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La résistance au marketing dans le secteur agro-alimentaire.

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par Aliénor Miroudot
INSEEC Lyon - Master 2 Marketing, Communication et Stratégies commerciales 2016
  

Disponible en mode multipage

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    Aliénor Miroudot

    Promotion 2014- 16

    LE MOUVEMENT DE RÉSISTANCE

    DANS LE SECTEUR DE L'AGRO-

    ALIMENTAIRE

    ECOLE SUPÉRIEURE DE L'INSEEC
    MASTER OF SCIENCE

    MASTER MARKETING

    Master Marketing, Communication & Stratégies commerciales

    MÉMOIRE DE FIN D'ÉTUDES

    « LE MOUVEMENT DE RÉSISTANCE DANS
    LE SECTEUR DE L'AGRO-ALIMENTAIRE »

    2

    Réalisé par :

    Aliénor MIROUDOT

    Années académiques : 2014-2016 Tutrice de mémoire : Mme I. Chalamon

    ÇSoyez le changement que vous voulez voir

    dans le monde.»

    Gandhi

    3

    4

    Remerciements

    Je tiens à remercier tous ceux qui m'ont accompagné dans mon parcours universitaire, et plus particulièrement l'équipe enseignante du Master of Science Marketing de l'Inseec de Lyon qui, au cours de mon master, a toujours su me conseiller et m'aiguiller dans ma formation afin que je puisse trouver la voie qui me correspondait, car elle a visé juste.

    J'ai une pensée particulière pour Mme Isabelle Chalamon, tutrice de ce mémoire, mais avant tout l'intervenante qui m'a permis d'intégrer cette formation. Elle a su dès notre rencontre m'orienter et me soutenir dans mes choix et mes moments de faiblesse pour me motiver tout au long de ma formation. Elle m'a surtout permis d'intégrer l'entreprise où je réalise mon stage de fin d'études, dans le domaine que j'affectionne particulièrement : celui de l'agro-alimentaire. Ce stage m'a permis de m'ouvrir sur les nouveaux enjeux de consommation et de ce fait elle m'a permis d'établir mon sujet de mémoire.

    Je tiens aussi à remercie M. Bernard Goret, directeur général de l'entreprise NEWTREE et tuteur de mon stage de fin d'études, qui m'a permis d'intégrer son entreprise et de découvrir le monde des « entreprises éthiques ». Je le remercie car à présent je sais exactement quelles entreprises ou organisations je souhaite intégrer demain. A force d'entendre qu'on ne peut rien faire en tant que consommateurs, j'ai envie de participer à notre évolution au côté d'entreprises engagées de manière éthique.

    Enfin, je tiens à remercier mon entourage personnel qui m'a toujours soutenu dans mes études et mes projets et qui me donne la force de toujours me surpasser, notamment dans ce projet de mémoire, où ils ont réveillés ma motivation et ma détermination.

    5

    Sommaire

    4

    REMERCIEMENTS

    5

    INTRODUCTION

    9

    PARTIE 1 : CADRE THÉORIQUE

    Chapitre 1 : Le mouvement de résistance 9

    1 - Les fondements théoriques de la résistance 10

    2 - Les ressorts de la résistance 12

    Chapitre 2 : Consommation locale et Locavorisme : Figure de consom'action dans le secteur agro-alimentaire

    17

    1 - Origine et concept 18

    2 - La locavorisme résultat de la critique consumériste 20

    3 - Les nouveaux enjeux de la consommation locale 20

    4 - Essor de nouveaux circuits alternatifs et durables 23

    Chapitre 3 : L'art des entreprises de s'adapter 25

    1 - Le rôle du marketing 26

    2 - Les stratégies RSE au coeur des stratégies d'entreprise 28

    31

    PARTIE 2 : CADRE PRATIQUE

    31

    Méthodologie

    1 - Stratégie de recherche 31

    2 - Méthodologie et plan d'échantillonnage 32

    3 - Les variables 39

    4 - Le traitement des données 39

    40

    RÉSULTATS

    48

    DISCUSSION DES RÉSULTATS

    56

    CONCLUSION

    Référence bibliographiques 58

    Références méthodologique qualitative 60

    Annexes 61

    6

    Introduction

    Depuis la révolution industrielle de la fin du XIXème siècle et le développement d'une société capitaliste et libérale, les entreprises ont placé la valeur marchande au coeur de leurs stratégies où le marketing détient un rôle déterminant, car il définit notre modèle de consommation à travers les représentations affichées dans leurs discours commerciaux et dans la publicité. A l'origine, le marketing est une science qui s'appuie sur des études comportementales lui permettant de déterminer des profils de consommation et d'adapter le contenu de ses offres dans le but de satisfaire les besoins des consommateurs et de les influencer dans leurs décisions d'achat. Mais, les résultats positifs affichés par les stratégies marketing ont rapidement favorisé sa pratique dans tous les domaines comme les institutions publiques, politiques, etc. De nombreuses études démontrent que les consommateurs sont sous-pression et excédés par ces discours marketing (L. Sitz, 2008.) La mondialisation a engendré une société basée sur un modèle « d'hyper-consommation » (A.S. Novel, 2010) où la logique marchande a pris le dessus sur toute autre dimension, et le seul objectif est de générer des profits. Face à cet agacement et aux techniques douteuses, une partie des consommateurs se sont marginalisés des firmes en s'opposant à leurs offres, à leurs discours, aux marques et aux modèles imposés, en favorisant des solutions alternatives voire à rejeter complètement le système. C'est approche est défini par la notion de résistance à la consommation. De plus, avec le développement prononcé des techniques de communication et l'expérience de consommation, le consommateur est aujourd'hui en position de mobiliser un certain nombre de ressources pour manifester individuellement ou collectivement son mécontentement. Ce changement de comportement n'était jusqu'il y a 20 ans, que très peu relevé et considéré par le marketing. Avec l'essor de nouveaux enjeux, l'intégration de la notion de développement durable par le consommateur, ce dernier s'est façonné un nouveau profil plus aguerri et plus responsable qui cherche à s'émanciper des systèmes marchands en place pour favoriser une société sur l'intégration des valeurs éthiques. Les études révèlent l'émergence de nouveaux profils de consommation plus citoyen qui rejettent la société individualiste, où tout va trop vite, et où l'on perd certaines valeurs identitaires.

    Dans le secteur agro-alimentaire, l'essor des circuits de grande distribution et des marques de distributeurs ont poussé les firmes a développer des produits dans l'abondance au travers des stratégies de matraquages de plus en plus intrusives dans le quotidien du consommateur. A fortiori, on a développé une société de sur-consommation en moins de 50 ans qui contribue au « nivellement des goûts » (A.S. Novel, 2010) où tous nos aliments sont « déconnectés de leur enracinement géographique » (J.P. Poulain, 2002.) Aujourd'hui, les aliments parcourent en moyenne 2500 km (A.S. Novel, 2010) et perdent toute leurs valeurs

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    d'authenticité car tous les produits sont transformés, modifiés. Les firmes sont tenues responsables de ces changements et pour cause, elles ont été à l'origine de nombreuses crises alimentaires et maladies. Pour manifester leur mécontentement, où simplement dans le but de réaffirmer leur identité, la notion de consommation locale est redevenue à la mode, et plus précisément le « locavorisme ». Les locavores consomment des produits alimentaires dans un périmètre géographique limité et refusent de restreindre l'acte alimentaire à l'ingurgitation d'éléments nutritifs. Ils incorporent toute une notion éthique, de plaisir qui devient un reflet de la personnalité et de l'identité. Ces évolutions du comportement de consommation alimentaire sont favorisées par la diffusion des pratiques abusives des firmes, mais aussi par la nécessité d'intégrer une responsabilité citoyenne dans sa consommation pour le bien de tous. Bien que certains de ces profils aient encore recourt à la consommation de produits alimentaires industriels ou qu'ils voyagent à travers le monde, les locavores sont vigilants sur le choix de ses aliments, sur les origines et les caractéristiques des produits en considérant l'impact de sa consommation alimentaire sur le monde. Dans un sens, ils participent à l'évolution de la société en ayant une consommation s'inscrivant dans une démarche citoyenne. Que ce soit volontaire ou non, sa démarche s'inscrit d'une certaine manière dans une démarche de résistance à la consommation.

    Depuis quelques temps, dans le but de satisfaire une nouvelle demande ou d'améliorer leur image, les entreprises ont intégrées les enjeux du développement durable et de la consommation locale dans leur stratégie d'entreprise. Aujourd'hui, on voit dans tous les magasins alimentaires utilisant les codes du marketing éthique : les codes couleurs remis au vert, l'utilisation d'engagements sociaux ou environnementaux pour assurer la promotion de leurs produits, le développement d'une multitude de labels et certifications pour « rassurer » le consommateur. Ils essaient de valoriser un positionnement tourné vers l'éthique et le durable, alors que les consommateurs continuent de remettre en question leur confiance et leur estime envers les firmes, car les pratiques de fond restent inchangées. D'autre part, ces nouveaux profils de consommation tentent de faire émerger de nouveaux acteurs marchands ou revalorisent des parties-prenantes trop longtemps délaissés comme les agriculteurs, producteurs du coin, etc.

    L'objectif de ce mémoire est donc de comprendre comment le mouvement de résistance peut-il modifier durablement les modèles de la consommation sur le marché agro-alimentaire ? A travers la consommation alimentaire, nous allons essayer de comprendre les nouveaux enjeux du consommateur moderne et en quoi il est capable d'influer les modèles affichés sur les marchés alimentaires. Ce mémoire va s'articuler autour de deux grandes parties qui sont le cadre théorique et le cadre pratique dans lesquels je vais essayer d'apporter un cadre d'analyse complet pour répondre au mieux à cette problématique.

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    Nous débuterons ce mémoire avec une revue de littérature pour définir d'un point de vue très théorique la résistance à la consommation, le mouvement locavore et l'intégration de ces éléments du point de vue des entreprises et du marketing.

    Dans un premier temps, nous allons présenter les fondements théoriques de la résistance à la consommation en tentant de conceptualiser et de définir ce mouvement en fonction des différentes recherches déjà effectuées à ce propos. Malgré la difficulté de son analyse et sa récence, nous allons essayer de définir ses ressorts sur la société au travers des stratégies de résistance déployées par les consommateurs et d'exemple à l'appui comme le boycott. Afin de mieux comprendre ce que la résistance implique en général pour le consommateur, nous allons illustrer ce mouvement à travers la présentation de profils de consommateurs « résistants. » Puisque ce mémoire porte sur les conséquences de la résistance à la consommation sur les modes de consommation alimentaire, nous allons dans un second temps définir le mouvement locavore et la consommation locale comme moyen de résistance, dans la mesure où ce mouvement fait émerger des acteurs alternatifs pour contourner les offres actuelles rejetées. Enfin, pour se protéger et dans une démarche complètement éthique, nous analyserons le rôle du marketing et des firmes face à cette résistance, et nous essaierons de comprendre comment elles font pour continuer de séduire ces nouveaux profils de consommateurs. Ces éléments constituent les hypothèses que nous allons vérifier dans la partie suivante.

    Pour savoir si le locavorisme peut modifier durablement les codes de la consommation alimentaire, nous allons effectuer une étude qualitative en plusieurs étapes. En effet, pour apporter un cadre d'analyse le plus complet à ce concept de résistance encore peu étudié, nous avons réalisé une étude d'observation de type descriptive sur les consommateurs et les acteurs de l'offre puis un entretien en focus groupe visant à explorer la notion de résistance et le mouvement du locavorisme. Dans cette partie pratique, nous avons tout d'abord définit la méthodologie de l'étude qui s'articule à travers sa stratégie, la méthode d'échantillonnage et de recueil des données, la définition des variables et le traitement des données. Grâce à cette étude, nous allons pouvoir vérifier si le locavore fait toujours acte de résistance dans sa consommation locale, est-ce qu'il est volontairement à l'origine de création de valeur sur le marché dans la mesure où il ne peut pas se suffire à sa consommation locale et qu'il est dans un certain sens dépendant des firmes et des distributeurs.

    Enfin, tous ces éléments nous permettront dans une dernière partie de présenter et de discuter les résultats de l'étude, qui seront comparés avec les éléments analysés dans le cadre théorique, dans le but de vérifier notre hypothèse à savoir est-ce que le locavore ou consommateur local est à l'origine de création de valeur sur le marché ? Puis, pour compléter notre analyse, nous proposerons des pistes de recherches futures afin d'approfondir les travaux sur le lien positif établit entre mouvement de résistance et modification des codes dans le cadre du marché agro-alimentaire.

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    Partie 1 / Cadre théorique

    CHAPITRE 1 : LE MOUVEMENT DE RÉSISTANCE

    La résistance est une réaction observée depuis des siècles dans le comportement de l'individu. C'est une réaction commune et naturelle, déjà identifiée dans de nombreux contextes historiques et sociologiques (E. Remy, 2004). Dans notre société où les firmes détiennent une place prédominante et « croient encore possible, bien à tort, de gouverner le consommateur » (Y. Gabriel et T. Lang, 1995), elles continuent de développer des offres et des outils encore plus précis à travers des stratégies de fidélisation pour satisfaire le consommateur et l'inciter à rester. Pourtant, à force d'être noyé dans cette multitude d'offres, le consommateur ne distingue plus les différences entre les marques, la valeur ajoutée et l'innovation des nouveaux produits. De plus, avec l'évolution de la société et l'apparition de nouveaux enjeux éthiques, il y a de nouveaux facteurs qui interfèrent dans la relation consommateur-entreprise. D'autant plus dans une société d'information de masse, ultra-connectée, avec des rythmes toujours plus rapides, le consommateur se sent de plus en plus dépassé et lassé par les représentations envers qui il manifeste légitimement son mécontentement. On remarque un changement notoire dans le comportement de consommation, le consommateur « traditionnel » recherchait par tous les moyens à consommer les offres présentées sur le marché pour satisfaire ses besoins et appartenir aux représentations établies, tandis qu'aujourd'hui, il est beaucoup plus informé et à même de décrypter les marques pour consommer en fonction de lui et de ses valeurs. Malgré tout, les firmes continuent de développer des outils de fidélisation pour séduire, mais ces derniers mobilisent différentes ressources pour exprimer leur résistance, car s'il y a résistance, c'est qu'il n'y a pas de satisfaction. L'intérêt pour le marketing aujourd'hui est de réussir à comprendre et à percevoir les raisons et les ressorts de la résistance, pour ne pas remettre en question son rôle dans notre société, car la résistance semble être la conséquence de besoins non traduits dans les offres proposées. Dans les années 90, la résistance à la consommation a commencé à être étudiée par les sciences du marketing, mais c'est un concept difficile à cadrer en raison de la complexité des informations à interpréter, des variables impliquées à l'origine de la résistance et la diversité des actions traduisant cette résistance. Dans cette première partie, je vais tenter d'apporter un cadre d'analyse au mouvement de résistance, de définir les ressorts de la résistance à travers les moyens utilisés par les consommateurs. Afin d'illustrer les nouveaux profils de consommation, je définirai dans un dernier temps le « nouveau consommateur » (D. Roux, 2007) à travers le « consom'acteur ».

    10

    1 - Les fondements théoriques du mouvement de résistance

    Ce mouvement a d'abord été conceptualisé par M. Poster en 1992 comme la capacité des consommateurs à employer des « stratégies d'appropriation » en réponse « à des structures dominantes », puis reprit par Penazola et Price en 1993. Dès lors de nombreuses recherches se sont multipliées essentiellement fondées sur des approches comportementales permettant d'analyser principalement les actes de résistance.

    Le terme résister vient du latin « resistere » qui signifie « s'arrêter et faire face ». Dans ses recherches, D. Roux (2007) a définit la résistance à la consommation comme une forme d'opposition, émanant d'un sentiment de rejet envers une représentation donnée, et s'exprime au travers de stratégies d'appropriation, puis, dans la capacité à manifester sa contestation. Dès lors, pour qu'il y ait résistance, il faut qu'il y est une relation déjà établite entre la représentation (firmes, marchés, institutions) et le consommateur. Il est nécessaire de comprendre cette double conceptualisation, car dans un premier temps, il faut que le consommateur ressente une pression s'exercer sur lui en identifiant les éléments dissonants, et qu'il manifeste son insatisfaction. La résistance nécessite que le consommateur mobilise différents mécanismes de défense pour se protéger dans le but d'atteindre sa cible. La résistance est donc un acte plus ou moins volontaire de la part du consommateur dans le but de s'opposer à une force jugée oppressive (Roux D., 2009), mais pas nécessairement conscient. Dans ce sens Dominique Roux (2004) a établit un cadre d'analyse de résistance du consommateur et a définit la résistance comme un ensemble de formes variables d'opposition face à des situations de pression et d'influence, dans lesquels les « pratiques et discours marchands sont jugés comme dissonants. »

    Cadre d'analyse de la résistance du consommateur1

    1

    La résistance du consommateur : proposition d'un cadre d'analyse - D. Roux, 2007

    11

    La résistance dépend de plusieurs dimensions variables. Ils peuvent être externes au consommateur, alors intégrés à la « dimension situationnelle » (D. Roux, 2007), en effet, les consommateurs s'opposent à des conditions de marché jugées inacceptables (R.J Moisio et S. Askegaard, 2002), le consommateur n'a aucune emprise sur ces éléments. A travers le concept du « coping » (Lazarus, Folkman, 1984), on remarque que le consommateur a le sentiment de faire constamment des efforts de compréhension et d'adaptation, ce qui le place dans une situation de rejet. L'interprétation cognitive de la situation est propre à chacun, mais dans une société mondialisée où les informations abondent dans tous les sens, le consommateur a le pouvoir de prendre du recul sur la situation, s'informer, de comparer les offres et acteurs pour mieux analyser les discours, ce qui représente autant d'éléments qui peuvent interférer entre les firmes et le consommateur. Les firmes, à travers leurs outils ont d'une certaine manière poussé le consommateur à agir comme tel. L'essor des Marques de Distributeurs en constitue un exemple pertinent, puisque les consommateurs se sont retrouvés au coeur d'une bataille des prix entre marques de distributeurs et marques industrielles. Ainsi, le consommateur a aujourd'hui une image du rapport qualité/prix qui va le pousser à regarder et comparer dans chaque situation. En effet, le consommateur mémorise une série d'expériences plus ou moins positives, qui sont propres à lui ou à son entourage pour se faire un jugement. Ce « concept de métacognition » (Friestad et Wright, 1994) influence significativement sa réaction face à une représentation négative supplémentaire. Le consommateur compare, associe et recoupe des faits avant de déterminer sa réaction. Si le consommateur enregistre une accumulation de rejets pour une même représentation dans différentes situations, il va alors s'opposer (C. Ficher, 2001).

