_
INSTITUT DES RELATIONS
INTERNATIONALES DU CAMEROUN
Master « Coopération internationale,
Action humanitaire et Développement
Durable »
Filière : Coopération Internationale
et Coopération Décentralisée pour le
Développement
Année Académique 2011-2012
Mémoire de recherche
La gestion durable de la filière cacao dans la
Région du Centre du Cameroun : le cas du bassin de production de la
Lékié
Project work : Rapport de stage académique
à la
SODECAO
MBARGA Dieudonné
Matricule ..........
1ère promotion
|
Directeur de mémoire :
Prof. KOUNOU Michel
Politologue
Maître de conférences
|
INSTITUT DES RELATIONS
INTERNATIONALES DU CAMEROUN
Master « Coopération internationale,
Action humanitaire et Développement
Durable »
Filière : Coopération Internationale
et Coopération Décentralisée pour le
Développement
Année Académique 2011-2012
Mémoire de recherche
La gestion durable de la filière cacao dans la
Région du Centre du Cameroun : le cas du bassin de production de la
Lékié
MBARGA Dieudonné
Matricule 11J130 R
1ère promotion
|
Directeur de mémoire :
Prof. KOUNOU Michel
Politologue
Maître de conférences
|
Remerciements
La réalisation de ce travail n'a été
possible que grâce aux concours de plusieurs facteurs et acteurs. A cet
effet, notre gratitude va :
* A nos parents, qui ont accepté tous
les sacrifices pour notre éducation.
* A l'administration et au corps
enseignant de l'IRIC et du CIRDA de
l'Université Cà Foscari de Venise, pour leurs
riches enseignements et leur encadrement. Nous pensons particulièrement
à
- Monsieur Narcisse MOUELLE KOMBI,
Agrégé des Facultés de Droit, ancien Directeur de l'IRIC
et Coordonnateur du Master CA2D, pour ses hautes qualités humaines en
plus de celles managériales,
- Monsieur ESOH ELAME, Géographe,
Enseignant-chercheur à l'université Cà Foscari de Venise,
pour sa vivacité intellectuelle et sa disponibilité pour ses
étudiants.
* A notre encadreur, Professeur Michel KOUNOU
qui, malgré ses multiples occupations, a bien voulu diriger
ce travail. Ses conseils et orientations nous ont été d'une
importance capitale.
* Notre respect et notre affection aux Professeurs
- Laurent ZANG, Politologue, Chef du
Département de diplomatie de l'IRIC,
- Dieudonné OYONO, Politologue,
Recteur de l'Université de Douala ; pour le respect que commande
leur épaisseur intellectuelle et pour leur soutien paternel.
* A nos frères et
soeurs, nos enfants, nos amis,
ainsi qu'à tous ceux qui, de près ou de
loin, ont contribué à la réalisation de ce travail.
Résumé
Le présent travail met en exergue
la contribution qu'une gestion respectueuse des exigences du
développement durable (solidarité sociale, efficacité
économique, responsabilité écologique et interculturelle)
peut apporter à l'optimisation des potentialités de
l'activité cacaoyère au Cameroun et suggère les chemins
à emprunter ainsi que les moyens à mettre en oeuvre pour
favoriser cette émergence.
Notre étude montre que, dans un environnement
international, dominé par une spéculation débridée
et un contexte interne marqué par la libéralisation de
l'économie découlant de la mondialisation et de l'amaigrissement
des moyens de l'Etat-providence, l'activité cacaoyère au
Cameroun se caractérise, en dépit des statistiques optimistes
d'une production en hausse ( 220 000 tonnes en 2011) par son
délabrement continu qui la voue à un abandon certain si la
refondation de sa gestion n'intervient pas à brève
échéance.
C'est la condition nécessaire à
l'affirmation de ce secteur ainsi qu'à l'épanouissement qui
devrait en résulter à la fois, pour les planteurs, le
développement local, et le bien-être national à travers la
consolidation de sa contribution dans le budget de l'Etat.
Mots clé :
Développement durable - Gestion durable
Abstract
This work highlights the
contribution that management respects the requirements of sustainable
development (social solidarity, economic efficiency, environmental and
intercultural responsibilities) can contribute to the optimization potential of
cocoa in Cameroon activity and suggests ways to borrow and the means to
implement to promote this emergence. Our study
shows that, in an international environment dominated by unbridled speculation
and internal context marked by the liberalization of the economy arising from
globalization and the means of slimming the welfare state, the activity in
cocoa Cameroon is characterized, despite the optimistic figures of increased
production (220 000 tonnes in 2011) by the continuous decay committed to
abandoning certain if the overhaul of its management does not occur in the
short term.
This is the necessary condition
for the affirmation of this sector as well as the development that would result
both for farmers, local development and national welfare through the
consolidation of its contribution in the state budget.
Keywords: Sustainable Development -
Sustainable Management
Sommaire
Remerciements i
Résumé ii
Abstract iii
Sommaire iv
Introduction Générale 1
Ière PARTIE :
PRESENTATION GENERALE DE L'ACTIVITE CACAOYERE DANS LE BASSIN DE LA LEKIE
15
Chapitre 1 : L'historique de l'activité
cacaoyère et la présentation de ses potentialités 16
Section 1 : L'historique de l'activité cacaoyère
dans la Lékié 16
Section 2 : Les potentialités de l'activité
cacaoyère dans le bassin de la Lékié 27
Chapitre 2 : Les entraves ou pesanteurs à la
gestion durable de la cacaoculture dans la Lékié 34
Section 1 : Les facteurs endogènes structurant la
gestion non durable de la cacaoculture dans la
Lékié ....................................................................................................
34
Section 2 : Les facteurs exogènes de blocage de la
gestion durable de la cacaoculture dans la Lékié 38
Ième PARTIE : LE CADRE GENERAL
D'EXPERIMENTATION D'UNE GESTION DURABLE DE L'ECONOMIE CACAOYERE DANS LA LEKIE
43
Chapitre 1 : Les considérations théoriques
sur la gestion durable de l'activité cacaoyère dans le bassin de
production de la Lékié 44
Section 1 : L'intégration et la promotion du concept de
durabilité dans le management des politiques agricoles au Cameroun 44
Section 2 : L'analyse profonde de la question des prix et
de la réglementation en vigueur ainsi que le nécessaire
renforcement de la promotion de certains ingrédients de socialisme dans
la donne
libérale ..........................................................................................47
Chapitre 2 : Quelques propositions pour une gestion durable de
l'activité cacaoyère dans la Lékié 53
Section 1 : La rationalisation de l'action de l'Etat dans la
filière cacao 53
Section 2 : L'indispensable structuration du monde rural
58
Conclusion Générale 66
Bibliographie 67
Annexes 69
Questionnaire administré 69
Liste des acronymes 70
Cartes de localisation de la Lékié 71
INTRODUCTION GENERALE
CONTEXTE ET JUSTIFICATION
Tout dans le profil géophysique du Cameroun1(*) dresse, au final, le portrait
d'un pays à vocation agricole. Les 3/4 du territoire se trouvent en
effet à l'intérieur de la fameuse zone équatoriale
africaine couverte de forêt dense abondamment arrosée de
précipitations fréquentes. Elle est traversée par de
nombreux cours d'eau (le Nyong, la Sanaga, le Ntem, le Mbam, la Sanaga, la
Boumba, la Ngoko...). Même dans la zone soudano-sahélienne, des
cours d'eau généreux (la Bénoué, le Logone, le
Chari...) arrosent à suffisance les territoires traversés.
L'on observe aussi une variété de climats,
des sols et des paysages où alternent montagnes (Le Mont Cameroun est un
volcan actif),vallées, falaises, plaines et plateaux, forêts et
savanes. Ceci prédispose avantageusement le pays à une
diversité de choix et à un large éventail d'options pour
l'agriculture, dont il a fait le moteur de son développement.
Souveraine et généreuse, la nature a fait
converger en ce pays de 475 000 km2 et 20 millions d'habitants, de
nombreux facteurs propices aux pratiques d'une activité agricole riche
et porteuse de prospérité. L'on comprend, dès lors,
pourquoi le choix de l'agriculture a pu s'imposer, sans difficulté, aux
autorités du pays dès avant l'indépendance ; et
pourquoi il a été réaffirmé depuis lors au fil des
années par les plus hauts responsables de l'Etat, qui ne cessent de
réitérer leur détermination résolue, de faire du
secteur agricole le poumon de l'activité économique nationale. A
ce sujet, dans son ouvrage de référence, Pour le
libéralisme communautaire, le Président Paul
BIYA souligne avec force : « L'agriculture priorité
de nos priorités, conserve sa place centrale dans notre stratégie
de développement, car nous ne perdons pas de vue que quatre-vingt pour
cent de nos populations vivent encore dans les campagnes »2(*).
De manière chiffrée, le secteur agricole
occupe 60% de la population active. Il contribue à hauteur de 40% au PIB
et participe pour 15% aux recettes de l'Etat.
Structuré depuis l'époque coloniale en
agriculture de traite destinée à l'exportation et donc,
pourvoyeuse de revenus importants ; et celle vivrière
destinée majoritairement à l'autosuffisance alimentaire, le
secteur agricole camerounais est porté par plusieurs filières au
rang desquelles le cacao occupe une place de choix. Car sur les près de
40% de contribution que fournit le secteur agricole au PIB national, le cacao
seul participe à hauteur de 13%, ce qui représente 25% en valeur
totale des exportations.
Avec à peu près 300 000 hectares de
vergers cacao sur son territoire et une production annuelle de 220 000
tonnes en 2011, le Cameroun reste le cinquième pays producteur mondial
de cacao pour une valeur de 5,6 % de la production mondiale. On y
dénombre une population globale de 600 000 producteurs de cacao. Cette
activité fait vivre directement et indirectement 6 à 8 millions
de personnes, selon les statistiques officielles de l'Etat du Cameroun
rapportées par le MINEPAT dans le Document de Stratégie de la
Croissance et de l'Emploi en 2009. Le cours mondial du cacao oscille entre
700 et 1400 frs CFA depuis 2005.
Plante d'origine latino américaine,
scientifiquement appelée théobroma cacao, le cacaoyer fut
introduit dès le 15ème siècle en Europe par
les Espagnols, qui arrivaient alors du Mexique3(*). Le cacao ne s'implante au Cameroun que dans les
dernières années du 19ème siècle (en
1887), en même temps que se développait la colonisation allemande
à l'aune de la politique des grandes plantations. Les premières
cabosses furent importées en 1892 et les premières plantations
voient le jour sur les pentes du mont Cameroun.
A cette époque, la cacaoculture était une
activité très encadrée et contrôlée. Pour
l'exercer, des certificats et des autorisations spécifiques
étaient exigés au préalable. Le transfert des fèves
hors des localités des plantations était strictement interdit aux
travailleurs nationaux, sous peine de sanctions exemplaires. Ce n'est
alors que de manière tout à fait illégale, notamment par
vol et à leurs risques et périls, que les travailleurs
camerounais desdites plantations réussiront à dérober
quelques fèves aux fins d'introduire la cacao culture dans leurs
villages d'origine.
Il faudra attendre les années 1924-1925 pour voir
la culture du cacao se propager en milieu camerounais, encouragée (et
parfois imposée) par la nouvelle administration coloniale
franco-britannique. Une fois devenu souverain du fait de son accession à
l'indépendance en 1960, le jeune Etat veillera à soutenir et
promouvoir l'engouement pour cette activité par le biais de sa politique
de plans quinquennaux de développement qu'il initie de 1961 à
1985.
La cacaoculture au Cameroun se localise dans les
régions du Sud-ouest, de l'Ouest, du Littoral, du Centre, du Sud et de
l'Est qui, du fait de leurs potentialités géophysiques favorables
à cette culture, constituent ainsi les bassins nationaux de
production.
La Région du Centre4(*) est, au regard des statistiques officielles du
MINCOMMERCE, MINEPAT et MINADER, le premier bassin de production au plan
national pour une valeur d'environ 50 % de la production nationale : le
département du Mbam et Kim viendrait en tête, suivi de celui de la
Lékié.
Le département de la Lékié5(*) sur lequel se focalise notre
étude, a pour chef-lieu Monatélé. Il est situé
à l'ouest de la région du centre ; à peu près
au Nord du 4è parallèle de l'équateur.
Ce département s'étale sur une superficie de
2989 Km2 et comporte environ 700 villages et 08 arrondissements, à
savoir Obala, Batchenga, Elig-Mfomo, Evodoula, Monatélé, Okola,
Sa'à et Lobo. Sa population dynamique, d'environ 500 000 habitants, se
caractérise par sa sédentarisation et une occupation optimale de
l'espace, ce qui se traduit par une des plus fortes densités du pays
(environ 100 à 500 hbts/km2).
Le département de la Lékié est
traversé par plusieurs cours d'eau, dont le fleuve Sanaga au nord, qui
sert non seulement de frontière avec le département du Mbam, mais
contribue en plus à conforter et diversifier l'économie locale en
en faisant à la fois le principal bassin de production du sable pour les
bâtiments et travaux publics du pays et un important pôle de
production de denrées alimentaires (tomates, bananes-plantains, poissons
d'eau douce ...).
A coté de ce fleuve mythique, on relève
également la présence d'autres cours d'eau, à l'instar de
la Lékié qui donne d'ailleurs son nom à ce
département, l'Afamba, Ngobo...
Les sols, rouges et jaunes, riches en fer, reçoivent
une moyenne de 1.300 à 1.500 millimètres de précipitations
annuelles. Ce qui conforte la vocation agricole de ce département.
A l'heure de la relance de la filière cacao,
initiée depuis 2005 par le Ministère de l'Agriculture et du
Développement Rural et conduite par la Société de
Développement du Cacao (SODECAO), le département de la
Lékié avec une population agricole à 95 %, selon les
propos de M. Jérôme MVONDO, Directeur Général de la
SODECAO, « est une chance pour le cacao ». C'est
la base sur laquelle va reposer la nouvelle et très ambitieuse politique
de relance sus évoquée, d'où l'intérêt de
notre thématique.
DELIMITATION DU SUJET
Considérée comme l'une des activités
les plus porteuses de l'économie nationale, et de celle agricole de
manière précise, la cacaoculture se déroule à plus
de 80% dans les zones rurales. Le bassin de production de la
Lékié, cadre spatial de notre étude, nous plonge dans l'un
des principaux bassins de production de la Région du Centre dans lequel
les efforts et le dynamisme des producteurs de cacao attendent toujours
d'être véritablement gratifiés et rentabilisés.
A la suite des organismes internationaux de
coopération au développement à l'instar du PNUD (Programme
des Nations Unies pour le Développement) qui pensent qu'en Afrique, pour
atteindre les objectifs de développement, il est impératif
d'élaborer et d'appliquer des stratégies efficaces de lutte
contre la pauvreté et de promotion de la bonne
gouvernance ; l'exposé du volet agricole de la
politique étrangère des Etats unis, par son Excellence Robert P.
JACKSON à Yaoundé le 20 juillet 2012 à l'occasion du
lancement au Cameroun du Programme Initiative pour la Promotion de la
Filière Cacao en Afrique révèle que, pour
prospérer, le secteur agricole en Afrique a besoin d'un soutien qui va
largement au-delà de l'aide étrangère, et intègre
à la fois des investissements nationaux et étrangers
publics-privés ; l'amélioration des infrastructures et de
l'accès aux capitaux ; l'intégration régionale ;
un commerce transfrontalier débarrassé de barrières ;
l'accès aux intrants à des prix abordables ; un
environnement des affaires apportant des garanties aux investisseurs et
soucieux du bien-être des petits producteurs. L'appropriation
contextuelle de cette exigence fondamentale est le fil d'Ariane de notre
étude qui couvre temporellement la période 1990-2012.
CLARIFICATION DES CONCEPTS
1. L'économie :
Le doyen Georges KOBOU6(*) l'appréhende sommairement comme l'ensemble des
activités d'une collectivité humaine relative à la
production, à la distribution et à la consommation des richesses.
Il précise par ailleurs que l'économie
libérale ou économie de marché
est un système qui repose sur les mécanismes de marché ou
sur les principes du libre jeu de l'offre et de la demande et limite
l'intervention de l'Etat.
Par déduction, l'économie
cacaoyère est l'ensemble des activités d'une
collectivité humaine relatives à la production, à la
distribution, à la transformation et à la consommation du
cacao.
L'économie sociale et solidaire
pour sa part est à la lumière des éclairages de
l'économiste Jacques DEFOURNY7(*), l'ensemble des activités et des services de
proximité assurés par les associations, les coopératives
et les mutuelles et ayant pour but de réduire l'exclusion et de
contribuer à la cohésion sociale.
2. Le développement durable :
Le développement s'appréhende de
manière littérale comme l'ensemble des différents stades
par lesquels passe une activité, un organisme, un être vivant pour
atteindre sa maturité (croissance).
A la lumière des éclairages de la Wikipedia
Foundation inc. dans son encyclopédie universelle8(*), le développement
économique et social fait référence à l'ensemble
des mutations positives (technique, sociale, démographique,
sanitaire ...) que peut connaitre une zone géographique
(monde ; pays ; localité) à un moment donné.
Pour l'économiste politique guinéen BADA
DIOUBATE, le développement économique et social est un processus
de création de richesses entrainant généralement une
progression du niveau de vie des habitants d'une localité et à
une période données. Et s'il est assimilé au
progrès, il doit cependant être nécessairement
distingué de la simple croissance économique (processus
d'augmentation du niveau de richesses) certes consécutive au
développement mais n'en constituant qu'un aspect. Car le
développement est un concept plus holistique d'où le recours
à d'autres indicateurs en plus du Produit Intérieur Brut (PIB)
pour le mesurer à l'instar de l'Indice de Développement Humain
(IDH), de l'Indice du Bonheur National Brut (BNB), de l'Indice de
Pauvreté (IP) pour le cerner convenablement. En somme, le
développement économique est l'amélioration qualitative
durable d'une économie et de son fonctionnement.
Le développement durable est
selon le rapport Brundtland de 1987 de la Commission des Nations Unies pour
l'environnement, la capacité pour les générations
présentes de satisfaire leurs besoins sans toutefois compromettre les
chances des générations futures à satisfaire les leurs.
Dans ses travaux sur le développement durable9(*), le professeur ESOH ELAME
déplie les origines du développement durable, qu'il situe
temporellement autour des années 1987-1992, et le définit
à l'aune du Rapport Brundtland de la Commission des Nations Unies pour
l'environnement de 1987, comme un développement axé sur la
capacité des générations présentes à
satisfaire leurs besoins, sans toutefois compromettre celle des
générations futures à satisfaire les leurs. Le professeur
ESOH ELAME poursuit en relevant qu'il s'agit d'un développement qui
repose sur quatre piliers fondamentaux que sont :
· La solidarité sociale
· La responsabilité écologique
· L'efficacité économique
· La responsabilité culturelle.
Dans sa conclusion, il fait abondamment
référence aux travaux du chercheur français Ignacy
SACHS10(*)qui expose les
conditions et les principes de la durabilité de toute entreprise
développementaliste.
En effet, en reprenant l'analyse fondamentale du concept
d'écodéveloppement, Ignacy SACHS le définit comme une
opportunité extraordinaire de concilier le développement et
l'environnement, vus comme indissociables l'un de l'autre. Le chercheur
français expose alors cinq conditions de la durabilité dans la
planification du développement qui sont : les dimensions sociale,
économique, écologique, spatiale et culturelle. Ainsi :
· La durabilité sociale se rapporte à plus
de justice et d'équité entre les membres d'une
société, à une meilleure définition de
l'intérêt général, la recherche du bien-être
et une meilleure répartition des retombées de la croissance.
· La durabilité économique pour sa part, se
rapporte à une gestion efficace et une répartition plus
équitable des ressources et flux constants d'investissements publics et
privés dans la société. Elle interpelle les questions de
prix, de dette, des termes d'échanges commerciaux internationaux,
très défavorables à bien des égards pour les Etats
du Sud.
3. La gestion durable :
Le mot gestion indique l'action d'administrer, de diriger,
d'organiser selon le dictionnaire Larousse 2010. Dans le contexte de
l'économie cacaoyère, c'est l'ensemble des normes et pratiques
qui s'appliquent à l'activité cacaoyère.
Précisée depuis 1992 par des
conférences internationales, la gestion durable est selon la loi
d'orientation forestière de la République française de
2001, celle qui garantit la diversité biologique, la capacité de
régénération, la vitalité et la capacité
d'une activité ou d'une ressource à satisfaire actuellement et
pour l'avenir les fonctions économique, écologique et sociale
pertinentes aux niveau local, national et international sans causer de
préjudices à d'autres écosystèmes. Et suivant, le
rapport de la Food and Agriculture Organisation (FAO) de 200811(*) ; la gestion durable vise
à garantir que les biens et services procurés répondent
aux besoins d'aujourd'hui tout en s'assurant la continuité de leur
disponibilité et de leur contribution à long terme.
Et suivant la Fondation Allemande pour le
Développement Internationale dans son Rapport du Cours international sur
l'Organisation et Gestion de Coopératives et d'autres Organisations
d'Autopromotion, 1987, la gestion durable est une manière d'administrer
empreinte des piliers et principes du développement durable et se
caractérisant notamment par des exigences directrices d'analyse
participative, de planification, et d'évaluation.
De même, la lecture de l'article 4 de la loi cadre
relative à la gestion de l'environnement au Cameroun de 1996, la gestion
durable vise à promouvoir une organisation et utilisation rationnelles
des ressources des domaines forestiers, fauniques, fluvial, et maritime en vue
d'augmenter considérablement leur contribution au développement
économique, social, culturel et scientifique du pays.
4. Le bassin de production :
Armand COLIN12(*)le définit comme une zone géographique
bien déterminée au sein de laquelle se développe une
activité agricole.
5. La filière agricole :
Le Professeur Georges KOBOU, enseignant d'économie
à l'université de Yaoundé 2 l'appréhende comme
l'ensemble des activités et d'industries relatives à un produit
de base.
L'INTERET DU SUJET
L'exploration de notre thématique présente un
triple intérêt:
1. L'intérêt heuristique :
Notre étude ambitionne d'apporter une modeste
contribution à une meilleure compréhension des enjeux, des
dynamiques et des perspectives du développement durable dont est
potentiellement porteuse l'activité cacaoyère dans notre
pays.
2. L'intérêt politique :
Notre étude se propose d'aider les acteurs
politiques et praticiens du développement à mieux s'outiller pour
une formulation, la mise en oeuvre et l'évaluation adéquates des
politiques publiques de développement en général et celles
agricoles en particulier.
