Kaamelott humour télévisuel et série intertextuelle( Télécharger le fichier original )par Sébastien Brossard Université de Franche-Comté - M2 Discours Texte Communication Documentation 2012 |
ConclusionBrossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 73 A partir de ce travail sur les références, la stratégie des chaines de télévisions ou encore l'étude de l'anachronisme nous pouvons percevoir plusieurs éléments nous permettant d'affirmer que Kaamelott n'est pas une simple shortcom commandé par une chaine de télévision pour servir de locomotive au prime time mais une oeuvre de fictions beaucoup plus complexe et beaucoup plus riches que les autres productions françaises. Il nous faudrait évidemment davantage de temps pour pouvoir répondre pleinement à cette question en analysant bien d'autres éléments tels que l'image par exemple, la réception, en réalisant une comparaison avec les autres shortcom et bien d'autres encore. Nous avons pu constater par moment que les shortcom avait la même base (format, genre, moyen, diffuseur) et que la comparaison peut avoir un avoir un réel intérêt. Si nous nous en tenons au travail réalisé nous pouvons tout de même en tirer quelques conclusions La première est que bien que l'action se situe au Moyen Age, la série n'oublie pas pour autant d'aborder des problématiques contemporaines. L'auteur s'emploie à traiter de sujets universels et à priori intemporels, tel que l'amour, la séduction, le pouvoir, la mort, l'ivresse, la trahison... mais également la torture, la peine de mort, la retraite ou encore l'adolescence. Nous pourrions décréter un peu promptement que ces questions ont été débattues de tous temps. Il est vrai que la torture n'a pas été conçue par l'armée américaine ou française au cours du 21ème siècle et que la cruauté est sans doute aussi vieille que l'Homme. Mais sa remise en cause est beaucoup plus récente. Désormais il faut la justifier comme un mal nécessaire. Il en est de même pour l'adolescence, étant à la base une transformation physiologique ; nous pouvons donc affirmer qu'il y a toujours eu des adolescents. Cependant Kaamelott ne s'intéresse pas à cet aspect des choses, d'ailleurs Yvain ou Gauvain ne parle jamais de sexualité, mais bien à l'adolescent tel que nous le connaissons depuis environ un demi-siècle. Soit un palier intermédiaire entre l'enfance et l'âge adulte avec ses propres codes, ses propres envie, ses propres aspirations mais également ses angoisses et ses tourments. Nous pourrions refaire cette démonstration pour les autres sujets (le travail a toujours existé alors nous pouvons juger qu'une certaine forme de code ou législation lui a toujours été lié) cependant l'essentiel à retenir est que Kaamelott se place toujours du point de vue contemporain pour traiter de ces sujets. La visée dAA en introduisant ses sujets contemporains est uniquement artistique. Il n'y a aucun courage en 2006 en tant qu'auteur français à dénoncer la peine de mort, prendre position sur la question de la pédagogie, revendiquer la nécessité du code du travail. Cependant A.A prétend parfois aller plus loin que la recherche du rire et créer un anticonformisme évident à ses yeux. Dans le dossier de presse de son long métrage David et Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 74 Madame Hansen75 nous pouvons lire ceci : « Ce qui m'anime depuis mes débuts est une colère contre la conformité. Je suis un peu connu grâce à une série très personnelle, sur laquelle je n'ai jamais triché et lorsque l'on regarde Kaamelott dans son intégralité, je m'y livre beaucoup. Arthur arrive toujours dans un pays où il combat des règles comme la torture ou l'esclavage. Il est progressiste dans un monde barbare et c'est pour cela qu'il s'en prend plein la gueule ». Astier a déclaré dans plusieurs entretiens qu'il ne votait pas et qu'il ne souhaitait pas traiter de sujets politiques. Le Roi Arthur d'Astier n'est donc pas un Tintin du 21ème siècle. En effet, Hergé, le père du célèbre reporter Belge pour les enfants « de 7 à 77 ans » se servait des aventures de son personnage pour diffuser des messages antisémites, colonialistes ou