    La résistance varie donc en fonction de facteurs personnels traduits par la capacité du consommateur à réagir dans une situation en fonction de sa perception, de ses émotions et de son état. Sa capacité à décrypter l'information dépend aussi de facteurs sociaux comme le niveau d'éducation de l'individu. Si un individu grandit dans une famille qui est sensible aux enjeux du développement durable, le consommateur adulte fera plus attention à ces éléments. Le profil socio-démographique du consommateur détermine également son niveau d'exigence face aux firmes, sa sensibilité face à leurs pratiques et à sa position dans la construction de la société. Dans ce sens, si le consommateur a une situation plus aisée, il pourra plus facilement s'opposer ou trouver d'autres solutions. Enfin, le facteur émotionnel joue un rôle essentiel, auquel on accorde une double dimension, (Knowles et Linn 2004) : d'une part « l'état motivationnel » du consommateur qui représente l'état d'un individu à se contrôler face à des éléments dissonants; d'autre part « les manifestations de résistance » qui s'apparentent à des forces puisées favorisant l'action de résistance. Enfin, le consommateur a acquit avec le temps une liberté précieuse qui lui est très précieuse comme le droit à l'information, la liberté d'expression, qu'il cherche à protéger au maximum. Si cette notion de liberté est remise en question ou bafouée par les représentations proposées par les firmes, le

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    consommateur va naturellement remettre en question sa relation avec le produit ou son besoin de consommer voire de s'opposer (J. Brehm, 1966).

    De manière générale la résistance peut être classifiée sur trois niveaux, le premier niveau correspond à une résistance face au contenu de l'offre. Aujourd'hui, uniformisé et standardisé par la mondialisation, il est de plus en plus critiqué par le consumérisme. Le second niveau de résistance porte sur les techniques et actions utilisées par le marketing dans leurs stratégies d'influence perçues comme abusives. Enfin, le troisième niveau de résistance interroge le rôle des acteurs marchands et leur responsabilité face aux nouveaux enjeux de la mondialisation (D. Roux 2007). Ces différents niveaux de résistance vont déterminer les changements de comportement et les profils de consommateurs résistants.

    2- Les ressorts de la résistance

    2-1 Les stratégies de résistance

    Face au développement des pratiques commerciales ayant pour seul objectif d'engager un maximum de consommateurs dans un acte marchand (D. Roux, 2007) et de dégager des profits, on assiste à des comportements de « non-adhésion » envers les marques, les offres et les modèles affichés. En effet, le consommateur ne peut plus se contraindre à un cadre de représentations qu'ils évaluent de manière négative (S. Chreim 2006). Dans ce cas, il se manifeste et adopte des stratégies de défense qui peuvent être exprimées à travers des actions très diversifiées. Afin de mieux les comprendre, il est intéressant de se pencher sur leurs origines. Dès lors, on dissocie la résistance du client face à une firme et ses actions de persuasion. Par exemple, dans le secteur agro-alimentaire, les consommateurs dénoncent de plus en plus le rôle des entreprises face à l'évolution des problèmes de santé. Ne consommant principalement que leurs produits dans leur alimentation, ils assistent ouvertement à des crises alimentaires (Vache Folle, Viande de Cheval chez Findus), mais aussi à l'utilisation de produits peu sains, au milieu de discours dissonants, il va alors s'interroger et éventuellement trouver d'autres solutions. Ce profil est à dissocier des consommateurs très engagés dans des démarches citoyennes, comme le développement durable ou la permaculture, qui vont naturellement chercher à s'opposer au système.

    Néanmoins, toute forme de résistance émanant d'un client de l'entreprise ou d'un individu lambda peut engendrer autant de risques pour les firmes (D. Roux, 2007). Face au rejet envers les firmes, O. Hirschmann (1970) a analysé qu'un consommateur résistant peut choisir entre trois possibilités. Dans un premier cas, le consommateur peut tout de même rester attaché à l'entreprise malgré son opposition (Fidélité). Cela va dépendre des variables liées au

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    degré d'engagement envers la marque. Dans un second cas, il peut rejeter la marque pour trouver une solution alternative sur le marché et continuer à satisfaire ses besoins (le pouvoir d'expression). Enfin, il peut manifester verbalement son mécontentement et intervenir face à la firme, et/ou au marché pour tenter de changer la situation (le pouvoir de défection). Cette dernière possibilité apparaît comme plus pertinente, et constitue le sujet de recherche le plus analysé en recherche marketing.

    On dissocie les actions de résistance passives et actives des consommateurs (D. Roux, 2012). Selon la personnalité du consommateur et son degré d'implication envers la marque et/ou le marché, certains vont s'opposer de manière furtive, isolée et silencieuse. Cette forme de résistance est la plus dangereuse pour les firmes, puisque le consommateur ne matérialise pas de manière claire son opposition, mais ne la restreint pas pour autant. De plus, malgré la mise en place de « Services de réclamation », sorte de « stratégies relationnelles » (E. Remy, 2007) développées par les firmes pour toujours contrôler les comportements et pouvoir réagir, si un consommateur veut s'opposer de manière passive et que cela échappe aux firmes, l'effet de résistance peut se décupler et devenir encore plus néfaste pour les firmes. Par exemple, en reprenant l'illustration du rôle des firmes dans le phénomène de « malbouffe », le consommateur peut en arriver à réaliser un acte de dé-consommation et bannir certains produits alimentaires ou marques de sa consommation à force de vivre de mauvaises expériences. Cette résistance peut en effet rapidement conduire à des actes de dé-consommation, voire de défection (M. Ritson et S. Dobscha,1999).

    A l'inverse, d'autres consommateurs vont diffuser en masse leur mécontentement pour informer et partager leur opinion dans une démarche solidaire et humaine. Ils vont chercher du soutien auprès d'autres consommateurs ou associations pour multiplier leur pouvoir de force et arriver plus facilement à leurs fins. Depuis les années 80, face au développement des techniques marketing dans tous les secteurs (E. Remy 2007), des associations de défense de consommateurs se sont formées pour essayer, de manière cadrée, de protéger les consommateurs en leur fournissant des informations supplémentaires, grâce au pouvoir de la communauté qui permet de les réunir autour d'une cause commune et les aide à se mobiliser ou à être représentés dans la sphère publique. La relation ne s'établit plus seulement autour de l'entreprise et du consommateur, d'autres facteurs externes ou internes sont à prendre en compte, car ils redéfinissent la consommation, tout comme le rôle de la communauté. En premier lieu, la consommation collaborative est apparue progressivement et est à présent ancrée comme une forme de résistance fréquente. Elle rassemble les consommateurs de tout horizon autour d'échanges et de partages et permet de trouver des solutions alternatives à la consommation de masse (I. Robert, AS Binninger, N. Ourahmoun, 2014). Grâce au

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    regroupement communautaire, on peut assister à des stratégies de contournement, grâce au pouvoir de la communauté, qui permettent aux consommateurs de favoriser d'autres systèmes, avec par exemple l'essor de nouveaux circuits de distribution de secondes mains. À force de se lasser du système marchand, où tout est toujours à acheter ou à racheter, sans qu'il y ait une grande nécessité, les consommateurs ont développé des circuits « consumer to consumer » , basés sur la solidarité. Dans les cas extrêmes, le pouvoir de la collectivité

    2

    peut aussi pousser à des formes de résistance par le biais d'actions collectives comme le boycott (A. Leroux, 2014), qui est un acte politique non-violent. Par exemple, en 2013, Nestlé a ébranlé la toile du web. Nestlé est un grand acteur industriel du marché de l'agro-alimentaire à travers le monde qui produit et commercialise un large éventail de produits et de boissons alimentaires. Il détient sur le marché une image novatrice et d'expert. Néanmoins, les propos du PDG P. Brabeck (2013) dans le reportage « We feed the World » ont fait scandale. Le documentaire illustre les conditions terribles de pauvres communautés vivant dans de médiocres conditions où l'accès à l'eau potable est une réelle problématique à cause de des sources d'eau naturelles souillées. Le PDG explique que l'eau est la matière première la plus importante donc deux possibilités s'offrent à nous : soit l'eau est démocratisée et nationalisée et tout le monde y a accès; soit elle a « une valeur de denrée », ce pour quoi il est entièrement favorable, surtout pour l'avenir économique du groupe. Sans même retenir la suite de ses propos, les consommateurs ont lancés un appel au boycott, relatant par la même occasion les différentes crises que le groupe a connu depuis ses débuts. Au-delà de la résistance, le boycott apparaît ainsi comme une forme d'action publique (A. Leroux 2014.)

    Malgré les volontés des firmes, les consommateurs ont une réflexion plus approfondie, notamment grâce aux évolutions technologiques et au développement de l'ère numérique. Ils détiennent désormais une multitude d'outils supplémentaires pour résister et faire preuve de solidarité entre consommateurs résistants. Ces éléments favorisent une « cyber-résistance » (I. Chalamon, R. Chiouk, B. Guiot 2012), le consommateur se sent à la fois protégé derrière ses écrans, peut résister face à une « représentation anonyme » et se mobiliser dans un cadre indéfini. Ces nouveaux éléments leurs accordent un pouvoir supplémentaire qui n'est plus seulement un « objet de captation » (D. Roux, 2007). Les nouvelles possibilités offertes par internet aux consommateurs, en étant protégés derrière un écran ou un profil anonyme, permettent d'échanger en communauté et d'attaquer directement (sur les pages de leurs réseaux sociaux par exemple) ou indirectement (sur d'autres sites communautaires) les firmes avec des moyens plus ou moins puissants, car les médias sont utilisés comme hauts-parleurs. Qu'elle soit individuelle, collective, active ou

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    CtoC : Consumer to consumer : Ensemble des relations commerciales entre consommateurs

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    passive, la résistance peut affecter une multitude d'éléments comme la publicité, les marques, les techniques de ventes, la fidélité, les plaintes, le système, etc, tant d'éléments qu'il faut rechercher pour comprendre la résistance (A. Leroux 2014).

    D'autre part, les notions de qualité de vie et d'éthique sont à réellement intégrées pour mieux comprendre les évolutions comportementales des consommateurs (W. Zavetowski, 2002). En effet, ils affichent un « ras le bol » du système marchand et font preuve de militantisme à travers une « consommation politisée » (E. Remy, 2004) pour améliorer leur mode de vie.

    2-2) Le consommateur moderne : « Le consom'acteur »

    La globalisation de notre société et les évolutions qu'elle apporte, redéfinissent en permanence le profil du consommateur. Un modèle d'une société « d'hyper-consommation » (A.S. Novel, 2010) est critiqué par le consumérisme. Cette évolution favorise le développement de pays et a permis le progrès dans d'autres domaines, mais a engendré des répercussions sur d'autres dimensions. Les progrès techniques et marchands ont incité les firmes à diffuser un modèle de consommation standardisé et excessif, diffusé par les médias. Mais cela a aussi façonné le consommateur comme acteur dans la société. Ainsi, le « consom'acteur » est la contraction des termes « consommateur » et « acteur », pour désigner un consommateur qui s'émancipe des produits et services proposés, des modes de vie que le marché définit pour lui. Il devient ainsi autonome de ses choix et contribue de manière citoyenne à l'évolution de la société. O. Hirschman (1983) a analysé dans son oeuvre « Bonheur privé Action Publique » que la consommation individuelle est à la fois une source de besoin et de satisfaction, mais que l'action publique donne aussi un contre-pouvoir au consommateur. La notion de « consom'action » s'est développée à la faveur de la diffusion du développement durable. René Dubos a utilisé pour la première fois le terme « Penser global, agir local » lors du premier sommet sur l'environnement en 1972. Il a engagé la responsabilité de chaque individu dans la prise de conscience sur « sa contribution à la régulation de la société, à son niveau et avec ses moyens ». Ainsi, la notion de développement durable est apparue. Le concept a été présenté dans le rapport Bruntland ,

    3

    lors de la commission mondiale de l'environnement et du développement en 1987, où il est défini comme « un développement susceptible de satisfaire les besoins de la génération actuelle sans compromettre la possibilité pour les générations futures de satisfaire les leurs ». Il se doit d'être à la fois économiquement efficace : c'est-à-dire qu'il faut qu'il y ait création de richesse, à travers une gestion raisonnée, durable et saine, sans préjudice pour l'environnement. Le développement durable est socialement équitable, le but est de satisfaire les besoins essentiels de l'humanité. Le développement durable vise à réduire les inégalités

    3 http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/sites/odyssee-developpement-durable/files/5/rapport_brundtland.pdf

    16

    entre les individus, et à améliorer les conditions de vie, dans le respect de chaque culture, et dans un cadre écologiquement tolérable (préserver les ressources naturelles à long terme, en maintenant les grands équilibres écologiques et en limitant les mauvais impacts environnementaux). Le développement durable interpelle sur le conflit naissant entre « monde civique » et « monde marchand » (L. Boltanski et L. Thévenot,1991) et met en valeur le fossé naissant de notre société actuelle. De ce fait, on voit émerger « un nouveau consommateur » (B. Cova et A. Cova, 2009), où la figure du consommateur-client est remplacée par un « client-citoyen » qui emploie des actes de consommation apparaissant comme « subpolitisés » (J.S. Beck 2011) dans la mesure où il devient une partie-prenante. Ce nouveau visage comme « consom'acteur » peut militer de manière individuelle, voire ponctuelle, mais va mobiliser très facilement et naturellement « des moyens de pression d'une autre dimension », comme les stratégies de contournement ou les actes de dé-consommation, des formes de boycott, pour essayer de modifier durablement le fonctionnement établit par le système (E. Remy, 2007). De manière plus global, le « consom'acteur » agit en fonction « des causes et valeurs qui lui tiennent à coeur » 4 , et l'acte de consommation devient une action publique qui n'est plus simplement rattachée à un « cadre cognitif dominant » (E. Remy 2007). De manière générale, le « consom'acteur » va s'interroger sur la valeur pécuniaire et la dimension éthique des marques, produits et services pour juger nécessaire la consommation.

    Pour aller plus loin dans les nouvelles figures consuméristes, l'alter-consommateur, jugé « révolutionnaire » (E. Remy, 2007), est encore plus engagé que le consom'acteur. Par son caractère plus extrémiste, il proteste de manière plus « radicale » et audible. En effet, l'alter-consommateur s'inscrit dans un mouvement du « contre » dans lequel E. Fouquier constate des similitudes dans leurs profils sociaux-démographiques : leurs catégories socioprofessionnelles élevées, leur bon niveau d'éducation, leurs expériences d'adulte et leur capacité à s'informer (E. Fouquier 2004) . Les alter-consommateurs ont une «

    5 culture du

    marketing » enrichit, qui devient une arme redoutable dans la critique consumériste en protestant pour l'anti-consommation et la défection pure (E. Remy, 2007), et en se mobilisant dans des mouvements d'anti-consommation comme les boycotts apparentés aux actes de désobéissance civile (H. D. Thoreau, 1849), les mouvements anti-pub radicaux (comme l'alliance des mouvements Anti-Pubs et Casseurs de pub) pour générer plus d'impact. Il y a donc deux approches parallèles : le consom'acteur qui se protège par les moyens fournit par le modèle capitaliste, malgré leur résistance et leur approche citoyenne; les consom'acteurs qui ne s'affranchissent pas entièrement des firmes et ressentent encore nécessité de

    4 www.economiessolidaires.com

    5

    L'alterconsommateur et le qualitativiste, Décision Marketing 2004

    satisfaire leurs besoin. L'alter-consommateur, quand à lui, s'émancipe complètement d'un système de consommation auquel il n'appartient pas et qu'il rejette, il va en ce sens essayer de se réconforter dans un modèle pur et authentique, et revendique sa résistance au maximum. (M. Lee, D. Roux, H. Cherrier, B. Cova, 2012).

    Cadre délimitant la consommation résistante de l'anti-consommation

    Ces deux types de consommateurs vont redéfinir la consommation « traditionnelle » où le consommateur n'est plus simplement un « objet de captation » (D. Roux 2014) mais fait preuve de « résistance créative » en leurs accordant un pouvoir.

    CHAPITRE 2 : CONSOMMATION LOCALE & LOCAVORISME : FIGURE DE

    CONSOM'ACTION DANS LE SECTEUR AGRO-ALIMENTAIRE

    Dans le cadre du secteur agro-alimentaire, les notions de mondialisation et de surconsommation ont complètement modifié nos codes. Nos parents et nos grands-parents ne connaissaient pas toutes les denrées que nous avons aujourd'hui. L'apparition des circuits de grande distribution tels que les supermarchés, réunissent tous les produits alimentaire sdans un même point de vente. Le développement industriel permet le développement d'une offre plus globalisée, avec des produits uniformisés présentés à des prix souvent très bas, ont poussé les consommateurs à s'engouffrer dans une sur-consommation alimentaire. Le développement de ce modèle et des techniques industrielles a eu des conséquences sur notre Terre, sur nos valeurs et relations sociales et sur notre propre identité, qui sont à l'origine de critique au consumérisme. Pour simplement diffuser l'information et réunir des consommateurs autour de valeurs communes éthiques, les « consom'acteurs » résistants ont fait émerger de nouveaux mouvements militants comme le Slow Food et les locavores, mais aussi dans le but d'affecter les firmes et de tendre à des changements. Agissant à la fois comme client et citoyen, il est intéressant d'évaluer le rôle qu'ils jouent dans nos modes de

    17

    18

    consommations alimentaires et l'impact de leur résistance. Dans ce chapitre, je vais définir le concept de locavorisme à travers son origine et ses conséquences sur les marchés, à travers son profil de résistance au consumérisme alimentaire. Enfin je donnerai un cadre à ce nouvel écosystème généré.

    1- Origine et concept du locavore

    Le « Locavorisme » est un mouvement apparu il y a dizaine d'années aux Etats-Unis. En s'appuyant sur la notion de « Food Miles » définit par T. Lang dans les années 1980 (A.S. Novel 2010), il consiste à s'interroger sur les kilomètres que parcourent nos produits alimentaires. Le terme a été employé pour la première fois par J. Prentice, étudiante à San Francisco, qui, lors de la journée mondiale sur l'environnement, a mis au défi les habitants de sa ville de ne consommer des aliments exclusivement produits à moins de 160 km de chez eux. Depuis, le mouvement est né et a rapidement connut un franc succès.

    D'un point de vue étymologique, en latin, le terme locavore est la fusion de deux termes « locus » qui signifie local, et « vorare » le fait d'avaler quelque chose. Les locavores sont des consommateurs qui favorisent une alimentation locale. Ils se définissent comme « un groupe d'aventuriers culinaires qui tend à consommer des aliments produits à moins de 160 km de leur ville » (A.S. Novel,2010). Le locavorisme a pour objectifs principaux de réduire l'impact de notre consommation alimentaire sur l'écologie et de maîtriser la traçabilité des produits alimentaires. Pour devenir locavore, les consommateurs doivent respecter trois principes : S'alimenter de produits ayant une distance limitée à 200km maximum entre le lieu de production et celui de consommation: consommer uniquement des produits frais; et de saison, et enfin consommer des produits issus d'une production raisonnée, durable, écologique (A.S. Novel, 2010).