3. L'intérêt socio-économique :
Notre étude voudrait conforter la solidarité
sociale nationale, en raffermissant la motivation des acteurs de la
cacaoculture, à travers des propositions captivantes, afin qu'ils
continuent de trouver un intérêt pertinent pour le
développement de l'agriculture en général et la
cacaoculture en particulier et de dynamiser l'efficacité
économique de la filière cacao, afin de lui garantir une plus
grande productivité et une forte rentabilité.
LES LIMITES DE L'ETUDE
Nous reconnaissons des limites à notre
travail :
Au plan géographique, nous n'avons
pas pu étendre la recherche sur l'ensemble des bassins de production du
cacao pour des contraintes de temps d'une part, et en raison d'une surface
financière très compressée, ainsi que des moyens
logistiques insuffisants d'autre part.
Au plan scientifique, l'approche
historico-fonctionnelle pour laquelle nous avons opté nous imposait un
cadrage méthodologique précis à suivre pour une
exploration optimale de notre thématique.
Dans cette perspective, la non disponibilité d'une
bibliographie suffisamment documentée ne nous a point permis de mieux
étoffer et de donner à notre travail, toute la consistance
souhaitable.
ETAT DE LA QUESTION
La gestion durable de l'agriculture en
général et de la filière cacao en particulier, s'impose
comme une nécessité, étant donné le rôle
primordial que l'agriculture a toujours joué dans le
développement de l'économie camerounaise. Gérer
durablement la filière cacao dans le bassin de production de la
Lékié est indispensable, si l'on veut offrir au producteur de
cacao la possibilité de se libérer du joug de la misère et
de la pauvreté, grâce au juste bénéfice des fruits
de son labeur. Il en va des producteurs comme des bassins de production, qui
pourront enfin améliorer leur cadre de vie.
Le sociologue américain Robert CHAMBERS13(*), part du constat que les zones
rurales, que ce soit dans les pays du nord que ceux du sud, sont les plus
démunies et les plus défavorisées, avec un cadre et des
conditions de vie précaires, qui confèrent un visage multiple
à la pauvreté rurale. Il évalue les différentes
démarches jusque-là implémentées par l'Etat et les
praticiens du développement, pour
« améliorer » le sort des zones rurales, et aboutit
à la conclusion qu'elles pêchent toutes par la non
intégration et la non systématisation d'une approche
participative dans l'élaboration, la mise en oeuvre et
l'évaluation des politiques de développement. En guise
d'amélioration, il propose d'une part, que les décideurs et les
praticiens intègrent et systématisent l'approche participative en
« re »-mettant les populations locales au centre de leurs
travaux, et d'autre part que l'encadrement juridique de ces activités
soit amélioré.
Jules DURUFLE14(*) met en évidence les circonstances d'adoption
des Programmes d'Ajustement Structurels (PAS) par les Etats d'Afrique
(Sénégal, Côte d'Ivoire, Madagascar) et leur impact sur le
développement socio-économique desdits Etats, notamment :
· le relèvement des prix des produits
vivriers ;
· la vulnérabilité des producteurs
directement exposés aux variations des cours mondiaux ;
· la diminution des subventions à
l'activité agricole (intrants, salaires) ;
· les systèmes de compensation et de subvention
agricole déguisés par les pays du Nord ;
· l'extraversion de l'économie et l'endettement
croissant.
Pour ce qui est spécifiquement de l'agriculture,
l'auteur propose une rationalisation des prix, pour garantir une montée
en puissance de la croissance économique globale et de la production
agricole, ainsi qu'un encadrement étatique rationnel de
l'activité agricole.
Sur la même thématique, le chercheur
Camerounais Jean Marc ELA15(*), dénonce la
marginalisation accentuée du monde rural par l'appareil gouvernemental.
Marginalisation qui se caractérise par la politisation de la question
agricole, qui confère un large éventail d'avantages à
l'élite dirigeante, laissant l'agriculteur abandonné à son
propre sort, par une absence criarde d'encadrement et de subventionnement
adéquats de l'activité agricole.
Par la suite, l'auteur dénonce sans ambages, le
paradoxe de la dégradation incessante du cadre et des conditions de vie
des paysans, alors même que l'agriculture contribue toujours
remarquablement au financement du fonctionnement de l'Etat et à
l'entretien de ses agents ; preuves que les paysans ne tirent toujours pas
judicieusement ou équitablement profit des prix des produits agricoles
sur les marchés mondiaux, et que les ressources accumulées dans
les offices de commercialisation sont utilisées à des
investissements qui ne portent pas réellement sur les
préoccupations d'épanouissement et d'émancipation du monde
rural.
Pour remédier à cet état de fait, le
sociologue camerounais propose de réévaluer et de
redéfinir la relation Etat-société ou Etat-paysannerie,
qui doit être encore fondée sur une intégration des paysans
via une approche participative dans la formulation, la mise en oeuvre et
l'évaluation des politiques de développement; et un encadrement
voire un accompagnement adéquat, propice à leur
responsabilisation, aux fins d'un meilleur accès aux
bénéfices des fruits de la production.
Ce sont ces mêmes idées qu'il expose dans
l'ouvrage intitulé l'Afrique des
villages, Edition Karthala paru en
1981.
Le Professeur Wilfred AWUNG NDONGKO16(*) agroéconomiste
camerounais, explore la thématique fondamentale du développement
économique des Etats en général, et ceux du tiers monde,
dont le Cameroun en particulier. Il pose précisément le
problème de l'absence de coordination entre la recherche en sciences
sociales et la formulation des politiques de développement au Cameroun
qui, de ce fait néglige la contribution inestimable de la recherche dans
l'accélération du développement socio-économique
d'un pays. Il poursuit son exposé par l'analyse, d'une part, du Code des
Investissements du Cameroun, qu'il propose d'ailleurs de réformer eu
égard aux problèmes de transfert de technologie, d'assistance
technique et de transfert de fonds ou le rapatriement des
bénéfices que ledit code pose, et d'autre part, celle des
relations entre le gouvernement, les hommes d'affaires nationaux et
étrangers avec en toile de fond, une présentation sommaire de
l'économie camerounaise dans sa structure et ses principes.
Enfin, le Professeur TOUNA MAMA17(*), économiste et
conseiller spécial du Premier Ministre de la République du
Cameroun, scanne le potentiel économique de l'Etat camerounais et
indique des pré-requis pour son développement. Il y
démontre en effet que les politiques de planification abandonnées
suite à la période de crise de 1986-1987 n'ont pas atteint leurs
objectifs d'où l'utilité de revenir à une logique à
la fois réaliste et prospective pouvant se traduire en termes de
programmation économique et budgétaire et d accent mis sur la
formation des jeunes et la création d'emplois points d'ancrage
véritables d'un développement à la fois quantitatif et
qualitatif de notre pays.
PROBLEMATIQUE
Le fait que la gestion de la filière cacao au
Cameroun, avant et après les indépendances, avec son arrimage
à la donne de la libéralisation, se soit accompagnée d'une
paupérisation toujours plus grandissante des zones rurales en
général, et des bassins de production du cacao dont celui de la
Lékié en particulier, convie à s'appesantir sur :
Comment faire pour que la culture du cacao pose enfin les bases et les
conditions d'un véritable épanouissement
socio-économique, par l'amélioration du cadre de vie des
populations de l'un des plus grands bassins de production de la Région
du Centre du Cameroun qu' est la Lekié ?
En d'autres termes, comment expliquer que le cadre et les
conditions de vie des producteurs de cacao et même des populations de
cette zone se soient davantage dégradés ou alors n'aient toujours
pas connu d'améliorations substantielles, relativement à leur
engagement indéfectible dans cette activité, alors même que
la libéralisation survenue dans la décennie 1990 augurait des
perspectives et des lendemains meilleurs ?
De même, Etats et producteurs de cacao sont-ils
comptables au même degré, de cet état de
régression ? Sinon, qu'elle est la responsabilité de l'Etat
à qui incombe la mission de formuler les politiques agricoles, de
protéger le producteur de cacao, d'assurer son encadrement et
l'éclosion des zones rurales ou agricoles?
Ou tout simplement, doit-on continuer de cultiver le cacao en
comptant sur l'Etat ?
Ce questionnement exigee des réponses qui doivent
être trouvées et formulées dans le cadre des
hypothèses du présent travail.
LES HYPOTHESES ET LES OBJECTIFS DE L'ETUDE
LES HYPOTHESES
Nous proposons dans la présente analyse de
vérifier les hypothèses suivantes :
1- La gestion libérale de la filière cacao dans
sa structuration et son fonctionnement actuels, n'est pas de nature à
permettre et conforter l'essor de l'activité cacaoyère dans la
Lékié, car elle comporte, dans sa conception et sa mise en
oeuvre, des carences et des contradictions que la gouvernance nationale et
certains agissements des cultivateurs de cacao contribuent à
accentuer.
2- D'où la nécessité de concevoir un
cadre novateur de sa gestion imprégnée fondamentalement des
exigences de développement durable, synonyme d'épanouissement des
populations de ce bassin de production.
LES OBJECTIFS
Notre travail s'attèlera à :
1- rendre compte de l'évolution de l'activité
cacaoyère dans le bassin de la Lekié, depuis l'époque
coloniale à nos jours, ainsi que ses implications dans le
développement socio-économique du Cameroun;
2- relever les carences ou entraves à une gestion
durable de cette activité dans cette zone ;
3- proposer des voies d'amélioration et de
consolidation du développement durable dans la gestion de la
filière c'est-à-dire celle qui motive sans cesse et dont les
générations présentes et futures peuvent tirer profit.
Nous comptons, dès lors, nous intéresser
à la fois aux questions propres aux sciences sociales du pourquoi, et
du comment de la gestion durable ; mais aussi à celles
propres à l'économie du développement notamment, qui
reçoit quoi, comment et pourquoi ; et surtout à celles
concernant les praticiens qui s'articulent autour du comment améliorer,
réaliser ou changer la donne ?
METHODE D'ANALYSE
Pour effectuer ce travail, nous avons opté pour la
méthode historico-fonctionnelle, méthode hybride qui se
revendique à la fois de l'histoire (Léon POLIAKOV) et de la
sociologie (Talcott PARSONS) et se traduit par une mise en relation des faits
(historiques ou sociaux) dans l'optique d'appréhender ou
d'apprécier la societé et/ou ses activités à partir
des institutions, leurs processus et résultats, et des comportements
individuels à travers les rôles et les statuts qui s'en
dégagent.
Notre option pour cette méthode de travail trouve sa
raison d'être dans la perspective interdisciplinaire indispensable
à l'analyse et à la compréhension des questions de
développement dans lesquelles se positionne par ailleurs notre
thème, en plus de ce qu'elle nous a paru simple de compréhension,
démonstrative, subtile et diachronique sur le
sillon de la rigueur et l'objectivité au coeur de notre démarche.
TECHNIQUE DE COLLECTE DES DONNEES
Pour réaliser notre travail, les techniques de
recherche auxquelles nous avons eu recours sont :
1- une étude documentaire sur les contours de la
question, notamment sur les bases théoriques, le rôle de l'Etat,
le contexte de l'étude et la mise en exergue de la gestion de la
filière ;
2- des entretiens, à la suite de descentes de terrain,
avec des acteurs de la recherche agricole et les cultivateurs, MINADER,
SODECAO, FODECC, experts de la FAO, du FIDA, etc.
3- ainsi qu'un questionnaire administré (voir annexe)
à certains acteurs de la filière afin de recueillir leurs
éclairages sur des aspects de notre travail.
ARTICULATION DU PLAN
Il s'agit d'une harmonisation des idées ainsi
qu'une cohérence des analyses autour de deux grands axes à
savoir :
Ière PARTIE : PRESENTATION
GENERALE DE L'ACTIVITE CACAOYERE DANS LE BASSIN DE LA LEKIE
Chapitre 1 : L'historique de
l'activité cacaoyère et la présentation de ses
potentialités
Section 1 : L'historique de l'activité
cacaoyère dans la Lékié
Paragraphe 1 : De la période
coloniale à l'indépendance et les lendemains de
l'indépendance
Paragraphe 2 : De 1990 à nos
jours - La période de
libéralisation
Section 2 : Les potentialités de
l'activité cacaoyère dans le bassin de la Lékié
Paragraphe 1 : Les potentialités
naturelles et sociales de l'activité cacaoyère dans la
Lékié
Paragraphe 2 : Les potentialités
économiques
Chapitre 2 : Les entraves ou pesanteurs
à la gestion durable de la cacaoculture dans la Lékié
Section 1 : Les facteurs
endogènes structurant la gestion non durable de la cacaoculture dans la
Lékié
Paragraphe 1 : Les facteurs imputables
à l'acteur étatique
Paragraphe 2 : Les facteurs imputables
au producteur lui-même
Section 2 : Les facteurs exogènes de
blocage de la gestion durable de la cacaoculture dans la Lékié
Paragraphe 1 : Présentation des
controverses de l'Accord de l'OMC sur l'agriculture et les produits agricoles
à l'endroit des Pays en Voie de Développement
Paragraphe 2 : La concurrence
déloyale des grandes puissances agroindustrielles et la
problématique de la pratique des prix
IIème PARTIE : LE CADRE GENERAL
D'EXPERIMENTATION D'UNE GESTION DURABLE DE L'ECONOMIE CACAOYERE DANS LA
LEKIE
Chapitre 1 : Les considérations
théoriques sur la gestion durable de l'activité cacaoyère
dans le bassin de production de la Lékié
Section 1 : L'intégration et la
promotion du concept de durabilité dans le management des politiques
agricoles au Cameroun
Paragraphe 1 : Les conditions et les
exigences de la durabilité
Paragraphe 2 : Les implications de la
gestion durable
Section 2 : L'analyse profonde de la
question des prix et de la réglementation en vigueur ainsi que le
nécessaire renforcement de la promotion de certains ingrédients
de socialisme dans la donne libérale
Paragraphe 1 : Les prix et la loi comme
instruments d'affermissement de l'économie cacaoyère
Paragraphe 2 :
Le nécessaire renforcement de la promotion de certains
ingrédients de socialisme dans la donne libérale
Chapitre 2 : Quelques propositions pour une
gestion durable de l'activité cacaoyère dans la
Lékié
Section 1 : La rationalisation de l'action de
l'Etat dans la filière
Paragraphe 1 : La création d'un
unique organe étatique de gestion de la filière cacao - L'Office
Camerounais de Cacao et du Café (O3C)
Paragraphe 2 : La redynamisation de la
coopération en matière cacaoyère
Section 2 : L'indispensable structuration et
modernisation du monde rural
Paragraphe 1 : Les Fondements et les
finalités de la structuration et la modernisation du monde rural
Paragraphe 2 : Les
modalités de la structuration et la modernisation du monde rural
Ière PARTIE : PRESENTATION GENERALE DE
L'ACTIVITE CACAOYERE DANS LE BASSIN DE PRODUCTION DE LA LEKIE
Situé dans la Région du
Centre et crée en 1964 par Décret présidentiel,
matérialisant ainsi l'éclatement du département du Grand
Mbam, le département de la Lékié, est le deuxième
plus grand bassin de production du cacao de cette Région après
celui du Mbam et Kim.
La Lékié représente 30% de la production
cacaoyère de la Région du Centre, soit approximativement 15 % de
la production nationale (2011) 18(*). Sa population reconnue pour son dynamisme est
constituée à 95% d'agriculteurs.
Ces chiffres témoignent de l'intensité de cette
activité dans cette région et de l'attachement, mieux, du culte
que ses populations semblent lui vouer, en dépit d'une conjoncture pas
toujours encourageante. C'est de ce constat que découle la
nécessité de faire une présentation générale
de l'activité cacaoyère dans la Lékié dans
l'optique de mieux cerner les méandres de l'économie qu'elle
structure, en termes d'exploration des motivations qui la sous-tendent et qui
justifient l'attachement viscéral de ces populations à cette
dernière, de même que les hypothèques qui brident cette
motivation et limitent ses perspectives d'essor.
Ainsi, cette partie envisage t-elle, dans un premier temps
(Chapitre 1), d'exposer l'histoire de l'activité cacaoyère au
Cameroun en général et dans le bassin de production de la
Lékié en particulier ; dans un second temps, elle
présentera les entraves ou pesanteurs à la gestion durable de
l'activité cacaoyère dans la Lékié (Chapitre 2).
Chapitre 1 : L'historique de l'activité
cacaoyère et la présentation des potentialités de la
cacaoculture au Cameroun et dans la Lékié
C'est le lieu ici de présenter la genèse de
l'activité cacaoyère dans la Lékié, son
évolution dans le temps et dans l'espace (Section1), ainsi que ses
potentialités (Section 2).
Section 1 : L'historique de l'activité
cacaoyère dans la Lékié
Comme sus-évoqué à l'introduction, le
cacao, plante d'origine latino américaine fût introduit en Europe
dès le 15ème siècle par les Espagnols. La
promotion de sa culture en Afrique va se faire à la faveur de la
politique impériale européenne, notamment allemande pour ce qui
est du Cameroun. C'est précisément en 1884 que les allemands,
sous la forme d'une économie administrée, favorisent son
enracinement dans certaines régions de notre pays, notamment au
Sud-ouest et dans le Littoral. Mais il faudra attendre la tutelle
franco-britannique pour voir le cacao introduit et promu dans la
Lékié. L'histoire de l'activité cacaoyère dans ce
bassin de production peut s'appréhender en deux segments, à
savoir: le premier segment couvrant la période allant de la colonisation
jusqu'à l'indépendance et les lendemains de l'indépendance
(Paragraphe 1) et qui correspond à la période d'avant la
libéralisation ; ensuite, le second segment, qui marque le
début de l'ère de la libéralisation, c'est-à-dire
du début des années 1990 à nos jours (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : De la période coloniale
à l'indépendance et les lendemains de l'indépendance
Ce paragraphe entend apporter des éléments de
réponses qui éclairent un certain nombre de questions relatives
à la période sus-indiquée.
Point 1 : L'implantation de l'activité
cacaoyère dans le département de la
Lékié
Quand et Comment l'activité cacaoyère s'est-elle
implantée dans la Lékié ?
C'est sous la tutelle française et britannique que
le cacao arrive dans la Lékié dans les années 1919. Les
premières plantations sont alors créées à Mvoa par
Evodoula occupant des superficies moyennes d'un peu plus d'un hectare19(*). La tradition orale
révèle que c'est Michel ATANGANA, installé chez son oncle
ENGAMA ONAMENGUE qui serait le tout premier ressortissant Eton à planter
la fève violette dans la partie Sud de l'arrondissement d'Okola.
Les premières plantations étaient alors
constituées à partir des semences importées du pays Bassa.
L'expansion de cette culture sera ensuite soutenue par des
conditions naturelles ou environnementales (sols, climats...)
généreuses et entretenue par l'installation de nombreux postes
agricoles dont le tout premier à Okola date de 1955, et
consolidée à travers la politique des plans quinquennaux de
développement (1961-1985)
De manière sommaire et souvent très loin des
expressions scientifiques, trois variétés de cacao sont
cultivées dans la Lékié. Ce sont :
- Le Calaba Keka, espèce se reconnaissant à la
forme de ses cabosses arrondies, trapues, de surface quasi lisse.
- Le Lebouak Keka, c'est-à-dire celui qui ressemble au
melon. Scientifiquement dénommée amellorado,
cette variété a des cabosses allongées,
arrondies à la base, la surface étant marquée par de
très légers sillons.
- Le Nkpaman Keka, c'est-à-dire le nouveau cacao. Elle
est peu répandue et est délivrée par l'Institut de
Recherche Agricole pour le Développement (IRAD).
Ses cabosses sont généralement
développées, leur fructification très précoce et
leur maturation très étalée dans l'année. En outre,
elles sont plus rustiques, plus résistantes et plus productives20(*)
Point 2 : L'organisation et le fonctionnement de
l'activité cacaoyère dans la Lékié à cette
période
Quelle était l'organisation de l'activité
cacaoyère dans la Lékié et comment
fonctionnait-elle ?
Il s'agit ici d'élucider deux préoccupations
à savoir: quels étaient les acteurs qui ont mené
l'activité cacaoyère à cette époque dans cette
région? Et quel était leur mode opératoire ?
De manière globale l'activité
cacaoyère avant l'indépendance était pilotée par un
seul acteur, à savoir la puissance coloniale. En effet, les plantations
à l'époque allemande n'appartiennent qu'à l'administration
coloniale et à ses partenaires, majoritairement les grandes firmes
occidentales à l'instar de Jansen et Thormalen purement allemandes et,
celles Grecques et Libano-syriennes telle que Kritikos ; qui mettent
à contribution la main d'oeuvre nationale, voire locale. Cette main
d'oeuvre, corvéable, ne bénéficie d'aucun statut. Cette
époque, convient-il de le rappeler, constitue l'apogée de la
politique de l'indigénat, véritable esclavage sous les tropiques
consistant à capturer, dans les villages, de jeunes adultes qu'on
enrôlait de force dans divers chantiers pour utiliser de manière
gratuite leur force de travail21(*) . Il y a lieu de signaler que la
totalité de la production était rapatriée vers les
métropoles occidentales.
La période tutélaire franco-britannique,
1920-1957, sera caractérisée par une relative expansion de la
cacaoculture. La puissance coloniale franco-britannique ayant pris l'heureuse
initiative d'encourager les populations à créer des plantations.
La promotion de la culture du cacao rencontre un succès dans les
bassins de production que nous connaissons aujourd'hui. Contrairement à
la puissance impériale, l'Etat, devenu souverain, va consolider cet
état de fait dans la mise en branle de sa politique des plans
quinquennaux de développement. Il s'octroie alors la
responsabilité d'encadrer et d'accompagner à titre non
onéreux, le planteur, désormais propriétaire de sa
plantation et pouvant dès lors jouir des fruits de la production.
Pour des besoins d'efficacité, l'Etat scinde sa
mission d'encadrement en deux volets. D'un coté, un volet d'encadrement
purement technique, se rapportant globalement à la fourniture des plants
et l'entretien des plantations ; l'objectif visé est de garantir la
qualité du produit. Ce volet est assumé par les Services de
l'Agriculture, créés en 1952, qui se déploient à
travers le SEMCENTRE (Secteur de Modernisation de la région du Centre
-Sud) qui, lui-même s'est substitué au SEMAC (Secteur
Expérimental de Modernisation des Cacaoyères) créé
en 1953-1954 avec pour mission principale d'encadrer au travers d'appuis
logistiques, techniques et financiers, les producteurs en vue de la
vulgarisation et la promotion de cette activité22(*).
Ce programme va disparaitre à la faveur d'une part, de
la mutation des Services de l'Agriculture en Ministère de l'Agriculture
en 1972, d'autre part, suite à la création de la
Société de Développement du Cacao (SODECAO) en 1974.
