III-1-3-2- Aire basale et densité des tiges
La zone témoin, avec une densité de 832
tiges.ha-1 pour une aire basale de 50,88
m2.ha-1 est le milieu le plus boisé des
différents sites étudiés (Tableau VII). La lisière
de la forêt a une densité plus élevée (515
tiges.ha-1) que l'intérieur de la forêt (380
tiges.ha-1). On remarque une diminution des aires basales des
milieux conservés vers les milieux anthropisés. Ainsi, les aires
basales diminuent progressivement de la zone témoin (50,88
m2.ha-1) à
25
l'intérieur (35,88 m2.ha-1),
suivi de la lisière (27,27 m2.ha-1) et de la zone
rurale (7,29 m2.ha-1) (Tableau VI).
Tableau VI : Densité de tiges et aires basales dans les
différents biotopes
Zone témoin Lisière FCHS Zone rurale
Intérieur FCHS
Densité de tige/ha
|
832
|
515
|
110
|
380
|
Aire basale (m2/ha)
|
50,88
|
27,27
|
7,29
|
35,88
|
III-1-3-3- Distribution des classes de hauteur
La distribution des classes de hauteur (Figure14) montre que les
arbustes inférieurs à 4 m ne sont pas nombreux dans les
différents milieux. Les arbres de hauteur comprise entre 4 m et 8 m sont
les plus nombreux dans le milieu témoin tandis que la lisière est
dominée par un nombre élevé de ligneux de hauteur comprise
entre 16 m et 32 m que les autres milieux. En outre, les arbres de grandes
tailles (supérieur à 32 m) sont en faible proportion et se trouve
uniquement dans les milieux témoin et intérieur de la
forêt.
Figure 14 : Diagramme de distribution des classes de hauteur dans
les différents biotopes
(MIL TEM : milieu témoin; MIL INT : milieu
intérieur; MIL LIS : milieu lisière; MIL RUR : milieu rural)
26
III-2- Discussion
Les investigations effectuées au cours des
relevés de cette étude, qui s'est déroulée
uniquement dans la partie Nord de la forêt, ont permis d'obtenir 322
espèces. Sur toute la superficie de la FCHS, Kouamé en 1998 a
recensé 1047 espèces. Cet écart peut s'expliquer par le
fait que notre étude s'est déroulée uniquement dans la
partie Nord de la FCHS. Les familles dominantes sont les Rubiaceae (19), les
Euphorbiaceae (16) et les Fabaceae (14). L'abondance des Rubiaceae
s'expliquerait par le fait que la FCHS se situe en zone de forêt dense
humide (région Guinéo-Congolaise) qui est le domaine de
prédilection des Rubiaceae (Aké-Assi, 2002). Ce milieu n'aurait
donc pas encore atteint le stade climacique (Guillaumet et Adjanohoun, 1971).
En ce qui concerne les espèces à statut particulier, leur
présence, leur nombre et leur variété soutiennent
l'idée du rôle de la conservation de la biodiversité que
jouent les aires protégées en général et la FCHS en
particulier. En effet, 25 des espèces dénombrés sont
endémiques à l'Afrique de l'Ouest dont deux (Baphia
bancoensis et Chrysophyllum taiense) sont endémiques
à la Côte d'Ivoire. Cependant, Kouamé (1998) avait obtenu
77 espèces endémiques à l'Afrique de l'Ouest dont 7
espèces endémiques à la Côte d'Ivoire. Il s'agit de
Chrysophyllum taiense, Eugenia tabouensis, Gymnostemon zaizou, Hibiscus
tabouensis, Piptostigma fugax, Psychotria abouabouensis, Sapium
aubrevillei. Bien que nos travaux n'aient concerné que la partie
Nord de la FCHS, nous pensons que de nombreuses espèces
endémiques ont disparues de cette zone entre 2000 et 2013 du fait des
activités anthropiques. Les espèces à statut particulier
ont été signalées dans les différents milieux mais
leur présence diminue de l'intérieur de la forêt vers la
zone rural. Selon Tchouto (2004) et Van Gemerden (2004), les espèces
à statut particulier sont les plus sensibles aux perturbations
causées par l'homme. Il est donc probable que les activités
anthropiques dont la résultante est la destruction de la forêt, ne
favorisent pas la survie de ces espèces qui ont besoin d'un microclimat
particulier (Sangne, 2008). Cependant, la présence de certaines
espèces particulières dans la zone rurale peut s'expliquer par le
fait que certains paysans laissent quelques arbres ou arbustes en vue d'une
protection des jeunes plants (cacaoyers, caféiers, etc.) des
rayonnements solaires (Koulibaly, 2008). Ainsi, des espèces à
statut particulier peuvent se retrouver dans les champs. C'est le cas
d'Euadenia eminens qui est une espèce devenue rare,
laissée dans les exploitations agricoles de la zone d'étude pour
ses vertus médicinales (Dickson et al., 2012). En outre la FCHS
regorge un nombre important d'espèces exploitables. Dans cette
étude nous avons recensé 37 espèces exploitables avec un
taux de
27
56,75 % d'essences de catégorie 1 (P1), 27,25 % de
catégories 2 (P2) et 16,25 % d'essences de catégories 3 (P3).
Cela confirme les travaux de Kouamé, 1998 qui a dénombré
80 essences principales commercialisées pour la qualité du bois
dont 43 soit 53,75% d'essences de P1, 17 soit 21,25% d'essences de
P2 et 20 soit 25% d'essences de P3. Le nombre élevé de bois
commerciaux dans cette forêt fait qu'elle est sous l'influence de
l'exploitation forestière. Bien que ne datant pas de la dernière
décennie, l'exploitation dans cette forêt s'est toutefois
accentuée et est devenue anarchique en faveur de la crise.