    Le site officiel des locavores les classifie selon 3 profils de consommation qui ont chacun leur propre « dimension alimentaire » (A.S. Novel, 2010). De ce fait, on distingue les « ultra-stricts » qui ne consomment que des produits locaux, les « Marco Polo6 » (profil le plus courant) qui consomment essentiellement des produits locaux, mais qui accordent des exceptions pour certaines denrées telles que les épices (thé, café, etc). Dans ce cas précis, ils favorisent des produits issus du commerce équitable. Enfin, les consommateurs qui consomment local, sans que ce soit une « obligation », et qui ne s'inscrivent pas nécessairement dans le mouvement locavore.

    6 Marco Polo : eatlocalchallenge.com

    19

    Le locavorisme tire son origine dans le concept du « localisme », un mouvement d'actualité, alors que cette pratique correspond à celles de nos grands-parents vivant dans des milieux ruraux qui ne consommaient quasiment que des produits locaux. Dans les années 80, le Slow food a revalorisé ces pratiques en sensibilisant les citoyens à « l'éco-gastronomie » soucieuse de l'état de nos assiettes et des problématiques environnementales7. Le mouvement a très rapidement connu un succès aux Etats-Unis où la « Junk Food » est de plus en plus critiquée. Au regard de sa notoriété, en 2008, le terme « Locavore » a fait son apparition dans le New Oxford American Dictionnary comme une « personne qui recherche de la nourriture produite localement » et est nommé « mot de l'année » dans la foulée par l'Oxford University Press. Le mouvement s'est très vite répandu au Canada et en Europe. En France, il a pris du temps à s'installer, en effet comme le souligne Alexis Botaya, ingénieur agronome et président du mouvement « Vraiment durable » en France, on n'a pas le même rapport aux distances, aux transports (É) La notion de terroir est encore très présente. Il existe des labels, des garanties d'origine et la traçabilité des aliments sont meilleures.» Mais pour protéger un patrimoine alimentaire classé à l'UNESCO depuis 2010 8, les Français ont vite adopté les principes de ce mouvement.

    En quelques années, le mouvement s'est installé durablement dans nos modes de consommation. Des essais tels « The 100 miles Diet » d'Alisa Smith et James McKinnon et des romans comme celui de Barbara Kingsolver ne cessent de valoriser le concept à travers le récit de leurs expériences afÞchées dans tous les médias. Le mouvement a connu une telle notoriété, qu'on voit émerger des restaurants locaphiles qui proposent des produits locaux,

    9

    comme le restaurant Notre Maison approvisionné quotidiennement par le marché de la Croix-Rousse à Lyon. En France, des chefs cuisinier se sont appropriés le concept en valorisant les produits locaux dans nos assiettes. La grande distribution s'est même emparée du concept et propose des produits locaux et régionaux aux Etats-Unis et en Europe, comme on peut le voir avec E. Leclerc. Cette enseigne a développé une stratégie de partenariats et d'alliances locales, qui fonde sa communication uniquement sur cette gamme de produits. On constate un développement en croissance comme les marchés de producteurs, des AMAP (Association pour le maintien de l'agriculture paysanne), qui recensent 270 000 consommateurs en 2012 , ou le développement de fermes et de coopératives.

    10

    7 Rapport Ecoconso E.Leclerc

    8 www.unesco.com

    9 http://www.locaphonic.org/Definitions.html

    10 http://www.alliancepec-rhonealpes.org/

    20

    2 - Le locavorisme : résultat de la critique consumériste

    La consommation locale comme « un acte politique, écologique, éthique et un acte de résistance pacifique à tous les systèmes qui tirent leur puissance économique de la confiscation du droit des peuples à se nourrir par eux-mêmes » (P. Rabhi, 2012).

    Les pratiques employées par les industries agroalimentaires et la grande distribution apparaissent comme un « non-sens » (E. Birlouez, 2015) pour les consommateurs qui s'interrogent sur des problématiques sociétales et de développement durable. Ils font preuve de « Résistance ouverte et avouée aux pratiques du marketing institutionnalisé » (Austin, Plouffe, Peter, 2005) qui remettent en question la confiance du consommateur. Ils adoptent alors des attitudes sceptiques définies comme le fait de « ne pas croire le contenu de l'offre » (Oberillier et Spangenberg, 2010), ou cyniques, soulignées comme le fait d'avoir des « soupçons sur les intentions, la fidélité et la bienveillance » (Kanter et Wortzel, 1985) à l'égard de l'environnement et de lui-même. Malgré un pouvoir d'achat revu à la baisse plusieurs fois ces dernières années, le consommateur fait le choix de « consommer moins, mais consommer plus malin » (Vidal/Sipa, 2014). Il va consommer de manière plus responsable, en intégrant les conséquences de ses actes sur d'autres facteurs. Le locavore recherche donc un moyen pour s'alimenter de manière « saine, juste et durable. » En revalorisant des circuits oubliés par les grandes firmes, le consommateur s'oppose à un modèle de consommation alimentaire ancré. La logique marchande des entreprises est pointée du doigt, ces représentations sonnent comme dissonantes auprès du consommateur qui se recentre dès lors sur des valeurs collectives et éthiques.

    3- Les nouveaux enjeux de la consommation locale

    En favorisant une consommation locale, les consommateurs locaux font acte de résistance face à un modèle de consommation définit, que ce soit volontairement ou non, par le choix de solutions alternatives qui affectent nos représentations. La mondialisation a façonné nos marchés avec des offres standardisées et uniformisées. On retrouve aux quatre coins du monde les mêmes marques, les mêmes restaurants, et les mêmes produits alimentaires. Les offres globalisées favorisent un « nivellement des goûts » (A.S. Novel, 2010) qui n'apparait pas comme la meilleure solution au locavorisme. En consommant local, les consom'acteurs ont la sensation d'agir positivement sur plusieurs dimensions, de contribuer au développement durable, et d'être à nouveau maître de leur consommation. Le locavore puise son idéologie dans des valeurs éthiques.

    21

    L'enjeu écologique

    En France « la conscience environnementale » influence 51% des achats en 2011 , et ce

    11

    phénomène va s'accroître. En consommant local, le locavore agit directement sur le développement durable de son environnement. D'un point de vue écologique, le locavore consomme des aliments produits dans un périmètre restreint. Il s'interroge sur l'empreinte carbone de ses aliments et favorise alors des alternatives écologiquement plus responsables, limitant ainsi les transports des produits. En consommant local, il limite aussi la multitude d'étapes des chaînes alimentaires. Le modèle alimentaire des grandes marques implique l'utilisation de beaucoup d'énergie et autres ressources naturelles limitées, et dégagent énormément de gaz à effets de serre, s'ils ne sont pas encadrés. Un repas composé de produits industriels émettrait jusqu'à 3kg de Co2 . De plus, en favorisant une consommation

    12

    locale, le locavore préserve la biodiversité et valorise le patrimoine de sa région, car en consommant essentiellement des produits du terroir, il remet au goût du jour des produits délaissés par les industriels. (J. Labaronne, 2015).

    Le locavore s'oppose aussi aux pratiques de gaspillages alimentaires pratiquées par les grands groupes du secteur alimentaire. Par exemple, les fournisseurs des AMAP ne livrent que les quantités commandées, ce qui permet de ne pas gâcher la nourriture, « valeur trop souvent oubliée ». (C. Fischler, 2011).

    Les enjeux sociaux

    D'un point de vue social, dans les circuits de distribution traditionnels, il n'existe aucun lien et aucun échange direct entre le vendeur ou producteur et le consommateur13. A travers la démarche de consommer local, le consommateur rencontre les producteurs et agriculteurs avec qui il peut directement échanger. L'individu se retrouve à nouer une relation avec eux et cette expérience sociale est enrichissante pour lui (1ère motivation pour 51,5% des acheteurs, selon le CERD). Il fait ainsi la « promotion de liens sociaux de proximité » (A.S. Novel, 2010). Ce lien social est retrouvé aussi entre producteurs et même producteurs/ marques de distributeur. L'évolution des marchés de producteurs en France, ainsi que les AMAP, valorisent la capacité des acteurs à se réunir autour de valeurs communes, à développer leur réseau professionnel pouvant servir leurs activités, mais aussi d'un point de vue personnel.

    11 Etude Green Brands, 2011 : http://www.marketingdurable.net/les-resultats-de-letude-green-brands-2011

    12Réseau Action-climat France, 2015 : http://www.rac-f.org/

    13 Etude Ethicity, 2012 : http://www.greenflex.com/etudes/consommation-responsable/

    22

    Les enjeux économiques

    D'autre part, on relève en France 5 442 500 chômeurs en novembre 2015, en consommant

    14

    local, le consommateur favorise la production et la création d'emplois locaux (D. CAPT et A.M DUSSOL, 2004). Ainsi, il re-dynamise des territoires en perte de vitesse : zones périurbaines, zones fragiles touristiques ou non, en particulier zones de montagne.

    La consommation locale réduit aussi drastiquement les intermédiaires et permet d'améliorer les revenus du producteur, plutôt que d'en reverser dans les marges intermédiaires. Lorsqu'un consommateur achète un produit alimentaire en grande distribution, il a du mal à savoir à qui et comment sera reversé son argent. Si cela est fait de manière réfléchie, le fait de consommer local permet de réaliser des bénéfices économiques. Un consommateur qui achète des produits de saison va profiter d'un prix bas car le produit sera abondant à cette période (A.S. Novel, 2010). Tandis que de consommer des produits importés hors-saison engendre des coûts supplémentaires. Selon Jean-Louis Cazaubon, « le locavore ne doit pas coûter plus cher, c'est un gage de qualité et d'authenticité ».

    Les enjeux de santé et nutrition

    Le locavore est soucieux de sa santé et de ce que contient son assiette. Le modèle d'hyper-alimentation que nous connaissons a été trop souvent remis en question dans sa responsabilité face à l'évolution de notre alimentation. 46% des Français sont en surpoids, en 2014 . Ces chiffres alarment l'institut de santé publique ainsi que l'opinion, surtout lorsqu'on

    15

    sait que 80% des aliments industriels sont trop gras, trop sucrés, trop salés, trop chimiques16. Les consommateurs ne font plus attention à la composition des produits qu'ils mangent. Les firmes ont recours à des « appâts gustatifs » (conservateurs, colorants, etc). Ainsi le Dr Chevallier indique que notre assiette peut contenir 357 additifs (A.S Novel, 2010). Dans une logique économique, les firmes ont recourt à des procédés peu sains pour « contrôler » le cycle de vie de l'aliment. Tous ces éléments sont néfastes pour la santé du consommateur. La « malbouffe » (A.S. Novel, 2010) détériore notre niveau de vie et de santé. Cette « malbouffe » critiquée par les actions publiques devient aujourd'hui un vrai casse-tête pour les consommateurs, car dissimulée derrière des éléments marketing. La consommation locale, combat cet état de fait, car le consommateur connaît la traçabilité de ses produits.

    14 Chiffres INSEE, 2015 : http://www.insee.fr/fr/themes/info-rapide.asp?id=14

    15Etude INSEE - Evolution et tendances de la consommation alimentaire, 2013 - Annexe

    16

    Utilisation de produits OGM ou pesticides

    23

    L'enjeu identitaire

    S'inscrivant dans le mouvement du Slow Food, le locavore recherche aussi un plaisir hédoniste dans son alimentation. Contrairement aux Etats-Unis, les français passent 135 minutes à tables par jour (C. Fischler, 2011). S'alimenter signifie un moment de « convivialité » et de « plaisir ». Pour 94% d'entre eux, cuisiner est un plaisir (TNS Sofres 2010). Malgré la notoriété des produits transformés, les locavores sont vigilants, quant à ce qu'ils mangent. Ils recherchent des produits leur correspondant, d'une qualité supérieure et surtout authentiques. En consommant des produits locaux, ils cherchent à ré-affirmer leur identité. Au-delà des avantages que cela procure aux consommateurs, le fait de consommer local permet aussi de redécouvrir les produits de son terroir, de favoriser l'héritage des savoirs et ainsi de retrouver une identité. Le consommateur a besoin de se démarquer en défendant sa culture. Cette approche permet de participer à la protection des différences de chaque communauté et d'en apprécier d'autant plus l'exotisme quand il se doit. En France, on note plus largement que la tendance s'est développée pour le « Made in France » et les produits régionaux. Ces pratiques prouvent la volonté des individus à affirmer leur identité à travers leur alimentation. Film documentaire - « Solutions locales pour une démarche globale », C. Serreau, 2010.)

    4- Essor de circuits de distribution alternatifs et durables

    Les notions de circuits-courts sont apparues dans les années 60 au Japon (Tikei) et aux États-Unis (CSA - Community Supported Agriculture.) Le principe permet à des consommateurs de se regrouper entre eux et d'acheter auprès d'un producteur, sa production en fixant un prix en commun à l'avance. Ces méthodes sont utilisées pour se protéger des produits transformés des industries agro-alimentaires, mais aussi pour « valoriser des méthodes de production naturelles, le respect de l'environnement et l'équité. » Les agriculteurs et producteurs ont su mettre à profit les différentes crises alimentaires, afin de valoriser à la fois leur savoir-faire et leurs produits. Ainsi, les circuits courts se sont développés et démocratisés auprès de consommateurs-citoyen. Ils sont définis comme des circuits permettant une grande proximité entre consommateurs et producteurs , mais B.

    17

    Redlingshöffer valorise aussi dans son approche la réduction « d'opérateurs ». La proximité peut-être appréciée de manière géographique, c'est-à-dire la distance concernée entre production et consommation, puis de manière organisationnelle, incluant le nombre d'intermédiaires.

    17

    Ministère de l'Agriculture : http://agriculture.gouv.fr/circuit-court

    24

    Le ministère de l'agriculture a définit la typologie suivante pour classifier les circuits

    alternatifs :

    - Les circuits ultra-courts (ventes directes) :

    - Vente à la ferme (vente en panier)

    - Vente en tournées ou à domicile (par point relais)

    - Vente par correspondance (Internet, etc)

    - Vente sur le marché

    - Les circuits courts (ventes indirectes) :

    - Vente à des commerçants détaillants (traiteurs, bouchers, etc)

    - Vente aux restaurations collectives (Cantine d'écoles ou de travail, etc)

    Schéma : La diversité des circuits courts de commercialisation 18

    Les circuits courts représentent une opportunité pour de nombreux agriculteurs en matière d'installation ou de développement de démarches commerciales alternatives plus en lien avec les consommateurs. La connaissance de l'offre en circuits courts permettra d'apprécier l'impact économique et territorial en termes de création de valeur ajoutée, et permettra aux consommateurs d'évaluer les coûts d'une consommation locale souvent réfrénée pour cette raison. Dans les circuits-courts, on relève un autre frein à la consommation. Les producteurs en circuit-court ont parfois du mal à assurer l'approvisionnement. Cela s'explique par le fait qu'un exploitant doit aujourd'hui maîtriser plusieurs compétences en étant à la fois

    18

    Chambre d'agriculture - Mai 2010

    25

    producteur, commerçant et si l'activité le nécessite, transformer les produits en respectant les nouvelles normes d'hygiène, adaptées à leurs circuits.

    Malgré ces freins, on note une augmentation accrue de ces circuits de distribution alternatifs et durables. La progression des Associations de maintient de l'agriculture (AMAP) reflète cette évolution. En France, en 2012, on comptait 1600 AMAP qui réunissent près de 200 000 consommateurs, pour un chiffre d'affaire annuel estimé à 48 millions d'euros. Ainsi, 6%

    19

    des Français disent avoir déjà adhéré à une AMAP, et 38% sont intéressés .

    20

    CHAPITRE 3 : L'ART DES ENTREPRISES DE S'ADAPTER

    Face à ces mutations comportementales, il apparaît donc que le consommateur détient un pouvoir grandissant de moins en moins contrôlable par les firmes et les industries agroalimentaires et surtout le marketing. Ils doivent s'interroger sur leur rôle et revoir leur « capital marque » (Aaker, E. Roux, 2007) pour ne pas se retrouver définitivement exclu ou très mal perçus dans ces nouveaux modes de consommation. Le marketing doit prendre en compte les évolutions sociétales, même s'il n'est pas en mesure d'identifier et de quantifier tous les changements pour favoriser le progrès dans notre société. Ainsi on s'aperçoit que ces acteurs utilisent les notions d'éthiques au coeur de leur stratégie. On voit ainsi partout des refontes de stratégies d'entreprise, marketing, de communication, des entreprises qui développent de nouvelles marques avec de nouvelles offres.

    La dimension de développement durable est aussi définie par le cadre législatif. En effet, à propos de la consommation locale en Janvier 2016, l'Etat Français a réagi face à « l'attente citoyenne » des consommateurs. Après des études sur l'impact des pratiques de l'industrie agro-alimentaire sur notre santé, la députée EELV B. Allain cherche à introduire considérablement la notion de « manger local » dans les restaurations collectives publiques

    21

    qui devront à partir de 2020 proposer 40% de produits locaux dans leurs offres. Ce cadre législatif contraint les entreprises à revoir leurs stratégies et à adopter de plus en plus un comportement éthique. Le fait de devoir les obliger à agir interroge sur leur rôle social dans la société. Est-ce que la valeur marchande est-elle plus importante que la valeur éthique ?