encore anticommunistes76. Astier se contente d'enfoncer des portes ouvertes à notre époque, de réaffirmer de grands principes, de se placer du bon coté de la barrière mais il serait exagéré de parler d'épisodes engagés. Même un sujet d'actualité comme le mariage homosexuel qui aurait pu être abordé par exemple dans l'épisode Compagnons de chambrée, se contente d'évoquer la position de l'Eglise sur l'homosexualité. Astier aurait pu aussi en profiter par parler du mariage des prêtres mais il n'en fera rien. L'objectif de ses épisodes est donc uniquement de divertir le téléspectateur en l'associant à des problématiques où il se sentira davantage impliqué que s'il s'agissait d'une question concernant uniquement le Moyen Age. Le Moyen Age traité de façon contemporaine, par son langage par ses sujets, par ses références est une des raisons qui nous permet d'affirmer que Kaamelott est une série française se démarquant des autres productions. Encore une fois c'est une façon parmi tant d'autres de distinguer la série. Nous avons également évoqué son changement de format. Nous pouvons également citer la tournure dramatique que la série prend à la fin de la saison IV. Des personnages obscurs, apparaissent ; Arthur n'est plus roi ; la dépression, la mort, la mélancolie, la trahison, la vengeance occupent une place prépondérante dans les saisons V et VI. Cependant les personnages gardent le ton qui fait le succès de la série avec un rythme et des répliques que l'on croirait sorties d'un film de Michel Audiard. Ce qui permet ces changements c'est le succès de la série qui a permis à Astier d'obtenir un budget bien supérieur à celui attribué pour les premières saisons. Nous pouvons en conclure que les moyens changent, mais l'esprit reste. 75 http://astierandco.fr/, dossier de presse de David et Madame Hansen 76Maxime Benoit-Jeannin, Les guerres d'Hergé, édition Aden, Bruxelles 2007 Astier n'est pas un homme de télévision. Le théâtre est son terrain de jeu d'origine et Kaamelott est né au cinéma grâce au court métrage Dies Irae. Kaamelott existe également en bande dessinée et connaitra une suite au cinéma d'ici 2015 avec une trilogie, ce qui n'est pas sans rappeler encore une fois les sagas Star Wars et le Seigneur des Anneaux. Cette trilogie apportera encore une dimension supplémentaire à « la saga Kaamelott » et la fera entrer définitivement dans l'ère des films-mondes qui donnent lieu à des formes étendues de consommation de produits dérivés et créent de véritables univers désormais entretenus via Internet »77. Cette multiplicité de medium et de media utilisés par Astier pour donner vie à sa version de la LA la démarque encore davantage des autres productions télévisées et lui confère donc, en partie, son originalité. Pour conforter l'hypothèse de l'originalité de Kaamelott il existe de nombreuses pistes mais la plus pertinente semble celle de l'analyse filmique. En effet nous venons de voir sur ce travail de première année et davantage sur celui-ci que Kaamelott ne ressemblait à aucune autre série française par son écriture. Il faudrait donc analyser, et cela peut être l'objet d'un projet futur de recherche, les spécificités de Kaamelott d'un point de vue filmique. Il peut s'agir de la temporalité, la durée fictive des intrigues (un épisode peut évoquer un fait durant un jour comme une heure) de l'utilisation des plans, du son, etc. Cette nouvelle approche de la série nous permettrait de l'analyser plus précisément qu'actuellement car bien que pertinente les théories de Genette ne sont pas réellement adaptées au genre télévisuel C'est également pour cette raison que nous sommes ici en présence d'une analyse portant uniquement sur le texte et non sur le son et l'image. Nous le voyons donc, Kaamelott à un véritable intérêt épistémologique et peut encore faire l'objet de très nombreux travaux de recherches et ce dans plusieurs disciplines. Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 75 77 Sadoul (Georges), L'histoire du cinéma mondial, Flammarion, Paris, 1999 Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 76 |
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