Mémoire de fin d'études
Le Design Thinking comme moteur de changements
au
sein d'une structure.
Nom et Prénom des étudiants :
BARD Jean-Baptiste & LECARDONNEL-VIDAL Camille Tuteur de
mémoire : Grant Linscott
2
Problématique :
Dans quelle mesure l'approche par le Design
Thinking
dans la conduite de projet peut influencer la
politique
stratégique d'une Entreprise et son organisation
?
Remerciements
En tout premier lieu, nous tenons à remercier Grant
Linscott, notre tuteur, et qui nous a accompagnés tout au long de la
rédaction de ce mémoire. Nous le remercions pour ses conseils, sa
disponibilité et la liberté d'action qu'il nous a laissés
dans la rédaction de notre travail.
Nous remercions également le corps professoral de
l'école de Marseille avec qui nous a fourni les éléments
et ressources nécessaires à la réflexion et à
l'élaboration de ce mémoire.
Nous exprimons tout particulièrement notre gratitude
aux quelques salariés de l'entreprise Schneider Electric et Nissan qui
ont accepté de répondre à nos questions et de nous faire
part de leurs connaissances concernant leurs domaines d'expertises
respectifs.
Ce mémoire clôture notre master et
représente le fruit d'un travail de recherche de 6 mois. C'est pendant
cette période que nous avons été soutenus et
encouragés par toutes les personnes suscitées. Les outils
méthodologiques mis à notre disposition, nos expériences
professionnelles respectives ainsi que celles des personnes rencontrées
ont constitué les fondements à la conduite de nos recherches et
à la rédaction de ce mémoire.
Enfin, nous remercions finalement toutes les personnes qui
nous auraient aidées et que nous aurions involontairement
oubliées.
1
TABLE DES MATIERES
I. REVUE DE LITTÉRATURE 4
I.1/ Concept Design Thinking 4
I.2/ Politique stratégique et
organisationnelle 18
II. MÉTHODOLOGIE 21
II.1/ Epistémologie 21
II.2/ Présentation du terrain et de
l'échantillon étudiée 22
II.3/ Méthode utilisée 23
III. ENQUETE ET ANALYSES DES RESULTATS 24
IV. LIMITES ET RECOMMANDATIONS 28
IV.1/ Les limites 28
IV.2/ Les Recommendations 28
V. CONCLUSION 41
VI. BIBLIOGRAPHIE 43
VII. ANNEXES 44
2
INTRODUCTION
« Pour le développement économique de la
France, il est essentiel et urgent de faire de l'innovation une priorité
»1 telle fut la conclusion d'un rapport réalisé
en 2013 par le ministère du redressement productif et du
ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Déjà en 2004, Christian Blanc, alors secrétaire
d'état chargé du développement, défendait
l'innovation comme « moteur de la croissance, de la
compétitivité et de l'emploi »2 On a besoin de
l'innovation pour faire survivre une entreprise face à sa concurrence,
pour imaginer des services correspondant aux évolutions de nos
sociétés ou pour défendre une jeune entreprise en
développant une nouvelle activité, par exemple. Toutefois, les
projets d'innovation sont difficiles à mettre en oeuvre dans la plupart
des entreprises, en raison de problèmes organisationnels et structurels,
d'une frilosité et d'un manque d'ouverture des pouvoirs en place, de
problèmes de communication ou encore d'un management qui empêche
les prises de risque. Généralement, le manque voir l'absence
d'innovation en entreprise sont liés à un manque de
collaboration, et d'une vision commune, transversale et stratégique. Les
industries créatives, par les axes de réflexion non
conventionnels qu'empruntent les artistes, nourrissent des projets innovants.
Arnaud Montebourg avait fait des industries créatives, sont cheval de
bataille: « Le redressement productif passe par le redressement
créatif ». Des efforts sont faits dans le sens des métiers
du design, avec la création en 2013 de la Mission Design par le
ministère du redressement productif et de la culture, et la mise en
place des « rendez-vous » du design. Le design est porté comme
source de modernité. Car en effet, le designer a accompagné et
facilité de grandes mutations technologiques. Toute la difficulté
reste son intégration dans la gestion de projet des entreprises. Tim
Brown, co-fondateur et directeur de l'agence de design et d'innovation IDEO, a
mis au point dans les années 2000, la démarche Design Thinking en
partenariat avec l'université de Stanford. Traduit littéralement
en français: « la pensée design ». Cette
démarche s'est imposée ces dernières années comme
la méthodologie opérationnelle de la gestion de projet de
l'innovation. À mesure que l'activité économique des pays
développés autrefois centrée sur la production, se
déplace vers l'industrie de la connaissance et des services, le Design
Thinking « s'affirme comme une stratégie de survie
»3. C'est une méthode aujourd'hui reconnue comme une des
plus performantes pour des projets d'innovation de rupture, de nouvelle
organisation sociale ou encore de développement d'activités.
Paradoxalement, la démarche Design Thinking est peu, voir pas
appliquée au sein de nos entreprises françaises, alors qu'elles
ne cessent de subir la concurrence. Déjà, vingt ans auparavant,
on parlait de design management, qui montrait, par l'intégration des
designers au sein de
1, Jean-Lub Beylat et Pierre Tambourin, L'innovation, en
enjeu majeur pour la France, avril 2013
2, Christian Blanc, Pour un écosystème de la
croissance, mai 2004
3, Tim Brown, L'esprit Design , p8, Pearson 2014
3
l'équipe projet, que l'on pouvait aboutir à de
véritables outils de communication et de vente pour les entreprises
désireuses d'accroitre leur chiffre d'affaires.
C'est à la suite des Mooc IDEA animés par EM
Lyon, que nous souhaitions approfondir cette réflexion sur le Design
Thinking. Nous trouvions intéressant d'aller au delà de la
démarche en tant que telle, et de penser le Design Thinking plutôt
dans son écosystème. Nous souhaitons observer
l'intégration de cette démarche en entreprise et ses
conséquences sur sa politique stratégique et organisationnelle,
afin de pouvoir par la suite proposer un guide de conduite à l'intention
des entreprises afin qu'elles se lancent plus facilement dans cette
expérience et cette approche.
Nous tâcherons à répondre à la
problématique suivante: Dans quelle mesure l'approche par le Design
Thinking dans la conduite de projet influence la politique stratégique
et organisationnelle de l'entreprise?
Dans un premier temps, dans notre revue de littérature
qui constitue notre partie théorique, nous définirons les trois
concepts majeurs émergents de notre problématique. Ces deux
concepts sont Design Thinking et politique stratégique et
organisationnelle. De l'analyse de ces concepts, nous dégagerons des
questions de recherche ou hypothèses que nous soumettrons lors
d'entretiens. L'exposition du positionnement épistémologique, le
choix du terrain ainsi que de l'échantillon feront donc l'objet de notre
seconde partie. Et enfin, nous présenterons les résultats que
nous structurerons, commenterons, interpréterons et comparerons dans la
troisième et dernière partie. Cette étude aura pour
objectif de pouvoir proposer par la suite aux entreprises un guide pratique
pour adopter encore plus facilement la démarche Design Thinking.
4
I. Revue de littérature
I.1/ Concept Design Thinking
Le Design Thinking est la notion majeure de notre
mémoire, autour de laquelle s'articule notre problématique. Plus
connue par les personnes travaillant de près avec le milieu du design,
nous nous attacherons donc à bien la définir.
Depuis les années 2000, l'agence de design IDEO et
l'Institut de design à l'université de Stanford popularisent le
concept de Design Thinking, que l'on peut traduire littéralement en
« pensée design ». Il est présenté comme une
nouvelle méthode en faveur de l'innovation, en aidant les équipes
à « générer des idées révolutionnaires
applicables et réellement efficaces »4. Il s'apparente à un
nouveau modèle philosophique du design. Comme la bien montré
Wolfgang Jonas, il ne faut pas confondre le design thinking (en minuscule) avec
le Design Thinking ni avec le Design Management. Le design thinking
était étudié dans les années 1990 par les
héritiers du mouvement des Design Methods qui visait à comprendre
les processus cognitifs de l'acte de design.
Toutefois, avant de s'aventurer dans l'explication du Design
Thinking, il est nécessaire de définir et de comprendre ce qu'est
le design. Il est très difficile de trouver une définition,
même le Design Dictionary s'avoue battu: « Au risque de vous
décevoir, cher lecteur, il est impossible de donner une
définition unique et faisant autorité de terme central de ce
dictionnaire - design »5. Cette indéfini-tion du design n'est pas
une fatalité en soi, mais illustre plutôt un symptôme
épistémologique. Ce symptôme s'explique très bien
par le fait que depuis une vingtaine d'année, la notion de design a
littéralement explosé et évolué. Elle a beaucoup
évolué entre 1990 et 2010. Alors qu'il régnait autrefois
une certaine stabilité et unité autour de la notion « design
industriel » (1960-1980), il règne aujourd'hui une multitude
d'approches et de définitions. En effet, comme le souligne C.Chaptal de
Chanteloup, le design est décliné à toutes les sauces et
il est donc important de distinguer "Design", "Design Management" de
"Management du Design". Simplement, l'auteur définit le "Design" comme
une démarche pour concrétiser une vision. Le "Design Management"
quand à lui est l'intégration de cette vision dans un contexte
qui prend en compte les aspects stratégiques et organisationnels d'une
entreprise. C'est pour cela que le Design Thinking se rapproche du "Design
Management" dans sa façon d'opérer.
4, Tim Brown, L'esprit Design, p 3-4,
Pearson
5 Design Dictionnary M.Erlhoff, T.Marshall
(dir), , Basel, Boston, Berlin, Birkhauser, 2008, p.104
5
Le design est une discipline apparue lors de la
révolution industrielle, d'abord sous la forme de design industriel.
Historiquement, le sens premier de design n'est pas celui du design industriel,
mais de projet ou méthodologie de conception, qui remonte à la
Renaissance. Comme l'a montré le psychosociologue Jean-Pierre Boutinet,
le design est intrinsèquement lié au projet architectural de la
Renaissance italienne; projet architectural inventé par l'architecte
Brunelleschi à Florence vers 1420. Le projet était alors un moyen
« pour séparer et unir simultanément deux temps essentiels
dans l'acte de création appliqué à l'édification
d'un bâtiment: le temps de travail en atelier, ordonné à la
conception de la maquette, et le temps de travail sur le chantier,
concrétisé dans la réalisation de l'oeuvre à partir
de la maquette conçue »6 Le projet est donc l'invention d'une
division du travail en deux temps: un premier temps, celui de la conception,
puis un second temps, celui de la réalisation. C'est ce que la langue
italienne distingue par les mots: progetto (activité intellectuelle
d'élaboration) et progettazione (activité de réalisation).
Les deux mots confondus donnent designo en italien, soit design en anglais.
Design est donc le terme qui regroupe originairement les deux dimensions
fondamentales d'un projet, la conception et la réalisation.
S'éclaire aussi l'étymologie du terme design. Design est aussi
issu du latin de-signare (« marquer d'un signe ») ; forme que l'on
retrouve dans le terme italien de-signo et anglais de-sign. Le design est alors
à entendre en tant que mode de conception par les signes; signes
représentant dans le cas dans projet architectural les images en
perspective de l'opération. C'est uniquement à l'âge de la
société de consommation de masse que le design a acquis son sens
de design industriel.
Le premier usage du terme design dans un contexte
économique et industriel remonte à 1849 avec la parution du
Journal of Design and Manufactures, créé et dirigé par
Henry Cole qui militait à l'époque pour « marier le grand
art et l'habilité mécanique »7. En effet, suite aux
préjudices engendrés par l'industrialisation, de nombreux groupes
d'artistes, d'architectes et d'artisans se sont sentis ravagé par cette
volonté « de faire des produits de qualité »8 et de
valoriser le travail industriel grâce « à la
coopération de l'art, de l'industrie et du travail manuel »9 .
D'où le livre de Raymond Loewy, La Laideur se vend mal, qui est un
best-seller et un manifeste dans lequel il définit son approche du
design industriel: « la Beauté par la Fonction et la
Simplicité ».10
Les projets de cet homme, Raymond Loewy, sont devenus des
légendes comme le paquet de cigarettes Lucky Strike ou encore le logo
des biscuits LU. Le design industriel s'est saisi de
6 JP Boutinet, 2002, p224
7 A.Midal 2009, p33-34
8 D.Huisman, G.Patrix, 1961, p15
9 D.Quarante, 1994, p60
10, R. Loewy, La laideur se vend mal , 1953,
p26
6
l'opportunité de la production en série pour
vendre en masse; la concordance entre la forme et la fonction a principalement
pour but l'efficacité commerciale. Ce modèle se manifeste
concrètement dans une entreprise des années 1930 par la fusion du
département design avec celui du marketing. Le design, ainsi
réduit au marketing, devient alors uniquement un processus
créatif de reconfiguration des signes au service du marché de
consommation, par exemple la branche du design d'emballages (packaging design).
Cette nouvelle configuration organisationnelle au sein des entreprises a
contribué à l'arrivée d'une multitude de produits sur le
marché, créant alors un monde nouveau constitué de «
commoditise », et de consommateurs passifs et « conditionner
»11. Dans ce contexte de libéralisme et de quête de nouveaux
marchés, les secteurs clés du design sont la création
d'image de marque, de supports de communication et d'offre produits et
services. « Le design industriel est le service professionnel qui consiste
à créer et à développer des concepts et des
spécifications qui optimisent la fonction, la valeur et l'apparence des
produits et systèmes au bénéfice mutuel de l'utilisateur
et du producteur »12. Ce model économique va tellement s'imposer
que l'expression « design industriel » cède peu à peu
sa place au simple terme « design ». La notion industriel n'est plus
mentionnée, soit parce qu'elle est considérée comme
implicite, soit pour suggérer une extension du design qui s'applique au
delà des seuls produits manufacturés.
Le design ne serait plus « ni un art, ni un mode
d'expression, mais bien une démarche créative méthodique
qui peut être généralisée à tous les
problèmes de conception »13 Le design rentre alors en crise, petit
à petit, dans les années 60. Cette redéfinition du design
commence par l'arrivée d'un directeur à l'école de design
d'Ulm qui entend vouloir « promouvoir un design au service des individus
et non de la société de consommation » proposant ainsi
à ses étudiants des cours de psychologie, d'anthropologie et de
sciences. En 1971, Victor Papanek publie Design pour un monde
réel, un livre cinglant dans lequel il écrit
qu'en raison du fort taux de pollution que rejette l'industrie « peu de
professions sont plus pernicieuses que le design industriel » et incite le
design a devenir « un outil novateur, hautement créateur et
pluridisciplinaire, adaptés aux vrais besoins des hommes »14. Cette
crise identitaire du design industriel prend tellement d'ampleur qu'elle oblige
les designers souhaitant continuer leur activité à une profonde
remise en questions. Au lieu de créer des produits à obsolescence
programmée et rapidement dépassés par les mutations
technologiques, le design doit changer et renouer avec sa tradition humaniste,
centrée sur l'humain.