    19 Miramap : http://miramap.org/

    20 http://www.ademe.fr/

    21 Rapport Ç Manger local È : https://brigitteallain.eelv.fr/wp-content/blogs.dir/736/files/2015/07/Synth%C3%A8se-du-rapport-Et-si-on-mangeait-

    local.pdf

    26

    1- Le marketing en pleine mutation

    A travers son influence sur la consommation, le marketing joue aussi un rôle « politique » dans notre société, dans le sens où il s'est propagé à toutes les organisations pour tendre à couvrir l'intégralité du marché (E. Remy, 2007). D'ailleurs, dans un système capitaliste, le marketing transparaît comme « le spécialiste de la médiation marchande (F. Cochoy, 1999), dont l'objet est « d'élaborer des relations d'échanges satisfaisantes » (J.L. Baker, 2000). Ainsi, le consommateur est définit comme une « source de valeur » pour les entreprises (Roux D. 2014). Néanmoins ces évolutions poussent les individus à remettre en question plus régulièrement le rôle des firmes et des offres, ou à faire acte de résistance volontaire. Le marketing rencontre de nouvelles problématiques où son rôle social et politique est à repenser dans l'organisation des marchés. Aujourd'hui, il s'appuie fortement sur « la subjectivité » (E. Remy, 2007) faisant appel à l'affecte et à l'émotion pour séduire et valoriser la relation avec le consommateur. Le marketing est de plus en plus interrogé dans la pertinence de son rôle vis-à-vis des consommateurs. L'évolution des comportements de consommation change avec l'évolution idéologique du marketing (E. Remy, 2004) Le marketing est une forme de recherche expérimentale, de tout temps, il a renouvelé et amélioré ses pratiques, pour être sûr de satisfaire. On aperçoit que « les réactions d'insatisfaction des consommateurs » à l'égard des firmes ont permis au marketing de les « récupérer dans un espace marchand » (O. Hirschman 1983, E. Remy 2007). Après avoir abondé le marché d'offres et d'informations autour d'un marketing conventionnaliste « construire des sujets, des objets et des énoncés conformément à ses intérêts » (G. Marion, 1992), il a laissé place aujourd'hui a une nécessité de tout connaître, contrôler et modifier. Cependant, cette ère où le marketing « cadrait l'interaction » (S. Barrey, 2002) et sa position dominante a laissé transparaître ses limites et est à l'origine de nouvelles interrogations. Les outils utilisés par le marketing pour mesurer la satisfaction, la fidélité et la confiance dans une vision positive, pour capter les consommateurs en permanence, etc sont d'autant plus limités qu'ils ne prennent pas en compte leurs opposés, ou des éléments externes à la relation comme le rôle citoyen du consommateur. Le marketing est face à un consommateur informé, responsable et équipé pour choisir et s'exprimer (T. Mallard, 2000), capable à présent, de passer au travers des techniques de récupération. Il est alors nécessaire que le marketing intègre « la sociologie de la traduction » (D. Roux, E. Remy 2008), car face à ces nouvelles problématiques, les consommateurs « font l'objet de multiples enjeux » au sein d'un réseau (Callon, 1986 ; Latour, 1989 ; Latour et Woolgar, 1979 ; Akrich, Callon et Latour, 2006), avant de s'opposer à une offre. Le marketing doit intégrer cette traduction qui met en lumière les variables et les contextes à l'origine des mutations sociales, pour que le marketing permette à nouveau un « échange de valeur fructueux pour les deux parties » (D. Roux, 2012). Pour

    27

    cela, il se doit d'impliquer réellement le consommateur (dans une démarche sociale et non financière) dans la définition de l'offre (M.A. Dujarier, 2008), pour favoriser par exemple le marketing collaboratif. Le rôle du marketing est avant tout de créer des représentations qui permettent aux consommateurs de s'identifier. Le marketing doit s'émanciper de cette image dominante pour ne pas générer de résistance et élargir son champ de vision à un « réseau » dans lequel il convient d'intégrer ces autres éléments (E. Remy, D. Roux, 2008). Il apparaît comme plus efficace d'impliquer le consommateur et ses actions dans des démarches plus globales et de réseau des firmes, au regard de leur « intégration naturelle dans des pratiques existantes » (B. Latour, 1999). Ainsi, le consommateur aura plus de difficulté à mettre le doigt sur les éléments dissonants. En endossant le rôle d'acteurs « responsables », les firmes s'inscrivent dans une logique de compréhension des problématiques sociétales au coeur d'un réseau mondial qui permet de déstabiliser le consommateur, et de présenter leurs engagements comme valeur ajoutée, utilisée à bon ou à mauvais escient. Bien que les consommateurs soient impliqués dans ces nouveaux enjeux, les contestations prennent source généralement face aux stratégies et tactiques employées par les firmes (M. Certeau, 1990). Le marketing collaboratif peut-être une solution pour créer de la valeur en l'impliquant directement dans la stratégie pour faire évoluer l'offre.

    Dans le cadre du secteur de l'alimentaire, la résistance des consommateurs cause « la marginalisation de la consommation et des modes de vie » (Hivet 2012) et poussent les consommateurs à se replier sur des circuits alternatifs. Les nombreuses crises et les évolutions sociétales ont favorisé l'émergence d'un consommateur-citoyen pour qui la « conscience éthique » est primordiale et peut-être source de « non-adhésion » en faveur d'une marque ou d'un modèle (M. Micheletti, 2003). Ainsi, les entreprises doivent intégrer ces nouvelles dimensions, apparues sous forme de marketing durable ou éthique, pour ne pas encore plus exclure le consommateur de ce système, mais pour l'intégrer afin qu'ensemble ils favorisent un progrès. Cependant est-ce simplement une technique de récupération des consommateurs pour les entreprises, ou est-ce une réelle stratégie de fond visant à améliorer les structures existantes des marchés ? D'autant plus que cette nécessité de changer, et les mutations des comportements de consommation apportent de nouvelles opportunités aux firmes d'un point de vue à la fois économique, ou sociétal. La résistance des consommateurs porte sur les techniques jugées abusives des la part des consommateurs, il apparaît tout à leur honneur de ne pas délaisser les avis des consommateurs en pensant trop simplement pouvoir les influencer, car aujourd'hui ils détiennent tout de même le pouvoir d'achat, ce qui assure la survie de l'entreprise. Il est bien connu que les entreprises mettent beaucoup de temps à construire une image de marque différenciante et pérenne, mais elle peut être anéantie en quelques minutes. Le marketing se doit d'intégrer les nouveaux enjeux de consommation et de s'en accommoder parce qu'à long terme la logique marchande finira

    28

    peut-être par céder. En attendant, les firmes réagissent en développant de nouvelles offres plus ou moins adaptées.

    2- La RSE (Responsabilité Sociétale de l'Entreprise), une réponse à la critique consumériste éthique

    L'utilisation du marketing éthique apparaît aujourd'hui comme « un sujet d'intérêt cyclique » (C. Szocs, 2013) conformément aux vagues cycliques de réappropriation des marques (O. Hirschman, E. Remy, 2007). Si les démarches RSE des firmes peuvent paraître dérisoires dans la sphère marchande, il n'en est pas moins qu'elles ont compris le pouvoir de leurs diffusions comme stratégie de récupération des consommateurs pour certains, ou comme apport de valeur pour d'autres. La RSE ou plutôt responsabilité sociétale de l'entreprise est un concept dans lequel les entreprises intègrent des préoccupations sociales et environnementales dans leurs activités et dans leur interaction avec leurs parties prenantes . Les entreprises sont conscientes des effets d'une communication durable sur

    22

    les consommateurs. Selon l'étude Green Brands, en 2011, 30% des Français affirment que l'intérêt de l'entreprise pour l'environnement est un critère très important, 58% trouvent cela « assez important». 41% des interrogés étaient prêts à dépenser plus que l'année précédente pour ces marques engagées23. Ainsi, « dans un univers concurrentiel où les batailles commerciales gagnent sur le terrain de l'image » (G. Lipovetski, 1992) les firmes valorisent ou dissimulent de nouvelles caractéristiques aux produits pour se démarquer. Mc Donald's par exemple, grand acteur sur le marché des fast-food, à entièrement changé sa politique RSE. On a pu percevoir ce changement à travers la refonte de la communication axée sur l'écologie, changement de couleur du logo en vert, traçabilité et origine des produits affichées, alors qu'il reste un acteur de fast-food, extrêmement pointé du doigt dans les problèmes de « malbouffe ». Dans le secteur agro-alimentaire, des études ont révélé qu'il

    existe un réel lien entre ces nouvelles pratiques et des évolutions comportementales réceptives (Aouina, Benhallam, 2010) En cherchant à capter le consommateur, les entreprises ont introduit la notion de développement durable, entrainant l'accroissement de l'intérêt public pour ces enjeux (E. Remy, 2007). Par exemple, l'individu a du mal à faire la différence entre « responsable », « éthique », et « durable.» Cette prise de conscience reflétant

    22 Définition RSE : http://audit-rse.com/definition-rse/

    23 Etude Green Brands 2011 : http://www.marketingdurable.net/les-resultats-de-letude-green-brands-2011

    29

    l'attente citoyenne des consommateurs, ont a amené les firmes à utiliser d'autant plus d'outils marketing pour valoriser au mieux leurs points de différenciation... L'essor de signes de qualité dans les rayons des magasins alimentaires a pour objectif de mieux informer le consommateur, mais qui au final l'a noyé dans une multitude d'informations, d'étiquettes, d'appellations qui cumulées s'avèrent de plus en plus complexes à déchiffrer et qui perd le consommateur. Pour les labels alimentaires, par exemple, on dénote les labels nationaux, régionaux, industriels, gouvernementaux, etc. En effet, les entreprises ont tenté de développer des symboles pour rassurer le consommateur, qui l'ont plongé dans une « cacophonie diététique » (C. Fischler, 1995). Ces stratégies incitent le consommateur à revoir sa perception du produit parmi un ensemble de facteurs cognitifs qui évaluent la satisfaction par l'usage du produit, mais aussi dans sa plus-value (Pontier, Faddy, 1999.) Aujourd'hui 48% des français pensent qu'il y a trop de communication autour du produit alimentaire durable .

    24

    Le marketing « durable » est perçu comme un outil supplémentaire par les entreprises à

    25

    travers des certifications, répondant à des normes, favorisant l'éco-conception, utilisant une multitude d'ingrédients aux bénéfices nutritionnels, tant d'éléments qui au lieu de rassurer le consommateur, le renvoie à des besoins de sécurité et d'authenticité qui le pousse à favoriser des solutions alternatives.

    Face à l'engouement pour les produits locaux et régionaux, tout le secteur alimentaire dispose d'un nouveau marché de niche impliquant de belles opportunités. Les mouvements associatifs régionaux ont poussé les industries agro-alimentaires à développer des marques régionales et locales, qui peuvent permettre à des petites structures d'intégrer les linéaires de la grande distribution. Bien que cette offre soit pour l'instant très peu développée, elle tend à s'accroître. La notoriété du localisme sert d'autant plus aux distributeurs, qui 10 ans, après le lancement de leurs marques de distributeurs, comme la marque « Nos régions ont du talent » de E. Leclerc profitent pleinement de cette tendance et de pouvoir développer des partenariats avec des structures locales favorisant leur bonne image auprès des consommateurs. Néanmoins, il est plus facile de pouvoir adapter son offre et son approvisionnement sur des groupements d'indépendants, comme Système U qui propose un assortiment de produits régionaux depuis 2009. Ce tournant est plus délicat pour les distributeurs intégrés comme Carrefour, qui revoit intégralement leur structure pour s'adapter. Mais leurs engagements, qu'is soit dans un but purement marchand ou non, ont permis tout de même d'améliorer leurs performances en développement durable.

    24 Les Chiffres de la consommation responsable 2013 - Annexe

    25

    Marketing durable : Toute forme de marketing qui prend en compte les thèmes du développement durable. Mercator-Publicitor http://

    www.mercator-publicitor.fr/IMG/pdf/Mercator Debat developpement durable.pdf

    30

    Infographie de la Distribution responsable en 2014 par rapport à 201226

    26 Etude Essec 2014 : http://www.grandprix-distributionresponsable.com/

    31

    Partie 2 / Cadre pratique

    I/ Stratégie de recherche

    Cette recherche vise à répondre à la problématique de mémoire qui est la suivante : « Dans quelle mesure le mouvement de résistance peut-il modifier durablement les codes de consommation alimentaire ? » on a procédé à la réalisation d'une étude qualitative en plusieurs étapes qui porte sur l'analyse des attitudes et comportements de consommation face à la résistance et à la consommation locale. L'objet de cette étude est le rapport entre résistance et consommation locale à l'égard de la création de valeur sur le marché pour les différentes parties-prenantes.

    On a choisi de réalisé des études de type descriptive et exploratoire, car il est difficile de quantifier les actes et ressorts de la résistance à la consommation. Dans ce cas, l'approche quantitative serait apparue comme peu pertinente, car l'intérêt de ce mémoire est de comprendre le lien entre résistance et évolution des comportements de consommation alimentaire.

    Dans l'analyse théorique, nous avons relevé que le consommateur est très informé des techniques marketing. Il maîtrise de nombreux outils lui permettant de réfléchir, comparer et appréhender son discours et, lorsqu'il est insatisfait, il est en mesure de manifester son mécontentement sous diverses formes. Le consommateur est aussi parfois inconscient de certaines facettes de son comportement de consommation. Ces éléments permettent d'évaluer que le discours du consommateur ne peut être toujours le plus fiable. C'est la raison pour laquelle on a couplé des études de type descriptives et exploratoires pour apporter un cadre d'analyse le plus complet possible.

    Ainsi, on a réalisé des études observatoires visant à analyser le comportement des consommateurs dans un cadre particulier, et la position des acteurs marchands pour analyser les mutations et leurs ressorts. On a donc procédé à une observation participante des comportements de consommation dans le but d'identifier et d'analyser de manière neutre et externe les attitudes des consommateurs. L'intérêt de cette observation réside dans son contexte commercial, car il est dans une situation où il se sent libre et pas interrogé, ce qui permet de déceler des comportements naturels et plus spontanés. A l'issue de cette analyse comportementale, on s'est intéressé à l'observation des acteurs de l'offre, qui sont en partie impliqués dans les mutations comportementales. Pour rester très impartiale, nous avons analysé le fonctionnement d'une organisation publique et d'une organisation privée.

    Les études observatoires sont judicieuses dans le sens où elles permettent de définir un cadre, une mouvance et des attitudes, mais elles ne permettent pas d'approfondir et de comprendre ces éléments.

    32

    Par la suite, on a réalisé une étude exploratoire à travers un entretien en « focus groupe » pour analyser les causes et conséquences des comportements de consommation locale, le degré d'implication des interrogés et enfin essayer de proposer des solutions ou des recherches futures permettant d'aller encore plus loin dans ce domaine.

    On a choisi la méthode d'entretien en « focus groupe », car le sujet de la résistance est un mouvement qui peut inquiéter, voire braquer l'individu interrogé. Le fait de réunir plusieurs individus avec des leaders et des profils plus discrets permet de générer une dynamique de groupe plus constructive, que l'on n'aurait pas pu retrouver dans un entretien en face à face avec une personne. De plus, le fait d'être en groupe permet de rebondir sur des échanges et des avis personnels, que l'on n'aurait peut-être pas soulevés en face à face. Néanmoins, l'entretien en focus groupe demande un gros travail de préparation de la part du chercheur, mais aussi un travail d'animateur durant l'entretien. En effet, les participants peuvent s'enfermer dans leurs idées personnelles et provoquer des tensions voire des conflits entre chacun.

    II/ Méthodologie et plan d'échantillonnage

    A travers un stage de fin d'études, on a participé au Salon du Chocolat de Paris et on a été au contact de consommateurs de produits alimentaires durant 5 jours. A cette occasion, on a pu réaliser une étude observatoire participante qui consiste à étudier une communauté en participant aux activités de l'entreprise et à ses enjeux . L'intérêt de cette étude a porté sur

    27

    l'observation des « nouvelles » attitudes de consommation, de déceler s'il y a acte de résistance, et leur degré d'implication face aux enjeux sociétaux. En effet, ce stage s'est déroulé au sein de l'entreprise privée NEWTREE qui commercialise des chocolats. Son concept repose sur 3 piliers fondamentaux : des produits gourmets, des recettes saines et bénéfiques pour la santé (label AB Bio ), et un fort engagement dans des actions sociétales

    28

    et durables (Labellisé Fairtrade Commerce équitable ). L'observation s'est déroulée lors du

    29

    Salon du Chocolat, sur le stand de NEWTREE où on a eu la fonction de représentant commercial . Lors de cette étude, on a utilisé un échantillon de convenance sur le coup, que

    30

    l'on a pu définir par la suite, grâce aux données des organisateurs du salon. On a relevé un éventail de consommateurs très diversifié, car l'édition a accueilli 100 000 visiteurs. L'échantillon était composé d'hommes et de femmes provenant de toute la France et de l'étranger, avec une moyenne d'âge de 30 ans. Le Salon du Chocolat accueille des familles, des couples, des amis et des professionnels venant profiter d'un cadre agréable et découvrir et/ou acheter des produits.

    Le concept NEWTREE attire des consommateurs pour l'achat de chocolat, mais suscite l'intérêt et/ou séduit pour ses engagements en faveur de la santé et du développement durable. Lors de l'observation, on a discuté avec des consommateurs, et on a eu des

    27

    (M. Bouchon - Colecte de données, méthode qualitative : file:///Users/amiroudot/Downloads/88d4615517874541ea59746434096d81.pdf)

    28 http://agriculture.gouv.fr/lagriculture-biologique-1

    29 http://www.maxhavelaar.ch/fr/fairtrade/fairtrade/le-label-fairtade/

    30

    Représentant commercial : promeut la marque et vend les produits

    33

    échanges très courts d'une minute, comme d'autres pouvant durer quelques dizaines de minutes. On a réussi à relever 4 minutes d'échange en moyenne. On ne pensait pas établir une observation sur la résistance dans le cadre de ce mémoire à cette occasion. Ainsi, on a adopté 2 comportements, tout d'abord on a eu naturellement une attitude passive où on a relevé plusieurs grands thèmes, ce qui a permis d'élaborer un guide d'analyse pour structurer l'observation. A chaque observation, il y avait une prise de contact avec le consommateur. En fonction du profil de consommation, on engageait la conversation en adaptant le discours pour rester neutre au maximum. Bien que nous soyons en fonction, on essayait de prendre des notes discrètement afin de tenir à jour ce guide. Le fait que l'échantillon soit aussi diversifié nous a permis de relever des éléments dans un champ très large, il faut donc rester vigilant vis-à-vis du degré de confiance que l'on peut accorder à cette analyse.

    L'élaboration du guide d'analyse s'est appuyée sur les thématiques suivantes, en respectant

    une logique d'entonnoir :

    - Le manque de confiance des consommateurs vis-à-vis des marques

    - Un consommateur qui a besoin de preuve pour valider le discours commercial

    - Un consommateur autonome qui vérifie les éléments

    - Des consommateurs résistants à des systèmes ou représentations

    - Des consommateurs de plus en plus soucieux des enjeux environnementaux.

    A l'origine, le terrain d'analyse est la consommation locale et plus précisément les locavores, mais nous nous sommes servi de ces observations, car elles nous sont apparues comme pertinentes. En intégrant ces éléments, il paraît plus évident d'apprécier cette logique d'entonnoir.

    A l'issue de ces observations, on s'est intéressé aux rôles des différents acteurs de l'offre dans le cadre de la consommation alimentaire locale. On a relevé dans la partie théorique que les locavores favorisent des circuits alternatifs et courts. On a donc réalisé une étude observatoire passive d'une organisation publique - AMAP - représentant l'offre des circuits courts et d'une organisation privée type - Marque de Distributeur - représentant les circuits longs. Pour assurer cette étude, on a eu recours à la collecte d'informations par le biais d'articles et d'observations réalisées sur le lieu de vente. On s'est appuyé sur une grille d'analyse nous permettant de comparer et distinguer les deux entités sur les mêmes éléments.

    On a définit dans cette grille d'analyse en fonction des thèmes suivants :

    - Le niveau d'engagement des organisations - La communication des organisations - L'assortiment de produits proposés

    - Le mode de distribution et le point de vente - La relation établit avec le consommateur - L'ambiance appréciée

    Pour l'organisation publique, on a sélectionné l'AMAP « Les Pieds sur Terre », située dans le quartier de la Croix-Rousse à Lyon. On a choisi cette AMAP pour deux raisons. La première repose sur le fait que Les Pieds sur Terre est un réseau très étendu en France et surtout très reconnu pour la distribution de produits locaux et bio. La seconde est sa localisation. Ce quartier de Lyon présente une bonne variété de profils de consommateurs locaux et jeunes.

