Année universitaire 2018-2019
Master Gestion des Territoires et Développement
Local
Parcours POLITER
Politiques territoriales de développement
durable
Mémoire de Master 2
La transition durable dans les petites villes :
Le cas de Barcelonnette
Charly MUZIOTTI
Sous la direction de Sandrine BACCONIER-BAYLET
REMERCIEMENTS
Ce mémoire a été l'occasion pour moi
d'apprendre à mieux connaître la ville dont je suis originaire.
Outre cela, il m'a aussi permis de mieux comprendre les tenants et les
aboutissants de la transition durable dans des villes qui n'ont que trop peu de
moyens et de compétences.
Ce que j'en ai retiré, je le dois à de
très nombreuses personnes qui ont su se montrer disponibles lorsque j'en
avais besoin, et qui ont pris le temps nécessaire pour développer
le sujet.
Je tiens à témoigner toute ma reconnaissance aux
personnes suivantes sans qui ce mémoire n'aurait pas eu de sens :
Claude GOURON, président d'Énergies Modernes
Ubaye pour m'avoir détaillé longuement l'histoire, le
présent et le futur de la SCIC, avec toutes les embûches sur son
parcours et leurs espoirs d'y arriver, malgré tout.
Coralie SEWERY et Jean Michel PAYOT, respectivement directrice
du Pays S.U.D. et élu à la communauté des communes
Vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon, qui m'ont accueillis dans leurs
locaux et m'ont donné de précieuses informations sur leurs
activités et leurs rôles dans ce projet ambitieux.
Sabine BLATTMANN, conseillère municipale à
Barcelonnette, pour avoir pris le temps de me donner son ressenti sur les
ambitions de la commune et sur les réalités du terrain.
J'adresse un grand remerciement au maire de Barcelonnette,
Pierre MARTIN CHARPENEL. D'une part pour avoir mis l'idée sur la table
d'une autonomie énergétique dans la commune et sa
sensibilité à l'égard de l'écologie. D'autre part,
pour m'avoir accordé une interview dans son emploi du temps
chargé.
Sandrine BACCONNIER-BAYLET qui m'a aiguillé,
corrigé, supporté à chaque ligne de ce mémoire et
qui m'a permis, grâce à ses connaissances et à sa patience,
de faire ce mémoire.
Enfin, merci à Lucie ENJOLVY, ma compagne et à
mes amis qui ont du, malgré eux, subir mes états d'âmes,
mes doutes et mes craintes tout au long de la rédaction.
SOMMAIRE
Introduction 1
I. Les petites villes, des entités
limitées en termes de compétences et de
moyens, qui doivent se réinventer pour perdurer
dans le temps 2
1. Les petites villes, entre influence limitée et pouvoir
structurant 2
A. La petite ville, une entité floue pouvant être
abordée de différentes
manières 2
B. Le développement des petites villes : de la
décentralisation des politiques
à la gouvernance locale 3
C. Un contexte fluctuant, entre exode rural et
externalité négatives : la petite
ville face à ses problématiques actuelles 4
2. La transition écologique, un concept jeune qui
oblige la ville à se
réorganiser 5
A. La ville, un modèle qui s'essouffle, en quête de
renouveau 5
B. La transition, un concept jeune, qui passe par l'implication
des citoyens
dans les processus de décision 7
3. Le développement territorial, un aspect majeur
dans la transition des
petites villes vers un mode de vie durable confronté
à des défis de taille 9
A. La ville durable, comment créer le concept dans
l'imaginaire et la manière
d'aborder la ville ? 9
B. Les documents d'urbanisme et les agendas 21, des outils
efficaces pour
amorcer la transition ? 10
C. La transition durable, une vision ambitieuse de l'avenir, qui
peine encore
à s'imposer comme la norme 11
II. Barcelonnette, ville enclavée au rôle
fédérateur sur son territoire
alentours, entre contraintes et potentialités
d'une petite ville structurante 16
1. Une méthodologie analytique et empirique pour
comprendre un sujet
majeur, transversal à tous les domaines politiques 16
A. Des données qualitatives et quantitatives pour
éclairer notre propos 16
B. Des entretiens semi-directifs pour comprendre les
problématiques en jeu 17
C. Des limites méthodologiques inhérentes à
la recherche dont il faut avoir
conscience 18
2. Un territoire organisé le long de l'Ubaye,
articulé entre une communauté
des communes et une association de territoires, qui joue un
rôle prépondérant
dans le développement local et les projets d'avenir 19
A. Un territoire centralisé autour de l'Ubaye, qui va de
sa source au lac de
Serre-Ponçon 19
B. Un environnement riche et fragile sur lequel repose une
économie locale
importante, qui doit être protégé pour
perdurer dans le temps 20
C. Une consommation énergétique majoritairement
saisonnière et largement
tournée vers le secteur résidentiel et les
transports routiers 24
3. Un territoire pertinent pour aborder la problématique
de la transition
durable dans les territoires ruraux isolés 25
A. Un secteur économique saisonnier
éloigné de l'influence d'une métropole 25
B. Le Pays S.U.D., entre développement rural et
volonté d'être précurseur
dans la résilience 27
C. Un TEPOS pertinent compte tenu des potentialités
énergétiques 28
III. Un territoire divisé en plusieurs
entités politiques qui peine à porter les
projets de transition durable 34
1. Des décideurs locaux pour aborder la
problématique à différentes échelles 34
2. Des projets pléthoriques, qui répondent
à des logiques de priorité et de
budget 35
3. Des freins liés à des problématiques
locales propres aux petites villes 42
4. Différents outils peuvent être mis en oeuvre
à l'échelle des petites villes
pour exploiter les potentialités locales 46
Conclusion 53
1
INTRODUCTION
Les considérations écologiques ne sont pas
nouvelles. Dès le début des années 1960, de nombreuses
voix s'élèvent pour alerter contre les dérives
liées à nos modes de vie. En 1962, Rachel Carson publie «
Silent Spring » et enclenche une vague de prise de conscience dans le
monde occidental. Cette vague écologiste, d'abord cantonnée aux
individus eux-mêmes, ne tarde pas à se répandre dans les
sphères politiques. Cela a eu pour conséquence de politiser le
développement durable comme un objectif transversal à toutes les
disciplines, un fil conducteur pour lequel chacun doit prendre ses
responsabilités. Les années 1970 marquent l'entrée dans
une nouvelle ère en termes d'écologisme. Les premières
considérations à propos de l'ozone en Antarctique ainsi que
divers effets néfastes entraînent l'émergence successive de
Greenpeace (1971), du premier sommet de la Terre (Stockholm, 1972), du Rapport
Meadows (1972) et du Mouvement Écologique en France (1974). La fin de la
décennie est marquée par les catastrophes de Seveso (Italie,
1976), de l'Amoco Cadiz (France, 1978) et de Three Mile Island
(États-Unis, 1979).
Il est vite mis en exergue que le développement durable
passera par une adaptation des comportements à toutes les
échelles et pas seulement à l'échelle des puissances
étatiques. Cela a mené à la création des
Conférences des Parties (COP), dont la première édition
à Berlin en 1995 a rassemblé des acteurs non gouvernementaux
divers et variés (ONG, associations, villes, entreprises et
citoyens).
Cette prise de conscience générale de toutes les
strates a développé la marge d'actions des villes pour en faire
des acteurs à part entière dans la lutte contre le changement
climatique. La décentralisation du pouvoir décisionnel leur a
permis d'envisager un développement à l'échelle
territorial, plus à même de répondre aux
spécificités locales. Depuis, les théories et projets se
multiplient dans le monde et de nombreuses villes s'inscrivent en
pionnières de nouvelles formes d'urbanisme et de développement.
Les villes font de cette « course à la durabilité » un
argument marketing, mais pas seulement. Elles aspirent à intégrer
leurs citoyens dans un processus général dans lequel tous les
aspects sont abordés sous l'angle du développement durable et de
ses trois piliers : l'environnement, l'économie et le social.
Cet élan renforce les villes et les rend plus
indépendantes. Cependant, ces actions nécessitent des ressources
humaines et financières importantes, d'autant plus que le recul sur le
développement durable étant encore faible, elles sont en phase
d'expérimentation de la ville durable. A ce titre, il convient de
dissocier les grandes villes et/ou métropoles, détentrices de
moyens conséquents, des petites villes isolées, dont la marge de
manoeuvre est, par définition, réduite.
Comment les petites villes participent-elles à la
transition écologique à leur échelle ? Peuvent-elles
être pionnières au même titre que les grandes villes ou
sont-elles condamnées à suivre voire se fondre dans ces
dernières ?
I. Les petites villes
,
2
des entités
limitées en termes de
compétences
et de moyens, qui doivent se
réinventer pour perdurer dans le
temps
1. Les petites villes, entre influence limitée et
pouvoir structurant
A. La petite ville, une entité floue pouvant être
abordée de différentes manières
Avant toute chose, il convient de définir ce qu'est une
petite ville. Le seuil statistique de l'urbain se situe aujourd'hui à 2
000 habitants, une petite ville ne peut donc en compter moins. Cependant, la
définition d'une petite ville varie fortement d'une étude
à l'autre et selon qui l'étudie. Par exemple, l'INSEE retient
régulièrement le seuil de 3 000 habitants pour comptabiliser les
petites villes, laissant ainsi un vide sémantique pour les villes entre
2000 et 3000 habitants. Les géographes, eux, adoptent
généralement un seuil de 5 000 habitants (MAINET, 2008).
Concernant la limite supérieure, il y a là aussi des fluctuations
avec une limite hausse généralement admise à 20 000/25 000
habitants (LABORIE 1997) (EDOUARD 2007).
Cependant, il est aujourd'hui difficile de définir une
petite ville en termes de seuil François TAULELLE souligne qu'»il y
a presque autant de seuils que de chercheurs» (2010). Ces seuils sont
amenés à varier selon les spécificités
géographiques mais aussi d'un pays à l'autre. Afin de
définir si une ville est petite ou moyenne, il ne faut pas seulement
prendre en compte le seuil de population. Il est nécessaire aussi de
mesurer sa taille de manière proportionnelle avec les villes alentours
(DEMAZIERE, 2017). Il est possible de considérer les petites villes et
les villes moyennes comme des entités plus ou moins similaires en ce
sens qu'elles constituent des pôles urbains de l'espace non
métropolisé (KAYSER, 1969).
Selon J-P Frey, «si l'on peut toujours donner un chiffre
approximatif au titre d'ordre de grandeur pour qualifier de petite ville une
agglomération par rapport à d'autres, seules ses
caractéristiques intrinsèques permettent de sortir le chercheur
de l'embarras » (FREY, 2002). De fait, il est réducteur de
n'utiliser que les seuils pour définir la taille d'une ville même
si cela apporte une première indication sur la forme urbaine. Il faut
donc ajouter une nouvelle variable pour rendre la définition plus
précise. Cette couche supplémentaire, c'est la fonction urbaine.
Cette variable est liée à la taille et plus une ville est grande,
plus elle accumulera de fonctions. La fonction urbaine permet de
pondérer le poids des villes dans leur environnement proche. Ainsi, une
petite ville pourra bénéficier d'une zone d'influence
étendue, tandis qu'une ville moyenne pourra être phagocytée
par la proximité d'une métropole ou d'une autre ville avec
laquelle elle partagera les fonctions (TAULELLE, 2010).
3
Les études sur les petites villes se sont longtemps
cantonnées aux monographies, les chercheurs ayant porté leurs
efforts sur les «monstres» (GEORGES, 1968). Cependant, elles sont
aujourd'hui considérées par certains auteurs comme «un outil
de connaissance des changements qui affectent tout le pays» (Laborie,
1997). A partir des années 1990/2000, les problématiques
liées aux petites villes se multiplient et elles apparaissent comme des
territoires riches d'enseignements. Les résultats obtenus peuvent ainsi
être transposés à un niveau plus global (EDOUARD, 2012).
Cependant, les études récentes sur les territoires ruraux
montrent que les «second towns» sont impliquées dans
des changements sociaux et économiques plus larges que leur territoire
(DEMAZIERE, 2015).
B. Le développement des petites villes : de la
décentralisation des politiques à la gouvernance locale
Le contexte du développement a progressivement
changé et ce pour trois raisons. Dans un premier temps, la hausse des
mobilités a transformé les espaces ruraux en espaces de flux
entre les villes et les campagnes. De fait, il n'est plus possible aujourd'hui
de faire l'impasse sur les territoires ruraux lorsqu'on raisonne en termes de
structuration spatiale (HERVIEU, VIARD 2001) (LACOUR, 2005).
Deuxièmement, l'échelle de mise en place des politiques -
progressivement réduite - a poussé à la mise en place de
systèmes de gouvernance territoriale. Enfin, l'augmentation de la
contractualisation et des documents régissant les orientations à
venir (SRU, Loi Urbanisme et Habitat) modifie la nature des décisions
prises pour l'avenir du territoire.
A partir des années 1970, des politiques
spécifiques succèdent aux politiques des métropoles
d'équilibre de la décennie précédente. Ces
politiques visent à accompagner la croissance démographique des
petites et moyennes villes en réhabilitant les centres-villes pour
améliorer leur rayonnement (TAULELLE, 2010). Ces politiques s'amplifient
à partir des années 1990 pour harmoniser la répartition
des hommes et des activités sur le territoire français.
D'un point de vue de la gouvernance des territoires ruraux,
sont associés d'une part la proximité géographique des
acteurs et d'autre part la proximité organisée. Il y a donc une
logique de voisinage entre les acteurs mais aussi une logique de similitude qui
les lie. De plus, la gouvernance régit et organise les rapports locaux
mais aussi les rapports avec les acteurs extérieurs au territoire mais
qui peuvent potentiellement y jouer un rôle (ANGEON, BERTRAND, 2009).
Comme le précise B. Pecqueur et J-B. Zimmermann (2004) : « la
proximité géographique est subordonnée à la
proximité organisée », la proximité
géographique jouant davantage un rôle de mise en contexte de la
problématique (BERTRAND, MOQUAY, 2004). Plus le territoire est petit,
plus la cohérence entre les projets est amplifiée. Cela est
dû au fait que la proximité organisée est plus facile
à mettre en oeuvre sur des territoires limités (ANGEON, BERTRAND,
2009).
4
C. Un contexte fluctuant, entre exode rural et
externalité négatives : la petite ville face à ses
problématiques actuelles
Les territoires ruraux ont longtemps fait office d'espaces de
production agricole et la politique agricole de la France a entretenu cette
représentation. Cependant, nous observons aujourd'hui une baisse de la
production et donc des revenus qui oblige à envisager une reconversion
de ces territoires afin d'en assurer la pérennité future (CORNET,
AZNAR, JANNEAUX, 2010).
C'est un fait, les métropoles prennent une place de
plus en plus importante dans leur territoire et, de ce fait ont une influence
sur les petites villes environnantes. Pour François GRETHER, «
L'attraction des grandes villes se fait au détriment des petites
» (site Batiactu, 2013). En observant les effets de la
métropolisation, il est possible de souligner que les villes se
spécialisent. Ainsi, les villes petites et moyennes qui intègrent
ces super agglomérations peuvent se voir cantonnées à des
fonctions de villes dortoirs ou d'autres fonctions telles que la ville
commerce, la ville travail ou la ville administrative (LEGUE, 2006). L'effet de
polarisation des richesses et des hommes est un autre effet de la
métropolisation qui peut toucher les villes se situant même en
dehors de l'aire d'influence directe (TAULELLE, 2010). Cependant, les petites
villes conservent un pouvoir structurant de leur territoire alentour, c'est
pourquoi il semble judicieux de ne pas trop concentrer les services et la
population dans les métropoles mais plutôt tendre vers un
équilibre ville/campagne qui saurait permettre aux deux configurations
de perdurer de manière complémentaire (FEREROL, 2016).
Les territoires ruraux peuvent aujourd'hui être
envisagés selon la typologie proposée par la DATAR en 2011
(PISTRE, 2015) :
? Les campagnes des villes, du littoral et des vallées
organisées ; ? Les campagnes agricoles et industrielles ;
? Les campagnes vieillies à très faible
densité.
L'espace rural se caractériserait par un vieillissement
de la population ainsi qu'une pauvreté croissante (LE RAMEAU, 2016).
Cependant, nous observons une inversion de la tendance à l'exode rural.
En effet, depuis 2012, 1,5 millions de personnes ont déserté les
villes pour s'installer dans les espaces ruraux (RIVAT, 2017). Ces personnes
sont à la recherche d'un mode de vie plus sain et un retour à une
consommation locale plus écologique et économique (PISTRE, 2015).
On observe dans l'espace rural une plus grande résistance au
chômage et il bénéficie d'un attrait marqué de la
part de la classe moyenne qui recherche sa qualité de vie et un
accès à la propriété simplifié. Pour autant,
force est de constater que les espaces ruraux sont très
dépendants de l'économie des pôles urbains environnants, ce
qui les rend statistiquement plus précaires que les espaces urbains
(CORNET, AZNAR, JANNEAUX, 2010).
5
2. La transition écologique, un concept jeune qui
oblige la ville à se réorganiser
A. La ville, un modèle qui s'essouffle, en quête de
renouveau
Le modèle des villes tel que nous le connaissons est en
train de s'épuiser. En témoignent les dysfonctionnements qui
commencent à apparaître tels que la hausse du chômage, la
précarité énergétique ou encore la hausse des
inégalités économiques. Afin d'améliorer l'impact
que l'écologie a sur les actions concrètes, il faut la sortir de
son discours alarmiste et aller vers un raisonnement pragmatique. Si cela a
été utile pour alerter les populations des dangers liés
à notre mode de vie, il faut aujourd'hui en sortir pour mener des
politiques cohérentes et réalistes. Jusqu'à
présent, la volonté d'aller vers une société
efficace et efficiente a fait que la science et la technique ont
privilégié les processus économiques (STATIUS, 2017). La
faible prise en compte des voix citoyennes ne fait que renforcer le clivage
Nature/Société. Cela a pour effet de considérer
l'environnement comme une variable technique et pas comme un objet transversal
à toutes les politiques. Le sentiment d'impuissance s'en trouve ainsi
renforcé (LAIGLE, 2013).
Or la transition écologique peut se définir,
selon Lydie LAIGLE (2013), d'une part par les associations et citoyens qui
désirent agir sur leur territoire et se réapproprient leur
environnement ; d'autre part par l'action publique dont le rôle est
basé sur la justice environnementale et de redistribution pour limiter
les inégalités des territoires.
Pour aller vers un processus de transition, il est
nécessaire que les pouvoirs publics portent ces projets. Les objectifs
et principes directeurs sont ainsi édictés à
l'échelle nationale mais les modalités d'actions peuvent
être adaptées en fonction de la spécificité de
chaque territoire, tant que cela va dans le sens des objectifs (RIVAT, 2017).
Cela est notamment important car le retour sur investissement de ces projets
écologiques est trop lointain pour attirer des investisseurs
privés. De plus, il est important, en parallèle de ces
transitions, de former la population à l'écologie afin de fournir
la filière en travailleurs qualifiés. Enfin et pour pallier
à l'urgence, les pouvoirs publics peuvent encourager la réduction
de la dépendance des habitants aux énergies non renouvelables.
Une des solutions possibles en termes financiers se situe du côté
de la Banque Centrale. Cette dernière pourrait accorder des prêts
avantageux aux projets écologiques afin de lever le verrou financier qui
bloque parfois ces initiatives (GRANDJEAN, 2012).
Les petites villes ont vu leur statut changer avec le retrait
progressif des services publics. La tendance à la métropolisation
a, en effet, eu un effet polarisant sur les services publics qui ont
progressivement déserté les territoires ruraux (TAULELLE, 2010).