11 E.Sottsass, Lettre aux designers, Domus,
avril 1990
12 The Industrial Designers Society of
America, en ligne, aout 2004
13 J. de Noblet, Roger Tallon, un designer
industriel 14V. Papanek, Design pour un monde réel,
1917
7
L'ère post-industrielle veut que les designers
s'intéressent plus sérieusement aux sujets. Désormais
comme l'affirme Klaus Krippendorf, ancien étudiant de l'école du
design d'Ulm, dans son ouvrage The Semantic Turn: a New Foundation for
Design, « le design est une fabrique du sens des choses
»15. Le design est alors là pour dépasser la simple
fonctionnalité et le simple côté esthétique d'un
produit, et pour jouer un rôle social en y intégrant les
émotions. Le design devient un outil pour nous faire comprendre les
choses, nous les rendre plus familières, afin de les intégrer
dans notre vie. Depuis les années 1990, la notion de design est
rentrée dans une nouvelle ère, où la finalité
humaniste reprend le pas sur la finalité marchande. De nouvelles formes
de design comme l'éco-conception, le design d'interaction, le design de
services, le design social ou encore le co-design ou design participatif
apparaissent, et ne se limitent plus seulement au design industriel. Le
designer s'intéresse et s'interroge désormais sur la façon
dont les individus, les groupes et les cultures vivent. On peut alors reparler
de projet, de projet design, et revenir au sens initial du design comme
étant une méthodologie de la conception chez les architectes de
la Renaissance. Par projet, Jean-Pierre Boutinet, auteur d'une imposante
anthropologie du projet, entend par projet « toute conduite d'anticipation
socialement observable, qu'elle soit individuelle ou collective
»16. Depuis ces dernières années, on constate que
le projet est devenu la matrice organisatrice de la plupart de nos
activités humaines dans une société postindustrielle. On
parle de « projet pédagogique », de « projet de loi
», de « projet architectural », de « projet
d'aménagement » et de « projet d'entreprise ». Projet
d'entreprise qui rejoindra notre concept de politique stratégique et
organisationnelle. Le projet de design ne se réduit toutefois pas
à la seule conduite d'anticipation. Le design est une discipline du
projet; il ne peut s'en passer. On n'a par exemple pas toujours eu besoin de
projet pour l'orientation professionnelle des jeunes (« projet
d'orientation »), cependant, il est tout simplement impossible de
fabriquer un objet industriel sans la méthodologie du projet en amont.
Le projet est un « trait structurel »17 du design.
Le design étant une discipline du projet par essence,
notre choix d'étudier l'approche Design Thinking non pas en tant
qu'outil d'innovation, mais plutôt en tant que mode projet prend tout son
sens. Les deux concepts sont liés intrinsèquement.
Continuons donc à approfondir la méthode projet
en design, et commençons à essayer de la comprendre.
Stéphane Vial a analysé dans De la
spécificité du projet en design: une
démonstration la culture de conception propre au design. Il a
alors affirmé que « pratiquer le projet en design, c'est
15 Krippendorff, 2006
16 Jean-Pierre Boutinet, Anthropologie du
projet
17 Stéphane Vial, Le design, p82
8
concevoir en fonction d'un idéal du monde un dispositif
artéfactuel complexe qui donne forme à des usages autant qu'il
produit des connaissances, en réaction à une demain ou un
insatisfaction, et grâce à une méthodologie rigoureuse en
constante évolution qui vise de manière créative et
innovante, à améliorer l'habitabilité du monde »18.
De cette définition, on en déduit trois caractéristiques.
Le design est une discipline du projet tout d'abord fondée sur une
culture créative. Le design est, en suite, une discipline avec son
propre mode de connaissances et de compréhension du monde. Enfin, la
discipline du projet en design est philosophiquement engagée dans la
construction d'un idéal d'avenir meilleur et durable.
Il existe deux manières d'aborder la question de la
méthode en design. La première est celle qui consiste à
penser cette méthode sur le modèle de l'art, c'est à dire
à considérer le processus de conception comme un acte de
création; acte de création fondé sur des méthodes
intuitives. Cette approche créative tend à résumer le
design à une simple discipline de création d'objets
destinés à l'exposition et/ou la vente dans des galeries d'art et
des musées. La deuxième manière est celle qui consiste,
cette fois-ci, à penser le design sur le modèle de la science. Le
processus de conception est alors considéré comme un acte de
projet, fondé sur des méthodes rationnelles. Cette approche
pragmatique du design s'enracine dans l'observation des pratiques, des usages
et des modes de vie. On passe alors de l'approche centrée-objet à
l'approche centrée-processus. Cette nouvelle manière d'aborder
les choses s'intègre dans le mouvement des Design Methods. Lancé
lors de la conférence des Design Methods à Londres en 1962, ce
mouvement vise à fonder le processus du design sur l'objectivité
et la rationalité, et donc à sortir de l'illusion selon laquelle
le processus de design serait un processus créatif reposant uniquement
sur l'intuition solitaire du designer-artiste. Comme le dit Rittel: « Tout
d'abord, l'acte design n'est pas un flux incessant d'événements
créatif; c'est un travail hautement organisé et structuré,
qui est seulement occasionnellement interrompu par de soudaines idées et
intuitions. Ensuite, on ne peut pas tenir pour acquis que ces rares «
événements créatifs » sont nécessairement
mystérieux et au-delà de toute compréhension. »19
Désormais, grâce au mouvement des Design Methods, les
méthodes en design peuvent être théorisés et
enseignés dans les écoles. Or, enseigner la méthode de
projet du design, c'est être capable de l'expliquer, la définir et
la questionner. C'est pour cela que dans les universités et la plupart
des écoles de design dans le monde, la recherche est inséparable
de l'enseignement du design. Ainsi, comme l'explique Alain Findeli, il ne
s'agit pas pour les designers de faire « de la théorie pour la
théorie », mais plutôt de « renoncer à
l'application de la théorie à la pratique en passant à la
fécondation de la pratique par la
18 Vial,S, De la spécificité du
projet en design: une démonstration
19 H.Rittel, Some principles for the design of
an educational system for design , Journal of Architectural Education 25
(1/2), 1971, p1
9
théorie »20. Bien évidemment, il faut
éviter de tomber dans le second écueil, qui est celui de «
réinventer le monde à chaque projet! »21.
Pour ce faire, l'enseignement va présenter la
diversité des théories du projet et de ses modélisations.
Une modélisation du projet (project mapping) est une
représentation, sous forme de schéma, des grandes étapes
incontournables et typiques d'un projet de design. Elle permet, par sa
représentation simple de « l'acte de design », d'orienter la
pratique des designers pour qu'ils soient plus efficaces. Hugh Dubberly a
regroupé d'ailleurs dans son livre inachevé, How do you
design?22, plus d'une centaine de modèles!
Ces nouvelles formes de design contemporaines semblent
constituer un socle à l'émergeant de la démarche Design
Thinking. Contrairement, au design thinking, héritier du mouvement des
Design Methods, qui vise donc à comprendre le processus de l'acte du
design, le Design Thinking est moins descriptif et plus normatif. Il vise
à améliorer les processus stratégiques de l'innovation
pour pouvoir installer des offres uniques, claires qui pourront répondre
de façons différenciées et durables aux besoins
fondamentaux du consommateur. Tim Brown, directeur de l'agence IDEO, fait du
Design Thinking son cheval de bataille. En 2009, il publie Change by
design, traduit en français en 2010 sous le titre
L'Esprit design, dans lequel il expose sa théorie
et sa méthodologie. Il en est venu à cette méthode, car il
s'est rendu compte que les designers étaient de plus en plus
sollicités par les entreprises pour résoudre des problèmes
éloignés des domaines « classiques » d'intervention du
design. Ses idées sont clairement exprimées dans un article
publié dans la Harvard Business Review publié en 2008. Brown y
présente alors le Design Thinking comme une « méthodologie
qui imprègne l'ensemble des activités d'innovation avec une
philosophie centrée sur l'humain »23.
Le concept de Design Thinking s'ancre dans une logique selon
laquelle le design industriel classique n'est plus adapté et pertinent
pour affronter les enjeux du mode contemporain:
« Désormais, plutôt que de demander aux
designers de rendre une idée déjà développée
plus attractive pour les consommateurs, les entreprises leur demandent des
idées qui rencontrent mieux les besoins et les désirs
réels des consommateurs. Le premier rôle est tactique, et se
réduit par la création limitée de valeur; le nouveau
rôle est stratégique, et conduit à d'extraordinaire
nouvelles formes de valeurs »24.
20 A.Fideli, R.Bousbaci, cit, p40
21 A.Fideli, R.Bousbaci, version longue, EAD 6
(colloque de Brême) 2005, p12
22 H.Dubberly, How do you design?, 18 mars
2005, en ligne (septembre 2004):
http://goo.gl/zHd6
23 T.Brown, Design Thinking, Harvard Business
Review, juin 2008, p86
24 T.Brown, Design Thinking, Harvard Business
Review juin 2008, p86
10
Dans une économique des services et de la connaissance,
il ne s'agit désormais plus seulement de créer des produits, mais
« des procédés, des services, des interactions
numériques, des divertissements, des manières de collaborer et
communiquer, autant d'activités centrées-humain dans lesquelles
le Design Thinking peut faire la différence »25. En
effet, au fur et à mesure que les activités économiques
des pays développés mutent, en passant d'une activité de
fabrication à une activité de connaissance et de services
fournis, « l'innovation s'affirme comme une stratégie de survie
26». Il faut donc passer à une « approche de
l'innovation puissante, efficace et accessible, tenant compte de tous les
aspects de l'entreprise et de la société27». La
pensée design trouve des solutions à des questions
éloignés de l'objet.
Méthode du Design Thinking selon Tim Brown
Ainsi, comme toutes les nouvelles formes de design
contemporains mentionnées précédemment, le Design Thinking
s'insère dans le mouvement de l'éclipse de l'objet et affiche son
ambition d'humaniser le monde actuel. Le Design Thinking ne croit pas non plus
au « génie créateur », mais plutôt au «
travail augmenté par un processus créatif de découverte
centré sur l'humain et suivi par des cycles itératifs de
prototype, de test et d'affinement ». Inspiré par le concept de la
pensé intégrative, le Design Thinking tente d'intégrer
trois variables à leur réflexion: la variable humaine «
désidérabilité » (intégrer l'homme au coeur du
processus de réflexion et donc ne pas positionner les entreprises au
dessus), la variable financière « viabilité » et la
variable technologique « faisabilité ». Ces trois
critères indissociables conditionnent la validité d'une
idée, avant même celui du projet. Le but étant de «
conjuguer ces trois critères dans un équilibre harmonieux
»28. Le Design Thinking part donc des compétences que
les designers ont apprises ces dernières décennies pour mettre en
adéquation les besoins des hommes avec les ressources techniques
disponibles, tout en respectant les contraintes économiques et
environnementales. En conciliant ces trois variables, les designers ont
créé les produits que nous avons aujourd'hui.
25 T.Brown, Design Thinking, Harvard Business
Review juin 2008, p86
26 T.Brown, L'esprit design , 2014, p 8
Pearson
27 T.Brown, L'esprit design, 2014, Pearson
28 T.Brown, L'esprit design, p19, 2014
Pearson
11
Fig: Modèle intégratif du Design Thinking selon
l'agence IDEO
Désormais, l'approche Design Thinking va encore plus
loin et évolue vers un transfert des compétences du designer
à d'autres acteurs, jusqu'alors étrangers au monde du design. Ces
derniers vont les appliquer à des problématiques plus vastes. Le
Design Thinking sollicite des capacités que nous possédons tous,
mais qui ne sont généralement pas utiliser dans les
méthodes classiques de résolution de problèmes. « Il
n'est pas seulement centré humain, mais il est humain en soi
29». Il mobilise notre intuition, notre capacité
à générer des idées à fort contenu
émotionnel, et à nous exprimer autrement que part des mots et des
signes. Aujourd'hui, les entreprises ont tendance à concentrer leur
innovation à des idées rentables sur le court terme. Cela donne
lieu à des produits qui certes séduisent les consommateurs, mais
qui s'avèrent très souvent être inutiles et finissent
à la poubelle. Victor Papanek le résume ainsi: « Convaincre
des gens d'acheter des choses dont ils n'ont pas besoin, avec l'argent qu'ils
n'ont pas, pour impressionner leurs voisins qui s'en moquent
»30.
En parallèle de ces trois variables qui tendent
à se réunir, 3 temps, appelés « espaces » par
Tim Brown, divisent la réflexion Design Thinking: l'espace de «
l'inspiration » (caractériser et problé-matiser le sujet),
l'espace de « conceptualisation » (engendrer, développer et
tester des idées) et enfin l'espace de « réalisation »
(trouver le marché qui rencontre les utilisateurs). L'usage de la notion
d'espace permet de mettre l'accent sur la nature non-linéaire
et itératif du processus de réflexion:
« Les projets passent en boucle à travers
des espaces - en particulier les deux premiers - bien plus qu'une fois,
à mesure que sont affinés les nouvelles idées et que sont
prises les nouvelles directions »31.
29, T.Brown, L'esprit design, p4, 2014,
Pearson
30 Victor Papanek, Design for the Real World:
Human Ecology and Social Change
31 T.Brown, Design Thinking, Harvard Business
Review, juin 2008, p86
12
L'espace de l'inspiration se résume à
l'observation des besoins des personnes dans son mode de vie et son contexte
culturel: se laisser inspirer par les usages, s'efforcer d'être en
empathie avec eux, se mettre à leur place afin de tenter de penser et
percevoir le monde comme eux. L'espace de de conceptualisation est
l'expérimentation concrète, via de nombreux prototypes, afin de
faire émerger de nouvelles idées. Il s'agit de « faire pour
penser, non pas penser pour faire »32. Enfin, l'espace de
réalisation consiste à rechercher, puis mettre en oeuvre
une stratégie marketing et commerciale adaptée en au
marché ciblé, tout en incluant une forte participation des
utilisateurs.
Ce phénomène de boucle et de
non-linéarité du processus ne tiennent pas à un manque
d'organisation ou de discipline de la part des designers, mais s'expliquent
plutôt par le fait que le « Design Thinking est fondamentalement un
processus exploratoire »33.