    34

    Au préalable, on a réuni quelques éléments sur l'entité, puis on s'est rendu sur les lieux au moment du rendez-vous hebdomadaire de la distribution qui a lieu tous les Mercredis soir de 17h à 20h, dans une MJC (Maison des jeunes et de la culture). Durant notre observation, nous avons suscité l'intérêt d'un Amapien qui est venu nous a interrogé sur notre démarche. Très intéressé par notre sujet, on a saisi l'occasion de cet entretien « non conventionnel », malgré son caractère embryonnaire, pour relever des informations, en se rapprochant le plus possible d'une logique en entonnoir. On a donc réalisé un court entretien dans lequel on l'a laissé parler librement. Il est engagé depuis le début des années 2000 auprès des AMAP, il très engagé en faveur du développement durable depuis 40 ans car il travaille dans les énergies renouvelables et milite dans des mouvements politiques « vert ». De ce fait, on a improvisé des questions, tant bien que mal dans le respect de la logique d'entonnoir avec les thèmes suivants :

    - Ses raisons d'engagement

    - Sa perception du développement des AMAP

    - Sa perception des acteurs privés

    - Sa perception de l'avenir des AMAP et de la consommation alimentaire.

    Pour l'organisation privée, on a sélectionné une marque de distributeur. On a choisi ce type d'enseignes car elles sont placées au coeur de nouvelles problématiques et des nouveaux enjeux de consommation. Les marques de distributeurs développent depuis quelques années des stratégies RSE comme stratégie de récupération ou réelle volonté de changer. Etant donné que le terrain d'analyse est la consommation locale, on s'est particulièrement intéressé aux distributeurs indépendants qui ont plus de marge de manoeuvre dans leur insertion d'offres locales plutôt que les distributeurs intégrés et souvent rattachés à des centrales nationales. On a sélectionné le distributeur Système U, car il fait parti du peloton de tête des meilleurs distributeurs en France (4ème distributeur). Par ailleurs, il a été le premier à s'engager dans des démarches RSE pour proposer des offres régionales et locales qui nous paraissent plus pertinentes dans ce cadre de recherche. Pour cette étude observatoire, on a procédé à la relève d'information par le biais d'articles de presse sur Internet (type « LSA Commerce et consommation »), puis par une observation terrain. Pour cela, nous nous sommes rendu dans le magasin « Utile » de centre-ville dans le 6ème arrondissement de Lyon.

    A l'issue de ces recherches descriptives, on a réalisé un entretien en focus groupe afin de confirmer les éléments relevés lors des observations, leur degré d'implication vis-à-vis de la consommation locale et leur perception et intégration de la résistance à la consommation, et de l'impact de ces deux éléments sur la société.

    Pour mon échantillon, on a recruté des consommateurs de profils variés, avec des personnalités et comportements différents afin de confronter les idées pour en ressortir un maximum d'éléments à analyser. A l'issue de l'analyse théorique sur la résistance et sur la consommation locale, on a relevé que les consom'acteurs ou alter-consommateurs ont souvent des profils similaires : une bonne éducation, un profil socio-culturel élevé, qu'ils ont vécu des expériences de consommation leur permettant de se dresser un profil plus autonome et réfléchi. On s'est focalisé volontairement à une population assez jeune, d'une moyenne d'âge de 26 ans pour évaluer auprès d'eux leur perception de la résistance et de la consommation locale. Nous avons ainsi sélectionné 8 personnes ayant des profils de

    35

    consommation alimentaire très aléatoires. Lorsqu'on s'est rendu à l'AMAP pour l'étude observatoire, on a intrigué 2 jeunes Amapiens avec qui nous avons échangés sur la raison de notre visite. Tous deux ont un profil de consommation locavore, ils font très attention aux aliments qu'ils consomment et ont avant tout une démarche citoyenne. D'autre part, on a invité une jeune femme qui a un profil très particulier puisqu'elle est végétarienne. Ce genre de profil se démocratise de plus en plus et apparaît comme résistant de nature. On a invité un fromager, fort d'une expérience de plus de 10 ans dans ce domaine. Lors de l'étude observatoire chez Système U, on a rencontré 2 jeunes individus avec qui on a échangé sur ce sujet de mémoire et qui ont souhaité participer à cette étude. En premier lieu, nous n'avons pas relevé l'intérêt de les convier, mais après on a réalisé qu'il pouvait être intéressant d'intégrer la perception des jeunes adultes dans notre consommation alimentaire. On a donc souhaité intégrer ces profils pour favoriser des interactions lors de l'entretien. Enfin, on a invité un consommateur qui a toujours accordé beaucoup d'intérêt à l'alimentaire et à la consommation locale par pur plaisir. A travers cet éventail de profils, nous avons réuni différents profils locavores avec des consommateurs lambdas.

    Participants

    Âge

    CSP

    Ville

    Profil de consommation
    alimentaire

    Intervenant 1

    31

    Fromager

    Lyon

    Consommateurs de produits locaux
    rarement, travaillent depuis 10 ans
    dans le secteur alimentaire

    Intervenant 2

    32

    Chef de projet web

    Lyon

    Consommateur de produits locaux
    A changé son alimentation avec

    l'âge

    Intervenant 3

    22

    Vendeuse

    Lyon

    Végétarienne, et consommatrice de produits locaux

    Intervenant 4

    28

    Osteopathe

    Lyon

    Locavore Marco Polo

    Intervenant 5

    20

    Chômage

    Lyon

    Consommateur lambda

    Intervenant 6

    18

    Etudiante

    Lyon

    Consommateur lambda

    Intervenant 7

    27

    Agent

    commercial

    Aix les Bains

    Locavore Marco Polo

    Intervenant 8

    32

    Archéologue

    Lyon

    Consommateur de produits locaux

    Récapitulatif Profils Entretien Focus Groupe

    L'entretien de groupe s'est déroulé dans un appartement à Lyon, dans un cadre neutre et convivial, afin de mettre en confiance les individus dans une atmosphère agréable. On les a convoqué un samedi en fin de journée, à 16h, une fois leur semaine terminée et en weekend. On a favorisé un moment de calme pour ne pas être perturbé par des éléments extérieurs et de manière à ce qu'ils aient l'esprit libre.

    L'entretien s'est déroulé autour d'une table pour favoriser la discussion. Pour les mettre à l'aise dès leur arrivée, on les accueilli chaleureusement et on a proposé des boissons pour les détendre avant l'entretien. Puis, on leur a présenté l'entretien, les règles et on a démarré l'entretien. Pour assurer son bon déroulement, on a réalisé au préalable une grille d'entretien pour définir les points à aborder lors de l'étude qui s'articulaient autour des thèmes suivants.

    36

    Pour approfondir ces thèmes, on avait préparé des questions ouvertes ou fermées basées sur une approche semi-directive pour essayer d'aiguiller les interrogés.

     

    THÈMES ABORDÉS

    QUESTIONS POSÉES

    1

    PRESENTATION

    - Présentation des participants (Prénom, âge, sexe, CSP, activité professionnelle, activités secondaires)

    - Présentation du profil de consommation en général (engagé, résistant,

    pacifiste, É)

    2

    LES ENJEUX DE LA CONSOMMATION
    ALIMENTAIRE

    - Comment percevez vous l'acte de consommation alimentaire ?

    - Une priorité, un engagement, Fait attention, Pas important, Ignorant ?

    - Globalement, pensez-vous connaître le contenu de vos assiettes ?

    - Pourquoi ?

    - Selon vous, comment pouvez-vous connaître le contenu de vos assiettes ?

    - Quels sont vos critères de consommation alimentaire ?

    - Lequel est le plus important ? Pourquoi ?

    - La sécurité est pour vous un critère ? Pourquoi ? Comment ?

    - Les signes de qualité représentent la sécurité ? (certifications, labels É)

    - Les marques, leurs engagements et leur communication sont-ils des critères ? Pourquoi ?

    - Est-ce que la dimension éthique vous importe dans la consommation alimentaire ?

    - La dimension sociale ? La dimension environnementale, écologique ?

    3

    LES HABITUDES DE CONSOMMATION
    ALIMENTAIRE

    - A quelle fréquence faites-vous vos courses ?

    - Tous les jours ? Plusieurs fois par semaine ?1 fois par semaine ? Toutes les 2 semaines ? Plus rarement ?

    - Est-ce que les courses sont synonymes de plaisir ou d'une contrainte ? Pourquoi ?

    - Est-ce que vous faites vos courses dans différents points de vente ?

    - Est-ce que vous achetez toujours les mêmes produits ou vous aimez le changement ? Pourquoi ?

    - Est-ce qu'il y a des produits en particulier pour lesquels vous avez un point de vente en particulier ? Lesquels ?

    4

    CONSOMMATION LOCALE

    - Est ce que globalement vous connaissez la consommation locale et les

    locavores ? Comment ?

    - A quel degré d'importance placez-vous la consommation locale ?

    - Est-ce que vous consommez locale ?

    - A quelle fréquence ?

    - Pour quelles raisons vous consommez locale ?

    - Où achetez vous des produits locaux ?

    - Connaissez vous d'autres endroits ou acheter local ?

    37

    5

     

    CIRCUITS COURTS / CIRCUITS LONGS

    - Préférez-vous vous servir ou être servi dans les magasins alimentaires ?

    - Comment évaluer vous les conseils, est-ce un élément important pour vous ?

    - Que pensez-vous des circuits courts ?

    - Quels sont les avantages des circuits courts?

    - Pensez vous que les circuits courts présentent des inconvénients ?

    - Avez-vous des freins à consommer local ?

    - Achetez-vous des produits alimentaires en grande distribution ?

    - Quels types de produits alimentaires achetez-vous en grande distribution ?

    - Comment percevez-vous les industrielles et la grande distribution de manière

    générale ?

    - ReformulationÉet que pensez-vous de l'apparition d'une offre locale en grande

    distribution ?

    - Est-ce que vous consommez des produits locaux de MDD ?

    - Pensez-vous que leurs offres locales s'apparentent aux offres des autres

    organismes locaux ?

    - Pensez-vous que cette une stratégie lucratives à proprement parlé ou un réel

    engagement de leur part ?

    - Que pensez vous de la communication des MDD et marques industrielles ?

    - Est-ce que pour vous il vous parait important que les circuits-courts fassent un

    peu plus de communication ?

    6

    THÉORIE DE LA DÉPENDANCE

    - Pensez-vous que la consommation locale peut-être suffisante ?

    - Est-ce que vous aimez consommer des produits alimentaires provenant de

    pays étrangers ? Commerce équitable ?

    - Est-ce que vous achetez ces produits en grande distribution ?

    - Où iriez-vous sinon ?

    - Trouvez qu'il y a assez de ces magasins spécialisés ?

    - Pensez-vous sincèrement que vous pourriez vous affranchir de la grande

    distribution ?

    - Est ce que MDD et marques industrielles peuvent être synonyme de bonne

    alimentation?

    7

    ACTE DE RÉSISTANCE

    - Selon vous, comment me définiriez-vous la résistance à la consommation ? - ReformulationÉ

    - Est-ce que vous consommez locale comme acte de résistance volontaire ou de manière inconsciente ?

    - Est ce que la consommation locale est pour vous un moyen de faire évoluer, bouger les marchés ?

    - Est-ce que, selon vous, vous pensez que ces mutations favorisent la création de valeur pour les parties-prenantes ?

    - Auriez-vous des recommandations à faire pour les différentes organisations pour favoriser la création de valeur ?

    8

    REMERCIEMENTS ET PRISE DE CONGÉ

    Au cours de cet entretien, on a endossé plusieurs rôles : celui d'animateur qui encadre l'étude en préparant un guide d'entretien pour assurer son bon déroulement; celui d'observateur en écoutant activement et en prenant des notes durant l'étude. Enfin en tant que modérateur, on a assuré la fluidité du débat et stimulé le groupe en s'appuyant sur des techniques et outils tels que la reformulation, la distribution de parole, la « pause active » et l'approfondissement des discours.

    Pour ne pas perdre d'informations, on a placé au centre de la table un enregistreur numérique, qui a enregistré toute la discussion d'une durée d'1h15 minutes. L'entretien en focus groupe a duré longtemps, et on savait qu'il allait rendre plus complexe l'analyse, mais de cette manière on pouvait relever encore plus d'informations. On a essayé d'éviter de couper les individus, car parfois le rôle de modérateur peut interrompre et braquer les participants pour s'exprimer à nouveau. A la fin de l'entretien, on a fait un récapitulatif global avec les interviewés afin de valider les idées, favoriser une dernière intervention et enfin clôturer l'étude. A l'issue de l'étude, pour apporter des éléments complémentaires et quitter les intervenants dans de bonnes conditions, on a réalisé un débrieffing pour qu'ils puissent donner leur ressenti sur cette expérience. Par la suite, on a procédé à une retranscription complète de l'enregistrement pour bien décortiquer les informations, l'analyse des

    38

    « verbatims » et on a définit un code couleur pour mettre en évidence les éléments utiles

    31

    pour définir le codage des données.

    Avec du recul, on est conscient que l'aide d'une tierce personne aurait pu s'avérer utile pour la prise de note lors de l'entretien et aurait permis d'intervenir plus facilement dans le débat. De plus, on s'est aperçu après plusieurs écoutes qu'on n'a pas été toujours très neutre, nous n'avons pas voulu influencer les propos, mais on a essayé d'illustrer les thèmes et questions pour faciliter la compréhension des intervenants et le débat. En effet, la difficulté réside dans l'approche du chercheur en fonction de sa subjectivité.

    31 Définition Verbatim : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/verbatim/81475

    39

    III/ Définition des variables

    A travers cette étude qualitative, on cherche à valider ou rejeter l'hypothèse de départ : Le mouvement de résistance conduit à la création de valeurs sur le marché.

    Pour vérifier cette hypothèse principale, on doit analyser les éléments permettant d'affirmer ou d'infirmer les sous-hypothèses suivantes :

    - Hypothèse 1 : Le consommateur fait acte de résistance en consommant local ou pas

    - Hypothèse 2 : Le consommateur local reste dépendant de la consommation globale ou pas

    - Hypothèse 3 : Le consommateur cherche à générer de la valeur ajoutée sur le marché pour lui et toutes les autres parties-prenantes ou non.

    Pour y répondre plus facilement, on a choisi de trianguler les données relevées dans chaque partie de l'étude afin d'avoir une vision plus complète.

    IV/ Le traitement des données

    Durant l'entretien en focus groupe, on a procédé à l'enregistrement des échanges pour nous permettre de mieux les analyser. On a d'abord réalisé une retranscription des données à l'écrit en « verbatims » pour analyser plus facilement les réponses et réactions de chacun. Pour retranscrire l'analyse, on s'est appuyé sur les travaux du Dr Pia Touboul . Pour

    32

    retranscrire au mieux les éléments, on a réécrit dans un vocabulaire français les prises de paroles de chacun, en respectant un maximum leurs propos. Pour nous aider à déceler les codes, on a utilisé un code couleur. Dès qu'un terme ou une évocation était utilisé à plusieurs reprises on le soulignait à travers l'utilisation de couleurs.

    A l'issue de cette retranscription, on avait deux possibilités d'analyse : l'analyse verticale qui consiste à analyser la réponse de chaque intervenants en fonction des thèmes et des questions abordées et l'analyse horizontale qui consiste à analyser les données au travers des thèmes et des questions de tous les interrogés. On a choisi délibérément l'entretien en Focus Groupe pour confronter les comportements et les avis et favoriser le consensus. De ce fait, on n'a pas souhaité décortiquer les réponses de chaque intervenant, mais s'intéresser au mouvement de groupe. On donc procédé à une analyse horizontale qui nous paraissait être la plus pertinente dans notre cadre de recherche.

    Pour l'étude observatoire, on a pris des notes au fur et à mesure des observations, que l'on a organisées dans une grille d'analyse. Les éléments récupérés lors de ces observations ne sont pas les plus fiables, mais ils nous a permis de déterminer des codages de données. Dans la procédure des analyses qualitatives descriptives et exploratoires, on a donc réalisé pour chacune des études une analyse basée sur le codage des données que nous avons par la suite triangulé. Ce codage a permis de mettre en corrélation la notion de résistance avec la consommation locale, d'identifier les résultats nous permettant de vérifier nos hypothèses. 33

    32 Dr Pia Touboul, Recherche qualitative La méthode Focus Groupe

    33

    Voir Résultats principaux

    40

    Résultats généraux

    Dans cette partie, on va présenter les résultats de manière générale, les réponses détaillés des différentes étapes de l'étude se trouvant dans chaque annexe qui leur est consacrée, puis par la suite, nous allons développer les codages des données.

    Tout d'abord, à propos de l'observation faite sur les comportements de consommateurs au Salon du Chocolat on peut remarquer :

    - Ils ont de moins en moins confiance dans les représentations affichées par les marques, ils ne se contentent plus du discours commercial des marques et de leurs techniques marketing ou des publicités. Ils échangent à propos des différentes marques, les comparent, et essaient de se protéger des stratégies d'influence. Ils sont conscients que les marques placent leurs intérêts financiers qu'ils jugent prioritaires avant la relation avec le consommateur ou sur le rôle qu'elles jouent dans la société.

    - Ils cherchent à travers des évènements externes à découvrir des nouvelles marques ayant des concepts différents en lien avec des valeurs éthiques ou qui proposent des innovations significatives ou des produits différents de ce que nous avons l'habitude de consommer en général. Ils dénoncent une consommation de masse où ils n'ont plus accès à des produits artisanaux qui ne sont pas commercialisés par les grandes entreprises connues.

    - Ils se sentent enfermés dans un système où ils ne sont pas réellement maîtres de leur consommation.

    - Ils ont recourt à des techniques diverses pour s'informer. Ils se renseignent sur la marque, sa stratégie et ses produits en comparant avec d'autres enseignes ou auprès de leur entourage avant d'acheter. Beaucoup de consommateurs ne se contentent plus des informations affichées et ils cherchent à se renseigner auprès des vendeurs en posant des questions très précises, en demandant des éléments d'informations supplémentaires (brochure, site internet) et souvent ils manifestent le besoin qu'il y ait des preuves qu'ils puissent vérifier (signes de qualité : labels, certifications) qui les mettront plus en confiance dans leurs parcours d'achat.

    - Les certifications « AB BIO » et « FAIRTRADE » sont des labels qui rassurent énormément le consommateur dans sa démarche d'achat, ils cherchent sur les produits l'apposition de ces logos pour considérer la qualité du produit.

    - L'intégration des nouveaux enjeux sociétaux par les marques est un gage de qualité pour la majorité des consommateurs observés. Pour NEWTREE, la plupart des consommateurs venaient acheter des produits, car l'entreprise est engagée en développement durable, plus précisément envers l'environnement et la santé des consommateurs. La plupart des consommateurs naturellement intéressés ou non sur ces démarches, se voient intégrer ces dimensions éthiques dans leur décision d'achat lorsqu'on leur en parle. 7 fois sur 10, lorsqu'on leur expliquait la démarche éthique de l'entreprise, les consommateurs se voyaient acheter un produit. Pour beaucoup d'autres consommateurs, la consommation passe par l'intégration d'une démarche citoyenne.