Comme son nom l'indique, la SODECAO (Société de
Développement du Cacao) est directement érigée en moteur
de la promotion et l'essor de la cacaoculture sur le territoire du Cameroun
oriental dont fait partie la Lékié. Elle est une
société dite d'Etat, mieux encore, une entreprise parapublique
tel que le stipule clairement son décret de création23(*), ainsi que son statut. Elle a
alors pour missions de fournir à suffisance (quantité et
qualité), le matériel végétal aux potentiels
producteurs de cacao de son territoire de compétence et d'encadrer
techniquement ces derniers dans l'exercice de cette activité (la
cacaoculture). De plus, elle est appelée à faciliter la collecte
et la commercialisation des fèves de cacao en contribuant, par
ailleurs, au désenclavement des zones rurales à travers un
important programme d'entretien des pistes de collecte.
Le nouvel Etat souverain va opérer une grande mutation
au volet accompagnement commercial et financier assuré jusque là
par la Caisse de Stabilisation (Caiss Stab) créée en 1955, dont
la mission était de garantir le prix d'achat du cacao au planteur afin
de le protéger des fluctuations du marché mondial24(*).
Dans son action, la « Caiss Stab »
était aidée par le concours en aval des sociétés
coopératives dont la première expérience remonte en 1926
avec l'institution des Sociétés Indigènes de
Prévoyance (SIP) qui, avec le slogan 100 000 tonnes de production,
conduira à l'expansion de ce mouvement.
Par la suite, la Caisse de Stabilisation sera remplacée
par l'ONCPB (Office National de Commercialisation des Produits de Base)
créé en 1978, et dont le fonctionnement sera basé sur un
système de compensation et de mise à disposition de micro
financements ou microcrédits, alimenté par les ressources
provenant essentiellement d'un système de taxations à
l'exportation. A titre indicatif, une étude de JANIN Pierre 25(*) sur la libéralisation
agricole au Cameroun révèle que, entre 1979 et 1988, l'ONCPB a
prélevé 375 milliards de FCFA, dont 220 milliards pour la seule
filière cacao. Concrètement, ONCPB se finance par le
différenciel de l'écart entre le prix versé aux
producteurs et le prix obtenu à l'exportation (prix du marché
mondial). En schématisant, s'agissant du cacao à commercialiser,
le rôle de l'ONCPB consiste à centraliser l'offre camerounaise de
cacao et à négocier la vente au meilleur prix. L'ONCPB fixait
alors un prix d'achat national du cacao aux producteurs alors constitués
en coopératives, et celles-ci étaient tenues de le respecter sous
peine de sanctions.
S'agissant du planteur, il s'organise à la fois
individuellement et collectivement.
Individuellement, il s'attelle à mener seul son
activité partant de la création, passant par l'entretien
jusqu'à la commercialisation du cacao.
Cependant, même si l'initiative de créer la
plantation lui revient individuellement, la nécessité de
s'associer aux autres producteurs, pour rendre plus efficaces l'entretien et la
commercialisation se fait de plus en plus sentir, d'où
l'intérêt pour le regroupement en GIC et en
coopératives.
En effet, le mouvement d'expansion de l'expérience
coopérative sus-évoquée va, dans un premier temps, convier
à la création des Comités Villageois de Défense du
Cacao, et dans un second temps, il aboutira à la transformation de ces
derniers en Groupement d'Agriculteurs Modernes (GAM) et en Zone Agricole de
Production Intensive (ZAPI) de 1963 à 1970.
Dans l'optique d'un meilleur contrôle de la
qualité du cacao et de la facilitation de sa commercialisation,
l'autorité gouvernementale du Cameroun va instituer en 1957, des Centres
de Groupage de Cacao, à l'instar de ceux de Mvoua I et II, ou d'Ebanga,
Nkonabeng à Okola. Elle va également faciliter la création
de Sociétés Coopératives comme la Société
Coopérative des Planteurs d'Okola (SOCOPO) en 1979 et la
Société Coopérative des agriculteurs d'Obala dans la
même période.
Paragraphe 2 : De 1990 à nos jours - La
période de libéralisation
De manière sommaire, c'est
l'avènement des Programmes d'Ajustement Structurel (PAS) à l'aube
des années 1990 qui a donné un coup d'accélérateur
à la libéralisation et privatisation des activités
économiques au Cameroun. Celle-ci est encadrée par la loi
N°-90/031 du 10 août 1990 régissant l'activité
commerciale, dans le secteur agricole et notamment des cultures pérennes
dont le cacao. La libéralisation totale est devenue effective à
partir de 1995. La libéralisation de la filière cacao est
normativement régie par la loi N°- 95/11 modifiée et
complétée par celle N°- 2004/025 portant organisation du
commerce du cacao et du café et ses décrets et
arrêtés d'application26(*).
Point 1 : Le contexte et la signification de la
libéralisation
Que signifie la libéralisation ? Qu'est ce qui
l'introduit et qu'induit-elle ?
La libéralisation se structure autour de la
théorie des avantages comparatifs énoncée par
l'économiste David RICARDO en 1817 dans ses « Principes de
l'économie politique et de l'impôt » ;
théorie qui signifie que tout pays à intérêt au
libre-échange, même s'il n'a davantage absolu nulle part, ou
même s'il en a partout. Car il faut savoir renoncer à ses
avantages les plus faibles pour tirer profit des plus forts. Dans cette
optique, la libéralisation agricole se présente comme
décisive pour le développement des Etats car ses effets sont de
nature à conforter le poids ou la valeur de l'agriculture dans les
économies nationale et mondiale et à créer des dynamiques
qui entraineraient les secteurs non agricole. Effective en Europe et aux Etats
unis depuis fort longtemps, la libéralisation ne deviendra une pratique
africaine véritable que dès 1990.
En effet, depuis les années 1980, une cascade de
dysfonctionnements dans le système économique et financier
international : crise financière internationale, chute des cours
des matières premières (pétrole, café, cacao,
hévéa, coton...) et crise de l'endettement aux
répercutions profondes sur la santé économique du Cameroun
en particulier et ses perspectives de développement en
général (endettement exponentiel, balance commerciale et
budget déficitaires, baisse drastique des salaires des fonctionnaires,
et dans une certaine mesure, dévaluation du FCFA ... ), entraine la
mise en place de reformes structurelles de manière globale et le
démantèlement de l'organisation des filières d'exportation
(café et cacao) pour ce qui est de l'agriculture en particulier,
ceci, dans le cadre des accords avec le Fonds Monétaire International
(FMI). C'est sur ces décombres du tissu économique que vont
naître et s'édifier les Programmes d'Ajustement Structurel (PAS)
mis en branle par le biais de deux concepts opératoires à
savoir : la libéralisation et la privatisation.
La privatisation repose sur le postulat de la
rationalité des décisions privées, alors que la
libéralisation relève d'un élargissement de cette
dernière à l'ouverture du pays aux échanges
extérieurs.
Techniquement, les PAS à la faveur desquels la
libéralisation est introduite, promue et intensifiée par la
privatisation, visent à rétablir les grands équilibres
macro-économiques du pays par l'assainissement des finances publiques et
la libéralisation du marché27(*).
Encouragée par un préjugé favorable qui
la dit sage, la logique des PAS dans le secteur agricole, commande à
l'Etat du Cameroun de ne plus intervenir directement dans l'encadrement
technique et au niveau de la commercialisation des produits, notamment pour ce
qui relève de la fixation du prix au producteur ; le marché
devant s'autoréguler. La Caisse de Stabilisation, structure de garantie
du prix d'achat aux producteurs est alors dissoute en 1990. L'ère de la
libéralisation s'enclenche.
Elle induit une responsabilisation plus accrue des acteurs,
et une promotion de l'esprit d'entreprise. Elle se traduit concrètement
dans le domaine de l'agriculture, par une suppression globale des
subventions ; plus question d'octroi des intrants et des produits
phytosanitaires aux producteurs. Adoption d'un système de prix flexible
aux producteurs, qui bien que se référant aux prix
pratiqués sur le marché international, est calculé sur des
bases économiques censées plus réalistes (coût de
production, de conditionnement et acheminement, frais d'analyse de
qualité et d'emballage).
A cette logique nouvelle correspondent désormais
une organisation et un fonctionnement spécifiques.
Point 2 : L'organisation et le fonctionnement de
la filière cacao à l'ère libérale
La filière cacao à l'ère
libérale s'organise globalement autour de trois acteurs : l'Etat et
ses partenaires, le producteur et l'acheteur.
L'Etat n'est désormais plus un acteur au sens
littéral du terme, mais un régulateur dont le rôle, sous la
houlette du Ministère de l'Agriculture, reformé en
Ministère de l'Agriculture et du Développement Rural (MINADER) en
200428(*), dans l'optique
d'intégrer davantage des aspects développementalistes en faveur
du monde rural, désormais au coeur de sa stratégie d'action,
s'engage à établir les conditions de garantie de la
qualité du produit « made in
Cameroon » et à aménager les rapports entre le
producteur et l'acheteur. Il (l'Etat), se déploie principalement
à travers trois organismes que sont, la Société de
Développement du Cacao (SODECAO), l'Office National de Commercialisation
du Cacao et du Café (ONCC) et le Fonds de Développement du Cacao
et du Café (FODECC).
Confirmée dans ses missions traditionnelles telles
que présenté dans nos précédentes analyses, sauf
que l'Etat n'ayant dorénavant plus les moyens de son interventionnisme,
la SODECAO pour survivre, réduit à la portion congrue ses
subventions, et se résout à abandonner le volet entretien des
pistes de collecte, en raison de la réduction drastique de sa dotation
budgétaire, provenant exclusivement des ressources du budget de l'Etat.
Sa présence sur le terrain sera maintenue tant bien que mal pour assurer
ses missions d'appui ou d'accompagnement technique.
L'Office National de Commercialisation du Cacao et du
café (ONCC) a été créé par le décret
n° 91/271 du 12 juin 1991 pour se substituer à l'ONCPB, puis
modifié et complété par le décret n° 97/141 du
25 août 1997. C'est un établissement public administratif
doté d'une autonomie financière et placé sous la tutelle
du Ministère du Commerce.
Organe de régulation, d'encadrement, de certification
des produits et de coordination de ces filières, l'ONCC est
chargé entre autres :
- du suivi statistique des campagnes de commercialisation du
cacao et du café ;
- du suivi des activités de contrôle de produits
à l'exportation ;
- des visites techniques des installations des organismes
chargés du contrôle de la qualité, des usines et des
magasins de stockage en vue de leur agrément ;
- de la défense et de la promotion du label made in
Cameroon ;
- du suivi des accords internationaux de cacao et de
café ainsi que de la représentation du Cameroun auprès des
organisations internationales du cacao et du café, en relation avec
l'interprofession ;
- de toutes les études à lui confiées par
le Gouvernement dans le domaine des filières Cacao et
Café ;
- de la gestion du système d'information INFOSHARE dans
les filières cacao et café au Cameroun.
L'office National de Commercialisation du Cacao et du
Café occupe de ce fait, une position centrale dans les filières
cacao et café du Cameroun y compris en matière de veille et
d'information. Il assure le lien avec les différents intervenants des
filières (exportateurs, usiniers, transitaires, sociétés
chargées du contrôle de la qualité, etc.) et collecte des
informations sur une large diversité d'aspects (prix d'achat aux
planteurs, calendriers des marchés, noms des exportateurs actifs sur le
terrain, dénonciation de mauvaises pratiques de certains exportateurs,
etc.).
Ses ressources proviennent d'un prélèvement de
5 500 FCFA / tonne + 1 500 FCFA pour le pré contrôle et le
contrôle de qualité + 1 500 FCFA pour les cotisations aux
Organisations internationales (soit 34% du prélèvement total
fixé à 25 000 FCFA /tonne) opéré à
l'exportation des fèves de cacao , Conformément
à l'Arrêté n° 00004/MINCOMMERCE/CAB du 19
février 2010 complétant certaines dispositions de
l'arrêté n°0016/MINCOMMERCE du 30 Août 2006 fixant les
redevances à l'ONCC, au CICC et les contributions aux organisations
internationales du cacao et du café.
Pour accroître l'efficacité des
filières cacao et café, le FODECC (Fonds de Développement
des filières Cacao et Café) a été
créé en mars 2006 par le décret présidentiel
n° 2006/085 du 9 Mars 2006 portant organisation et fonctionnement dudit
Fonds.
Sa mission principale est d'appuyer ce secteur à
travers le financement de projets visant à sécuriser,
accroître et garantir la bonne qualité de la production du cacao
et du Café.
Ses ressources, conformément à
l'arrêté présenté dans le paragraphe qui
précède, proviennent d'un prélèvement de
12 500 fcfa / tonne (soit 50% du prélèvement total).
Dans sa mission de régulation, l'Etat bénéficie du soutien
de certains de ses partenaires multinationaux et bilatéraux à
l'instar, des Etats Unis à travers l'USAID, et de l'Union
Européenne par le biais de son Fonds d'Aide et de la Coopération.
A ce propos, les partenariats entre le Cameroun et la Banque Mondiale, de
même que ceux avec la FAO et le FIDA, se sont accentués depuis
1992 dans le sens de la promotion de l'encadrement technique (éducation,
et formation des producteurs) et ce à l'aune de plusieurs programmes de
développement agricole à l'instar du Sustainable Free Crops
Program, qui teste l'approche de vulgarisation Champ-Ecole-Paysan depuis 2003,
programme consistant en une promotion des techniques culturales modernes et de
gestion simplifiée, mais plus efficace dans le bassin de production de
la Lekié.
De même, le 20 juillet 2012, l'ambassadeur des USA
à Yaoundé, son Excellence Robert P. JACKSON, a raffermi le
partenariat public-privé Cameroun-USA à travers l'extension de
l'initiative de son gouvernement pour la Promotion de la filière cacao,
volet majeur de leur politique d'aide internationale à la mise en place
d'une agriculture durable et la sécurité alimentaire
Le planteur, quant à lui, se déploie de deux
manières :
De façon individuelle en tant que concepteur,
investisseur et réalisateur de son activité et commerçant
du produit de celle-ci. A ce propos, les surfaces qu'il cultive vont
globalement de 500 pieds de cacao, à 10 hectares voire plus pour les
plus nantis d'entre eux à l'instar de l'Honorable NDONGO ESSOMBA dans
l'arrondissement de Sa'a.
Et, de manière collective, à travers :
Un regroupement facultif aux seins des Groupements
d'Intérêts Communautaires (GIC) et des coopératives, dans
le sens d'amortir les coûts d'investissements dans l'activité eu
égard à la suppression des subventions de l'Etat, et de mieux
défendre ses intérêts dans l'optique d'une
commercialisation éthique et équitable de son produit. Les
plus en vue de ces Groupements et Sociétés coopératives
dans la Lékié sont :
- La Coopérative d'Organisation des GIC pour le
Développement de la Lékié (COGPRODEL) active depuis les
années 1978. Elle est une confédération de GIC aux rangs
desquels, le GIC Pam Ebougsi-centre ; GIC Ekekam ; GIC Nkom.
- La CONOPROCAM, Confédération Nationale des
Producteurs de cacao et café du Cameroun, créée en 2002.
Elle jouit d'une aura nationale avec cependant une forte présence dans
le département de la Lékié notamment à Obala, Sa'a,
et Evodoula. Elle est, de manière précise, une
confédération de 30 fédérations de GIC et compte
une moyenne de 20 000 producteurs.
- Et la SOCOOPRAV, Société Coopérative
des Promoteurs Agropastoraux Mvog Kani, créée en 2005 et
basée à Obala. Elle compte aujourd'hui 3000 adhérents et
se déploie sur les localités de Kokodo, Niga, Yemessoa,
Nkolbiyem. Dans ses activités, elle s'est spécialisée dans
la production des plants de cacaoyer dont les statistiques
révèlent une production encore non égalée de
280 000 plants en 2008.
Si le regroupement au sein des GIC demeure facultatif, il
existe cependant un regroupement formel, à travers le Conseil
Interprofessionnel du Cacao et du Café (CICC), organisme central de
promotion et défense des intérêts des intervenants des
filières cacao et café autres que l'Etat.
LE CICC EN RACCOURCI :
- Nature et vocation du CICC
Le Conseil Interprofessionnel du Cacao et du Café
(CICC) a été créé conformément à la
loi de 1990 sur les associations et partant du rôle dévolu
à l'Interprofession à partir de l'Ordonnance de 1991, la Loi
95/11 de 1995 et les Décrets 97/130/PM et 97/131/PM de 1997. Le CICC
regroupe les Organisations Professionnelles de l'Agriculture, du Commerce, de
l'Industrie et des Services des filières cacao/café qui
adhèrent à ses statuts ; il constitue une association
d'action, de représentation, de coordination, de liaison et
d'information. Ses statuts, élaborés et approuvés en 1992
lors de sa création, ont été révisés et
adaptés au nouveau contexte des filières - et aux nouvelles
missions de l'interprofession - par deux AGE en 1995 ; puis par une AGE en
1999.
Conformément à la législation sur les
filières cacao et café, le Conseil Interprofessionnel a pour
missions :
- de donner son avis ou de présenter ses propositions
sur toute question ou réforme du système de production et de
commercialisation des Cafés et du Cacao ; - de déterminer les
critères d'exercice dans les professions de la commercialisation des
Cafés et du Cacao et fournir une caution morale du bon
déroulement des opérations ; - de veiller à
l'application des règles qui assurent une concurrence saine et loyale
entre les opérateurs, membres des organisations professionnelles
affiliées au CICC et adhérant aux présents statuts ;
- de gérer la Caisse Mutuelle de Cautions et de
Garanties Professionnelles et de concevoir dans le cadre de la Caisse Mutuelle
de Cautions et de Garanties Professionnelles un système d'assurances et
de réassurance professionnelles ;
- d'apporter à toutes les Organisations
professionnelles constituant les différents collèges
représentés à son Assemblée Générale
tout concours et/ou service en vue d'accroître l'efficacité de
l'ensemble de l'organisation professionnelle ;
- de représenter les professionnels des filières
camerounaises auprès des organisations internationales du cacao et du
café.
Le CICC est amené à prendre des initiatives et
à mener de multiples actions au delà de cette liste ; notamment
en matière d'appui aux organisations de producteurs en concertation avec
les projets d'appui du monde rural dans les domaines du cacao et des
cafés.
- Organisation interne du CICC
Le CICC comprend :
Une Assemblée Générale,
organisation collégiale constituée de 60
représentants de différents collèges, chacun de ces
collèges correspondant à une catégorie professionnelle
présente dans les filières de production et de commercialisation
du cacao et des cafés.
Et d'autres instances que sont :
Le Conseil Exécutif : L'organe de
direction du CICC ;
le Comité Permanent : chargé de
l'examen des problèmes techniques et des aspects pratiques de la mise en
oeuvre des décisions prises ;
le Conseil de Discipline : il est le garant
du respect du code de déontologie, et se réunit pour statuer sur
les infractions et les litiges liés à son application;
le Secrétariat Permanent : sous
l'autorité du Conseil Exécutif et de son Président, il met
en oeuvre les résolutions de l'AG, assure l'administration et la gestion
du CICC au quotidien, assure le secrétariat des autres instances.
- Les ressources du CICC
Ses ressources, conformément à
l'arrêté sus-cité, proviennent d'un
prélèvement de 4 000 FCFA / tonne (soit 16% du
prélèvement total).
Compte tenu de la modicité de ses moyens, en
comparaison au vaste chantier que représente la filière
cacao-café, le CICC fait appel à des organismes et bailleurs de
fonds amis, pour financer ses activités non institutionnelles, comme par
exemple l'appui aux producteurs et à leurs organisations.
- LES PROBLEMES QUE RACONTRE LE CICC
Du fait de l'inapplication dans les faits d'un grand
nombre de dispositions de la réglementation en vigueur, le CICC ne peut
pas assurer l'autodiscipline entre les opérateurs, qui est la base de la
gestion interprofessionnelle des filières libéralisées.
Il en est ainsi de la non observance de l'obligation de
la carte professionnelle délivrée par le CICC, ce qui
permet la multiplication des acheteurs informels (coxeurs) dans les zones de
production, et la prolifération d'exportateurs inactifs ;
D'où la difficulté pour le CICC de mettre
en oeuvre une de ses plus importantes résolutions, notamment celle
relative à la mise en place d'une caisse de caution mutuelle et de
garantie professionnelle.
Par ailleurs, du fait de l'inexistence des déclarations
prévues par la Loi (achats dans les zones de production et à
l'exportation) les statistiques sur les marchés, les prix et les
quantités échangées sont lacunaires et ne permettent pas
un suivi sérieux.
Pour ce qui est des acheteurs. Leur qualité
d'acheteur, c'est-à-dire, la faculté d'opérer les achats
du cacao et du café, découle formellement d'une obtention
préalable d'un certificat ou carte professionnelle
délivrée par le CICC, seul habilité à le faire au
regard de la législation en vigueur. Sauf que, le respect de cette
exigence légale n'est pas une réalité sur le terrain de la
pratique où, spéculation, arnaque et spoliation sont entretenues
par la confusion semée par l'incivisme et l'imposture.
Toutefois, selon des sources proches du Conseil
Interprofessionnel du Cacao et du Café (CICC), le Cameroun
représente un marché important de cacao, évalué
à l'heure actuelle (2011) à environ 220 000 tonnes de
production annuelle et, est dominé essentiellement par trois
multinationales :
- Américaines, Cargill représentée au
plan national par Telcar cacao, qui dispose d'une usine de traitement à
Douala.
- Belgo-Française, Barry Callebaut
représentée par SIC cacao (Société Industrielle de
Commercialisation du cacao) et Chococam (Chocolaterie du Cameroun).
- Américaine, Archer Daniels Midland ; mais aussi
quelques intermittents négociants internationaux d'Allemagne et
d'Angleterre. Aux cotés de ces multinationales se déploient
quelques acheteurs locaux à l'instar des établissements NDONGO
ESSOMBA, SOCAMEPA, ONOMO, 2CCAM qui, dans les faits, agissent en
réalité pour le compte de l'une ou l'autre de ces
multinationales. C'est précisément le cas des Etablissements
NDONGO ESSOMBA, principal acheteur de fèves de cacao dans la
Lékié car, il représente à lui tout seul, un peu
plus de 75% des achats de la précieuse fève dans ce bassin de
production, qui n'est en réalité qu'une filiale de la
multinationale Cargill à l'échelle locale.