La phase initiale d'un projet est consacrée à la
constitution d'une équipe projet pluridisciplinaire: des designers, des
spécialistes, des experts, des marketers, des ingénieurs etc.
L'équipe projet est, comme le dit Tim Brown, « l'ingrédient
majeur à l'innovation ». Il est toujours possible de travailler
seul, toutefois la complexité des projets actuels rend difficile ce type
de fonctionnement. Dans la mesure où le design intervient dans de
nombreux domaines et se situent en amont du processus d'innovation, le designer
qui réfléchit seul aux relations entre la forme et la fonction,
ne peut gagner face aux équipes interdisciplinaires. « Le design
est trop important pour être laissé aux seuls mains des designers
»34. Le designer est donc amené à collaborer de
plus en plus avec les psychologues, philosophes, ethnographes,
ingénieurs, scientifiques, managers, marketers, etc. Toutes ces
disciplines contribuent depuis toujours au développement des nouveaux
produits et des services. La différence est que la démarche
Design Thinking les oblige à cohabiter au sein d'une même
équipe et à exploiter le même processus de
réflexion. Ils apprennent alors à communiquer entre eux, et cela
favorise la transversalité des activités et des
responsabilités, ce qui a pour effet d'étoffer la
créativité. Elaborer un projet avec un regroupement de
professionnels issus de domaines d'activités différents demande
du temps et de la patience. On peut prendre l'exemple des designers et des
architectes qui ont du mal à échanger et à partager, voir
qui ont tendance à se détester. Il est donc nécessaire de
prendre son temps pour les choisir.
Ainsi, depuis la création de l'institut de design
à l'université de Stanford en 2005, des écoles
spécialisées ouvrent leurs portes comme le Hasso-Plattner
Institut (HPI) à Postdam en Allemagne ou en-
32 T.Brown, L'esprit design , 2014,
Pearson
33 T.Brown, 2014, L'esprit design , Pearson
p17
34T.Brown, Designers - think big! TED Global
2009, Oxford, juillet 2009, en ligne
http://www.ted.com/talks/tim
brown urges designers to think big
13
core l'université Aalto d'Helsinki en Finlande, fusion
de l'université technologique avec l'école supérieure
d'art, d'architecture et de design, et l'école de commerce. En France,
l'intégration de l'approche Design Thinking dans les programmes de
formation reste contrastée. Alors qu'elle a tendance à être
ignorée voir méprisée dans les écoles de design
traditionnelles, les écoles d'ingénieur s'y intéressent
avec notamment l'ouverture du programme IDEA (Ecole centrale et EM Lyon) et de
la Paris-Est Design School (Ecole des Ponts ParisTech). Les nouvelles
formations proposent de plus en plus des programmes à double profil,
comme des ingénieurs ayant une expérience dans le marketing. Les
entreprises créatives sont en effet à l'affut de profils
polyvalents et capables de travailler de façon transversale. C'est
pourquoi, Tim Brown insiste bien sur la différence entre équipe
multidisciplinaire et une équipe interdisciplinaire.
« Dans une équipe multidisciplinaire, chacun fait l'avocat de sa
propre spécialité et la collaboration se résume à
une négociation sans fin qui aboutit le plus souvent à un
compromis de fortune. Dans une équipe interdisciplinaire, les
idées sont la propriété de tous et de chacun
»35. Ceux qui veulent donc pratiquer le Design Thinking doivent
travailler au sein d'une équipe interdisciplinaire.
Le projet dans une approche Design Thinking est fondamentale,
voir nécessaire. On ne parle pas de problème, mais
plutôt de projet. Le projet est en effet le vecteur par lequel
l'idée passe du concept à la réalité. Il
s'incère dans la réalité avec un début et une fin,
et la mise en place d'actions. Le fait que le Design Thinking s'exprime dans le
cadre d'un projet, cela oblige à rédiger un cahier des charges
avec des objectifs clairs.
Depuis toujours, les entreprises françaises ont eu
tendance à négliger l'environnement de travail de ses
salariés. Mais depuis la percée de Google alors que dans son
bâtiment il y a des toboggans et des dinosaures à grandeur nature
gonflables, il est difficile de ne pas admettre que cet environnement stimule
la créativité de ses salariés. De nombreuses études
montrent que l'efficacité des hommes est déterminée par
leur environnement physique et par l'entourage psychologique dans lequel ils
travaillent. Il faut « permettre aux individus d'être pleinement
eux-mêmes »36 comme le souligne Tim Brown. Dans les
structures, on observe souvent que les différents services sont
séparés eux-entres.
Le Design Thinking est une méthode qui permet aux
non-designers de faire du design. En effet, cette démarche se base sur
trois compétences humaines qui ne nécessitent pas de formation
particu-
35 T.Brown, L'esprit Design, p28, 2014
Pearson
36 T.Brown, L'esprit Design , p33, 2014
Pearson
14
lière. Ces trois compétences font
référence à trois éléments qui conditionnent
la réussite d'un projet. Ces trois éléments sont comme le
définit Tim Brown: « l'intuition, l'observation et l'empathie
»37.
Il est difficile de détecter les besoins. Les besoins
arrivent soit à ne pas être formulés correctement, soit ils
sont latents voir inconscients. Le rôle des designers initialement est
d'aider les gens à formuler des besoins latents voir inconscients. La
pensée design a pour mission de traduire les observations en
informations, puis ces dernières en produits et services, pour
améliorer la vie des hommes. Les comportements ont toujours
été très significatifs. Pour se faire, il va avoir recourt
à ces trois critères.
L'intuition est « l'un des fondamentaux de la
pensée design »38 comme le précise Tim Brown.
L'idée est de sortir des studios pour les designers et des bureaux pour
les marketers, ingénieurs.., et d'aller dehors et d'observer le
quotidien des différentes populations potentiellement ciblées par
leurs produits et services en cours d'élaboration. La psychologue Jane
Fulton Suri, pionnière à s'être intéressée
aux facteurs humains, se focalisait aux nombres « actes inconscients
» que nous faisons chaque jour: les livres que le salarié met pour
poser son écran d'ordinateur à hauteur des yeux. L'homme
consommateur de produits et services aura beaucoup de difficulté
à exprimer réellement ses besoins et ce que les entreprises
pourraient faire pour améliorer son quotidien, alors que son
comportement réel pourra nous renseigner sur l'ensemble de ses besoins
non satisfaits. Ce travail pour essayer d'apprendre de la vie des autres,
déclenche des idées créatives chez tout le monde;
idées créatives qui part d'intuitions issues de ce travail
d'observation.
L'observation a pour but de regarder ce que les gens ne font
pas et écouter ce qu'ils taisent. En effet, la meilleure façon
d'apprendre à connaître des gens est de vivre avec eux un certain
temps. Il est donc nécessaire de se rendre sur place pour une
période d'observation intensive. L'idée est de « regarder ce
que font les gens (et ne font pas) et écouter ce qu'ils disent (et ce
qu'ils ne disent pas) »39. Bien entendu, cela exige une
certaine pratique, car ce n'est pas la quantité, mais plutôt la
qualité qui compte. L'empathie, enfin, consiste à se mettre
à la place de l'individu, et non pas les considérer comme des
rats de laboratoire. Pour se mettre à leur place, il faut d'abord
comprendre leurs comportements et leurs émotions; c'est l'empathie.
Ainsi, il est possible d'adopter leur regard sur le monde, de
l'appréhender au vue de leurs expériences et de le ressentir
à travers leurs émotions. C'est en empruntant la vie des autres
et en créant des ponts entre eux et les équipes projets, qu'il
est alors possible d'imaginer des idées neuves. Une forme de
collaboration est alors inventée, plus seu-
37 T.Brown, L'esprit Design, p41, 2014
Pearson 38, T.Brown, L'esprit Design, p41, 2014
Pearson 39 T.Brown, L'esprit Design, p41, 2014 Pearson
lement entre les membres de l'équipe, mais entre
l'équipe et le public. Ce n'est plus la logique « nous pour
eux », mais plutôt « nous avec eux » pour
les adeptes du Design Thinking. Howard Rheingold l'a montré dans ses
études sur « les foules intelligentes », tout comme Jeff Howe
qui a créé le concept de « crowdsourcing »40
(ou « design participatif distribué).
Nous sommes à un moment significatif dans la
manière où le rôle des consommateurs est
considéré. On est passé d'un consommateur passif à
un consommateur actif, où l'idée est d'aller vers eux pour les
observer dans leur mode de vie et leurs expériences et d'utiliser ces
données comme source d'inspiration, et donc d'innovation. Concentrer du
temps à comprendre une autre culture en se rendant sur place peut donc
ouvrir de nouvelles opportunités à l'innovation. La phase ultime
serait le moment où le public créerait lui-même son
produit. Toutefois, la capacité des consommateurs a créé
seul des idées réelles novatrices (sans reproduire des concepts
déjà existants ou avec des coûts de production faibles) n'a
toujours pas confirmé. Avant d'arriver à ce stade, on voit
largement arriver et se développer une collaboration entre
l'équipe projet et les consommateurs, avec en parallèle une
disparition des frontières entre les entreprises et les individus.
Constater le pouvoir du design et le défendre est
encore autres chose que de l'intégrer dans sa réflexion et de
l'incorporer à sa structure. Le processus de la pensée design
passe par plusieurs cycles: des cycles d'expérimentations, de
fortes intuitions, puis de focalisation sur des détails, avant de
repasser à une phase d'observation. La pensée design ne cesse
donc de diverger puis de converger.
Faire l'expérience de la démarche Design
Thinking équivaut comme l'affirme Tim Brown, « à s'engager
dans une danse qui oscille entre quatre états mentaux
»41. La pensée design ressemble donc à un
échange rythmique entre les phases de divergence et de convergence,
passant d'un état d'espoir, à l'intuition puis à la
confiance.
15
40 Néologisme conçu en 2006,
calqué sur « outsourcing », externalisation. Il consiste
à utiliser la créativité, l'intelligence et le
savoir-faire d'un grand nombre d'internautes. (NdT)
41 T.Brown, L'esprit Design , p68, 2014
Pearson
16
Tim Brown nous explique, que via ce cheminement entre
l'espoir, la confiance et l'intuition, l'équipe projet doit se
préparer à osciller entre espoir et excitation lors de la phase
de lancement du projet, puis entre excitation et confiance à la fin du
projet quand la satisfaction d'avoir terminé et d'avoir
réalisé un travail qui correspond à vos attentes
née. Mais entre ces deux phases, la courbe de confiance est
forcément mise à mal et l'échec est alors
inévitable. Cet échec n'en est finalement pas vraiment un, car il
permet à l'équipe de se remettre en question et de faire encore
émerger de nouvelles idées. La pensée design se
présente donc rarement comme une promenade idyllique. Elle met à
l'épreuve nos émotions et notre aptitude à collaborer
ensemble, tout en valorisant et récompensant les résultats
méritants.
La phase divergente consiste à faire émerger de
nouvelles idées et à l'inverse, la phase convergente
élimine les options et doit faire des choix. La plupart des idées
crée de la complexité et les entreprises préfèrent
limiter les problèmes en privilégiant les solutions
évidentes qui ne remettent pas en cause les choses existantes. Bien que
cette solution semble efficace sur le court terme, elle rend l'entreprise peut
flexible face aux imprévus et conservatrice. La pensée
divergente, comme l'affirme Tim Brown, « contrairement aux idées
reçues, n'est pas un obstacle à l'innovation, bien au contraire,
elle y mène directement »42. En complément de la
pensée divergente et de la pensée convergente, on peut introduire
les termes d'analyse et de synthèse.. L'idée
étant de faire émerger un récit cohérent et
pertinent via l'analyse et la synthèse.
42 T.Brown, L'esprit Design, p41, 2014
Pearson
17
Différents outils créatifs peuvent être
mis en place au sein d'une structure. Ces outils participent à
l'émergence de nouvelles idées. Initialement, instituées
pour les équipes créatives, les séances de brainstorming
peuvent se faire à tous niveaux de l'entreprise. Cette technique tend
à se répandre avec de nombreux articles entre autre écris
par des professeurs d'école de commerce. Bien que certains disent que
les individus trouvent plus rapidement une idée en étant seul
qu'en groupe de travail, d'autre démontrent que le brainstorming est
indispensable à la créativité. Le brainstorming s'impose
de lui-même lorsqu'il est question d'aboutir à un plus grand
nombre d'idées; rien ne vaut une bonne séance pour les
créer. Il existe des dériver comme les workshops.
Les histoires et les récits ont toujours servi à
mettre des idées dans un contexte afin de leur donner un sens et une
signification. Il semble donc naturel que dans une démarche de conduite
de projet centré sur l'homme, la capacité de l'homme à
écrire joue un rôle majeur. Les scénarimages,
l'improvisation ou encore les scénarios sont des techniques de narration
qui aident à visualiser une idée dans la phase de conception.
L'usage de la fiction a un double enjeu aujourd'hui. Elle permet certes de
développer des idées novatrices, mais elle permet surtout de
développer, et ainsi de proposer au consommateur, une expérience
en achetant et/ou en utilisant le produit.
Comme l'affirme Joseph Pine II et James H. Gilmore, nous
commençons à entrer dans une « économie de
l'expérience »43. Ce type d'économie est
marqué par le fait que les hommes passent de la consommation passive
à la participation active. Ainsi, le consommateur recherche avant tout
une expérience dans l'achat et l'usage d'un produit. Les attentes des
consommateurs augmentent. Il ne suffit désormais plus d'avoir une bonne
idée. Les bénéfices fonctionnels seuls du produit ne
suffisent plus à séduire le consommateur ou à créer
des signes distinctifs sur le marché. Le consommateur recherche avant
tout un contenu, une histoire additionnelle.
Désormais, l'enjeu réside dans cette
capacité à crée une histoire, une expérience dont
le consommateur pourra se souvenir. Cette expérience pour qu'elle soit
réussie, doit toucher le consommateur sur le plan émotionnel et
expérientiel. Une histoire bien racontée peut avoir un impact
émotionnel redoutable. Cette expérience peut passer par la
participation du consommateur où il devient alors l'auteur de sa propre
expérience. L'arrivée de la musique numérique et
d'internet a encouragé un grand nombre d'entre nous à pratiquer
de la musique, au lieu de la consommer purement et simplement. Grâce
à des logiciels comme Garage Band sur Mac, le consommateur est
invité à composer sa propre musique, sans savoir
nécessairement jouer d'un instrument. Au niveau du marketing et de la
communication, on va parler de storytelling. Le storytelling est un
moyen pour une marque de raconter son histoire à travers une
cohérence entre son passée et sa charte graphique, ses
décorations
43 Joseph Pine II et James H. Gilmore, The
Experience Economy
18
de magasin ou encore ses plans de communication. Le
storytelling est « faire usage des codes narratifs ». Le storytelling
permet à la marque de s'identifier, de créer une cohérence
dans sa communication et de se rapprocher du consommateur. Le storytelling est
un enjeu pour les entreprises au-jourd'hui car une récente étude
montre que si des marques étaient amenées à disparaitre,
73% des personnes ne s'en soucieraient pas, et seulement 20% des marques sur
marché proposent une sensation de bien-être au consommateur.