    - Les consommateurs sont de plus en plus sensibles à l'aspect nutritionnel, ils interrogent beaucoup sur la composition des produits et ne se contentent pas simplement de lire les étiquettes. D'autant plus, qu'il y a une population grandissante d'intolérants ou d'allergiques qui ne sont pas du tout satisfaits des offres limitées qui s'offrent à eux sur le marché. Les produits à base de « sans » (Gluten, Lactose, É) connaissent un franc succès. De manière générale, les consommateurs font de plus en plus preuve de résistance, même si celle-ci est pas toujours consciente.

    Dans un second temps, lors de l'étude observatoire des organisations de l'AMAP et d'un point de vente Système U, on peut relever que les offres ne sont pas présentées de la même manière.

    · 41

    AMAP

    - La communication : Les réseaux d'AMAP, et plus particulièrement « Les Pieds sur Terre » ne communiquent pas beaucoup. La communication la plus fréquente est le bouche à oreille ce qui leur permet de gagner en notoriété très rapidement. Elle commence à se développer de plus en plus sur le web. Par exemple, on peut à présent trouver les listes d'AMAP ou de producteurs sur le web. Les AMAP ne cherchent pas à communiquer particulièrement, car cela implique un budget qui peut-être consacré à d'autres causes. De plus le concept est basé sur le lien social, sur des relations humaines et de confiance, plutôt que de passer par des intermédiaires qui communiquent.

    - La distribution : On trouve de plus en plus d'AMAP, il est à noter que pour qu'il y ait plus d'AMAP, il faut qu'il y ait plus d'Amapiens, car le réseau se développe en fonction de la demande. Il y a de plus en plus de producteurs prêts à travailler pour des Amapiens engagés.

    - L'assortiment de produits : Dans les AMAP, l'assortiment de produits n'est pas un choix dans la plupart des situations, les produits sont imposés puisqu'ils dépendent de la production qui se fait en fonction des saisons, de la météo, etc. Néanmoins, après test les produits sont beaux, et sont de bonnes qualités. D'autre part, il y a des produits qui peuvent être commandé, pour prévoir les productions, par exemple si le producteur a les compétences et le matériel, les Amapiens peuvent commandés du pain, des produits transformés naturellement, etc. Enfin, l'intégralité des produits est locale ET Bio, car à l'origine les AMAP ont été créées pour la promotion des produits bio.

    - Le prix : Après avoir comparé avec les produits locaux d'une marque de distributeur et les produits lambdas de toute enseigne confondu, les produits en AMAP ne sont pas très chers, et dans la plupart des situations, moins chers que dans les autres points de vente, pour des produits plus sains.

    · SYSTÈME U

    - La communication : Les MDD34 communiquent énormément sur l'intégration d'offre locale ou régionale. Elles utilisent ces enjeux pour assurer leur bonne image et une meilleure notoriété. Le groupe Système U joue sur le fait d'une grande prise de conscience pour les enjeux sociétaux. Ils affichent sur tous leurs supports : web, print, en magasin, etc - que les actions environnementales et sociales sont à intégrer pour le bien de tout le monde. Du fait de leur statut de structure indépendante, il valorise beaucoup les contrats de partenariats avec des producteurs locaux dans leur communication et justifie grâce à cela, une meilleure qualité des produits. Par contre, ils ont déjà connu des affaires judiciaires sur l'emploi de pratiques abusives dans la négociation tarifaire avec les producteurs locaux. D'autre part, en magasin, il est très difficile de trouver les produits locaux. A comparer à du bio où les produits sont reconnaissables en rayon grâce à des outils marketing, les produits locaux ne sont pas réunis dans un corner par exemple. De manière plus générale, il y a peu de différence entre tous les produits.

    - La distribution : Système U en rachetant une chaîne de magasins de proximité, « Utile » joue sur le fait de développer des points de vente en ville, de petite superficie, avec une offre de produits locaux. Sur leur site de vente en ligne, il propose aussi selon les régions des produits locaux.

    - L'assortiment de produits : Lorsqu'on se rend en magasin, on ne trouve pas beaucoup de produits locaux, et sur le site internet on trouve plutôt des offres régionales. Après test des produits locaux Utile et AMAP, ils s'avèrent que les produits locaux Utile ont beaucoup moins de goût et ont l'air (à l'apparence) de moins bonne qualité.

    - Le prix des produits locaux : Le peu de produits locaux trouvés sur le site web sont généralement 10% à 20% plus cher qu'en circuit court type AMAP et en magasin sur des produits « similaires » le prix peut-être deux fois plus cher qu'en circuit court.

    34

    Les Marques de Distributeurs

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    Enfin, nous allons nous focaliser sur les réponses relevées lors de l'entretien en « focus groupe » :

    Comment les interrogés perçoivent leur consommation de manière générale et plus particulièrement leur consommation alimentaire ?

    A quel degré êtes-vous engagé dans la consommation et plus particulièrement la consommation alimentaire ?

    A propos de la consommation en général, ils sont 62% à se sentir engagés (5/8 intervenants), ils affirment que « la consommation a un rôle important et qu'elle doit être réfléchie » (vendeuse de 22 ans), « Je fais attention à ne pas gaspiller ou sur-consommer, mais dans la société dans laquelle on a grandit on a été habitué à consommer comme cela » (Agent commercial de 28 ans).

    Ils étaient 25% (2/8) à afÞrmer ne pas se sentir engagé « la consommation dépend du budget » (Soudeur au chômage, 20 ans), « je m'en fiche, je ne fais pas trop d'achats » (Etudiante de 18 ans).

    De manière générale, les consommateurs font plus attention dans le domaine alimentaire que dans les autres:

    - « Hors alimentaire je ne fais pas attention » (Intervenant 8)

    - « C'est très difficile pour les vêtements d'acheter Français par exemple » (Intervenant 2)

    - « Par rapport pour l'électroménager, je regarde beaucoup français, ma mère a toujours essayé de consommer français » (Intervenant 5)

    - « Cela dépend des secteurs » (Intervenant 6)

    Sur l'alimentaire les intervenants font plus attention, 80% des intervenants font attention :

    - « Sur l'alimentaire je fais un peu plus attention car je travaille dedans j'aime bien les bonnes choses, mais le prix peut aussi jouer » (Fromager, 31 ans)

    - « Je suis engagé, du moment où je peux faire travailler les petits producteurs du coin, je le fais. Pour la nourriture, je fais super attention » (Agent commercial, 28 ans)

    - « Pour l'alimentaire, je fais attention, cela dépend des périodes, mais j'essaie le plus possible d'acheter local au marché ou de consommer aux AMAP quand je peux » (Archéologue, 31 ans).

    - « J'ai pas pour autant l'impression d'être engagée, parce que je le fais de manière égoïste, à la base pour moi, pour ma santé, pour la santé de la Terre et de l'environnement et je pense aux générations à venir, je ne me sens pas engagée parce que je ne sous-traite pas » (Ostéopathe, 28 ans)

    Néanmoins, ils sont aussi conscient qu'ils ne font pas toujours attention, mais dans 90% des cas ils savent faire la différence : « Oui, mais on apprécie aussi la junkfood, mais on fait la différence entre un bon burger maison et un McDo »

    Pour 80% des intervenants, l'alimentaire est assez important pour eux, manger est synonyme de notion de plaisir et surtout de lien social

    - « La nourriture c'est une part très importante de ma vie, c'est un des budgets les plus conséquents » (Interrogé 8), « J'aime beaucoup manger » (Chef de projet web, 32 ans), « Avec des budgets réduits tu peux faire des bons plats aussi, et c'est ça de se faire plaisir » (Intervenant 7)

    - « Je me nourris n'importe comment, je fais les courses le moins possible, mais j'aime bien cuisiner pour les autres » (Chômeur, 22 ans), « C'est un cadeau, cela fait plaisir à la personne que tu reçois » (Interrogé 2)

    - « Les gens cherchent la facilité et la rapidité, alors qu'avec un peu de temps tu arrives à faire ce que tu veux »

    60% des participants pensent connaître le contenu de leurs assiettes, et ils ont répondu spontanément et rapidement qu'ils s'informent au moment de l'achat :

    - « nous faisons vraiment attention aux ingrédients utilisés dans les plats » (Intervenant 7)

    « Dès l'achat, de toute façon c'est sélectionné, je n'achète quasiment plus de produits transformés sans lire derrière les ingrédients qu'il y a dedans » (Intervenant 3)

    43

    Les autres justifient le manque d'informations par le fait qu'ils ne lisent pas les informations sur le packaging

    - « Je ne lis jamais, jamais les étiquettes, je regarde celles de devant jamais celles de derrière, c'est le marketing, celle ci je la regarde, c'est celle qui va me faire acheter » (Intervenant 1)

    - « Je regarde les images sur le produit » (Intervenant 4)

    Souvent, car les étiquettes ne sont pas claires ce qui nécessite un effort, alors que cela devrait être un signe de sécurité :

    - « La lecture des étiquettes c'est très compliqué, il faut savoir lire entre les lignes » (Vendeuse 22ans) - « J'ai appris à les lire » (Intervenants 3, 5, 6)

    - « La sécurité c'est être informé » (Agent commercial, 28 ans)

    « Un produit chimique dans un produit alimentaire c'est pas imaginable » (Archéologue, 32 ans)

    Parfois, les participants font volontairement pas attention, juste pour un achat plaisir : « Cela n'empêche pas l'achat plaisir où on ne regarde pas les étiquettes » (Archéologue, 32 ans)

    Pour 80% des intervenants, le critère de consommation le plus important est la qualité, il passe largement avant le prix pour ceux qui n'ont pas les budgets suffisants : - « Cela dépend du produit, le frais ce sera la qualité » (Fromager, 31 ans) - « Ce n'est même pas que pour le frais mais tout l'alimentaire » (Intervenant 8)

    Les intervenants ont mentionné la sécurité comme critère, mais ils pensent que les certifications utilisées comme signe de qualité ne s'apparentent pas évidemment à la sécurité. Il y en a beaucoup trop, ce qui fausse leur pertinence :

    - « Un label veut tout et rien dire »

    - « Dans le fond j'aimerais bien, mais je me dis qu'au regard du fonctionnement, il peut toujours y avoir des failles »

    - « Il y a des faux labels comme « Coq de France » pour les poulets, mais il y a des labels certifiés par l'état comme le bio, label rouge, les AOP, cela fait beaucoup »

    Ils sont perdu et ne font pas toujours la différence :

    - « Le marketing du bio dans les supermarchés, cela n'arrête pas en ce moment, mais les produits ils viennent de partout dans le monde, donc au final l'empreinte carbone est énorme »

    - « Le bio ce n'est pas l'écologie »

    - « Moi les OGM, je n'y touche pas du tout, je suis un peu au courant par mes cours et je refuse de manger des produits qui sont génétiquement modifiés, je ne touche pas à cela. Les autres labels s'apparentent à des signes de qualité, je pense que je me fais avoir parfois, parce que ça m'aiguille dans mon choix et cela me rassure beaucoup »

    D'une manière générale, les participants ne se fient pas aux marques industrielles et à leurs discours comme critère et leur communication peuvent plus marquer un frein

    - « Non, plus il y a marques, plus il y a d'argent, plus on peu faire de la communication »

    - « Le marketing est derrière et cela ne veut pas dire signe de qualité et de sécurité, mais simplement argent qui tombe, ils misent tout sur le marketing comme ça il y aura un retour »

    - « C'est l'aspect commercial et le marketing dont on a marre, parce qu'il y en a trop, dès que tu allumes ta télévision, tout le monde essaie de t'influencer et c'est à cause de cela qu'on en a marre »

    Alors que pour les commerçants artisans c'est un gage de qualité

    - « Des artisans cela peut faire la différence -dans mes achats- »

    - « Certaines marques ont des gages de qualité ou derrière ce n'est pas forcément de l'industrie de masse. Cela pousse plus à aller vers ces marques, mais si tu as pas le choix et que tu te retrouves en grande distribution tu n'es pas obligé d'aller vers la plus grosse marque qui va le plus produire »

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    Pour 90% des participants, ils font leurs courses plusieurs fois par semaine, et cela est dans la plupart des cas un moment de plaisir.

    - L'hypermarché est signe de contrainte pour eux : « Moi je vais à l'hyper une fois par mois, et là-bas ce n'est pas forcément un plaisir, donc c'est mitigé finalement »

    Alors qu'aller chez le commerçant du coin s'apparente à un plaisir : « II y a plaisir d'aller chez le commerçant, de le rencontrer et de discuter »

    100% des intervenants font leurs courses dans différents endroits :

    - « Pour moi, il y a un endroit pour chaque produit »

    - « Juste à côté de chez moi, j'ai un producteur de fruits et légumes. Quand je me motive, ce qui est rare, je vais inconsciemment aller la-bas pour la qualité. Sinon, je vais aller chez Auchan avec mon sac où je prends tout pour faire au plus simple »

    100% des intervenants connaissent les offres de produits locaux et en consomment pour 90% toutes les semaines :

    - « Pour les fruits et légumes, je vais au marché toutes les semaines »

    - « L'AMAP me permet de tenir la semaine et c'est du local »

    Ils consomment local pour les raisons suivantes (Triées dans l'ordre d'importance) : L'environnement, la qualité, le lien social, favoriser l'économie locale, la nutrition, par simple opposition aux firmes :

    - Pour moi c'est un mélange de plusieurs choses, le fait de consommer local, cela fait du bien à l'environnement, si c'est fait d'une manière propre selon les règles du bio, encore plus. Je le fais aussi pour favoriser l'économie locale »

    - « il y a aussi un côté militantisme »

    - « dès que je peux sortir du système de la grande distribution, j'essaie. »

    - « Je le fais aussi pour moi et mon corps »

    - « le but c'est d'aider les autres je vais donner à lui parce que cela me ferait plaisir »

    - « Je différencie vraiment le local du non local et du bio, moi je suis bio et local, car pour moi les qualités nutritives sont surtout dans le bio »

    Tous les participants qui consomment local, consomment dans les circuits courts.

    « Au marché »

    « En AMAP »

    « Chez les commerçants »

    Les intervenants sont capables de citer d'autres endroits où acheter local et notamment la grande

    distribution.

    Lorsqu'on oppose circuits-courts et circuits longs, 100% des intervenants préfèrent se servir des produits dans les magasins pour pouvoir analyser, vérifier la qualité, s'en imprégner. Néanmoins pour certains produits, ils préfèrent faire confiance au commerçant du coin :

    - « Pour les boutiques de quartier, je vais plus avoir tendance à vouloir l'écouter que quand je vais au supermarché je vais moins avoir confiance »

    Alors que 100% des participants font confiance aux circuits courts pour l'origine et la traçabilité des produits et surtout le lien social. Certains y voient quand même des freins dans certains cas comme le prix, mais sont prêt à faire l'effort pour de bons produits : « L'AMAP ce n'est pas contraignant, quand tu fais le poids contraintes/bénéfices, c'est une fois par semaine de 17h à 20h, tu peux y aller quand tu veux, au début tu penses que c'est un peu contraignant, mais par contre après tu vois le bénéfice, parce que tes légumes ils sont bons, les producteurs bossent tout seul, et c'est donc pas cher », mais ils justifient le prix par la qualité : « En fait, on dit que cela coûte plus cher, mais ce n'est pas la vérité, on paiera toujours plus pour une certaine qualité malheureusement. Mais payer plus cher pour une qualité raisonnable, moi je le fais »

    Pour les intervenants, le fait de passer par des circuits courts leur permet de « Ré-apprendre à consommer autrement aussi »

    45

    Ils font difficilement confiance aux circuits de grande distribution. Bien qu'ils soient 100% à acheter des produits alimentaires là-bas, 90% sélectionnent les familles de produits qu'ils y achètent : « Le longue durée de conservation », « Jamais, jamais, aucun produit frais »

    Comme une surprise, grande distribution égal produits d'entretiens ou de beauté et encore une fois la notion de développement durable est intégré pour certains :

    « Dans ces produits, je choisi des produits écologiques »

    Par contre « supermarché » et « local » ne peuvent pas être complémentaires : « Non parce qu'il y a l'image »

    « Si tu veux manger local, tu vas pas au supermarché »

    Même s'il y a un étal de boucher au supermarché, les participants ne vont pas avoir la même confiance que pour le commerçant, même si l'offre est locale :

    - « Ce n'est pas que je ne vais pas avoir confiance en lui, mais à la base je vais douter de la sélection des produits qui n'est pas qualitative »

    - « Les supermarchés cherchent à faire leurs marges, donc forcement la qualité sera moins bonne, enfin pour moi. Tu peux avoir moins cher un morceau de viande de moins bonne qualité, qu'un morceau qui est de meilleur qualité »

    - « On en revient au local, si mon boucher il a un producteur qui est à 20km d'ici il vend à la fois à Super U et à la fois à un boucher local, je préfère aller chez le boucher local parce que cela ferait marcher un artisan de plus »

    100% des intervenants pensent que l'intégration d'une offre locale en grande distribution s'apparente à une volonté de faire plus de profits et ce n'est pas un signe de changement pour devenir un acteur meilleur :

    - « Il y a un lobbying derrière tout cela, c'est un moyen de récupérer encore plus de consommateurs, et d'argent, c'est toujours le nerfs de la guerre »

    - « Je ne vois pas la bonne conscience et l'éthique derrière tout cela »

    - « Tu peux aller l'acheter direct, tu ne te dis pas je vais aller l'acheter par lui, non, cela ne sert à rien. Après si je dois passer par un intermédiaire je préfère un intermédiaire local »

    - « Bien-sûr, en plus tu le vois le producteur ou le commerçant, c'est plus sympa »

    - « Etant donné que c'est eux qui ont crées cette consommation, je ne vois pas pourquoi aujourd'hui, ils essaieraient de s'en détacher »

    Lorsque l'on parle de Théorie de la dépendance des ressources, 80% des participants ont répondu qu'ils ne peuvent pas se satisfaire de l'offre locale et que pour certains type de produit, il est nécessaire d'avoir des offres globales :

    - « De toute façon, les épices ne viennent pas de France, c'est chouette de pouvoir avoir de la diversité, il y a des choses que tu peux pas consommer chez toi et c'est sympa de goûter des nouveaux goûts. Mais consommer ce qu'on a chez nous c'est bien aussi »

    100% des intervenants consomment des produits globaux, et pour ces produits 70% d'entre eux vont favoriser des produits issus du commerce équitable qu'ils considèrent aussi important que les enjeux du locaux mais à une échelle mondiale : « C'est le même principe que les AMAP, mais d'un point de vue mondial, cela veut dire qu'il va y avoir une trésorerie pour le producteur lui permettant d'agrandir son exploitation »

    100% des intervenants consomment des produits de « cuisine étrangère » (asiatique, italien,...) qu'ils achètent généralement tous en grande distribution, ou souvent au restaurant et pour 25% d'entre eux en magasins spécialisés. D'une manière générale, ils trouvent qu'il y a assez, voire trop de magasins spécialisés, mais ils se rendent tout de même en grande distribution.