L'exploitation forestière a donc contribué à la
dégradation du couvert végétal voire la disparition des
espèces végétales du fait principalement des
dégâts engendrés par l'abattage de l'arbre et le transport
des grumes (Bertault et Sist, 1999 ; Durrieu de Madron et al., 2000).
Cette activité crée des écosystèmes artificiels
tels que les zones d'abattages, les pistes d'exploitation, les parcs de
chargements, les zones brulées, etc. (Kouamé, 1998)
désorganisant ainsi l'écosystème naturels. La richesse de
la flore en essences forestières commerciales surtout de
catégorie 1 nécessite une surveillance particulière de la
FCHS afin de limiter les exploitations forestières clandestines. La
forte proportion de phanérophytes observée dans la FCHS est la
caractéristique des forêts tropicales (Le Coeur et al.,
2008). Cette forte proportion pourrait permettre la reconstitution de la
FCHS si elle est à l'abri des pressions anthropiques. L'analyse du
spectre biologique a montré une abondance de microphanérophytes
et une faible proportion des mégaphanérophytes. Cette situation
est imputable à l'exploitation forestière qui se déroule
dans la forêt. En effet, lors de cette activité, les grands arbres
(plus de 32 m de hauteur) sont abattus au profit des plus petits (arbustes de 2
à 8 m de hauteur).
L'analyse des coefficients de similitude entre les
différents milieux montre une différence au niveau de la flore
dans les types de biotopes. Cette différence pourrait s'expliquer par
les activités qui se déroulent dans la forêt.
Activités anthropiques, qui selon les gestionnaires de la FCHS se
seraient accentuées pendant les dix dernières années
à la faveur des crises en Côte d'Ivoire. En effet, l'afflux de
clandestins s'est matérialisé par la présence de
nombreuses pistes menant à la FCHS et à la présence de
nombreuses plantations de cacaoyers (Figure 15) principalement à
l'intérieur de la forêt. Les âges de ces plantations
étant, en général, inférieure à 10 ans, nous
permettent de conclure que ces dernières ont été
installées pendant la période de crises. Cette situation est
attestée par la différence de la flore intérieure et la
zone témoin, installée à l'intérieur de la
forêt. En effet une fois à l'intérieur de la forêt,
le clandestin commence à défricher à partir de
l'intérieur vers la limite de la forêt ce qui permet de dire
que
28
dans cette forêt le front d'anthropisation est
centrifuge. L'indice de Shannon montre aussi que la flore intérieure de
la forêt est plus diversifiée que la zone témoin.
Cependant, l'indice d'équitabilité de la zone témoin est
plus important que celui de l'intérieur de la forêt et les autres
milieux, suggérant ainsi que les individus sont mieux repartis entre les
espèces recensées dans les sites témoins par rapport aux
autres milieux. Les milieux perturbés sont susceptibles d'être
spécifiquement plus riches que ceux qui ne présentent aucun signe
d'agression (Adou Yao, 2005). L'intérieur de la forêt étant
sous pressions, les processus de régénération,
recolonisation et de succession des espèces végétales y
sont plus importants que dans les autres parties de la forêt. La faible
diversité (valeur de l'indice de Shannon) dans la lisière
comparativement aux autres parties de la FCHS est due au fait que cette
lisière a été reboisée exclusivement par une
espèce exotique le Teck (Tectona grandis).
Les mesures de dbh dans la zone témoin
présentent une répartition inégale de tiges par classes de
diamètre avec dominance de tiges de la classe [30cm-40cm [. Ce
résultat suggère que cette zone est relativement moins
exposée aux exploitations agricoles. Néanmoins, il existe
quelques traces d'exploitations forestières dans ce milieu; ce qui
justifierait la rareté des arbres de grands diamètres (> 80
cm).
La lisière de la forêt, reboisée de tecks,
il y'a environ 20 ans, compte une densité en tiges plus importante que
l'intérieur de la FCHS. Les pieds de teck n'intéressent pas
principalement les exploitants forestiers et les paysans. Ces derniers
préfèrent aller à l'intérieur pour faire leurs
champs. En plus, exploiter la lisière exposerait les clandestins aux
contrôles sporadiques des agents de surveillance de la FCHS.
Les zones témoins ont une forte densité de tiges
et d'aires basales élevées par rapport aux autres milieux. Ce
constat laisse deviner que lorsque la forêt n'est pas sous influence des
activités humaines, elle peut conserver un grand nombre de tiges et un
nombre important d'arbres de grands diamètres. La forte densité
de tige observée à la lisière est la conséquence de
la délimitation de la FCHS à partir du teck, il y a une vingtaine
d'année. Les clandestins préfèrent éviter cette
partie de la FCHS afin d'être moins visibles par les gestionnaires de la
forêt. Aussi les differentes strates de fragments de forêt
observées dans la FCHS montrent que la zone conservée comporte
plus de ligneux de grandes tailles que les autres milieux. Ceci s'expliquerait
par les activités humaines qui sont moins intenses dans les milieux
témoin. Néanmoins, les arbres de hauteur supérieure
à 32 m (mégaphanérophytes) ne sont pas nombreux dans tous
les milieux voire absent à cause de l'exploitation forestière qui
privilégie
29
les arbres de gros diamètres et de grande taille.
Toutefois cette activité profite aux arbustes qui peuvent se
développer. En outre la lisière est dominée par une strate
d'arbres pratiquement de même taille (20 m à 25 m) qui serait due
au reboisement des tecks ayant tous le même âge.
Photo (Kouassi,2013)
Figure 15 : Jeune champ de cacaoyers observé dans la
FCHS
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