Chapitre I : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
1.1. Revue de la littérature
La reconnaissance de la dimension de la crise en eau n'est pas
récente; elle date de la conférence tenue à MAR Del Planta
(Argentine) sur l'eau potable en 1977. En effet, lors de cette
conférence, les Nations Unies ont consacré la décennie
1980 -1990 comme la décennie internationale de l'eau et de
l'assainissement. L'objectif principal de celle-ci était de fournir de
l'eau potable en quantité et en qualité suffisante à tous.
Malheureusement, les progrès réalisés sont très
insignifiants surtout en milieu urbain comme le souligne Appollinaire K.
(2007). Après cet échec, de grandes mobilisations ont eu lieu en
faveur de l'eau. Il s'agit, entre autres, de journée internationale de
l'eau douce, de la proclamation de la décennie d'action « l'eau
source de vie » (2004 2015) et récemment de l'objectif du
millénaire pour le développement (OMD). Dans le chapitre sept des
OMD, les nations unies s'engagent à réduire de moitié le
nombre de personnes qui n'ont pas accès à l'eau potable d'ici
2015.
Sur le plan scientifique, la question de l'eau potable dans
les villes en voie de développement, surtout dans les villes d'Afrique
saharienne, intéresse beaucoup les chercheurs. Plusieurs thèmes
sont abordés sur la disponibilité en eau, l'accès à
l'eau potable et à l'assainissement, la pollution de l'eau, la gestion
de cette ressource, les objectifs du millénaire pour le
développement.
Devant la croissance démographique et spatiale des
villes, c'est la question de la disponibilité en eau qui attire
l'attention des chercheurs. Selon Rayaleh O. (2004), les villes des pays en
voie de développement sont confrontées à une forte
croissance démographique qui s'accompagne d'une forte urbanisation. Ce
phénomène se traduit par la concentration des populations dans
des agglomérations où les besoins domestiques en eau sont souvent
supérieurs aux ressources en eau mobilisées. Ces villes sont
confrontées à un retard d'extension du réseau
d'alimentation en eau par rapport à leur extension spatiale et à
leur croissance démographique. Jaquelin S. (2001) pour sa part souligne
le faible taux de connexion au réseau de distribution des villes. Il est
de 43% à Cotonou, 13% à Port au Prince, 35% à Madras et
39% à Niamey. Dans le même ordre d'idées, Leray G. (1990)
soutient que les problèmes d'eau dans les villes africaines sont dus
à la croissance urbaine spectaculaire et le non accompagnement de
celle-ci par une production d'eau suffisante.
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Layousse T. (1990) quant à lui, évoque avec
insistance les difficultés croissantes en matière d'alimentation
en eau potable de la ville de Dakar et la nécessité de trouver
d'autres sources de captage au regard du rythme de consommation de la ville.
Dans la revue sécheresse N°4, parue en 1999, Nadia B et al exposent
le risque que court la ville capitale du Niger, Niamey, à cause de sa
croissance démographique, de l'étiage du fleuve Niger et de la
pollution des nappes phréatiques. Kheren S. (1995) souligne que le
fleuve Niger constitue la principale ressource en eau potable de la ville de
Niamey avec un débit de 720m3/an. Mais, on assiste depuis quelques
décennies à une baisse de l'eau disponible due à la
détérioration des conditions climatiques. En abordant le
problème d'accès à l'eau potable dans un quartier
périphérique Koufan dans la commune urbaine de Tahoua, Moussa E.
(2006) révèle que les facteurs qui influencent et expliquent le
problème sont le surpeuplement du centre de la ville et la
vulnérabilité des ménages. Quant à Abdou M. (1995),
dans son mémoire de fin d'étude en géologie et
hydrogéologie, ayant pour champs d'investigation : Zinder (Niger) et
Bamako (Mali), il montre pour le cas de Zinder qui nous intéresse, que
les aquifères de recouvrement et d'altération du socle
(Gogo-Machaya) et les aquifères discontinues des fissures du socle
(forages de la commune urbaine) ne répondent plus aux besoins sans cesse
croissants de la ville, en raison de leur faible extension et leur
dépendance climatique. Il propose la nappe de koramas comme une
alternative pour l'alimentation en eau de la ville car, selon lui, celle-ci
reçoit des précipitations élevées et de
l'écoulement souterrain provenant du Nigeria. Pour Keita Lalo A. (1987),
le problème d'eau potable à Zinder est imputable à la
géologie de la ville et à l'ancienneté des ouvrages
hydrauliques. Il souligne que la ville voit toutes ses perspectives d'expansion
économiques freinées à cause de l'insuffisance des
ressources en eau. Cette même idée est soutenue par Aman H. (1984)
pour qui le problème d'eau de la ville empêche le
développement des activités industrielles de grandes
envergures.