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    100% des intervenants indiquent qu'ils pourraient complètement s'affranchir de la grande distribution, mais ce sera une tâche plus complexe et qui prendrait plus de temps au quotidien:

    « Oui, on pourrait, si on voulait vraiment », « Si on voulait pousser le vice jusqu'au bout, on pourrait faire nos pâtes nous mêmes, se décider que je ne consommerais plus tout cela, c'est possible », « Après, il ne faut plus avoir de travail pour avoir le temps »

    Enfin, malgré le fait qu'à travers leurs réponses, les intervenants ne pensent pas toujours faire acte de résistance face aux représentations des firmes, lorsqu'on les interroge sur leur pouvoir de résistance, ils sont conscients de leur force à travers leur pouvoir d'achat :

    « Le fait que ce soit nous qui avons notre carte de crédit et que ce soit nous qui allons donner notre argent et de savoir où on va donner notre argent, à qui je le donne, pourquoi je le donne »

    « De toute façon, en tant que consommateur, si le monde réfléchissait, le bulletin de vote c'est notre porte-monnaie, ce n'est pas le petit papier que tu vas mettre dans l'urne, c'est l'argent que tu vas donner »

    D'une manière générale, ils ne croient pas au possible changement moral ou éthique des firmes :

    « Elles pourraient pas, parce qu'on les croirait pas (les firmes), c'est ce qu'on a dit tout à l'heure, moi demain si Auchan passe au bio et local, j'arriverai pas à y croire »

    « Il y a trop de gens à convaincre, à faire changer, on ne pourrait pas déjà ce n'est pas possible, c'est trop ancrer dans les meurs »

    Après avoir fournit une définition de résistance à la consommation, les réactions sont instantanées, et les intervenants expliquent qu'ils ne consomment pas certaines marques, certains produits à cause du rejet de leur techniques de production, ou de leur image, etc. « Par exemple, moi pour les produits Monsanto, j'ai une liste sur mon téléphone qui recense toutes les marques rattachées à Monsanto, et je me refuse de les acheter. Je n'achèterai jamais »

    Quand on les interroge sur leur volonté à créer de la valeur pour le marché et les autres, les avis sont mitigés : certains affirment le faire très personnellement:

    -« Je le fais pas pour que tout le monde le fasse, je l'ai dis c'est avant tout égoïste, c'est pour moi, c'est pour mon bien »

    -« Je pense au final, tout du moins, si on ne peut pas le changer, on peut essayer de vivre en accord avec nos idées »

    -« Si cela devient fashion, cela va rentrer dans le système dans lequel on est déjà, et ce serait dommage »

    et d'autres cherchent indirectement à le partager pour faire évoluer les systèmes :

    -« Moi mon AMAP, je la promeus de partout »

    -« Etant végétarienne, moi je cherche à convaincre, j'ai des débats dans des repas familiaux qui sont houleux, mais je me heurte à des murs

    -« Convaincre c'est dur, quand tu essaies de convaincre tu t'attaques peut-être à des gens qui en ont rien à faire, juste dire son avis et pas aller plus loin c'est mieux, ça laisse réfléchir les gens si nécessaire, plutôt que de juger, ce qui a aucun impact

    -« Moi, je pense qu'il y a une mouvance qui est en train d'arriver. Les gens se rendent compte qu'ils mangent des saletés depuis des années, et certaines personnes sont aussi là pour te montrer que tu peux changer de système et retrouver de la qualité. Ce n'est pas parce qu'on te dit que la terre est trop polluée, même si c'est vrai, ce n'est pas une raison pour en rajouter une couche dans le discours. Nous on arrive à faire quelque chose même si c'est pollué, on peut arriver à faire quelque chose de correct surtout »

    - « Si cela devient « super fashion » tant mieux »

    Enfin pour la plupart des participants, les recommandations qu'ils ont à faire portent sur la capacité des circuits courts à communiquer, ils voudraient qu'on en entende plus parler pour que

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    les gens prennent conscience des enjeux de la consommation alternée entre local, régional et global. Il faudrait trouver un équilibre :

    -Ç Tant que les marques pourront faire ce qu'elles veulent, et que les gens ne l'auront pas décidé autrement dans leur tête, cela ne changera pas »

    -Ç Revenir à une autre consommation c'est cela l'enjeu. Elle a déjà existé et elle est possible »

    -Ç Un équilibre, bien-sûr »

    -Ç La mondialisation c'est que tu peux avoir du café, du thé qui vient d'ailleurs, mais cela doit être éco-responsable, et équitable !

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    Discussion des résultats

    Le mouvement de résistance peut-il modifier durablement les modèles de consommation dans le cadre du marché agro-alimentaire ? Pour répondre à cette problématique, il faut tout d'abord rapprocher les résultats avec les hypothèses avancées.

    Nous avons relevé dans le cas pratique que les individus qui consomment locale dans des circuits-courts, agissent en parti pour s'opposer à d'autres systèmes qu'ils ne les satisfont pas ou plus. Dans ce sens, ils font preuve de résistance à la consommation. En effet, l'alimentaire est un domaine pour lequel 62% des intervenants se considèrent comme « engagé ». Ils pensent que « la consommation joue un rôle » et doit passer à travers un « acte réfléchit ». En consommant de cette manière, nous avons relevé que les consommateurs intègrent les différentes dimensions du développement durable qui concernent le locavorisme : la dimension environnementale, la dimension sociale et solidaire, la nutrition et le fait de consommer en fonction de leur valeurs éthiques dans une démarche identitaire. Tous ces éléments signifient que leur consommation alimentaire implique une démarche citoyenne qui nécessite qu'ils s'interrogent sur les causes et conséquences de leur consommation.

    Pour l'intégralité des personnes sondées, l'acte de consommation alimentaire répond avant tout à une notion de plaisir hédoniste : « C'est un plaisir de manger », « Je le fais de manière égoïste, à la base pour moi, pour ma santé », qui peut dépendre de plusieurs facteurs tels que le lien social « C'est convivial », ou le plaisir de la démarche citoyenne « pour la santé de la Terre et de l'environnement » ou par simple plaisir de la pratique « J'adore cuisiner ». Les consommateurs veulent s'émanciper de toutes les techniques d'influence utilisées par les firmes et le marketing pour un retour à des valeurs plus humaines, authentiques et réelles : « on ne veut pas de communication, cela ne nous intéresse pas, on veut juste Jean Claude qui vend ses tomates, le reste on s'en fiche ». La consommation alimentaire doit être en cohérence avec les valeurs de chacun, car si elle ne l'est pas, elle apparaît comme complètement rejetée « l'actionnaire majoritaire de Papillon le Roquefort c'est Jean-Marie Le Pen, par conviction je n'ai pas mangé de Roquefort Papillon pendant des années, et il a revendu ses parts il y a 5 ans et du coup j'en rachète ».

    Les consommateurs cherchent avant tout à se détourner d'un système marchand « Les supermarchés cherchent à faire leurs marges », système mis en place par les marques de distributeurs et industrielles. Tous les participants ont une image assez négative de ces firmes : « C'est la grosse machine ». Ils pointent du doigt la perpétuelle recherche de profits de ces organisations : « Il y a un lobbying derrière tout cela, c'est un moyen de récupérer encore plus de consommateurs, et d'argent, c'est toujours le nerfs de la guerre », au détriment d'autres dimensions : « Cela implique que les produits soient congelés, traités, transformés, etc et c'est nuisible pour le produit au final ». Lors des observations, beaucoup de consommateurs ont critiqué ces démarches, car ils souhaitent simplement un retour à des valeurs fondamentales, à des techniques de production et des produits artisanaux et de terroir : « Le Français me pousse à acheter ». Ils recherchent des produits alimentaires qui répondent avant tout la qualité, ils veulent des produits qui les rassurent pour qu'ils se sentent en sécurité, et s'ils doivent y mettre le prix, ils le feront, car ils estiment que c'est un budget qui en vaut la peine pour 80% des sondés : « La qualité se paye aujourd'hui ».

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    Si l'on reprend la définition de Dominique Roux, chercheur en marketing sur la résistance à la consommation: « La résistance est une forme d'opposition qui dépend de plusieurs variables et répond à un rejet face à des pratiques et formes de pression que les consommateurs jugent comme dissonantes. Ainsi, le consommateur qui mobilise des moyens pour résister à une forme de pression, fait acte de résistance ». Dans le cas présent, les consommateurs qui ont une représentation faussée des firmes, industries, et de leurs pratiques, s'opposent et rejettent d'une certaine manière le système marchand et ses techniques de production souvent douteuses. Par exemple, pour protéger leur santé, les consommateurs s'opposent aux pratiques qui consistent à utiliser des OGM : « Moi les OGM, je n'y touche pas du tout, je suis un peu au courant par mes cours et je refuse de manger des produits qui sont génétiquement modifiés », ou des pesticides : « Les vitamines de toute façon, elles sont dans la peau - des fruits et légumes - , c'est là où il y a le plus de valeurs nutritionnelles. Alors que quand tu as des pesticides tu es obligé d'enlever la peau, donc tu n'as aucune valeur nutritionnelle ». Ces éléments ont amené les consommateurs à douter des produits, de fait à s'informer pour ne pas se faire piéger.

    Selon O. Hirschman, la résistance peut se faire selon à 3 niveaux : s'opposer mais rester fidèle à la marque, choisir des alternatives pour répondre à leur besoin ou la défection totale. Dans ce cas la, nous n'assistons pas à la défection, car les consommateurs sont conscient qu'ils consomment encore des produits des marques industrielles : « on apprécie aussi la junkfood », mais en consommant dans des AMAP ou circuits-courts, ils s'opposent en recherchant d'autres solutions alternatives pour le même besoin « L'AMAP me permet de tenir la semaine et c'est du local », dans ce sens ils s'affranchissent des circuits traditionnels de la grande distribution, même si cela nécessite des efforts « si nous nous décidons de consommer locale, et qu'on s'y met alors qu'on était pas du tout comme ça avant. On va trouver cela difficile pendant un bon moment (É) craquer et trouver cela trop contraignant. Je pense que c'est pareil quand on prend des habitudes pour tout, c'est comme n'importe quelle habitude, la consommation locale faut prendre l'habitude », ils profiteront des avantages par la suite : « L'AMAP ce n'est pas contraignant, quand tu fais le poids contraintes/bénéfices, c'est une fois par semaine de 17h à 20h, tu peux y aller quand tu veux, au début tu penses que c'est un peu contraignant, mais par contre après tu vois le bénéfice, parce que tes légumes ils sont bons, les producteurs bossent tout seul, et c'est donc pas cher ».

    On remarque bien que même si les marques essayaient de changer et de s'inscrire dans des démarches éthiques, les consommateurs ont tellement été habitués à ce sytème « Je fais attention à ne pas gaspiller, à ne pas être en sur-consommation, (É) On est dans une société de consommation dans laquelle on a grandi, on a été habitué à consommer comme cela », qu'ils ne pourront pas croire un éventuel changement si facilement : « moi demain si Auchan passe au bio et local, j'arriverai pas à y croire ». Les marques vont donc devoir s'armer de patience pour se détacher de cette image négative perçu par les consommateurs. « Tant que les marques pourront faire ce qu'elles veulent, et que les gens ne l'auront pas décidé autrement dans leur tête, cela ne changera pas ». Par ailleurs, en citant l'exemple de Système U, ils ont monté leur communication depuis 2009 sur les valeurs du développement durable, en intégrant des discours sur l'intégration de produits locaux ou régionaux, les partenariats avec des entreprises ou producteurs français. Dans cette

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    communication l'équité est au coeur des stratégies. Cependant, en 2015, Système U est condamné par DGGCRF pour pratiques abusives appliquées sur les négociations tarifaires avec les producteurs régionaux. Ces éléments donnent autant de pouvoir au consommateur de perdre confiance et de chercher à s'opposer en favorisant des circuits alternatifs : « J'avais discuté avec un d'eux -producteur-, il a essayé de passer par la grande distribution, mais en gros il a rejoint cette association parce que la grande distribution l'a écrasé sur les prix. Ils ne veulent même pas discuter sur les prix. C'est eux qui font le prix. Ainsi, le producteur n'a pas le choix et se met dans l'embarras. Finalement, il se retrouve mieux à passer par des circuits courts que par la grande distribution ». Ainsi les consommateurs résistent et s'interrogent réellement sur le rôle des Marques de distributeurs ou industrielles dans ce type de consommation « Pourquoi aller acheter local chez la grande distributeur alors que tu peux aller acheter local directement chez le petit producteur ? », car même si elles essaient, ce ne sera pas les mêmes enjeux, ni les mêmes valeurs.

    D'une certaine façon les sondés se méfient du comportement des firmes, par exemple lorsque la tendance de la consommation éthique s'est installée, Système U a été le premier a l'intégrer à sa stratégie marketing. Néanmoins, à part dans sa communication et la visibilité des produits du terroir dans certains points de vente, on s'aperçoit que les offres locales, régionales et durables sont très peu développées et peu reconnaissables. On remarque surtout qu'à force d'utiliser les codes du marketing durable dans tous les sens, les consommateurs se retrouvent perdus : « Le marketing du bio dans les supermarchés, cela n'arrête pas en ce moment, mais les produits ils viennent de partout dans le monde, donc au final l'empreinte carbone est énorme ». Dans ce cas là, on remarque une grosse incompréhension dans la distinction du label bio et de la certification C02 neutre. D'autre part, pour influencer le consommateur, les marques ont recourt à des stratégies de persuasion qui commencent à dévoiler leurs limites. Ainsi, les messages subliminaux qui cachent une liste de composants étranges sur les étiquettes sont de plus en plus remarquées et dénoncées « La lecture des étiquettes c'est très compliqué, il faut savoir lire entre les lignes ». La publicité mensongère en est une belle illustration, elle est très mal perçue parce que beaucoup en ont gardé de mauvaises expériences, comme « McDonald's on sait que ce n'est pas bon et pas sain, mais nous sommes quand même content d'y aller de temps en temps. On sait qu'on y mange des conneries, mais ce serait tellement mieux qu'ils affichent ce qu'ils sont vraiment, au lieu de mentir sur des engagements, alors qu'on sait ce qu'ils sont - Junkfood, Fast-food, c'est dommage ». En se tournant vers d'autres circuits, les consommateurs cherchent avant tout de la simplicité, la relation et les conseils basés sur la confiance, qu'à leurs yeux ils ne retrouveront même pas auprès de spécialistes en grande surface « Pour les boutiques de quartier, je vais plus avoir tendance à vouloir l'écouter que quand je vais au supermarché je vais moins avoir confiance ».

    Selon les sondés, l'acte de résistance paraît inconscient, voire improbable dans certaines discussions, par exemple lorsqu'on aborde leurs habitudes alimentaires, les consommateurs qui consomment local n'ont pas l'impression d'agir contre les marques directement « Je ne fais pas cela contre les marques, mais je le fais pour moi avant tout, après si cela les touche ce n'est pas le but recherché ». Néanmoins, quand on aborde la notion de résistance à la consommation, les consommateurs sont conscients du pouvoir qu'ils détiennent face aux firmes, et sentent qu'ils peuvent en user pour se protéger : « Le fait que ce soit nous qui avons notre carte de crédit et que ce soit nous qui allons donner notre argent et de savoir où on va donner notre argent, à qui je le donne, pourquoi je le donne ». Enfin, sous forme de

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    volontariat on assiste à des comportements de défection vis-à-vis de certaines marques, à cause de leur image et/ou de leurs stratégies peu éthiques et durables. « Par exemple, moi pour les produits Monsanto, j'ai une liste sur mon téléphone qui recense toutes les marques rattachées à Monsanto, et je me refuse de les acheter. Je n'achèterai jamais », ou « je n'en achèterai aucun aliment lié à l'huile de palme ».

    Dans ce sens, nous pouvons affirmer que les consommateurs de manière volontaire ou inconsciente font acte de résistance, en consommant auprès de circuits de distribution alternatifs, contre plusieurs éléments.

    Bien que le consommateur local essaie de s'affranchir un maximum des marques industrielles ou de distributeurs, pour 100% des intervenants, ils continuent de se rendre en réseau de grande distribution car ils se sentent « obligés d'y aller ».

    Malgré les outils marketing et autres procédés pour influencer le consommateur, les consommateurs trouvent toujours intéressant de se rendre en grande distribution, car ces points de vente présentent des avantages considérables. Dans une société où le rythme est en permanence accéléré, les individus apprécient de pouvoir réaliser toutes leurs courses dans un seul et même lieu. « Après, il ne faut plus avoir de travail pour avoir le temps » En effet, cela leur fait gagner du temps, car tous les travailleurs n'ont pas le temps de pouvoir se rendre dans différents points de vente pour acheter tous les produits nécessaires à leur consommation. « Sinon, je vais aller chez Auchan avec mon sac et je prends tout pour faire au plus simple », « Parce que c'est quand même l'endroit -grande distribution- où tu retrouves tout, c'est la simplicité ».

    Lors de l'analyse théorique, on a relevé que les consommateurs locaux ou les locavores dits Marco Polo consomment à la fois des produits alimentaires locaux, mais ils consomment aussi des produits globaux. Lors de l'entretien, bien que nous traitions du domaine alimentaire, quand la grande distribution a été mentionnée, la première réaction spontanée des participants a été d'évoquer les produits cosmétiques ou d'entretien, car ils y retrouvent de tout, et encore une fois des produits correspondant à leurs valeurs « je choisi des produits écologiques ». En effet, que ce soit pour les épices ou denrées étrangères convenant aux Locavores Marco Polo, ou plus largement des aliments à « longue conservation » pour les consommateurs locaux, la grande distribution offre un large choix de familles de produits, et pas seulement en alimentaire. Ces éléments constituent des repères clés pour le consommateur, qui a généralement été habitué à se rendre dans les supermarchés « On est obligés d'y aller ». Il est sûr de pouvoir trouver tous les produits qu'il souhaite. La plupart des consommateurs s'y rendent donc pour des conserves, des bouteilles, l'épicerie salée, etc. Tout mais pas les produits frais : « Jamais, aucun produit frais ».

    Néanmoins, grâce à cet éventail de produits, on retrouve beaucoup de produits certifiés Bio ou Fairtrade. Bien qu'il faille dissocier « le local du non local et du bio », ces signes de certification sont gages de qualité pour les consommateurs, ils passent même parfois avant le critère du local pour certains consommateurs « Il vaut mieux prendre bio que français ». D'ailleurs lors de l'observation auprès de l'AMAP, j'ai découvert qu'à l'origine ces associations ont été lancées dans l'objectif premier de promouvoir les produits bio par le biais de producteurs locaux qui valorisent avant tout le respect de la production et des aliments qui évoluent sans ajouts de pesticides ou d'éléments chimiques. Si l'on compare un produit

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    bio de grande distribution ou d'une AMAP, le résultat sera le même en terme de qualité, mais ce qui va varier se sera les techniques de production de l'un et l'autre. Ce label, comme d'autres, est un réel atout pour les acteurs qui le détiennent. En effet, les participants ou les consommateurs du Salon du Chocolat cherchent chez NEWTREE des produits qui ont ces labels et certifications, gage de qualité « Moi par exemple dans la grande distribution, je ne vais plus aller acheter du commerce équitable ». En introduisant des produits éthiques, les firmes ont aussi permis à des personnes de découvrir et de s'ouvrir à ces dimensions de développement durable. La grande distribution permet donc aux consommateurs de s'ouvrir à de nouveaux produits s'inscrivant dans une démarche en faveur du développement durable et profitable à tous.