Suite au retrait progressif de l'État des territoires ruraux, les villes
ont du effectuer un travail de diagnostic afin d'identifier les forces et les
faiblesses de leur territoire afin de les exploiter au mieux (DEMAZIERE, 2007).
Ce diagnostic a permis d'intégrer la transition durable dans les visions
d'avenir des petites villes qui peuvent ainsi prendre un nouveau départ
et se libérer des modes de pensées nationaux.
6
Différents auteurs se sont penchés sur la
question pour essayer d'extraire les grands axes d'une transition. Compte tenu
que la transition est un phénomène récent, il est
aujourd'hui difficile d'avoir suffisamment de recul pour juger du
bien-fondé de ces axes. Alain GRANDJEAN dénombre 3 axes pouvant
être développés pour organiser la transition
énergétique :
· Réduire la consommation des ressources en
augmentant l'efficacité énergétique, en réduisant
les déchets à la source ou en pensant le bâti dans un
diptyque incluant le transport ;
· Substituer progressivement les technologies propres
aux technologies existantes pour un passage en douceur vers un mode de
fonctionnement plus durable ;
· Prendre en compte la valeur intrinsèque des
écosystèmes et investir dans leur restauration et/ou
préservation.
Selon Rob Hopkins, il y a 3 composantes essentielles pour
amorcer une transition durable :
· Relocaliser les activités sur le territoire en
question ;
· Encourager les actions locales pour redonner vie au
territoire ;
· Resserrer les liens de proximité afin de
créer une réelle autonomie du territoire.
Quelles sont les capacités des municipalités
pour influer sur la transition écologique ? Cette question mérite
d'être posée. Car si la transition écologique est l'affaire
de tous pour aller vers des modes de fonctionnements plus résilients, il
n'en demeure pas moins que les spécificités locales obligent
à ajuster les variables en fonction du territoire. A ce titre, les
métropoles en font un argument de marketing territorial qui peut
être déconnecté des véritables actions
(HOULLIER-GUIBERT, 2009). Les villes petites et moyennes ne peuvent pas
être comparées à des métropoles. Elles se situent
dans un vaste entre-deux entre le bourg et la métropole (TAULELLE,
2010). A ce titre, les moyens mobilisés et les freins à la
transition ne sont pas les mêmes. La proximité de l'échelon
municipal avec les habitants renforce l'accessibilité et la
possibilité d'influer sur les politiques, comme le dit Mathieu RIVAT
(2017) : « La mairie devient un espace d'où peut se penser et se
construire une autre manière d'habiter un territoire ». Il est
possible de voir la petite ville comme un lieu de construction des pouvoirs,
avec des relations très marquées entre l'administration et les
élus et des relations sociales très fortes. Les élus ont
des potentialités importantes en matière de négociations
de politiques d'aménagement du territoire (TAULELLE, 2010). Mathieu
RIVAT va plus loin en affirmant que la taille d'une ville est importante dans
le processus de prise de décision. En effet, une petite ville n'a pas de
structures lourdes, divisées en d'innombrables services et permet donc
de faire bouger les choses plus rapidement et de conclure : « En
matière de démocratie, la question de l'échelle est
essentielle ». De fait, il importe aujourd'hui de reléguer les
politiques du type « top-down » pour passer à des politiques
dites « bottom-up » dans lesquelles les décisions sont prises
du bas vers le haut. Ainsi, les habitants ne se font plus imposer la ville mais
peuvent agir sur cette dernière (LEVY, 2009). Les
réintégrer dans le processus décisionnel, c'est leur
donner la possibilité de mesurer pleinement la force des enjeux qui
façonnent cet organisme vivant qu'est la ville (JOUVE, 2007). Cela
constitue une expérience à l'échelle locale qui ne peut
être que
7
bénéfique et entraîner des réponses
plus adaptées, il est souvent reproché à la ville
d'engager des experts qui apportent des réponses
stéréotypées, venues d'ailleurs (CHEMETOV, 1994).
B. La transition, un concept jeune, qui passe par
l'implication des citoyens dans les processus de décision
Les petites villes ont ceci de particulier qu'elles peuvent
mobiliser plus facilement les citoyens. Comme nous l'avons vu
précédemment, l'absence de structures lourdes et la
proximité avec les élus permettent d'envisager la consultation
des habitants comme une procédure efficace et relativement simple
à mettre en place. Afin de permettre la transition, il faut permettre
aux citoyens de se saisir des questions et problématiques liées
à la transition écologique. Ainsi, il est primordial de les
consulter et d'être attentif à ce qu'il se passe au niveau
associatif. C'est par ces relais que les habitants se sentiront
impliqués et en mesure d'apporter leur pierre à l'édifice
(LAIGLE, 2013). Il y a des sujets qui requièrent une technicité
importante évinçant de fait les habitants de la participation et
de la co-construction. Cependant, les habitants peuvent être
impliqués à leur échelle et en fonction de leurs
compétences, en collaboration avec les experts des cabinets d'urbanisme
(RIVAT, 2017). Impliquer les citoyens dans les décisions en
matière de transition écologique permet de les rendre plus
responsables et plus critiques. Leur implication est donc aussi une
manière d'influer sur leurs comportements. Cela peut être
amplifié par des initiatives telles que la mise en place d'un
système d'actions qui permet aux citoyens d'investir et donc de rentrer
au capital d'un projet écologique pour être encore plus
impliqués dans le développement des alternatives durables (RIVAT,
2017). Bien que la gouvernance nécessite de revoir l'organisation des
acteurs sur le territoire, il est possible d'observer que les acteurs locaux
ayant comme objectif la transition durable se sont déjà
organisés à leur échelle. Par exemple, les producteurs
désireux de valoriser les circuits-courts ont mis en place des
systèmes tels que les AMAP ou la vente directe afin de prendre les
devants sur l'organisation générale du territoire (EYCHENNE,
2014). Ce sont des expériences que les élus locaux doivent
prendre en compte afin d'intégrer ces actions à un niveau
municipal. Il est, aujourd'hui, difficile d'interpréter la
démarche en faisant un retour d'expériences. En effet, la
démarche étant encore jeune, les données
récoltées ne permettent pas de faire un retour probant sur ces
initiatives. C'est pourquoi il peut être intéressant de se tourner
vers les acteurs qui se sont déjà organisés en ce sens.
Bien qu'ayant un recul encore limité, ils ont parfois des années
d'avance et des premiers feedbacks qui encouragent les démarches
à perdurer (EYCHENNE, 2014).
Pour permettre la participation des citoyens, il faut
organiser des débats dans lesquels tous les échelons se
confrontent afin d'aboutir à des pistes et des solutions pour amorcer la
transition écologique. Les initiatives citoyennes apportent un regard
citoyen qui permet de compléter la vision d'ensemble des initiatives
publiques. Cela permet aussi de savoir quels sont les secteurs pour lesquels
les habitants sont prêts à consacrer du temps et de
l'énergie (LAIGLE, 2013). Afin de produire un débat de
qualité dans lequel toutes les parties sont impliquées, Philippe
BARRET dénote 3 conditions essentielles (2014) :
8
? Toutes les parties doivent être impliquées et,
surtout, chacune doit connaître à l'avance son niveau
d'implication ;
? Définir dès le départ le preneur de
décision ;
? Organiser un suivi et une continuité du débat
car tout ne peut être résolu en une seule réunion.
Malgré ces conditions, le débat peut être
freiné pour diverses raisons. Premièrement, le cadre du
débat. En effet, si les enjeux sont flous, les solutions trouvées
le seront tout autant et peuvent finalement s'éloigner du
problème concret. Deuxièmement, il convient de savoir qui finance
le dialogue ? Ce dernier a un coût qui est souvent supporté par
les décideurs qui doivent ainsi optimiser le débat. L'erreur
à ne pas faire serait de comparer le coût du débat avec le
coût du «non-débat». Enfin, et cela est un
problème qui se posera de plus en plus à l'avenir, le
débat avec toutes les parties oblige à revoir le rôle de
l'élu. Son pouvoir se trouvera diminué par la concertation,
cependant, le rôle de l'élu est peut-être amené
à passer de décisionnaire à organisateur du débat
(BARRET, 2014).
Pour aller vers la transition durable, les petites villes
possèdent un autre levier que beaucoup d'auteurs admettent comme
primordial. Il s'agit de la relocalisation des activités au sein du
territoire rural. La relocalisation des activités permet d'être
moins dépendant des énergies fossiles et plus résilient
face aux changements climatiques. Cela favorise de plus l'engagement citoyen et
la prise d'initiative par les habitants du territoire, pour le territoire.
Renforcer l'action locale permet d'envisager un développement durable
plus ancré avec son territoire. Les actions écologiques
trouveraient donc une utilité sociale en rapprochant consommateurs et
producteurs locaux, tout en valorisant les initiatives prises à
l'échelle du territoire (LAIGLE, 2013). Cependant, se concentrer sur
l'activité locale en favorisant les circuits courts ne veut pas dire
qu'il faille se couper de l'extérieur. Rester ouvert sur le territoire
environnant est primordial, ne serait-ce que pour ne pas fonctionner en circuit
clos et prendre le risque que les décisions soient
déconnectées des problématiques réelles (RIVAT,
2017).
Les territoires ruraux peuvent se retrouver dépendants
d'un employeur local ou d'un secteur d'activité. Un des principes de la
durabilité serait alors de tendre vers la diversification des
activités (RIVAT, 2017). Pour cela, les petites villes peuvent se
regrouper sous forme de «Pays» afin d'avoir un poids politique plus
important et une diversité accrue. Les lois sur
l'intercommunalité et sur l'aménagement (loi sur les pays de 1995
et loi Voynet puis Chevènement de1999) témoignent de ces (en)jeux
de pouvoirs avec les élus des villes petites et moyennes. Selon
François TAULELLE (2010), elles ont permis :
? De conforter les communes dans leur rôle de
centralité des intercommunalités ;
? A ces regroupements d'être porteurs de projets de
développement, notamment en raisonnant en termes de «Pays».
Les intercommunalités ont donné un rôle
de coordination des politiques locales aux villes petites et moyennes,
renforçant ainsi leur centralité au sein des Pays (LABORIE,
DELPEYROU, 2004).
9
3. Le développement territorial, un aspect
majeur dans la transition des petites villes vers un mode de vie durable
confronté à des défis de taille
Afin d'organiser la transition vers une société
plus résiliente, la petite ville doit adapter son développement
territorial en intégrant des notions de développement durable en
filigrane de toutes ses politiques. L'enjeu est plus compliqué qu'il n'y
paraît et même si les connaissances sur le sujet sont chaque jour
un peu plus poussées, il reste un long chemin à parcourir pour
tendre vers la durabilité.
A. La ville durable, comment créer le concept dans
l'imaginaire et la manière d'aborder la ville ?
Élaborer une ville durable, c'est avant tout impliquer
ses habitants dans les processus. Et pour cela, il faut que ceux-ci se sentent
appartenir à un tout qu'ils maîtrisent, façonnent et font
évoluer en fonction des principes du développement durable, mais
aussi de leurs besoins. La communication et l'information jouent des
rôles essentiels dans la prise de conscience des enjeux et une
communication ciblée sur la ville est de nature à créer et
renforcer l'attachement des habitants à leur lieu de vie (SAUVAGEOT,
1997). De nombreux auteurs se sont penchés sur cet aspect de la ville
durable et sur la communication à adopter pour aller dans ce sens. Cela
a conduit deux auteurs à qualifier la ville durable de « mythe
de la qualité totale » (THEYS, EMELIANOFF, 2001).
La communication de la ville répond à 3
objectifs qui agissent comme des lignes directrices (GAGNEBIEN, BAILLEUL, 2011)
:
? Connaître les comportements des habitants pour
éventuellement les pallier ou les encourager ;
? Mettre en avant le modèle prôné de la
ville ;
? Informer et éduquer les citoyens à d'autres
habitudes afin de tendre vers la durabilité.
Une fois ces principes mis en place, les débats
peuvent être plus constructifs et ont de nature à imposer le
développement durable de manière douce et transversale dans les
considérations d'avenir et cela grâce à de nouvelles normes
communicationnelles (GAGNEBIEN, BAILLEUL, 2011).
Créer un imaginaire autour de la ville durable, c'est
aussi envisager des formes de travail peu ou pas utilisées pour le
moment. Par exemple, de nombreux métiers peuvent aujourd'hui
bénéficier d'un aménagement en télétravail
afin de limiter les déplacements. Cela est d'autant plus vrai dans les
territoires ruraux où les habitants sont amenés à
parcourir des distances plus grandes qu'en milieu urbain et ce avec moins de
possibilités de se reporter sur les transports en commun ou les
mobilités douces (GANCE, 2013).
10
L'homogénéisation des modes de vie
entraîne une tendance à la métropolisation et à une
augmentation de l'influence urbaine. Le territoire rural a cette
particularité de présenter des avantages en matière de
flexibilité et de lutte contre l'inertie, et en ce sens il est
nécessaire de lutter contre cette uniformisation au profit d'une culture
du rural plus marquée et plus à même d'aller dans le sens
de la transition écologique (RHONALPENERGIE, 2012).
Nous observons ainsi des notions nouvelles telles que le
« city branding » qui peut permettre aux territoires ruraux
de tirer leur épingle du jeu. Cela consiste à mettre en avant les
atouts de la ville dans une stratégie de marketing territorial afin de
la rendre attractive auprès des populations et des entreprises (INSTITUT
JULES DESTRÉE, 2012). Pour renforcer ce poids, les villes peuvent se
rassembler en communauté des communes afin de mutualiser les forces et
les coûts et améliorer la qualité de leurs services.
Cependant, ce n'est pas la seule forme de rassemblement puisqu'au rassemblement
par proximité géographique s'oppose celui par thématique.
En effet, des regroupements tels que Cittaslow ou Réseau
international des villes du bien vivre ou le réseau SEKOM
(éco-municipalités) crée en Suède. Ce dernier a
été fondé à Övertorneå en Suède
en 1983 avant de s'étendre à 107 communes et consiste surtout en
un échange d'expériences entre les communes participantes afin de
mutualiser les connaissances et permettre un développement rapide de la
ville durable.
B. Les documents d'urbanisme et les agendas 21
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des outils efficaces pour amorcer la transition ?
Pour parvenir à leurs fins, les territoires
bénéficient de plusieurs outils leur permettant d'aller vers le
développement durable et la transition écologique.
En premier lieu, il y a tous les documents d'urbanisme qui
permettent de tracer les lignes directrices des projets urbains, avec en
tête de ceux-ci le Plan Local d'Urbanisme. Le PLU venu remplacer via
la loi SRU (2000) le Plan d'Occupation des Sols, permet essentiellement
d'effectuer un zonage dans les zones constructibles et non constructibles dans
les années à venir. Cependant, le PLU va plus loin que le POS en
intégrant un nouveau document, le Plan d'Aménagement et de
Développement Durable (PADD). Le PADD peut et doit refléter une
vision globale et politique de l'avenir de la commune, sous l'égide du
développement durable, en intégrant l'urbanisme, mais aussi le
logement, l'emploi, les déplacements (SCHMIT, 2006). Certains
critères sont imposés au niveau national par la loi Grenelle II,
à savoir un « urbanisme économe en ressources
foncières et énergétiques », cela présuppose
une lutte contre l'étalement urbain couplée à des actions
de densification des centres (GRENELLE II, 2010).
Afin de permettre la transition écologique, les
communes doivent agir sur plusieurs axes. Premièrement, le
développement durable doit être une notion transversale à
toutes les politiques locales qui doivent ainsi intégrer cette variable
dans toutes les planifications. Cela étant, il est nécessaire de
faire monter en compétences le personnel de la commune qui aura ainsi
des notions plus poussées en matière de développement
durable. Enfin, il ne faut pas hésiter à intégrer des
propositions du milieu associatif qui a souvent une expérience plus
poussée en matière d'initiatives
11
durables (TORREALBA, 2014). Pour cela, la mise en place d'un
Agenda 21 est une manière d'intégrer les considérations
écologiques aux politiques de développement territorial. Comme
l'analyse Cyria EMELIANOFF (2005) : « Les agendas 21 locaux constituent la
traduction la plus immédiate ou la plus visible, puisqu'elle est
labellisée, de la problématique du développement urbain
durable ». Selon la définition de l'ICLEI (Conseil
international pour les initiatives écologiques locales) : «
l'agenda 21 local est un processus multisectoriel et participatif
destiné à atteindre les buts de l'agenda 21 au niveau local et au
moyen de la préparation et de la mise en oeuvre d'un plan
stratégique d'action sur le long terme, plan qui traite des enjeux
locaux et prioritaires du développement durable. » (1997).
Cependant, on déplore que cet outil fasse souvent la promotion de
politiques sectorielles, ne prenant pas en compte l'interrelation des
différents secteurs (ICLEI/DIFU, 1999). Comme le dit Christian GARNIER :
« Le contexte français reste fortement marqué par des
politiques initiées à l'échelon central, qui
découragent les initiatives décentralisées et
l'expérimentation locale » (1994). Cela étant, nous
observons que la France accuse un retard comparé à ses voisins
européens en matière d'agendas 21, les agendas 21 locaux n'ayant
pas réussi à s'imposer comme un outil efficace en matière
de transition durable (EMELIANOFF, 2005).
C. La transition durable, une vision ambitieuse de l'avenir,
qui peine encore à s'imposer comme la norme
Dans un premier temps, nous observons que de nombreuses
villes érigent des éco-quartiers comme autant de vitrines de
leurs actions écologiques, mais aussi comme des laboratoires de
solutions potentiellement transposables à la ville dans son
intégralité. Cependant, leur caractère exceptionnel leur
confère un surinvestissement financier et une marge de manoeuvre
déconnectée des véritables enjeux. De fait, les solutions
mises en place dans ces quartiers ne sauraient constituer des outils
transposables à toute une ville (SOUAMI, 2007). De plus, nous observons
un isolement marqué de ces quartiers par rapport au reste de la ville
qui les place comme des îlots déconnectés de la
réalité (TARDIEU, 2015).
D'un point de vue politique, nous pouvons constater que la
mise en place d'un agenda 21 local encourage la mise en place de politiques
sectorielles alors que le développement durable est censé
être transversal tant il concerne tous les secteurs de l'action publique
(MAINET, 2016). En théorie, le développement durable conserve sa
notion de transversalité mais les faits témoignent d'une gestion
sectorielle. De plus, et cela est primordial pour les territoires, il est
intéressant de se demander si l'échelle communale est aujourd'hui
la bonne échelle pour répondre aux enjeux à venir.
L'imbrication des communes sur de nombreux secteurs (transports,
assainissement, développement économique) nécessite
d'envisager la mise en place de politiques durables en collaboration avec les
communes voisines exerçant une influence sur la commune en question.
Dans une aire urbaine dense, la métropolisation est de mise pour
répondre à ces enjeux au sein d'un territoire élargi,
cependant, les territoires ruraux n'ont pas toujours la possibilité de
se regrouper en pôles pour mutualiser les forces et les risques (MAINET,
2016). L'incompatibilité des échelles globales et locales freine
le développement des collaborations et la mise en place des innovations
car les solutions ne sont pas transposables en l'état sur
12
d'autres territoires. Les spécificités de chacun
les encouragent ainsi à entreprendre des actions chacun de leur
côté (GUYONNET, 2007).