L'image des marques et des entreprises sont en berne. L'approche par le Design
Thinking rentre directement dans cette logique de storytelling par son
intérêt pour l'humain.
I.2/ Politique stratégique et
organisationnelle
Le concept de « politique stratégique » est
composé du nom commun politique et de l'adjectif stratégique.
L'adjectif stratégique est lui-même issu du sens même du nom
« stratégie ». Il faut tout d'abord bien définir le
concept de la stratégie. C'est après avoir bien identifier ses
caractéristiques et son sens, que nous pourrons mieux appréhender
la notion de politique dans ce concept.
Etymologiquement, le mot stratégie provient du grec
ancien, strategós. Au Véme siècle av-JC, un strategos, ou
stratège, était un magistrat élu chargé de diriger
les questions de la politique militaire athéniennes. C'est en 1771, soit
dix siècles plus tard, que le mot stratégie est inventé
par le lieutenant-colonel Joly de Maïzeroy après avoir
essayé « la stratégique » sur le modèle de la
tactique et de la logistique. Dans le Larousse, la stratégie est un nom
commun féminin qui désigne « l'art de combiner l'action de
forces militaires en vue d'atteindre un but de guerre déterminé
par le pouvoir politique. »44 La stratégie est donc l'ensemble des
actions qui maximisent dans un univers conflictuel ou concurrentiel - face
à un rival, un adversaire ou un opposant - les chances d'atteindre un
objectif donné. Ce terme est donc utilisé dans l'emploi des
forces militaire, en politique, en diplomatie, en guerre, et en management
d'entreprise et marketing. Dans le cadre du management d'entreprise, il existe
une multitude de définition pour la stratégie d'entreprise.
Chaque auteur ayant approfondi sur ce sujet, présente sa propre
définition. Prenons par exemple la définition de trois auteurs;
celle d'Alfred Chandler, grand historien et économiste américain
qui s'est concentré sur la gestion des grandes entreprises
américaines, celle d'Alain Derray et Alain Lusseault dans Analyse
stratégique paru en 2001, et enfin celle de
Frédéric Le Roy, professeur et chercheur spécialiste des
stratégies concurrentielles. Alfred Chandler dans son livre,
Stratégies et structures de l'entreprise,
édité en 1964, voyait la stratégie comme un
concept en deux phases qui consistait « à déterminer les
44 Définition Stratégie, Larousse
Online
19
objectifs et les buts fondamentaux à long terme d'une
organisation, puis à choisir les modes d'action et d'allocation des
ressources qui permettront d'atteindre ces buts et objectifs.»45 En
d'autres termes, c'est allouer des ressources nécessaires à des
actions préalablement définies afin d'atteindre ses propres
objectifs. A.Derray et A.Lusseault y voient plutôt « un art de
l'organisation et de la coordination d'un ensemble d'opérations pour
parvenir à un but».46 L'emploi de l'art renforce l'idée de
difficulté dans la mise en place d'une stratégie, et fait
plutôt référence à un don, plus qu'à une
compétence que l'on peut acquérir après une formation.
Pour Frédéric le Roy dans Stratégies de
l'Entreprise, la stratégie d'entreprise « s'inscrit
dans un environnement, en fonction duquel elle va fixer des objectifs puis
allouer des ressources afin d'obtenir un réel avantage compétitif
durable ».47
Le point commun entre ces trois définitions est
l'atteinte d'objectifs préalablement définis. La stratégie
d'entreprise est donc un processus qui se met en place dans l'optique
d'atteindre un, voir plusieurs objectifs bien précis, comme par exemple
un taux d'occupation d'un hôtel à 100%, le lancement d'un nouveau
produit ou assurer une maintenance 24h/24h 7j/7. A.Derray et A.Lusseault,
mettent l'accent sur le management des actions dans le but d'atteindre des
objectifs, alors qu'Alfred Chandler et Frédéric le Roy sont tous
les deux d'accord pour affirmer que des ressources doivent être
mobilisées après définition de ces objectifs; ressources
qui vont pouvoir mettre en pratique des actions pour concrétiser ces
objectifs. Frédéric le Roy va encore plus loin dans le sens
« d'objectif ». Pour lui, ceux ne sont pas des objectifs fixés
au hasard, mais bien des objectifs qui s'inscrivent dans une volonté de
se positionner sur un marché différent au vue de l'environnement
actuel, dans le but d'être plus compétitif. Toutefois, avant
même de se projeter dans la consolidation ou l'expansion d'une
entreprise, il est impératif de répondre à ses besoins
nécessaires pour qu'elle puisse fonctionner au jour le jour. On constate
donc qu'il existe plusieurs niveaux d'application de stratégie
d'entreprise, et qu'il est donc impératif de les distinguer. Selon Garry
Johnson et Kevan Scholes, il existe trois niveaux d'application de la
stratégie:
- La stratégie d'entreprise qui est le processus qui
permet de créer un portefeuille d'activités et d'allouer des
ressources humaines et financières pour pérenniser l'entreprise.
« Elle a pour but de répondre aux attentes des actionnaires, et des
autres parties prenantes en augmentant la valeur des différentes
composantes de l'entreprise »48,
- La stratégie par domaine d'activité
stratégique,
45 Alfred, Stratégies et structures de
L'entreprise, Paris, Organisation 1964
46 Alain Derray, Alain Lusseault, Analyse
stratégique, Ellipses, 2001. (p. 86)
47 Frédéric Le Roy, Les
stratégies de l'entreprise, 4e édition, Dunod,
2012 48, Garry Johnson et Kevan Scholes, Stratégique
édition Pearson
20
- Les stratégies opérationnelles
déterminent la manière dont les différentes composantes de
l'entreprise pourront répondre effectivement aux choix
stratégiques pris au niveau global et de chacun des domaines
d'activités.
On parle de stratégie d'entreprise à partir du
moment où cette dernière a définit clairement ses besoins
et objectifs, et souhaite développer un positionnement
différenciant sur le marché. Le positionnement
différenciant se définit à partir des avantages
compétitifs identifiés en amont. La recherche des avantages
compétitifs est souvent source de performance et de distinction de
l'offre produits et services. Le portefeuille d'activités peut
s'étendre comme se spécifier dans un coeur de métier
propre. L'avantage compétitif crée de la valeur ajoutée
générant des profits financiers. Ainsi, la capacité
d'investissement de cette dernière en R&D, marketing, communication
et outil de production est plus forte. Elle peut alors maintenir sa position
compétitive. On comprend dès lors l'importance de l'innovation
dans cette recherche d'avantages compétitifs, qui une fois
intégrer à la stratégie prendront la forme de facteurs
clés de succès. La définition d'une stratégie se
fait en trois étapes clés:
1) Segmentation des domaines d'activités
stratégiques
2) Définition des systèmes compétitifs qui
aboutit au positionnement
3) Définition des facteurs clés de
succès
Une analyse stratégique et prospective met en avant les
enjeux, les champs d'actions possibles, et définit les axes
stratégiques de l'entreprise et ses facteurs clés de
succès. Toutefois, les facteurs clés de succès ne
constituent pas une finalité en soi. Leur succès dépend de
leur mise en place dans le cadre d'actions concrètes et globales.
Ces actions concrètes, au delà de leurs
objectifs premiers, impacteront nécessairement dans la phase de
réalisation les ressources humaines, la production, le management,
l'image de l'entreprise, sa communication, son organisation, et sa politique
d'entreprise. Le choix pour une entreprise d'avoir recourt à la
démarche Design Thinking, comme moteur de l'innovation, impactera
l'entreprise. En effet, le Design Thinking en raison de son processus de
réflexion et de mise en place d'un nouveau mode de travail, celui du
mode projet, impacte la stratégie politique et organisationnelle.
L'idée est alors de savoir comment l'appropriation de cette nouvelle
démarche se concrétise dans une entreprise?
Trouver une articulation pertinente entre notre
problématique (objet de recherche) avec le terrain et notre
méthode de recherche est fondamentale pour répondre au mieux
à notre question.
21
Dans cette seconde partie donc, accès sur notre
méthodologie, nous allons exposer clairement notre positionnement
épistémologique et ses raisons. Par positionnement
épistémologique, nous entendons le choix de notre approche
plutôt qualitative ou quantitatif, de notre échantillon et
terrain. Nous présenterons alors les moyens mis en place, et toutes les
informations nécessaires pour mieux comprendre notre terrain.
II. Méthodologie
II.1/ Epistémologie
Suite à notre revue littéraire et au vue de
notre problématique, nous constatons que l'approche qualitative
s'impose. En effet, nous ne cherchons en aucun cas à valider ou
réfuter des hypothèses, mais bien à répondre
à la question du comment on peut mettre en place une démarche
Design Thinking dans la conduite d'un projet. Et d'observer ainsi ses impacts
d'un point de vue organisationnel et stratégique. Ultérieurement,
nous avons mis en avant les grands principes intelligibles de la
démarche Design Thinking. Nous cherchons dès lors à faire
émerger des modes organisationnels concrets et simples en se basant sur
ses grands principes, pour que les entreprises puissent s'approprier facilement
cette nouvelle approche de conduite de projet. Nous adopterons donc une
démarche exploratoire et constructiviste.
Notre guide d'entretien s'articulera donc autour des grands
principes fondamentaux du Design Thinking que nous avons fait émerger et
que nous avons expliqué dans notre revue de littérature et qui
sont:
- Une équipe pluridisciplinaire
- Une recherche centrée sur l'homme et
préoccupée par son bien-être et son bonheur
- Un cahier des charges bien défini
- Une capacité à observer et être en
empathie
- Des outils pour explorer et expérimenter les
idées
- Etre sur le terrain
- Impliquer le consommateur dans la recherche.
Ils constitueront des sous-problématiques qui
structureront des questions simples et ouvertes. Le guide d'entretien (voire
annexe 1) nous permettra de faire, selon l'entreprise interviewée, soit
un retour d'expérience si elle a déjà eu recours au Design
Thinking, soit une séance d'idéation stimu-
22
lante dans le cas contraire. Ainsi, on pourra faire un bilan
du Design Thinking aujourd'hui au sein des entreprises en France. Cela nous
aidera et enrichira notre analyse prospective.
II.2/ Présentation du terrain et de
l'échantillon étudiée
Initialement, nous avions pensé faire de la
54ème édition du salon du meuble de Milan notre terrain. Ce salon
du meuble de Milan se déroulait du 13 au 19 avril 2015. L'un de nous
deux allant pour le travail au Salon, nous avions souhaité profiter de
cet événement pour y réaliser notre étude. Le salon
international du meuble et du design est installé dans le parc des
expositions de Rho au nord-ouest de Milan. Il regroupe plus de 2106 exposants,
sur plus de 200 000m2. Le OFF, répartis sur 3 quartiers (Breira, Tortona
et Lambrate), rassemble lui plus de 200 expositions. Près de 300 000
visiteurs (professionnels de l'ameublement, décorateurs, designers mais
des curieux) se sont rendus sur le salon pour découvrir les
dernières créations des plus grands fabricants de secteur. Cet
événement réunit en effet des fabricants et
éditeurs de meubles, mais aussi les designers et futurs designers de nos
espaces de vie. Un événement idéal pour rencontrer
facilement des entreprises et designers français pour leur parler du
Design Thinking.
Ce qui nous amenait donc à notre échantillon qui
aurait été les fabricants et éditeurs de meubles
français. Cela était certes restrictif par rapport au tissu
industriel français dans sa globalité. Toutefois, ce choix de
population observée n'était pas anodin, pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, c'est un secteur historiquement fondé sur des
équipes créatives. Grâce au design, le meuble a pu
évoluer, et s'industrialiser puis se standardiser. On pense alors aux
Modernistes illustré par le Corbusier et D'ailleurs, pour certain
historien, le XVIIIème siècle marqué par le château
de Versailles et les fauteuils Louis XIV, serait à la source du design.
Deuxièmement, le marché de l'ameublement français est en
difficulté avec une perte de compétitivité, à
l'égard de ses voisins italiens et suédois bien plus
compétitif sur ce marché. Troisièmement, ce marché
est conscient de cette nécessaire à être innovant en terme
d'offres, de distribution et de services, et sur le plan industriel, logistique
et du financement. Les nouveaux modes de vie et usages, marqués par
l'arrivée de la génération Z, et l'arrivée du
numérique et des objets connectés dans la maison font du
marché du meuble et de l'aménagement intérieur, un
marché prioritaire pour l'innovation. Par essence, le marché du
meuble est focalisé et centré sur l'homme et la recherche de son
bien-être. Un marché donc idéal pour mettre en place dans
les entreprises françaises une approche Design Thinking.
En raison de ce terrain et cet échantillon, les
entretiens prenaient la forme d'interviews en face à face qui se faisant
directement sur le stand au salon. Cela était plus facile d'un point de
vue organisationnel qu'un groupe de discussion. Il nous suffisait d'aller sur
le stand, et de leur demander après
23
présentation de notre parcours et de notre projet de
mémoire de recherche si quelqu'un serait d'accord pour nous accorder 10
min afin de débattre de la démarche du Design Thinking.
Malheureusement ayant finalement obtenu que 3 entretiens en
raison d'une présence française sur le Salon trop faible, il a
été nécessaire de repenser notre méthodologie. Le
temps nous permettant de nous retourner, nous avons mis en ligne le
questionnaire via notre page Linkedin et un blog. Nous avons aussi
envoyé ce questionnaire à nos connaissances du milieu de
l'entreprise. Cette démarche nous a permis de recueillir 6
réponses supplémentaires.
Ces entretiens ont été complétés
par des données secondaires, dites « de secondes mains »
collectés dans le cadre de conférences, d'études annexes
ou dans d'autres contextes que celui de notre mémoire de recherche.
La méthode de collecte de données de type
qualitatives se partagera, comme nous l'apprend la démarche Design
Thinking, entre les entretiens et les observations faites sur places.
L'entretien constituera à demander une extraction d'informations sur
leur vision du Design Thinking et de la place à l'innovation faite dans
les structures françaises; l'observation nous demandera de regarder
globalement les stands et de trouver « l'innovation »; le texte
ressortit des entretiens et de nos recherches en base de données sera
examiné.