    Néanmoins, pour en revenir aux techniques employées par les firmes, c'est la qu'elles sont pointées du doigt, comme les scandales à propos du gaspillage alimentaire. « Dans la consommation locale, tu n'es pas dans la sur-consommation et tu ne fais pas de gaspillage ». Ce sont des paradoxes comme ceux-ci qui décrédibilisent les discours et bonnes actions des firmes, car dans leurs recherches de bénéfices, elles sont parfois prêtes à user de recours douteux et suspicieux qui retient l'attention des consommateurs. « Non plus il y a marques, plus il y a d'argent, plus on peu faire de la communication ». Ces éléments font douter le consommateur qui va se replier sur d'autres solutions.

    Aujourd'hui, dans leur résistance, les consommateurs montrent qu'ils sont prêt à réapprendre à consommer « réapprendre à consommer autrement, c'est cela surtout », mais dans de meilleures conditions « La sécurité, c'est d'être informé ». Si nous reprenons l'exemple précédent de McDonald's, les consommateurs continueraient de se rendre dans ces fast-food par pur plaisir, mais pourquoi mentir ou fausser la réalité aux consommateurs ? « Cela n'empêche pas l'achat plaisir où on ne regarde pas les étiquettes », mais ce que les consommateurs n'acceptent plus c'est la mauvaise expérience « Si je vis une mauvaise expérience, j'arrête de consommer cette marque ».

    Les consommateurs auront toujours plus ou moins besoin des firmes, surtout en ce moment de mouvance, mais il est dommage que le marketing soit réduit à une telle image négative « Le marketing est derrière et cela ne veut pas dire signe de qualité et de sécurité, mais simplement argent qui tombe, ils misent tout sur le marketing comme ça il y aura un retour » à cause de ressenti où le consommateur se sent trahi « je pense que je me fais avoir parfois (par les labels) », alors que le marketing détient des outils qui utilisés de manière optimal pourraient profiter à chacun. Tandis que, les Amapiens, les intolérants/allergiques (gluten, lactose, etc) ont, certes, des profils complètement différents, mais ont aujourd'hui ont des besoins en terme de représentations pour qu'il y ait plus de communication autour et de manière adaptée. « Je trouve cela très dommage, car il y a pleins de gens qui ne connaissent pas et je pense que si les AMAP communiquaient plus, elles auraient bien plus d'adhérents ». Alors qu'ils sont sûr du pouvoir que détiennent les firmes et les médias « Si cela passe au journal de 20h de TF1, tout le monde se le dira et le fera ». Le consommateur a forcément besoin de l'implication des entreprises, mais aussi des médias pour « recréer un lien social dans les supermarchés », comme dans tous les circuits de distribution et pour l'ensemble des marques.

    Les consommateurs sont en recherche de lien social dans une société « où les gens ont beaucoup de mal à avoir du temps, alors que prendre le temps, là est la question ? » Et c'est un point très apprécié chez les consommateurs locaux « II y a plaisir d'aller chez le

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    commerçant, de le rencontrer et de discuter - Tu as vraiment un conseil - C'est sympa ». On s'aperçoit qu'il y a certains éléments qui sont critiqués chez les distributeurs, mais qui ne sont pas propres aux produits alimentaires, mais plutôt aux stratégies d'entreprise derrière. Les éléments les plus critiqués sont « l'aspect commercial et le marketing dont on a marre, parce qu'il y en a trop, dès que tu allumes ta télévision, tout le monde essaie de t'influencer et c'est à cause de cela qu'on en a marre ». On relève que les consommateurs se font une idée globale de la masse et ne distinguent difficilement les différents types d'entreprise. Alors que si les firmes ne se contentaient pas de représentations plus ou moins ancrées avec un modèle de consommation à respecter, et qu'elles s'ouvraient à d'autres visions, elles pourraient développer de meilleures relations avec les consommateurs. Au lieu de favoriser l'émergence d'un fossé, les firmes pourraient être à l'origine de mouvance positive sur le marché et jouir d'un impact positif pour leur image.

    Dans le cadre du Salon du Chocolat, les consommateurs nous citaient très facilement les firmes comme « Nestlé », « Jeff de Bruges », mais ils ne connaissaient que très peu de petites structures, souvent artisanales. D'ailleurs, c'est la première raison de leur visite : la découverte des nouveaux produits. A l'inverse, NEWTREE qui est une TPE engagée en faveur du développement durable, peut être associé dans l'image à une entreprise industrielle par cynisme de la part des consommateurs. On remarque que les consommateurs apprécient les petites structures car elles sont signe de qualité : « il y a des -petites - marques qui me plaisent, signes de qualité gustative », même si les produits ont une origine plus lointaine, ce sera le critère de la confiance qui conviendra le mieux au consommateur. Malgré la volonté pour les distributeurs tels que Système U d'intégrer des producteurs locaux dans certains de leurs magasins comme les poissonniers de leur magasin sur la côté Ouest française, les distributeurs souffrent de cette image négative : « Ce n'est pas que je ne vais pas avoir confiance en lui, mais à la base je vais douter de la sélection des produits qui n'est pas qualitative (supermarché) »

    Ces éléments nous permettent d'affirmer l'hypothèse que les consommateurs ne se suffisent pas à consommer essentiellement des produits locaux, ils sont dépendant des produits globaux. Néanmoins, à force de vivre de mauvaises expériences avec les firmes, les consommateurs mémorisent des expériences négatives, qui vont les pousser à essayer de se tourner vers d'autres alternatives. La grande distribution jouit quand même d'une position stratégique avec son éventail de produits et de marques, on peut donc parler de théorie de la dépendance des ressources. Les firmes ont besoin de l'agriculture, et des producteurs, tout comme les consommateurs ont besoin de tous ces acteurs. Si chacun trouvait sa place et que ceci était respecté, on pourrait se développer un équilibre entre tous, qui servirait chacun. D'autant plus que même si les consommateurs locaux cherchent à se détacher d'un système marchand, il apparaît très difficile de pouvoir intégralement s'auto-suffire : « Mes cousins de Paris ont changé du jour au lendemain, ils ont ouvert une ferme à côté de Paris, ils font de la biodynamie. C'est encore plus poussé que le bio, et eux par contre ils lavent eux-mêmes leur linge avec des huiles essentielles, ils n'achètent plus rien d'industriel et c'est hyper intéressant, car oui ils s'auto-suffisent, sauf pour le café, le sucre, et encore le sucre provient d'une coopérative », bien qu'ils mettent tout en oeuvre pour, ils sont dépendants des acteurs de l'offre.

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    Enfin, tous les éléments cités précédemment révèlent que les consommateurs citoyens ont complètement modifié les codes de consommation. Ils rejettent à présent ce système d'hyper-alimentation, pour certes se faire plaisir, mais aussi s'opposer à des firmes, pour asseoir leur identité. Mais on remarque que 100% des personnes intervenants, lors de l'entretien, consomment local pour revaloriser des acteurs ou des circuits de distribution et pour essayer d'amener à une consommation plus juste et équitable pour tous. Pour les AMAP, ce sont les Amapiens qui sont à l'origine du développement des points de distribution, car plus il y a d'Amapiens, plus il va y avoir de producteurs impliqués. Pour ne pas tomber dans la sur-consommation les AMAP limitent le nombre d'adhérents par point de distribution à environ 80 personnes. Si la demande est trop importante, alors vont naître d'autres AMAP. Dans ce système là, le consommateur est à l'origine de création de circuits alternatifs. D'autre part, dans les AMAP, le bon fonctionnement repose sur l'engagement des 2 parties, mais l'engagement du consommateur sur l'année permet aux producteurs de se développer, d'investir pour proposer plus de produits, ou améliorer sa production : « L'AMAP, c'est que tu t'engages pour l'année, en gros le producteur il sait qu'il y a tant d'argent, au 1er Janvier tu fais tes chèques pour l'année, donc il connait sa trésorerie. Du coup, il peut ré-réinvestir pour faire de nouvelles sortes de légumes, pour faire des travaux, enfin c'est génial, je trouve cela top ». Les consommateurs locaux prennent plaisir à faire preuve de solidarité avec les producteurs locaux, c'est pour une source de plaisir : « Tu fais plaisir aux gens », « c'est comme partager ce plaisir la avec la personne qui produit ».

    En effet, quand on les interroge sur les raisons de la consommation locale, après la notion de plaisir, voila les premières réactions spontanées qui se font dans cet ordre : pour l'environnement, « je mange que du bio, l'environnement compte beaucoup », pour l'économie locale « Je le fais aussi pour favoriser l'économie locale, plutôt que de favoriser une autre économie, dans ce cas la je touche la personne en face de moi », et pour le lien social qu'ils retrouvent », « je préfère donner mon argent à cet homme là qui travaille dans ses terres et avec ses mains ». La consommation locale favorise la démarche sociale et solidaire que ce soit auprès des producteurs indépendants ou même entre consommateurs « Cela peut être ton voisin d'à côté qui a un mûrier et tu lui achètes des fruits, c'est local et solidaire ».

    A travers la démarche citoyenne de la consommation locale, on assiste pleinement à une démarche de consom'action, c'est-à-dire que dans un sens les consommateurs cherchent à utiliser leur acte de consommation pour influencer plus ou moins le monde dans lequel on vit. Néanmoins, quand on interroge les participants sur leur démarche de création de valeur pour le marché, ils ne considèrent pas que leurs gestes soient réalisées dans le but de créer de la valeur : « Ce sont mes valeurs, ce n'est pas pour la création de valeurs, c'est simple les miennes pour moi - je le fais pas pour que tout le monde le fasse, je l'ai dis c'est avant tout égoïste, c'est pour moi, c'est pour mon bien ». Il est évident que le consommateur agit pour lui avant les autres, mais en creusant un peu plus cette approche, on remarque qu'il essaie tout de même de faire évoluer la société de consommation à son échelle et avec ses moyens: « Moi mon AMAP, je la promeus de partout - Etant végétarienne, moi je cherche à convaincre, j'ai des débats dans des repas familiaux qui sont houleux, mais je me heurte à des murs - Convaincre c'est dur, quand tu essaies de convaincre tu t'attaques peut-être à des gens qui en ont rien à faire, juste dire son avis et pas aller plus loin c'est mieux, ça laisse réfléchir les gens si nécessaire, plutôt que de juger, ce qui a aucun impact ». Dans ce sens, de manière inconsciente, les consommateurs tendent de faire évoluer la consommation dans le bons sens « Moi, je pense qu'il y a une mouvance qui est en train d'arriver. Les gens se

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    rendent compte qu'ils mangent des saletés depuis des années, et certaines personnes sont aussi là pour te montrer que tu peux changer de système et retrouver de la qualité ».

    Nous pouvons donc afÞrmer que directement ou indirectement, consciemment ou non, le consommateur est à l'origine de la valeur ajoutée pour toutes les parties prenantes sur le marché.

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    Conclusion

    Nous remarquons depuis quelques années que les consommateurs font de plus en plus acte de résistance pour s'opposer à des représentations qui ne leur semble pas être à leur goût. Que ce soit de manière individuelle ou collective, les consommateurs s'opposent de manière plus ou moins audible pour essayer d'affaiblir ou de faire changer la cible visée. On assiste à l'émergence de profils de consom'action. Les consommateurs intègrent dans leur plaisir, la nécessité d'agir pour l'intérêt public, dans le but de faire évoluer, dans le bon sens, la consommation.

    Dans le secteur de l'agro-alimentaire, nous avons d'abord vu émerger le mouvement du Slow Food, qui tout simplement s'oppose avec le fast-food ou le modèle « d'hyper-alimentation » d'une consommation dans l'abondance et dans l'excès. Ce mouvement et plus récemment l'apparition du mouvement du locavorisme ont des conséquences considérables sur nos habitudes de consommation alimentaire, et interrogent sur le rôle de chaque acteur sur les marchés. Le consommateur local ou locavore résiste aux modèles du marché agro-alimentaire en choisissant des solutions alternatives qui suscitent la revalorisation d'anciens circuits ou l'apparition de nouveaux acteurs. Il favorise des produits respectueux de l'environnement, de l'économie locale, bons pour la santé, et qui permettent de se reconnecter avec la nature et notre patrimoine alimentaire. En agissant comme tel, le consommateur local cherche à s'opposer aux techniques douteuses des firmes. Derrière cette idée, ils ne veulent pas simplement s'opposer, ils veulent participer à l'évolution de notre société. Le consommateur est donc à l'origine d'un nouveau cycle, dans lequel il est nécessaire que le marketing réagisse, car il est de plus en plus critiqué et à tordtmalheureusement.

    Le consommateur citoyen est plus réfléchi, plus informé, plus autonome et il intègre d'autres dimensions sociétales. Il apparaît comme une force pour toutes les parties-prenantes du fait qu'il détient le pouvoir d'achat et que c'est lui qui va définir la pérennité des acteurs sur le marché, si tout le monde agissait. À présent, le rôle des firmes et du marketing est d'utiliser à bon escient la force de ce consommateur sur le terrain pour développer une relation favorable à chaque partie. Le marketing doit retrouver sa position initiale, c'est-à-dire traduire les besoins du consommateur pour lui apporter une offre satisfaisante, plutôt que de valoriser toujours la logique marchande. Le marketing doit apporter des informations pertinentes au consommateur, l'impliquer dans la stratégie d'entreprise et utiliser l'émergence de cette nouvelle consommation pour le rééduquer de manière constructive pour tous et effacer cette image noircie du marketing et des firmes, qui apportent tout de même des solutions au consommateur dans pas mal de situations. Il serait plus judicieux de faire cela dans une démarche où les consommateurs se rendent compte de la bienveillance des marques. Les firmes doivent à présent se positionner comme un maillon, comme le producteur ou le consommateur, d'une chaîne qui construit des projets durables et dans laquelle l'intervention de tous est nécessaire à l'équilibre de tout et chacun.

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    Bien que l'argent « soit le nerf de la guerre » depuis des décennies, l'environnement le prouve, il aura toujours raison de nous et de nos pratiques. Il faut sortir de cette logique marchande qui est en permanence au coeur des stratégies en permanence et que l'économie soit perçue de façon tout aussi égal que les dimensions sociétales.

    Néanmoins, en France, d'une manière générale, les prises de conscience et/ou mouvement de changement sont dus en partie à l'intervention de l'État, ou à la pression médiatique d'une sur-couverture d'un sujet. En effet, par exemple, pour calmer le recourt massif à l'apposition de signes de qualité tels que « Source d'Oméga 3 », « Plus de fibres », etc sur les packaging pour influencer les consommateurs, l'État a donc été obligé d'intervenir. Depuis quelques temps, il existe une loi qui règle l'utilisation des allégations nutritionnelles pour cadrer ce recours. Bien que les firmes s'en servaient à tout bout de champ et pas toujours de manière très honnête, que cela se répercutait sur la santé des consommateurs; les firmes ont attendu la réforme législative pour se contraindre aux règles. Tandis que si d'elles mêmes elles avaient fait la démarche, elles auraient totalement séduit les consommateurs et valorisé une relation de confiance. Avec cet exemple, on aperçoit que la consommation locale est introduite à présent dans les textes législatifs avec la réforme sur l'intégration de cette offre dans la restauration collective, tombée en Janvier 2016. Est-ce que les firmes et le marketing vont attendre que les obligations tombent ou est-ce qu'ils ne peuvent pas se positionner comme précurseurs et manifester leurs engagements pour revaloriser leur image ?

    Que ce soit à propos de la consommation locale ou d'autres profils de consommation, les consommateurs sont rattachés aux firmes et au marketing, et à part en choisissant de vivre reclus et exclus, ils sont rattachés à ces entités. Il serait intéressant qu'il y ait un travail en collectivité pour le bien de chacun.

    Cette étude montre bien que le locavore est à la fois un acteur résistant, mais il est source de création de valeur pour toutes les parties-prenantes, et en se fondant sur la théorie de dépendance des ressources, il prouve que bien qu'il essaie, le consommateur peut difficilement s'émanciper des firmes. De ce fait, on peut conclure que le mouvement de résistance est en train de chambouler doucement, mais sûrement les modèles. Il peut à long terme les modifier durablement.

    Il serait intéressant de rechercher de manière plus approfondie comment cela fonctionnerait si chaque partie-prenante avait une place prépondérante dans nos marchés alimentaires ? Comment les entreprises, les producteurs et les consommateurs peuvent se réapproprier les marchés alimentaires en les concevant dans des valeurs justes pour chacun ? Ces recherches futures pourraient permettre au marketing de comprendre le rôle qu'il a à jouer, tout en le rassurant sur sa position vis-à-vis des consommateurs. Pour ces derniers, ils ont besoin d'être remis en confiance, et d'être traités non pas par rapport à leur pouvoir d'achat, mais avant tout par rapport à leur identité de consommateur-citoyen.

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    - Fischler C. (1994) : Pensée magique et alimentation aujourd'hui, Colloque Pluridisciplinaire International, 3-77

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    - Novel A.S (2010) Le guide du locavore pour mieux consommer local, 11-55

    - Labaronne J. (2015) Good Food : Manger sain, simple et savoureux, Hors-Séries Clés, 72-77

    - Cachot M. (2015), Consommer local, un phénomène global ? Dossier EcoSocioConso

    - Aouina-Meijri C. et Benhallam M. (2010) Résistance du consommateur face à l'argument citoyen des enseignes de grande distribution française : une étude exploratoire, Paris, 22-40

    - Robert I. (20) Le Co-branding une réponse à la résistance du consommateur, Lille

    - Ipsos Publuc Affairs (2014), Les Français et le consommer local, Une enquête Ipos pour Bienvenue à la Ferme,The social Research and Corporate Reputation Specialists

    59

    60

    Références méthodologique

    qualitative

    - Dr Touboul P. (2014), Recherche qualitative La méthode Focus Groupe - O. Maulini 2003), Comment transcrire un entretien ?

    61

    Annexes

    Grille d'observation comportements Salon Du Chocolat (2015) 62

    Grille d'observation Organisation Système U (2015) 66

    Grille d'observation Organisation AMAP (2015) 75

    Guide d'animation - Entretien Focus Groupe & Verbatims & Analyse 81

    108

    Enregistrement Focus Groupe (2015) - Enregistrement audio Fichier audio joint en version numérique

    Enregistrement Focus Groupe (2015) - Enregistrement audio Fichier audio joint en version numérique

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand