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Les conséquences de la desinformation médiatique sur la population kinoise

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par bahati kasindi
institut facultaire des sciences de l'information et de la communication - Gradué en journalisme 2014
  

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4.3. FAITS ET MEFAITS D'UNE PROFESSION QUI A PERDU TOUT SENS.

Les révélations de la Radio France Internationale (Rfi) des exactions commises par JP Bemba en République Centrafricaine 2002 et 2003 étaient peut-être un modèle du genre, ne serait-ce que dans la mesure où même les publics les plus virulents, Congolais comme Centrafricains sont entrés dans le jeu de la Rfi. Pour eux, il n'y avait évidemment aucune raison de douter de la réalité des atrocités commises par une milice étrangère qui était censé leur venir en aide suite à la demande de leurs autorités qu'ils avaient été les premiers à dénoncer.

Pourtant, la première équipe de reportage occidentale réputée et qui fait montre d'une honnêteté à outrance dans ce métier en Afrique, reste toujours la Rfi. Cette dernière a réussi à gagner la confiance du public local plus que même les chaines locales. Elle a l'habitude de fournir les bonnes informations en ce qu'on se croirait. Son équipe est toujours la première à être sur le terrain. En couvrant les événements dans des contrées les plus reculées dans l'arrière-pays. Interrogeant les témoins les plus sures : les familles des victimes. Le plus important est de noter que c'est suite à ces révélations des médias étrangers que la milice de JP Bemba a commencé à être vue sous un oeil différent. Et être présenter comme responsable de toutes ces exactions jusqu'en étant qualifié de milice meurtrière que de libératrice.

Accusé de cannibalisme par les Nations-Unis, le chairman démettra de leurs fonctions les miliciens qui ont été accusés d'avoir contraint sous la menace d'armes des femmes pygmées à cuisiner puis manger leurs maris. Une situation qui a tant ému les foules, a incité le monde libre, les sympathisants de Jean-Pierre Bemba à accepter malgré lui l'inculpation de leur leader dans cette affaire car selon un dicton militaire, il n'existe pas de mauvais soldat, il n'y a que de mauvais maître.

Un an plus tard, est apparu ce qu'on redoutait le plus. D'autres pygmées ont affirmés être ceux qui étaient supposés avoir été mangés comparaitront vivant de la presse, créant un doute sur les patronymes. C'est ce qui sera appelé l'affaire Mambasa. Une affaire que les manipulateurs ont fabriquée de toute pièce. Ceci fut une double manipulation du fait que Mme Mutandji, la mère d'Amuzati a déclaré n'avoir jamais entendu parler d'actes de cannibalisme à Mambasa ou elle vivait et encore moins de sa propre mort. Moi, j'ai fui dans la forêt lorsque les combats ont éclaté. C'est à Mangina (80 km, plus au sud de Mambasa) que j'ai été mise au courant de la nouvelle de ma mort. J'ai alors décidé de regagner Mambasa ».

La vieille dame semble pourtant dire la vérité mais les journalistes n'ont pas l'air convaincus. BanzaTiefelo, président de « Info Plus , une ONG chargée de la défense et de la liberté de la presse : « Le MLC veut nous faire croire que, la première fois, les pygmées avaient été victimes d'actes d'anthropophagie de la part de ses militaires et maintenant que devons-nous croire quand visiblement, ils sont venus à Kinshasa dans les bagages du MLC, soignés aux petits oignons, logés, nourris et blanchis par Jean-Pierre Bemba ? »58(*).

Si nous nous sommes permis ce récapitulatif, c'est pour illustrer les faits que la manipulation peut avoir à créer pour orienter l'opinion selon son gré et les méfaits que cela a pu occasionner. Changer le quotidien de tout un peuple, transformer le rêve d'un grand mouvement qu'est le MLC en une autre façon de voir les choses et d'agir. La manipulation peut désorienter tout un peuple.

A une époque où toutes les chaines de télévision s'échangent, s'achètent, se vendent les reportages qu'elles réalisent, les chaines de télévisions congolaises et Kinoises en particulier n'avaient évidemment aucun mal à acquérir ces reportages et à remettre ainsi, visuellement, les choses au point. Elles se sont bien gardées de le faire, préférant entretenir le flou sur cette affaire d'importance titanesque aux yeux de congolais. Ce silence complice des médias locaux a permis à Jean-Pierre Bemba d'oeuvrer comme tout congolais innocent dans sa carrière de politicien.

Lorsque l'on connait la popularité dont jouit Jean-Pierre Bemba, les modestes 20 pourcents des suffrages obtenus lors des élections présidentielles de 2006 et dont il se glorifiait d'avoir remporté les élections. Mais ne nous y trompons pas, le silence et les informations complices de la presse occidentale, après l'exploitation des événements post-électoraux de 2006, a permis au nouveau régime de s'installer confortablement et de se maintenir au pouvoir.

Les vertus de la concurrence ne sont plus à démontrer. Mais certains effets pervers sont peut-être en train de se manifester à la télévision dans la perspective de la course à l'audimat. Dans le cadre de reportages qui se veulent de plus en plus attractifs ou de plus en plus racoleurs, les chaines n'hésitent plus à se livrer à des véritables mises en scène, voire à payer des figurants, comédiens professionnels ou non, afin d'attirer le grand public. Phénomène que l'on connait déjà depuis plusieurs années aux États-Unis.

Dans le numéro du 29 septembre 1990 de Télérama, Marc Lecarpentier écrivait avec raison : «  lorsque le journaliste se sert des armes de la fiction sans le dire, lorsqu'il manipule l'espace scénique et invente la dramaturgie pour mieux émouvoir, ce sont les téléspectateur qui sont méprisés. Ce qui vaut bien un vrai débat... faute de quoi, tout en s'accusant mutuellement des pires bidonnages, les reporters réussiront peut-être des coups. Mais ils en prendront peut-être aussi qui seront justifiés ».59(*) L'importance de l'image est qu'elle peut occulter un certain nombre d'informations.

Mais en plus de ça, ce qu'il faut noter est que les bornes de la déontologie sont franchies lorsque le journaliste, abandonnant son rôle de témoin, se veut acteur et qu'à l'occasion, il paie d'autres professionnels dans certains cas, pour bénéficier des images les plus saisissantes et créer, si besoin est, le scoop. Nous ne nous empêcherons pas de garder à l'esprit l'effet boule de neige qu'a eue la révélation de la libération de Jean-Pierre Bemba des geôles de la cour pénale internationale par un journaliste de CCTV.

De même, plusieurs journalistes des grands organes de presse ont pataugés dans cette boue de désinformation. Ces exemples montrent à quel point la télévision peut être partiale. Le phénomène en soi est grave. Il a accentué par la propension des congolais à ne pas lire. Nous l'avons dit, contrairement à un pays comme l'Afrique du sud, le poids de la presse écrite en république démocratique du Congo, pour ne pas dire ridicule, face à ce mastodonte que représente l'audiovisuel. Ce moloch, surtout quand il s'agit des chaines publiques a toujours besoin d'argent.

Lors des Assises Internationales de la Désinformation de Nice, Pierre Médecin, le directeur de l'Opéra de la ville notait à ce propos : « La mainmise idéologique de la gauche (particulièrement en France, parti opposé aux conservateurs) s'est imposée grâce à un esprit de prospective qui lui a fait saisir très vite l'importance capitale des médias dans le monde moderne. Le bouche à l'oreille, la presse écrite, ont été longtemps la seule publicité accordée aux découvreurs et aux créateurs jusqu'à ce que la radio et puis la télévision, deviennent des formidables instruments qui, permettant d'atteindre chez eux 50 millions d'individus en pantoufles, dispensent à leur guise information et, surtout, désinformation. Empruntons à Cavanna cette citation : « les cuistres étaient instruits. Les petits maitres et beaux esprits avaient un vernis sur leurs talons rouges.

Les gens qui causent dans le poste sont trop souvent des ânes boursouflés ou des baratineurs flatte-couillon, l'un n'empêches pas l'autre. Le peuple ingurgite mais il ne digère plus. Il répète mot pour mot ce qu'il entend et avec la mimique. Voilà parfaitement décrite l'arme offensive dont s'est inspirée la pensée de gauche grâce au tacite acquiescement général. »60(*) Voilà d'où est allé la rumeur. S'il s'agissait d'un article de la presse écrite à l'origine de la nouvelle, le temps qu'elle aurait mise à atteindre un maximum de lecteurs serait cent fois insignifiantes que ce qu'elle a réussie à atteindre lorsqu'elle a été balancée à la télévision. Et pas n'importe quelle télévision. La télévision dont lui-même Jean-Pierre Bemba est Propriétaire. Une chaine qui est le canal par lequel l'opposition peut s'exprimer et être sure d'atteindre ses objectifs, d'être écouté et dont le public pense qu'on ne pourrait mentir au sujet de l'une des grandes figures de l'opposition si ce n'est leur dire la vérité.61(*)

Certaines vedettes de la radio ou du petit écran ont beau jeu aujourd'hui de prétendre que les pressions politiques ont disparu. Et pour cause. L'opposition a du mal à faire entendre sa voix. Quant au pouvoir, il a le monopole de la presse ; notamment le malaise provoqué par l'amnistie des scandales politico-financiers, il n'a aucune raison de vouloir morigéner des journalistes qui globalement lui sont acquis et qui, sans aucune intervention extérieure, se placent délibérément dans la ligne qu'il a choisie ; exception faite des querelles internes qui se répercutent partiellement sur le monde médiatique.

Les chaines de radio, de télévision et des journaux qui, dans leur ensemble, avaient superbement ignoré les critiques et se sont brutalement passionnée pour l'affaire libération de Bemba, dès lors que les opposants et une grande partie du public la jugent importante. En d'autres termes, le public qui n'avait pas eu connaissance de la mise en cause du pouvoir en place, est abreuvé des réactions des autorités politiques concernées.