II.3/ Méthode utilisée
L'unité d'échantillonnage qui fait la base de
notre sondage est donc les entreprises françaises (allant d'une
activité de production, de fournisseur à une activité de
services) ayant déjà recours à des équipes
créatives ou ayant développer en interne un pôle «
Innovation ». L'unité déclarative est alors les
salariés des industries françaises. Il est en effet important de
ne pas se limiter qu'aux dirigeants, et d'interroger les personnes qui
pourraient potentiellement avoir recours et/ou participer activement au Design
Thinking. Nous pensons aux marketers, aux commerciaux, aux managers et aux
ingénieurs. L'unité de référence est alors le
designer. La taille de notre échantillon est une vingtaine
d'industriels. Cette taille est malheureusement en dessous de la taille
suffisamment conséquente pour avoir un degré de précision
viable sur une étude qualitative. Taille d'échantillon qui est de
30. On passera à un échantillonnage au jugé. C'est
à dire qu'il sera choisi au hasard parmi ceux de nous croiserons, car
nous considérons qu'il est apte à répondre à nos
questions et révélateur du propos. Toutefois il est reste libre
de nous accorder ou pas cet entretien d'une quinzaine de minutes.
24
III. Enquête et Analyses des résultats
Analyses et commentaires
Dans cette partie d'analyse et de synthèse, nous allons
reprendre question par question celles du questionnaire, afin de ne rien
oublier et de faire ressortir au mieux les remarques et résultats
pertinents. (Voir annexe 2)
Question 1:
Il était demandé à notre
échantillon de nous dire combien de personnes en moyenne sont
impliquées dans l'équipe projet. Il en est ressorti 2 chiffres:
de 2 à 10 personnes et plus de 15.
Nous pensons que ce chiffre varie en fonction de la taille de
l'entreprise. Plus l'entreprise sera grande, plus il y aura de personnes
impliquées dans l'équipe projet.
Question 2:
Nous les interrogions cette fois-ci sur la place des designers
dans les différents projets menés par l'entreprise.
Les designers sont certes présents
régulièrement en réunion, ils le sont aussi du
début à la fin du projet, jusqu'à son lancement. Nous
constatons toutefois une réduction du rôle des designers par les
dirigeants, en donnant aux designers un simple rôle de conseillés
avec une participation réduite, alors que les responsables de
département tendent à valoriser leur participation dans les
différents projets.
Question 3:
Les départements généralement
impliqués dans les projets d'une entreprise sont celui du marketing, des
ventes, du développement commercial, du recherche et
développement et de la finance. On constate ici que les entreprises
favorisent toujours certains départements, au détriment de
d'autres. Bien que le département création/ design ait
été mentionné deux fois, il reste encore un
département marginal. Cette marginalité est expliquée par
son rôle encore strictement réduit à résoudre des
problèmes esthétiques.
L'entreprise Appel sous Steve Job portait autant d'importance
à tous ses départements. Ils fonctionnaient tous en
étroite collaboration. Depuis son départ, on constate une
montée du département Marketing comme l'illustre la sortie de
l'appel Watch avec la présence de célébrité comme
Karl Lagerfeld.
25
Question 4:
C'est la seule question qui amène un non consensus.
Pour enrichir la question précédente, il leur était
demandé de nous dire comment étaient choisis ces
départements. Pour 50% d'entre eux, ils sont choisis en fonction du type
de projet. Pour les 50% restant, ces départements sont
prédéfinis en fonction d'une charte organisationnelle et de
conduite de projet présente dans l'entreprise.
Ce résultat permet de mettre en avant une certaine
flexibilité de la part des entreprises dans le choix des
départements participatifs dans la gestion et la réalisation des
projets. Il est donc possible d'intégrer le design au même titre
que les autres départements dans la conduite et dans la
réalisation d'un projet. Il suffirait d'initier et de former les cadres
et dirigeants au design.
Dans le cadre de la réalisation d'une étude
sectorielle prospective et stratégique de la filière ameublement
français, nous avons constaté lors des nombreux entretiens faits
avec des fabricants de meubles, une confusion entre créatif et designer.
Il y a une distinction à apporter, car on nomme « designers »
des personnes n'ayant pas leurs compétences. Certes un designer est un
créatif, mais avec des spécifiés qui sont celles
d'intégrer dans un produit (objet ou service) la fonctionnalité
(l'aspect d'usage) et l'esthétique, en ayant à se poser des
questions fondamentales.
Question 5:
Les critères de sélection dans la formation de
l'équipe projet sont les suivants: l'expérience et le poste
occupé dans l'entreprise. Arrivent ensuite, l'esprit créatif et
d'innovation.
La recherche de former une équipe pluridisciplinaire et
multidisciplinaire ne fait pas partie des critères dans la formation des
équipes projets. L'intégration d'une personne extérieure,
non plus. La présence obligatoire d'un designer, encore moins.
Question 6:
Contrairement aux questions précédentes
où on identifie un résultat clair, cette dernière
révèle que 33% des personnes interrogées se fient à
un guide préétabli la gestion de leur projet, et alors que les
autres 67% rédigent au tout début du projet le cahier des charges
à une ou deux personnes.
Un cahier des charges spécifique à chaque
à projet n'est donc pas automatique, et sa rédaction à
plusieurs mains n'est pas systématique.
Question 7:
Pour la phase d'idéation, il existe de nombreuses
méthodes. Certaines sont connues dans le monde entier et
considérés comme des « basiques », d'autres sont plus
spécifiques à chaque entreprise. Mé-
26
thodes généralement choisies en fonction du
coeur de métier de l'entreprise, de ses valeurs et de son management. Il
a été mentionné dans notre questionnaire comme outil:
- PMI methodology;
- Des séances de créativité (brainstorming)
après la sélection des idées les « plus prometteuses
»
par le comité de direction.
- Réunions
- Présentations powerpoint
- Usage de paperboard
Question 8:
Pour la phase de conceptualisation et d'application, il est
possible de recourir aux mêmes outils que précédemment,
mais aussi à la charte de Gantt, Excel.
Question 9:
Au cours du projet, la communication se fait pour 100% des
interrogés par téléphone, mail, et en réunion et
rendez-vous en face à face. Il est toutefois ressorti pour 20% d'entre
eux le recours aux réseaux sociaux d'entreprises et aux nouveaux outils
collaboratifs.
Les réseaux sociaux ou encore les nouveaux outils
collaboratif ne sont pas des réflexes pour les entreprises, qui restent
encore à des méthodes traditionnelles. Est ce que changer nos
méthodes de communiquer et d'échanger en dehors des
réunions de travail ne permettraient t'elles pas de favoriser les
idées créatives?
Question 10:
50% de nos interrogés ont déjà entendu
parler du Design Thinking. Toutefois, il était difficile pour eux de le
définir. Aucun n'a su nous expliquer clairement en quoi cela consistait.
La confusion avec le design management est très importante, car la
vision qu'ils avaient de l'intégration des designers dans une
équipe projet se rapprochait plus du design management que du Design
Thinking. Il nous semble donc nécessaire de faire une distinction claire
entre ces deux approches d'intégration du designer. (Voir annexe 3)
Question 11:
Bien que cette méthode de travail soit connue par les
entreprises, peu d'entre eux (2/3) l'ont déjà testé au
sein de leur structure.
La question reste alors de savoir: Dans quel cas ont t'ils eu
recours à cette méthode et pourquoi?
27
Combien de fois ils l'ont appliquée? Comment ils s'y
sont pris? Est ce que se fut un échec ou un succès?
Question 12:
Les projets durent généralement 5 mois, voir
plus.
Question 13:
Les facteurs considérés comme les plus importants
pour les porteurs de projet:
- Fonctionnalité/ Utilité/ Potentiel profit -
Cohérence avec l'image de marque - Coût de production
- Originalité / Innovation
- Esthétisme
Les facteurs clés de choix des projets restent encore
la recherche de profit, d'utilité et de fonctionnalité pour le
consommateur. Ces facteurs sont des facteurs sur le court-terme. L'innovation
arrive en 4ème position, soit avant-dernier, alors que toutes les
études démontrent l'importance de l'innovation pour suivre sur le
marché. Dernièrement, la BPI a organisé un
événement sur l'innovation et les Start-up françaises
à la Cité de la mode et du design à Paris. L'étude
sectorielle stratégique et prospective menée par Monitor Deloitte
sur la filière de l'ameublement met aussi en avant l'enjeu et la
nécessité de l'innovation (produit/service/process/technologique)
pour retrouver de la compétitivité.49
Malgré cet engouement de la presse, des écoles
de commerce pour l'innovation, finalement la réalité en
entreprise est autre. La question qui est reste à se poser, est
pourquoi?
Question 14:
Cette question pose cette fois-ci clairement le Design
Thinking comme un outil de gestion de projet. Après avoir introduit
cette variable constitutive de sa définition, il n'y a finalement plus
que 25% des personnes interrogées qui l'auraient utilisée
ainsi.
Question 15:
Il y a eu recours au Design Thinking en tant qu'outil de
gestion de projet une seule fois. Le designer était là pour
résumer et mettre en page tous les projets dans leur portefeuille
d'offre.
49 Monitor Deloitte, Etude sectorielle: Comment
la filière de l'ameublement français peut retrouver de la
compétitive dans un secteur mondial porteur ?! 2015 pour UNIFA
28
IV. Limites et Recommandations
IV.1/ Les limites
Dans le cadre de notre recherche, nous avons du faire face
à plusieurs limites. Pour certaines des limites dites « classiques
», d'autres plus inattendus.
Nous avons été en effet limités par notre
manque de temps dans l'élaboration de notre mémoire de recherche
pour approfondir certains points clés de notre réflexion sur le
Design Thinking. Nous pensons essentiellement au côté
esthétique de la démarche ou assister en tant qu'observateur
à une séance d'idéation. Nous avons aussi rencontré
de nombreuses difficultés à rentrer en contact avec les
entreprises souhaitant s'exprimer sur notre sujet. Les PME contactés ne
se sentaient pas intéressés ou concernées.
Ce qui nous amène à notre dernière
limite, limite importante et inattendue, qui est celle du manque flagrant de
connaissance de la part des entreprises sur le sujet du Design Thinking. Le
processus de Design Thinking était un processus d'innovation inconnu
pour 88% des entreprises appelées. Ce processus reste encore trop mal
compris par les entreprises, qui tendent à le confondre avec la
démarche Design Management. À l'heure actuelle, seule les grandes
entreprises consolidées et ayant trouvée comme axe de
différenciation et d'évolution le design et l'innovation,
investissent sur ce processus de réflexion. Des espaces
dédiées à l'innovation, à l'émergence
d'idées créatives est de plus en courant. L'innovation n'a jamais
pris autant de sens dans les entreprises jusqu'à maintenant.
Jusqu'alors, elle était associée à l'innovation technique.
Désormais, l'innovation touche essentiellement les services, le design
produit et surtout les business model avec de nouvelles formes de
collaboration. L'enjeu de l'innovation se trouve désormais sur ces
nouveaux créneaux.
IV.2/ Les Recommendations
Dans le cadre de la rédaction de ce mémoire,
nous nous sommes rendu comptes de plusieurs points négatifs et limites
concernant la situation du Design Thinking et de sa non-compréhension
par les entreprises sur le territoire Français à l'heure
actuelle. Nous avons donc répertoriés différentes re-
29
commandations pour développer cette démarche
dans les années à suivre au sein des entreprises
françaises et accroitre leur innovation.
La Formation
Une des plus importantes pistes d'amélioration pour
l'éclosion du Design Thinking dans les organisations en France se situe
en amont du process, et par là nous entendons la formation. Aujourd'hui
le Design est enseigné uniquement de la manière la plus
traditionnelle possible, c'est à dire figé sur les
caractéristiques techniques et esthétiques d'un produit. Nous
ajouterons que dans le système éducationnel en France devrait
dédier une partie plus importante à l'approche du Design dans les
différentes écoles de commerce et d'ingénieurs afin de
sensibiliser dès le plus jeune âge à l'approche du Design
Thinking dans un contexte organisationnel, à l'image de l'EM Lyon et son
programme I.D.E.A (Innovation, Design, Entrepreneurship & Arts.) qui
enseigne notamment le concept du Design Thinking à ses étudiants.
Toutes les personnes qui créent de nouvelles solutions afin
d'améliorer leurs situations professionnelles ou personnelles font appel
à du Design d'une certaine façon et comme le rapelle Tim Brown
lors de sa conférence Ted : "Whenever we do something to improve the
state of the world, we're designing. Design is everywhere, inevitably everyone
is a designer." Il nous à paru donc légitime de penser que
la formation des cadres qui cherchent perpétuellement à innover
dans leurs environnements professionnels vers une approche du Design Thinking
pourrait être un moyen d'encadrer de manière plus
théoriques et pratiques ces cadres dans leurs conduites de projets. On
peut aussi penser à la création de séminaires de
sensibilisation, pour les fonctions de la finance, du marketing et de
l'ingénierie, aux méthodes du design avec l'intervention des
designers pendant plusieurs semaines. Ce serait comme un camp
d'entraînement à la créativité avant de passer
à la phase pratique d'idéation et de conception pour lancer de
nouveaux produits. Cet espace dédié au projet peut prendre la
forme d'un laboratoire d'innovation ouvert à tous. Compte tenu de
l'aspect expérimental du Design Thinking, la flexibilité est un
facteur clé. Le défi sera alors de valoriser la prise de risque
et l'exploration, alors que la culture en entreprise a tendance à
favoriser l'efficacité et la hiérarchisation. L'idée de ce
séminaire permettrait de diffuser la pensée design dans
l'entreprise, et de la faire remonter vers « l'amont » des projets,
jusqu'aux prises de décisions. Cette remontée en amont de la
pensée design et des designers permettrait de répondre aux
besoins et enjeux du marché actuel.
30
De plus en plus d'organismes se mobilisent pour faciliter la
connaissance et l'utilisation du Design Thinking, l'EM Lyon comme nous l'avons
vu précédemment et son programme I.D.E.A, les conférences
TED sur l'innovation qui se démocratise de plus en plus en France ou
encore les réunions "Meet-Up" qui propose des meetings sur le Design
Thinking plusieurs par an. Des organismes telle que le VIA ou encore La
Cité du Design à Saint Etienne faisant la promotion du design
proposent d'accompagner les entreprises à intégrer les designers
dans des projets stratégiques. (Voir annexe 4)
Le travail en équipe
Savoir choisir les personnalités et les talents les
plus à même à collaborer ensemble sur un laps de temps
donné est un défi de taille. La constitution d'une équipe
pluridisciplinaire n'est pas une mise affaire. Il faut certes
sélectionner de préférences des personnalités
à double cursus, mais il faut surtout trouver des personnes ayant
suffisamment confiances en leur propre expertise pour accepter à la
dépasser.
Le Design Thinking est un travail d'équipe, et non une
démarche individuelle. Les projets peuvent donc être mis à
plat plus facilement.
Il faut toutefois faire attention à « l'esprit de
groupe » qui comme l'expliquait William H.Whyte dans le magazine
Fortune en 1952 a pour effet d'étouffer la
créativité de l'individu. La pensée design, au
contraire, libère cette créativité individuelle. Pour ce
faire, il est préférable de travailler en petite structure. Les
petites structures sont aussi favorisées car la communication entre les
membres d'une équipe élargie prend beaucoup de temps, et cela au
détriment de la créativité. Les grandes structures
trouvent toutefois leur place dans la phase de conception et d'inspiration du
projet. Une solution à ce problème de communication peut
être trouvée parmi les nouveaux logiciels de collaboration. En
guise d'exemple, on peut citer les systèmes de
vidéoconférence et de partager de dossiers. Bien entendu, ces
nouveaux outils de collaboration à distance ne remplace malheureusement
pas l'efficacité les échanges d'idées en direct.
Le passage du design au Design Thinking est marqué par
l'évolution qui débute par la création de produits, puis
par l'étude du rapport entre le produit et l'humain, pour enfin
s'orienter vers l'analyse des relations que les hommes entretiennent entre eux.
Voici la clé de la créativité d'une entreprise selon
l'agence IDEO : « Tous ensemble, nous sommes plus intelligents que
n'importe lequel d'entre nous »50.
En plus de contribuer à la vulgarisation de la culture
design auprès des entrepreneurs, décideurs, ingénieurs,
etc. Toutefois, il n'y a pas de recette universelle qui puisse remplacer une
formation de
50 T.Brown, L'esprit Design, p27, 2014
Pearson
31
designer. Il faut donc rester vigilant comme le
préconise Paola Antonelli, curatrice en design au Museum of Modern Art
de New York:
« Le Design Thinking est un réel danger car,
grâce à lui, de nombreuses entreprises pensent qu'elle font du
design alors qu'elles n'en font pas. C'est devenu un terrain de jeu pour les
consultants, et une nouvelle manière pour de nombreuses entreprises
d'abdiquer leur responsabilité à l'égard du
design.51 »
On voit ici l'importance et la nécessaire
d'intégrer dans cette démarche de Design Thinking des designers;
designers qui pourront alors orienter, corriger et aider les autres membres de
l'équipe projet n'ayant pas cette formation. La méthode Design
Thinking se fait en présence d'une équipe projet
pluridisciplinaire où toutes les parties prenantes de la chaine de
valeur du projet se réunissent en amont de ce dernier.
Ceux comme Don Norman qui, au départ, ne voyaient dans
le Design Thinking qu'une simple « méthode systématique
d'innovation création52 », ont désormais
changé d'avis. Le Design Thinking est en pleine ascension.
Le Design Thinking Manager
Nous recommandons de faire émerger le poste de Design
Manager qui nous semple primordial dans le process du Design Thinking. Avant de
pouvoir mettre en pratique le Design Thinking, il nous paraît important
de mettre en place ce poste dans les organisations afin de pouvoir diriger
différents projets en utilisant la méthode du Design Thinking.
Le Design Thinking Manager a une double casquette;
familiarisé au design, il l'est aussi avec le marketing. De ce fait, il
est souvent bien placé pour servir les leaders, actionnaires au sein des
entreprises, tout en contribuant à mettre en place de nouvelles
initiatives. De plus, le design manager sert d'interface entre les
équipes design et marketing, voir logistique, ingénierie et
financière, et peut donc être à l'origine de surprenantes
combinaisons. Il peut aussi impliquer les cadres dans un processus
créatif, ce qui permet d'intégrer différents services,
disciplines et fonctions. Le Design Manager doit aussi apprendre à jouer
différents rôles chaque stade du projet, à la fois
auprès du client et de son équipe. Ainsi, il va devoir tour
à tour se comporter en coach (pour encourager les
51 The Conversation, Paola Antonelli
interview, 5 décembre 2013, en ligne (aout 2014):
http://goo.gl/LmrNB9
52 D.Norman, Design Thinking: A usefull myth
, Core 77, 25 juin 2010
32
clients et l'équipe), en mentor (pour éduquer
les uns et les autres) et plus fréquemment en coéquipier (pour
leur apporter aide et soutien).
Structurer, guider, diriger
Les équipes design travaillent toujours mieux
lorsqu'elles sont structurées, guidées et menées
efficacement.
Structurer une équipe consiste à répartir
les rôles, les responsabilités, les tâches, à
établir des process de décision, à fixer des objectifs,
des délais et des calendriers. Le design manager sera souvent
amené à jouer l'arbitre et s'efforcera de répondre au
mieux au cahier des charges.
Guider suppose de tenir ses collaborateurs informés des
changements ou retours éventuels, de faire des critiques constructives,
et de féliciter l'équipe lorsqu'elle le mérite. Cela
suppose également d'encourager les initiatives et la prise de
responsabilités, de stimuler l'enthousiasme quand le moral est bas, de
maintenir la qualité des solutions créatives, d'encourager les
membres de l'équipe à communiquer entre eux et avec des
collaborateurs extérieurs.
Le Design Thinking est un processus collectif et collaboratif
qui nécessite une supervision. Le Design Manager doit savoir s'adapter
aux circonstances, diriger son équipe tout en encourageant les talents
des uns et des autres, prendre des responsabilités quand cela s'impose.
Le conflit fait partie intégrante du processus créatif, mais il
convient de le résoudre rapidement et effacement afin de ne pas mettre
en péril les objectifs. Fixer des limites et aborder les conflits
ouvertement et de façon positive permettront à l'équipe de
repartir sur des bases saines.
Précédemment, nous avions parlé de trois
variables indissociables de l'approche Design Thinking : la faisabilité,
la viabilité et la désirabilité ; variables à
prendre en compte dans le cadre de cette méthode. Toutefois, la
présence de ces trois variables n'implique pas nécessairement que
celle-ci pèsent un poids égal dans le projet global. C'est alors
aux entreprises de favoriser un aspect plutôt qu'un autre. Les
équipes adeptes du Design Thinking sont donc appelées à
jongler entre ces trois critères, mais leur attention reste
particulièrement portée sur les besoins humains. Il s'agit
d'utiliser « la sensibilité et les méthodes du designer pour
faire se rencontrer les besoins des personnes et les possibilités
technologiques, ce qu'une stratégie d'entreprise viable va pouvoir
convertir en opportunité de marché et en valeur pour des clients
»53.
53 T.Brown, Design Thinking , Harvard
Business Review, juin 2008, p86
33
Organiser des séances de mise au
point
A intervalle régulier, il est impératif de fixer
des séances de mise au point du projet afin d'évaluer son
évaluation en fonction des critères et des délais
établis dans le cahier des charges. Selon Hellins & Hollins, le
manque de communication entre les différents services et corps de
métier est particulièrement évident au sein des grandes
entreprises. Les groupes de discussion, comme les séances de mise au
point, peuvent résoudre ce genre de problèmes.
L'équipe projet sera amené à collecter
beaucoup de données au travers des observations sur le terrain, des
entretiens, et se retrouver avec une masse d'informations. À un moment
donné, elle devra faire un point au cours de période de
synthèse en les ordonnant, les interprétant et les transformer.
Extraite des notions pertinentes dune masse d'informations brutes est
fondamentalement un acte créatif. Les données ne restent que des
données tant qu'elles ne sont pas remise dans un contexte ou en
relation
Un environnement de travail stimulant
Les design managers doivent trouver des moyens pour stimuler
le processus créatif. Cela signifie donc qu'il est possible d'imaginer
de créer un environnent de travail stimulant et adapté à
ce type de réflexion, permettant ainsi d'assurer les conditions
nécessaires de cette étape. Bien entendu, l'entreprise qui veut
innover, n'est pas obligée de proposer un environnement
déjanté et de se trouver dans la Silicon Valley. Elle doit juste
être capable de fournir à ses salariés un environnement
physique et social dans lequel ils puissent explorer et expérimenter
toutes leurs compétences. On peut penser simplement à
l'aménagement d'espaces ouverts et vivants pour la stimulation
intellectuelle et l'interactivité, et des espaces silencieux invitant
à la réflexion. Par exemple, la Greenhouse de Deloitte à
Paris, inauguré le 6 mai dernier, qui est un espace dédié
à la création et l'innovation. C'est un espace mis à la
disposition des clients, afin de leur proposer une séance
d'idéation productive et qualitative. (Voir annexe 5)
Les designers en tant que créatifs le sont encore plus.
Bien qu'ils aiment bien être entre eux, leur isolement peut
pénaliser leur créativité. Il est donc souhaitable de
penser à une organisation spatiale ou temporelle favorisant les
échanges, les rencontres et le travail entre les différents
services. On peut alors facilement imaginer des « salles projets »
affectées à des équipes durant toute la durée de
leur projet. Ainsi, les recherches, les photos, les prototypes ou encore les
scénarios seraient accessibles à tout moment. Il serait alors
possible de voir l'ensemble du projet et d'avoir une compréhen-
34
sion globale. À la mise à disposition d'un espace
réservé au projet, on peut y conjuguer un réseau social
d'entreprise dédié au projet pour que l'équipe puisse
communiquer et publier des documents à tout moment.
Objectifs SMART
Faire des choix et prendre des décisions, coordonner
les demandes des uns et des autres supposent un important effort de
planification et de gestion des priorités à court et long terme.
La méthode SMART (spécifique, mesurable, atteignable,
réaliste et temporelle) pour atteindre ses objectifs peut aider le
Design Thinking Manager à prendre des décisions et renforcer
l'efficacité de l'équipe.
Le développement d'un esprit
collaboratif
Les entreprises qui encouragent leurs employés, leurs
cadres et leurs dirigeants à partager des informations, des
idées, des innovations proposent souvent des produits et des services
plus en adéquation avec les attentes du public.
Ce partage d'informations peut se faire à
différent niveau:
- Aménager des salles communes, de repose et de
détente, propices aux échanges informelles et à la
convivialité.
- Faire appel à des membres d'une agence de design
extérieure, selon leurs qualifications et les attentes du projet, et
être amenés à travailler en équipe de clients.
L'avantage de cette équipe est qu'elle peut s'immerger totalement dans
le projet design, et observer une certaine confidentialité. Dans la
mesure où il s'agit d'une équipe interdisciplinaire, le
problème du client est traité simultanément selon
différents points de vue. Un autre avantage de l'équipe de
clients est qu'elle est tenue à l'écart des autres services et de
toutes les tâches quotidiennes qui pourraient la distraire de son
objectif. Certaines entreprises ont pris l'habitude de faire appel à des
professionnels. Un grand nombre de sociologues ont d'ailleurs choisi
d'intégrer les entreprises. La mise en commun des différentes
expériences est devenue une source essentielle de création
d'idées.
- Réunir des personnes venues d'horizon
différentes, et former ainsi une équipe projet. Ce genre
d'équipe peut parfois générer des étincelles
créatives. Selon Rockwell (2000), il ne s'agit pas de « faire
asseoir les gens autour d'une table pour qu'ils approuvent ce que vous dites,
mais de faire s'exprimer un nombre de voix suffisamment différentes pour
créer des frictions, et d'utiliser ces frictions pour arriver à
une décision que vous n'auriez jamais prise sans cela ».
35
- Utiliser les réseaux sociaux d'entreprises
professionnels comme Yammer de Microsoft.
Peut-on imaginer développer une culture de l'innovation
et du design au sein d'une entreprise, en créant une équipe
spécialement dédiée et qui soit déchargée de
toutes les tâches routières? Dans certaines entreprises, le design
fonctionne comme un service, à part entière (l'équipe
créative), dans d'autres, le design relève de différentes
équipes (service marketing ou développement de produit). Quel que
soit leur cas de figure, les entreprises qui cultivent l'esprit d'équipe
obtiennent les meilleurs résultats en termes de confiance et de
communication. Powel souligne « qu'une entreprise est faite de personnes
dont les relations sont formelles et informelles, sont aussi importantes que
les relations informelles... De nombreuses décisions sont prises chaque
jour au niveau interpersonnel »(1992)
La mise en place de bonnes relations de
travail
L'entente, la compréhension mutuelle, le dialogue et
les centres d'intérêt communs sont des éléments
indispensables pour établir de bonnes relations de travail.
Le travail en réseau est au autre moyen de bâtir
des relations professionnelles gratifiantes. Accumuler les contacts, s'assurer
de la coopération des uns et des autres, collecter les informations par
le bouche à oreille sont autant de techniques efficaces. Certains
professionnels possèdent de nombreux contacts et associés souvent
être mis à contribution selon les cas. Etre à même de
se créer un réseau de relations, tant personnelles que
professionnelles, et de l'enrichir constamment est un atout pour l'entreprise.
Le Design Thinking Manager, disposant souvent de plusieurs contacts au sein
d'une entreprise, peut expliquer aux autres membres de l'équipe
créative qui joue quel rôle à l'intérieur d'un
projet donné. Ce genre d'informations peut s'avérer
extrêmement précieuse dans la mesure où il s'agit parfois
de données non officielles.
Séance d'idéation :
Brainstorming
Le brainstorming est régi par des règles, et
restent un exercice qui demande de la discipline et de l'expérience. Il
est donc nécessaire de déterminer les limites, afin
d'éviter de tomber dans les travers des réunions classiques
où tout le monde parle en même temps et n'écoute pas. Chez
IDEO par exemple, il est écrit dans les salles de réunions
réservées aux sessions de brainstorming: «S'abstenir de
jugements hâtifs. Encourager les idées folles. Rester
concentré sur le sujet. Construire à partir des idées
d'autrui ». Cette dernière règle, « construire à
partir des idées des autres » est la plus im-
36
portante parce qu'elle garantit que chaque participant
s'investit dans la dernière idée énoncé pour la
faire progresser. Les idées jaillissent tout en alimentant un processus
créatif.
Pour répondre à une problématique
d'éco-conception dans l'aménagement intérieur des
hôtels, le groupe Accor a mis en place des séances de workshops
avec toutes les parties prenantes des projets, et plus seulement designers
entre eux. Dans ce genre de pratique, l'usage du post-it est très
répandu. Le post-it, papier collant que l'on peut trouver en magasin et
grande surface, de toutes les couleurs et de toutes les formes, permet de
cerner et rassembler les idées afin de leur donner du sens. Il aide
ainsi à fixer les grandes lignes d'une idée, à la
repositionner ou à la rejeter. En faisant ressortir l'essentiel, il
représente le passage de la phase divergente à la phase
convergente, et permet à l'équipe projet de maintenir ses
délais. Le post-it s'avère donc être un puissant outil
d'aide à l'innovation.