D'autres problèmes d'un point de vue politique sont
les échelles de temps des actions liées à la transition
écologique. En effet, les délais pour entrevoir le début
de résultats positifs dépassent largement ceux d'un mandat
politique. Ainsi, les élus ne sont pas enclins à prendre des
mesures qui pourraient leur porter préjudice pour ne donner des
résultats que bien après son mandat (GUYONNET, 2007). Cela
fragilise démocratiquement l'élu qui doit faire face à un
dilemme, à savoir prendre les risques de ne pas être
réélu mais d'entreprendre des actions durables, ou adopter une
stratégie managériale et raisonner à l'échelle de
son mandat (ADEME, 2013).
Enfin, nous observons que, bien que les connaissances
puissent être disponibles sur le territoire, leur fragmentation sur le
territoire et la sectorisation des compétences sont de nature à
favoriser l'inertie. D'où l'importance de d'intégrer en premier
lieu le développement durable dans tous les secteurs afin que l'objectif
soit commun et les actions concertées et combinées. Dans les
territoires ruraux, cela passe par les initiatives et les convictions d'un ou
d'une poignée d'élus. En effet, un élu réfractaire
au développement durable peut, dans les petites communes, freiner le
développement de ces projets (ADEME, 2013).
Nous observons qu'en matière de ville durable, le
volet environnemental est largement mis en avant, ce qui impacte les deux
autres volets du développement durable, à savoir l'aspect
économique et social (LEVY, 2009). De plus, la conception de la ville du
futur telle qu'elle est mise en avant pourrait, à termes,
générer de nouveaux problèmes et questionnement, notamment
au niveau de l'égalité hommes/femmes. En effet, la participation
citoyenne est avant tout une affaire d'hommes, tandis qu'en supprimant des
moyens de transport comme la voiture, nous supprimons un moyen de protection
aux femmes qui encourent statistiquement plus de risques en milieu urbain que
les hommes (RAIBAUD, 2015). Ainsi, tendre vers la ville durable n'est pas
tendre vers une ville sans défaut mais plus vers une perfection de
façade, il ne faut pas forcément verser dans l'utopie qui
voudrait que « changer la ville, c'est changer la vie », et
opposer trop fermement une ville telle que nous la connaissons aujourd'hui avec
son pendant utopiste, durable et libérée de toutes contraintes
(LEVY, 2009).
Enfin, pour illustrer les dilemmes auxquels la ville durable
est confrontée, nous pouvons prendre le tristement célèbre
exemple de Dongtan en Chine. Afin de contrebalancer les images négatives
renvoyées par les villes chinoises, de congestion et de pollution, la
Chine a annoncé le projet d'une ville durable à la pointe de la
technologie et bénéficiant des dernières innovations en
matière d'écologie. Ville autonome en énergie, transports
en communs réguliers et sans émissions de gaz à effet de
serre, recyclage des eaux usées, des déchets, etc. Tels ont
été les maîtres mots de la construction de ce projet
faramineux qui n'a finalement pas vu le jour. Pour expliquer l'échec, il
est possible d'invoquer de nombreuses raisons, parmi lesquelles la
création ex-nihilo. En effet, le territoire sur lequel s'est construite
la ville était une réserve ornithologique, ce qui a
contribué à ternir l'image du projet. De plus, sans réelle
culture de la ville de la part des potentiels habitants, du fait de sa
nouveauté, aucun investisseur ni employeur n'a eu la capacité de
contenir une population qui devait s'élever à 500 000 habitants.
De fait, un pont à 8 voies a été
13
construit spécialement pour mener les habitants
à Shanghai afin de travailler, contribuant ainsi à un
excès de pollution liée aux véhicules. Enfin, et ce sont
des critères que nous avons pu retrouver tout au long de cet
énoncé, le coût de ces constructions était tel que
l'accès à la propriété devenait prohibitif pour une
majorité de chinois, excluant de facto le volet social du
développement durable en empêchant toute mixité sociale
(MEQUIGNON, MIGNOT, 2015).
L'erreur que peuvent commettre les villes, dans leur
désir de durabilité, est de composer sans les habitants qui se
retrouvent ainsi laissés de côté. Or ce sont eux qui font
et façonnent la ville, comme l'écrivent MEQUIGNON et MIGNOT dans
un article paru en 2005 [s1] : « Elle est le lieu de l'habitat, ce qui
pose alors [...] les questions de l'habiter ». Se pose alors la
question de l'accès à la propriété. C'est un
phénomène qui a déjà été
observé : une politique trop ambitieuse, voire hors sol (îlots ou
éco-quartiers) en matière de développement durable, a de
fortes chances de conduire à une gentrification des centres urbains et
à une baisse de la mixité. Or une ville ne peut pas être
durable si elle est élitiste, cela va à l'encontre des principes
directeurs. Le problème peut d'autant plus être important qu'une
réhabilitation des centres couplée à des restrictions sur
l'utilisation de la voiture personnelle va, d'une part, éloigner les
classes les plus pauvres du centre-ville, mais aussi les marginaliser par
rapport à leur utilisation de la voiture pour revenir vers ces centres.
Cela peut générer des « captifs du périurbain »
(ROUGE, 2005) voire conduire à la création de ghettos (GUYONNET,
2007). C'est tous ces paradoxes que la ville durable doit intégrer dans
son désir d'aller vers l'harmonie environnementale, économique et
sociale, et cela nécessite d'être en mesure de pondérer les
décisions prises et d'identifier leurs éventuels effets
néfastes.
La participation citoyenne, nous l'avons
évoquée plus haut, est un critère primordial dans
l'élaboration de la ville durable. Cependant, tous les quartiers ne
participent pas avec la même intensité aux processus
décisionnels. Les quartiers où la mixité sociale est la
plus forte enregistrent aussi le plus fort taux de participation. Des habitants
aux profils pléthoriques, allant du jeune adulte peu
diplômé au cadre exerçant une profession intellectuelle en
passant par la personne retraitée, favorisent le débat et la
confrontation. A l'opposé, les quartiers plus homogènes,
composés soit de personnes aisées soit d'une population aux
revenus faibles ne sont pas aussi dynamiques (LES GRANDS DOSSIERS DES SCIENCES
HUMAINES, 2015). Il faut aussi envisager les quartiers comme des vases
communicants. Par exemple, un quartier qui va limiter la circulation de
véhicules motorisés entrainera deux conséquences.
Premièrement, une gentrification du quartier par le gain en
tranquillité lié à la mesure. Deuxièmement, un
report des flux de circulation sur les quartiers voisins, et donc une
dévalorisation foncière (HUMAIN-LAMOURE, 2015).
Anne-Lise HUMAIN-LAMOURE va plus loin dans les limites de la
participation citoyenne, notamment en termes de concurrence entre les citoyens
et le milieu associatif qui oeuvre dans le secteur parfois depuis longtemps. A
cela s'ajoute aussi une différence de poids de parole et les citoyens
les plus éduqués vont briguer plus facilement le débat car
ils ont des chances d'être plus familiers du processus. Le risque
étant que la ville se façonne finalement à leur image,
sans tenir compte de la mixité sociale et des situations sociales
différentes. Enfin, un dilemme se pose concernant la forme de la
démocratie participative. Sans modérateur, la réunion peut
vite devenir une litanie de doléances et renforce l'idée de
réunions
14
institutionnalisées. Cependant, elle souligne trois
limites : la mise en scène trop formelle, un accès au conseil
plus difficile et des débats qui peuvent s'avérer biaisés
par les municipalités si le projet discuté est déjà
mis en route.
La ville est à un tournant de son histoire. Les
nouveaux enjeux environnementaux, couplés à une
possibilité d'actions accrue des villes, leur confèrent une
responsabilité à l'échelle locale et internationale. De
fait, nous observons que sa forme change, ainsi que son organisation et sa
planification.
Si la ville a longtemps été un organisme froid,
déconnecté de ses habitants, elle aspire aujourd'hui à
plus de participation de ses citoyens dans les décisions à
prendre. L'enjeu est primordial, il faut, aujourd'hui, composer la ville qui
vivra des décennies, en diminuant son impact sur l'environnement, ses
habitants et sa dynamique. Ainsi, le volet environnemental est important, mais
il est loin d'être le seul aspect à prendre en compte. La
mixité sociale et la croissance économique sont autant de
variables nécessaires à la pérennité de la
ville.
Nous l'avons vu, les réponses à apporter pour
aller vers la transition écologique ne sont pas clairement
définies. Cela est dû à la jeunesse des
considérations et à un retour d'expériences faible voire
inexistant. En effet, les échelles de temps afin de valider
l'efficacité d'une démarche sont bien plus longues que les
mandats politiques. Cela pose le problème de la continuité des
actions au-delà des mandats. Enfin, chaque territoire ayant des
spécificités en matière géographique,
organisationnelle, démographique et en termes d'impacts sur son
environnement, les solutions ne peuvent être dupliquées de
manière stéréotypée et chaque ville doit effectuer
un travail de recherche spécifique avant d'entamer un processus de
changement.
C'est en ce sens que les petites et les grandes villes
diffèrent. Les grandes villes et métropoles disposent de moyens
humains et financiers conséquents pour établir un diagnostic
précis de leurs territoires. Elles bénéficient aussi d'un
fort attrait économique qui rend l'émergence d'initiatives plus
viable. Les petites villes, quant à elles, sont souvent isolées
et peu dynamiques comparées aux métropoles. De fait, elles
doivent composer avec les moyens présents pour établir un
système efficient qui ne soit pas trop consommateur de budget public
tout en impactant l'économie de manière positive. Ce dilemme
renforce l'inertie des territoires, mais peut être pallié par une
implication plus forte des habitants. Cela est possible partout, mais est
efficace dans les petites villes qui bénéficient d'un territoire
réduit, ayant une taille plus humaine et sur lequel les retombées
des actions se verraient plus rapidement.
Bien que différentes dans leur structure, les villes
sont aujourd'hui l'échelle du développement durable. A ce titre,
elles concourent toutes vers l'objectif commun de réduire leurs impacts,
locaux dans un premier temps, mais globaux quand ils sont mis bout à
bout. Des coopérations locales et internationales voient le jour afin de
mutualiser les connaissances encore jeunes sur le sujet. Cette
coopération est vitale pour les petites villes qui, bien qu'elles ne
puissent les calquer telles quelles, peuvent s'inspirer de ce qui se fait
ailleurs afin de s'orienter dans la bonne direction.
Les décennies à venir marqueront
l'avènement d'une ville nouvelle, une ville réconciliée
avec ses habitants et son territoire. Et pour ce faire, il faudra en passer par
des choix audacieux, parfois impopulaires, mais toujours concertés. De
fait, les
15
petites villes ont un rôle prépondérant,
de par leur nombre conséquent et la population qu'elles abritent.
Comment les petites villes participent-elles à la transition
écologique à leur échelle ? Nous faisons les
hypothèses - au regard de ce qui a été
rédigé précédemment - que les petites villes ont un
rôle prépondérant à jouer dans le
développement durable et sont en mesure de prendre en charge leur propre
développement à l'échelle locale. Pour cela, nous partons
du postulat qu'une petite ville aura certes des manques de compétences
et de moyens pour certains aspects, mais une plus grande marge de manoeuvre sur
d'autre. De fait, nous partons de l'idée qu'une petite ville, à
partir du moment où elle joue un rôle structurant sur son
territoire, a un rôle prépondérant à jouer dans
l'élaboration de projets de développement durable.
Nous nous concentrerons sur le cas de Barcelonnette, ville de
montagne de 2 000 habitants et qui a la particularité d'être une
petite ville qui fait office de bourg-centre et a donc un rôle
structurant sur son territoire alentours au même titre que ville de plus
grande envergure.
16
II. Barcelonnette, ville enclavée au
rôle
fédérateur sur son territoire
alentours, entre contraintes et
potentialités d'une petite ville
structurante
1. Une méthodologie analytique et empirique
pour comprendre un sujet majeur, transversal à tous les domaines
politiques
Après avoir étudié la littérature
ainsi que l'historique de l'analyse des petites villes, nous nous sommes
arrêtés sur les perspectives d'avenir des villes et leur
capacité à prendre en main leur propre destin. Nous avons ensuite
dissocié les villes sous l'influence métropolitaine des petites
villes qui devaient envisager leur développement territorial de
manière moins collaborative. A ce titre, il convient ainsi de souligner
la différence de moyens et donc de marge de manoeuvre entre les deux
types d'entités. L'objectif final était de mettre en exergue les
freins et les potentialités des petites villes pour tendre vers la
transition durable, pour souligner leur capacité à prendre en
main leur développement local en accord avec les principes de
durabilité qui peuvent et doivent régir la ville de demain.
A. Des données qualitatives et quantitatives pour
éclairer notre propos
Les données recherchées sont d'ordre qualitatif et
quantitatif.
Les données quantitatives liées à la
transition écologique sont à chercher plutôt dans
l'entretien semi directif avec le maire de Barcelonnette. A cette occasion, il
sera possible de déterminer des freins économiques et des manques
de moyens humains pouvant empêcher certains projets de se
réaliser. A cela peut s'ajouter les perspectives chiffrées des
projets mis en oeuvre.
D'un point de vue qualitatif, il conviendra de
récupérer des données sur la perception qu'ont les
habitants de leur ville. Une perception à mettre en parallèle
avec leur sensibilité à l'écologie et d'autres
paramètres tels que leur sentiment d'appartenance à la ville et
leur capacité à influer sur les décisions politiques.
Le même type de données peut être
récolté lors de l'entretien avec le maire, avec cette fois une
vision « top-down ». Cependant, la relative jeunesse des
projets actuellement discutés en font des problématiques
essentiellement reliées aux pouvoirs publics. De fait, la population n'a
pas encore la pleine mesure des avancées sur ces sujets étant
donné que peu de choses concrètes ont été
entreprises. De fait,
17
les données quantitatives se limiteront à des
montants budgétaires et aux écarts entre ceux-ci et le coût
des installations prévues.
B. Des entretiens semi-directifs pour comprendre les
problématiques en jeu
Dans le cadre de la collecte de données qualitatives,
un entretien semi directif sera réalisé en présence de
Pierre MARTIN-CHARPENEL, maire de Barcelonnette. Le but de cet entretien est de
dresser un tableau actuel des avancées en matière de transition
écologique et de s'attarder sur les problématiques et la
manière dont la ville envisage de passer outre les obstacles. Cet
entretien permettra d'avoir le point de vue de la mairie et devra être
couplé à un questionnaire auprès des habitants de la
vallée de l'Ubaye.
De plus, un autre entretien semi-directif sera
réalisé avec Claude GOURON, président de l'association
Énergies Modernes Ubaye (EMU). Cet entretien aura pour but de
comprendre les tenants et les aboutissants d'une association citoyenne qui
souhaite oeuvrer dans le sens d'une meilleure autonomie
énergétique. Cela permettra de confronter les
problématiques publiques et citoyennes et de comprendre les
interrelations qui sous-tendent leurs projets.
Enfin, un entretien sera réalisé avec le Pays
S.U.D. qui possède des bureaux à Barcelonnette. L'idée
étant de confronter les différentes perceptions de ces projets en
fonction de l'entité. Le Pays S.U.D. englobant Barcelonnette, ils
peuvent avoir des approches légèrement différentes,
notamment en termes d'outils mobilisés pour arriver à leurs fins.
Ainsi, des acteurs de toutes les strates seront sondés et nous pourrons
comprendre les relations qu'ils entretiennent enfin de rendre leurs
démarches les plus efficientes possibles.
En fonction de ces entretiens, d'autres interlocuteurs peuvent
être interrogés à propos de leur rôle au sein de ces
projets. Nous les détaillerons dans les entretiens si besoin est.
Lors de ces entretiens, nous nous efforcerons de ne pas
enfermer les interlocuteurs dans un questionnaire trop précis. Dans un
premier temps, nous parlerons de l'historique des projets d'autonomie
énergétique, que ce soit les projets de Barcelonnette en
matière d'autonomie à l'horizon 2040, ou les projets de TEPOS du
Pays S.U.D.. Une méthodologie similaire sera appliquée à
l'entretien avec Claude GOURON, afin dans un premier temps de mettre en exergue
les motivations qui ont poussé ces acteurs citoyens à participer
à ces projets.
Un autre objectif sera de comprendre les relations qui
régissent et sous-tendent les deux projets, à savoir celui de
Barcelonnette et celui du Pays S.U.D., dont Barcelonnette fait partie
intégrante. Nous verrons ainsi comment ces projets sont menés,
s'ils sont concomitants ou s'ils sont dissociés sur certains points.
Compte tenu de la faible expertise et du manque de moyens, nous essaierons
aussi de comprendre quels sont les transferts de compétences et de
connaissances qui permettent aux deux projets d'éviter les non-sens et
d'être le plus efficients possibles.
18
Au-delà de ces projets, nous essaierons de comprendre
quelles seront les prochaines étapes, à savoir la mise en
pratique des théories actuellement à l'étude et les
impacts de ces idées sur les autres secteurs des pouvoirs publics tels
que l'urbanisme, l'économie et le social.
C. Des limites méthodologiques inhérentes à
la recherche dont il faut avoir conscience
Malgré le soin qui sera apporté à la
collecte et à l'analyse des données, il faut souligner les
limites incompressibles qui sous-tendent une telle démarche et qui
doivent être prise en considération dans la lecture de l'analyse.
Nous abordons en particulier les limites concernant la collecte
d'informations.
Bien que le panel soit le plus diversifié possible,
cela ne peut garantir sa neutralité totale. Ainsi, les militants et
partisans d'une transition écologique seront plus enclins à
s'étendre sur le sujet tandis que les personnes qui ne se sentent pas
concernées pourront ne pas prendre le temps de répondre à
nos questions.
Du fait que le sujet est aujourd'hui axé
essentiellement sur les pouvoirs publics et les initiatives locales proches de
ces pouvoirs publics, nous ne récolterons pas de données
concernant le ressenti des habitants de ces territoires. Cela pourra être
fait dans un deuxième temps, afin de consulter la population et
d'ajuster les actions pour qu'elles soient en adéquation avec les
attentes des habitants. De fait, une fois cette consultation faite, il se peut
que le projet dévie sensiblement des postulats de départ, il sera
intéressant de refaire l'exercice à plusieurs étapes du
projet afin de confronter le projet de départ avec les actions mises en
place et ainsi évaluer l'importance de la population dans le processus
d'application des idées.
De plus, il ne faut pas exclure l'existence de certains
biais. Ces acteurs interrogés n'ont pas tous les mêmes aspirations
politiques ni la même vision de la transition durable. Du fait de leur
appartenance à différents services, à différentes
échelles, il se peut que des incompréhensions naissent de leurs
rapports et biaisent les réponses, consciemment ou non.
Enfin, ces projets s'inscrivant sur le long terme, ces
entretiens ne sauraient relater qu'une photographie d'une situation à un
moment donné. Le turn-over politique amènera probablement les
objectifs à dévier de ceux initialement édictés et
il se peut que le panorama soit sensiblement différent en fonction des
interlocuteurs qui régissent le territoire.
Dans le cadre de ce mémoire, les problématiques
seront appliquées au territoire de Barcelonnette et à sa zone
urbaine environnante. Ainsi, nous prendrons comme référentiel la
vallée de l'Ubaye, pour laquelle Barcelonnette est le chef-lieu. Ce
choix s'est imposé naturellement car il y a un fort lien entre les
communes alentours et la ville centre qui, malgré sa petite taille, agit
comme un pôle central autour duquel les communes s'articulent et se
développent.
19
2. Un territoire organisé le long de l'Ubaye,
articulé entre une communauté des communes et une association de
territoires,
qui joue un rôle prépondérant
dans le développement local et les projets d'avenir
A. Un territoire centralisé autour de l'Ubaye,
qui va
de sa source au lac de Serre-Ponçon
Figure 1 - CARTOGRAPHIE DU PAYS S.U.D.
