Protection juridique des personnes vulnérables au Niger.par Abdou Taher Université d'Abomey-Calavi - Master 2 en droit et institutions judiciaires 2017 |
ParagrapheII :L'effritement delapréventionLes mesures préventives à l'endroit des personnes vulnérables les atteignent difficilement du fait des lacunes qu'elles comportent (A). Cela est d'autant plus aggravé quand on sait que le champ de ces lacunes est étendu (B). A-Leslacunesde la préventionLapréventionest « l'ensemble des mesures et institution destinés à empêcher ou moins à limiter, la réalisation d'un risque, la production d'un dommage, l'accomplissement d'actes nuisibles, etc.,ens'efforçantd'ensupprimerlescausesetlesmoyens.... »235(*). Il est à déplorer entre autre les obstacles, les conditionnalités trop complexes, l'absence d'appui institutionnelle aux organisations de la société civile, des méthodes en déphasage avec l'efficacité, la réactivité et la rapidité dans la prévention des atteintes des droits de l'Homme au Niger236(*). En plus de cela s'ajoute l'absence de stratégies dans la politique préventive, qui ne prennent pas en compte les mesures idoines pour pallier aux problèmes sérieux des personnes vulnérables. Ainsi les violences faites aux femmes et aux filles ne sont pas bien connues des populations. Il convient également de noter la faible capacité technique d'élaboration des requêtes de financement, le manque de professionnalisme de certains organes dans le domaine de la prévention qui doivent constituer une réponse aux besoins spécifiques des victimes de violence qu'est cette catégorie de personnes vulnérables237(*). En outre, au Niger, les actions de sensibilisation n'abordent pas en partie les manifestations mineures de l'exploitation sexuelle des enfants238(*). Prévenir les manifestations de l'exploitation sexuelle des enfants implique de connaitre chaque problématique et de les documenter239(*). En plus des lacunes perçues, d'autres se sont accrues. B - L'étenduedeslacunespréventivesL'étendue des lacunes du dispositif préventif se manifeste au Niger par uneprévention non abordée par la loi et certains organes voir même les autorités notamment à l'égard de certaines catégories de personnes vulnérables240(*). Les apatrides sont souvent considérés comme un « problème invisible », personnes que l'on ne voit ni entend le plus souvent. Il est par conséquent, encore plus difficile de mesurer l'apatridie ; les apatrides241(*), vivant en général dans des situations précaires, en marge de la société, non seulement les apatrides sont souvent sans papiers, mais ils sont aussi ignorés par les autorités et ne figurent ni dans les registres ni dans les bases de données administratives de l'État. Le plus souvent, les apatrides ne sont pas dénombrés lors des recensements puisque de nombreux États ne leur accordent pas beaucoup de priorité, ni d'attention et ignorent l'apatridie, ne disposant pas de bon système pour identifier véritablementles personnes concernées, en particulier parce que celles-ci ne mentionnent pas de volonté le fait qu'elles sont apatrides242(*). Dans le système de wahaya, une absence de précaution est observée, les femmes qui sont des « épousessupplémentaires » ne possèdent généralement aucun document, en traversant les frontières (lorsqu'elles le font) sans document d'identité, leurs enfants, qui, au Niger, ne sont pas considérés comme des enfants légitimes du « maitre » et qui restent des domestiques de familles (et les filles peuvent elles-mêmes être vendues comme Wahaya) risquent également de ne pas être enregistrés à la naissance et par la suite de devenir des sans-papiers243(*). Par ailleurs les personnes en situation de handicap font souvent l'objet de discrimination et/ou rejet de la part de l'environnement social ou familial et se trouvent privées d'opportunités économiques et sociales. 78% de cette catégorie de personnes vulnérables à l'âge de six ans ou plus n'ont aucune éducation, les quelques structures éducatives spécialisées ou intégratrices qui existent ne couvrent qu'une minorité en zone urbaine et sans plan de prévention crédible, moins de la moitié des personnes en situation de handicap (47,2%) des activités économiques etmalgré l'existence des règles minimales relatives à la protection sociale des personnes en situation de handicap, la plupart des établissements publics ne disposent pas d'aménagement appropriés pour leur permettre l'accès244(*). En dépit des défaillances précédentes, il existe des insuffisances liées à la mise oeuvre de la protection juridique. * 235GérardCORNU, op. cit., p. 800. * 236 Cf. OdileNdoumbéFAYE, op, cit., p. 64. * 237Idem. * 238 Voir rapport Globale de Suivi, op, cit., p. 29. * 239 Ces recherches permettent d'identifier les facteurs qui promeuvent et renforcent le respect des droits des enfants mais aussi les causes de vulnérabilités à l'exploitation sexuelle des enfants. * 240 Le Niger ne dispose d'un système d'identification des personnes apatrides ou à risque d'apatridie d'une manière générale qui permettra de faire cette identification sur tout le territoire national. Malgré les efforts fournis à travers l'adhésion aux différentes conventions relatives à l'apatridie, il n'y'a pas de statistique sur la présence des apatrides, car il n'y a eu aucune enquête officielle dans ce sens .Voir l'institut sur les apatridies et leur réinsertion, p. 61. * 241La convention de New York du 28 septembre 1954 s'applique à toute personne qu'aucun État ne considère comme son ressortissant par application de sa législation. Plus précisément, l'apatride désigne une personne dépourvue de patrie donc de nationalité. * 242 Sur toutes ces lacunes, Cf. HadizaYACOUBAHALIDOU, La prévention de l'apatridie en droit nigérien, Mémoire de Master II, Droit et institutions judiciaires, UAC, Bénin, 2019, p. 52. * 243Ibid., p. 45. * 244Voir Rapport initial sur la mise en oeuvre de la convention sur les droits des personnes handicapées, (MPPFPE septembre 2015). |
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