Devant un tel tir de barrage, la personnalité du Chairman du mouvement de libération du Congo ainsi désignée à la vindicte, ne peut se réfugier dans le silence dans un monde où l'information circule comme de l'air en attendant la fin des événements. Chacun de ses gestes sont communiqué au grand public. Et le comble est que chacun s'y prend en sa manière. Quant à ses amis politiques, censé voler à son secours par simple solidarité, ils se gardent bien de le faire de crainte d'attirer la foudre sur eux. De plus, ils n'oublient pas la leçon et se disent, notamment pour ceux qui auraient eu l'idée de se lancé dans une opération similaire, qu'ils ont tout intérêt à ne pas se faire remarquer s'ils ne veulent pas subir le même sort.

Ainsi, assiste-t-on au spectacle d'une opposition totalement anesthésiste et qui préfère, au moins partiellement, se couper de ses électeurs de plus en plus stupéfaits d'une telle attitude plutôt que de prendre le risque de s'opposer à l'actuel pouvoir médiatique. Voilà qui rend sans doute vaine toutes les tentatives faites pour dénicher « l'homme providentiel » susceptible de remédier à la situation que nous connaissons. Un mensonge qui provient des médias. C'est en quelque sorte mettre la charrue avant le boeuf. Dans l'état actuel des contraintes que la classe médiatique fait régner sur les hommes politiques, il ne faut pas espérer en trouver parmi eux qui soient prêt à briser les chaines. Le voudraient-ils qu'ils seraient immédiatement cloué au pilori ou tout simplement ignoré par la presse qui prendrait au malin plaisir à ne plus rendre compte de leurs initiatives. Ce qui équivaudrait, dans le contexte actuel à une mort politique à moyenne échéance.62(*)

Le débat apparait donc dans toute son ampleur, mais aussi dans ses différentes priorités. C'est nécessairement une action sur le monde médiatique qui peut, dans un deuxième temps, favoriser l'émergence d'une véritable opposition. Vouloir recréer cette dernière autour d'une personnalité, quelle qu'elle soit, sans avoir, au préalable, dénoncé la mainmise idéologique sur les médias et sans y avoir remédié, relève purement et simplement de l'utopie. 63(*)

La presse s'est toujours voulu un pouvoir, le quatrième le dit-on. Mais peu importe la place dans une perspective où ordre et désordre peuvent se confondre. Ce qui est sûr, en revanche, c'est que dans une société de liberté, un pouvoir ne peut se concevoir sans contre-pouvoir. C'est ce qui fait, à terme, sa force, sa légitimité. Contrairement à ce que certains croient, la désinformation est par essence l'arme utilisée par des esprits totalitaire pour remettre en cause nos libertés les plus fondamentales, pour déstabiliser les fondements de notre société. Elle est aussi l'expression d'un incommensurable mépris pour le public, ravalé au rang d'un simple pion sur un échiquier. Elle est enfin un véritable poison pour ceux qui ont la tâche d'informer.

Les journalistes devraient être les premiers à en avoir conscience. C'est notre mérite de poser un regard sans complaisance sur notre métier, y compris sur la façon dont nous pouvons nous-même l'exercer lorsque par inattention, par manque de rigueur ou de conviction, par paresse intellectuelle, du faite d'une formation inadaptée, nous nous faisons à notre insu les complices d'une désinformation qui a pu nous échapper.64(*)

Certains en ont publié des ouvrages, pour explique comment ils avaient pu être trompés et pour se refaire ainsi à bon compte une virginité. Mais qu'importent ces accès plus ou moins vrais de sincérité s'ils ne débouchent pas sur une réflexion à long terme et sur une volonté de faire preuve d'un plus grand scepticisme face aux informations qui nous assaillent ?

A quoi bon avoir regretté l'affaire de Mambasa pratiqué en république Centrafricaine par la milice de Jean-Pierre Bemba dans les années 2002-2003, si l'objectif était d'inculper l'ex- rebelle Jean-Pierre Bemba bien que les présumés pygmées contraint à être manger tout cru ont témoignés vivant devant la presse ? Clamer tout que bemba est libre pour venir dire que c'étaitplutôt ses proches collaborateurs et lui devrait encore garder sa geôle de la Haye ?

* 58« RDC : les pygmées de Mambasa déclarent n'avoir pas été mangés » ; Afrik.com, 10 septembre 2015

* 59 D. TRINQUET, « Une presse sous influence, comment la presse manipule l'opinion », éd. Albin Michel S.A, Paris, 1992

* 60 D. TRINQUET, « Une presse sous influence, comment la presse manipule l'opinion », éd. Albin Michel S.A, Paris, 1992

* 61 Idem

* 62 D. TRINQUET, « Une presse sous influence, comment la presse manipule l'opinion », éd. Albin Michel S.A, Paris, 1992

* 63 Idem

* 64 D. TRINQUET, « Une presse sous influence, comment la presse manipule l'opinion », éd. Albin Michel S.A, Paris, 1992

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