Source :
www.ccvusp.fr,
consultée le 10 mai 2019
La communauté de communes Vallée de l'Ubaye
Serre-Ponçon est située dans le département des Alpes de
Haute Provence. Depuis le 1er janvier 2017, la communauté de
communes regroupe 13 communes comptant 7 790 habitants et d'une superficie de 1
013,6 km1. Le siège de la communauté des communes se
situe à Barcelonnette, la ville la plus peuplée des 13 communes.
Barcelonnette est aussi la sous-préfecture des Alpes de
Haute-Provence.
La communauté de communes est un territoire d'altitude
variable qui se divise en trois catégories :
? La basse vallée : Du Lauzet à Barcelonnette (771
mètres à 1150 mètres) ;
? La moyenne vallée : De Barcelonnette à
Jausiers (1200 mètres à 1300 mètres) ;
1
https://www.annuaire-mairie.fr/communaute-communes-vallee-de-l-ubaye-serre-poncon.html
20
? Les hautes vallées : De Jausiers aux sources de l'Ubaye
(1200 mètres à 2650 mètres).
Le territoire est marqué par le passage de l'Ubaye en
son centre. Cette rivière prend sa source à la frontière
franco-italienne pour aller se jeter dans le lac de Serre-Ponçon, 80
kilomètres plus à l'ouest. La vallée
bénéficie de très nombreux lacs et retenues d'eau
artificielles.
L'échelle supérieure dans laquelle
Barcelonnette est englobée est la CCVUSP. La Communauté des
Communes de la Vallée de L'Ubaye Serre-Ponçon a été
créée en 2017 et regroupe 13 communes. Barcelonnette est le
siège de la CCVUSP. Elle est née de la fusion de la
communauté des communes de la Vallée de l'Ubaye et de la
communauté des communes Ubaye Serre-Ponçon. La CCVUSP est une
émanation qui découle de la Loi NOTRe pour renforcer les
compétences des établissements publics de coopérations
intercommunale. Cette échelle se croise avec celle du Pays S.U.D. qui
représente un autre niveau de gouvernance à l'échelle du
territoire.
Le Pays S.U.D. est une association loi 1901 qui a vu le jour
en 2005 à l'initiative de 4 communautés de communes voisines.
S.U.D. est l'acronyme de Serre-Ponçon-Ubaye-Durance ; le pays regroupe
les communautés de communes suivantes :
? La Communauté de communes du Savinois
Serre-Ponçon (CCSPP) ; ? La Communauté de communes de l'Embrunais
(CCE) ;
? La Communauté de communes de la Vallée de
l'Ubaye (CCVU) ; ? La Communauté de communes d'Ubaye Serre-Ponçon
(CCUSP).
Ces 31 communes se sont réunies sous l'égide
d'une même entité afin de coordonner leur développement
rural et tendre vers la soutenabilité de leur territoire. Leur but est
de s'organiser autour d'un « projet de territoire » et d'un «
territoire de projets ». La mutualisation des ressources et des
compétences des communes permet d'avoir un poids plus important sur
l'aménagement du territoire.
B. Un environnement riche et fragile sur lequel repose une
économie locale importante, qui doit être protégé
pour perdurer dans le temps
Un climat méditerranéen et un ensoleillement
important qui offrent des opportunités en matière de ressources
énergétiques potentielles
La Vallée de L'Ubaye bénéficie d'un
climat méditerranéen et d'un ensoleillement de 300 jours par an
en moyenne. Cette particularité, couplée à un espace
fortement naturel, permet à la ville de bénéficier de
nombreuses ressources potentielles pour amorcer une transition
énergétique et produire des énergies renouvelables.
Les risques naturels sont détaillés dans un
Document d'Information Communal sur les Risques Majeurs (DICRIM). Il
s'agit principalement des inondations, des mouvements de terrain, du risque
sismique, des feux de forêts et des risques climatiques des territoires
de montagne. Étant donné leur caractère immuable et le peu
d'emprise des actions humaines sur leur survenue, ils ne seront pas
détaillés plus amplement ici.
21
D'un point de vue de la gestion des risques, la maitrise des
émissions de gaz à effet de serre est primordiale, d'autant plus
que la Vallée de l'Ubaye est très vulnérable aux
aléas climatiques. En effet, comme nous le verrons dans la prochaine
partie, la région vit essentiellement du tourisme et plus
particulièrement des sports d'hiver. Or le changement climatique en
cours rend les hivers imprévisibles et l'enneigement s'en trouve
modifié. Il est donc nécessaire d'atténuer les changements
tout en diversifiant les sources de revenus économiques.
Barcelonnette a tout intérêt à
empêcher les dégradations de son environnement car c'est une
commune qui vit du tourisme et qui, hiver comme été, est
tributaire des aléas climatiques qui peuvent impacter gravement les
retombées économiques. Il est, de fait, important de lutter
contre les aléas climatiques afin de stabiliser la situation et
continuer de bénéficier des retomber du tourisme des sports
d'hiver et d'été, en modifiant les comportements afin que ce
tourisme impacte moins l'environnement.
Un environnement naturel riche qui doit être
protégé par la mise en place de programmes de sauvegarde
La Vallée de l'Ubaye possède un environnement
naturel riche et une biodiversité importante en matière de faune
et de flore. De ce fait, et pour protéger une vallée fortement
marquée par l'empreinte de l'homme depuis le XIème
siècle, des dispositions ont été prises afin de se montrer
proactif dans la protection de l'environnement.
Les prémices règlementaires de la protection
des territoires de montagne apparaissent en 1985 avec la Loi Montagne.
Le but de cette loi est de favoriser le développement et la
préservation des territoires de montagne par l'intermédiaire de
règles d'urbanisme spécifiques qui régissent le
développement urbain des villes concernées. Selon cette loi, les
territoires de montagnes sont considérés comme : « un
ensemble de territoires dont le développement équitable et
durable constitue un objectif d'intérêt national en raison de leur
rôle économique, social, environnemental, paysager, sanitaire et
culturel ». Barcelonnette, comme plus de 6 000 communes en France,
fait partie des villes qui doivent mener leur développement en accord
avec cette loi (DIAGNOSTIC TERRITORIAL SYNTHETIQUE, 2015). De nombreux autres
documents directeurs verront le jour par la suite et ils doivent tous
être en concordance avec les premiers principes édictés en
1985.
Barcelonnette agit sur deux volets concernant la protection
de son environnement naturel. Il s'agit des sites classés Natura
2000 d'une part et l'adhésion au parc national du Mercantour
d'autre part.
22
Des sites classés Natura 2000, témoins de la
volonté du Pays S.U.D. de préserver la richesse de son
environnement
Figure 2 - SITES NATURA 2000 ANIMES PAR LA
CCVUSP
Source : https://www.ccvusp.fr/
Le projet Natura 2000 émane des politiques
européennes de préservation de la biodiversité. Les sites
ayant cette désignation font l'objet d'une attention particulière
dans le but d'encourager une gestion collective équilibrée et
durable. De fait, les activités humaines susceptibles de porter
préjudice à l'environnement dans lequel elles s'installent ne
peuvent s'établir qu'après une évaluation de l'impact
réel sur la biodiversité. Des objectifs de conservation sont
édictés et la gestion quotidienne de ces sites doit aller dans le
sens de ces objectifs. Ces projets bénéficient d'aides de la part
de l'Union Européenne.
Plusieurs sites de la communauté des communes sont
classés en zones Natura 2000. Ainsi, le contractant s'engage
à respecter un cahier des charges strict afin de protéger la
faune et la flore des zones concernées.
23
Une adhésion volontaire au Parc du Mercantour, une
première nationale pour aller plus loin dans la préservation du
patrimoine naturel
Le parc national du Mercantour est l'un des 10 parcs
nationaux que compte la France. Cette zone a suscité de nombreux
débats liés à sa préservation et ce depuis le
milieu du XIXème siècle. C'est en 1979 que le parc est
officiellement créé, il s'étend sur deux
départements (Alpes Maritimes et Alpes de Haute Provence) et 21
communes. Son extrême diversité en termes de faunes et flores en
font un territoire très protégé, mais aussi très
touristique.
Barcelonnette, chef-lieu de la Vallée de l'Ubaye, a
volontairement rejoint le Mercantour en juillet 2017. Cette adhésion se
traduit par la mise en place d'un plan d'actions portant sur des nombreux
points tels que la gestion d'un tourisme durable, la promotion du
développement durable et l'étude approfondie du patrimoine
naturel de la ville en vue de sa préservation. L'adhésion
volontaire d'une commune dans un parc national est une première en
France. Barcelonnette montre ici sa capacité proactive et sa
volonté de lutter efficacement contre les effets néfastes sur la
biodiversité des activités de l'Homme.
Figure 3 - CARTE DU PARC NATIONAL DU
MERCANTOUR
Source :
https://seolane.org/,
consultée le 11 juin 2019
24
C. Une consommation énergétique majoritairement
saisonnière et largement tournée vers le secteur
résidentiel et les transports routiers
En tant que territoire largement tourné vers le
tourisme, Barcelonnette a un profil de consommation d'énergie
spécifique. Ainsi, une grande partie de la consommation
énergétique concerne le chauffage du secteur résidentiel
(PAYS SUD, 2015). Le fait qu'une grande partie des logements soient à
vocation touristique génère une hausse de la consommation
électrique. En effet pour répondre à la demande
saisonnière, ces logements sont équipés en grande partie
de chauffages électriques. De plus, les stations de ski sont de grandes
consommatrices d'électricité pour leurs installations.
Figure 4 - CONSOMMATION FINALE DE CC VALLEE DE L'UBAYE
- SERRE-PONÇON
Consommation finale de CC Vallée de l'Ubaye -
Serre-
Ponçon
Evolution sectorielle (énergie finale en KTEP)
Industrie/déchets Résidentiel Tertiaire
Agriculture Transports routiers
Source : AtmoSud - Inventaire énergétique et
d'émissions de polluants et gaz à effet de serre, 2017
Nous pouvons voir, grâce au graphique ci-dessus que le
secteur résidentiel compte pour une part importante de la consommation
finale d'énergie de Barcelonnette, au même titre que le transport
routier. Le secteur tertiaire arrive en troisième position et reste
stable au fil des années. Par ailleurs, nous notons que la consommation
liée à l'industrie est en forte baisse. Cela témoigne de
la place prépondérante du tourisme dans l'économie locale.
Si les deux secteurs étaient au même niveau de consommation en
2007, nous pouvons observer que la tendance baissière de l'industrie
montre que l'économie locale doit se concentrer sur le tourisme qui est
et reste son secteur principal de revenus.
25
3. Un territoire pertinent pour aborder la
problématique de la transition durable dans les territoires ruraux
isolés
A. Un secteur économique saisonnier éloigné
de l'influence d'une métropole
La Vallée de l'Ubaye vit principalement du secteur
touristique. Selon les mots de Pierre MARTIN-CHARPENEL, maire de Barcelonnette
: « Il est bien connu que notre économie repose à 80 ou
90 % sur l'activité touristique, c'est-à-dire sur des
activités saisonnières. Depuis plus de quarante ans, avec des
Comité d'expansion, de Bassin d'Emploi et d'autres structures, la
problématique pour résoudre le « il faut diversifier
l'économie » n'a jamais obtenu de résultat. En cette
période où l'argent public se fait de plus en plus rare, nos
chances de diversification sont encore plus réduites, l'espoir de
désaisonnaliser l'économie semble vain »
(décembre 2017).
Figure 5 - PROPORTIONS D'ENTREPRISES PAR SECTEURS
D'ACTIVITES (EN % DES ENTREPRISES
TOTALES)
Proportion d'entreprises par secteurs
Industrie Commerce Dont commerce Construction Administration
automobile publique, santé,
enseignement
Proportion d'entreprises par secteurs
70
60
50
40
30
20
10
0
Source : Plan Local d'Urbanisme de Barcelonnette, 2015
Nous voyons grâce au graphique ci-dessus la
prépondérance des activités liées au tourisme. A
cela s'ajoute l'évolution défavorable du nombre d'entreprises du
secteur, en effet, une trentaine de commerces du centre-ville ont fermés
entre 2009 et 2014, tandis que le nombre d'entreprises crées est
passé lui de 50 en 2009 à 32 en 2014 (ELABORATION DU PLAN LOCAL
D'URBANISME, 2015). Cela est en partie du à la conjoncture, mais ce
même document souligne des lacunes dans l'offre touristique qui peine
à se renouveler pour attirer un nouveau profil de clientèle.
Le territoire est donc partagé entre la
nécessité de dynamiser son secteur touristique à des fins
économiques d'une part et l'obligation morale de protéger son
environnement. De plus, les sports d'hiver est une part
prépondérante de l'activité touristique et sera un des
premiers secteurs à subir les effets du réchauffement climatique
avec des saisons de plus en plus courtes et des taux d'enneigement
26
irréguliers2. A cela s'ajoute la
versatilité en termes de comportements touristiques, qui
génère des incertitudes et empêche la Vallée de
l'Ubaye de pouvoir faire des prévisions de fréquentation d'une
année sur l'autre (PAYS S.U.D., 2014). La diversification de
l'économie revient donc sur le devant de la scène, en impulsant
de nouvelles dynamiques dans les secteurs agricoles (notamment avec les
circuits courts) et énergétiques (car le territoire
bénéficie d'une réserve d'énergies renouvelables
prometteuse).
Des territoires isolés, qui doivent se
développer en eux-mêmes, pour eux-mêmes
Barcelonnette, chef-lieu de la communauté des
communes, est relativement éloignée des principales
métropoles du sud-est de la France. Ainsi, la métropole la plus
proche est Nice à 147 kilomètres. Cependant, le col de la Bonette
n'étant ouvert que l'été, Nice se retrouve à 240
kilomètres. Les autres métropoles à proximité sont
Grenoble (170 kilomètres), Marseille (210 kilomètres) et Lyon
à 290 kilomètres.
A cela s'ajoute une faible offre en matière de
transports rapides vers le Pays S.U.D. En effet, bien que de nombreux projets
aient été mis à l'étude afin de raccorder
l'hinterland marseillais aux territoires alpins, la plupart ont
été abandonnés, faute de terrain d'entente entre les
différentes parties prenantes. De fait, les réseaux
autoroutières et ferroviaires existent aux alentours mais ne sont pas
raccordés au Pays S.U.D. et plus particulièrement à la
Vallée de l'Ubaye. Ainsi, l'autoroute A51 s'arrête à 13
kilomètres de Gap et 65 kilomètres de Barcelonnette.
Par ailleurs, une ligne de train faisant
Chorges-Barcelonnette devait voir le jour. Son histoire débute à
la suite du Plan Freycinet (1879), qui voulait que toutes les
sous-préfectures soient reliées au réseau ferré. Ce
projet a démarré en parallèle du projet de barrage
à Serre-Ponçon (voir focus ci-dessous), ce qui a d'ailleurs eu
des conséquences sur le tracé prévu pour la ligne de
train. En 1909 débute les travaux afin de relier Barcelonnette et
Chorges. Cependant, la première guerre mondiale va rapidement grever les
travaux et suspendre le projet pour un temps. En 1936, alors que 27
kilomètres de voies ont déjà vu le jour, un
arrêté ministériel met fin aux travaux à cause du
manque de crédits alloués3. Le projet ne sera pas
repris et la Vallée de l'Ubaye n'a pas pu bénéficier du
désenclavement qu'aurait permis la création d'une ligne de chemin
de fer. La Vallée de l'Ubaye demeure de fait un territoire
enclavé, relié aux métropoles par des routes de montagnes
sinueuses.
Cette situation fait de Barcelonnette une ville au pouvoir
structurant fort car la communauté des communes ne subit pas l'effet
d'aspiration que peuvent avoir les métropoles sur les communes
environnantes. De fait, la ville et le Pays S.U.D. qui l'englobe en sont un bon
exemple pour illustrer notre problématique sur la transition
écologique dans les petites villes, ne bénéficiant pas de
l'influence directe d'une métropole pour se développer et prendre
des initiatives ambitieuses.
2
https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2018-01/14-stations-ski-Alpes-nord-face-rechauffement-climatique-Tome-2.pdf
3
http://www.lauzetubaye.fr/annuaire/voie-ferree
27
B. Le Pays S.U.D., entre développement rural et
volonté d'être précurseur dans la
résilience
L'autonomie énergétique en 2040, un
objectif ambitieux, témoin du dynamisme d'un territoire
enclavé
Barcelonnette, ville centrale de la Valée de
l'Ubaye, nourrit un projet ambitieux d'être autonome en énergie
à l'horizon 2040. Les élus de Barcelonnette ont validé le
lancement d'une étude de faisabilité pour atteindre l'autonomie
énergétique à l'horizon 2030/2040. Comme
le dit Pierre MARTIN CHARPENEL : « Des villes ont
déjà atteint cet objectif, nous souhaitons devenir ville
pilote et atteindre cette autonomie à l'horizon 2030/2040. Ce projet
s'insère pleinement dans la candidature Territoire à
Énergie positives porté par le gouvernement et dont le Pays SUD
est lauréat sur le territoire ».
Pour cela, Barcelonnette peut compter sur une subvention de
80 000€. Les élus comptent, de plus, intégrer
pleinement les habitants dans ce processus, d'abord par une phase informative
afin de susciter l'adhésion de la population, puis par une
phase consultative4.
Pour poser les jalons de l'étude, la ville
utilise un logiciel appelé Dimosim et
développé par le Centre scientifique et technique du
bâtiment (CSTB). Ce logiciel permet d'effectuer des
simulations de plusieurs scénarios. L'objectif est doublement
intéressant car d'une part le logiciel va permettre d'envisager
les scénarios les plus efficients et d'autre part, son
utilisation permettra d'améliorer les simulations futures, il s'agit
donc d'un vrai test pour les deux parties engagées dans ce projet. Le
CSTB a donc établi deux modèles, un modèle
à moyen terme (2030) avec la mise en place de technologies
durables pour la production, le stockage et l'utilisation de l'énergie
verte, et un scénario à long terme (2050) visant une
autonomie énergétique totale5.
Ce projet fait écho à la volonté du Pays
S.U.D. de mettre en place un territoire à énergie positive
(TEPOS). Un territoire à énergie positive (TEPOS) est un projet
qui agit sur deux volets. Premièrement la réduction des besoins
énergétiques en combinant la sobriété et
l'efficacité énergétique. Deuxièmement, la
couverture des besoins restants avec de l'énergie
renouvelable.
L'objectif de la mise en place d'un TEPOS (Territoire
à Énergie Positive) est pertinent à l'échelle des
territoires de montagnes à cela pour plusieurs raisons.
Premièrement, les ressources disponibles en matière
d'énergies renouvelables surpassent la consommation d'énergie du
territoire compte tenu de la faible densité. Barcelonnette
dispose d'une densité de 159 habitants par
kilomètre carré6, soit légèrement plus
que la densité moyenne sur l'ensemble du territoire
français (104,6 habitants/km2 en 20157).
La communauté des communes Vallée de l'Ubaye
Serre-Ponçon, elle, a une
4
https://www.laprovence.com/article/edition-alpes/3396848/la-ville-bientot-pilote-en-matiere-dautonomie-energetique.html
5
http://www.cstb.fr/fr/actualites/detail/dimosim/
6
https://www.insee.fr/fr/statistiques/1405599?geo=COM-04019
7
https://www.insee.fr/fr/statistiques/1405599?geo=FRANCE-1
28
densité de 7,8 habitants au kilomètre
carré en 2014 avec un total de 7 921 habitants répartis sur 13
communes. Cette densité est considérée comme très
faible selon l'INSEE.
