Analyse de la performance des collectivités territoriales du Tchad: cas de la commune urbaine d'Abéchépar Abdramane oumar YASSINE ENAM-NIGER - Maîtrise 2018 |
1.1.3 ProblématiqueLe passage de la logique de moyens à celle de résultats dans les communes est fondamental. Son introduction est dictée par lanécessitéd'une gestion optimale des ressources qui se font de plus en plus rares dans les pays en voie de développement. L'allocation des ressources fait l'objet de mesure d'efficience et d'efficacité. Aussi, la prise en compte des aspirations des populations est devenue une exigence. Cet élément oblige la commune à s'inspirer des pratiques du privé, pour être performante. Le pilotage de la performance est une nécessité pour la commune. A ce titre, il permet : - à la population de s'assurer que les deniers publics sont utilisés de façon efficiente et que l'Administration réponde au mieux à leur besoins ; - au gestionnaire de la commune de se fixer des objectifs clairs et d'avoir une plus grande marge de manoeuvre dans l'exécution de ses missions. Mais, il est difficile aujourd'hui de définir les contours et les enjeux de la performance des collectivités territoriales. Cette difficulté ne favorise pas sa promotion ainsi que son développement au sein de ces dernières. Plusieurs freins à son développement sont à préciser. Tout d'abord, en ce qui concerne les ressources humaines, il faut noter que les procédures de recrutement des agents communaux ne se font pas de manière efficiente,la gestion du personnel de la commune d'Abéché ne s'appuie pas sur des critères de mesures de performance, ni sur des mesures d'incitation à celle-ci. Quant à laformation,il faut préciser que globalement, les élus, et agents de la Mairie ne bénéficient pas suffisamment de formation continue, qu'elle soit organisée par les Mairies elles-mêmes ou par le Ministère de tutelle. L'insuffisance de formation ne permet pas aux cadres d'acquérir de nouvelles compétences. S'agissant des finances locales, on note une faible maitrise de la matière imposable, des difficultés de recouvrement et des retards dans les transferts de compétences et des ressources de l'Etat aux collectivités. Cetransfert, qu'il soit financier ou technique est faible. De plus, la performance d'une commune suppose la mise en oeuvre d'actions qui nécessitent des financements, d'abord issus des ressources internes au territoire, puis complétées par des ressources externes venant de l'Etat, des partenaires au développement, de la diaspora ou encore des communes étrangères dans le cadre de la coopération décentralisée. Cette mobilisation des ressources reste particulièrement faible dans la commune d'Abéché du fait de la pauvreté de la population c'est-à-dire le faible revenu de la population, de l'incivisme fiscal, etde l'accroissement du secteur informel. Le PIB par Habitant au Tchad est de 860 dollars par an en 2017, et le taux d'impôt sur vente est de 18% dans la mêmepériode2(*). Concernant la gestion financière de la commune, il faut dire que la commune a une comptabilité manuelle, généralement assez mal tenue et ne pouvant pas retracer avec fiabilité toutes les opérations requisses : engagement, liquidation et paiement. Par ailleurs, le besoin de planifier et de mettre en oeuvre les projets et programmes de développement issus du PDC avec la population devient de plus en plus manifeste et est ressenti aujourd'hui où la prise de décision et la participation sont décisives pour l'atteinte des actions par et pour la population. La participation active de la population est essentielle à toute initiative d'évaluation de performance. Or, dans la commune, cette dernière est négligeable. Cette façon de voir les choses engendre très souvent des problèmes liés à la gestion et à la durabilité des actions de développement car n'étant pas approprié par les populations. Aussi, le manque d'un cadre de concertation dynamique entre le conseil municipal et les différents partenaires au développement et l'insuffisance de sensibilisation de la population en majorité analphabète (plus de 80% de la population abéchoise3(*) est analphabète selon le PDC) sur les enjeux de la décentralisation et l'absence de reddition seraient- ils les causes des préjudices au processus de la décentralisation et par ricochet à la bonne performance de commune. La difficulté majeure dans la promotion de l'utilisation d'un outil d'auto évaluation de performance provient du fait que les résultats enregistrés par la commune sont intangibles, à l'instar de l'augmentation de la qualité de vie. La seconde difficulté découle du fait que les résultats sont le fruit de partenariats et s'estompent généralement dès la fin desprojets. Il faut également noter la faible accessibilité de la population aux services sociaux de base, environ 60% et la faible performance des services techniques communaux (PDC). Les services de la commune ne sont pas informatisés,ne sont pas assistésà l'instar des autres communes du Tchad dans leur fonctionnement par de services techniques déconcentrés de l'Etat. Seul le comptable est un agent de la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique. Toutes ces raisons nous amènent à nous interroger sur la performance de la commune d'Abéché, sur les moyens à mobiliser pour une auto-évaluation et sur les perspectives d'amélioration de la performance. Comment peut-on mesurer la performance de la commune d'Abéché? Quels sont les indicateurs qui permettent de mesurer la performance de la commune? Existe-t-il un lien entre performance et planification ? * 2 Tiré du Tchad : les indicateurs économiques * 3 Les habitants de la ville d'Abéché sont appelés Abéchois |
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