Sur l'accès à l'eau potable, plusieurs
études s'intéressent à la qualité de l'eau,
à sa quantité et à l'inégalité dans
l'accès à celle-ci. C'est ainsi que Salem G. (1998) dans son
étude retient le faible niveau d'accès à l'eau potable
comme facteur du risque sanitaire à Pikine au Sénégal.
Quant à Ouedrago S (1998) qui a travaillé sur la qualité
de l'eau en milieu périurbain de Ouagadougou (kamboisé), il a
souligné que seuls 6% de points d'eau échantillonnés dans
son étude peuvent être considérés comme potables, si
l'on se repère à la norme de l'OMS en matière d'eau de
boisson. Motcho (1991), pour sa part, a choisi comme un indicateur permettant
de définir les zones à risques (santé) de Niamey, la
desserte en eau potable. Il explique cela par le fait que l'eau conditionne
l'hygiène de la nutrition, de la vie familiale et
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collective, car l'insuffisance d'une eau potable pour la
boisson est une cause importante de la propagation de maladies
diarrhéiques.
Pour sa part, Dos Santos S. (2005) s'est
intéressé à l'inégalité dans l'accès
à l'eau potable dans la ville de Ouagadougou. Il a noté que
malgré le fort taux d'accès à l'eau potable observé
dans cette ville (97%), des inégalités s'observent en termes de
consommation dans les différents ménages.
Certains auteurs mettent l'accent sur la gestion de l'eau dans
les villes des pays en voie du développement. Dans la revue Afrique
contemporaine n°205, Janique E (2003) montre que l'amélioration des
conditions d'accès à l'eau potable dans les quartiers
défavorisés passe par l'implication accrue de différentes
catégories d'acteurs. En effet, le partenariat entre les
sociétés d'adduction d'eau, autorités locales et petits
opérateurs privés peuvent permettre l'amélioration dans un
proche avenir du niveau de desserte en eau dans les villes des pays en voie de
développement. Quant à Lise B. (2004), après avoir
établi un bilan critique des gestions dans le domaine de l'eau des pays
en voie de développement, propose un modèle de gouvernance qui
s'appuie sur un partenariat public- privé et qui accorde un traitement
spécifique aux pauvres.
D'autres chercheurs mettent plutôt l'accent sur la
situation des pays africains par rapport aux objectifs du millénaire en
matière d'accès à l'eau potable. Pour Dos Santos .S
(2005), avec le rythme actuel, l'Afrique n'atteindra pas les objectifs du
millénaire pour le développement en 2015, elle l'atteindra en
2040. Omar A. (2009). Souligne que les réalisations qui ont
été faites dans le domaine de l'hydraulique urbain à
Niamey sont en deçà des attentes des objectifs du
millénaire pour le développement et rien ne présage
l'amélioration de la situation.
De tout ce qui précède, on constate que la
question de l'eau a été abordée sous divers angles dans
les villes africaines. Mais dans les villes nigériennes peu
d'études s'intéressent à l'eau potable, la plupart de
celles qui existent concernent surtout la ville de Niamey. Pour le cas de
Zinder, les études qui ont été menées sont non
seulement très peu nombreuses mais font une large place aux facteurs
hydrologiques et hydrogéologiques pour expliquer la crise de l'eau. Pour
notre part nous estimons que beaucoup de facteurs doivent être pris en
compte pour comprendre le problème d'eau potable de Zinder. Il s'agit
entre autre de la croissance démographique et spatiale de la ville. En
effet, Zinder connait une croissance sans précédent,
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et qui engendre des besoins sans cesse croissants. Ce
phénomène n'explique- t-il pas le problème de
disponibilité d'eau potable dans la ville ?
Même si l'eau est disponible, son accès exige
certaines conditions : avoir un robinet chez soi, ou avoir le moyen de payer
auprès de revendeurs ou bien à la borne fontaine. Toutes ces
conditions ne rendent-elles pas difficile l'accès à l'eau potable
aux ménages qui ont un niveau de vie très faible ? Toutes ces
interrogations qui n'ont jamais fait l'objet d'une étude ressortent
l'originalité de notre travail.
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