Deuxièmement, la multiplicité des ressources
pouvant être exploitées à des fins de production
d'énergie renouvelable est significative. Eau, vent, soleil, biomasse
peuvent être exploités dans les territoires montagnards afin
d'atteindre l'autonomie énergétique. Le TEPOS sera
décliné en deux échéances à savoir 2030 et
2050, avec pour les deux des objectifs différents. D'ici 2030, le Pays
S.U.D. veut tendre vers l'autosuffisance énergétique en
électricité et en chauffage en agissant sur les leviers de la
précarité énergétique afin de faire baisser la
consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de
serre de 40%. A l'horizon 2050, le TEPOS prévoit une autosuffisance
énergétique qui inclut la mobilité, une division par 4 des
émissions de gaz à effet de serre et une division par 2 de la
consommation énergétique.
C. Un TEPOS pertinent compte tenu des potentialités
énergétiques
a. Des infrastructures de production d'énergies
renouvelables locales importantes mais encore sous-exploitées
Le Pays S.U.D. produit 183GWh/an en énergie
renouvelable, cela représente 24% de sa consommation totale mais la
totalité de la consommation en électricité (174 GWh/an).
L'épicentre de la production locale d'énergie est la
Vallée de l'Ubaye qui concentre 60% de cette production (PAYS S.U.D.,
2015).
Focus sur le barrage de Serre-Ponçon
Le barrage de Serre-Ponçon retient le lac artificiel
du même nom. Sa création en 1960 répondait à deux
nécessités : assagir la Durance - rivière capricieuse
capable de détruire des infrastructures - et produire de
l'électricité.
Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, les besoins en
énergies des habitants de la région allaient croissants, et
nécessitaient de trouver une source d'énergie fiable et
régulière à travers les saisons. Cependant l'idée
du barrage est antérieure à la guerre. En effet, nous retrouvons
les prémices d'un barrage en 1856, suivi en 1912 d'un ouvrage d'Ivan
WILHELM intitulé La Durance. Étude de l'utilisation de ses
eaux et de l'amélioration de son régime par la création de
barrages qui insiste sur la pertinence d'un barrage compte tenu des
avantages qu'il pourrait présenter (régulation de la Durance,
production d'électricité, réservoir d'eau pour
l'agriculture). De nombreuses études sont dès lors lancées
(12 campagnes de sondages jusqu'en 1927) mais les résultats obtenus ne
permettent pas d'envisager la création d'un barrage en béton,
voire tout simplement de construire un barrage avec les moyens techniques de
l'époque.
En 1948, EDF et de nombreux protagonistes rouvrent le
débat et prennent la décision de construire un barrage en
remblais atteignant les 120 mètres de hauteur. Pour cela, 100 000 m3
d'alluvions sont mélangés à 20 000 tonnes d'argile et 10
000 tonnes de ciment afin de réaliser ce qui reste aujourd'hui le plus
gros barrage en terre d'Europe. Sa réalisation a nécessité
la submersion de 2825 ha de terres réparties sur 13 communes, ainsi que
l'expropriation de plus de 1 000 personnes.
29
Aujourd'hui, la centrale hydroélectrique du barrage de
Serre-Ponçon produit plus de 700 millions de KWh par an, ce qui
correspond à la consommation électrique des Hautes-Alpes, cela
classe la centrale parmi les plus puissantes de France8.
Depuis la mise en place du projet de TEPOS par le Pays
S.U.D., des initiatives ont vu le jour afin de favoriser la relocalisation de
l'énergie produite en la rendant, lorsque cela est possible,
renouvelable.
Ainsi, Energ'éthique 04 voit le jour en 2012. Cette
SCIC est l'oeuvre d'une cinquantaine de citoyens ayant la volonté de se
réapproprier la production énergétique de leurs
territoires. Energ'éthique 04 a été missionné par
Barcelonnette et le Pays S.U.D. afin de les accompagner dans leur étude
concernant la mise en place de projets d'énergies renouvelables citoyens
en Ubaye. Cette mission de 9 200€9 a débuté en
2016 et doit émerger sur la faisabilité d'un projet citoyen
d'énergie renouvelable « de type centrale villageoise
». L'intérêt d'un tel projet se décline en
plusieurs points :
? Faire collaborer les citoyens et les collectivités ;
? Intégrer les installations productrices
d'énergies renouvelables dans des territoires au patrimoine local fort
;
? Mettre à l'oeuvre le savoir-faire local dans des
projets qui pourront s'inscrire comme des références en la
matière ;
? Mutualiser plusieurs petits projets afin de réduire le
coût.
Cette initiative a pour but de concilier les
compétences de toutes les strates du territoire afin d'aller vers un
objectif commun : l'autonomie énergétique. Cela rejoint les
principes de la ville durable tels que nous les avons mis en exergue en
première partie, en effet, l'objectif n'étant pas seulement
d'aboutir à une centrale de production énergétique locale,
mais aussi d'impliquer les citoyens sur des questions fondamentales telles que
la gestion de l'énergie. Cela passe par une phase d'informations et de
sensibilisation pour aller vers un débat ouvert sur les dispositions
à prendre afin de tendre vers ce projet.
Energ'éthique 04 travaille en collaboration avec EMU
(Énergies Modernes Ubaye) qui a pour but de regrouper les
citoyens désireux de faire partie de ce projet. Leur premier objectif
est d'augmenter le taux d'équipement en panneaux photovoltaïque des
ménages et de certains bâtiments publics. Sont ainsi
concernés l'école élémentaire, la salle omnisports,
le complexe de l'ancienne caserne ou encore la salle des fêtes. Chaque
projet est détaillé dans une fiche exhaustive afin de
déterminer les caractéristiques et les potentialités de
chaque bâtiment.
Le territoire bénéficie aussi d'une centrale
photovoltaïque située sur la commune du Lauzet-Ubaye et qui a une
capacité de production de 2.5MWc.
8
http://museoscope-du-lac.com/fr/presentation-barrage-serre-poncon.html
9
http://www.ener04.com/la-cooperative/nos-references.php
30
b. D'autres filières d'énergie renouvelable
existent et peuvent être exploitées pour augmenter le pack d'EnR
à l'échelle locale
Certaines énergies renouvelables n'ont que très
peu de références en milieu montagnard. C'est le cas par exemple
du solaire thermique et de la méthanisation. De fait, il est difficile
d'extrapoler compte tenu du peu de données et les seuls résultats
pertinents peuvent venir d'une analyse empirique. En l'absence de tels projets,
ces énergies ne seront pas prises en compte dans cette étude.
Il y a parfois une absence de données récentes
sur la consommation énergétique du Pays S.U.D.. Certains secteurs
semblent ne pas avoir de données du tout. Il est donc difficile de
dresser un panorama exhaustif de la consommation. Cependant, étant
donné les potentialités en matière d'énergies
renouvelables, il est possible d'imaginer que Barcelonnette et le Pays S.U.D.
ont suffisamment de potentiel pour couvrir les besoins en énergie des
habitants.
Sur cette base, il est possible de faire émerger les
potentialités de chaque filière d'énergie renouvelable et
estimer leur pertinence à l'échelle du Pays S.U.D. (CEREMA,
2016).
La filière bois-énergie : une filière
à fort potentiel qui reste encore sous-exploitée
La Vallée de l'Ubaye possède 28 500 ha de
forêt de production avec des essences quasiment toutes résineuses,
notamment composées de pins sylvestres et de mélèzes.
Outre l'intérêt écologique de préserver les
forêts dans un état convenable, il y a aussi un
intérêt au niveau de la filière bois-énergie. De
nombreuses communes aux alentours continuent d'utiliser le bois comme bois de
chauffage et les demandes en affouage sont en augmentation. Le territoire
possède aussi une chaufferie « bois » (25 tonnes de bois par
an) et de multiples projets relatifs à l'utilisation du
bois-énergie10.
La communauté des communes s'est d'ailleurs
dotée d'une charte forestière afin de développer, mettre
en valeur et protéger les ressources en bois du territoire. Le but de
cette charte est de mettre en confrontation tous les acteurs de la
filière afin de leur permettre de se concerter et de prendre des mesures
pour l'avenir de leur filière. 6 axes ont été
définis, eux-mêmes regroupant plusieurs actions :
· Favoriser la concertation ;
· Promouvoir l'image du territoire au travers de la
filière bois ;
· Augmenter la part de bois local dans le bois de
construction ;
· Développement et valorisation des entreprises
locales du secteur ;
· Renforcer la mobilisation du bois ;
· Permettre la valorisation des forêts via le
tourisme.
Le territoire de la CFT (Charte Forestière de
Territoire) a été mis en place en 2007 et concerne les
territoires Ubaye-Pays de Seyne. Ce territoire est couvert à 28% de
10
https://www.ccvusp.fr/la-filiere-bois.html
31
forêts de production mais la filière est encore
sous exploitée (CHARTE FORESTIERE UBAYE-PAYS DE SEYNE, 2012).
Cette filière fait face à des contraintes
d'exploitation qu'il faudra surmonter afin de dynamiser le secteur et permettre
une gestion optimale des forêts de production :
? Éloignement des axes de communications ; ?
Difficultés d'exploitation liées au relief ; ? Peu de
transformation locale ;
? Encore peu de liens entre les acteurs.
La CFT définit, entre autres, des indications afin de
dynamiser la filière bois-énergie à l'échelle
locale en augmentant les ressources mobilisables et en mettant en avant le
savoir-faire local en la matière. Un PAT (Plan d'approvisionnement
territorial) vient s'ajouter en complément dans le but de participer au
programme « 1 000 chaufferies bois » mis en place par la
Fédération Nationale des Communes Forestières. Ce
projet vise à créer un réseau de 1 000 chaufferies bois
sur le territoire national (ADEME, 2010).
Les objectifs à moyen terme de la CFT en ce qui
concerne l'utilisation de la filière bois-énergie sont les
suivants :
Figure 6 - EXTRAIT DE LA CHARTE FORESTIERE
TERRITORIALE
Source :
https://www.ccvusp.fr,
2012
Nous observons ici la volonté de multiplier par
près de 4,5 l'utilisation du bois-énergie à
l'échelle locale par an.
Le Pays S.U.D possède un réservoir de
bois-énergie conséquent. Cependant, cette ressource est
inégalement accessible du fait du relief, de l'enneigement et des
considérations environnementales et peut donc faire varier les
coûts finaux de l'utilisation du bois. De plus, il faut que les
techniques pour brûler le bois soient performantes car, dans le cas
contraire, elles peuvent émettre des particules nocives (UICN, 2013).
La filière hydroélectrique : des
potentialités existantes mais qui peinent à se
concrétiser compte tenu des inquiétudes quant à son impact
sur les milieux aquatiques
L'énergie produite par la filière
hydroélectrique est généralement admise comme propre car
elle ne rejette que peu de gaz à effet de serre est potentiellement
intéressante pour les territoires montagnards. Il existe des
inquiétudes concernant l'impact des centrales sur la biodiversité
aquatique. Cependant, selon certaines études, il est possible de faire
cohabiter les centrales avec les milieux aquatiques sans que l'impact ne soit
significatif sur la nature (ASSOCIATION NATIONALE DES ELUS DE LA MONTAGNE,
2010).
32
La filière photovoltaïque : un secteur
d'avenir pour la Vallée, capable d'offrir une énergie
décentralisée aux espaces les plus reculés
Outre l'ensoleillement important de
Barcelonnette et de ses environs (> 2 700 heures/an11), les
sommets enneigés en hiver constituent aussi un atout non
négligeable pour capter la lumière du soleil. En effet,
la neige augmente l'effet albédo et permet de capter
les rayons diffus, ce qui a pour effet d'accroitre l'énergie
captée par les panneaux solaires, mais aussi leur disposition.
Ils peuvent ainsi être mis verticalement sur les façades des
immeubles. Les températures relativement fraiches tout au long
de l'année (8,4°C à Barcelonnette12)
permettent aussi de préserver les cellules photovoltaïques, qui
voient leur tension générée baisser au-delà de
25°C13.
Enfin, le relief naturel des Alpes est un autre atout
à l'implantation de champs de panneaux photovoltaïques au
sol. Cependant, et cette problématique s'applique à
tous les projets de centrales photovoltaïques, le fait que les
besoins en énergie soient principalement observés lors des
périodes de faible insolation, oblige à surdimensionner les
centrales afin de répondre à la demande, cela est donc
très consommateur d'espace.
La filière éolienne : une filière peu
déterminante compte tenu de la géographie encaissée du
territoire
Il s'agit peut-être de la
filière la moins pertinente pour les territoires de montagne. En effet,
les reliefs des territoires montagnards tels que Barcelonnette et ses environs
agissent comme un coupe-vent (CLUB ARC ALPIN, 2012). L'éolien
fonctionne de manière efficiente avec des vents constants
autant en vitesse qu'en direction, or la présence de
montagnes tout autour accroit les turbulences et rendent la technologie peu
intéressante.
De plus, l'impact négatif sur les paysages
rend l'acceptation des projets éoliens plus difficiles pour les
habitants. Enfin, il est difficile d'installer des éoliennes sur
des terrains dont les pentes dépassent les 20% (PROJET ALPINE
WINDHARVEST, 2005). De fait, la vallée de l'Ubaye voit son
potentiel d'installation de projets éoliens réduit par
le fait que de nombreuses pentes dépassent ce seuil.
Cependant, les projets de petit éolien peuvent
être pertinents afin d`alimenter en énergie des
bâtiments isolés en moyenne et haute montagne, afin de les rendre
autonome et éviter un raccordement au réseau plus lourd et avec
des conséquences négatives plus importantes.
11
http://eost.u-strasbg.fr/seolane/ubaye/presentation/
12
https://fr.climate-data.org/europe/france/provence-alpes-cote-d-azur/barcelonnette-65644/
13
https://energieplus-lesite.be/theories/le-photovoltaique/le-rendement-et-la-puissance-crete-des-cellules-photovoltaiques/
33
Comme nous l'avons vu dans cette partie, Barcelonnette et plus
généralement le Pays S.U.D. présentent des
caractéristiques déterminantes pour répondre à la
problématique. En effet, ces territoires naturels reculés n'ont
pas d'influence d'une métropole aux alentours, compte tenu de la
distance avec ces dernières.
Ainsi, les villes qui pourraient faire office de petites
villes dans un autre contexte ont ici un rôle structurant et doivent
impulser des nouvelles actions au territoire dans son ensemble. De fait, le
projet de TEPOS et d'autonomie énergétique sont deux volets qu'il
est intéressant d'analyser. En effet, ces projets sont maintenant dans
l'air du temps et de plus en plus de grandes villes en font des arguments de
marketing territorial. Ici, l'enjeu est de préserver un territoire
riche, tout en permettant au secteur économique de se développer
afin d'assurer un avenir pérenne à ces territoires.
De fait, ce double objectif peut et doit être
co-construit pour que le projet soit cohérent et permette au territoire
de se construire une identité et une pérennité dans les
décennies à venir. Nous verrons dans la prochaine partie, par
l'intermédiaire d'entretiens avec des acteurs de ce
développement, que les problématiques, bien que similaires
à celles des grandes villes, diffèrent dans la pratique car les
moyens et les compétences ne sont pas les mêmes que dans les
métropoles.
34
III. Un territoire divisé en plusieurs
entités politiques qui peine à
porter
les projets de transition durable
1. Des décideurs locaux pour aborder la
problématique à différentes échelles
Afin de dresser un panorama relativement exhaustif des
problématiques qui sous-tendent la transition durable de Barcelonnette,
nous avons réalisé des entretiens à différents
échelons politiques. En effet, la taille relativement modeste de
Barcelonnette et ses compétences parfois limitées multiplient les
échanges avec les différents découpages du territoire. Par
conséquent, 5 entretiens ont été effectués avec des
personnes aux rôles différents dans le territoire. L'objectif
était d'aborder des problématiques similaires à
différentes échelles et mettre en exergue les différences
d'approches, d'outils et quels sont leurs freins à la bonne tenue des
objectifs.
Le premier entretien a été
réalisé avec Claude GOURON en qualité de président
de la SCIC Énergies Modernes Ubaye, une initiative citoyenne de
création de grappes de panneaux solaires sur des toits particuliers et
publics. Les deux autres entretiens ont été
réalisés avec du personnel de la mairie de Barcelonnette,
à savoir Sabine BLATTMANN, conseillère municipale à la
mairie et Pierre MARTIN-CHARPENEL, maire de Barcelonnette. L'échelon
suivant est la communauté des communes de la Vallée de l'Ubaye
Serre-Ponçon avec l'interview de J.-M. PAYOT qui fait partie du conseil
communautaire et qui est aussi conseiller municipal à la mairie actuelle
(il était 1er adjoint du précédent maire).
Enfin, le dernier entretien a été réalisé avec
Coralie SEWERYN, présidente du Pays S.U.D., une association regroupant
deux communautés des communes (Vallée de l'Ubaye et
Serre-Ponçon).
Cette dernière partie a pour objectif, dans un premier
temps, de faire un rapide tour d'ensemble des projets envisagés par
Barcelonnette, soit via la mairie soit via un ensemble territorial plus large
(Pays S.U.D., CCVUSP). Une fois cela fait, nous mettrons en évidence les
potentialités et les freins que ces projets ont rencontrés tout
au long de leur développement et leur avenir.
Ces projets n'étant pas encore, pour la plupart,
concrets, la population n'a pas été consultée dans cette
étude car il n'y a pas eu de communications. L'objectif est donc de
montrer les difficultés de réalisation au niveau des pouvoirs
publics ou des initiatives citoyennes proches des pouvoirs publics. En effet,
il n'y a pas d'entités publiques ou citoyennes qui fassent aujourd'hui
de l'information auprès des citoyens à propos de
velléités de transition durable à Barcelonnette. Nous
verrons cependant dans la prochaine partie que l'organisation des parties
actives dans le domaine peut conduire à la redistribution des
rôles et à l'intégration d'un volet de sensibilisation
auprès du grand public.
35
2. Des projets pléthoriques, qui répondent
à des logiques de priorité et de budget
Barcelonnette, dans sa logique de transition
écologique, a déjà réalisé de nombreux
projets d'envergure plus ou moins importante, notamment en matière de
sensibilisation et d'aménagements de l'existant. Nous trouverons le
détail des projets déjà réalisés dans le
tableau ci-dessous :
Figure 7 - PROJETS DE DEVELOPPEMENT DURABLES REALISES
PAR LA VILLE DE BARCELONNETTE
Type de projet
|
Détail du projet
|
Aménagement
|
Aménagement d'un point de rassemblement co-voiturage
|
Sensibilisation
|
Sensibilisation des services municipaux aux questions du
développement durable
|
Aménagement
|
Optimisation de la performance énergétique des
bâtiments du quartier Craplet
|
Aménagement
|
Mise en place d'un réseau de chaleur-bois de 1000 KW qui
alimente 9 bâtiments depuis 2015 (dont la cité scolaire,
l'hôtel d'entreprises, la gendarmerie et l'école
d'ébénisterie)
|
Aménagement
|
Création d'une pico-centrale en 2013 dans le Riou
Guérin et la source des Aiguettes
|
Sensibilisation
|
Création d'une charte environnementale à
destination des organisateurs d'évènements sur la commune
|
Sensibilisation
|
Création d'une charte environnementale à
destination des organisateurs d'évènements sur la commune
|
Aménagement
|
Rénovation énergétique de
l'éclairage public en 2016
|
|
Source : Révision générale du POS -
Élaboration du PLU (2015)
Des petits projets, pour des réalisations
concrètes
Selon le service auquel appartient la personne
interrogée, nous remarquons la différence d'envergure des
projets. Ainsi, Sabine BLATTMANN, conseillère municipale, a tenu
à souligner l'importance des projets concrets, quoi que de portée
limitée à l'échelle du territoire. Nous avons pu avoir un
aperçu des projets répondant à une stratégie des
« petits pas » : la limitation du débit d'eau des
fontaines par exemple. Si cela peut paraître dérisoire, il ne
s'agit pas ici d'en faire un argument de marketing commercial et pour cause, il
n'y a eu quasiment aucune communication sur cette action. Elle constitue
pourtant une manière d'amorcer la transition en limitant au maximum
l'utilisation des ressources naturelles et des moyens financiers et en
changeant ce qui peut l'être pour des coûts et une logistique
raisonnable. C'est la même démarche qui a guidé
l'équipe municipale qui a eu l'initiative de mélanger du sable au
sel afin de déneiger les routes. L'utilisation du sel pendant des
décennies a eu un impact négatif sur la flore de la
vallée, le sel brûlant littéralement les plantes (GUELPA,
1973).
