Conclusion
Les pratiques d'exploitation forestière des producteurs
de bois-énergie dans le bassin d'approvisionnement urbain de
Pointe-Noire se caractérisent essentiellement par la valorisation des
abattis de champs en forêts naturelles et des rémanents issus de
l'exploitation de l'eucalyptus en plantations industrielles. Cette valorisation
des sous-produits de l'agriculture traditionnelle itinérante sur
brûlis en forêts et de la sylviculture industrielle d'eucalyptus en
savanes est un aspect important de durabilité écologique et une
spécificité qui fait distinguer le bassin d'approvisionnement en
bois-énergie de la ville de Pointe-Noire de plusieurs autres bassins
d'approvisionnement urbain en bois-énergie d'Afrique tel que dans le
Sahel (Bamako, Niamey, etc.) ou dans certaines villes du bassin du Congo comme
Brazzaville et Kinshasa où les ressources forestières sont
uniquement et directement exploitées à des fins
énergétiques.
Toutefois, un tiers des producteurs de bois-énergie
enquêtés pratiquent la coupe sélective en forêts
naturelles et la majorité d'entre eux sont des allochtones en
particulier des migrants urbains à la quête d'une
rémunération rapide. Cette pratique qui prend des proportions
considérables dans certains villages comme Loemé Nangama, l'une
des principales sources d'approvisionnement en bois-énergie de
Pointe-Noire est un indicateur qui révèle l'évolution de
la pression de la demande urbaine en bois-énergie sur les ressources
forestières et l'apparition des nouveaux producteurs qui n'ont plus la
même perception de la forêt entend que « garde à manger
» à entretenir de façon durable mais un simple moyen de se
faire de l'argent le plus rapidement possible au mépris des
règles traditionnelles d'exploitation forestière. C'est ainsi que
plus d'une dizaine d'essences forestières exploitées pour le
bois-énergie sont cités par les producteurs comme des essences
rares à la tête desquelles se place le Pentaclethra
macrophylla connue localement sous le nom de Mouvandza qui est la
meilleure essence pour la production de charbon de qualité. Les
superficies exploitées pour la production du charbon et/ou de bois de
feu sont très variables ; 87% des producteurs exploitent moins de 1,5
ha/an et 11% à partir de 1,5 ha/an et plus. Le charbon étant le
principal produit visé par les producteurs, il est produit par la
technique de la meule traditionnelle en terres pour des rendements de
carbonisation limités autour de 12%.
En plantations industrielles d'eucalyptus, le principal mode
d'accès aux rémanents est le contrat avec la
société EFC et ce sont les opérateurs urbains qui sont
privilégiés du fait de leur
Diahambana Mayala Rommel Mémoire de fin de
formation. IDR Page 54
capacité à exploiter 10 et 25 ha de
rémanents en deux mois, délai fixé par EFC. Le bois
d'Eucalyptus Urograndis est le plus exploité du fait de sa
productivité au bout de 7 ans. En milieux villageois, le
caractère ponctuel de cette activité est à l'origine d'une
pression diffuse indirectement exercée par les producteurs de
bois-énergie sous forme des coupes illicites et incendies des massifs
EFC.
Ainsi, le niveau de pression exercé par l'ensemble des
pratiques d'exploitation forestière développées par les
producteurs de bois-énergie dans le bassin d'approvisionnement urbain de
Pointe-Noire peut-être mesuré par les tendances des trois
indicateurs suivants : (i) la diminution de la durée moyenne de
jachère forestière qui en 15 ans, entre 1995 et 2010, a fortement
diminuée dans certains villages comme Loemé Nangama (de 16
à 8 ans) ; (ii) l'augmentation de la distance de marche des producteurs
de bois-énergie entre leurs villages et leurs lieux de production ;
oscillant entre 0 et 5 km en 1995, constante jusqu'en 2005 (1 à 5 km) et
galopant entre 2 et 8 km en 2010 ; (iii) l'augmentation du coût moyen de
location par hectare de forêts naturelles par les producteurs de
bois-énergie qui en 15 ans est passé de l'intervalle de 30 000
à 80 000 FCFA/ha en 1995 à l'intervalle de 40 000 à 100
000 FCFA/ha en 2000 et 2005 avant de galoper entre 55 000 et 160 000 FCFA en
2010.
Au regard de tout ce qui précède, il
apparaît recommandable d'une part que des recherches soient poursuivies
sur un plus grand nombre de villages pour identifier les foyers de pression des
activités de production de bois-énergie sur les forêts
naturelles et plantées, afin de définir et suivre
l'évolution des indicateurs de pression pertinents, et d'autre part que
des projets de développement soient mis en oeuvre pour promouvoir la
régénération assistée de l'essence
légumineuse locale Pentaclethra macrophylla (Mouvandza) dans
les jachères forestières et les plantations mixtes paysannes en
savane à travers les outils comme le PNAR, le SNR, etc..
Enfin, une structure mixte indépendante
représentant les différentes parties prenantes des
filières de bois-énergie à Pointe-Noire est à
mettre en oeuvre pour orienter la gestion du système d'approvisionnement
urbain en bois-énergie de manière à garantir sa
durabilité et la prise en compte par tout gestionnaire des plantations
industrielles d'eucalyptus du triple enjeu social, économique et
écologique de la filière plantations industrielles d'eucalyptus
dans l'approvisionnement urbain durable en bois-énergie.
Diahambana Mayala Rommel Mémoire de fin de
formation. IDR Page 55
|