Section 2 : Les potentialités de
l'activité cacaoyère dans la Lékié
De nombreuses études ont abouti
à la conclusion que le Cameroun tant au plan pédologique, humain,
climatique qu'environnemental (flore et faune) est « une Afrique en
miniature « ; l'on peut aussi indiquer qu'une application de ces
mêmes études à petites échelles, convie en retour au
constat que la Lékié est véritablement un Cameroun en
miniature, car en son seul sein, se retrouvent les éléments
humains, pédologiques et environnementaux de tous les autres
départements de la République.
Par potentialités, nous entendons un ensemble
d'éléments ou de facteurs qui, pris en compte, permettent de
développer ou de « booster « une activité.
Pour ce qui est justement de l'activité
cacaoyère dans le bassin de production de la Lékié, ces
potentialités sont identifiables autour de deux axes à
savoir : naturel et social d'une part (paragraphe 1) et économique
d'autre part (paragraphe 2), objets des développements qui suivent.
Paragraphe 1 : Les potentialités naturelles
et sociales de l'activité cacaoyère dans la Lekié
Point 1 : Les potentialités naturelles de
la cacaoculture
Elles se rapportent à l'ensemble des facteurs
offerts par l'environnement ou dame nature, indépendamment de l'action
de l'homme et qui sont susceptibles de favoriser le déploiement et le
développement de l'activité cacaoyère dans la
Lekié. Il s'agit notamment du climat, des sols et de l'hydrographie.
Le climat de la Lékié est de type
équatorial à quatre saisons réparties comme suit :
une grande saison des pluies, qui va de mi-août à mi-novembre,
une petite saison des pluies, allant d'avril à mi-juin, une grande
saison sèche qui va de mi-novembre à mars et une petite saison
sèche allant de mi-juin à mi-août.
Le cacao est une plante tropicale cultivée sous des
climats chauds et humides, caractéristiques qui correspondent de
manière précise au climat de ce bassin de production et qui
présente de manière sommaire des températures oscillant
entre 14°c et 45°c29(*).
Les sols dans la Lekié varient selon les
localités. Dans certaines, ils sont ferralitiques c'est-à-dire
rouges (Okola, Elig Mfomo), dans d'autres, ils sont ferrugineux, donc riches en
fer et en argile (Sa'a - Ebebda) et enfin, ils sont sablonneux par endroits
(Monatélé - Batchenga-Lobo). Ceux-ci sont alors propices à
une cacaoculture féconde (productive), à l'entretien facile, car
ne favorisant pas une poussée rapide et encombrante (touffue) des
mauvaises herbes. Situation avantageuse qui permet un meilleur
épanouissement des plants et un refoulement naturel de certaines
maladies et parasites.
En plus de son climat de type
équatorial, la Lékié a une hydrographie riche. Son
territoire est traversé par de nombreux et importants cours d'eau (la
Lékié, l'Afamba, la Ngobo...) dont la Sanaga, le plus long fleuve
du Cameroun qui fait 918 km, et ses sols sont arrosés par des
précipitations annuelles d'une moyenne de 1300 à 1500
millimètres. Cette hydrographie présente un équilibre
propice à l'épanouissement des plants dans les champs et à
une expansion limitée de certains parasites et maladies des
végétaux comme la pourriture brune. Cette eau abondante et
disponible fait en sorte que la dévastation des récoltes pour
cause de sécheresse constitue une menace maîtrisable.
Point 2 : Les Potentialités
socioculturelles de l'activité cacaoyere dans la
Lékié
Ce sont les éléments favorables à la
cacaoculture dans la Lékié, découlant et dépendant
des représentations sociales (perceptions) et des pratiques (dimensions
purement culturelles) de l'être humain.
- Du point de vue des représentations
sociales :
Selon ABRIC (1987), la représentation sociale est le
produit et le processus d'une activité mentale par laquelle un
individu ou un groupe, reconstitue le réel auquel il est
confronté et lui attribue une signification spécifique. Mais
c'est à JODELET (1989) qu'il faut se référer pour une
bonne assimilation de cette notion. Pour cet auteur, les représentations
sociales sont des systèmes d'interprétation régissant
notre relation au monde et aux autres qui orientent et organisent les
conduites et les communications sociales. Elles sont alors des
phénomènes cognitifs engageant l'appartenance sociale des
individus par l'intériorisation de pratiques et d'expériences, de
modèles de conduite et de pensée. Ainsi, les potentialités
de la cacao culture dans la Lékié relèvent, sous cet
aspect, de ce que :
Le cacaoyer et la cacaoyère se
présentent comme des marqueurs fonciers.
A l'heure où le droit coutumier et le droit positif
s'affrontent dans la définition du régime foncier au Cameroun, le
cacaoyer et la cacaoyère servent à la fois de borne et d'indice
de propriété foncière.
L'acuité de cette dimension du cacao nous a
été exposée par M. MINTOLO du village Efok, une
localité de l'arrondissement d'Obala qui nous a confié que, n'eut
été l'existence de la plantation que lui a léguée
son feu père, il perdait sa propriété foncière et
se retrouvait de fait, exproprié de son héritage et
expulsé de ses racines, du fait d'un acharnement malveillant de ses
cousins et voisins du village.
La cacaoculture fondatrice d'un statut social : le
cultivateur de cacao, un emblème.
Du fait de la cacaoculture, son titulaire n'est plus un
vulgaire paysan ou un planteur ordinaire à l'image d'un cultivateur de
piment ou de maïs. Désormais il est un véritable et
important citoyen, un VIP du cru : « Mpan môd »,
comme cela se dit en langues locales (Eton, Manguissa...).
Aussi, ceux qui se consacrent à cette activité
et ont des exploitations de plus d'un hectare, auraient, semble t-il, aux dires
de Madame MESSINA Thérèse de la localité d'Elig Zogo
à Sa'a, un train de vie plutôt au-dessus de la moyenne de la
localité, perceptible à travers le confort de leurs maisons (car
les leurs sont en «dure« et pour les autres en terre battue). D'une
manière générale ils possèdent entre autres, un
téléviseur, un groupe électrogène ainsi qu'une
moto ; des commodités et d'autres qui constituent des signes
patents d'une aisance qui tranche avec le dénuement des villages et des
habitants de l'arrière pays.
La sédimentarisation des
populations est une potentialité indéniable pour la cacaoculture
dans la Lékié. Avec plus de 700 villages et une
densité de 100 à 500 habitants au km/2, la Lékié a
une population de près de 600 000 âmes comportant en son sein, des
autochtones dont les Eton et Manguissa sont majoritaires, et de nombreux
allogènes venus de tous les horizons de la République,
attirés par le dynamisme et l'hospitalité des populations
autochtones.
Ce visage de la Lékié offre ainsi des
statistiques impressionnantes en termes d'intérêt pour
l'agriculture en général et la cacaoculture en particulier :
une population d'agriculteurs à 95%.
M. ONDOMBO Jean de Dieu habitant la localité d'Evodoula
qui semble parfaitement connaitre son département de naissance et de
travail puisqu'il y exerce comme «coxeurs« à temps
partiel (c'est-à-dire seulement au moment des campagnes de
commercialisation du cacao) affirme que dans la Lékié, on est
agriculteur dès sa naissance avant de devenir chauffeur,
mécanicien, maçon, menuisier, magistrat, médecin ou
ministre, et qu'on retourne toujours dans l'agriculture.
- D'un point de vue purement
culturel :
Les potentialités sous ce point de vue
sont constituées par tout ce qui, tiré de la tradition et des
façons de vivre des populations de la Lékié (autochtones
comme allogènes), est porteur de germes de promotion et
d'épanouissement de l'activité cacaoyère. A ce titre, il
est opportun de citer :
Le dynamisme des populations. C'est un
caractère que lui reconnaît l'histoire qui révèle un
peuple venu d'ailleurs, des confins de l'Adamaoua peut-être, fuyant un
danger (épopée de la traversée de la Sanaga). Dans tous
les cas, un peuple en quête permanente de terres fertiles afin
d'assouvir sa passion pour l'agriculture.
De même, ce dynamisme se traduit par l'esprit
d'émulation qui prévaut ici plus qu'ailleurs entre les
populations de cette localité et s'exprime en termes
de : « comme tu as déjà un hectare de
plantation, rassures-toi, je vais me mettre à fond au travail pour en
avoir deux voire plus », tel que nous l'a confié Monsieur
Mani, assesseur à la chefferie de 3è dégré Mvog
Ezok à Monatélé, lui-même propriétaire de 03
hectares «pour l'instant«.
L'ancrage traditionnel symbolisé par deux rites
majeurs : So'o et Anagsama.
Le So'o, réservé aux jeunes hommes, a pour
objectif d'éprouver leur bravoure au terme d'un parcours du combattant
semé de moult épreuves à braver dans la forêt, au
sortir duquel ils seront dorénavant aptes à tout entreprendre
notamment, se marier, se lancer dans la cacaoculture...
Rare, exceptionnel et mystérieux, l'Anagsama est un
rite très réservé qui se pratique soit pour chasser les
mauvais esprits, soit pour garantir et accroitre la production agricole ;
il vise la prospérité et la paix.
Cet ancrage traditionnel conforte la vocation agricole des
populations de la Lékie qui, de ce fait peuvent décider de
s'investir dans l'activité cacaoyère sans avoir à craindre
les désagréments d'une mauvaise récolte, les aléas
naturels liés aux caprices du climat ou aux forces occultes.
Et l'instauration d'une Journée
Départementale du Cacao depuis 2009 et d'un Festival national du Cacao
en 2012 ; deux initiatives qui sont de nature à
conforter l'intérêt pour l'activité cacaoyère dans
les moeurs nationales en général et de la Lékié en
particulier. C'est d'ailleurs cet argumentaire que développe Monsieur le
Ministre du Commerce Luc Magloire MBARGA ATANGANA, co-promoteur de cette
deuxième initiative, lors d'une interview à la
Télévision nationale.
Paragraphe 2 : Les potentialités
économiques de l'activité cacaoyères
Les potentialités économiques sont
l'ensemble des facteurs mieux, les arguments relatifs à la
création des richesses et à la rentabilité
financière susceptibles d'améliorer l'intérêt
à s'investir dans la cacaoculture dans le bassin de production de la
Lékié. Ce qui précède peut être
illustré par les arguments qui suivent.
Point 1 : La cacaoculture - une activité
rentable
La cacaoculture est une activité lucrative qui
rapporte des ressources financières importantes. Elle offre un
éventail de possibilités (investir ailleurs dans d'autres
activités) à ceux qui s'y consacrent. Elle ne nécessite
pas obligatoirement un gros investissement tant en termes de ressources
financières, humaines, technologiques, logistiques que juridiques.
Au plan financier, Il s'agit pour le titulaire d'un hectare
de cacaoyère, d'investir 100.000 frs Cfa pour la création de la
plantation, 50.000 f Cfa dans l'entretien annuel pour en attendre une rente
annuelle de près d'un million de Francs CFA et ce, sur 10, 20 voire 30
ans ; comme nous l'a déclaré M. NDONGO Jérôme,
propriétaire d'une exploitation de 2 hectares dans la localité de
Mvôm Nnam, une périphérie de la ville de Sa'a.
Au plan humain, c'est une activité
qui ne nécessite pas forcément une main d'oeuvre abondante et
très qualifiée. Très souvent, on n'a pas besoin de
recruter, puisque la main d'oeuvre familiale à elle seule (père,
mère, enfants), mise à contribution, suffit.
De même, il s'agit d'une activité très
peu éprouvante du point de vue de la santé physique de ceux qui
s'y livrent, ceci comparativement, à la culture de la tomate qui
nécessite un effort constant avec l'exigence d'une présence
quotidienne effective de son acteur, une intervention discontinue (trois
à quatre fois l'an) pour l'entretien de la cacaoyère suffit
à garantir une récolte satisfaisante en quantité comme en
qualité.
Au plan technologique, le matériel
rudimentaire employé est accessible à tous. Machettes et limes,
par exemple, se vendent partout et à un prix abordable, tout comme le
pulvérisateur ou les fongicides nécessaires.
Au plan juridique ou procédural, la
cacaoculture se présente comme une activité non sujette à
une procédure administrative longue et complexe ; l'on tient compte
de la réalité rurale et ses caractéristiques
(analphabétisme, pauvreté monétaire...) dont elle est
empreinte ; elle ne nécessite pas d'autorisation préalable
et subit une pression fiscale souple et subtile perceptible seulement au moment
de la commercialisation des fèves à l'exportation et du produit
fini.
Point 2 : La cacaoculture - une aubaine pour
la création d'emplois
S'il est admis que la main d'oeuvre familiale, à
elle seule (père, mère, enfants...) mise à contribution,
peut suffire à satisfaire l'équation de la ressource humaine que
nécessite l'activité cacaoyère, force est surtout de
relever que dans les faits, la pratique de cette activité donne lieu
à des possibilités d'emplois saisonniers (au moment de
l'entretien des cacaoyères comme de la récolte). Ces
opportunités d'emplois temporaires pour des personnes non membres de la
famille constituent une aubaine dans un contexte où le chomage tend
à devenir endémique.
Mais au-delà de ces aspects purement saisonniers et
temporaires, les perspectives d'emplois permanents dans et par la cacaoculture
sont réelles.
Celles-ci sont portées d'une part, par la
réalité des pépinières réalisées par
des personnes privées qui, oeuvrent aux cotés de la SODECAO
à la satisfaction du besoin en matériel végétal
approprié (qualité, quantité), constituant ainsi une
source permanente de revenu pour ceux qui s'y consacrent; et par le
foisonnement des points de commercialisation des produits phytosanitaires
(pesticides, engrais, pulvérisateurs, machettes...).
Le volet transformation des fèves de cacao,
fût-elle artisanale, chocolatiers, pâtissiers, cosméticiens
(...) constitue un vaste gisement de création d'emplois et de richesses
encore quasiment inexploré dans notre pays, ceci, dans la mesure
où le taux de transformation n'est que de 15%.
Conclusion
La présentation de l'historique et des
potentialités économiques, sociales et naturelles de la
cacaoculture dans le bassin de production de la Lékié nous a
permis de distinguer deux grandes périodes, celle d'avant la
libéralisation et celle d'avec la libéralisation.
Elle nous a également permis de relever que, si en
période d'économie dirigée (c'est-à-dire avant la
libéralisation), la présence de deux acteurs (l'Etat et le
producteur) favorisait une identification et une gestion simples et faciles des
intérêts en présence ; tel n'est pas le cas pour la
période libérale en cours qui, offre le spectacle d'un
foisonnement d'acteurs aux intérêts divergents et parfois,
difficiles à concilier.
Nous avons également relevé
l'effectivité des potentialités naturelles, sociales et
économiques qui constituent des facteurs motivants et donc, catalyseurs
de l'essor de la cacaoculture dans cette zone de production.
Cependant, malgré ce riche potentiel,
l'activité cacaoyère dans le bassin de la Lékié
présente des signes d'essoufflement qui annoncent son déclin,
prélude à son abandon certain. Qu'est ce qui peut donc bien
expliquer cet état de fait ? Les éléments de
réponse à cette importante interrogation constituent la trame de
fond du chapitre qui suit.
Chapitre 2 : Les entraves ou pesanteurs à
la gestion durable de la cacaoculture dans la Lékié
C'est en constatant l'inefficacité de près
de trente années de pratique d'une politique d'économie
administrée et en réponse aux défis de la mondialisation,
que le Cameroun s'est engagé dans la libéralisation de son
économie ; ce qui, espérait-on, devait se traduire par le
désengagement de l'Etat, une responsabilisation plus accrue des acteurs
concernés, de meilleures perspectives sur le plan de la
rémunération du travail à travers la logique des prix
compétitifs...
Il en résulte à contrario un réel
sentiment de démotivation, voire, de non épanouissement
susceptible d'aboutir à un abandon pur et simple de la cacaoculture
pourtant chère à la Lékié comme l'attestent de
nombreux sondages et études30(*). Qu'est qui peut alors bien expliquer ou justifier
cet état de fait ?
Cette situation du non épanouissement de la
cacaoculture et du producteur de cacao dans le bassin de production de la
Lékié, peut trouver des éléments d'explication dans
l'analyse des entraves ou pesanteurs à la gestion durable de cette
filière agricole dans cette région, objet du présent
chapitre.
Les entraves à la gestion durable de la cacaoculture
sont l'ensemble des facteurs endogènes (c'est-à-dire ceux qui se
rapportent au contexte national) et exogènes (ceux découlant de
l'environnement international) qui freinent et même, empêchent
l'épanouissement et l'émancipation de la cacaoculture et du
producteur de cacao dans la Lékié.
Section 1 : Les facteurs endogènes structurant
la gestion non durable de la cacaoculture dans la Lékié
Monsieur NTCHOUWAT Amadou, enseignant de Droit à
l'université de Yaoundé II appréhende les facteurs
endogènes structurant la gestion non durable de l'économie
cacaoyère, comme l'ensemble des dynamiques qui dérivent
originellement de l'environnement interne de l'Etat et gênent l'essor et
l'épanouissement de la cacaoculture et du producteur de cacao. Si
certains de ces facteurs dans le contexte national relèvent de l'acteur
étatique (paragraphe 1), d'autres par contre sont imputables au
producteur de cacao lui-même d'une part, et d'autre part, à
l'acheteur (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les facteurs imputables à
l'acteur étatique
De nombreux facteurs imputables à
l'Etat n'ont pas favorisé l'émancipation et
l'épanouissement de/par la cacaoculture. Ces facteurs se traduisent
globalement en termes d'inappropriation même de la donne libérale
dans notre contexte, d'un malaise organisationnel et managérial de la
filière, de baisse du prix réellement perçu par les
planteurs et de déficit infrastructurel.
Point 1 : L'inappropriation de la donne
libérale et le problème d'organisation et de management de la
filière
Imposée à marche forcée par les PAS,
la libéralisation du secteur cacao n'a pas été suivie
d'une appropriation nationale de nature à impulser son efficacité
(adaptation) et son efficience (adéquation) au contexte
« Cameroun ». Les réformes initiées
au pas de charge ont été dictées par l'urgence,
insuffisamment pensées et donc insusceptibles de réaliser les
ambitions escomptées. A titre illustratif, si la réforme de
l'ONCPB, du fait de la venue de la libéralisation entraine en 1991 la
création de l'ONCC et du FODECC, tel n'est pas formellement le cas de
la SODECAO pourtant acteur phare de la gestion de la filière, qui a
dû s'adapter tant bien que mal sur le terrain au lieu d'être au
préalable formellement réformée pour correspondre à
la conjoncture nouvelle. Ce qui a eu pour résultat de réduire ses
performances avec une longue période de navigation à vue et une
sérieuse menace de liquidation ou de fermeture (1996-2003). En d'autres
termes, la Société de Développement du Cacao a
continué de fonctionner en 1995 - période libérale, avec
la logique d'économie administrée qui prévalait au moment
des années de sa création en 1974, alors même que le
contexte économique n'était plus le même ; d'ailleurs,
il était désormais fondamentalement différent, aux
antipodes de sa logique d'antan.
De même à la suite de ce qui
précède, il faut relever une mauvaise organisation et un
management défaillant de la filière. La logique libérale
au Cameroun a conduit à la création de plusieurs centres de
décisions se traduisant entre autres par l'existence d'un trop plein
d'organes aux compétences chevauchantes parfois mal définies et
inadéquates, comme l'illustre la présence d'un CICC, du GEX
(Groupes des Exportateurs de Cacao) à coté d'un ONCC, organismes
qui revendiquent chacun la prérogative de la formation des producteurs
et opérateurs de la filière en matière de contrôle
de la qualité.
Les inconvénients de cette mauvaise organisation de
la filière sont davantage complexifiés par une
inefficacité managériale perceptible par l'absence de
systématisation formelle d'outils de gestion tel, l'Agenda 21
d'entreprise, instrument technique de planification, suivi et évaluation
dans la définition et atteinte des objectifs, de même que dans
l'emploi des ressources s'y rapportant (humaines, financières,
logistiques); conduisant in fine à une gestion opaque, non performante,
c'est-à-dire inefficace et inefficiente de la filière cacao.
Enfin, l'Etat n'ayant plus les moyens de son
interventionnisme d'antan et n'ayant pas suffisamment élaboré des
modalités de soutien aux producteurs de cacao eu égard à
la donne libérale qui s'imposait désormais à lui, c'est
à un accompagnement approximatif auquel on assiste désormais, se
traduisant :
- Au plan financier, par l'absence d'un système et
organisme officiels de financement de l'activité cacaoyère, le
projet de création d'une banque agricole n'étant encore à
l'heure actuelle qu'à l'étape embryonnaire et le système
FODECC pour sa part relevant toujours de l'opacité ;
- Et au plan purement technique, par la suppression de
nombreux postes agricoles pourtant indispensables dans et pour certaines
localités du pays en général et du bassin de la
Lékié en particulier, à l'instar de ceux de Mvoua 1 et 2
ou d'Ebougsi à Okola en 1995 ; et de leur absence dans d'autres
localités comme à Lobo, condamnant ainsi les producteurs à
la débrouille et décourageant de facto des potentiels
intéressés comme nous l'a confié M. MAMA MVONDO
François, producteur de cacao, notable à la Chefferie de
Tchek.
De même, le foisonnement de programmes agricoles aux
contours spatio-temporels et utilitaires mal définis mais au
fonctionnement budgétivore faisant très souvent concurrence
à la SODECAO de manière injustifiée comme l'illustre
l'existence de nombreux programmes semenciers (Le Programme de l'Union
Européenne pour l'Amélioration de la Productivité Agricole
- Relance des filières Cacao et Café-PAPA/RFCC) et d'entretien
phytosanitaire logés au sein même du MINADER, est de nature
à conforter la défaillance sus relevée.
Point 2 : La baisse du prix réellement
perçu par les planteurs et le déficit infrastructurel
Nous savons que la baisse des cours
mondiaux de la fève n'est pas un fait directement imputable aux Etats
producteurs comme le Cameroun, sauf que la non effectivité des cours
nationaux notamment à l'endroit du planteur est par contre un fait qui
devrait directement leur être attribué. En effet, pour le cas du
Cameroun, s'il est acquis que déjà dès 1966, le prix
national était fixé par décret présidentiel au
prorata de la qualité des fèves, de même que l'information
sur ce dernier est depuis la période libérale relayée par
l'ONCC par le biais de son système Infoshare, force est cependant de
constater que l'Etat s'est dès lors juste cantonné à le
fixer sans aménager les conditions de son effectivité.
Résultat de cette posture, les planteurs sont spoliés, et dans un
tel contexte, ils perçoivent que leur activité n'est plus
rentable, ils ne sont plus motivés et envisagent son abandon au profit
d'autres cultures rentables en tout temps à l'instar de celles
vivrières ou de l'hévéa.
De même, le déficit infrastructurel qui se
traduit par l'absence et/ou le piteux état des pistes de collecte
à l'instar d'Elig Bikoun à la périphérie de
Monatelé, l'inadéquation de la carte sanitaire et scolaire (...),
est une entrave majeure à l'épanouissement du producteur de cacao
et à l'émancipation de la cacaoculture. Ceci dans la mesure
où, le Programme d'Entretien des Pistes de Collecte logé à
la SODECAO depuis 1974, de même que le plan national de
développement rural réaménagé à plusieurs
reprises, n'ont plus depuis longtemps, les moyens de leur objectif, ce qui
condamne ainsi les zones rurales enclavées qui se consacrent à la
cacaoculture à l'incertitude de la commercialisation de leur
production.
De plus, quand bien même, celle-ci (la
commercialisation) est faite dans ces conditions d'enclavement, le prix
versé aux planteurs de ces zones est très dérisoire car
réduit à proportion de la difficulté d'accès de
l'acheteur à ladite zone. Toutes choses qui empêchent un essor
réel de la cacaoculture. Dans le même contexte, la couverture du
réseau téléphonique est encore largement
déficitaire avec de nombreuse localités encore non couvertes
à l'instar de Lobo pourtant située à seulement 37 km de la
ville de Yaoundé.
Paragraphe 2 : Les facteurs imputables au producteur de
cacao
Si la grande part de
responsabilité de la gestion non durable de l'activité
cacaoyère incombe à coup sûr à l'Etat, nous devons
également relever que le producteur de cacao de la Lékié
par ses pratiques et son contexte est aussi, à bien des égards,
responsable de son non épanouissement.
Point 1 : La responsabilité du producteur
de cacao au plan individuel
Individuellement, la responsabilité du producteur
de cacao dans la gestion non durable de son activité découle de
ce qu'il laisse vieillir son verger de cacaoyer, au lieu d'épouser une
dynamique de réhabilitation planifiée, caractérisée
par l'acquisition d'un nouveau matériel végétal plus
productif et plus durable, et la mise en oeuvre de techniques culturales
modernes.
Outre le fait que l'usage de l'outillage rudimentaire
(machette et lance pour la cueillette) perdure, témoignant de l'absence
de mécanisation de l'activité cacaoyère certes
justifiée par une insuffisance des ressources financières, le
producteur de cacao de la Lekié manque de vision de diversification de
son activité à l'instar du développement d'une industrie
de transformation artisanale des fèves de cacao31(*), et de l'investissement de ses
ressources issues de la cacaoculture ailleurs dans d'autres activités,
que viennent complexifier les pratiques de location des cacaoyères
à des prix dérisoires, condamnant les producteurs de cacao
à la paupérisation voire à la misère totale.
Point 2 : La responsabilité des
cacaoculteurs du point de vue collectif
Collectivement, il faut relever le manque d'engouement de
l'écrasante majorité des producteurs de cacao pour le
regroupement en collectivité (GIC, coopérative) pourtant
salutaire à la défense des intérêts collectifs et au
bénéfice de certaines facilités, à cause de leur
gestion taxée d'approximative car empreinte de corruption, de
détournement de fonds, de spéculation et donc impropre
à leur promotion. A ce titre, notre examen des Rapports annuels des
activités des GIC et Coopératives de la délégation
départementale du MINADER de la Lékié nous a permis de
constater que de 1995 à 2010 sur les près de 400 organismes
collectifs que comptait ce département, on en dénombre plus
qu'une centaine, les autres ayant soit déposé le bilan, soit
fusionné. A ces facteurs se mêlent ceux découlant de
l'environnement extranational.
De même, le déficit démocratique et le
type de management qui y ont cours semblent impropres à favoriser la
promotion du mouvement associatif de défenses et promotions des
intérêts collectifs. En effet, le management ici est surtout de
type patrimonial où dans les 2/4 des cas que nous avons pu
apprécier, le père de famille s'entoure d'abord de sa femme et
ses fils à des postes stratégiques (caissier, secrétaire
...) de la coopérative pour ensuite prétendre gérer des
intérêts collectifs.
Section 2 : Les facteurs exogènes de blocage de la
gestion durable de la cacaoculture dans la Lékié
Les facteurs exogènes à la gestion non
durable de la cacaoculture se définissent comme étant l'ensemble
des dynamiques découlant de l'environnement international et qui
enfreignent l'épanouissement et l'essor de la cacaoculture et du
producteur de cacao au plan national et notamment de la Lékié.
Le Cameroun est membre de l'Organisation Mondiale du
Commerce (OMC), et à ce titre, est partie à l'Accord sur
l'agriculture et les produits agricoles, signé à Marrakech en
1994 et entré en vigueur en 199532(*). Il est de ce fait totalement intégré
dans l'environnement commercial international dont l'analyse nous
révèle des éléments à la fois
idéologiques et pratiques défavorables à
l'émancipation locale de l'économie cacaoyère.
Eléments dont la bonne compréhension découle de la
présentation des controverses de l'accord de l'OMC sur l'agriculture et
les produits agricoles à l'endroit des pays
sous-développés (paragraphe1) et la concurrence déloyale
des grandes puissances agro-industrielles ainsi que la problématique de
la pratique des prix (paragraphe 2).
Paragraphe 1: Présentation des controverses de
l'accord de l'OMC sur l'agriculture et les produits agricoles à
l'endroit des Pays en Voie de Développement
Le Cameroun, au sein de l'OMC, a le statut de Pays Moins
Avancé (PMA) et fait ainsi partie de la catégorie globale des
Pays en Voie de Développement (PVD).
L'accord de l'OMC nourrit sommairement comme ambitions,
l'élimination progressive des barrières douanières, une
réduction des soutiens internes à l'agriculture et la suppression
des subventions à l'exportation. Ce sont les ambitions
sus-évoquées qui sont, à l'analyse et ce, à bien
des égards, porteuses d'entraves au bien-être agricole des Etats
africains de manière générale, du Cameroun en particulier.
Point 1 : La problématique de
l'élimination progressive des barrières
douanières
L'élimination progressive des barrières
douanières elle est commandée par la libéralisation des
échanges prônée par l'OMC. Elle indique une
amélioration de l'accès au marché mais implique cependant
une perte importante des recettes douanières pourtant indispensables au
financement du budget de l'Etat, en plus de l'ouverture des frontières
visant à favoriser la promotion de la concurrence sur les marchés
nationaux et internationaux.
Or un examen attentif de ce dernier aspect
révèle que, en l'état actuel de leur niveau global de
développement, les Pays en Voie de Développement d'Afrique ne
sont pas suffisamment outillés tant en termes de connaissances, de
technologies que de flux financiers pour faire face à la concurrence des
pays développés sur leur propre territoire. Ce qui a pour
conséquence la forte inondation de leurs marchés par les produits
des Etats les plus industrialisés, traduisant la volonté
réelle de maintenir toujours les pays du tiers-monde dans le giron du
sous-développement. A ce propos, la concurrence outrancière que
subit notre chocolat «national« (Chococam) est suffisamment
illustrative.
Point 2 : Les effets néfastes de la
réduction des soutiens internes à l'agriculture et la suppression
des subventions à l'exportation
La réduction des soutiens internes à
l'agriculture et la suppression des subventions à l'exportation sont
à bien des égards corrélatives à
l'élimination progressive des barrières douanières et la
réduction de leur tarifs dans la mesure où elles entrainent
mécaniquement une diminutions des recettes budgétaires des PMA
dans lesquelles les droits de douanes peuvent représenter une part
importantes allant parfois de 10 à 30/100 comme c'est le cas pour le
Cameroun.
Connaissant le contexte socio-économique de nos
Etats : paupérisation globale des populations, insuffisance
alimentaire, lourd endettement (...) ; la formulation suffisamment
évocative de la réduction des soutiens internes à
l'agriculture et la suppression des subventions à l'exportation les fait
clairement apparaitre sous le prisme de mesures discriminatoires voire,
éliminatoires à l'émergence agricole de l'Afrique car
comme l'a problématisé JANIN Pierre dans son article, que peut
vraiment un planteur en Afrique en général et au Cameroun en
particulier sans le soutien global de l'Etat ? La réponse à
cette interrogation semble sans ambages être :
« normalement, rien du tout mais au mieux, pas grand chose33(*)». De plus, quand bien
même les pays en développement se plient au respect de ces
mesures, les pays riches semblent littéralement les contourner.
Paragraphe 2 : La concurrence déloyale des
grandes puissances agroindustrielles et la problématique de la pratique
des prix
Point 1 : La concurrence déloyale des grandes
puissances agroindustrielles
La concurrence déloyale est une
pratique propre aux puissances agroindustrielles de l'Union Européenne
(EU) et les Etats Unis d'Amérique du nord (USA). Elle est le fait pour
ces puissances de ne pas respecter scrupuleusement les règles
établies par l'OMC et s'appréhende à travers la pratique
du protectionnisme déguisé et des subventions masquées.
En effet si les Etats africains ouvrent effectivement
leurs frontières en respect des engagements pris à Marrakech, tel
n'est point le cas à proprement parlé des pays
industrialisés (UE, Etats-Unis, Chine etc.), qui continuent de
protéger les leurs par un recours à divers mécanismes qui
faussent le jeu de la libéralisation dans le domaine agricole. Il s'agit
par exemple de trop d'exigences en matière phytosanitaire pour les
produits en provenance des PVD et de la pratique déloyale des pics
tarifaires (c'est-à-dire des taxations progressives) quant à
l'entrée desdits produits, sur leurs marchés. Pour ce qui est du
cacao, cette pratique des pics tarifaires se traduit par une taxation à
l'entrée relative au degré de transformation du produit, soit 10%
pour les fèves de cacao, 62% pour le beurre de cacao et 96% pour le
chocolat, sur le marché américain selon un rapport de la CNUCED
et la FAO de 2001.
S'agissant des subventions, alors même que l'OMC
les interdit, les Etats les plus puissants économiquement continuent
d'apporter des soutiens à l'exportation de leurs produits de telle sorte
qu'ils soient vendus à un prix largement en deçà des
coûts de production.
Cette pratique est techniquement appelée dumping et a
des effets de diktat sur les prix internationaux qu'elle contribue à
tirer à la baisse, au détriment des pays pauvres dont le
Cameroun. A ce titre, le rapport d'information N-120 de la chambre haute du
parlement français révèlent les montants des transferts
directs aux agriculteurs de l'ordre de 40 milliards d'Euros pour les pays de
l'Organisation pour le Commerce et le Développement en Europe (OCDE), et
de 39 milliards de Dollars ou 32,5 Milliards d'Euro pour les Etats Unis
d'Amérique. Ces sommes handicapent justement les pays en
développement sur le marché mondial en annulant l'avantage
comparatif qu'ils doivent disposer en matière d'agriculture.
Point 2 : La problématique de la pratique
des prix
Cette question de la pratique des prix peut
s'appréhender sous deux prismes :
Dans un premier temps, le prisme de sa détermination
qui par ailleurs englobe sa négociation et sa définition.
Les Pays en Voie de Développement dont le Cameroun ne
sont pas suffisamment représentés et représentatifs dans
les fora internationaux pour ainsi faire entendre leurs voix et peser de leur
influence quant à cette détermination. L'épaisseur de
l'Afrique dans le commerce internationale qui s'évalue à un peu
moins de 5%, est de nature à justifier et à conforter cet
état de fait.
Dans un second temps, le prisme sa réalisation
c'est-à-dire le prix effectivement versé au producteur de cacao
lors des ventes de son produit.
Elle est l'objet de tous les tripatouillages et
spéculations possibles. Les firmes agroindustrielles multinationales
peuvent être considérées comme caution de la spoliation des
producteurs de cacao, car comme le dit M. Bilana du village
Nkolossan : « si dans les médias l'on parle de 1400
frs par Kg comme prix d'achat initial, ici seuls les plus chanceux ont pu
percevoir 700 frs pour la campagne 2010, c'était le prix « à
prendre ou à laisser « ». Ce qui laisse transparaitre un
arrangement en amont entre les multinationales et les acheteurs qui les
représentent. Les éléments de l'environnement
international ainsi présenté se positionnent comme de
sérieuses pesanteurs à l'épanouissement et à
l'émancipation agricole des pays africains.
Conclusion
Les entraves endogènes à une gestion durable de
la cacaoculture, imputables à la fois à l'Etat et au producteur
de cacao, auxquelles s'ajoutent celles découlant de l'environnement
international tel que sus-évoquées, se perçoivent à
l'évidence comme des handicaps incontournables. Pourtant à
l'analyse, celles-ci revêtent davantage un caractère
d'hypothèques (c'est-à-dire quelque chose de surmontable)
plutôt que d'obstacles au sens de barrières infranchissables et
peuvent ainsi être contournées si des modalités
précises, objet de la deuxième partie de notre étude, sont
implémentées.
IIème PARTIE : LE CADRE GENERAL
D'EXPERIMENTATION D'UNE GESTION DURABLE DE L'ECONOMIE CACAOYERE DANS LA
LEKIE
L'histoire de l'activité cacaoyère, dans le
bassin de production de la Lékié, met en exergue les riches
potentialités de cette région propice à la cacaoculture,
en tant que source potentielle d'épanouissement et de bien-être
des planteurs et des populations de ce bassin d'une part, de même que les
facteurs endogènes et exogènes qui freinent cet essor, d'autre
part.
Ces facteurs limitants sont en réalité des
hypothèques qu'il convient de maitriser et de lever pour permettre un
essor optimal de l'activité cacaoyère et la transformation de
cette zone de production.
En effet, la gestion de l'activité cacaoyère
en vigueur jusqu'alors, peu performante, du fait de l'ensemble de facteurs
à la fois endogènes et exogènes que nous avons
indiqués dans nos précédents chapitres, se
révèle impropre à impulser le développement
escompté des bassins de production et l'épanouissement des
producteurs de cacao. A titre illustratif, Jean-Joël Aerts, dans un
ouvrage collectif révèle que : « les
exportations de cacao qui représentaient 94 milliards de francs en
1984/1985 tombent deux ans plus tard à 72 milliards et ne constituent
plus qu'une trentaine de milliards en 1992/1993. »34(*)
Le cadre général d'expérimentation de
la gestion durable de l'économie cacaoyère dans la
Lékié que nous formulons ici s'appréhende comme
l'aménagement de l'opérationnalisation d'une gestion empreinte de
toutes les exigences du développement durable. Il s'articule autour de
deux axes majeurs. Il s'agit des considérations théoriques sur la
gestion durable de la cacao culture, qui convoquent un ensemble de notions et
concepts empruntés à divers champs scientifiques (sociologie,
économie, anthropologie, développement...) d'une part, et la
formulation de propositions concrètes pour la gestion durable de
l'activité cacaoyère au Cameroun, notamment dans la
Lékié d'autre part.
Chapitre 1 : Les considérations
théoriques sur la gestion durable de la cacaoculture dans le bassin de
production de la Lékié
Les considérations théoriques sont
l'ensemble des préalables idéologiques et conceptuels,
empruntés à plusieurs domaines du savoir, sur lesquels il est
important de prendre appui pour donner vie à la gestion durable en vue
de l'épanouissement de l'économie cacaoyère et par
l'économie cacaoyère.
A ce sujet, on peut relever que la gestion de la
filière cacao a eu jusqu'ici, pour idéologie le capitalisme avec
comme concepts opératoires la libéralisation et la privatisation.
Ce qui a résulté à reléguer les bassins de
production à un statut de zone de pur prélèvement
financier et condamné les planteurs à une posture de force de
travail, sans préoccupation véritable pour leur bien-être
et l'amélioration de leur environnement immédiat. Loin de
congédier la donne libérale et l'idéologie capitaliste qui
la fonde, il nous semble opportun, dans une perspective de développement
durable, de la nuancer pour corriger ses excès et l'adapter aux
réalités du terrain. Dans cette visée, des pratiques
empruntées au socialisme et/ou au constructivisme peuvent être
convoquées, dans le sens de repositionner le producteur de cacao au
centre de son activité et le responsabiliser davantage, en vue de son
épanouissement et de l'amélioration de son cadre de vie.
Section 1 : L'intégration et la promotion du
concept de durabilité dans le management des politiques agricoles au
cameroun
Le rapport Brundtland de la Commission des Nations Unies
pour l'Environnement de 1987, définit le développement durable
en termes de capacité des générations présentes
à satisfaire leurs besoins, sans toutefois compromettre les chances des
générations futures à satisfaire les leurs.
La gestion durable est, pour sa part, à l'aune des
éclairages de la Fondation Allemande pour le Développement
International35(*),
une manière d'organiser et d'administrer empreinte des piliers et
principes du développement durable. Le Code forestier gabonais du
31 décembre 2001 en son article 13 précise par gestion durable,
on entend une gestion qui maintient la diversité biologique des forets,
leur productivité ; leur faculté de
génération, leur vitalité et leur capacité à
satisfaire de manière pérenne les fonctions économiques,
écologiques et sociales pertinentes sans causer de préjudices
à d'autres écosystèmes.
Sur le fondement de ses préalables, une analyse en
filigrane de l'histoire de l'activité cacaoyère dans le bassin de
production de la Lekié révèle que la non
intégration et la non systématisation du concept de
durabilité dans le management de l'activité cacaoyère
jusqu'ici implémentée, est la cause fondamentale du
délabrement de la filière et de la paupérisation continue
du monde rural. D'où l'urgence de l'intégration et de la
promotion de ce concept dans la gestion sus-évoquée objet de la
présente section qui s'articule autour de la présentation des
conditions et des exigences de la durabilité (paragraphe 1) et ses
implications (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : les enjeux et les conditions de la
durabilité
Gérer durablement la cacaoculture dans le bassin de
production de la Lékié est indispensable, si l'on veut offrir aux
producteurs de cacao la possibilité de se libérer du joug de la
misère et de la pauvreté, grâce au juste
bénéfice des fruits de leur labeur ; et à ce bassin
de production la possibilité de se développer et
d'améliorer son cadre de vie en termes d'infrastructures et davantage
d'opportunités à offrir en termes d'emplois et d'offres de
services de qualité, etc.
Point 1 : Les enjeux de la durabilité dans
la gestion de la filière cacaoyère dans la
Lékié
La gestion durable est un concept globalisant qui prend en
compte la solidarité sociale, la responsabilité
écologique, l'efficacité économique et la
responsabilité culturelle, bref tout ce que sous-entend la notion des
piliers du développement durable36(*).
A cet effet, suivant les éclaircissements du chercheur
français Ignacy-Sachs37(*), il ressort globalement que la durabilité, qui
est considérée comme un appel à laisser à nos
enfants un héritage qui ne soit pas pire que celui que nous avons
reçu des générations précédentes, a cinq
dimensions : sociale, économique, écologique, spatiale et
culturelle, qui s'imbriquent mutuellement pour la construction de la gestion
durable, dont la réalisation repose sur les exigences de planification
et de suivi évaluation, proposés par l'Agenda 21 Local et/ou
d'entreprise d'une part ; et d'approche participative, dans l'analyse des
situations et des prises de décisions, d'autre part.
En économie cacaoyère, la gestion durable
convie à mettre en oeuvre des mécanismes et des pratiques visant
à stimuler les acteurs intervenants dans la filière à
quelque niveau que ce soit dans l'optique de maintenir et booster sans cesse
leur motivation et leur implication et partant, améliorer la
productivité.
Point 2 : les conditions de la réalisation
d'une gestion durable dans la Lékié
Les conditions ou modalités de réalisation
de la gestion durable définissent l'approche méthodologique
à adopter pour la rendre effective c'est-à-dire traduire son
existence dans les faits. Dans le cadre précis de l'économie
cacaoyère, ces conditions concernent les trois grands groupes d'acteurs
et se traduisent notamment :
Pour l'Etat, à la fois régulateur et acteur,
en une meilleure définition des politiques agricoles et notamment
cacaoyère à l'aune d'une approche participative, et donc
imprégnée des aspirations réelles des principaux
concernés aux rangs desquels les producteurs de cacao ; leur
implémentation grâce à des stratégies
ingénieusement conçues en termes de ressources humaines,
financières, logistiques s'y rapportant, de leur déplacement
spatio-temporel, et affinées grâce à la
systématisation de l'évaluation.
Pour les acteurs privés notamment le planteur, il
s'agit de définir préalablement et ajuster continuellement ses
buts dans et pour l'activité cacaoyère, c'est-à-dire ce
qu'il y investit et ce qu'il en attend, ses projets, la gestion des ressources
générées par l'activité, la modernisation de son
activité bref l'adoption d'une posture de Business Manager. Et
même si ceci peut paraitre un peu irréaliste dans un contexte
paysan, c'est cependant possible grâce à un encadrement opportun
des pouvoirs publics à travers une démarche informative et
formative constante.
Et pour le groupe des acheteurs qui englobe aussi bien les
acheteurs stricto sensu que les transformateurs et industriels, il est question
de sortir de la logique du profit à tout prix voire à tous les
prix, en ayant toujours à coeur la situation et le cadre de vie des
producteurs de la précieuse fève pour adoptant la logique
rationnelle du commerce équitable seul véritable gage d'une
satisfaction partagée.
Paragraphe 2 : Les implications de la gestion
durable pour la filière cacao
Les implications de la gestion durable se rapportent
à ce qu'elle induit ou tout simplement ce que l'on peut en attendre.
C'est encore le chercheur français Ignacy
SACHS38(*)qui nous permet
d'appréhender clairement et globalement ces implications. Ainsi, se
fondant sur les quatre piliers du développement durable qu'il
développe dans sa théorie, nous pouvons par déduction
formuler que la gestion durable se résume en une mise en valeur et
une émancipation des piliers du développement durable.
Point 1 : Les dimensions sociale,
économique et culturelle de la gestion durable
La dimension sociale de la gestion durable
implique plus de justice et d'équité entre les acteurs de la
cacaoculture (Etat - producteur de cacao - acheteur), une meilleure
définition de l'intérêt général, la recherche
du bien-être collectif, et une meilleure répartition des
retombées de la production.
La dimension économique pour sa part, induit une
organisation plus efficace et efficiente de l'activité cacaoyère,
une plus grande productivité ainsi qu'une répartition plus
équitable des ressources et flux constants d'investissements
publics-privés dans la société. Elle interpelle les
questions de prix, de dette, des termes d'échanges internationaux,
très déséquilibrés entre les acteurs et ceci,
davantage au préjudice des producteurs de cacao.
La dimension écologique de la gestion durable vise
à augmenter la capacité de charge de la terre en faisant en sorte
de valoriser davantage le potentiel des ressources des différents
écosystèmes, pour des fins utiles et en ne minimisant pas les
attaques portées aux systèmes naturels desquels dépend la
vie sur la planète. Il s'agit de manière concrète pour
l'Etat dans sa mission d'assistance technique aux producteurs de cacao, de
promouvoir des techniques d'entretien phytosanitaire saines des exploitations
cacaoyères et partant de les initier à des techniques d'entretien
modernes totalement écologiques à l'instar de la vulgarisation de
la pratique de la polyculture sur les exploitations cacaoyères
(cacaoyers + orangers + banane + citronniers) utiles à la
rationalisation de l'utilisation des engrais et pesticides.
Point 2 : Les dimensions culturelle et spatiale
de la gestion durable
La dimension culturelle de la gestion durable de la
cacaoculture recherche des racines endogènes aux modèles de
modernisation et aux systèmes intégrés de production. Il
s'agit de promouvoir un changement dans la continuité culturelle, en
traduisant le concept normatif d'écodéveloppement en une
pluralité de solutions locales, adaptées à chaque
écosystème, contexte culturel et site. Il est question, pour
l'Etat, de sortir de la logique de considération des bassins de
production comme des zones de pur prélèvement financier, logique
héritée de la colonisation, pour faire la place belle au
développement réel du monde rural en remettant le producteur de
cacao au centre des préoccupations dans la définition et
réalisation des politiques publiques de développement. A ce
propos, le processus de décentralisation en cours dans notre pays, doit
nécessairement être structuré et orienté à
cette fin, pour que la Lékié émerge véritablement
au plan national par l'amélioration substantielle du cadre de vie de ses
localités cacaoyères.
Enfin, la dimension spatiale de la gestion durable en
matière de cacaoculture convie à un meilleur équilibre
ville -campagne et une répartition spatiale des constructions humaines
et des activités économiques, en mettant l'accent sur les
problèmes suivants : l'urbanisation galopante (et anarchique), la
concentration excessive dans les métropoles ; la destruction par
l'homme des écosystèmes fragiles mais importants ; le besoin
de promotion d'une agriculture moderne régénératrice et de
l'agrosylviculture auprès des petits paysans, en leur fournissant les
moyens techniques appropriés, des fonds et un accès au
marché ; le développement d'une industrialisation
liée à la nouvelle génération des technologies
propres, en particulier des industries de transformation de la biomasse en
mesure de créer des emplois nouveaux non agricoles ;
l'établissement d'un réseau de réserves naturelles et de
biosphères pour protéger la biodiversité.
Dans ce sens, il est opportun :
Pour l'Etat, de donner les moyens à la Lekié de
mettre en place une industrie locale, beurre de cacao, chocolaterie, dans le
sens de créer les emplois, faire de la Lekié un label et
promouvoir durablement cette activité. De définir les projets
pour la Lekié dans le temps et dans l'espace, c'est-à-dire ce
qu'elle doit devenir dans 10, voire quinze ans, quels endroits ou
localités doivent porter tels projets et la localisation des
plantations.
Et pour le planteur, intégrer la
nécessité d'une occupation rationnelle de l'espace.
Section 2 : L'Analyse profonde de la question des prix
et de la règlementation en vigueur ainsi que le nécessaire
renforcement de la promotion de certains ingrédients de socialisme dans
la donne libérale
En plus de l'intégration et de la promotion de la
notion de durabilité dans la gestion de l'économie
cacaoyère, le recours à des leviers tels que les prix, la loi
ainsi que la nécessaire intégration des ingrédients de
socialisme dans le libéralisme peuvent certainement conforter l'essor de
la cacaoculture et l'épanouissement de ses acteurs.
Paragraphe 1 : Les prix et la loi comme
instruments d'affermissement de l'économie cacaoyère
Le concept de développement durable met au premier
plan le problème de l'équité, en cherchant à
assurer une juste répartition dans l'espace et dans le temps, des
charges et des bénéfices et cela pour chaque action politique et
dans chaque secteur, tout cela bien huile par un cadre normatif.
Point 1 : Les prix comme mécanisme de
consolidation de l'économie cacaoyère
Le principe d'équité subodore la
nécessité de rompre avec l'idéologie du
développement synonyme d'accumulation et de déséquilibre,
pour s'orienter vers un modèle de développement qui impose la
redistribution, à travers la lutte contre les inégalités.
Cette nouvelle conception du développement intègre les
critères éthiques de la justice sociale et de la
responsabilité à l'égard des générations
présentes et futures.
De plus, l'équité intra
générationnelle et intergénérationnelle que la
nouvelle vision du développement impose, nous pousse à nous
projeter vers une durabilité sociale basée sur la
solidarité intra et intergénérationnelle. La recherche de
l'équité toujours dans le cadre de la satisfaction des besoins
élémentaires de chacun et de la possibilité d'aspirer
à une vie meilleure, impose de « re »-concevoir le
développement pour redistribuer les richesses. Cela signifie qu'il faut
s'orienter vers un processus de changement dans lequel l'exploitation des
ressources, le choix des investissements, l'orientation du développement
technique et les changements institutionnels sont déterminés en
fonction des besoins présents et futurs. La gestion durable implique
donc une transformation durable de l'économie et de la
société39(*). Dans cette perspective, les prix et la loi
constituent les moyens efficaces de transférer les ressources, le
contrôle de l'initiative aux populations des bassins de production.
Les prix sont l'arme la plus puissante pour augmenter les
revenus agricoles, motiver le planteur et entrainer le transfert massif des
revenus de la ville vers les campagnes ou des Pays développés
vers ceux qui sont en voie de l'être, dans la perspective de
réduire les inconvénients de la logique libérale de
fixation des prix par le marché national et international.
Une étude de Jean Marc ELA de 1979,
révèle par exemple que dans les années 1975, les
compagnies d'import-export qui dominaient le commerce interne et externe
recevaient pour chaque kilogramme de cacao camerounais vendu à
l'étranger, une marge bénéficiaire de 220 Frs. Or le prix
payé aux paysans producteurs de cacao par les intermédiaires,
oscillait entre 70 et 90 frs CFA, soit trois fois moins que la marge
bénéficiaire des multinationales : expression
accentuée de la spoliation du planteur40(*).
L'argumentaire qui précède indique en substance
le climat qui prévaut dans la pratique du prix du cacao sur le
marché. Ce dernier est prescrit préalablement par les traders des
bourses de Londres et de New York, travesti par les multinationales, leurs
négociants et intermédiaires et, enfin, imposé aux
planteurs, alors contraints de l'accepter (le prix) tel quel. Positionné
à la queue de cette impitoyable échelle de puissance sans aucune
voix au chapitre, le planteur apparait dans toute sa faiblesse.
Le défi en ce qui concerne le prix, est alors de le
rendre rémunérateur à l'endroit du producteur de
cacao ; en le définissant équitablement et le garantissant
effectivement, tout en contrôlant l'inflation dans les bassins de
production, pour en jouir pleinement.
La définition équitable du prix du cacao
signifie, au plan international, une présence et une participation
effective des Etats producteurs du Sud aux fora de négociation
internationaux (OMC et ICCO) et une sensibilisation des acheteurs à une
intégration de la logique du commerce équitable (partenariat
gagnant- gagnant) aux fins de la promotion du respect de la valeur travail,
gage du maintien et de la motivation des planteurs dans l'économie
cacaoyère : expression achevée de la durabilité pour
ce qui les concerne.
Au plan interne, une consultation préalable des
producteurs par l'Etat au sein et au-delà des fora institutionnels
(CICC, Coopératives, GIC), aux moyens de techniques consultatives
diverses (sondages et autres ...), pour la fixation du prix (bord champ et
hors champ) sur le marché national ; l'idéal étend
qu'il oscille au minimum autour des 60% du prix du marché international
comme suggéré à la récente Conférence
Mondiale sur le cacao.
La garantie effective du prix est un engagement pris par
l'Etat de maintenir un prix d'achat standard du cacao au producteur en
dépit de la fluctuation de ses cours mondiaux. Elle est
nécessaire à la protection du planteur de la filouterie des
acteurs intermédiaires (représentants officiels des firmes
multinationales et nationales et entremetteurs), ainsi que des
désagréments découlant des fluctuations profondes des
cours mondiaux de la précieuse fève.
La garantie peut être satisfaite par l'idéal de
la mise en branle d'un mécanisme efficace et efficient de cautionnement
du prix bord champ au producteur de cacao. Toutefois, celle-ci doit
nécessairement passer par le recours à l'information publique
(les médias), pour le porter à la connaissance de tous et de
chacun ; à la loi pour fixer le cadre d'exercice de
l'activité d'acheteur aux fins d'en sanctionner les véreux (les
spéculateurs sauvages) couramment appelés coxeurs, ainsi que par
la mobilisation des brigades des agents des eaux et forêts, des
contrôleurs des prix et des agents de douanes ; tout ceci
facilité en amont par une indispensable structuration du monde rural tel
que nous le présenterons dans le prochain chapitre.
Le contrôle de l'inflation dans les bassins de
production aux fins de jouir pleinement du prix du cacao devenu dès lors
rémunérateur, impose la facilitation de l'accès aux
produits de première nécessité (électricité,
pétrole, médicaments d'urgence...) à des prix rationnels.
Il s'agit d'un défi organisationnel et structurel, notamment celui de la
modernisation des zones rurales. Défi qui ne peut à
l'évidence être résolu à court terme. Mais
conjoncturellement (ponctuellement), la solution peut résider dans le
redéploiement de la MIRAP (Mission Régulation des
Approvisionnement en Produits de Grande Consommation) en faveur du
marché rural. Concrètement, l'Etat se doit de prioriser dans
l'action de la MIRAP, les zones rurales. Celle-ci devra désormais de
façon fréquente, selon un calendrier bien arrêté,
publié et donc connu, ravitailler ces zones en produits de
première nécessité, avec pour avantage la limitation de la
pénurie du fait de l'accessibilité facilitée et la
rationalisation de leur coût, et en prime une économie en frais de
transport.
Point 2 : La loi comme outil de stabilisation de
l'économie cacaoyère
Comme le relève KAMTO
Maurice : « le droit norme le comportement des acteurs
sociaux vis à vis de l'environnement41(*) » ; c'est-à-dire qu'il ne
peut y avoir de protection, de prévention ou de promotion sans un
encadrement juridique préalable ou plus largement, sans prescription de
comportements car comme il le souligne par la suite, « Nombre
d'acteurs sociaux ne respectent la loi que par crainte de la sanction dont elle
est assortie; c'est cette crainte qui va les amener à s'abstenir
d'enfreindre les règles protectrices de l'environnement42(*)».Dans ce sens, le mérite de
l'établissement des bases juridiques d'une gestion durable revient dans
le contexte juridique actuel de notre pays, à la loi N-96/12 du 05 aout
1996 portant Code de l'environnement qui l'appréhende en
matière forestière.
Pour ce qui est de la gestion durable dans la
filière cacaoyère , le problème de sa non
effectivité ne réside pas fondamentalement dans l'inexistence de
lois s'y rapportant mais davantage dans la pléthore des textes (ceux
créant les organismes de gestion de la filière et ceux portant
commercialisation des fèves de cacao etc.) se rapportant à sa
structuration et à son articulation ou fonctionnement ; leur manque
de cohérence et d'actualisation (à l'instar des statuts et
règlement de la SODECAO qui datent de 1974), révèlent leur
inadéquation à l'essor de la cacaoculture et à
l'épanouissement de son acteur phare qu'est le producteur de cacao.
D'où la nécessité de plaider pour l'adoption d'une loi
unique, conçue comme le ciment de la gestion durable envisagée,
car appelée à chapeauter toute l'architecture de
l'économie cacaoyère, dans le sens de la définition de ses
organismes et acteurs ; la détermination de leurs modes
opératoires et la rationalisation de leurs rapports. Il lui incombera
entre autres, de préciser les conditions de la garantie effective du
prix au planteur, d'assainir la gestion de la filière par le
démantèlement et l'épuration des acteurs parasites
intermédiaires à l'instar des coxeurs, de même que les
mauvaises pratiques qui entravent le bon fonctionnement de cette
filière.
En somme, c'est une loi se rapportant de manière
précise à la thématique de la gestion durable de cette
filière au Cameroun qui proposera et conduira à un changement
fondamental de l'approche de gestion et un ancrage national de la gestion
durable dans les moeurs en matière d'économie cacaoyère en
apportant des solutions durables aux dysfonctionnements et problèmes
observés jusqu'alors.
Paragraphe 2 : Le nécessaire renforcement
de la promotion de certains ingrédients de socialisme dans la donne
libérale
Le capitalisme qui, en économie cacaoyère,
s'exprime en termes de libéralisme, signifie la recherche
effrénée du profit. A première vue, ce dernier se
présente dans le cadre de cette étude comme une entorse à
l'essor de la cacaoculture et de l'épanouissement du planteur.
Point 1 : Le contexte et les enjeux de cette
nécessité
La gestion libérale de l'économie
cacaoyère a entrainé une série de blocages structurels sur
le plan social et économique. La dégradation permanente du
pouvoir d'achat de l'agriculteur, son déclassement par rapport aux
salaires des centres urbains, ont contribué peu à peu à
dévaloriser le métier de planteur. Comme les autres
régions soumises à la monoculture industrielle, la zone
cacaoyère n'a été considérée par les
planificateurs, que comme un secteur de pur prélèvement
financier. L'économie cacaoyère ignore les conditions globales
d'existence du planteur. Elle ne s'intéresse à sa vie que comme
une force de travail, elle n'est pas orientée vers la modernisation
radicale des campagnes. Dans cette perspective, Jean Marc ELA affirme
que : « le cacao n'a pas induit autre chose qu'une
économie de traite et un déclassement progressif des
paysans ».
D'où la nécessité de son humanisation
dont l'objectif est de remettre le producteur de cacao au centre de son
activité et de le motiver en permanence. Il y va de la survie de
l'activité. Car comment continuer de s'investir dans une activité
qui n'a, apparemment, plus aucun mérite aux yeux d'une
société à qui elle procure pourtant d'importantes et
précieuses ressources financières? Pourquoi continuer de se
sacrifier pour une activité qui ne rapporte rien du tout, sinon pas
grand chose ? C'est dans la réponse à ces questions majeures
que s'apprécie la nécessité de l'humanisation du
capitalisme qui de nos jours, prévaut en économie
cacaoyère, par la convocation et la promotion de certains
ingrédients de socialisme.
Point 2 : Les implications de ce
nécessaire renforcement
Le renforcement de la promotion de certains
ingrédients de socialisme dans la donne libérale incombe de prime
à bord à l'Etat responsable de l'encadrement de tous les autres
acteurs ainsi que la diffusion et la régulation des pratiques salutaires
à l'émancipation d'une gestion durable.
De façon concrète il s'agit pour l'Etat, dans
le sens d'une meilleure et juste redistribution des fruits de leur labeur,
d'accompagner les bassins de production dans la transformation et
l'amélioration de leur cadre de vie, en les dotant d'infrastructures
viables (routes, électricité, adductions d'eau, hôpitaux,
écoles...), éléments satisfacteurs et motivateurs à
la pérennité de culture du cacao. Car, si les populations
ressentent, comme c'est le cas de Ekekom, localité
périphérique de Sa'a, village natale de M. NDONGO ESSOMBA, grand
producteur de cacao devenu par ailleurs Honorable Député ;
que c'est grâce à leurs efforts dans l'activité
cacaoyère qu'ils ont telle ou telle autre infrastructure (route, centre
de santé, établissement scolaires...), elles ne s'en trouveront
que motivées et s'éloigneront de l'idée de l'abandonner un
jour.
Et dans cette impulsion, il est question de faire glisser
les activités d'encadrement et de commercialisation dans la logique de
l'économie sociale et solidaire. Celle-ci regroupe les activités
de coopératives, des mutualités et des associations.
L'éthique en vigueur sur ce plan vise la finalité de service aux
membres et à la collectivité, plutôt que de profit,
l'autonomie de gestion, la démocratisation du processus de
décision, la primauté des personnes et du travail sur le capital
dans la répartition des revenus ; le but ultime étant de
neutraliser l'égocentrisme de certains acteurs afin de mutualiser et de
faciliter le bénéfice des services essentiels (entretien
phytosanitaire, santé...).
Chapitre 2 : Quelques propositions pour une
gestion durable de l'activité cacaoyère dans la
Lékié
L'objectif de ce chapitre est de montrer comment la
gestion durable peut être réalisée de façon
concrète.
La crise économique des années 80,
confortée par l'inefficacité de l'interventionnisme
étatique au Cameroun, avec la mise en oeuvre des Programmes d'Ajustement
Structurel, va conforter l'option du libéralisme. Ceci s'est traduit
globalement par la limitation du rôle de l'Etat dans le secteur agricole,
spécifiquement dans la production et la commercialisation du
cacao pour faire une place plus importante aux acteurs privés. Ce
choix s'est imposé sans un accompagnement judicieux de la part de
l'Etat, qui s'en pressa de passer de l'Etat providence à l'Etat
régulateur, omettant son rôle d'acteur, alors même que la
fusion de ces deux aspects, Acteur et Régulateur, aurait pu à
l'évidence garantir une appropriation et une optimisation
adéquate de la donne libérale et ses opportunités au
Cameroun et dans la Lékié notamment. Cette mutation soudaine a
résulté au délabrement de la filière. Pourtant des
Etats comme la Côte d'Ivoire ou le Ghana n'ont pas adopté le
même cheminement. Ces deux pays sont devenus leaders dans le monde de la
cacaoculture, avec respectivement 1 300 000 et 1 000 000 de tonnes en
201143(*). Au Cameroun,
les chiffres les plus optimistes affichent 220 000 tonnes en 201144(*).
L'urgence est donc de fonder l'économie
cacaoyère dans la durabilité, eu égard à son
importance dans la dynamique de la relance de la croissance de
l'économie nationale et les perspectives d'émergence
envisagées à l'horizon 2035 ; ainsi qu'à la
nécessité de motiver sans cesse les producteurs de cacao des
bassins de production sur lesquels repose fondamentalement cette
activité.
Section 1 : La rationalisation de l'action de l'Etat
dans la filière
De l'article de Pierre JANIN, au titre suffisamment
évocateur, « Un planteur sans
l'Etat peut-il encore être un
planteur », nous retenons que l'ancrage de la
durabilité dans la filière cacao dépend fondamentalement
de l'action effective de l'Etat, à qui incombe la conception des
politiques publiques agricoles, porteuses du bien-être de ses
populations ; et leur mise en oeuvre par la création d'institutions
et organismes appropriés.
La rationalisation de l'action de l'Etat dans la
filière que nous envisageons se rapporte d'une part, à
l'amélioration de sa présence et à la facilitation de son
identification, car le trop plein d'organes jusqu'ici en concurrence dans la
gestion de la filière n'est pas de nature à favoriser la
satisfaction des objectifs, sus-évoqués ; et se traduit
d'autre part, par une amélioration de la visibilité et
l'optimisation de sa démarche. Il n'est certainement pas question pour
l'Etat de redevenir interventionniste au sens littéral du terme, mais de
mieux encadrer, aux sens structurel et fonctionnel, la logique libérale,
dans l'optique de maîtriser ses inconvénients et d'en optimiser
les opportunités relativement à la filière cacao.
Cela passe nécessairement par, l'instauration d'un
organe unique de gestion de la filière (paragraphe 1), et une
redynamisation de la coopération en matière cacaoyère
(paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La création d'un unique
organe étatique de gestion de la filière cacao - L'Office
Camerounais de Cacao et du Café (O3C)
Point 1 : Justification de la création de
l'O3C
L'un des plus grands handicaps à la mise en oeuvre
et à l'émancipation d'une gestion durable de la filière
cacaoyère demeure la mise en place d'une multitude d'organismes (04 au
total), aux missions quasi similaires. Ce qui contribue à gaspiller les
ressources financières, à générer des
chevauchements voire des blocages et in fine, à diluer
l'efficacité de l'action de l'Etat dans la filière.
Nous pensons en effet que l'existence à la fois
d'un Office de Commercialisation du Cacao et du Café (ONCC), d'un Fonds
de Développement du Cacao et du Café (FODECC) ,d'une Cellule de
suivi de la cacao culture au sein des Services du Premier Ministre, de la
SODECAO, aux côtés d'une Direction de la filière cacao
avec de nombreux programmes connexes au Ministère de l'Agriculture et du
Développement Rural (MINADER) marque une dispersion d'énergie. Il
est alors opportun que l'organe législatif de l'Etat (le parlement) vote
une loi harmonisant le fonctionnement de la filière et créant
deux institutions au coeur de la gestion de la cacaoculture : l'Office
Camerounais de Cacao et de Café (O 3 C), fédération, mieux
absorption de toutes les structures existantes, représentant unique de
l'acteur étatique ; et le Conseil interprofessionnel du Cacao et du
Café(CICC), représentant formel des acteurs privés de la
filière, interlocuteur privilégié de l'Etat. (cf. infra,
section 2- paragraphe 2)
L'Office Camerounais de Cacao et de Café (O 3 C),
sous la tutelle des MINADER, MINCOMMERCE et MINFI, représentés au
sein d'un conseil d'administration devant être élargi au CICC,
sera le seul organisme à la base du développement du cacao pour
toute l'étendue du territoire nationale.
- Sur le plan technique, sa mission consistera à
encadrer la production nationale et garantir la qualité du produit made
in Cameroon, avec en charge entre autres, la fourniture en qualité et en
quantité du matériel végétal. Il devra en outre se
positionner au plan industriel notamment dans la transformation des
fèves en s'armant d'un véritable pan industriel (une usine de
transformation : chocolaterie, cosmétique) et de plantations
propres à l'instar de la SOSUCAM sise à Mbandjock. En plus il
devra conforter sa contribution à l'amélioration des visages des
bassins de production, à travers la dynamisation d'un important
programme d'entretien des pistes de collecte pouvant être facilité
par l'initiation d'un partenariat avec le Génie Militaire, et les
exploitants forestiers.
Enfin, il devra oeuvrer à la modernisation de
l'activité par le biais des conventions ingénieuses avec les
instituts de recherche à l'instar de l'IRAD pour le matériel
végétal amélioré ,et l'Ecole Nationale
Supérieure Polytechnique pour l'amélioration et l'actualisation
d'un outillage jusqu'ici rustique.
Point 2 : Les attributions et l'organisation de
l'O3C
- Sur le plan de la commercialisation du produit, il s'agira
d'encadrer et faciliter cette dernière, en certifiant les acheteurs
conjointement avec le CICC d'une part, en mettant à disposition des
balances fiables et l'information sur le prix par campagne ; en organisant
et en supervisant les marchés périodiques ; en assurant la
supervision et le contrôle de la qualité du produit à la
vente à l'exportation, d'autre part.
- Sur le plan organisationnel et fonctionnel, de
manière globale, l'Office Camerounais de Cacao et de Café (O 3 C)
sera une entreprise parapublique comprenant trois(03) principales Directions
à savoir :
*Une Direction Générale, organe exécutif
en charge du management général, c'est-à-dire, de la
coordination et de la cohésion des activités de tous les autres
départements de cet organisme.
*Une Direction Technique, sentinelle de la qualité du
cacao camerounais, précisément en charge de la fourniture du
matériel végétal, de l'accompagnement technique des
producteurs de cacao, de l'encadrement des exploitations propres à
l'Office Camerounais de Cacao et de Café (O 3 C), avec en plus, une
succursale industrielle responsable de la transformation des fèves en
produits semi-finis et finis (beurre de cacao, cosmétiques et
chocolats).
*Une Direction Commerciale dont le rôle se
déclinera en l'encadrement de la commercialisation des fèves de
cacao et produits dérivant de son pan industriel. De plus elle sera en
charge de la labellisation des produits des artisans (transformation
artisanale) dans le cadre de la mise en branle d'une politique de commerce
équitable.
Le financement de son fonctionnement pourra alors
découler des subventions budgétaires accordées par l'Etat,
des prélèvements à l'exportation, mais à terme, et
ce, en grande partie, des ressources issues de la commercialisation des
fèves de ses exploitations et des recettes de son bras industriel.
Schématiquement cela peut donner lieu à la construction d'un
Immeuble Cacao pour l'abriter dont l'architecture en forme de cabosse peut
avoir l'allure qui suit.
Figure 1 : Immeuble Cacao
ou
Immeuble Siège de l'O3C
Paragraphe 2 : La redynamisation de la
coopération en matière cacaoyère
Du fait de la bonne place que le cacao occupe sur
l'échelle des produits surclassés du commerce international et de
son importante contribution au financement du budget de l'Etat camerounais (15%
du PIB), les questions se rapportant à la gestion durable de
l'économie cacaoyère ne sauraient être
gérées efficacement de manière autarcique,
c'est-à-dire purement au plan interne de l'Etat du Cameroun. Il s'agit
d'un produit stratégique, dont la valorisation continue impose
l'ouverture au monde. La convocation et l'instrumentalisation de la
coopération en matière cacaoyère se signale ainsi comme
une nécessité.
Redynamiser la coopération en matière
cacaoyère, oblige à la repenser dans l'optique de la rendre
performante, c'est-à-dire efficace et efficiente aux fins de servir au
mieux les intérêts de la filière cacaoyère
camerounaise. Selon le Professeur Pierre MOUKOKO MBONJO enseignant des
Relations Internationales, la coopération internationale s'entend comme
un ensemble de rapports et flux divers entre les acteurs du système
international. Elle est à la fois classique : Etat à Etat
(bilatérale), Etat(s) à OI ou OI à OI
(multilatérale) ; et décentralisée
(c'est-à-dire, de collectivité territoriale
décentralisée à collectivité territoriale
décentralisée).
Point 1 : Positionner l'O3C au centre de la
coopération internationale classique
La coopération internationale classique est une
affaire d'Etat à Etat(s) ou d'Etat à organisation(s)
internationale(s) et repose au préalable sur des conventions bi et/ou
multilatérales.
Redynamiser la coopération internationale classique
revient pour l'Etat à positionner l'Office Camerounais de Cacao et de
Café (O 3 C) dans la dynamique de partenariats nécessaires
à l'amélioration de ses compétences, et partant à
la réalisation de ses missions telles que définies dans son
agenda 21 d'entreprise.
A ce titre, la coopération avec le Brésil a
tout intérêt à être refondée et
rationnalisée dans le sens de faciliter et d'améliorer la
fourniture en matériel végétal en qualité et en
quantité par l'Office Camerounais de Cacao et de Café (O 3 C).
Dans le même élan, un cadre partenarial devrait
être aménagé avec les grands producteurs tels que le Ghana
et la Côte d' Ivoire dans une visée d'échange d'expertise
et de formation continue du personnel. De même l'expertise des grandes
puissances agroindustrielles en matière de cacao tels que les USA ou la
Suisse devrait être sollicitée dans le contexte d'un partenariat
favorable à l'émancipation de son bras industriel
sus-indiqué.
Point 2 : Instrumentaliser la coopération
décentralisée comme levier d'optimisation de l'activité
cacaoyère dans la Lékié
La coopération décentralisée est une
donne nouvelle dans le cadre des initiatives locales de développement.
Au Cameroun, suivant le décret du Premier Ministre de 2011 s'y
rapportant, elle repose sur un accord entre deux collectivités ou leur
groupement et se rapporte à l'ensemble des initiatives et actions
qu'elles mène ou prévoit de mener conjointement.
Inscrite dans une logique de développement et de
valorisation ou d'ouverture et d'échanges, et traduite en termes
d'action internationale selon le jargon latino-américain, la
coopération décentralisée se présente comme une
aubaine à la fois pour les collectivités territoriales
décentralisées des bassins nationaux de production en
général et de la Lékié en particulier, par
ailleurs plus proches des producteurs de cacao que l'Etat au sommet ; et
pour les perspectives d'essor de l'activité cacaoyère.
De façon concrète, il s'agit pour les
communes du département de la Lékié de définir et
structurer leurs politiques de développement, de les ouvrir à
l'international en tissant des partenariats plus construits et plus
fouillés s'appuyant sur les besoins et potentialités locaux, des
compétences techniques fortes et des ressources
nécessaires. Et à l'O3C, il revient d'embrayer sur les
communes du département de la Lékié, afin qu'elles fassent
de la cacaoculture et du cacao un thème de coopération
décentralisée.
Ainsi ces communes pourront par exemple aller vers leurs
homologues ou consoeurs du Canada, de Suisse (...), grands consommateurs de
cacao, pour susciter leur intérêt à venir soutenir, mieux,
investir dans l'activité cacaoyère, car elles seront
désormais reconnues pour la bonne qualité de la fève qui y
est produite, et favorable à l'organisation permanente des mini comices
à l'instar du FestiCacao ou de la Journée Départementale
du Cacao sus présentés.
Pour ce qui est de l'essor de l'activité
cacaoyère, les producteurs de cacao pourront à la faveur des mini
comices agropastoraux, périodiquement organisés sous la coupe de
la coopération décentralisée, nouer de nouveaux
partenariats aux fins de bénéficier des appuis en
matériel, en expertises techniques (structurelles et organisationnel) et
opportunités de financements.
Section 2 : L' indispensable structuration du monde
rural
Analphabétisme, ignorance, absence
d'électrification, rareté des ressources financières,
déficit d'infrastructures viables (écoles, dispensaires, routes
etc...) et individualisme exacerbé, sont autant d'éléments
d'aggravation de la grande pauvreté, mieux de l'extrême
précarité du monde rural. Ce constat général se
décline pour ce qui est de la Lékié en des taux de
couverture sanitaire et de scolarisation insuffisants ou faibles et un revenu
moyen par habitant de l'ordre de moins de 500Fcfa/jour, très insuffisant
pour garantir des conditions de vie minimalement descentes car bien loin des
standards internationaux et en inadéquation à la conjoncture
nationale en terme du coût de la vie.
A l'évidence donc, les problèmes de
développement des bassins de production ne peuvent trouver des solutions
adéquates que sous formes normative et structurelle. La
nécessaire structuration du monde rural dans lequel évolue la
Lékié relève alors de cette précédente
observation. Structurer le monde rural signifie organiser ses acteurs,
aménager des espaces de dialogue et de travail pour mieux articuler
leurs initiatives de développement.
Paragraphe 1 : Fondements et finalités de
la structuration du monde rural
Dans le décèlement des causes de la
pauvreté en milieu rural, la thèse écologiste nous
enseigne que celles-ci sont d'abord à rechercher dans les faits de
l'homme et de son environnement (analphabétisme, malnutrition,
réchauffement climatique etc.). Mais c'est davantage la thèse
économiciste qui nous édifie mieux à ce sujet en nous
renseignant que, ces causes se résument surtout en la non maîtrise
de la mise en oeuvre de politiques économiques capables de favoriser la
production des richesses et leur équitable
« re »-distribution dans le rapport espace-temps. Cette
réalité traduit une défaillance de l'appropriation du
concept de développement à la base ou développement
endogène suivant les termes de Robert Chambers45(*).
Le développement à la base ou
développement endogène peut se comprendre comme étant un
processus par lequel une société, à un moment de son
histoire, s'organise pour une meilleure mobilisation et une meilleure
utilisation des ressources et forces dont elle dispose en vue d'atteindre un
état jugé satisfaisant ou meilleur par elle-même,
conformément à ses aspirations et ses normes culturelles et
jugé également plus conforme à la dignité humaine,
d'après des valeurs universellement reconnues.
De manière simplifiée, le développement
à la base peut être considéré comme un type de
développement centré sur les besoins fondamentaux des populations
et sur leur propre capacité d'organisation.
A l'échelle rurale, le développement
endogène a pour synonyme le développement rural. Il est
destiné à rendre un groupe spécifique de gens, hommes et
femmes, pauvres de la campagne, capables de gagner, pour eux-mêmes et
leurs enfants plus que ce qu'ils désirent et dont ils ont besoin.
Il implique alors d'aider les populations rurales à
exiger et à contrôler une plus large part des bienfaits de la
production des richesses. C'est donc au coeur de cet argumentaire que se situe
la nécessité de structurer véritablement le monde rural,
mieux que ce qui se fait au demeurant.
Point 1 : La structuration du monde rural comme
gage d'un amortissement des coûts d'exploitation et d'une meilleure
défense et promotion des intérêts des producteurs de cacao
et de leurs localités
S'il est vrai que souvent, on rentre dans
l'activité cacaoyère à titre individuel en investissant
ses ressources propres, force est cependant d'indiquer qu'à terme,
l'exploitation a des coûts importants (entretien des champs,
sollicitation de l'expertise technique, achats des engrais phytosanitaires),
surtout pour qui veut de manière permanente garantir une production de
qualité ; et ces coûts sont davantage importants pour les
vergers de grandes surfaces (5-8-10 hectares...). Il devient alors
indéniablement salutaire pour les producteurs de cacao de se mettre
ensemble, en se constituant en groupe dans le sens d'amortir les coûts
d'exploitation et de mutualiser les risques. Ne dit-on pas l'union fait la
force.
De plus, pour assurer une meilleure défense et
promotion des intérêts des producteurs de cacao et de leurs
localités, la structuration se présente comme un pare-feu aux
spéculations de toutes sortes et aux tripatouillages des acheteurs
véreux (trucages des balances) dont sont régulièrement
victimes les producteurs de cacao solitaires au moment des ventes de leur
produit. Elle est aussi une aubaine pour une meilleure négociation du
prix en ce sens que, s'il est facile de tromper un individu et que seul on est
vulnérable, dans le groupe cela devient difficile voire peu probable,
les faiblesses des uns étant comblées par la vigilance des
autres.
Organisés, les acteurs de la cacaoculture deviennent
faciles à identifier et à rassembler. Ils peuvent ainsi mieux
formuler et présenter leurs opinions, revendications et suggestions aux
acteurs d'en face (Etat, acheteurs, partenaires...).
Point 2 : la structuration du monde rural dans
l'optique de soutenir la modernisation du monde rural et en faire un
véritable pôle de développement
Dans la logique d'un développement endogène,
conçu et mis en oeuvre par les populations elles-mêmes, le monde
rural devient un interlocuteur ainsi qu'un véritable pôle de
bien-être et un argument valable pour maitriser l'exode rural. Aussi
est-il nécessaire de mettre en oeuvre un schéma organisationnel
adéquat, devant permettre véritablement de penser local et d'agir
local.
Dans les faits, cela revient à crédibiliser
formellement les institutions communautaires (chefferies, comités locaux
de développement, GIC, coopératives) pour la promotion de
l'intérêt local par la définition et l'appropriation d'un
plan de développement communautaire se déclinant en la
réalisation des projets dont les financements nécessaires
pourront découler principalement des ressources financières
issues de la commercialisation des produits des cacaoyères
communautaires. Lesdites cacaoyères devraient préalablement
être créées sur la base d'un cadrage juridique
adéquat (régime foncier et d'exploitation), ainsi que de
financement issu des contributions de chaque membre.
Paragraphe 2 : Les modalités de la
structuration du monde rural
La présentation schématique des structures
à mettre en place pour l'épanouissement de l'activité
cacaoyère et de son acteur en milieu rural, notamment à la
Lékié, constitue l'objet de notre paragraphe. Il s'agit
concrètement d'une promotion des GIC, des comités locaux de
développement, des coopératives et du CICC.
Point 1 : L'encadrement et promotion des
organismes locaux
La nécessité de lutter contre la
pauvreté, les excès du libéralisme notamment l'exclusion
sociale accélérée par les rudesses des Plans Ajustement
Structurel, la logique du marché fondée sur le profit à
tout prix, soulignent l'urgence de promouvoir un autre mode de gestion
économique mieux adapté au monde rural qui privilégie la
vie associative, l'entraide et la solidarité.
Un Groupement d'Intérêt Communautaire (GIC) est
une personne morale de droit privé qui a pour but de faciliter ou de
développer les activités de ses membres, alors qu'une
coopérative (Coop) est un regroupement d'acteurs (producteurs,
acheteurs...) ayant des intérêts communs ; et un
Comité Local de Développement (CLD), une association de personnes
ressortissantes d'une même localité ayant à coeur
l'impulsion et amélioration du cadre et conditions de vie de leur
localité.
Partant de la démarche individuelle, ces
institutions associatives peuvent constituer de véritables
ingrédients de promotion de l'activité cacaoyère dans le
bassin de production de la Lékié. Ceci dans la mesure où,
quand elles ne sont pas directement propriétaires des exploitations,
elles peuvent prendre en charge certains aspects de cette activité
(transformation, vente des produits dérivés). Le cadrage
juridique (Loi n° 90/053 du 19 décembre 1990 sur la liberté
d'association au Cameroun et Loi n°92/006 du 14 Août 1992 concernant
les sociétés coopératives et Groupes d'Initiative Commune)
sur lequel elles sont adossées, a favorisé leur
foisonnement dans la Lékié. Sauf que ce régime attrayant
par les exemptions fiscales qu'il accorde conduit à des dérives
importantes au rang desquelles, les usurpations permanentes de ce statut par
des sociétés privées de prestation de services n'ayant
rien à voir avec les activités agricoles ou pastorales dans le
but d'échapper à la fiscalité ; l'autre faiblesse
relevée tient au déficit managérial se traduisant soit par
la mise en avant d'une logique de regroupement familial aux dépens
même d'une dynamique d'efficacité, soit par des fréquents
détournements de fonds qui mènent ces regroupements
inexorablement à la ruine.
Il devient alors indispensable que les Comités Locaux
de développement, les GIC et les sociétés
coopératives sortent des logiques désastreuses sus
décrites pour épouser véritablement leur destin de cadres
et instruments démocratiques de développement, en adoptant des
processus managériaux de compétence et d'efficacité
fondés sur la promotion de l'intérêt communautaire.
Dans cette perspective, une refondation du CICC
s'avère nécessaire. La nouvelle structure aura
pour mission principale d'organiser et de défendre les
intérêts de ses membres auprès de l'Etat, désormais
rationnellement et efficacement représenté par l'O3C, dans
l'optique de garantir la discipline et l'efficacité de
l'activité.
Point 2 : la réforme du CICC et son
positionnement au centre de cette structuration
La reforme vise à ameliorer l'organisation du CICC et
à optimiser l'efficacité et effectivité de ses missions
dans le sens d'e l'epanuoissement de et par la cacaoculture dans les bassins de
production en priorité et pour l'Etat du cameroun dans sa
globalité .
1- Nature et vocation du CICC
Le Conseil Interprofessionnel du Cacao et du Café
(CICC) sera refondé sur les nouvelles dispositions législatives
et réglementaires de gestion des filières cacao-café.
Le CICC regroupe les organisations Professionnelles de
l'Agriculture, du Commerce, de l'industrie et des Services des filières
cacao/cafés qui adhèrent à ses Statuts et constitue une
association d'action, de représentation, de coordination, de liaison et
d'information.
Conformément à la nouvelle
législation sur les filières cacao et cafés, le CICC aura
pour missions :
- de donner son avis ou de présenter ses propositions
sur toute question ou reforme du système de développement, de
commercialisation, de taxation et de financement des Cafés et du Cacao
;
- de déterminer les critères d'exercice dans les
professions de la commercialisation des Cafés et du Cacao et fournir une
caution morale du bon déroulement des opérations ;
- de veiller à l'application des règles qui
assurent une concurrence saine et loyale entre les opérateurs membres
des organisations professionnelles affiliées au CICC et adhérant
aux présents statuts ;
- de gérer la Caisse Mutuelle de Cautions et de
Garanties Professionnelles, et de concevoir dans le cadre de la Caisse Mutuelle
de Cautions et de Garanties Professionnelles un système d'assurances et
de réassurance professionnelles ;
- d'apporter à toutes les Organisations
professionnelles constituant les différents collèges
représentés à son Assemblée Générale
tout concours et/ou service en vue d'accroître l'efficacité de
l'ensemble de l'organisation professionnelle ;
- de représenter les professionnels des filières
camerounaises auprès des organisations internationales du cacao et du
café.
- Organisation du CICC
Le CICC disposera de :
Une Assemblée Générale
(AG) constituée de
représentants de différents collèges, chacun de ces
collèges correspondant à une catégorie professionnelle
présente dans les filières de production et de commercialisation
du cacao et des cafés à savoir, les organisations des
producteurs ; celles d'acheteurs, d'usiniers, et de conditionneurs ;
et les organisations professionnelles d'exportateurs ; les organisations
professionnelles des Transformateurs Industriels locaux suivant des conditions
precises.
Un Conseil Exécutif, organe de
direction du CICC.
Un Comité Permanent, chargé de l'examen des
problèmes techniques et des aspects
pratiques de la mise en oeuvre des décisions prises.
Un Conseil de Discipline, garant du respect
du code de déontologie, et se réunit pour statuer sur les
infractions et les litiges liés à son application;
Un le Secrétariat Permanent,
chargé de mettre en oeuvre les résolutions de l'AG, d'assurer
l'administration et la gestion du CICC au quotidien, et du secrétariat
des autres instances. Il n'est pas constitué d'élus.
2- Ressources du CICC
Le CICC aura pour ressource un prélèvement de 2
200 F CFA/tonne effectué au niveau des exportations de cacao et de
cafés,pour un budget approximatif de 600 millions de F CFA par an.
Pour améliorer la modicité de ses moyens, le
CICC fera appel à des organismes et bailleurs de fonds amis pour
financer ses activités non institutionnelles, comme par exemple l'appui
aux producteurs et à leurs organisations.
3- Relations du CICC avec le monde rural
- RELATIONS INSTITUTIONNELLES
Le monde rural producteur de cacao et cafés est
constitué d'un très grand nombre de planteurs (plusieurs
centaines de milliers), dispersés, souvent isolés, toujours mal
informés.
Les actions en faveur des planteurs :
1. Organiser les planteurs :
- en GIC ou coopératives de base pour
produire et vendre à meilleur prix ;
- en Unions (et fédérations) de
GIC ou de coopératives pour vendre encore mieux et se faire
représenter, notamment dans les instances du CICC..
Le CICC collabore avec les projets d'appui à la
structuration du monde rural en ce sens
2. Appuyer la mise en place des
Collèges Régionaux de Producteurs dans les
différentes zones de production, afin de faciliter le processus de
désignation des délégués planteurs à l'AG,
et constituer une base représentative authentique des planteurs
vis-à-vis des autres catégories professionnelles et des Pouvoirs
Publics.
3. Appuyer la constitution des
Comités CICC d'Arrondissement dans lesquels les
représentants des organisations de planteurs désignent leurs
membres et assurent la présidence ; afin de concrétiser
l'interprofession au plan local et dans la pratique quotidienne (relations avec
les commerçants, vente bord champ).
- APPUI COMMERCIAL
1. En matière de
formation :
Réaliser des sessions de formation économique de
2 jours au bénéfice des responsables d'organisations de
planteurs : notions de commerce international, filières,
marchés, fixation des prix, vente groupée, qualité des
produits...
Former des membres des CCA (essentiellement planteurs) dans
les mêmes domaines, lors de stages de 4 jours.
- En matière
d'information :
Diffuser des prix bord-champ et des prix FOB pendant les
campagnes : le CICC devrait assurer le système d'information dans
le cadre du financement du Cameroun et de l'Union Européenne. Ce projet
est en cours de négociation.
Publier un bulletin trimestriel CACAO et CAFES en
français et en anglais sur tous les sujets intéressant les
professionnels du secteur.
Assurer la diffusion informelle d'information sur les prix
bord champ grâce à un ensemble d'informateurs à partir du
Secrétariat Permanent à Douala.
- Appui direct à la
commercialisation :
Diffuser par fax les offres de vente groupée
auprès des exportateurs.
- CONSEILS POUR L'AMELIORATION DE LA
PRODUCTION
Le CICC n'est pas un projet de développement
agricole, mais une institution pérenne des filières ; il n'a
pas vocation à intervenir directement dans la production. Il agit
cependant, notamment dans le domaine de la qualité :
- collaboration avec le MINADER à
travers des sessions de formation et d'information des responsables
d'organisations et d'agents et cadres du MINADER ;
- collaboration avec l'IRAD dans la recherche des
solutions aux problèmes du matériel végétal.
- Très forte implication du CICC dans la
réflexion sur la Relance de la Production en liaison étroite avec
le MINADER et le MINCOMMERCE.
Plus directement en matière de qualité :
- financement d'ateliers de formation de
vérificateurs de qualité cacao et cafés au sein des
organisations de producteurs ;
- programme d'émissions de radio en
français, en anglais et en langues locales sur la qualité du
cacao et des cafés;
- cession à prix subventionné de
matériel de contrôle de qualité, de pesée, de
stockage et de traitement phytosanitaire aux organisations de
producteurs ;
- diffusion dans le monde rural de plusieurs
milliers d'affiches portant sur la qualité du cacao ;
Au-delà de ces actions ciblées, il va de soi que
les planteurs sont chez eux au CICC, et le Secrétariat Permanent recevra
de nombreuses visites à Douala, appels téléphoniques,
lettres(...) émanant des planteurs et de leurs organisations ; lui
conférant de ce fait un rôle considérable de
« plaque tournante » tant pour les planteurs, leurs
organisations, que pour leurs relations avec les commerçants des
filières.
La clarification législative et réglementaire
à l'entame de ce point et l'application de toutes les dispositions
qu'elle prévoit permettra au CICC d'assurer l'autodiscipline entre les
operateurs de ces filières, gage de la gestion interprofessionnelle des
filières libéralisées.
Diagramme de venn d'interaction des Structure du Moude
rural
Figure 2 : Diagramme de Venn d'interaction des
Structures du Monde rural
CLD : Comité local de
développement GIC: Groupement
d'intérêt Communautaire
Coop : Coopératives
Action Interaction
Conclusion
Le défi d'ancrer l'économie cacaoyère
dans la durabilité aux fins de promouvoir son essor et
l'épanouissement du producteur de cacao ainsi que des bassins de
production, nous a conduit à élaborer une architecture
susceptible de permettre sa réalisation de manière factuelle. A
cet effet, nous avons envisagé, d'une part, une redéfinition de
la tutelle de l'Etat avec pour unique organe représentatif, l'Office
Camerounais de Cacao et du Café (O 3 C), cheville ouvrière de ce
dernier dans tous les aspects de la gestion de la filière, ainsi qu' une
redynamisation de la coopération en matière
cacaoyère ; et d'autre part, nous avons indiqué une
nécessaire structuration du monde rural qui implique une appropriation
préalable du concept de développement à la base ou
développement endogène, avec pour cadre d'expression les GIC, les
coopératives, les comités locaux de développement et le
CICC, occupant la position centrale.
CONCLUSION GENERALE
Malgré l'immense potentiel qui sous-tend la culture
du cacao au Cameroun en général et dans la Lékié en
particulier, les perspectives d'essor de cette activité demeurent
grippées, à cause de certaines entraves imputables conjointement
au planteur, à l'Etat et à la conjoncture internationale.
Le désengagement de l'Etat imposé par la mise
en oeuvre de Plans d'Ajustement Structurel a jeté le monde rural
agricole, totalement désorienté, dans les bras des
prédateurs qui l'ont précipité dans la
précarité.
L'essor de la cacaoculture dans ces conditions reste
tributaire, d'une part, d'une structuration adéquate du monde rural
à travers le renforcement des capacités de la sphère
associative et des espaces de formulation et d'expression des initiatives de
développement à la base, ainsi que d'une redéfinition de
la place de l'Etat en tant que régulateur et facilitateur de
l'activité économique et sociale d'autre part.
Suivant l'exemple des pays Africains leaders en matière
de cacaoculture (Côte d'ivoire, Ghana notamment), une meilleure
organisation de la filière cacao café régie comme au Ghana
par un organe faitière unique (la Cocoa Board) pourrait nous
éviter le déficit managérial constaté au Cameroun
en raison d'une pluralité de structures qui font au mieux double emploi
et au pis se chevauchent, créent des blocages nuisibles et provoquent
une dispersion d'énergie regrettable. Interlocuteur souvent
oublié, relégué tout au bout de la longue chaine des
décideurs imbus de leur puissance incarnée, paradoxalement, c'est
le pauvre planteur perçu à tord comme simple force de travail,
mal rémunéré et sans la moindre voix au chapitre qui tient
fermement dans ses mains frêles, la clé vers le
développement de notre cacaoculture. La mutation à opérer
consiste à le positionner au coeur des divers projets à
réaliser. Le professionnalisme adossé aux exigences de la bonne
gouvernance devrait ouvrir la voie à la performance escomptée.
A cet effet, l'organisation locale et surtout la
qualité du produit made in Cameroon constituent des ingrédients
essentiels pour accéder à la notoriété
internationale. Ce label indispensable sert de visas pour ouvrir les portes
des principales places où se négocient le cacao et le
café. Et sur ces places hélas, le Cameroun ne siège pas
aux premières loges.
De plus, et en référence à la
rhétorique du penser local et agir global (et vis versa)
indispensable pour un bien-être collectif international, la
systématisation d'une gestion durable de l'économie
cacaoyère se signale comme une nécessité non seulement
pour le maintien et la motivation du producteur de cacao dans cette
activité, mais aussi et surtout pour la prospérité de
l'économie cacaoyère toute entière tel que souligné
par la récente Conférence Mondiale sur le Cacao.
BIBLIOGRAPHIE
A- OUVRAGES GENERAUX
1- BIYA, Paul, Pour le Libéralisme
communautaire, Pierre-Marcel FAVRE, 1986
2- DESJARDINS Denis Requier, L'Alimentation en
Afrique, manger ce qu'on peut produire, Editions Karthala - Dusaf, 1989
3- DUPRIER Hugues, Paysanne d'Afrique Noire, TERRES ET
VIE, 1980
4- ELA Jean marc, Afrique des villages,
Edition Karthala, 1982
5- ELA Jean marc, Quand l'Etat pénètre en
brousse, la reposte paysanne à la crise, Editions Karthala, 1990
6- N'KALOULOU Bernard, Dynamisme paysan et
développement Rural au Congo, Editions L'Harmattan, 1984
7- TERSIGUEL, Philippe et BECKER, Charles, dir.
Développement durable au sahel, Edition Karthala -
Sociétés - Espaces, Temps, 1997
8- TOUNA MAMA, L'économie camerounaise : pour un
nouveau départ, Afrédit, 2008
B- OUVRAGES SPECIALISES
1- ASSOUMOU Jean, L'économie du cacao :
Agriculture d'exportation et bataille du développement en Afrique
tropicale, Editions P. DELARGE, 1977
2- CHAMBERS, Robert, et CTA, Développement Rural, la
pauvreté cachée, Editions Karthala ,1990
3- Comprendre une Economie Rurale, guide pratique de
recherche de l'institut panafricain pour le développement, Editions
L'Harmattan
4- DURUFLE Gilles, L'Ajustement structurel en Afrique,
Edition Karthala, 1998
5- KAMTO M., Droit de l'environnement en
Afrique,EDICEF/AUPELF/VANNES,1996
6- LAMNERINCK Marc et WOLFERS, Ivan, Approches
participatives pour un développement durable, édition
Karthala-IPD, 1998
7- Organisation et gestion de coopératives et d'autres
organisations d'autopromotion, Rapport sur un cours de formation
internationale, Fondation Allemande pour le Développement
Internationale, 1987
C- ARTICLES ET REVUES
1- ALARY, Véronique ; « La
libéralisation de la filière cacaoyère vue et vécue
par les planteurs du Cameroun », in Revue Région et
Développement n°4,1996
2- CHAMPAUD J. ; « L'Economie Cacaoyère
du Cameroun », in Cahier ORSTOM, ser.sci.hum, III. 3,1966
3- Document de Stratégie pour la Croissance et l'Emploi
(DSCE), 2009
4- ESOH ELAME ; « Histoire et fondements
du concept de développement durable- Unité 6 :
Développement durable et interculturalité, concepts et
outils », Master Course Coopération internationale,
Action Humanitaire et Développement Durable , CIRDA, 2009
5- JANIN Pierre ; « Un planteur sans Etat
peut-il encore être un planteur ? »
http://www.politique-africaine.com/numeros/pdf/062045.pdf
6- « L'impact de la crise Economique sur les
systèmes Agricoles et le changement du couvert Forestier dans la zone
Forestière Humide du Cameroun », CIFOR, Decisional Paper,
N0.27, Février 2000
D- SITES INTERNET
1- www.google.com
2- www.ntsongon.org
4- www.fao.org
5- www.cameronline.cm
6- www.wikipédia.org
ANNEXES
QUESTIONNAIRE ADMINISTRE
IRIC- Institut des Relations Internationales du
Cameroun
La gestion durable de la filière cacao dans
la Région du Centre Cameroun : Le cas du Bassin de production de la
Lékié
Ce questionnaire a pour objectif de faire une
évaluation socio-économique sommaire des pratiques de gestion en
cacao culture dans le Département de la Lékié. Les
informations sont confidentielles et ne seront utilisées qu'à des
fins académiques. Votre coopération sera grandement
appréciée.
1.DATE.......................................................................................................
2.LOCALITE................................................................................................
3.NOM DE
L'INTERVIEWE.............................................................................
4.STATUT....................................................................................................
5.NOMS DES FACILITATEURS
.......................................................................
..................................................................................................................
1- Que représente pour vous, la culture du
cacao ?
2- Est-elle rependue ici ?
3- A quelle ampleur ?
4- Quel est l'âge moyen des exploitations et leur
taille ?
5- Produisent-elles de manière constante ?
6- Comment-êtes vous organisé ?
7- Qui est-ce qui vous encadre ?
8- Etes-vous satisfait par cette activité ?
9- A quelles difficultés êtes-vous
confronté ?
10- Comment les surmontez-vous ?
11- Avez-vous entendu parler ou connaissez-vous la
SODECAO ?
12- Que fait la SODECAO ou l'Etat pour vous
accompagner ?
13- Ses techniciens ou ceux du Ministère de
l'agriculture viennent-ils souvent ici vous écouter ou vous
encadrer ?
14- Que suggérez-vous pour améliorer cet
état de fait ?
15- Ou, à votre avis, que peut-on ou doit-on faire pour
améliorer votre situation pour la poursuite de la cacao culture dans de
bonnes conditions ?
16- Avez-vous déjà pensé à creer
des plantations communautaires dans le sens d'affecter leurs revenus à
la réalisation des projets d'intérêt commun tels que
l'entretien de la route, la construction d'un centre de santé, une
école... ?
LISTE DES ACRONYMES
MINADER : Ministère de
l'Agriculture et du Développement Rural
MINCOMMERCE : Ministère du
Commerce
MINEPAT :
Ministère de l'Economie du Plan et de l'Aménagement du
Territoire
DSCE :
Document de Stratégie de la Croissance et de l'Emploi
SODECAO : Société de
Développement du Cacao
ONCPB : Office Nationale de
Commercialisation des Produits de Bases
ONCC : Office National du
Cacao et du Café
FODECC : Fonds de
Développement des filières Cacao et Café
O3C : Office
Camerounais de Cacao et du Café
FAO : Food and
Agriculture Organization
FIDA : Fonds
International de Développement de l'Agriculture
CICC : Conseil
Interprofessionnel du Cacao et du Café
USAID : United States Agency of
International Development
CNUCED : Conférence des
Nations Unies pour le Commerce et le Développement Economique
OMC : Organisation
Mondiale du Commerce
GIC : Groupement
d'Intérêt Communautaire
CARTES DE LOCALISATION DU DEPARTEMENT DE LA
LEKIE
Figure 3 : CARTE DU CAMEROUN
Figure 5 : CARTE DU DEPARTEMENT DE LA
LEKIE
Figure 4 : CARTE DE LA REGION DU CENTRE
ET SES DEPARTEMENTS
INSTITUT DES RELATIONS
INTERNATIONALES DU CAMEROUN
Master « Coopération internationale,
Action humanitaire et Développement
Durable »
Filière : Coopération Internationale
et Coopération Décentralisée pour le
Développement
Année Académique 2011-2012
Project work
Rapports de stage académique à la
SODECAO
MBARGA Dieudonné
Matricule 11J130 R
1ère promotion
|
|
RESUME
Le présent rapport rend compte de notre séjour
de six mois (29 Septembre 2011 - 18 Mars 2012) à la SODECAO, Direction
de l'Appui à la Cacaoculture, Sous-Direction de la Qualité
Totale, indique les principaux acquis dudit stage et présente quelques
observations en guise de suggestions susceptibles de consolider les
performances de cette entreprise parapublique.
LA SODECAO EN RACCOURCI
- Créée en 1974, par le décret N-74-83 du
02 février 1974, la SODECAO a pour mission de fournir une assistance
technique aux producteurs de cacao et de garantir la qualité du cacao
camerounais. Elle est également chargée de l'entretien des pistes
de collecte du cacao servant parallèlement au désenclavement des
zones rurales. Le pilotage de projets de développement fait aussi partie
de ses missions.
- Il convient de relever que, au début des
années 1990,en raison de la crise multisectorielle dont le souvenir
reste vivace, la réduction drastique de la subvention allouée par
l'Etat a plongé la SODECAO dans une longue période d'hibernation
qui s'est achevée avec la nomination en 2006 d'un nouveau Directeur
General, M. Jérôme MVONDO, lequel a aussitôt engagé
la relance de la structure avec environ 300 personnels sur un
précédent effectif de 3500 employés.
- Placée au coeur de la stratégie nationale de
redressement de la filière cacao, la relance susmentionnée se
traduit entre autres par :
· la régénération des plantations
vieillies ;
· la création de nouvelles plantations ;
· la lutte phytosanitaire couplée avec le
renforcement de l'encadrement technique ;
· La professionnalisation des producteurs
(structurés, regroupés) ;
· L'amélioration de la quantité et de la
qualité du produit «made in Cameroun«.
· L'amélioration des circuits de
commercialisations (désenclavement des zones de
récolte) ;
· Le développement de la transformation et
valorisation des fèves de cacao.
ORGANIGRAMME
Direction Générale
Direction des Affaires
Administratives et Financières
Direction de l'Appui à Direction de
l'entretien des
la Cacaoculture Pistes de
Collecte
Délégations Régionales
et Départementales.
La Société de Développement du
Cacao (SODECAO)
BP. 1651 Yaoundé - Cameroun
Tel. 22 30 45 44
Fax +237 22 30 33 95
DEROULEMENT ET ACQUIS DU STAGE
Commencé le 29 Septembre 2011, notre séjour
à la SODECAO, Direction de l'Appui à la Cacaoculture, s'est
achevé le 18 Mars 2012.
C'est précisément à la
Sous-Direction de la Qualité Totale que nous avons
été affectés et placés sous l'encadrement de
M. MABOU, Ingénieur Agroindustriel, Chef de
Service de la Qualité Totale.
Notre première tâche a été de
prendre connaissance des missions et des principales activités de la
SODECAO, en particulier celles concernant notre département
d'affectation.
Il s'est agi ensuite de nous imprégner de la
politique de la relance de la cacaoculture initiée par l'équipe
managériale conduite depuis 2006 par M. Jérôme MVONDO.
Cette immersion enrichissante nous a permis d'avoir
accès à des données empiriques indispensables à la
réalisation de notre projet de recherche et de mettre en exergue tout en
les améliorant, les acquis de notre formation en Coopération
internationale, Action humanitaire et Développement Durable (CA2D)
à l'Institut des Relations Internationales du Cameroun/Université
Cà Foscari de Venise.
En effet, le stage nous a donné l'opportunité
d'une immersion totale dans les activités du Hall de Technologie de la
SODECAO et cela nous a permis d'apprécier à l'envie le processus
de transformation des fèves de cacao dans sa phase actuelle.
A ce sujet, les essais grandeur nature qui y sont
menés portent la promesse d'une réussite dans un avenir
prévisible. Ceci est très encourageant.
La recherche qui se poursuit inlassablement dans le but
d'affiner les résultats déjà enregistrés conforte
notre optimisme
En outre, ce stage nous aura permis d'appréhender
la dynamique interne et la densité des missions de la SODECAO.
Au final, de nos humbles observations, nous avons
suggéré quelques perspectives dans le but de consolider les
performances de la SODECAO qui, d'ores et déjà, se positionne
résolument en première ligne sur le chantier des
« grandes réalisations ».
QUELQUES SUGGESTIONS EN VUE DE POSITIONNER LA SODECAO A
L'AVANT-GARDE DE L'EMERGENCE DE LA FILIERE CACAO
L'émergence de la filière cacao
portée par la SODECAO repose sur deux leviers à savoir : le
cadre institutionnel et la capacité opérationnelle.
AU PLAN INSTITUTIONNEL :
Sa lettre de mission exprime avec force les espoirs
placés en la SODECAO et les résultats attendus pour
réaliser l'émergence de la filière cacaoyère.
Ce cahier des charges insiste en effet sur l'offre des
services à l'effet d'améliorer la qualité et la
quantité du cacao camerounais.
Aussi, cette claire définition des priorités
et des objectifs assignés a-t-elle permis à l'équipe
dirigeante actuelle de tracer les axes de son action qui reste, à
l'évidence, tributaire des capacités budgétaires et
logistiques de la structure. Or, pour le moment, rien ne permet de constater
l'adéquation entre les ressources dont dispose la SODECAO et
l'épaisseur de son cahier de charges. Il faut donc user de
créativité.
AU PLAN OPERATIONNEL :
· Doter la SODECAO d'un budget conséquent pour se
donner les moyens que la réalisation de sa nouvelle dynamique
exige ;
· améliorer de manière sensible la
stratégie de communication de la SODECAO pour mieux faire connaitre ses
ambitions et ses réalisations, pour intéresser un public plus
important et diversifié ;
· dynamiser le secteur de la Coopération et de la
Recherche ;
· densifier l'assistance technique pour stimuler la
professionnalisation de la filière et encourager le
développement communautaire ;
· promouvoir la transformation locale (voire artisanale)
ainsi que la valorisation des fèves de cacao. C'est un secteur novateur,
porteur de belles perspectives économiques ;
· poursuivre les programmes de développement de la
cacaoculture et d'entretien des pistes de collecte ;
· initier des partenariats mutuellement
bénéfiques.
Exemple : Un programme de soutien
à l'électrification des bassins de production avec AER - AES
SONEL, dont l'impact peut constituer une réelle perspective de
développement pour de nombreuses localités rurales.
* 1 Figure 3 : Carte du
Cameroun, en Annexes, P.71
* 2 BIYA Paul, Pour le
libéralisme communautaire, Pierre Marcel- FAVRE, 1986, P.65
* 3 CHAMPAUD J.,
l'économie cacaoyère du Cameroun, cah ORSTOM, ser. Hum., III,
3-1966
* 4 Figure 4 : Carte de la
Région du centre et ses départements, en Annexes, P.71
* 5 Figure 5 : Carte du
Département de la Lékié, en Annexe, P71
* 6 KOBOU Georges, Economie
internationale, IRIC , 2011
* 7 DEFOURNY J. , (dir.)
l'économie sociale au Nord et au Sud, De Boeck, Bruxelles
* 8
www.wikipedia.com
* 9 ESOH ELAME ;
« Histoire et fondements du concept de
développement durable : Unité 6 : Développement
durable et interculturalité : concepts et outils, Master
Course Coopération internationale, Action Humanitaire et
Développement Durable », CIRDA, 2009
* 10 SACHS Ignacy,
Stratégie de l'écodéveloppement, Ed. Privart, coll.
regard, 1980
* 11 www.fao.org/forestry
* 12 COLIN Armand, Dictionnaire
des sciences économiques, Paris, 2007
* 13 CHAMBERS Robert,
Développement rural : la pauvreté cachée, Edition
Karthala, 1990
* 14 DURUFLE Jules,
L'Ajustement structurel en Afrique, Edition Karthala, 1988
* 15 ELA Jean Marc, Dans
l'ouvrage intitulé, Quand l'Etat pénètre en brousse :
la riposte paysanne à la crise, Edition Karthala, 1990
* 16 AWUNG NDONGKO Wilfried,
les réflexions sur les politiques économiques et le
développement du Cameroun, éditions Sopecam, 1985
* 17 TOUNA MAMA,
L'économie camerounaise : pour un nouveau départ,
éditions Afrédit, 2008
* 18 Statistiques du CICC,
2011
* 19 AMOA ONGUENE Anselme
Serge, La cacaoculture dans l'arrondissement d'Okola 1960-2000, Mémoire
de Maitrise en Histoire, Université de Yaoundé 1, 2007
* 20 MANI OLONGO,
L'économie cacaoyère dans la région d'Okola,
Mémoire de Géographie, Université de Yaoundé,
1975
* 21 NGONGO Louis Paul,
Histoire des institutions et faits sociaux
du Cameroun, éditions Berger Levour, 1987
* 22 CHAMPAUD J,
« L'Economie Cacaoyère du Cameroun », in
Cahier ORSTOM, ser.sci.hum, III. 3,1966
* 23 Décret N-74-83 du
02 février 1974, portant création, organisation et fonctionnement
de la SODECAO
* 24 CHAMPAUD, J.1966,
« L'Economie Cacaoyère du Cameroun », in
Cahier ORSTOM, ser.sci.hum, III. 3
* 25 JANIN Pierre,
« un planteur sans l'Etat peut-il encore être un
planteur ? »,
http//www.politique-africaine.com/numéros/pdf/0622045.pdf
* 26 Arrêté
N-0000015/Mincommerce du 05 /09/2008 fixant les conditions
générales de conditionnement et commercialisation des
fèves de cacao
* 27ALARY
Véronique ; « La libéralisation de la
filière cacaoyère vue et vécue par les planteurs du
Cameroun », in Revue Région et Développement n°4,
1966, pp. 7-8
* 28 Décret
présidentiel du 08 décembre 2004, portant
réaménagement du gouvernement
* 29 TSALA MESSI,
André ; « Géographie de la
Lékié », www.ntsongon.org
* 30 FOLEFACK Pompidou et
GOCKOWSKI Jim, 12-01-2004, in « Libéralisation et
système de commercialisation du cacao en zone forestière du Sud
Cameroun »
* 31 MBARGA
Dieudonné, Contribution de la SODECAO au développement de la
transformation artisanale et à la valorisation des fèves de
cacao, Projet de fin de formation, Codev 2012.
* 32 The Uruguay Round
agreement on agriculture and processed agricultural products, OCDE, Paris,
1997, impact of the reform process in agriculture on LDC and net food-importing
development countries.
* 33 M. BILANA,
Retraité et cacaoculteur à la Lékié, entretien du
O3 novembre 2012
* 34 AERTS Jean-Joël,
COGNEAU Denis, HENERA Javier, GUY de Monchy, DOUBAND Français,
L'économie camerounaise : un espoir évanoui, édition
Karthala, 2000, P 40
* 35 Rapport du cours de la
Fondation Allemande pour le Développement International, sur
l'organisation et gestion des coopératives et autres organisations
d'autopromotion, 2e édition, Août 1987,P 17
* 36ESOH ELAME ;
« Histoire et fondements du concept de développement durable.
Unité 6 : Développement durable et interculturalité ;
concepts et outils, Master Course, Coopération internationale, Action
Humanitaire et Développement Durable »,CIRDA, 2011.
* 37 SACHS Ignacy,
Stratégie de l'écodéveloppement, Ed. Privart, coll.
regard, 1980
* 38 IBID
* 39ESOH ELAME ;
« Histoire et fondements du concept de développement
durable : Unité 6 : Développement durable et
interculturalité : concepts et outils, Master Course
Coopération internationale, Action Humanitaire et Développement
Durable », CIRDA, 20O9,op cit.
* 40 ElA Jean Marc, Quand
l'Etat pénètre en brousse, opi.cit, page 124
* 41 KAMTO M., Le droit de
l'environnement en Afrique, P.17
* 42 KAMTO M., Le droit de
l'environnement en Afrique, op cit, p.18
* 43 www.fao.org
* 44 Statistiques de la
SODECAO, 2011
* 45CHAMBERS Robert, Développement
rural : la pauvreté cachée, édition Karthala, Page
80 ; 241
|