36
Des voyages à l'étranger en guise
d'apprentissage
Un projet a particulièrement été bien
accueilli et a sollicité la participation de nombreuses personnes au
sein de la mairie de Barcelonnette. Ce projet était de voyager au
Liechtenstein, en Suisse et en Autriche afin d'aller à la
découverte de villages ayant des caractéristiques similaires
à celles de Barcelonnette et dans lesquels il y avait une conscience
écologique plus marquée. Ce voyage a pu avoir lieu grâce au
concours de la Commission internationale pour la protection des Alpes
(CIPRA), une organisation non gouvernementale qui, entre autres, met en
réseau les acteurs du paysage alpin afin de faire du transfert de
compétences et d'oeuvrer vers un développement harmonieux et
durable des Alpes. La délégation regroupait des
représentants de Barcelonnette et du Lauzet-Ubaye afin d'aller rendre
visite à des « bons élèves ». Ils ont pu
rencontrer au mois d'avril 2016 les représentants de Hittisau, de
Krumbach et de Doren (Autriche) et de Goms (Suisse) entre autres. Les
discussions se sont cristallisées autour de plusieurs sujets parmi
lesquels :
? Les différentes manières de se chauffer (exemple
: bois-énergie) ;
? Gestion de l'eau ;
? Redynamisation des centres anciens ;
? Politique participative ;
? Actions de sensibilisation.
37
Figure 8 - LES ATTENTES DES ACTEURS DE BARCELONNETTE A
PROPOS DU VOYAGE
Source :
https://www.cipra.org/, 2016
Ces échanges ont permis de mettre en exergue les
similitudes et les différences entre ces villes de montagne et essayer
d'envisager d'en exploiter certaines. L'intérêt était
d'avoir un retour d'expérience auprès de communes ayant entrepris
ce genre de démarches bien en amont de celle de Barcelonnette. Ainsi,
les communes suisses ont arrêté de faire de grosses installations
pour le chauffage au bois pour privilégier des microcentrales afin
d'harmoniser le stockage et la distribution sur leur territoire (Krumbach,
Autriche) (conseillère municipale de Barcelonnette, juillet 2019).
D'autres installations ont été visitées dont notamment des
petites centrales hydroélectriques et des centrales biomasses qui ont
particulièrement intéressées le maire de Barcelonnette.
38
L'objectif de ce déplacement était aussi de
comprendre comment ces projets avaient pu voir le jour. Bien que situés
dans d'autres pays, avec d'autres systèmes d'aides, ils ont pu, par
conséquent, voir que certaines installations avaient vu le jour
grâce au concours des citoyens et du bénévolat telle que
les installations photovoltaïques de Doren, tandis que d'autres avaient
bénéficié d'aides conséquentes pour se
développer comme la chaufferie bois de Niederernen.
Cependant, les installations visitées, bien que
très enrichissantes, auraient du mal à voir le jour en
l'état à Barcelonnette. En effet, certains des projets tels que
ceux en photovoltaïque étaient déjà très
avancés (maire de Barcelonnette, juillet 2019). Il a, par ailleurs,
visité d'autres installations et sollicité d'autres expertises,
notamment auprès de la Cité des Énergies de Cadarache.
L'éclairage public, un projet mené à
bien, qui est aujourd'hui réalisé
Force est de constater qu'il y a encore peu de projets qui
ont vu le jour à Barcelonnette. La volonté politique ne manque
pas, cependant d'autres freins sont à l'oeuvre et peuvent ralentir la
mise en place d'initiatives. Nous y reviendrons dans la prochaine partie.
Le débat sur l'éclairage public a
démarré avec une idée claire en tête : faire des
économies d'énergie. Le maire s'exclamait le 7 mai 2018 sur Alpes
1 : « À Barcelonnette, nous avons plus de 1 000 points
lumineux, c'est énorme et dispendieux ». Ce chantier
était intéressant car il permettait de résoudre un
problème de dépense énergétique, mais aussi d'agir
positivement sur les écosystèmes tout en profitant d'une
subvention significative de l'ADEME dans le cadre du TEPCV. Le projet avait un
coût total de 591 000€ divisés en deux tranches :
? 450 000€ subventionnés à 80% ; ? 141
000€ subventionnés à 100%.
Pour ce faire, un bureau d'études a été
mandaté et est arrivé à la conclusion qu'en changeant
l'intégralité des ampoules de la ville par des LED, on arriverait
à une économie d'énergie de 84%. Pour le moment,
Barcelonnette a tendu vers 50% d'économies d'énergie en couvrant
60 à 70% du territoire selon le maire de Barcelonnette.
Ce chantier s'est tourné vers des questions
très pratiques, à savoir la qualité des ampoules
installées et l'orientation de l'éclairage. Jusqu'à
présent, les luminaires étaient tournés vers le haut, ce
qui avait pour effet de perdre en luminosité et de perturber les
écosystèmes (conseillère municipale de Barcelonnette,
juillet 2019). Le Mercantour a apporté une analyse technique et des
ampoules LED 2500K offrant une luminosité naturelle et non perturbante
pour les écosystèmes qui pourraient être
impactés.
A cela s'ajoute l'obtention d'une première
étoile aux Villes et Villages Etoilés qui a
sensibilisé les communes au sujet de l'éclairage public,
conduisant à des réflexions et à des changements
d'équipements techniques (Directrice du Pays S.U.D., juillet 2019).
39
Des projets de documentations fédératrices du
territoire, à moyen terme
Au-delà de ces projets très concrets, le
territoire travaille aussi sur les documents d'urbanisme qui
fédèreront le territoire et lui donneront ses axes de
développement à moyen terme. Pour cela, deux organismes sont
à l'oeuvre afin de définir les directions à prendre. La
mairie a lancé un concours d'urbanisme en 2011 intitulé «
Mieux Vivre à Barcelonnette ». Le but de ce concours
était de réfléchir autour de trois axes directeurs
à savoir :
? Les quartiers de la ville et leur devenir : le
centre-ville, le quartier des villas mexicaines, le quartier Est, le quartier
Ouest, la rive gauche ;
? Réfléchir sur les équipements
structurants ;
? Comment relier les quartiers entre eux ? Notamment en
adaptant la circulation à des modes nouveaux.
J.-M. PAYOT, actuel élu de la CCVUSP était,
à l'époque, 1er adjoint au maire de Barcelonnette sous
le mandat précédent. L'importance de ces réflexions se
situait dans le fait qu'elles devaient revêtir un caractère
durable et s'inscrire dans le temps. 27 cabinets d'architectes ont
répondu à ce projet, 8 ont été reçus et 3
ont été retenus. Ils ont été choisis pour leur
complémentarité, un des 3 cabinets ayant une forte connotation
environnementale. Leur travail devait être fait chacun de leur
côté dans un premier temps, en s'appuyant sur des comités
de quartiers, puis ils devaient se réunir afin d'effectuer une
synthèse de leurs travaux14. Ce concours d'urbanisme devait
tenir lieu de préfiguration à l'élaboration du PLU.
Compte tenu des compétences de la ville en la
matière, le conseil municipal a mandaté des cabinets d'experts,
mais aussi délégué la création d'autres documents
connexes à différents organismes. A ce titre, le Pays S.U.D. est
en charge de l'élaboration du PCAET. Ce document n'étant pas
obligatoire pour les intercommunalités de moins de 20 000 habitants, il
s'agit ici d'une démarche volontaire. Ils travaillent aussi à la
réalisation du SCoT au niveau du territoire du Pays S.U.D. Cette
démarche volontaire prouve que la commune de Barcelonnette veut
être proactive dans la prise en compte de son territoire et dans la
direction à donner à son développement (Directrice du Pays
S.U.D., juillet 2019).
Ces raisonnements font écho aux raisonnements en
termes d'urbanisme et de mobilité que peuvent tenir les grandes villes
dans l'élaboration de leurs documents d'urbanisme. Il n'est plus
question aujourd'hui d'envisager la ville comme un espace zoné, dans
lequel chaque zone aurait sa spécificité. Le raisonnement est
systémique et inclus ainsi chaque parcelle du territoire dans un
système en interrelation avec les parcelles voisines.
14 Interview de Jean Michel PAYOT le 29 septembre
2011 - Concours d'urbanisme "Mieux Vivre à Barcelonnette" par
barcelonnette.com
40
Réutiliser l'existant : vers une logique
d'économie circulaire ?
Sabine BLATTMANN a longuement insisté sur la
nécessité de réaliser des actions de développement
durable en accord avec les petits budgets de Barcelonnette. La
réutilisation de l'existant est une action qui fait du sens d'un point
de vue écologique et qui est intéressante pour les petites villes
afin de limiter le coût des projets.
C'est par exemple le cas avec les canalisations souterraines
de Barcelonnette. La ville entretient des relations historiques avec le Mexique
car une partie de la population de Barcelonnette y est allée dans
l'espoir de faire fortune. Certains de ces émigrés sont revenus
du Mexique et ont construit de nombreuses villas mexicaines. Ils ont aussi
financé un réseau de canalisations souterraines afin d'arroser
leurs jardins. Ces canalisations sont aujourd'hui réutilisées
afin d'arroser les espaces publics et privés. Compte tenu du faible
débit de ces canalisations, les habitants gèrent l'arrosage
collectivement afin de ne pas tarir les canaux et permettre à tous ceux
qui en ont besoin d'en profiter. Cette gestion durable et collective montre
qu'en se consultant, il est possible de réutiliser l'existant même
si ce dernier n'est plus à la hauteur des besoins.
D'autre part, Barcelonnette a fait réaliser une
étude de son patrimoine dans le cadre d'une Aire de mise en Valeur de
l'Architecture et du Patrimoine (AVAP). L'objectif était de prendre en
compte l'évolution du paysage et du patrimoine en tenant compte des
contraintes environnementales. Il a fallu pour cela recenser le patrimoine afin
de mettre en place des mesures de protection de ce dernier. Ainsi, les villas
mexicaines font partie de ce patrimoine à protéger, mais pas
seulement. En effet, les villas ont bénéficié de cette
protection mais aussi le patrimoine naturel aux alentours (arbres et vergers)
(Conseillère municipale de Barcelonnette, 2019). Cela est primordial car
une étude de l'ONF sur le patrimoine arboré a mis en
évidence l'existence de trouées vertes dans Barcelonnette
(Élu au conseil communautaire de la CCVUSP, 2011). Le secteur des villas
est donc moins dense et, par définition, moins durable d'un point de vue
urbanistique. Cependant, la perméabilité des sols permet la
rétention des eaux pluviales. Toutes ces études préalables
sont connotées de notions de développement durable telles que
:
· La densité de la vieille ville participe au
développement durable en limitant l'étalement urbain et
préservant donc des espaces naturels. Cependant, elle n'est pas
entièrement habitée. L'AVAP a pour but de valoriser ce patrimoine
afin de densifier le centre-ville ;
· L'isolation des bâtiments est un chantier
très important afin d'assurer un confort de vie et faire des
économies d'énergie non négligeables ;
· L'AVAP permettra à termes de concilier la
protection du patrimoine et l'intégration de dispositifs de production
d'énergies renouvelables ;
· Les mobilités douces ;
· La mixité sociale des quartiers ;
· La gouvernance locale est favorisée et
encouragée par la création d'une commission locale
réunissant des élus, des personnes qualifiées et des
représentants d'administrations afin de piloter cette AVAP.
Barcelonnette bénéficie d'un espace
urbanisé conséquent et pour lesquels il faut maintenant trouver
une utilité. Il s'agit du secteur des casernes, un secteur qui a
41
abrité le 11ème BCA puis le CIECM de
1948 à 2009. Ces bâtiments, propriété de la mairie,
doivent maintenant être réutilisés par et pour la
population. De fait, de nombreuses hypothèses ont été
émises, telle que le déplacement de la cité scolaire sur
les lieux ou la caserne de pompiers. La réutilisation intelligente de
ces édifices permet de limiter l'étalement urbain en
réutilisant l'existant déjà urbanisé (Élu au
conseil communautaire de la CCVUSP, juillet 2019).
La réutilisation de l'existant est aussi à
l'oeuvre en vue de la production d'énergies renouvelables. De fait, il
est possible d'utiliser le réseau de distribution du gaz naturel ou
d'électricité pour transporter les énergies
renouvelables.
Des projets d'EnR concrets émanant d'initiatives
citoyenne ou publique
EMU, pour Énergies Modernes Ubaye, est une
société coopérative d'intérêt collectif.
Créée en 2018, la SCIC faisait écho à la
réponse du Pays S.U.D. à l'appel à projet pour des «
Territoires à Énergie Positive ». En effet, Barcelonnette et
le Pays S.U.D. ont mandaté Energ'éthique 04, une SCIC
basée sur Digne-les-Bains afin de créer une structure
équivalente à Barcelonnette. C'est comme ça qu'a vu le
jour EMU. La réflexion de la SCIC s'est faite conjointement avec le
mouvement Énergies Partagées et l'association Les
Centrales Villageoises. Selon Claude GOURON, son actuel président :
« Le but est d'équiper des toits de la Vallée de
l'Ubaye, qu'ils soient privés ou publics. Mais aussi de
réfléchir à l'organisation des énergies
hydrauliques et plus globalement aux EnR en général ».
Le système de gouvernance est simple : une voix est égale
à un sociétaire et le but recherché est purement citoyen,
il n'y a pas de notions de bénéfices.
Aujourd'hui, EMU compte une cinquantaine de personnes pour un
capital de 8000€. Parmi eux, 3 communes ont participé à
hauteur de 500€ (Barcelonnette, Enchastrayes, Ubaye/Serre-Ponçon).
Claude GOURON et les sociétaires se sont vite rendu compte qu'il
était plus facile de raisonner en termes de « grappe de chantiers
», plutôt que de prendre chaque projet individuellement. A ce titre,
le premier projet comportait 3 toits :
? Le toit du garage d'un particulier ;
? Le toit d'une maison individuelle d'un particulier ; ? Le toit
de l'école communale.
Le Maire de Barcelonnette était très
intéressé par l'idée et a spontanément
proposé le toit de l'école car ce dernier aurait pu servir un
double objectif : produire de l'énergie verte et faire office de support
éducatif afin de sensibiliser les enfants de l'école aux enjeux
du développement durable.
A côté de cela, Barcelonnette est doté
d'un deuxième projet abouti d'énergie renouvelable sur sa
commune. Un réseau de chaleur au bois d'une puissance de 1 000KW a
été créé à Barcelonnette dans le quartier
Craplet en 2003. A la base, il devait permettre de chauffer le quartier
Craplet, avec ses 23 bâtiments, les Allaris, la gendarmerie et le centre
Jean Chaix. Si techniquement la chaufferie fonctionne correctement, le
modèle économique peine à trouver sa rentabilité.
Les habitants ne se retrouvent pas dans la formule de paiement qui comprend une
grande partie fixe en guise d'abonnement et une partie variable pour la
consommation. La partie
42
abonnement est trop importante et la mairie essaie de faire
baisser ce prix pour que cette technologie devienne intéressante pour
les habitants qui en bénéficient.
3. Des freins liés à des
problématiques locales propres aux petites villes
Malgré l'existence de nombreux projets, des plus
concrets aux plus ambitieux, force est de constater qu'il y a de nombreuses
contraintes qui peuvent grever la réalisation des objectifs. Certains
projets sont aujourd'hui à l'arrêt, faute de moyens et de
compétences.
Un manque de moyens et de compétences grève les
projets de DD
EMU est un bon exemple de ce qui peut bloquer en termes de
moyens. En effet, cette SCIC n'a pas pour vocation d'aller vers la
réalisation de bénéfices, ce qui la libère de cette
pression économique. Cependant, malgré le fait que le projet soit
citoyen et n'impacte pas les finances publiques, il est intéressant de
souligner que les considérations économiques entrent tout de
même en compte dans l'étude de faisabilité. Le projet des 3
toits a commencé à bloquer lorsque l'Architecte des
Bâtiments de France a revu le projet et émis des réserves.
Compte tenu de la proximité de l'école communale avec des sites
classés (Tour Cardinalis, Monument aux Morts), il a fallu adapter le
projet aux exigences de l'Architecte de France et cela a eu pour
conséquence d'impacter le retour sur investissement. Nous pouvons voir
ici l'importance que revêt la rentabilité dans les projets. En
effet, les budgets alloués ne sont pas suffisants, les associations et
pouvoirs publics comptent beaucoup sur le retour sur investissement pour
permettre la rentabilité du projet. Or, nous le voyons ici, le moindre
imprévu peut mettre le projet en péril voire empêcher sa
concrétisation.
La loi du 31 juillet 2014 sur l'économie sociale et
solidaire (ESS) a fait passer le plafond de participation des
collectivités territoriales de 20% à 50% de la totalité
des fonds. Cela est intéressant mais bloquant pour EMU. En effet, la
SCIC peine à lever de fonds citoyens, de fait cela limite l'amplitude de
la participation publique. Dans l'hypothèse où ils
récolteraient 100 000€ de fonds publics, il faudrait trouver une
somme équivalente en fonds citoyens (Président de EMU, juillet
2019).
A cela s'ajoute la temporalité de ce genre de projets.
Le retour sur investissement intervient des années après
l'investissement lui-même et cela peut avoir de graves
conséquences sur la SCIC. En effet, en admettant qu'EMU ait la
capacité de mener un projet à son terme, le retour sur
investissement arrive longtemps après la mise en place du projet. De
fait, réaliser une installation bloquerait la société dans
sa capacité à repartir sur un autre chantier et donc à
avoir un réel impact sur la production d'énergie renouvelable.
Barcelonnette a manqué de moyens pour certains de ses projets. Il aurait
été plus facile de lever des fonds dans une ville plus importante
car les fonds citoyens auraient été proportionnellement plus
conséquents (Président de EMU, juillet 2019).
Enfin, les compétences et le temps alloués
à ces activités freinent aussi les avancées. La gestion
bénévole est compliquée sur des projets qui demandent
du
43
temps car les bénévoles n'ont pas la
possibilité d'accorder plus de temps pour s'occuper de EMU. De plus,
l'aspect saisonnier de Barcelonnette met la SCIC au ralenti l'été
lorsque la saison touristique bat son plein. L'administratif a constitué
un autre problème. La lourdeur des démarches contrastait avec le
caractère bénévole de la SCIC. Ainsi, les membres de la
SCIC n'ont pas pu s'occuper pleinement de ces démarches étant
donné leurs métiers respectifs au-delà de ce projet. Le
manque de relations avec Les Centrales Villageoises, qui auraient pu
leur apporter des compétences supplémentaires dans la gestion, a
aussi grevé les démarches (Président de EMU, juillet
2019).
