
Directeur de recherches : Mongi Madini Session
2012
Maître de conférences à
l'Université de Franche-Comté
Master 2
Discours, texte, documentation, communication
Kaamelott
Humour télévisuel et série
intertextuelle
Mémoire présenté et soutenu
publiquement par
BROSSARD Sébastien

Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 2
Remerciements
J'exprime ma profonde gratitude à Monsieur Madini, mon
directeur de recherches, pour avoir accepté de m'accompagner dans cette
aventure intellectuelle qu'est la réalisation d'un mémoire. Ses
conseils judicieux et sa confiance m'ont permis de mener à bien ce
projet. Je témoigne toute ma reconnaissance à Madame
Chauvin-Vileno pour m'avoir conseillé dans le choix de mon directeur de
recherche ainsi qu'à Monsieur Viprey de m'avoir encouragé
à poursuivre mon parcours avec ce sujet. Je tiens également
à remercier toutes les personnes qui ont contribué à mon
parcours universitaires, étudiants, enseignants et administratifs
compris. Je remercie plus particulièrement Nicole Salzard pour son aide
au laboratoire LASELDI.
Enfin je tiens à adresser toutes mes amitiés
à Martin Grand pour son scepticisme concernant le sérieux de ce
sujet et de la série Kaamelott et qui désormais a fini
par l'apprécier, je l'espère un peu grâce à mon
travail.
Je n'oublie pas non plus Emeline Gaudot pour ses judicieux
conseils de mise en page et de lecture. Pour les mêmes raisons j'adresse
toute ma gratitude et mon amitié à Clémentine
Vermot-Desroches, Thibaud Nedey, Marie Laure Louis pour ma photo de couverture
ainsi qu'à Alexandre Mathiot pour nos séances de visionnage et
surtout pour ses précieuses relectures, à Sébastien
Hacquard pour sa patience et à Ludovic Nicot ainsi qu'à ma soeur
Sandra pour m'avoir persuadé que cette série me ferait rire, je
pense avoir dépassé ses espérances.
Je ne saurais conclure ces remerciements sans évoquer
mes parents qui m'ont permis d'accéder à cette formation avec
tout le soutien moral et matériel que cela implique et de
démontrer, puisqu'il est hélas encore utile de le faire, que
l'université est un merveilleux lieu d'émancipation et un rempart
contre la reproduction sociale.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 3
Sommaire
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 4
Remerciements 2
Bilan de recherche 6
Kaamelott : Du programme court humoristique au format
américain dramatique
10
1. Le phénomène des programmes courts
humoristiques 11
2. La télévision, objet culturel 13
3. Les séries, un atout majeur pour la
télévision du XXIème siècle. 14
4. M6 et les programmes courts. 15
5. Evolution de Kamelott. 17
6. La distribution et ses spécificités. 18
7. L'intrigue. 20
8. La communauté de fans. 23
Kaamelott :26De la Légende Arthurienne à
Michel Audiard, une série construite
sur plusieurs niveaux d'intertextualité. 26
1. Les origines 27
2. Le formalisme russe. 29
3. La transtextualité de Genette. 30
4. Le pastiche 31
Les traces de contemporanéité dans Kaamelott,
une astuce scénaristique pour
évoquer le siècle du téléspectateur.
45
1. Présentation du corpus 46
2. Contextualisation des thèmes analysés. 47
3. Analyse des épisodes. 49
Conclusion 72
Bibliographies 76
Livres 77
DVD 77
WEBOGRAPHIE 78
Abréviations :
CC : Caméra Café
SDM : Scènes De Ménages AA : Alexandre Astier
LA : légende Arthurienne
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 5
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 6
Bilan de
recherche
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 7
Une oeuvre n'est qu'une rencontre passagère dans notre
vie mais il peut aussi être une trace indélébile. Cette
pensée nous semble être une explication satisfaisante pour
justifier le choix du sujet de ce mémoire. La rencontre avec la
série Kaamelott il y a de cela quatre années nous a
marqué profondément et nous a incité à nous y
intéresser non plus avec le regard du spectateur ou du critique mais
bien avec l'oeil du chercheur. Nous avons amorcé ce travail l'an dernier
en nous intéressant à l'intertextualité, aux influences
qui ont inspiré Alexandre Astier, l'auteur de la série, notamment
Michel Audiard. Nous reviendrons sur cette référence majeure au
cours du deuxième chapitre.
Nous restions donc dans le cadre de la série, sans la
considérer en tant qu'objet télévisuel avec toutes les
contraintes que cela implique.
L'objectif de ce mémoire est de démontrer en
quoi Kaamelott n'est pas qu'une série française
humoristique supplémentaire mais bien un programme original de
qualité, bien qu'il soit diffusé sur une chaine commerciale, et
ne se limitant pas à la télévision. Kaamelott est
vouée à devenir une référence dans l'histoire de la
fiction française, quelque soit le support et qui mérite qu'on
lui consacre deux années universitaires.
Selon le Trésor de la Langue Française
une série peut se définir comme un ensemble
représentatif dans un domaine technique. Dans le domaine des arts, c'est
« un ensemble composé d'oeuvres qui possèdent entre elles
une unité et forment un tout cohérent ». Et pour le genre
télévisuel c'est « une suite de feuilletons, de films,
d'émissions liés par une unité de genre, de forme, de
sujet ou de personnages ».
Nous avions donc conclu dans un travail
précédent intitulé Kaamelott Humour, parodie et
réflexion sur l'échec au vu des différents
éléments techniques que l'oeuvre d'Alexandre Astier peut
être considérer comme une série aussi bien au format
télévisuel que sous la forme de bande dessinée et
bientôt de long métrage pour le cinéma.
Les quatre premières saisons de Kaamelott sont
composées de cents épisodes chacune, d'une durée de trois
minutes trente secondes. