Université Paris-Saclay UVSQ
Année académique : 2019-2020
Communication de crise
Gestion de la crise sanitaire mondiale par le
Gouvernement Marocain
Cas du MEN
|
MEMOIRE
MASTER 2 en POLITIQUES de COMMUNICATION
Parcours action publique
Multimédia et parcours développement des
organisations
Sous la direction de : Monsieur Pascal
DAUVIN
|
Préparé par : Noureddine
IDRISSI
|
Soutenu le 15 octobre 2020
Àla mémoire de ma chère
maman, décédée le jour même de ma première
séance d'encadrement.
Merci d'avoir toujours cru en moi. Merci de m'avoir toujours
encouragé. Repose en paix !
À ma chère petite famille
adorée
Àmes frères et soeurs
À mon cher oncle maternel NAJIB
À tous mes amis
Je tiens à remercier Monsieur Saâd
BENMANSOUR, président du directoire, directeur de la
rédaction et de la publication de la Vie Eco, d'Aujourd'hui le Maroc et
consultant expert en médias politiquespour l'entretien fructueux qu'il
m'a accordé.
Je remercie également Monsieur Patrick
LAGADEC, chercheur spécialiste de la gestion du risque et de la
gestion de crise, directeur de recherche honoraire de l'École
polytechnique et consultant conférencier sur le pilotage des situations
complexes et chaotiques pour l'interview qu'il m'a accordée.
Mes remerciements vont aussi à mon directeur de recherche
Monsieur Pascal DAUVIN pour ses précieux conseils.
Un grand merci à Monsieur Nabil EDDAHAR
pour ses recommandations.
Je tiens à témoigner toute ma reconnaissance
à tous les enseignants du Master 2en Politiques de
communication.
Merci à ma charmante nièceHajarFILALI
ANSARI, jeune réalisatrice, pour son professionnalisme et la
qualité de son travail.
Je ne remercierai jamais assez les membres de ma chère
petite famille : Faty, Moulay IDRISS et
RHITApour leurs encouragements et tout le soutien qu'ils m'ont
apporté.
« Comment préparer les dirigeants pour qu'ils
puissent assumer leurs responsabilités quand ils se retrouvent
confrontés à cette «matière noire»
déboussolante de la crise majeure dans nos univers désormais
chaotiques et inconnus ? »
Patrick LAGADEC
Le gouvernement Marocain a mis en place un
dispositif impressionnant pour gérer la crise sanitaire liée au
Covid-19. Dès l'enregistrement du premier casconfirmé de
contamination au nouveau coronavirus, le ciel aérien est fermé,
les frontières terrestres et maritimes sont verrouillées, le
confinement et les mesures préventives sont
décrétés afin d'endiguer la pandémie.
Trois ministères sont sous le feu des projecteurs :
le Ministère de la Santé, le Ministère de
l'Intérieur et celui de l'Enseignement. On assiste à un vrai
travail de fourmi.
Au Ministère de la Santé, tout le personnel
médical est sur le qui-vive. Une campagne pédagogique de
communication de crise est véhiculée sur tous les médias
classiques et les réseaux sociaux avec des contenus et des messages
simples et clairs.
Le Ministère de l'Intérieur, les agents de
l'autorité et les forces de l'ordre jouent un grand rôle de
sensibilisation auprès de la population et maintiennent le respect du
confinement et des gestes barrières.
Quant au Ministère de l'Enseignement, il n'a pas
hésité à fermer toutes les écoles et les
universités et à mettre en place l'enseignement à
distance.
La gestion de la première phase de la crise sanitairepar
le Royaume a été saluée dans le monde entier. Des experts
en communication de crise et l'Institut Montaignes'accordent pour
l'ériger en modèle de gestion de l'épidémie.
Cependant ce véritable « cas d'école »
est en passe de devenir un mauvais élève.
En effet, le relâchement du gouvernement est notoire lors
de cette deuxième phase de gestion de la pandémie. Des
décisions « nocturnes » de dernière minute
et un manque d'information flagrant sont en train de
décrédibiliser la cellule de crise.
Les stratégies du MEN, en l'occurrence le e-learning, ne
tiennent pas compte d'une frange de la Société qui ne
possède pas les moyens de s'acheter un ordinateur, encore moins une
tablette ou un smartphone.
MEN : Ministère de l'enseignement
OMS : Organisation des Nations Unies
HCP : Haut-commissariat au plan
Q&S : Questions and answers (Questions et
réponses)
OPA : Offre publique d'achat
CNSS : Caisse nationale de la sécurité
sociale
TPE : Très petites entreprises
PME : Petites et moyennes entreprises
FAR : Forces armées royales
Mooc : Massive open courses (cours scénarisés
interactifs et séquencés)
PISA : Program for inernational student assessment
OCDE : Organisation de coopération et de
développement économique
MRE : Marocains résidents à
l'étranger
PIB : Produit intérieur brut
CSEFRS : Conseil supérieur de l'enseignement de la
formation et de la recherche scientifique
Remerciements..............................................................................................................................3
Résumé...........................................................................................................................................5
Liste des
abréviations....................................................................................................................6
Introduction.....................................................................................................................................8
Chapitre 1 : La communication de crise : objectifs
et enjeux...................................................10
1.1. Définition et concepts de crise
1.2. Histoire de la communication de crise
Chapitre 2: La gestion de la crise sanitaire
mondiale par le Gouvernement Marocain.........22
2.1. Cas du Ministère de
l'Enseignement.......................................................................................24
Chapitre 3 : Bilan de la gestion de la
communication de
crise...................................................27
Conclusion.......................................................................................................................................31
L'avis des spécialistes
3.1. Entretien avec Saâd
BENMANSOUR.........................................................................................33
3.2. Entretien avec Patrick
LAGADEC...............................................................................................36
Bibliographie......................................................................................................................................38
Annexes................................................................................................................................................41
« La crise est une sensation stimulante. Il faut
simplement lui enlever le goût de la catastrophe. »Max
Frisch
Tchernobyl, Fukushima, Katrina, crise des
subprimes, anthrax, le Grand Boycott Américain ou encore la Covid-19,
les crises mondialesse multiplient et deviennent de plus en plus
imprévisibles, graves et extrêmementdangereuses à
gérer.À croire que nous évoluons dans un monde
apocalyptique et chaotique. Tous les experts de la communication de crise,
notamment l'éminent Patrick LAGADEC que nous avons eu la chance
d'interviewer, s'accordent pour dire que nous devons nous attendre à
d'autres crises, d'autres épidémies dans le futur.
Le monde doit se préparer à « des gerbes
de crises majeures concomitantes, d'origines et de natures différentes,
toutes susceptibles de brouillage et de coagulation, susceptibles de
déclencher des vagues scélérates, monstrueuses et
imprévisibles » nous confie LAGADEC.
Parent pauvre de la Communication, la
communication de crise a été fort longtemps
négligée par les entreprises Marocaines. Cependant à la
veille de la pandémie sanitaire mondiale, nombreuses sont les
organisations et institutions qui ont été contraintes à se
doter des meilleures stratégies et outils pour assurer une communication
de crise optimale avec l'ensemble des parties prenantes.
Il faut dire que la gestion de la communication de crise lors
de la Covid-19 s'est imposée comme une problématique largement
d'actualité. En effet, sa mauvaise gestion peut impacter n'importe
quelle entreprise et par conséquent conduire définitivement
à sa disparition.
Pour éviter cette dérive, l'entreprise et ses
principaux acteurs doivent être préparés à
gérer toutes sortes de crises qui peuvent surgir à n'importe quel
moment.
Face à la crise sanitaire inédite de la Covid-19,
toutes les institutions de l'Etat, aujourd'hui plus que jamais, sont
contraintes de préparer en amont un plan d'urgence et de revoir leur
communication interne et externe, vu l'impact non négligeable sur
l'économie marocaine. (Le secteur du tourisme est le premier à
être touché de plein fouet)
Ces organisations doivent faire preuve de transparence
vis-à-vis de leurs collaborateurs, professionnels et entreprises en leur
expliquant à temps la situation réelle et en les informant sur
l'évolution de la crise.
Pour cela la communication doit être transparente et
suffisamment appuyée sur des outils efficaces. Surtout quand on sait que
la crise sanitaire actuelle est un sujet délicat que l'on doit
gérer dans une durée indéterminée.
En tant qu'étudiant et communiquant, la communication de
crise représente pour nous un véritable champ d'investigation qui
nous interpelle et nous passionne.Cela peut paraître contradictoire mais
la crise sanitaire actuelle nous offre une véritable opportunité
pour nous pencher sur une problématique et des questions qui nous
tiennent à coeur :
Le plan de communication de crise déployé par le
gouvernement marocain au lendemain de la pandémie.
Quelle stratégie a été adoptée par le
Ministère de l'Enseignement pour faire face à la crise sanitaire
?
Quels contenus et messages ont été
véhiculés aussi bien en interne qu'en externe à l'adresse
des différentes parties prenantes ?
Quelles sont les mesures de sécurité
déployées afin de protéger et de rassurer parents,
enseignants et élèves?
Quels outils de travail et plateforme ont été mis
à la disposition des collaborateurs pour servir les enseignants, les
étudiants et les élèves à distance ?
Quels moyens de communication ont été mis en oeuvre
pour répondre aux différents interlocuteurs ?
Enfin, le gouvernement marocain a-t-il prévu dans son
calendrier un bilan de gestion de communication de crise ?
C'est à toutes ces questions et bien d'autres que notre
mémoire de fin d'études prétend apporter des
réponses.
Pour ce faire, nous avons commencé par récolter et
trier des sources d'information sur notre sujet d'étude, notamment
desouvrages, des articles universitaires, des rapports et des étudesafin
de mettre en place une revue littéraire qui servira de base
théorique à notre analyse.
Notre sujet d'étude porte sur la gestion de la
communication de crise. Nous voulons déterminer dans quelle mesure les
stratégies mises en place par le gouvernement marocain pour gérer
la crise sanitaire ont été efficaces. Nous nous attarderons sur
le cas du MEN et son plan d'action Covid-19.
Pour étudier et analyser cette problématique, nous
avons opté pour la méthode empirique complétée par
une recherche bibliographique récente relative à notre
thématique et qui comprend des ouvrages, des articles universitaires,
des articles de presse et de revues spécialisées. Cette recherche
s'est ensuite couplée à deux entretiens (directif et
semi-directif) d'environ 45 minutes chacun avec d'éminents
spécialistes de la communication de crise et expert en politiques de
communication et médias.
Ce mémoire de recherche comprend troischapitres :le
premier consiste en une définition des concepts liés à la
communication de crise et sa stratégie, le deuxième estune
réflexion et une analyse qui consiste à étudier d'une part
la gestion de la communication de crise du gouvernement marocain et d'autre
part l'efficacité de son plan d'actions avec une étude de cas,
celle du MEN.
Enfin, letroisième et dernier chapitre est un bilan de la
gestion de la communication de crise par le Royaume.
Etant donné que la problématique de notre sujet de
recherche est liée à la crise sanitaire mondiale, nous avons
réalisé deux entretiens auprès d'éminents experts
et consultants en la matière. Nous avons pu recueillir le
témoignage de Patrick LAGADEC, chercheur spécialiste de la
gestion du risque et de la gestion de crise, directeur de recherche honoraire
de l'École polytechnique, consultant et conférencier sur le
pilotage des situations complexes et chaotiques et l'analyse de Saâd
BENMANSOUR, , consultant expert en médias politiques, président
du directoire et directeur de la publication et de la rédaction
d'Aujourd'hui le Maroc et de la Vie Eco.
Chapitre 1
La communication de crise : Objectifs et
enjeux
|
« Les crises de demain sont souvent le refus des
questions d'aujourd'hui. »Patrick LAGADEC
Pour Alex Mucchielli, la communication de crise est une
méthodologie d'accompagnement d'individus et de groupes
confrontés à des situations qu'ils doivent dépasser.
La communication de crise est une branche de la communication
d'entreprise. Elle dépend entièrement en matière de
messages, cibles et valeurs de la stratégie de communication globale de
l'entreprise. En gérant les crises, elle repose sur une stratégie
institutionnelle si la crise atteint à l'image globale de l'entreprise,
coordonne avec la communication produit s'il s'agit d'une crise ayant relation
avec les biens et services que produit l'organisation, et se conjugue à
la communication financière au cas où le cours de l'action sera
influé.
La communication de crise regroupe à la fois, la
communication interne, la communication institutionnelle, les relations presse
et les relations publiques.
La communication de crise se base sur de multiples aspects et
doit être considérée dans sa globalité.
Mais avant tout, la communication de crise c'est la mise en
oeuvre de techniques éprouvées, de stratégies
réfléchies, qui ne laisse aucune place à l'improvisation,
au hasard, à l'intuition ou à l'à peu près. Sans
être une science exacte, la communication de crise exige suffisamment de
technicité et de rigueur et doit être traitée par des
professionnels.
Mais la communication de crise c'est aussi un ensemble de
techniques de communication permettant d'atteindre plusieurs objectifs :
· Permettre d'anticiper les crises, voire même les
éviter.
· Éviter qu'un accident ne se transforme en
crise.
· Permettre d'atténuer une crise.
· Proposer l'opportunité d'une sortie favorable
à une crise.
Dans tous les cas, l'objectif majeur de la communication de
crise sera de préserver la crédibilité de l'entreprise ou
de l'institution.
Les enjeux seraient : perte de confiance, méfiance de la
population et des médias, perte de crédibilité des
gestionnaires et des intervenants en situation d'urgence, confusion lors des
interventions, atteinte possible à la sécurité de
l'équipe d'intervention et de la population.
Définition et concepts de crise
Une crise est un processus qui, sous l'effet d'un
événement déclencheur (interne ou externe), met en
évidence une série de dysfonctionnements affectant temporairement
ou durablement un ou plusieurs des aspects suivants d'une organisation
(entreprise ou collectivité) : la sûreté, la santé
humaine, l'environnement, le produit, la réputation, la
pérennité.
La crise est un phénomène qui se produit dans de
nombreux domaines. Elle nécessite une gestion particulière. Dans
certains cas, elle peut être bénéfique et entraîner
un changement important. Actuellement de nouveaux types de crises apparaissent,
entraînant de nouveaux risques plus ou moins importants. Une conjonction
de facteurs peut ainsi donner naissance à une crise parfaite voire
majeure.
Une crise n'en devient réellement une, qu'à partir
du moment où les médias s'en mêlent. C'est pourquoi il est
important d'avoir une bonne communication durant ces périodes et
d'intégrer cette communication au centre de la gestion de crise.
Selon Patrick LAGADEC, une crise est une situation où de
multiples organisations aux prises avec des problèmes critiques,
soumises à de fortes pressions externes, d'âpres tensions
internes, se trouvent brutalement et sur une période longue, sur le
devant de la scène, le tout dans une société de
communication de masse.
Étymologiquement le terme « crise » vient du mot
grec krisis, qui signifie « décider ou distinguer »
c'est-à-dire une réponse à une situation
particulière.
Une crise correspond à la phase ultime d'une suite de
dysfonctionnements qui met en péril la réputation et la
stabilité d'une organisation.
D'autres auteurs mettent plutôt l'accent sur le
caractère déstabilisant de la crise. Ils soulignent la
présence de changements profonds dans les paramètres de
l'environnement humain et physique, de telle sorte que les gens ne savent plus
comment se comporter.
La crise se caractérise par l'intrusion de nouvelles
parties prenantes qui exigent qu'on leur rende des comptes, comme les pouvoirs
publics, les associations de consommateurs... Il convient de noter l'importance
des enjeux que peut avoir ce bouleversement en termes d'image mais
également de chiffre d'affaires, de motivation des salariés ou
encore de méfiance des fournisseurs à l'égard de
l'organisation. La crise se matérialise par une saturation des
capacités de communication face à l'afflux des demandes.
Pour Thierry Libaert, directeur scientifique de l'Observatoire
international des crises et chercheur au LASCO, la crise se caractérise
par la présence d'acteurs pouvant être inhabituels (la presse, les
élus locaux, les pouvoirs publics, les associations, la justice...), un
flux inhabituel et surdimensionné d'informations. Elle entraîne
une mise sous tension généralisée due à
l'accélération du temps selon la nature de la situation (urgence
accrue...).
Pour ce chercheur, la crise est la phase ultime d'une suite de
dysfonctionnements mettant en péril la réputation et la
stabilité d'une entreprise.
La plupart du temps, une crise engendre des incertitudes et
favorise la circulation de rumeurs.
La crise touche aux quatre fonctions essentielles du management
:
· Le pilotage (détermination de la stratégie,
des objectifs) ;
· La maintenance (la gestion de l'entreprise, la production,
la mise en oeuvre des projets) ;
· Le leadership (les valeurs, les rites, les symboles) ;
· L'interface (surveiller l'environnement interne et
externe)
Typologies des crises
Il existe de nombreuses typologies de crise. La plupart sont
axées sur le type de causes à l'origine de la crise. Les
typologies sont utilisées principalement dans la phase d'anticipation,
afin de recenser l'ensemble des crises possibles à l'intérieur
d'un domaine d'activité. Les crises peuvent être de nature :
· sociale : grève, blocage d'usine, suicide sur
le lieu de travail
· financière : krach boursier, OPA sauvage
· technique : explosion, incendie, crash, naufrage ;
· commerciale : défaillance dans la
qualité du produit
· environnementale : pollution
· sanitaire : intoxication alimentaire liée
à un produit, pandémie ...etc.
· réglementaire : imposition de contraintes sur
l'activité de l'entreprise
· judiciaire : procès pour abus de biens
sociaux
· réputationnelle : rumeur,
désinformation
· économique : effondrement des activités
économiques suite à une innovation concurrentielle.
Le Cycle de vie d'une crise
1- Phase de gestation : Cette phase est
caractérisée par une série de dysfonctionnements et
d'erreurs qui sont autant de signaux. Si ces signaux sont
détectés, compris et pris en compte par l'organisation et ses
dirigeants, la crise peut être anticipée et ses effets
minimisés.
2- Phase aiguë : Durant cette phase,
il est essentiel d'avoir un suivi presse pour savoir comment réagir aux
propos des médias. Il convient d'opérer un travail de
rapprochement entre les informations, les acteurs et la surcharge de
médiation pour garder une vision globale de la situation.
3- Phase chronique : Lors de cette phase,
les médias se focalisent sur le sujet de la crise. La durée du
traitement médiatique dépend alors des autres sujets
d'actualité pouvant détourner l'attention des médias.
4- Phase de cicatrisation :Le cycle de vie
de la crise s'achève. On constate alors une atténuation de la
crise, les médias s'en désintéressant depuis un moment.
Cette phase ne doit pas être négligée : la crise peut
à tout moment resurgir.
L'organisation de la communication de crise :
La gestion de la crise se gagne avant son émergence. C'est
pour cela que l'entreprise doit se focaliser sur l'avant crise où
l'anticipation est primordiale. Pour ce faire, l'entreprise doit fonder sa
communication sur une structure organisée avec des outils concrets.
Dans une perspective de prévention et de
préparation, les outils suivants doivent être conçus, mis
en oeuvre et évalués :
A.La cellule de crise : elle est composée
de 15 personnes au maximum. Il faut prévoir 3 types de composantes :
L'animateur : il doit être un décideur ayant une
délégation de pouvoir ; il conduit les débats, anime et
gère le temps.
Les experts : chargés de recueillir et d'analyser les
informations techniques. Ils doivent avoir une formation juridique et
financière.
Le responsable de la communication : il assure le rôle de
l'intermédiaire entre l'environnement externe de l'entreprise et la
cellule de crise. Il doit également traduire en messages de
communication les décisions prises par la cellule.
B. Le recensement : une liste exhaustive de
toutes les crises potentielles qui peuvent frapper l'entreprise -avec leurs
probabilités- classées en familles. L'entreprise va travailler
sur les scénarios de crise les plus probables.
C. La Simulation : après le recensement
des crises, l'entreprise doit faire des simulations des crises afin de
renforcer sa capacité à répondre rapidement. Elle doit
impérativement prévoir les données de base à donner
considérant différents types de crise.
D. La check-list : en situations de crise, le
moindre détail compte et a des conséquences. Il est convenable
alors de tout prévoir à l'avance : les clés des locaux,
les mots de passe d'accès aux données et aux systèmes, les
numéros de téléphone des personnes internes et externes
à contacter lors d'une crise ... etc. Cet outil vient pour
répondre à un besoin de rapidité. Après avoir
fondé une structure matérielle de la communication de crise,
l'entreprise doit -à travers la cellule de crise- concevoir un plan de
communication de crise prenant en considération l'avant, pendant et
après crise, et adopter une stratégie de communication de
crise.
La stratégie de communication de crise
:
Thierry Libaert présente différentes
stratégies de communication de crise :
La reconnaissance, le projet latéral, le refus.
La reconnaissance :
Cette première stratégie consiste à accepter
la crise et ce, le plus rapidement possible. "Dans cette stratégie,
explique Didier Heiderich, si la presse dévoile la crise en
devançant l'entreprise, c'est que la communication de celle-ci est
mauvaise et que la crise ne lui appartient déjà plus. Pour mener
l'opération, l'entreprise doit donc aller vite et être en mesure
de déterminer rapidement si elle est compétente par rapport au
moteur de la crise. Ce moteur peut être interne, par exemple lié
aux produits de l'entreprise, ou externe, par exemple lié à un
contexte politique. Dans chacun des cas, l'axe de communication ne sera pas le
même."
De manière générale, la stratégie de
la reconnaissance s'appuie sur une communication claire et ferme.
Selon le contexte, plusieurs alternatives s'offrent à
l'entreprise :
- Reconnaître complètement la situation et sa
responsabilité. Dans ce cas, assumer les réparations des dommages
subis apporte un avantage au point de vue juridique, mais aussi
médiatique.
- Exprimer son incompréhension, si l'entreprise ne
connaît pas les raisons à l'origine de la situation.
-Elargir la responsabilité à des acteurs externes,
comme les autorités de régulation.
-Dissocier les choses en se délestant des responsables
s'il le faut.
-Contingenter la crise sur un objet, un lieu, un temps. Le but
est alors d'éviter d'élargir le phénomène à
d'autres produits, d'autres marques, d'autres usines...
Encore peu employée, cette stratégie de la
reconnaissance est pourtant "l'une de celle qui fonctionne le mieux", selon
Didier Heiderich. Difficile en effet d'avouer sa responsabilité pour une
entreprise. Mais le faire, c'est jouer la carte de la transparence et
acquérir une crédibilité auprès des
différents publics. Cette stratégie permet également
d'éviter une remontée ultérieure d'informations
contredisant les premières déclarations. Une situation dans
laquelle l'entreprise a énormément à perdre sur le plan de
l'image.
Le projet latéral
Développée par Thierry Libaert dans son livre
Communication de crise (Dunod, 2001), cette stratégie
cherche à modifier l'angle de vue de la crise. "Mais elle
doit pouvoir être fondée sur la réalité et des faits
concrets pour réussir à déplacer le lieu de débat",
précise Didier Heiderich.
Pour mener à bien un projet latéral,
différentes tactiques sont possibles :
-Contre-attaquer et dire à qui profite les faits, soit le
plus souvent au concurrent. Cette stratégie est
utilisée notamment par les grandes entreprises
françaises qui trouvent alors dans la concurrence internationale un
alibi naturel.
-Reporter la responsabilité à l'extérieur,
en orientant les faits vers l'administration, le politique...
-Minimaliser sa communication, ou communiquer plus fortement sur
un autre registre.
- Souligner le fait que le pire a été
évité et que la situation aurait pu être largement plus
grave si l'entreprise n'avait agi de telle ou telle manière.
Le projet latéral, qui consiste à déporter
la crise en dehors du champ de l'entreprise, doit impérativement
s'appuyer sur des éléments tangibles. Dans le cas contraire, son
utilisation peut s'avérer bien plus dangereuse que la crise
elle-même.
Le refus
La stratégie du refus consiste à affirmer qu'il n'y
a pas de crise. "Il s'agit alors d'une posture que l'entreprise doit être
capable de tenir", précise Didier Heiderich.
Quatre possibilités s'offrent à l'entreprise dans
ce scénario :
-Garder le silence dès le début de la crise
(stratégie choisie par les autorités russes lors de l'accident de
la centrale nucléaire de Tchernobyl)
-Cesser de parler à partir d'un moment précis et
donc ne plus alimenter la crise.
-Avancer le principe du chaînon manquant, comme dans
l'affaire des paillotes en Corse, où nul ne sait qui a donné
l'ordre initial.
-Minimiser les effets de la crise, à condition
d'être le seul interlocuteur à disposer des données.
C'est
la formule choisie par le gouvernement lors de la canicule de
l'été 2003. Mais les statistiques fournies
par les Pompes funèbres ont enrayé le
scénario.
Les conséquences d'une telle stratégie peuvent
s'avérer extrêmement dommageables, aux niveaux juridique et
médiatique, si les faits ressurgissent à plus ou moins long terme
et avec une nouvelle lecture des événements. Concrètement,
ce scénario du pire se traduira dans la plupart des cas par une perte de
crédibilité.
Avant que l'entreprise n'opte pour une stratégie de
communication de crise, elle doit absolument prendre en considération
les six éléments suivants :
A. La connaissance de la crise : dès le
début, l'entreprise doit posséder l'ensemble des informations
relatives aux causes et aux conséquences de la crise pour se positionner
clairement sur un type de messages ;
B. Les enjeux : l'entreprise doit savoir ce que
la crise peut lui faire perdre. Il s'agit généralement du chiffre
d'affaire, la motivation du personnel, l'image de marque de
l'entreprise...etc.
C. La médiatisation : l'entreprise
procèdera à analyser les caractéristiques des
médias auxquels elle a affaire. On ne s'adresse pas de la même
façon à un journal local qu'à une chaine TV internationale
de large couverture ;
D. Le déroulement prévisible de la crise
: si l'entreprise possède une idée de ce que deviendra
la situation d'ici une période donnée de temps, elle peut
envisager le type de messages à véhiculer. Par exemple, si
l'entreprise prévoit que la crise va se calmer dans une courte
période, elle peut adopter la stratégie du silence ;
E. Les acteurs : l'entreprise doit être
consciente des acteurs se trouvant impliqués dans la crise : les
autorités publiques, les entreprises concurrentes, les médias
etc.
F. Le temps : la crise se caractérise
par l'accélération du temps de la décision et par
l'urgence. L'entreprise doit bien gérer les flux d'information internes
et externes qui s'embouteillent dans de telles situations de pression.
Les 11 commandements de la communication de
crise
a- Avant la crise
1 - Formez-vous à la communication de crise
2 - Créez une cellule de crise, des process
3 - Faites de la veille
4 - Anticipez les cas de crise et prévoyez des
solutions
5 - Préparez votre documentation anti-crise : visuels,
sites web de crise dit « noirs », liste des interlocuteurs, des
ennemis intérieurs et extérieurs
6 - Simulez une crise
b- Pendant la crise
7 - Évaluer la source de la crise et les
différentes stratégies possibles
8 - Réagir à bon moment, ni trop vite, ni trop
lentement
9 - Bien dialoguer avec votre interlocuteur interne ou externe.
Il faut que tous croient en votre bonne volonté et finissent par avoir
confiance en vous. Pas de mensonges, pas de promesses, pas de
bouc-émissaire, pas d'approximation.
10 - Ne pas se laisser déborder. Déterminer
l'urgent et l'important, l'urgent et le non important, le non urgent et
important, le non urgent et le non important.
c- Après la crise
11 - Faites le bilan : qu'est-ce qui a fonctionné ?
Raté ?
Plan de communication de crise
Thierry Libaert définit le plan de communication de crise
comme « un outil opérationnel » fournissant la
programmation et le tableau de bord des actions à entreprendre.
Le Plan de Gestion de Crise doit notamment intégrer les
éléments suivants :
1. Le schéma d'alerte, qui va permettre
de définir clairement pour l'ensemble de l'organisation les
étapes essentielles de transmission des informations ;
2. La cellule de crise, qui a pour but de
définir clairement les différents intervenants de l'organisation
en cas de crise ;
3. Les fiches missions, qui ont pour objectif de
définir le rôle de chacun de ces intervenants en amont, pendant et
en aval de la gestion de crise ;
4. Les fiches outils, qui ont pour but de
favoriser la transmission des informations et le reporting pendant la gestion
de la crise et ainsi de gagner en efficacité ;
5. Les annexes, telles que l'annuaire de crise,
le plan des salles de crise ou encore les plans des sites de repli, qui doivent
permettent à chacun des intervenants de trouver les informations utiles
dont il a besoin pour remplir son rôle au sein de la structure de gestion
de la crise.
Au final, l'anticipation par la mise en place d'une organisation
et d'outils cadrés et maîtrisés par les différents
intervenants doit permettre à l'organisation de limiter la part
d'improvisation et de se mobiliser immédiatement dès la
survenance d'un évènement à caractère
exceptionnel.
1- Définissez les objectifs généraux de
votre stratégie de communication
2- Définissez votre public (Les personnes les plus
touchées par la rumeur ou la crise,
Les personnes les plus influentes pour communiquer vos
messages)
3- Choisissez vos messages clés(Que voulez-vous que le
public entende et retienne ?)
4- Choisissez les canaux de communication
Les actions de communication en situation de
crise
a) Au préalable
Suivi des médias
En situation de crise les relations avec les médias jouent
un rôle fondamental.
Il est donc nécessaire de disposer de moyens efficaces de
suivi des médias afin d'identifier en temps quasi-réel ce qui est
dit ou publié sur l'entreprise.
Il existe des organismes spécialisés dans ce
domaine, il est impératif de les connaître et de savoir comment
les utiliser si nécessaire.
· Identifier les porte-parole et leurs
suppléants.
· Identifier une personne en charge de la
documentation. (En situation de crise, la communication doit s'appuyer en
permanence sur des informations provenant de sources variées) S'assurer
qu'une personne soit disponible pour aller chercher les informations
nécessaires, c'est se donner plus de temps pour l'essentiel :
bâtir une stratégie et construire des messages.
b) Pendant la première heure
· Se procurer le manuel de communication de crise
· Informer le management de l'entreprise si cela n'a
pas déjà été fait
· Informer les pouvoirs publics et les autorités
si nécessaire
· Prévenir les organismes chargés du
suivi des médias
· Mobiliser les équipes de communication
nécessaires
· Se mettre en contact avec les équipes en
charge de la gestion de la crise
· Préparer un premier «statement»
· Commencer un journal de bord.
c) Pendant la deuxième heure
· Si possible envoyer un porte-parole sur le site de la
crise
· Informer le standard, la sécurité et le
personnel sur la possible arrivée de journalistes (rappeler
l'interdiction de répondre directement aux journalistes, renvoyer tous
les contacts vers la communication).
· Contacter les familles des victimes
éventuelles (obtenir des informations sur ces personnes : fonction,
âge, ancienneté,...)
· Préparer un premier Q&A sur la crise
d) Pendant la troisième heure et
ensuite
· Contacter éventuellement les élus
locaux
· Définir une stratégie de communication
de crise
· Préparer un communiqué de presse
· Mettre à jour les Q&A et
«statements» en fonctions des informations
· Maintenir un contact avec les victimes et leurs
familles
· Suivre et analyser les messages repris par les
médias
Les règles de base d'une communication de crise
réussie :
· Soyez présent le plus vite possible sur le
site de la crise
· Un seul porte-parole !
· Soyez aussi clair, franc et transparent que
possible
· Restez-en aux faits
· Parlez uniquement de ce que vous savez - pas de
spéculations !
· Empêchez la diffusion d'informations
incomplètes ou contradictoires
· Adaptez l'information aux personnes à qui vous
vous adressez
· Ne dites que la vérité - pas de
mensonge ni d'omission
· Considérez les groupes d'opposants
éventuels comme des partenaires et non des ennemis
· Expliquez les choses simplement et
précisément
· Assurez-vous de la cohérence entre ce que vous
dites et ce qui est fait
· Evitez les contradictions
Se préparer à la communication en situation
de crise
La préparation et l'entraînement jouent des
rôles majeurs et permettent de se donner tous les atouts pour
gérer au mieux la communication dans des situations souvent
stressantes.
Les exercices les plus courants sont :
La simulation de crise
Elle peut être de plusieurs niveaux. Dans un premier temps
il peut s'agir de tester la rapidité avec laquelle la cellule de crise
se constitue. Ensuite, il est recommandé de faire un exercice de crise
«grandeur nature» régulièrement (tous les 18 mois
environ). Cela permet non seulement de valider la pertinence des outils mais
également de tester la façon dont les membres de la cellule de
crise travaillent ensemble.
(Pour plus d'efficacité, il peut être pertinent de
travailler avec des prestataires extérieurs pour ce type d'exercice)
Le media-training
C'est l'entrainement à la prise de parole face aux
médias. Il est traditionnellement réalisé avec l'aide d'un
prestataire extérieur.
Le choix du porte-parole
Le choix du porte-parole en situation de crise est un exercice
toujours délicat.
Tout d'abord un bon porte-parole doit être volontaire, ou
tout au moins ne doit pas être forcé. Cela se voit
immédiatement lorsqu'une personne a été obligée de
prendre ce rôle et cela donne une image catastrophique. Enfin, et c'est
sans doute le plus important, il aura été bien entendu au
préalable entraîné pour ce rôle.
Communiquer en situation de crise
Une bonne communication de crise repose avant tout sur un parfait
travail d'équipe. Dans la plupart des cas, la crise génère
stress, chaos, confusion; lapression, l'émotion montent rapidement; la
capacité de chacun à prendre des décisions rationnelles,
pertinentes, diminue alors fortement.
Il est indispensable dans ces situations de pouvoir alors se
reposer sur des process quasi-automatiques qui facilitent la mise en place
d'une communication efficace et garantissent que toutes les parties prenantes
soient bien informées et disposent de l'ensemble des
éléments clés pour comprendre la situation.
Evaluation et debriefing
Lorsque la crise est finie, bien souvent le premier
réflexe est de vouloir passer rapidement à autre chose, de
retrouver un fonctionnement «normal». Or, s'il y a bien un domaine
où l'expérience fait fortement progresser, c'est bien
celui-là. L'analyse à posteriori de la communication (messages,
statements, communiqués de presse, Q&A, articles de presse,...)
permet de mesurer concrètement l'efficacité des outils mis en
place et de les adapter en conséquence.
Une évaluation efficace repose sur :
Des interviews des personnes impliquées
· Evaluation de la communication de crise dans son
ensemble
· Ce qui a bien fonctionné ? / Ce qui n'a pas
été efficace
· Rétrospectivement, qu'est-ce qui aurait
dû être fait autrement ?
Une évaluation qualitative et quantitative des actions
menées
· La rapidité avec laquelle l'alerte a
été donnée
· Est-ce que la communication a été faite
efficacement?
· A quelle vitesse, les équipes de crise se
sont-elles mobilisées?
· Combien de temps a-t-il fallu pour faire un Q&A ?
Un statement?
· Comment les médias ont-ils été
gérés?
· Quelle influence a eu la communication sur la
perception qu'ont eu les médias de la situation?
Enfin, n'oubliez pas de clore «symboliquement» la
crise. Il peut s'agir dans un premier temps de remercier tous ceux qui en ont
été les acteurs, puis ensuite de prendre une initiative marquante
(il peut s'agir tout simplement d'un message de remerciement de la part du PDG
à tous ceux qui ont été en première ligne).
Histoire de la communication de crise
Patrick Lagadec estime que la communication de crise s'est
développée dans les années 80 en réponse à
une ouverture des entreprises sur l'extérieur via la diffusion
d'informations.
La communication de crise est entrée dans une nouvelle
ère depuis l'avènement d'internet et en particulier des
réseaux sociaux (Facebook, Twitter...).
Cependant, il est difficile de fixer une date précise
pour caractériser la naissance de la communication de crise.
Présente au début du XXème siècle, elle se retrouve
dans le domaine des grandes opérations financières, et le groupe
Publicis déclare l'avoir mise en oeuvre avec succès en 1968 pour
le groupe Saint-Gobain qui faisait l'objet de la part de BSN (actuellement
Danone) de la première grande OPA hostile.
C'est toutefois dans les années 1980 que la
communication de crise en tant que pratique organisationnelle est reconnue
comme champ de recherche institutionnelle. La catastrophe de Three Mile Island
(1979) et l'affaire du Tylenol (1982) auront d'importantes
répercussions, et les premiers ouvrages seront publiés à
cette époque :
- La civilisation du risque, Patrick Lagadec, 1981
- La société du risque, Ulrich Beck, 1986
- Crisis Management: Planning for the inevitable, Steven
Fink, 1986.
On peut considérer que c'est la catastrophe de
Tchernobyl en 1986, première grande crise à l'échelle
internationale, qui a accéléré les recherches et la prise
en compte d'une nécessité de préparation dans la
sphère industrielle.
La dernière étape émerge aux alentours de
2005, avec la généralisation progressive des réseaux
sociaux. Les crises changent de nature, elles deviennent davantage
insaisissables, imprévisibles et se confondent souvent avec le bad
buzz.
CHAPITRE 2
Communication de crise : Gestion de la crise sanitaire
par le Gouvernement Marocain
|
« Le dirigeant se voit brutalement convoqué
pour un exercice auquel il n'a pas été préparé : le
pilotage hors-piste ! »P. LAGADEC
La lutte contre la propagation du Coronavirus a contraint
l'ensemble des États du monde entier à prendre des mesures
urgentes et exceptionnelles pour faire face aux risques de ce que l'OMS a
qualifié de pandémie. Le Royaume du Maroc n'a pas
dérogé à cette règle et dès l'enregistrement
du premier cas confirmé de contamination au nouveau Coronavirus le 2
mars, (Il s'agissait d'un Marocain résidant en Italie, pris en charge
à l'hôpital Moulay Youssef à Casablanca) il a pris des
mesures draconiennes afin d'endiguer l'épidémie :
- Fermeture des frontières aériennes, terrestres et
maritimes
- Fermeture des établissements scolaires et
universitaires
- Fermeture des lieux de culte, des restaurants et des
cafés
- Confinement sanitaire obligatoire, couvre-feu (dès le 20
mars)
- Port obligatoire du masque et gestes barrières
Le Maroc a jusqu'ici été dans l'anticipation en
prenant des décisions qui relèvent du stade 2 ou 3 alors qu'il
n'en était qu'au stade 1.
Un plan d'action a été rapidement établi par
le gouvernement autour de trois axes : santé, économie et ordre
social.
Sur le plan sanitaire, il s'agit de maîtriser d'urgence la
progression de la pandémie.
Sur le plan socio-économique et face à une
conjoncture économique nationale fortement impactée par la crise
sanitaire, (le Haut-Commissariat au plan a dévoilé le 22 avril
2020, une étude sur l'impact immédiat de la crise : La
croissance économique nationale serait amputée de 8,9 points, au
deuxième trimestre 2020) la création d'un «Fonds
spécial Covid-19 » s'est imposée. Doté d'une
capacité de 3% du PIB, ce fonds social a pour but de soutenir les
secteurs les plus affectés et les populations les plus touchées
par le ralentissement de l'activité économique.
D'après le HCP, une indemnité mensuelle est
octroyée jusqu'à fin juin 2020 au profit des salariés
déclarés à la Caisse nationale de sécurité
socialeen arrêt temporaire de travail, dans les entreprises en
difficulté. Elle a concerné 132.000 entreprises sur les 216.000
affiliées à la Caisse, et près de 900.000
salariés.
Le Comité de veille a également pris un ensemble
de mesures en faveur des TPE et PME touchées par la pandémie (les
entreprises marocaines ont vécu une période de cessation de
fonctionnement sans précédent. En effet, plusieurs
sociétés, industrielles et commerciales, étaient dans
l'obligation de rompre leur activité, et par conséquent leurs
cycles d'exploitation et de financement ont été
profondément impactés par cette crise sanitaire) en facilitant le
financement de l'économie par le système bancaire et en
répondant à leurs besoins en liquidité.
Les stratégies de communication de
crise
Pour éviter d'ébranler la population lors du
déclenchement de la crise sanitaire, le gouvernement Marocain a choisi
de garder le silence dans un premier temps. Un mutisme décrié par
plusieurs organes de presse qui déplorent le manque d'information et
l'absence d'interlocuteur.
Mais suite aux résultats des premiers tests, le
Ministère de la Santé Publique a commencé alors à
publier les chiffres sur les réseaux sociaux et dans les
médias.
Parallèlement, le gouvernement met en place sa
stratégie de gestion communication de crise grandeur nature que l'on
peut appréhender selon deux aspects : communicationnel et
opérationnel.
1-Stratégie de la discrétion
maîtrisée : L'information est communiquée au
compte-goutte pour ne pas déstabiliser la population.
- Fermeture des écoles, du ciel aérien, des
frontières maritimes, confinement, port du masque et gestes
barrières.
2-Stratégie de la reconstruction :
Création d'un fonds Covid-19, indemnisation des démunis.
3-Stratégie narrative : Le but de cette
stratégie est de toucher la fibre émotionnelle de la population,
chercher son adhésion et la rassurer à travers des messages
simples, des capsules audio et vidéo pratiques, diffusées en
Arabe, en Amazigh et en Français sur les chaînes de
télévision, de la radio, dans la presse, sur les portails web
officiels et sur les réseaux sociaux avec un hashtag : # Bkaw fdar
(Restez chez vous !) pour la première phase et # Nbakaw 3la Bal (Restons
vigilants !) juste après le confinement.
Si le traitement des malades à la chloroquine a
suscité un grand débat en France, au Maroc la population a
réagi positivement en faisant entièrement confiance au
Ministère de la Santé. (Mimétisme institutionnel : on voit
ce que fait le voisin Français et on l'imite)
Toujours dans le cadre de son approche anticipative, l'Etat a
mobilisé les FAR pour la mise en place de structures de santé
équipées dans les différentes villes du royaume.
Les forces de l'ordre ont joué un rôle clé,
et ce, dès l'annonce de l'état d'urgence sanitaire. Il y a eu
une mobilisation de l'ensemble des agents d'autorité, mais aussi celle
de l'armée et de la police pour sensibiliser les citoyens et faire
respecter le confinement.
Certains ministres du gouvernement, ont aussi fait preuve de
beaucoup de dynamisme, notamment le ministre de la Santé qui s'est
retrouvé sous le feu de la rampe, celui de l'Intérieur a
été mis sur le devant de la scène et leur collègue
en charge du Commerce, de l'Industrie et de l'Économie numérique
a su tirer profit de la crise sanitaire pour réadapter l'industrie
Marocaine. Quant au MEN, il a réussi la gageure en lançant
rapidement les cours à distance.
Mais Les vrais héros de la lutte contre la pandémie
demeurent incontestablement les médecins et le personnel soignant de
manière générale.
En première ligne dans le combat contre le Coronavirus, le
corps médical accueille les cas suspects, s'occupe du dépistage
des symptômes de la maladie et de la mise en quarantaine pour les
contaminés.
Il participe également à plusieurs campagnes de
sensibilisation avec le concours de certains acteurs associatifs dans presque
toutes les régions. Des campagnes qui ont pour but d'inciter la
population à respecter les gestes barrières, le port du masque,
le respect de la distanciation physique et des mesures d'hygiène.
La pandémie a été maîtrisée
lors de la première phase au détriment de l'économie qui a
accusé des coups durs, notamment dans le secteur du tourisme et de
l'informel.
Érigé comme modèle de gestion de crise
sanitaire par l'Institut Montaigne et plusieurs institutions internationales,
le Maroc a déployé un dispositif impressionnant pour lutter
contre l'épidémie et soutenir l'économie.
Ayant rapidement tiré les enseignements de
l'intensité de la situation en Chine et en Europe, le Royaume a
rapidement mis en place l'état d'urgence sanitaire avec la fermeture des
frontières nationales. Des mesures pour soutenir l'économie et
l'emploi, accompagnées des restrictions aux libertés de
circulation, de réunion et de manifestation ont été
consenties.
Cas du Ministère de l'Enseignement
National
|
« Nous sommes entrés dans une ère de
hautes turbulences et de crises inconnues
auparavant »
P. LAGADEC
Après la fermeture des écoles et des
universités le 13 mars 2019, le Ministre de l'Enseignement National, de
la Formation professionnelle, de l'Enseignement Supérieur et de la
Recherche Scientifique, a pris la décision de mettre en place le
e-learning et a mobilisé les médias publics pour diffuser les
cours et assurer la continuité pédagogique. Initiative largement
saluée par les différents acteurs de la Société.
Le MEN a rapidement réagi face à la pandémie
en élaborant un plan intégré pour gérer et surtout
sauver la saison scolaire. Pas question pour lui de décréter une
année blanche, cela ne fait pas partie de son plan d'urgence.
Dès le lancement de l'enseignement à distance, la
plateforme « Tilmid tice » a enregistré plus de
600 000 utilisateurs. Deux heures après, son contenu est
diffusé sur la 4ème chaîne marocaine.
En plus de«Tilmid tice», portail pédagogique
doté de contenus destinés aux élèves du primaire
jusqu'à la terminale, le MEN a lancé « Taâlim
tice »pour un renforcement optimal.
Des vidéos pédagogiques en streaming et des
Moocsont déposéessur des plateformes mais également sur
les réseaux sociaux.
Grâce au portail «Taâlim.ma», chaque
enseignant peut créer sa classe virtuelle à travers l'outil
«Microsoft teams»
Plus de 40.000 ouvrages de référence
numériques traitant différents domaines, ont été
mis à la disposition des apprenants.
L'enseignement à distance a pu toucher une dizaine de
millions d'élèves, étudiants et jeunes en formation
professionnelle, pour un taux de suivi variant entre 96% pour le secteur de
l'enseignement privé et 71% dans le public.
Plus de 6 200 sources numériques ont été
mobilisées à cet égard et 800 000 heures de formation ont
été dédiées aux apprenants avec un taux de suivi
allant de 50 à 90%, selon les filières.
Afin de venir en aide aux candidats des épreuves
certificatives, certains enseignants créent et diffusent gratuitement
des capsules vidéo sur les réseaux sociaux.
Les cours à distance et l'organisation des épreuves
du baccalauréat sont le véritable challenge et le défi
majeur que devait relever le MEN.
En effet, c'est dans des conditions exceptionnelles que 441 238
candidats passent la session normale du baccalauréat cette année,
alors qu'en France elle est annulée et seuls les contrôles
continus sont pris en compte.
A une situation exceptionnelle, un dispositif exceptionnel :
- 2 155 centres d'examen ont été mobilisés
au niveau des différentes villes du Royaume pour accueillir les futurs
bacheliers,
- Plus d'une centaine de salles couvertes,
- 145 amphithéâtres
- 1 910 établissements scolaires
- Un petit groupe par salle d'examen : 10 candidats (respect de
la distanciation)
- Des masques, des visières, des gels hydro-alcooliques
dans toutes les salles sans exception.
Les moyens logistiques et sanitaires mis au service des candidats
et des cadres pédagogiques chargés de la supervision des examens
sont à la hauteur des attentes des parents d'élèves.
Le MEN a réussi à relever le défi de
l'enseignement à distance et à organiser les épreuves du
baccalauréat dans un contexte sanitaire mondial très difficile
mais il n'en demeure pas moins que des inégalités existent quant
à l'accès au numérique.
En effet, les enfants des zones rurales n'ont pas accès
à Internet et n'ont pas les moyens pour s'acheter des tablettes, des
smartphones ou encore des ordinateurs.
Lors du confinement ces mêmes enfants ont
été privés des cours à distance et à
l'accès aux "classes virtuelles" via les applications Teams, WhatsApp ou
Facebook.
Le problème des égalités des chances se
pose, avec acuité, en dépit des efforts déployés
par le MEN.
Chapitre 3
Bilan de la gestion de la communication de crise par le
gouvernement Marocain
|
« Ce serait terriblement triste s'il ne sort pas de
cette mega-crise (Coronavirus) une pensée politique indiquant la
nouvelle Voie »Edgar Morin
La pandémie du Covid-19 s'est
présentée comme une occasion grandeur nature pour le gouvernement
marocain d'exposer toutes ses compétences. Or, le flou total de
communication de ces derniers jours concernant certaines situations
liées à la gestion de la crise sanitaire a réussi à
le décrédibiliser aux yeux de l'opposition, des médias et
de l'opinion publique.
En période de crise l'information est capitale et la
communication est le meilleur moyen de gestion d'une crise.
Si le gouvernement a réussi tant bien que mal à
gérer la première phase de la crise, son pilotage de la
deuxième phase suscite énormément d'interrogations. On est
loin du Maroc, cas d'école.
Entre un déconfinement improvisé et des
décisions «nocturnes» prises à la
dernière minute le gouvernement est appelé à sortir de son
mutisme et à communiquer son nouveau plan de lutte contre la
pandémie.
Outre les mauvaises décisions et les décisions non
argumentées, l'Etat semble avoir perdu les commandes de pilotage de la
crise sanitaire qu'il maîtrisait au début de la
pandémie.
- Célébrer la fête d'Aïd Al Adha (la
fête du mouton) n'était pas une sage décision quand on sait
que c'est l'occasion rêvée pour les familles de se retrouver,
surtout après un interminable confinement qui a duré plusieurs
mois.
- Les décisions prises à la légère et
à la dernière minute telle l'annonce surprise de l'interdiction
d'entrer et de sortir de huit villes, à la veille de la fête, a
provoqué un mouvement de panique générale.
- Les études suspendues quand les cas se comptaient par
dizaine sont repris en présentiel alors que le pays est au pic de
l'épidémie.
- L'enseignement à distance fut un échec :
Imposé par le confinement, le e-learning n'a pas été
à la hauteur des attentes des Marocains en raison des
inégalités des élèves à l'accès
à internet.
Selon une étude du HCP, seulement 17,3% des
élèves ou étudiants qui suivaient les cours à
distance pendant la période du confinement, considèrent que ces
cours ont couvert entièrement le programme pédagogique annuel.
Pour 68,3% des élèves, ces cours ne couvrent pas totalement le
programme et 14,4% sont indécis.
Une étude du Policy Center for the New South, montre que
la moitié des élèves ne disposent pas d'ordinateur
portable, de tablette ou de connexion internet.
La récente étude PISA de l'OCDE
révèle les limites du canal digital dans l'éducation
marocaine : seulement 25,8 % des élèves sondés disposent
d'une connexion à l'école avec un débit suffisant, tandis
que 27,8 % disposent d'une plateforme d'apprentissage en ligne effective.
En somme, la qualité de l'enseignement à distance
a été jugée insuffisante chez près de ¾ des
familles ayant leurs enfants à l'école.
La rentrée scolaire 2020-2021, prévue le 2
septembre et tant attendue par des milliers d'élèves,
désireux de retrouver le chemin de l'école et leurs camarades,
est marquée par une annulation de dernière minute : la veille,
c'est-dire dimanche soir.
Visiblement dépassé par l'évolution de la
pandémie, le gouvernement, dans un geste désespéré,
invite les parents d'élèves à choisir entre le
présentiel ou le distantiel comme s'il voulait « s'en laver les
mains.»
Il aurait dû prendre des décisions précises,
claires et surtout responsables à l'instar de celles prises lors de la
gestion de la première phase de la pandémie.
Autre volet de cette mauvaise gestion, et non des moindres, est
celui de l'absence d'accompagnement psychologique lors de la pandémie et
de la période de confinement.
La situation de confinement a aussi des conséquences
psychologiques auxquelles il convient de répondre. Le stress,
l'angoisse, la peur, l'inquiétude et même dans certains cas les
violences conjugales et la maltraitance des enfants sont monnaie courante.
Le HCP a réalisé, du 14 au 23 avril 2020, une
enquête auprès des ménages pour suivre l'adaptation de leur
mode de vie sous la contrainte du confinement. Cette enquête a
ciblé un échantillon de 2 350 ménages représentatif
des différentes couches socioéconomiques de la population
marocaine selon le milieu de résidence, urbain et rural.
Pour 49%, l'anxiété est le principal impact
psychologique du confinement. Cette proportion atteint 54% parmi les
ménages résidant dans les bidonvilles.
Selon toujours cette enquête, la peur est ressentie par 41%
des ménages marocains, principalement parmi les ménages
dirigés par une femme (47%), contre 40% dirigés par un homme, et
parmi les ménages pauvres (43%), contre 33% parmi les familles
aisées. 30% des ménages expriment un sentiment de claustrophobie,
32% en milieu urbain et 24% en milieu rural.
Ce traumatisme concerne 30% des ménages composés
de 5 personnes et plus, contre 25% pour les ménages de taille
réduite de 2 personnes. 25% évoquent une multiplication des
phobies. Cette proportion est plus élevée en milieu urbain (29%)
qu'en milieu rural (18%) et parmi les ménages dont le chef a le niveau
d'enseignement supérieur (28%) que parmi ceux
dirigés par une personne n'ayant aucun niveau
d'éducation (23%). 24% des ménages souffrent de troubles de
sommeil, les citadins (28%) sont deux fois plus touchés que les ruraux
(14%). 8% des ménages présentent d'autres troubles psychologiques
tels quel'hypersensibilité et la nervosité ou la lassitude. 24%
des ménages sont très inquiets des menaces du Covid19, et 46%
sont plutôt inquiets. Ces inquiétudes sont dues principalement
à la crainte d'être contaminé par le virus (48%), de perdre
son emploi (21%), du décès (10%), à ne pas pouvoir
subvenir aux besoins alimentaires du ménage (10%) et par rapport
à l'avenir scolaire des enfants (5%).
L'Etat a aussi failli à son devoir, celui du rapatriement
des Marocains restés bloqués à l'étranger
après la suspension du trafic aérien et la fermeture des
frontières. Une situation qui a plongé plusieurs familles dans
l'incertitude et le chaos.
Plus de 32 000 Marocains sont bloqués à
l'étranger et multiplient les appels à l'aide sans espoir de
retour alors que leurs ressources se sont épuisées.
Bloqués dans 17 pays étrangers, ils sont partis
pour des raisons touristiques, administratives, familiales ou médicales.
La réponse, sans équivoque, du ministre des
Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des
MRE ne se fait pas attendre devant les députés :
«Le Maroc ne peut pas continuer à supporter les
coûts du rapatriement des personnes. Nous avons ciblé des
opérations humanitaires relatives à des personnes sans
moyens»
Suite au projet de décret visant à prolonger
la validité de la période de l'état d'urgence sanitaire
sur l'ensemble du territoire national, les citoyens ont eu droit à une
série de vidéos de propagande, diffusées sur la toile,
mettant en avant le rôle des caïds (agents d'autorité)
à préserver l'ordre public. Force est de reconnaître que
ces représentants du Ministère de l'Intérieur ont
joué un rôle considérable pour ce qui est du respect du
confinement.
Cependant certains d'entre-deux ont abusé de leurs
pouvoirs. Sur une vidéo devenue virale, on pouvait ainsi apercevoir une
caïd femme, en treillis militaire, sillonnant les rues d'un quartier
populaire casablancais et ordonnant aux populations, sur un ton
désobligeant et irrespectueux, de se conformer à l'état
d'urgence sanitaire. Des scènes à peine croyables qui nous
rappellent malencontreusement les « années de plomb » que l'on
croyait révolues.
Le Ministère de l'Intérieur a récemment
adressé des demandes d'explication à des caïds
accusés d'abus de pouvoir et ayant fait l'objet de plaintes
auprès de la justice après avoir agressé verbalement ou
physiquement des citoyens.
Le Royaume était, il y a à peine quelques
mois, salué et érigé comme un modèle de gestion de
crise par plusieurs institutions internationales. Le chef du gouvernement,
parlait même de «success-story».Actuellement, face au manque
d'information et de transparence, face aux décisions prises à la
dernière minute, on se demande à quoi est réellement
dû le revirement de la situation et ce relâchement.
Le gouvernement gère la crise depuis le début sans
l'implication des acteurs de la société. Il est temps de plaider
pour une gestion participative de la deuxième phase de la crise
sanitaire.
Il est recommandé d'accorder une priorité accrue
à la communication et à la transparence.
Le plus important à ce stade est de conserver la confiance
du citoyen marocain et de continuer d'informer en toute transparence en
préparant une sortie de crise.
Au final, les enseignements que l'on peut tirer, dores et
déjà, pour l'avenir :
- La réforme de l'enseignement est plus que jamais
prioritaire, notamment la recherche scientifique et le développement du
numérique.
- L'école publique aujourd'hui « ghetto des pauvres
» devrait gagner ses lettres de noblesse d'antan afin de réaliser
l'égalité des chances. (Lors du confinement, force est de
constater que les élèves du privé étaient beaucoup
plus privilégiés que leurs camarades du secteur public)
Le rapport du Conseil Supérieur de l'Enseignement, de la
Formation et de la Recherche Scientifique, dresse d'emblée un constat
sans concession: « l'école Marocaine est l'épicentre
des inégalités et disparités sociales. Pis, elle les
aggrave »
Les disparités sociales déterminent la
réussite scolaire « Si l'école publique reste la plus
prisée (84% pour le primaire et 91% pour le collège et le
lycée), l'école privée reste le moyen d'assurer une
éducation de qualité » souligne Omar Azziman, le
président du CSEFRS.
- La santé des citoyens prime. Aussi le gouvernement est
invité à redorer le blason de ce secteur qui souffre de nombreux
dysfonctionnements, que ce soit au niveau des services de santé, des
conditions de travail des médecins, de l'insuffisance de la
capacité d'accueil des centres hospitaliers, du manque de personnel
qualifié et de matériel médical.
- Le volet social, longtemps négligé par tous les
gouvernements qui se sont succédés devrait être la
préoccupation majeure des politiques et un nouveau modèle de
développement doit voir le jour en vue de faire éclater les
disparités sociales.
Le Maroc a globalement bien géré la communication
de crise liée à la Covid-19 lors de la première phase de
la pandémie.
Son plan d'action, sa communication de crise et ses messages
étaient efficaces malgré quelques failles et bavures liées
essentiellement à un manque de communication et de transparence.
Certaines décisions prises à la dernière minute ont
décrédibilisé sa capacité à gérer une
crise sanitaire d'une grande envergure.
Le Maroc s'est érigé un véritable cas
d'école en matière de gestion de crise sanitaire liée au
Covid-19. En parfait stratège de la gestion de la communication de
crise, il a su tirer les enseignements de ce qui s'est passé en Chine et
en Europe. Un mimétisme institutionnel qui l'a poussé à
anticiper la crise et à mettre en place un dispositif impressionnant
afin d'empêcher la propagation du virus.
Ciel aérien fermé, frontières
terrestres et maritimes verrouillées, confinement et état
d'urgence décrétés, le Royaume a pris toutes les mesures
préventives drastiques au détriment de son économie qui a
été considérablement touchée par la pandémie
et qui devrait connaître probablement une récession sur l'ensemble
de l'année 2020.
Le fonds social Covid-19 a pu soutenir les TPE et PME en
difficultés et venir en aide aux familles touchées par la crise
liée à la pandémie.
Mais la précarité, la pauvreté et le
chômage sont un autre défi pour l'Etat. Beaucoup de
salariés en perte d'emploi et non affiliés à la CNSS se
sont retrouvés dans une situation financière peu confortable. La
pandémie s'ajoutant à la sécheresse, près de 10
millions de Marocains pourraient se retrouver dans une situation
économique très difficile, selon la Banque Mondiale.
Certains domaines clés pour le développement
du pays demeurent, à ce jour, des chantiers souffrant de
négligence et de nombreux dysfonctionnements, rappelant ainsi le
gouvernement à l'ordre.
Pour ce qui est du secteur de la santé le constat est
sans appel. Sous les feux de la rampe, dès le début de la crise
sanitaire, il est incapable de répondre aux besoins de la population. En
effet, les structures d'accueil sont insuffisantes, le personnel de la
santé, toutes catégories confondues, compte seulement 50.000
personnes pour 35 millions d'habitants, soit 6 médecins pour 10 000
habitants selon un rapport de l'OMS.
L'enseignement, notamment public, fait face à de
multiples défis et reste en deçà des aspirations des
citoyens et pour cause les retards enregistrés à tous les
niveaux. La cour des comptes relève encore une fois plusieurs
insuffisances dans le secteur de l'enseignement. Et la Banque Mondiale a
souligné, dans son dernier mémorandum, que le Maroc avait besoin
d'un «miracle éducatif». En effet, le Royaume est
classé à la 75 ième position sur 79 pays et arrive en
queue du classement de l'enquête PISA 2018 de l'OCDE.
Une réforme de l'Education doit être une
priorité absolue de l'Etat.
La pandémie à laquelle fait face aujourd'hui le
pays malgré les problèmes et les défaillances que l'on
vient d'évoquer ne sera certainement pas la dernière. Les crises
surviendront encore et toujours et au moment où l'on s'y attend le
moins.
Le Maroc doit être prêt pour relever les
défis à venir. Les chantiers fragiles ne devraient plus
être un handicap face à la gestion de nouvelles crises.
Selon les spécialistes de la communication de crise, les
prochaines seront pires, « inconnues et chaotiques » pour reprendre
les mots de Patrick LAGADEC.
La communication est l'élément déterminant
qui permet de surmonter toute crise. Refuser de communiquer s'avère
souvent contre-productif dans un contexte de crise.
La crise sanitaire liée au Covid-19 va certainement
transformer en profondeur notre mode de vie, l'économie mondiale et nos
sociétés. Il est impératif d'en tirer les enseignements et
de se projeter dans l'après crise.
Nous devons nous préparer dès maintenant pour les
changements et les crises à venir et surtout saisir les
opportunités qu'elles nous offrent.
Organisations et entreprises sont contraintes de
développer une capacité à évoluer dans un monde
instable et en perpétuel changement. Seules les institutions qui ont une
vision futuriste, prêtes à réadapter leur industrie
survivront, les autres risquent de disparaître.
La mue de la Société se fera à travers la
communication de crise et le digital qui a désormais le vent en poupe et
de beaux jours devant lui. En effet, durant la pandémie et le
confinement, l'enseignement à distance s'est imposé comme seule
alternative et les achats en ligne ont explosé. Seul le digital a permis
au monde de continuer à tourner.
L'avis des spécialistes
Entretien avec Saâd BENMANSOUR, consultant expert
en médias politiques
|
(Interview réalisée le 14 septembre 2020)
Saâd BENMANSOUR estprésident du directoire,
directeur de la rédaction et de la publication de La Vie Eco et
d'Aujourd'hui le Maroc, il est également consultant expert en
médias politiques.
Grille pour l'entretien avec M Saâd
BENMANSOUR (entretien directif)
Axes de discussion :
- La gestion de la crise sanitaire mondiale par le gouvernement
marocain
- Les stratégies mise en place par le MEN pour faire face
à la pandémie
- La post crise et ses opportunités
Axe I : La crise sanitaire a bouleversé l'ordre mondial et
notamment l'économie mondiale.
Question n° 1 : Quel décryptage ou quelle lecture
faites-vous de la gestion de la pandémie par le gouvernement marocain ?
« Le Maroc érigé comme modèle de
gestion de l'épidémie » par l'Institut Montaigne, ou encore
« Le Maroc est un cas d'école intéressant »
Question n° 2 : Aujourd'hui, on assiste à une
recrudescence des cas, pensez-vous que le Gouvernement est en train de perdre
la bataille qu'il pensait gagner ? Est-il en train de perdre le contrôle
de la situation ?
Question n° 3: Sur le plan socio-économique, force
est de constater les répercussions négatives de la
pandémie : des entreprises qui arrêtent définitivement ou
temporairement leur activité, d'autres qui mettent la clé sous la
porte, des employés qui se retrouvent sans travail ou qui sont tout
simplement remerciés, le taux de chômage qui n'arrête pas de
s'élever de jour en jour, des aéroports et des ports
fermés ...etc. Quel regard portez-vous sur cette situation chaotique ?
Question n° 4 : Des bavures ont été commises
à la veille de l'Aïd pour sauver soi-disant l'économie
marocaine mais à quel prix ? (Au détriment de la vie des
citoyens)
Est-ce qu'on a le droit de jouer ainsi avec la vie des citoyens
?
Question 5 : On a tous vu cette bonne campagne publicitaire sur
le tourisme local, bouée de sauvetage pour ce secteur qui a
été le plus touché par la pandémie mais face
à des villes fermées et des autorisations et des barrages
à l'entrée de toutes les villes beaucoup de marocains ont choisi
de rester chez eux. On se demande vraiment s'il y a derrière une
stratégie ou plutôt un gaspillage d'argent.
Axe II Le MEN est un des ministères qui a
été dès le départ celui qui est le plus sous les
feux de la rampe.
Question n° 6 : Quelle est votre évaluation des
mesures et des stratégies mises en oeuvre dans le cadre du programme
d'urgence pour l'éducation?
Question n°7 : Les mesures prises par le MEN lors de la
confirmation des premiers cas de Covid-19 ont été saluées
par l'ensemble des marocains. Cependant les toutes dernières
improvisées à la veille de la rentrée scolaire semblent
décevoir tous les parents d'élèves surtout quand on pense
qu'on leur a jeté la balle dans leur camp pour ce qui est du choix de
l'enseignement en présentiel ou à distance. Qu'en pensez-vous
?
Question n° 8 : Nombreux sont les citoyens qui reprochent au
Ministère de M AMZAZI d'être au service du patronat et que le
scénario de l'école à distance était
déjà prévu mais on a laissé le lobby des librairies
écouler sa marchandise avant de de déclarer la veille de la
rentrée scolaire, et à la dernière minute, que les
écoles seront fermées. Partagez-vous cet avis ?
Question n°9 : Le MEN se targue de ses mesures
préventives mais il semble oublier l'égalité des chances :
Ce ne sont pas toutes les familles marocaines qui possèdent un
ordinateur et une connexion Wifi. Ne voyez-vous pas que le fait d'opter pour
l'enseignement à distance a réussi à creuser
l'écart entre les différentes couches sociales ? (Je pense
surtout aux enfants qui vivent dans le milieu rural)
Résumé de l'entretien avec Saâd
BENMANSOUR
|
Le Maroc a apporté une bonne réponse
institutionnelle à la gestion de la crise sanitaire liée au
Civid-19. Il est vrai qu'il a été pris de court comme plusieurs
pays d'ailleurs et a réagi avec un temps de latence mais cela est
normal. Face à une crise de telle ampleur, il faut du temps pour faire
le diagnostic. Le dispositif et les mesures de prévention sont une
réponse extrême. Cependant la gestion de la communication de crise
lors des phases de déconfinement a connu un certain relâchement.
Cela n'a pas été conduit de la même vigueur et cela est
expliqué par l'impératif économique. Les citoyens,
euxaussi se sont laissés aller.
Par ailleurs les retombées de la crise sanitaire sur
l'économie sont considérables. Il y aura forcément des
« cadavres » et le secteur le plus touché
aujourd'hui c'est celui du tourisme et par conséquent tout ce qui tourne
autour.
Pour ce qui est du MEN, la décision de fermer les
écoles suite aux premiers cas de contamination par le nouveau
coronavirus, était sage et justifiée. Face à une crise
notamment sanitaire, l'on protège d'abord les citoyens.
Pour ce qui est de la mise en place de l'enseignement à
distance, le MEN nous a agréablement surpris. Le Maroc est parti d'une
page blanche et le lendemain de la pandémie il fallait enseigner
à quelques millions d'élèves...C'est un exploit !
Maintenant il faut se concentrer sur la post crise. On doit
être prêt à prendre la vague, on doit être parmi le
premier peloton. L'après Covid-19 sera certainement difficile mais il y
aura beaucoup d'opportunités à saisir. Le marché
européen et américain va bientôt exploser, la consommation
va reprendre et la machine de l'économie va démarrer....On doit
être prêt pour ce grand challenge.
Entretien avec Patrick LAGADEC
|
(Interview réalisée le 22 septembre 2020)
Patrick Lagadec est un chercheur spécialiste de la gestion
du risque et de la gestion de crise. Il est directeur de recherche honoraire de
l'École polytechnique et désormais consultant et
conférencier sur le pilotage des situations complexes et chaotiques.
Grille pour l'entretien avec Patrick LAGADEC
(entretien semi- directif)
Axes de discussion :
- La gestion de la pandémie par le Gouvernement
Marocain
- La stratégie du MEN
- La post-crise
Le questionnaire
Question 1 : Vous qui êtes un éminent
spécialiste de la communication de crise, est-ce que vous avez vu venir
cette crise sanitaire mondiale liée au Covid-19 ?
Question 2 : Que pensez-vous de la gestion de cette crise
sanitaire par certains pays Européens ? (et les Etats-Unis ?)
Question 3 : Qu'en est-il de celle du Maroc ? 16 Mars :
fermeture des écoles, ensuite fermeture de l'espace aérien
(Surtout durant la première phase de la crise)
Question 4 : Les mesures préventives
décrétées par certains pays paraissent un peu
surannées, datant des siècles derniers, je fais allusion au
confinement. Pour l'expert que vous êtes, était-ce vraiment
nécessaire ? (Surtout quand on sait qu'un pays comme la Suède
n'impose pas le port du masque, pas de confinement)
Question 5 : Quel scénario peut-on prévoir à
cette crise ?
Question 6 : Vous parlez souvent de crises
imprévisibles, chaotiques ....C'est à ça qu'elles
ressemblent celles à venir ?
Question 7 : Quels conseils donnerez-vous à ceux qui
sont aux postes de commandement ?
Résumé de l'entretien avec Patrick
LAGADEC
|
Les problèmes d'aujourd'huisont d'abord, des
problèmes d'insuffisance de pilotage qui se traduisent par un
problème de communication.
Si l'on fait de la bonne communication de crise, il faut encore
avoir une bonne compétence pour pouvoir la piloter.
Et si on ne sait pas piloter, j'ai très peur qu'on se fixe
uniquement sur la communication.
Il faut surtout faire très attention à des prises
de décision à la hâte. C'est un terrain très
compliqué.
Pour ce qui est de l'après crise, il y aura beaucoup de
surprises. On va être dans des Univers beaucoup plus instables,
chaotiques avec beaucoup de crises qui vont interférer les unes sur les
autres et des pilotes qui ne sont pas préparés à
gérer ce genre de choses.
LAGADEC Patrick, La Civilisation du risque, Seuil, 1986.
Thierry Libaert, La communication de crise, Dunod-Topos, 2001,
4ème édition 2015
LIBAERT Thierry , Le plan de communication - 5e édition.
Définir et organiser votre stratégie de communication Paris,
Dunod, Collection « Marketing/Communication »,
2017??????????????????????????????????????????????
LAGADEC Patrick, La gestion des crises, Paris, Me Graw Hill, 1991
(a), 323 p.
LAGADEC Patrick, « Pourquoi et comment bâtir un plan
de communication préventive » in
LAGADEC Patrick, Apprendre à gérer les crises,
Paris, Les éditions d'organisation,
1994, 120 p.
Gilles Guerin-Talpin, Communication de crise, Editions
Préventique, 2003, 160 pages
Didier Heiderich, Rumeur sur internet. Comprendre, anticiper et
gérer une cybercrise, Editions Village mondial, 2004, 178 pages
Didier Heiderich, Plan de gestion de crise. Organiser,
gérer et communiquer en situation de crise, Dunod, 2010
André Lafrance, Communication et sociétés en
crise, L'Harmattan, 2015
MORIN Edgar, « Pour une crisologie », Communications,
1976, vol. 25, pp. 149-163.
MUCCHIELLI Alex, Communication interne et management de crise,
Paris, Les éditions d'organisation, 1993, 207 p.
HERMANN CF., « Some consequences of crisis which limit the
viability of organizations », Administrative Science Quaterly, 1963, 8,
pp. 61-82.
KAPFERER J.N., Rumeurs : le plus vieux média du monde,
Paris, Le Seuil, 1987, 240 p.
KAPFERER J.N., « Le contrôle des rumeurs »,
Communications, 1990 (a), 52, pp. 99-117.
OGRIZEK M., GUILLERY J.M., La communication de crise, Paris, Puf,
1997,128 p.
PLOTTU E., « Les crises et leur gestion », Sciences de
la société, 1998, n° 44, pp. 145-164.
REVERET R., MOREAU J.N., Les médias et la communication de
crise, Paris, Economica, 1997, 112 p.
ROBERT B., VERPEAUX D., « Pourquoi et comment bâtir un
plan de communication préventive », in TIXIER M., (dir.), La
communication de crise, Paris, Mc Graw Hill, 1991, pp. 81-103.
ROUACH D., La veille technologique et l'intelligence
économique, Paris, Puf, 1996,128 p.
ROUX-DUFORT C, « Apprendre des crises. Entre le statu quo et
la transformation », Sciences de la société, 1998, n°
44, pp. 165-182.
TIXIER M., (dir.), La communication de crise, Paris, Mc
Graw-Hill, 1991, 268 p.
WATZLAWICK P, HELMINCK-BEAVIN J., JACKSON D., Une logique de la
communication, Paris, Seuil, 1979, 288 p.
Ulrich Beck, Société du risque, Aubier, 1986.
Guillaume Foucault, Communication de crise,
Télémaque, 2016.
Andrew Griffin, Crisis, Issues and Reputation Management, Kogan
Page, 2014.
Articles
- Marketing et situation de crise. Albert Louppe et Laurent
Hermel. Revue Française du Marketing. N° 186. 2002/1. P 5 à
23.
- Communiquer en temps de crise. Marion Brasseur et Bernard
Forgues. Revue Française de Gestion. Volume 28, N° 137,
janvier-mars 2002. Page 61 à 70.
- La communication de crise. Patrick Boccard. Entreprises et
Histoire. 1996, N°11.
- Stratégies de communication de crise. Patrick Lagadec.
Futuribles. Juillet Aout 1986.
-À consulter: Le Magazine de la communication de crise et
sensible
Ouvrages en anglais
- Dawn R Gilplin et Priscilla J Murphy. Crisis management in a
complex word. Oxford University Press. 2008.
- Michael Bland: communicating out of a crisis. Macmillan. 1998.
248 pages.
- Peter Swartz:When companies do bad things. Wiley. 1999. 192
pages.
- Robin Cohn: The PR crisis bible. T.T. 2000. 336 pages.
- Laurence Barton: Crisis in organizations. South Western. 2001.
283 pages.
- Harvard Business Review on Crisis Management. HBS Press. 2000.
252 pages.
- Jim Adamson: The Denny's story. How a company in crisis
resurrected its good name. Wiley. 2000. 206 pages.
- Marion K.Pindsdorf. Communicating when your company is under
siege. Fordham. 1999. 426 Pages.
- Michael Regester & Judy Larkin. Risk Issues and crisis
management. 3rd edition. CIPR. Kogan page. 2005.
- Eric Dezenhall. Damage control. Why everything you know about
crisis management is wrong. Portfolio. 2007. 212 pages.
- W. Timothy Coombs. Ongoing crisis communication: planning,
managing and responding. Sage publications. 2ème ed. 2007.
- Peter F Anthonisen (edited by): Crisis Communication. Practical
PR Strategies for reputation management and company survival. Kogan Page.
2008.
- Alan Jay Zaremba. Crisis communication: Theory and practice. ME
Sharpe. 2010.
- Amiso M George & Cornelius B Pratt (sous la direction de) :
Case studies in crisis communication. International perspectives on hits and
misses. Routledge. 2012
Coronavirus. L'évolution de
l'épidémie au Maroc
Le bilan du mercredi 7 octobre 2020 à 18h00
CAS ACTIFS ACTUELS
|
19443 -41
|
CAS CONFIRMÉS
|
140024 +2776
|
CAS EXCLUS SUITE À UN RÉSULTAT NÉGATIF
|
2638341
|
GUÉRIS
|
118142 +2788
|
DÉCÈS
|
2439 +29
|
TOTAL NOMBRE DE DÉPISTAGES
|
2778365
|
|