La communication visuelle
Pouvoir représenter les idées visuellement est
l'une des clés d'une communication réussie avec le client, et du
succès d'un projet. La représentation visuelle peut alors de la
simple esquisse ou collage au dessin sophistiqué réalisé
sur ordinateur avec des logiciels. Le dessin (dans son sens large) permet aux
designers de visualiser plus facilement les idées et donc de
résoudre les problèmes de forme et de fonction, mais aussi
d'explorer d'autres pistes. C'est une façon pratique de tester
rapidement différentes solutions ou prototypes, mais aussi une
qualité essentielle dans la mesure où l'ébauche, dans ce
type de processus de réflexion qui est le Design Thinking, permet de
modéliser, représenter et communiquer des idées à
des tiers. Historiquement, nous dessinons pour à la fois communiquer
avec les autres, capturer une pensée ou une idée volage,
représenter et conserver une information.
Il existe différents outils mis à la disposition
des équipes projets, leur permettant dans la phase d'idéation, de
générer facilement, des idées en ayant recours à la
communication visuelle:
Dessiner
C'est un processus qui consiste à représenter
visuellement une idée, ou un ensemble d'idées. Il suffit alors de
croquer rapidement l'idée, afin de pouvoir la montrer, la commenter et
l'enrichir. Si ce n'est pas le cas, il suffit de faire des bâtons.
Toutefois, le dessin reste un excellent moyen pour y voir plus clair et
prêter plus attention aux détails.
Le collage
Le collage consiste à assembler des images pour visualiser
une idée.
Faire un exposé
37
Un exercice très récurant, que l'on apprend
à faire dès l'école primaire. Toutefois, il n'est pas
souvent réussi, car attirer l'attention de son auditoire et de
communiquer ses idées ne sont pas toujours évident. Voici
quelques astuces pour présenter un projet: identifier son auditoire,
comprendre ce qu'ils attendent de l'exposé, préparer une
présentation « sexy », aérée et visible à
10m, et parler tout en présentant des documents projetés
La carte mentale
C'est un outil qui permet de générer rapidement
des idées. Imaginée par Tony Buzan, la carte mentale est une
représentation non linéaire de mots, de couleurs et d'images
permettant ainsi à l'esprit de se délier grâce à une
association d'idées. Il suffit de prendre une feuille de papier blanc et
des stylos de couleurs. On commence alors par écrire un mot ou dessiner
une image au centre, puis on fait des ramifications au bout desquelles on
ajoute d'autres mots ou images, et ainsi de suite. Cette méthode permet
de regrouper des thématiques autour d'associations d'idées et
d'identifier des similitudes ou des différences et de les
évaluer. La carte mentale est devient alors un excellent moyen de
trouver des opportunités en se livrant tout simplement à des
associations d'idées, qui peuvent parfois s'avérer
inattendues.
Prototypage
La pensée visuelle est une pratique dont les designers
ont recourt pour exprimer son idée sur du papier. Cette expression peut
se faire sous la forme d'un mot ou d'un dessin. Les mots et les nombres ont
leur propre utilité, mais seul le dessin peut révéler
simultanément les caractéristiques fonctionnelles d'une
idée et son contenu émotionnel. Ainsi les structures visuelles
permettent d'explorer et de décrire les idées de la
manière la plus pertinente. On a tendance à obtenir d'autres
résultats en ayant recourt aux dessins, qu'aux mots seuls, pour exprimer
une idée rapidement. Cette pensée visuelle aboutie à la
réalisation de prototypes. Les prototypes permettent d'aller de l'avant
et de tester quelque chose. David Kelley définit le prototypage, c'est
à dire l'acte de réaliser un prototype, comme le fait de: «
penser avec ses mains ». En parallèle des idées abstraites,
le prototype s'avère être un outil d'expérimentation
très efficace lorsqu'il s'agit de créer de nouvelles
idées, de les tester et de les faire évoluer. En effet, le seul
moyen pour départager les différentes idées rapidement,
est de les expérimenter le plus tôt possible. Ainsi, en
matérialisant une idée par un objet, on peut l'évaluer, le
perfectionner et se concentrer sur la solution la plus adaptée. En plus
donc de faire avancer le projet, le prototypage permet d'explorer plusieurs
idées en parallèle. Pour les réaliser rapidement, il
existe des cutters lasers très précis, des logiciels de design et
depuis peu les imprimantes 3D. l faut, bien entendu, trouver la juste mesure
dans la réalisation de ce dernier. Cela ne sert pas de créer des
prototypes trop détaillés ou élaborer. Il faut construire
un prototype en fonction des informations que l'équipe veut en retirer,
et faire en sorte que la résolution soit suffisante pour être
exploitable. Les prototypes qui s'appliquent dans le cadre de projet portant
sur la création d'un
38
service ou sur la réinvention d'une organisation
doivent être aussi rapides et minimalistes dans leur réalisation.
Les équipes projet ont alors plutôt recourt à des
scénarimages informatisés empruntés au monde du
cinéma; ce qui permet de réaliser des prototypes
d'expériences immatérielles. Les scénarios ont cet
avantage de replacer l'humain au coeur du concept, et de ne pas se perdre dans
les détails esthétiques et mécaniques. Il ne faut pas
hésiter à jouer un rôle et se laisser aller à
l'improvisation pour tester le potentiel d'une idée. La plupart des
prototypes sont réalisés à huit clos. Traditionnellement,
les entreprises invitent les consommateurs à des réunions ou des
séances de démonstrations pour tester les produits,
généralement sa fonctionnalité. Toutefois, ces testes ne
montrent pas l'interaction que le produit peut avoir avec son environnement et
la société. Au-jourd'hui, comme l'affirme Tim Brown « la
complexité des idées impose les prototypes à s'aventurer
à l'extérieur et être mis dans des conditions
réelles »54, afin de voir si ils sont adoptés ou
non.
Même si il s'agit de redéfinir une
stratégie d'entreprise ou la redéfinition de l'entreprise
elle-même, la phase de prototypage est indispensable. Tim Brown
déclare que « la capacité d'innovation se mesure par le
temps qu'il faut pour sortir son premier prototype »55. Cela
peut en effet constituer un facteur clé de succès, une
performance à étudier de près. Si l'équipe n'a pas
la capacité à fournir ce travail de précision que demande
le prototypage, l'entreprise ne doit pas hésiter à solliciter des
spécialistes externes comme des maquettistes ou vidéographes.
La Gestion de Projet
Bien que le processus du Design Thinking est itératif
et nécessite une certaine liberté, une planification et
coordination des ressources humaines et matérielles sont essentielles
à son bon déroulement dans un cadre budgétaire imparti.
Coûts, délais, performances
Etablir un planning dans ce cadre de méthode et s'y tenir
n'est pas facile. Le Design Thinking étant un processus itératif,
un certain nombre de questions demandant des décisions apparaissent tout
au long du projet. Le design manager doit à la faire savoir faire des
compromis et preuve de d'autorité, de bon sens, d'initiative pour
assurer les coûts, les échéances et les performances. Un
projet mal géré se traduit très souvent par des
dépassements important de délais et de coûts. Le
planning
54 Tim Brow, L'Esprit Design, p102, 2014
Pearson
55 Tim Brown, L'esprit Design, p111, 2014
Pearson
39
Le design manager découpe chaque étape
clé du projet en tâches, établit ensuite une liste des
priorités, répartie chaque tâche à une ressource
humaine, puis évalue le temps nécessaire à la
réalisation de chacune d'elles. La bonne gestion du
rétro-planning est capitale dans la mesure où un retard sur une
tâche peut entrainer des effets désastreux sur l'ensemble du
projet. Le design manager s'assure aussi que chaque membre soit bien conscient
des responsabilités qui leur sont données. Le design manager
s'occupe aussi de répertorier les ressources humaines et
matérielles nécessaires au projet. Il fixe également les
dates limites de rendu, les réunions d'avancement et les
présentations.
Il doit en outre s'assurer que l'information circule
correctement au sein de l'équipe projet. Il arbitre les
décisions, et assure la coordination de l'ensemble des tâches,
comme un chef d'orchestre.
Il existe certain nombre d'outils de planification qui peuvent
aider le design manager; des logiciels comme Microsoft Project, Basecamp ou
Filemaker, par exemple. L'outil le plus utilisé dans le milieu
professionnel reste le diagramme de Gantt. Il s'agit d'un tableau permettant de
lister chaque étape et les tâches du projet; celles
déjà réalisée et celles qui restent à faire.
En référant une ressource humaine et un temps à chaque
tâche, il est possible d'évaluer la durée probable des
tâches, de mettre en évidence les relations entre les tâches
et les ressources, et de visualiser les étapes cruciales, voir points
difficiles.
Cahier des charges
Il débouche sur des découvertes inattendues qui
méritent d'être approfondies. Ces découvertes peuvent
être déjà intégrer dans le processus en cours. Il
arrive souvent que des résultats incitent l'équipe à
revoir leur cahier des charges initial; cahier dans lequel les objectifs sont
clairement formulés. Cette approche itérative du projet, peut
allonger donc les délais, engendrant peut-être un surcoût
financier. Bien que la pensée design soit volatile, l'acceptation et le
respect des limites imposées constituent un de ses fondements. La
première étape du processus de design va donc être
d'hiérarchiser les contraintes et d'établir un «
schéma d'évaluation 56»; schéma qui
s'organisera autour des trois critères vus ci-dessus.
Le niveau de rédaction du cahier des charges
détermine ainsi le taux de créativité de l'équipe.
Plus le projet est décrit avec des orientations et des limites claires,
plus le niveau créatif pourra être fort. Cette phase
d'écriture pose les fondations et les orientations à prendre pour
le projet. Toutefois, il est important de souligner que ce cahier des charges
n'est pas constitué d'une série d'instructions et n'est pas non
plus une réponse à une problématique posée. Il doit
laisser une part de hasard et
56 T.Brown, L'esprit Design, p19, 2014
Pearson
40
d'incertitude. « Quand on sait dès le
départ ce que l'onc cherche, à quoi bon poursuivre la recherche!
»57 Cette étape qui a tendance à être
négligée par les structures, est finalement essentielle.
On le rappelle que ce cahier des charges doit être
écrit avec toutes les parties prenantes de l'équipe projet, et
pas uniquement les décideurs. Designers, ingénieurs, marketers,
financiers, commerciaux, etc doivent le rédiger ensemble. La
méthodologie Design Résidentiel, impulsée par le VIA, qui
est appliqué à la construction de lycées et internats dans
la région Pays de la Loire, prend implique dès la
rédaction du cahier des charges l'aménagement intérieur en
intégrant dès l'amont designer et fabricants. On pense dès
lors aménagement intérieur, avant de penser extérieur, et
cette approche change tout! On part des modes de vie et des usages des
générations Z. Le lit ne fait plus seulement lit, mais aussi
canapé pour accueillir des amis et travailler sur son lit. (Voir annexe
6)
Renforcer l'impact du design
Le design participe fortement à genèse de
nouvelles idées. Pour appuyer cet état d'esprit, le design
manager doit organiser des séminaires de présentations et de
sensibilisation au design, à l'intention des cadres (moyens et
supérieurs), des responsables de fabrication, de projets, voir les
dirigeants et les actionnaires. La plupart ne comprenne par à quoi peut
bien servir le design, si bien qu'il est important de l'illustrer avec des
projets relevant de la réflexion.
Renforcer l'impact du design dans une entreprise passe donc
par l'intégration dans ses valeurs et sa culture, afin que le design
devienne un état d'esprit, et pas seulement un outil commercial,
devienne un investissement, et pas qu'une dépense, devienne une
méthode, un process et outils permettant de résoudre des
problèmes, et non seulement une mécanique.
Pour illustrer la pertinence de leur présence
dès l'amont d'un projet, prenons le cas de la Holding Textile
Hermès. HTH, après 3 ans de recherches, a mis au point un textile
lumineux en intégrant dans le tissage des LEDs dans le tissu, tout en
conservant la souplesse d'origine. Ils ont déposé un brevet pour
cette technologie. Le prix de confection est très élevé en
raison du travail à la main nécessaire. Pour trouver un champ
d'application à leur projet, ils ont fait appel au VIA afin de les
mettre en relation avec des designers.
57 T.Brown, L'esprit Design, p23, 2014
Pearson
41
Il est en ressorti de ces entretiens que leur tissu à
l'heure actuelle n'avait aucune intérêt voir utilité, car
il ne répondait à aucun besoin ou usage du consommateur, à
part donner un côté « cheap » à l'objet. Ils
devaient donc soit poursuivre leur recherche pour créer une interaction
entre la LED et le consommateur, soit l'abandonner. Pourtant, HTH connaît
bien les créatifs, mais ils n'avaient jamais songé à les
intégrer dès la réflexion en amont de leur projet.
V. Conclusion
Le Design Thinking est perçu par certain professionnel
de l'innovation comme un simple outil de marketing de la stratégie
d'innovation, d'autre comme un effet de mode.
Le Design Thinking, ou plus généralement
l'intégration du design dans un processus d'élaboration et de
recherche dans les entreprises n'est t'il pas un processus lent, comme l'a
été le développement durable il y a une dizaine
d'année. Les quelques entreprises ayant fait l'expérience d'une
collaboration avec les designers en sont sortie gagnante. Ces
bénéfices se sont révélés à des
degrés divers et avec des résultats parfois inattendus. Il n'y a
pas de règle qui peut définir le moment où une entreprise
peut faire appel au design. On observe des grandes tendances comme à des
moments clés de la vie de l'entreprise (anniversaire, changement
d'actionnaires ou de dirigeant), à des moments difficiles (nouveaux
tremplins pour rebondir) ou en continu (pour celle ayant intégrer le
design parmi leurs outils de développement quotidien). Les
éléments déclencheurs à cette collaboration sont
souvent dû à la conviction du dirigeant, au soutient et au conseil
de certain organismes tels que le VIA ou la Cité du design (avec un
accompagnement personnalisé) et/ou à la quête de
l'innovation par la structure (le design est considéré comme un
élément moteur de l'innovation).