Ces manques de moyens et de compétences ne concernent
pas qu'EMU, mais aussi les autres services, notamment le Pays SUD. Par exemple,
l'ADEME finance un poste de conseiller en énergie partagé qui
doit gérer seul de très nombreux dossiers du fait de ses
compétences. Bastien EVON, l'actuel technicien, met donc ses
compétences au service des différentes communes du Pays S.U.D.
Bien que primordiale, cette subvention reste insuffisante puisqu'une seule
personne se retrouve à gérer une quantité importante et
transversale de dossiers à l'échelle de plusieurs communes. Cette
personne va apporter ses compétences sur divers sujets mais ne pourra
pas avoir une expertise transversale sur tous les domaines du
développement durable. Cela limite donc la capacité de la ville
de mener des projets d'un bout à l'autre en interne. Le manque de
personnel se fait ressentir et il faudrait une personne supplémentaire
à mi-temps afin de gérer la partie administrative qui occupe une
grande part des projets (Directrice du Pays S.U.D., juillet 2019).
Malheureusement, le manque de moyens ne permet pas à l'association
l'embauche d'une nouvelle personne. Le maire, lui, regrette qu'aucun cadastre
solaire n'ait été réalisé sur Barcelonnette afin de
dresser un panorama des potentialités en termes de photovoltaïque.
Cela est dû au manque de moyens et de compétences pour
réaliser un tel diagnostic, le conseiller du Pays S.U.D. ne pouvant
réunir toutes les compétences sur un sujet aussi vaste que le
développement durable.
Monsieur le maire rappelle aussi que le manque de moyens est
aussi prépondérant à l'échelle de la ville. En
effet, dans un rapport daté de 31/08/2010, la Cour des Comptes fait
état des difficultés financières de Barcelonnette. En 2008
- et en admettant que Barcelonnette consacre l'intégralité de son
épargne brute à cela - la ville mettrait 16 ans à
rembourser sa dette. Or ces considérations limitent
considérablement la capacité de la ville à injecter de
l'argent public dans des projets de transition durable. De fait, à
l'heure actuelle, les efforts sont concentrés sur les manières de
résorber cette dette à court terme ce qui entre en contradiction
avec la temporalité des projets d'énergie renouvelable et
empêche tout investissement significatif en ce sens. Aujourd'hui, les
objectifs en matière de développement durable sont au point mort
et la mairie se concentre davantage sur le redressement financier de la commune
afin de libérer les mains du prochain maire. Cela témoigne de la
réalité des choses du fait que les projets écologiques
sont des investissements souvent lourds et avec des retours sur investissements
lointains, chevauchant par conséquent plusieurs mandats. Ce
problème, évoqué par de nombreux auteurs, confronte les
échelles du développement durable avec les
échéances politiques, deux échelles de temps
complètement différentes. Certains évoquent aussi le fait
que la majeure partie des investissements se font dans le secteur du tourisme
(aux alentours de 60% selon J.-M. PAYOT).
44
Enfin, les compétences mobilisées se limitent
à celles que les pouvoirs publics peuvent se permettre d'engager au
travers des subventions. La directrice du Pays S.U.D. souligne l'importance que
revêt la démocratie participative et regrette que cette
dernière ne soit pas plus exploitée sur le territoire : «
Les questions de démocratie participative ne sont pas assez
développées sur le territoire alors qu'il s'agit d'un aspect
durable de la ville. En effet, se concentrer sur la gestion de l'environnement
est une chose mais il est aussi nécessaire que les habitants se
réapproprient la ville et puissent influer sur son développement
à travers des outils de démocratie participative »
(juillet 2019).
Des politiques publiques insuffisamment incitatives
Nos entretiens auprès des acteurs investis dans le
territoire ont aussi mis en exergue l'insuffisance des politiques publiques :
celles-ci ne sont pas assez incitatives concernant les projets de
développement durable.
Au-delà des considérations de l'Architecte des
Bâtiments de France qui ont obligé le projet à s'adapter,
l'autre problème majeur que rencontrait EMU pour la réalisation
de son projet concernait le prix du KWh. En effet, ce dernier n'a cessé
de baisser pour atteindre aujourd'hui les 0.18€ alors qu'il était
de 0.60€ en 200915. De plus, les seules subventions dont ils
peuvent bénéficier à l'échelle régionale
sont des subventions à maitrise d'ouvrage (Président de EMU,
juillet 2019). Il déplore ainsi le manque d'aides pour des projets qui
vont dans le sens de la transition durable. Le Pays S.U.D. fait face aux
mêmes limites. En effet, l'ADEME ne finance qu'un seul poste de
conseiller permettant de monter en compétences (Directrice du Pays
S.U.D., juillet 2019).
Mais un autre problème est particulièrement
intéressant dans le cadre des projets du Pays S.U.D. En effet, ce
dernier est en mesure d'obtenir des subventions via le programme FEDER. Le
Fond Européen de Développement Régional alloue
des subventions pour des projets de développement durable
régionaux. Cependant, ces subventions ont des planchers très
élevés et le Pays S.U.D. se retrouve avec le problème
inverse. Ils ont la possibilité de demander ces subventions, mais ils
n'arrivent pas à réunir suffisamment de projets au même
moment pour atteindre le montant du seuil. De fait, ce n'est pas ici le manque
de subventions qui bloque les projets mais plutôt l'incohérence du
montant de la subvention compte tenu de l'ampleur et du coût des projets
locaux. Il serait intéressant ici de prendre en compte les
spécificités territoriales locales pour proposer des aides en
cohérence avec les besoins.
La législation aussi peut parfois bloquer les projets
de petite envergure. Pour cela, nous pouvons prendre l'exemple des projets de
centrales hydroélectriques. Tous les projets ayant un impact direct ou
indirect sur le milieu aquatique se doivent de respecter les conditions de la
Loi sur l'eau et ce, à l'échelle européenne. Il est ainsi
obligatoire de réaliser une étude de faisabilité du projet
et ce, peu importe sa taille. Cela peut être bloquant pour une petite
ville car cela engage des moyens financiers et des compétences
techniques qu'elle n'a pas forcément (Maire de Barcelonnette,
15
https://www.fournisseur-energie.com/tarifs-rachat-electricite-photovoltaique/
45
juillet 2019). Bien qu'il soit conscient de l'importance de
ces études afin de ne pas impacter les milieux aquatiques, il
évoque cette loi comme une des raisons pour laquelle il est difficile
d'envisager la réalisation de ces pico centrales hydrauliques.
Finalement, quelle échelle s'avère la plus
pertinente pour des projets de transition ?
Pour finir, il convient de s'attarder un moment sur les
questions d'échelles. En effet, il est difficile d'évaluer quelle
échelle est la plus pertinente pour mener à bien des projets
d'envergure et ambitieux. Il est nécessaire ici de mettre en contexte la
situation actuelle de la communauté des communes dans son ensemble pour
mieux comprendre la situation de Barcelonnette (Élu au conseil
communautaire de la CCVUSP, juillet 2019).
Barcelonnette apparaît comme une ville
suréquipée par rapport à la totalité de sa
population. Ces équipements sont utilisés par les
barcelonnettes16, mais aussi par les habitants de toutes les
communes environnantes. La concentration des équipements dans le
bourg-centre pose la question de l'intercommunalité. Afin d'harmoniser
la situation, J.-M. PAYOT pense qu'il est possible d'envisager la
création d'une « super commune » en lissant la
fiscalité au niveau des 13 communes avec, par exemple, un
président intercommunal élu au suffrage universel. Cela fait
écho aux propos du précédent maire de Barcelonnette,
Jean-Pierre AUBERT dans une lettre ouverte du 29 mars 2010 en réponse au
rapport de la Cour des Comptes. En effet, Barcelonnette, en tant que
bourg-centre apparaît correctement équipée pour
l'intégralité de ses habitants et de ses communes voisines qui,
elles, n'ont pas d'équipements tels qu'un musée, une salle
omnisport ou une salle de spectacle. Cela peut paraître
éloigné des considérations du développement
durable, et pour autant il n'est pas possible de dissocier aussi nettement les
postes de dépenses comme cela pourrait être fait dans une ville de
plus grande envergure.
Au-delà des équipements, nous constatons que
Barcelonnette supporte aussi le poids du tourisme qui a pourtant des
retombées économiques dans l'intégralité de la
Vallée de l'Ubaye (Élu au conseil communautaire de la CCVUSP,
juillet 2019). Si aujourd'hui Barcelonnette bénéficie d'une
bonification bourg-centre qui allège un peu ce poids, force est de
constater que les décisions prises à l'échelon
supérieur sont en mesure de grever le budget de la ville qui supporte
une charge allant au-delà de ses limites géographiques,
l'empêchant par conséquent de diversifier ses investissements,
notamment dans la transition durable (Maire de Barcelonnette, juillet 2019).
J.-M. PAYOT rappelle que la multiplication des strates politiques, bien que
nécessaire, est de nature à ralentir voire rendre impossible tout
projet unifié. Sur le territoire, si les énergies renouvelables
relèvent de la compétence de la CCVUSP, certaines villes telles
que Saint Pons (pour le projet de champs de panneaux solaires) s'accaparent les
projets. Cette mésentente peut être à l'origine d'un
ralentissement des dits projets.
La première question essentielle et qui
préfigure la tenue de toutes les initiatives est la question de
l'échelle. Quelle échelle est la plus pertinente pour gouverner
le territoire ? Cette problématique se retrouve dans l'utilisation des
équipements, mais aussi avec l'exemple de la future centrale
photovoltaïque de Saint-Pons. Il s'agit
16 Les habitants de Barcelonnette sont appelés
les barcelonnettes
46
d'une commune limitrophe de Barcelonnette et qui fait partie
des communes disposant de peu d'équipements. Le projet de centrale
photovoltaïque se situe sur son territoire. Il s'agit alors de
réfléchir à l'endroit où sera stockée
l'énergie produite (actuellement, la solution semble se trouver sur
Barcelonnette). De plus, l'énergie produite ne profitera-t-elle
qu'à la commune de Saint-Pons ou peut-il être envisageable de
partager les profits et les frais liés à la gestion de cette
centrale ? Ces problématiques rejoignent en substance celles relatives
à la mise en place de la taxe professionnelle unique.
4. Différents outils peuvent être mis en
oeuvre à l'échelle des petites villes pour exploiter les
potentialités locales
Le détail des projets actuels et des freins à
leur mise en oeuvre montre à quel point il est difficile de mettre en
place des projets d'envergure dans un territoire relativement peu
étendu. Ainsi, et malgré toute la bonne volonté des
pouvoirs publics locaux et des associations citoyennes, les obstacles rendent
difficile le passage de la théorie à la pratique et le territoire
peine à trouver des ouvertures afin de démarrer la
réalisation des objectifs. Les élus doivent faire preuve
d'inventivité pour voir l'aboutissement de leurs projets. De nombreux
outils sont mis en l'oeuvre pour perpétrer cette idée d'une
transition durable. Des outils à leur portée, qui doivent allier
une certaine efficience avec un coût global limité, loin du
marketing territorial et des enveloppes de plusieurs millions d'euros,
Barcelonnette doit maximiser la gestion de ses ressources pour donner un
souffle nouveau et continuer sa démarche en faveur d'une transition
durable.
Multiplier les acteurs pour décupler les
compétences
Face au manque de compétences sur certains sujets, nous
avons pu remarquer que tous les acteurs interrogés faisaient appel
à des compétences extérieures via des cabinets
d'études ou des experts dans leur domaine. Cela est primordial car il
faut souligner une chose : les compétences nécessaires sont
transversales et ne peuvent être maitrisées par une seule ou un
petit groupe de personnes. De fait, deux possibilités s'offrent au
territoire pour bénéficier de ces expertises. Soit, ils
embauchent une personne capable de répondre à leurs besoins
à l'instant T, soit ils font appel à des cabinets d'études
qui factureront une opération et réaliseront l'étude
demandée. La deuxième solution semble présenter un
avantage dans le sens où un projet nécessite des
compétences dans des domaines très variés (diagnostic,
réglementation, faisabilité) nécessitant de fait
l'embauche de plusieurs personnes tout au long de la réalisation et
donc, finalement, un coût supérieur.
Cependant, il n'est pas sans fondement de faire monter en
compétences le personnel public afin de rapatrier certaines
facultés en interne. Comme le souligne J.-M. PAYOT : « Pour
permettre à Barcelonnette d'évoluer au travers de projets
ambitieux, il semble nécessaire d'opérer une professionnalisation
du pilotage des services publics » (juillet 2019). Toutes les
compétences ne sont évidemment pas à rechercher dans un
premier temps, mais il rappelle que beaucoup de projets n'aboutissent pas car
la ville n'a pas su lever les subventions nécessaires. Pour lui, se
doter d'une personne capable d'aller chercher ses subventions est
nécessaire afin
47
de ne pas connaître de tels problèmes à
l'avenir. Il déplore le fait qu'à cause d'une
méconnaissance des démarches administratives dans ce secteur,
Barcelonnette passe à côté de fonds importants qui
pourraient lui permettre d'accélérer sa transition.
Il arrive aussi parfois que les études faites par des
experts ne soient pas exploitables en l'état. Nous prenons l'exemple ici
d'une étude du CSTB à destination du Pays S.U.D,
réalisée en 2017, afin d'étudier la stratégie
énergétique à mettre en place sur ces territoires. Il a
notamment mis en évidence l'existence de nombreuses passoires
énergétiques à l'échelle du territoire. Ce
document, très complet et très détaillé, a un
niveau de technicité tel qu'il n'est pas exploitable en l'état.
De fait, la présence de Bastien EVON, conseiller en énergie
partagé, est primordiale afin que ce dernier effectue un travail de
vulgarisation du document pour que les autres services soient en mesure de
l'exploiter (Directrice du Pays S.U.D., juillet 2019). Nous avons ici un
exemple de complémentarité des compétences qui est
intéressant à analyser. Le CSTB, comme de nombreux cabinets
d'études, livrent des données très techniques et non
exploitables si personne dans la commune n'est en mesure de les
interpréter correctement.
Concernant EMU, le projet est malheureusement aujourd'hui mis
en pause suite aux difficultés rencontrées. Cela fait écho
au paragraphe ci-dessus, EMU n'a pas pu lever les fonds nécessaires par
manque de temps et de compétences dans ce domaine et n'a pas pu
s'adapter à la baisse de rentabilité prévue de sa grappe
de chantiers. Cependant, EMU a encore un rôle important à jouer :
en effet, la SCIC va concentrer ses efforts afin de faire de la
pédagogie sur ces projets en informant les citoyens et en
débattant sur leur expérience et sur les difficultés
rencontrées. Le Pays S.U.D. voit EMU comme ayant un rôle
d'information citoyenne plus développé que le leur, c'est en
partie pour cela qu'ils ne font pas d'informations eux-mêmes. Le volet de
la sensibilisation est primordial afin de permettre à la population de
prendre la mesure des enjeux d'une ville telle que Barcelonnette en
matière de transition durable. De plus, la sensibilisation des citoyens
peut leur permettre de s'investir personnellement dans des projets, soit en
donnant de leur temps soit en investissant dans des projets tels que les
grappes de chantiers de EMU. Le fait qu'une seule personne soit à temps
plein dans l'association nécessite de se concentrer sur certains volets
en laissant d'autres aspects à d'autres acteurs. De fait, ces acteurs
peuvent trouver une nouvelle articulation entre eux pour réorganiser
l'organigramme et mutualiser leurs forces.
Enfin, Sabine BLATTMANN rappelle l'importance de la
communication entre les associations citoyennes et les élus locaux. Elle
estime que, comparé à de plus grandes villes, il est plus facile
de s'adresser aux élus dans une ville de la taille de Barcelonnette
qu'une ville plus grande, avec un organigramme politique plus dense. Les
associations ont plus de facilités pour parler avec le maire et les
pouvoirs communaux des projets, il est plus facile pour elles d'exister et
elles peuvent mettre leurs compétences au profit de la commune via un
canal direct avec les élus. C'est le cas par exemple avec EMU : le maire
de Barcelonnette a bien accueilli cette initiative et a tenté de les
aider, malgré le peu de moyens dont il dispose. De plus, Pierre
MARTIN-CHARPENEL voit en ces projets des moyens très efficaces de faire
de la sensibilisation, notamment auprès des élèves de
l'école communale. Nous pouvons voir ici qu'une organisation efficiente
de toutes ces entités serait de nature à
48
véhiculer plus facilement des idées de
transition durable auprès de toute la population. La proximité
des citoyens avec les pouvoirs publics est quelque chose de propre à une
petite ville. Ainsi, cette possibilité existante offre des
potentialités qu'il faut mettre en oeuvre afin de développer de
multiples initiatives.
Transfert de compétences et veille territoriale
Les outils énoncés précédemment
sont une bonne manière de monter en compétence mais ils ne sont
pas les seuls à être pertinents pour des territoires dont les
moyens financiers sont limités. Le transfert de compétences et le
retour d'expériences de territoires relativement similaires à
Barcelonnette permet de limiter la possibilité de faire fausse route.
Comme nous l'avons vu, certains élus de Barcelonnette ont
effectué un voyage à travers trois pays alpins afin d'emmagasiner
de l'expérience auprès d'acteurs ayant entrepris ce genre de
projets bien avant Barcelonnette. La démarche est intelligente car elle
se fait à moindre coût. De nombreux organismes, comme ici la
CIPRA, facilitent la tenue de ces évènements pour harmoniser le
développement d'un territoire en particulier (ici, le territoire
alpin).
Cependant, il est intéressant de préciser
qu'effectuer un transfert de compétences, c'est aussi savoir mettre en
évidence les différences entre deux territoires voisins. En
prenant par exemple les différences entre les intercommunalités
de Barcelonnette et de Serre-Ponçon. En effet, certains projets
fonctionnent bien d'un côté mais pas de l'autre, ce qui laisse
à penser qu'un découpage du territoire est une chose complexe qui
nécessite de prendre en compte les spécificités de chaque
territoire, même si ces derniers sont proches comme c'est le cas ici
(Directrice du Pays S.U.D., juillet 2019).
Des projets à venir, en prenant en compte les
échecs passés et l'expérience acquise
Si certains projets semblent aujourd'hui difficiles à
mettre en oeuvre compte tenu des raisons précédemment
évoquées, ce n'est pas pour autant un échec complet. De
nombreux enseignements permettront d'adapter les projets de manière plus
réaliste à l'avenir.
Les changements n'en sont qu'aux balbutiements et de nombreux
dossiers, pour certains historiques, continueront d'être discutés
jusqu'à leur mise en oeuvre concrète. Lors de l'entretien, une
conseillère municipale nous a cité quelques-uns de ces dossiers
les plus pertinents à l'échelle de Barcelonnette. Un des dossiers
les plus importants de la ville concerne la création de d'un axe
cyclable Jausiers/Les Thuiles. Cela est discuté depuis des
décennies car c'est un projet primordial pour le développement
des mobilités douces, son problème majeur est le coût car
il va nécessiter le rachat de terrains par la commune. Le coût est
élevé à cause des expropriations à prévoir
et des travaux en eux-mêmes. Ce projet s'inscrit comme un axe primordial
et prioritaire. Barcelonnette ne peut prétendre à
développer les mobilités douces sans une réelle voie
traversant la vallée de part en part. La route est dangereuse a
été le témoin de multiples accidents par le passé.
Il est obligatoire de travailler sur cette piste cyclable afin de pouvoir
amorcer un véritable changement dans les comportements de
mobilité.
Ensuite, un autre projet activement discuté
dépend de la nécessité de développer les transports
en commun avec les villes limitrophes pour permettre aux potentiels
49
collégiens et lycéens de venir suivre leurs
cours à la cité scolaire de Barcelonnette. Cela est doublement
intéressant car cela revêt deux aspects très importants
pour la ville. Premièrement, il y a une connotation écologique
à densifier l'offre de transports en commun. Deuxièmement, cela
pourrait sauver la cité scolaire dont l'avenir est menacé par
manque d'élèves. De plus, d'autres lycées aux alentours
sont en situation de surcharge. A cela vient se greffer la volonté de
mettre en place et valoriser le co-voiturage. Cela pourrait permettre de
limiter le nombre de véhicules en circulation à Barcelonnette. En
effet, beaucoup d'habitants n'utilisent leur voiture que pour les sorties hors
de la vallée. Si une alternative fiable et efficace existait, ils
pourraient envisager de se séparer de leur véhicule.
Enfin, la piétonisation d'une partie de Barcelonnette
(notamment la place de la Mairie), est un souhait politique fort mais qui
nécessite d'être discuté car il rencontre de fortes
résistances par les commerçants et les citoyens. Les discussions
se concentrent autour de la place de la Mairie qui a fait l'objet d'une
expérimentation par le passé mai qui est, aujourd'hui, rouverte
à la circulation.
Deux projets de parcs de panneaux photovoltaïques sont
à l'étude sur les communes de Saint-Pons et de Jausiers. Ces deux
projets sont portés par ENERCOOP, qui se charge de la mise en oeuvre et
de l'exploitation. Cela dénote avec la volonté d'EMU de produire
de l'énergie locale par des acteurs locaux, pour les citoyens.
Cependant, l'intervention d'un acteur important du secteur est une bonne chose
afin que ces projets aient plus de chances de voir le jour. En effet, selon le
maire de Barcelonnette, les projets photovoltaïques sont complexes car ils
ne peuvent être réalisés sur n'importe quel terrain ;
à Barcelonnette, les bonnes parcelles sont des parcelles privées,
ce qui bloque la réalisation d'infrastructures sans passer par un
processus préalable d'expropriation. Or ici, les terrains de Saint-Pons
appartiennent à la commune et ceux de Jausiers appartiennent à
l'association Syndicale Libre du Planet. Grâce à
l'expertise et aux moyens de ENERCOOP, les études de faisabilité
se sont faites plus facilement et sans engager de moyens des communes. Cela
était d'autant plus important car, rappelle Pierre MARTIN-CHARPENEL :
« Le projet de panneaux photovoltaïques de Saint Pons est
situé sur un terrain communal qui a la particularité d'être
dans le cône de déjection du Riou Bourdoux, un torrent de montagne
qui peut se montrer particulièrement virulent en cas de fortes pluies.
Si aujourd'hui son cône alluvial est entièrement boisé, la
situation paraît précaire pour installer un champ de panneaux
». Il a fallu donc engager des moyens significatifs afin de s'assurer
de la viabilité d'un tel projet sur une parcelle telle que celle-ci. De
plus, l'émergence de ce projet a été possible car la
commune a exigé que ce projet soit un projet citoyen avec la
participation de la commune, des collectivités locales et des habitants
(Communiqué de presse d'ENERCOOP du 13 juin 2018)17.
Concernant EMU, la SCIC va devoir s'adapter, mais l'annulation
du chantier n'est que partie remise. Une réunion sera faite d'ici la fin
de l'année afin de donner une nouvelle orientation à EMU, en
attendant que la possibilité de poser des panneaux photovoltaïques
se présente. Barcelonnette s'est concentrée sur la
réalisation de projets ambitieux, mais l'information aux citoyens est
primordiale et n'a peut-être pas été assez
développée. EMU, du fait de l'échec de ce premier projet,
revient ainsi aux fondamentaux en commençant par sensibiliser les
citoyens aux problématiques des
17
https://paca.enercoop.fr/sites/default/files/CP%20-%20Lancement
ProjetPV StPons.pdf
50
énergies renouvelables. Par conséquent, EMU fera
de l'information et de la sensibilisation auprès des citoyens, en leur
apportant l'expertise qu'ils ont glanée au travers de leurs
expériences. Le manque de moyens et de volonté politique pour
accompagner ces initiatives obligent la SCIC à élargir son champ
d'actions. De fait, EMU discute aujourd'hui des possibilités futures
d'accompagnement et s'intéresse à l'autoconsommation. Ceci peut,
selon eux, arriver plus facilement à l'équilibre financier.
Cependant, l'investissement de départ est pour l'instant au-delà
de ce qu'EMU peut financer, bloquant les projets par manque de moyens. Il
n'empêche qu'elle peut accompagner les particuliers qui envisagent cette
solution, elle travaille même à une possibilité de
financement via le mouvement « Énergies Partagées
» (Président de EMU, juillet 2019).
Un projet est aussi en discussion sur l'ancienne caserne
militaire du 11ème BCA. Cette caserne, fermée le 10
juin 2009 suite à la nouvelle carte militaire voulue par le gouvernement
Fillon, constitue un espace d'ex bâtiments publics intéressantes,
compte tenu de l'importance de la surface. Ce projet se ferait sur le toit de
la nouvelle caserne des pompiers qui s'est installées dans les lieux
récemment.
Enfin, EMU réfléchit à la
possibilité d'effectuer une levée de fonds citoyenne qu'elle
injecterait dans deux projets de photovoltaïques aujourd'hui en passe
d'être réalisés :
? Un projet à Saint Pons d'une centrale de 1 hectare,
soutenu par la mairie et géré par Enercoop ;
? Un projet sur un terrain qui appartient à une
association à Jausiers.
Investir des fonds citoyens dans ces projets permettrait aux
investisseurs locaux d'avoir des voix et une possibilité d'influer
à leur échelle. Les initiatives citoyennes des petites villes
peuvent ainsi trouver intéressant de se greffer à des projets de
grands groupes tels que celui d'Enercoop. La rentabilité, les
compétences et la réalisation sont effectuées par Enercoop
et EMU, via ses fonds citoyens, peut entrer au capital et avoir un pouvoir de
décision. Certes celui-ci sera moins important que si elle avait
mené le projet d'un bout à l'autre, mais c'est un compromis
nécessaire à la poursuite des projets d'énergies
renouvelables, en attendant de pouvoir débloquer des aides ou plus de
fonds citoyens.
J.-M. PAYOT, au niveau de la CCVUSP, s'attarde davantage sur
les documents directeurs qui pourraient harmoniser le développement et
le rendre par conséquent plus fluide, plus efficient. Il observe que les
gros projets du territoire sont de plus en plus portés par la CCVUSP au
détriment des communes. Il n'est pas rare que la mairie fasse appel aux
compétences de la CCVUSP, comme par exemple avec la GEMAPI (Gestion
des Milieux Aquatiques et la Prévention des Inondations), pour
laquelle la mairie consulte la CCVUSP. Il se peut aussi que des projets
situés dans des communes différentes s'entrechoquent. Cela est
contreproductif et nécessiterait la mise en place d'un document
directeur qui permettrait de planifier le territoire de manière plus
intégrée (Élu au conseil communautaire de la CCVUSP,
juillet 2019). Dans le cadre de l'AVAP, un tel document directeur a
été réalisé concernant la pose de panneau
photovoltaïque dans la Vallée de l'Ubaye. Appelé «
Étude d'approfondissement pour l'intégration des panneaux
solaires photovoltaïque dans le secteur S2 » (2017), il fait des
simulations visuelles en édictant quelques règles pour que la
pose de panneaux solaires n'aille pas à l'encontre de la protection
du
51
patrimoine. L'important est d'éviter l'effet de «
surépaisseur » en les intégrant au toit et en choisissant
des teintes sombres et identiques à celle des panneaux solaires. De
plus, il est rappelé l'interdiction totale de panneaux solaires sur les
bâtiments d'intérêt patrimonial. Ainsi, cela rappelle les
difficultés rencontrées par EMU qui voulait équiper le
toit de l'école communale. Cependant, l'AVAP a fait des simulations
visuelles allant dans le sens d'une acceptation des panneaux
photovoltaïques sur de nombreux bâtiments de Barcelonnette.
Étant donné qu'aucune interdiction n'a été
émise, l'AVAP soutient la pose de panneaux solaires et émet
même des recommandations afin d'harmoniser leur développement.
Figure 9 - BARCELONNETTE, DEPUIS LA ROUTE COMMUNALE
RELIANT LE MAS FABRE AU PRA
SOUBEYRAN
Figure 10 - VUE SIMILAIRE AVEC POSE DE PANNEAUX
PHOTOVOLTAÏQUES SUR CERTAINS BATIMENTS
Source : Étude d'approfondissement pour
l'intégration des panneaux solaires photovoltaïque dans le secteur
S2,
2017
Le constat est qu'aujourd'hui, Barcelonnette ne peut pas vivre
et se développer sans les autres communes du territoire. De fait, la
commune doit articuler ses projets de
52
transitions durables entre tous les acteurs et les
différentes strates politiques. La commune, la CCVUSP et le Pays SUD
sont trois entités qui peuvent se coordonner dans le but d'oeuvrer dans
une même direction. Pour cela, il est important de définir le jeu
et le rôle des acteurs. Le développement territorial
nécessite d'avoir une vision collective du territoire. De fait,
l'intégration des communes dans un bourg-centre en regroupant les
communes semble une option intéressante (Élu au conseil
communautaire de la CCVUSP, juillet 2019). Il est persuadé de la
pertinence de l'échelle intercommunale. Coralie SEWERYN abonde dans ce
sens, en émettant tout de même des réserves. La discussion
sur l'échelle à laquelle les équipements doivent
être gérés est allée dans le même sens que la
CCVUSP, à savoir la possibilité de passer les équipements
à l'échelle communale. Cependant, cela peut générer
de nouvelles problématiques. Par exemple, Saint-Pons est une commune qui
a un réseau d'eau et d'assainissement bien entretenu. Cependant, en
admettant que ces équipements soient gérés collectivement
par l'intercommunalité, Saint-Pons se retrouverait dans l'obligation de
financer les travaux de certaines communes voisines comme Enchastrayes qui ont
pris du retard dans la rénovation de leur réseau. De fait,
l'idée d'imposer une mise à niveau à l'échelle
communale avant de prendre ces mesures à l'échelle intercommunale
a été émise, notamment par le Pays S.U.D., afin de ne pas
faire porter le coût de ces aménagements à tout le monde.
Ces discussions concernant la pertinence de l'échelle se heurtent
à de nombreux questionnements concrets comme ce dernier, et doivent
être mûrement réfléchis afin de permettre au
territoire d'évoluer d'une manière harmonieuse vers des objectifs
communs.
53
CONCLUSION
Sur la base des réponses obtenues aux entretiens, il
est possible de dresser un panorama des forces et des faiblesses liées
à la transition durable dans les petites villes. Il est clairement
apparu que les difficultés se concentrées sur des manques de
moyens et de compétences, caractéristiques qui font souvent
défaut aux petites villes.
Compte tenu des réponses, nous avons pu identifier les
deux principales raisons qui peuvent bloquer les projets, voire même
rendre leur réalisation impossible. Le manque de moyens est le principal
obstacle à tout projet, car l'embauche de personnes compétentes
dans les domaines recherchés découlent de moyens suffisants. Or,
sans cette possibilité, il faut redoubler d'ingéniosité et
savoir solliciter de l'aide extérieure. Cela rend aussi la recherche de
subventions cruciales et cela peut, comme nous l'avons vu pour
l'éclairage public, être à la base du projet. Ainsi, selon
les subventions accordées, les pouvoirs publics vont adapter leurs
projets afin de bénéficier de ces fonds.
Le manque de moyens met en exergue la question des
compétences dans les territoires ruraux ou de montagne. Si les communes
sont aujourd'hui à même de recruter une personne qualifiée
pour monter en compétences, il semble primordial de mener des actions de
sensibilisation ainsi que des formations afin de former le personnel en place.
La transversalité du développement durable à toutes les
politiques nécessite par conséquent la montée en
compétence de l'ensemble des élus et décideurs locaux.
Par ailleurs, il n'est pas aussi facile de diviser les
investissements par secteur comme cela pourrait être fait dans une ville
plus conséquente. Le fait que Barcelonnette soit contrôlée
par la Cour des Comptes ne permet pas de dissocier l'urgence de
rééquilibrer les comptes avec la tenue de projets de transition
durable. De fait, nous observons que les investissements sont massivement faits
dans le secteur du tourisme et qu'ils ne revêtent pas de caractère
écologique particulier. L'objectif étant de viser une
rentabilité à court terme qui assurerait la
pérennité de la vallée. Les questions de tourisme durable,
notamment en stations de ski, sont remises à plus tard. Le raisonnement
se fait à court terme tandis que les projets écologiques visent
des échéances à 20 ans minimum. Cette différence de
temporalité fait passer la rentabilité immédiate avant les
investissements durables. Cela est recevable car une ville durable est une
ville qui est écologiquement, économiquement et socialement
viable, aucun de ces piliers ne peut être mis de côté dans
l'optique d'un développement vertueux sur le long terme.
L'avenir est à la réflexion, comment faire de
Barcelonnette une ville économiquement saine et écologiquement
ambitieuse ? Les acteurs vont devoir se rapprocher, s'entretenir, se partager
les tâches et les compétences. Les strates politiques, comme le
rappelle J.-M. PAYOT, compliquent les choses en ramifiant les discussions, en
divisant les responsabilités. Il est peut-être nécessaire
aujourd'hui de fluidifier les échanges entre ces strates, d'ouvrir leurs
« frontières » pour aller vers plus de collaboration. En
l'absence de moyens, Barcelonnette devra utiliser toutes
54
les compétences et unir toutes les volontés pour
parvenir à se rapprocher de son objectif de base, l'autonomie
énergétique en 2040.
55
LISTE DES FIGURES
Figure 1 - CARTOGRAPHIE DU PAYS S.U.D. 19
Figure 2 - SITES NATURA 2000 ANIMES PAR LA CCVUSP 22
Figure 3 - CARTE DU PARC NATIONAL DU MERCANTOUR 23
Figure 4 - CONSOMMATION FINALE DE CC VALLEE DE L'UBAYE -
SERRE-
PONÇON 24 Figure 5 - PROPORTIONS D'ENTREPRISES PAR
SECTEURS D'ACTIVITES (EN
% DES ENTREPRISES TOTALES) 25
Figure 6 - EXTRAIT DE LA CHARTE FORESTIERE TERRITORIALE 31
Figure 7 - PROJETS DE DEVELOPPEMENT DURABLES REALISES PAR LA
VILLE
DE BARCELONNETTE 35 Figure 8 - LES ATTENTES DES ACTEURS DE
BARCELONNETTE A PROPOS DU
VOYAGE 37 Figure 9 - BARCELONNETTE, DEPUIS LA ROUTE
COMMUNALE RELIANT LE
MAS FABRE AU PRA SOUBEYRAN 51 Figure 10 - VUE SIMILAIRE
AVEC POSE DE PANNEAUX PHOTOVOLTAÏQUES
SUR CERTAINS BATIMENTS 51
1
ACRONYMES
AMAP - Association pour le Maintien d'une
Agriculture Paysanne
AVAP - Aire de mise en valeur de
l'Architecture et du Patrimoine
CCVUSP - Communauté des Communes
Vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon
CFT - Charte Forestière de
Territoire
CLAVAP - Commission Locale de l'AVAP
CSTB - Centre scientifique et technique du
Bâtiment
EMU - Énergies Modernes Ubaye
EnR - Énergie renouvelable
ESS - Économie Sociale et Solidaire
FEDER - fond Européen de
Développement Régional
ICLEI - International Council for Local
Environmental Initiatives
PADD - Projet d'Aménagement et de
Développement Durable
Pays S.U.D. - Pays Serre-Ponçon Ubaye
Durance
PAT - Plan d'Approvisionnement Territorial
PCAE - Plan Climat Air-Énergie
Territorial
PLU - Plan Local d'Urbanisme
SCIC - Société
Coopérative d'Intérêt Collectif
TEPCV - Territoire à énergie
positive pour la croissance verte
TEPOS - Territoire à Énergie
Positive
ANNEXES
Evolution de la taohe urbaine
Village de Barcelonnette et ses abords
|
E5
|
La Oçha urbaiio a 4I d J1rria varrrr
unl1ssu · aonbnudLneauparncleffeu rrrair* 5 DM
Ir.', les aorlelnUtdarls ALarl1 distentes entre IiireS de nlolnb de 50
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La dada de t3ons,urr ana did estinrda a perir
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Evolution da la Mt ho urbaine
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§ antre 1969 et 199) (.Si ,1 ha = 1115,41
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§
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antre 1991 et 1999 (.1S he = 123,4 he) antre 24)) et
201 e (.11,3 ha = 134,7 Ita}
§ date de canelruolion non connue (9,7 ha Total
den Zbi,Aie urbEeie eS - 144,4
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10
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taalkallan DL7r.fa1L TAÇAFJAA/ A -
ÇRr1RDfi$t1!". 7achas IIICRIfl . PLI '!2 ta
·
YwLMERE f1301. PFIEFET DES
üPES ·
4Nr ·
1111
jZNIEFFtypel
ZNIEFF type2
Forêt de protection
Espace Naturel Sensible
Monument historique
Prélèvements AEP, objet d'une DUP
Données ARS 2012
· Source
C. Puits dans la nappe
· Forage
· Eau de Surface
p ·f,, LLe Chaielas
Ii · . Monument aux mort z
fi
2dela.uerrede1914191,-,,R
t` 4MA Ancien cau ent des Dominicains".
Toon da l'Ho a
s ~`` nl~~A$ryVilia Bleue /
Bois de la Chau
Foret deyrotection
-AEP: alimentation pour Peau potable - ARS : Agence
régonale de santé - AP : arrêté
préfectoral
DUP : déclaration d'utilité publique
- ZNIEFF : zone naturelle d'invenatire écologique,
faunistique etfloristique
-Forèts Domaniales du Riou Bourdou
ei du Berard - tète de Crouès - Costebelle
·
1F.
· E:
·
·
·
:Wallons des Granges Communes, de Pelouse,
te Clapouse et des Terres Pleines - massif de l'Empelot
rmontagne dc l'Alpe - crètes et versant du Chevalier, du
Chareau de Gendarme et du Pain de Sucre
Périmètre de protection AEP
· Décharge
Limite communale
RATURA 2000,\
f
j
1
M
Y11PUDIit5R FW4cetc
PREFET DES ALPES- DE-HAUTE-PROVENCE
Direction Départementale des Territoires
LA CASSÉ/4 a ·
. ·b
t. ,LES ISSARTS SUPERIEURE--,
LA GOUAGNE r :^
Échelle: I cm _ 250 m en A3
Sources : IGN BD CARTO - SCAN25
DREAL PACA envir 2015 -ARS AEP 2006 et DUP 09/2012
CGO4 Décharges 2015 ENS 2014 STEP 2015 - PNRL zone
silence Réalisation DDT/SUCT/CAT/CC - Carte 06/2015 envir.wor
2
Equipement, zones protégées et
d'inventaire
1
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Sites web
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6
http://www.natura2000.fr/natura-2000/qu-est-ce-que-natura-2000
https://www.agence-france-energie.fr/edf/barcelonnette-04400/
http://museoscope-du-lac.com/fr/historique-barrage-serre-poncon.html
http://www.barrages-cfbr.eu/BackUp/Info/documentation/texte/col2003/col2003-s2-p123.pdf
http://rurener.eu/
http://alpesdusud.alpes1.com/news/alpes-de-haute-provence/68568/alpes-de-haute-provence-pres-de-600-000-euros-investis-dans-l-eclairage-public-a-barcelonnette
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