Dans ce cadre de mission, les designers doivent très
souvent relever d'objectifs opérationnels (développement de
nouveaux produits, création d'une identité visuelle ou de marque,
aménagement de locaux ou encore la conception d'emballage), bien que
l'impact économique du design ainsi que sur le positionnement
stratégique ne soient pas négligeables. Les résultats de
ce type de collaboration sont souvent bien largement supérieurs aux
objectifs fixés initialement. Les designers vont au-delà des
objets qui leur sont assignés, avec une connexion humaine
engagée. L'intervention de ces derniers permet de mettre en
lumière les entreprises avec une visibilité
supplémentaire, et stimule l'innovation au sein de l'entreprise.
Grâce aux projets développés avec les designers, les
entreprises se sont ouvertes à de nouveaux marchés avec un regain
de croissance, et une montée de leur valeur
42
ajoutée et de leur marge. La suite donnée
à ce type d'expérience est la planification d'une mission
suivante (le design est un outil de développement au même titre
que l'innovation, le marketing ou la communication) ou la décision
stratégique quant à la place du design dans l'entreprise (les
entreprises ayant découvert les vertus du design sentent son
potentiel.
Le design leur a ouvert une porte, voir plusieurs à la
fois. Il s'agit aux entrepreneurs de faire des choix judicieux à la
place stratégique donnée au design, qui est non seulement un
outil opérationnel, mais surtout une décision stratégique
qui devra faire partie du futur cahier des charges). Aussi bien dans les
entreprises ayant intégrées le design, que celles
découvrant l'approche, il existe une fonction design, c'est à
dire une ou plusieurs personnes ayant comme responsabilité la mise en
place de la gestion du design au sein de l'entreprise. C'est une garantie de
pérennité de l'intégration du design. Si personnes ne se
voit formellement attribués ce rôle, seules les personnes
convaincues de son potentiel prendront sur elles l'intégration du
design. Le risque est grand, qu'en cas de surcharge, elles ne prennent plus le
temps de ci consacrer, et qu'à leur départ, personne ne prenne la
relève, faisant retomber le design aux oubliettes.
Bien que le Design Thinking fasse débat,
l'intégration dès l'amont du design dans les projets est
considérée comme un outil efficace pour chaque entreprise. Une
entreprise n'ayant pas encore fait appel au service d'un designer à tout
intérêt à sauter le pas. Que le recours au design soit
ponctuel, limité ou plus global, elle en tirera partie pour
répondre à ses problématiques spécifiques.
L'intégration d'un designer dans une équipe projet ne se fait pas
de manière automatique, mais c'est une aventure humaine. Ce n'est pas un
remède miracle, ni une recette toute faite. Le design est une boite
à outils extrêmement efficace dès que l'on l'utilise
à bon escient. La clé du succès est toutefois d'avoir
pleine confiance en son designer. Bien entendu, il est très important
avant toute chose de définir clairement le rôle du design dans sa
stratégique de développement. Le designer devra mettre
l'entreprise au coeur de ses attentions, avec une grande capacité
d'écoute pour comprendre les enjeux auxquels l'entreprise est
confrontée directement ou indirectement. Le designer doit apporter, avec
son équipe, une réponse approprié, en accord avec les
ressources disponibles. Le succès est proportionnel à l'empathie
qu'il aura réussi à développer. Toutefois le meilleur
conseil à donner aux entreprises est de se faire accompagner et de
frapper à la porte des organismes qui les accompagnent dans cette
démarche. Ces organismes les aideront à définir le cahier
des charges (attentes, besoins, objectifs..), à recruter le bon designer
et à les guider dans la mise en place d'une relation efficace avec le
designer.
43
VI. Bibliographie
Tim Brown, L'esprit Design, édition Pearson
M.Erlhoff, T.Marshall (dir), Design Dictionnary,
Basel, Boston, Berlin, Birkhauser, 2008, p.104
R. Loewy, La laideur se vend mal, 1953, p26
E.Sottsass, Lettre aux designers, Domus, avril
1990
The Industrial Designers Society of America, en
ligne, aout 2004
J. de Noblet, Roger Tallon, un designer industriel
Stéphane Vial, Le design, édition
Puf
Séphane Vial, De la spécificité du
projet en design: une démonstration
H.Rittel, Some principles for the design of an educational
system for design, Journal of
Architectural Education, 25 (1/2), 1971, p1
A.Fideli, R.Bousbaci, version longue, EAD 6 (colloque de
Brême) 2005, p12
H.Dubberly, How do you design?, 18 mars 2005, en
ligne (septembre 2004)
T.Brown, Design Thinking, Harvard Business Review,
juin 2008, p86
T.Brown, Designers - think big!, TED Global 2009,
Oxford, juillet 2009, en ligne
Tim Brown, Change by Design, IDEO
Paola Antonelli interview, The Conversation, 5
décembre 2013, en ligne (aout 2014):
D.Norman, Design Thinking: A usefull myth , Core 77,
25 juin 2010
Larousse Online
Alfred, Stratégies et structures de
L'entreprise, Paris, Organisation 1964
Alain Derray, Alain Lusseault, Analyse
stratégique, Ellipses, 2001. (p. 86)
Frédéric Le Roy, Les stratégies de
l'entreprise, 4e édition, Dunod, 2012
Garry Johnson et Kevan Scholes, Stratégique,
édition Pearson
Inflencia Magazine n°12: Le Design Sauvera t-il le
monde ?
Kathryn Best, Le Design Management, Pyramyd
Thierry Van Kerm, Quand le design s'investit dans
l'entreprise, 2012, Cité du Design et ESADSE
VII. Annexes
Annexe 1 : Guide d'entretien
44
Annexe 2 : Résultats
1
2
Annexe 3 : Qu'est ce que le design Management ?
Contrairement au Design Thinking qui est une démarche
de réflexion, une nouvelle méthodologie dans la façon
d'appréhender un problème et de le résoudre, le design
management n'est qu'un outil à manager et à intégrer des
équipes créatives voir des designers dans des projets
d'entreprises. Le design management rentre dans une démarche globale
d'organisation, et prend en compte les aspects stratégiques de
l'entreprise, son portefeuille produits, et sa communication et son image de
marque, toujours dans un souci de rentabilité de l'entreprise. Il met
aussi en place les moyens et les outils permettant de concevoir, de
développer et de commercialiser des produits et services. Le design
management considère de façon simultanée et à part
égal, la vision stratégique de l'entreprise, son mode
organisationnel et l'utilisation de la démarche et des outils du design.
Au coeur des priorités du design management sont placées la
satisfaction de ses clients et la participation des différents services
en mode projet.
Dans ce graphe ci-dessus, nous distinguons les places
distinctes qu'occupent le Design Thinking et le Design Management, ainsi que
leur complémentarité et leur ordre. Le design est
présenté comme un outil puissant avec différent
degré de performance. Son degré le plus basique reste l'action
même de faire du design, c'est à dire dessiner,
concevoir... Le design management arrive juste après avec une
considération du design plus forte et des impacts organisationnels qui
commencent à être significatifs. Le Design Thinking semblerait
mettre plus en évidence le sens même du design; avec un
degré d'abstraction et de réflexion fort. La démarche
Design Thinking s'ancre donc une continuité du design management. Le
Design Thinking serait une évolution du design management, une forme
encore plus aboutie. Elle approfondie l'idée du design à travers
sa démarche.
3
Annexe 4: Les organismes accompagnant les entreprises
à l'intégration du design
Ces derniers temps, la concurrence s'est accrue, la
conquête de nouvelle part de marché est devenue compliqué.
Dès lors, la notion de design est devenue populaire et « à
la mode ». En effet, on parle de « produit design » pour
désigner le côté esthétique et ergonomique d'un
produit. Cela a donc conduit à l'apparition de nombreuses organisations
faisant la promotion du design auprès des entreprises ; des
organisations plus ou moins sérieuses et reconnues. Le VIA (valorisation
de l'innovation dans l'ameublement) fut le premier et longtemps le seul
à mettre en avant les designers et à soutenir des synergies entre
la sphère de la création et de la production. Il s'est, en raison
du contexte économique et culturel, rapidement trouvé
entouré d'autres structures comme le Lieu du Design ou la Cité du
Design à Saint-Etienne. Les entreprises ont alors un large choix pour
les aider et pour leur donner des conseils stratégiques. Nous avons fait
le choix de s'intéresser et présenter six structures plus ou
moins importantes aux caractéristiques et objectifs différents.
Il en existe de nombreuse autre, le but n'étant pas d'être
exhaustive, mais de traduire des différences à prendre en compte
: VIA, Le Lieu du Design, Aquitaine Développement Innovation, Air Lab de
Weave air, Nelly Rodi, La Cité du Design Saint Etienne
Organisme
|
Nature
|
Financement
|
Organisation
|
Missions
|
Activités
|
Points forts
|
Points faibles
|
Lieu du Design
|
Association créée en octobre 2009
|
Subventions par le Region Ile de France. Adhe- sions.
|
Equipe de 10 personnes avec un accent sur les relations avec les
industriels.
|
Promouvoir et valoriser le design indus- triel en Ile de
France
|
Expositions Matériauthèque Ressource do- cumentaire
Conférences, formations Annuaire des créateurs inter-
nationaux
|
Une reconnais- sance acquise rapidement au- près de la
sphère créative. Une activité suivie, des designers
valorisés, une matériauthèque unique.
|
D'un point de vue extérieur, c'est une struc-ture
culturelle dédiée au design, les con-seils proposés aux
entreprises n'ont rien d'innovant
|
VIA
|
Association crée en 1964
|
Subventionnée par le Codifab (récupère la
taxe)
|
Equipe de 10 personnes répar- ties entre la relation
entre- prise (entre- prises de fabri- cants de meuble) et les aides à la
créa- tion
|
Valoriser l'innovation dans l'ameublement
|
|
Expositions Label
Aide à projet Conférence Mise en relation
Documentation Annuaire des créateurs et édi- teurs
|
Expositions Label
Aide à projet Conférence Mise en rela-tion
Documentation Annuaire des créateurs et éditeurs
|
ADI (Aquitaine Développement
Innovation)
|
Association créée d'un rapproche- ment en 2011
|
Subventionnée par la région Aquitaine et soutenue
par le Ministère de l'Enseignement Sup. et de la Recherche. Ad-
hésions.
|
Equipe de 50 personnes ; chacun ayant un poste bien défini
et différent. Organisation par filières clés.
|
Innovation et Amélioration de la Compéti-
tivité Animation stratégique de filières, clus- ters,
pôles de compétitivité Dynamisation des territoires
|
Expositions Label
Aide à projet Conférence Mise en relation
Documentation Annuaire des créateurs et édi- teurs
|
Positionnement design
« Mix Design » Prospective Appels à candi-
datures
Mises en relation Guide pour les entreprises Evènements de
rencontre.
|
Positionnement design
« Mix Design »
Prospective Appels à can-didatures
Mises en rela-tion
Guide pour les entreprises
|
4
|
|
|
|
|
|
|
Rencontres
|
Air Lab (Weave Air)
|
Cabinet dépendant du cabinet privé de conseil
Weave, créé en 2001. Na- tional.
|
Par ses missions rémunérées.
|
Equipe de 6 personnes pour Weave Air et (250 consultants pour
Weave). Un directeur, un manager et 4 consultants.
|
AIR Lab est un dispositif d'innovation
accélérée qui s'appuie sur la pensée design et
l'analyse des tendances.
|
Positionnement design
« Mix Design » Prospective Appels à candi-
datures
Mises en rela- tion
Guide pour les entreprises Evènements de rencontre.
|
Stratégie et In- novation, Eco conception, Marketing du-
rable organisé en 3 étapes : Inspi- ration (prospec- tive,
tendances), Idéation (équipe projet, prototy- page), Expira- tion
(intégration sur le marché)
|
Stratégie et Innovation, Eco concep-tion, Marketing
durable organi-sé en 3 étapes : Inspiration (prospective,
tendances), Idéation
(équipe projet, prototypage), Expiration
(intégration sur le marché)
|
Nelly Rodi
|
Agence de pros- pective mode/art de
vivre/beauté/média créée en 1985.
|
Par ses missions rémunérées.
|
Aucune infor- mation sur l'équipe et son organisation.
|
Détecter les tendances et les styles par études
pros- pectives et les proposer aux entreprises.
|
Stratégie et In- novation, Eco conception, Marketing du-
rable organisé en 3 étapes : Inspi- ration (prospec- tive,
tendances), Idéation (équipe projet, prototy- page), Expiration
(intégration sur le marché)
|
Réseau
d'experts, études quantitatives, focus groups.
Observatoire des Styles, Marke- ting Style. Publications.
|
Réseau d'experts, études quanti-tatives, focus
groups. Observatoire des Styles, Marketing Style. Publications.
|
Cité du design St Etienne
|
Etablissement Public de Coopé- ration Culturelle,
Plateforme de développement économique et de valorisation autour
du design créée en 2009.
|
Par la ville de St Etienne et sa métropole, par la
région Rhône- Alpes et par le Ministère de la Culture.
|
Equipe de 42 personnes orga- nisée en Rela- tions Econo-
miques, Produc- tion, Recherche et Edition, Communication, Relations inter-
nationales.
|
La sensibilisa- tion de tous les publics au design;
le développe- ment de l'innovation par le design; La
recherche en design; La production d'événements
|
Réseau
d'experts, études quantitatives, focus groups.
Observatoire des Styles, Marke- ting Style. Publications.
|
Une activité forte et reconnue appuyée sur une
école de design réputée et sur une Biennale
Internationale. St Etienne est con- nue comme la ville du design en France.
Une grosse équipe qui re- crute.
Le mode Living Lab proposé aux entreprises.
.
|
Une activité forte et recon-nue appuyée sur une
école de design répu-tée et sur une Biennale
Inter-nationale. St Etienne est connue comme la ville du design en France.
Une grosse équipe qui recrute.
|
5
Annexe 5 : Greenhouse Deloitte
Le lieu :
Leur charte :
6
Annexe 6: Qu'est ce que Design Residentiel ?
Design Résidentiel est une démarche
poussée par le VIA afin d'intégrer dès l'amont dans le
cadre d'une construction d'un nouveau Lycée l'aménagement
intérieur. Cette réflexion amont sur l'aménagement
intérieur prend en compte les usages, modes de vie, et attentes et
besoins des lycéens, et se concrétise par la création d'un
mobilier et d'un agencement sur mesure en partenariat avec un designer.
Voici le processus avec ces grandes étapes :
La collaboration entre le fabricant de meubles pour
collectivité MMO International et la designer Bina Baitel pour
l'aménagement de la Résidence des Lycéens dans le nouveau
Lycée de l'Ile de Nantes a aboutis à ce résultat (voir
photos ci-dessous). Ce mobilier est astucieux et modulable, mais aussi beau
visuellement tout en ayant pris en compte les contraintes normatives et de
budget.
7
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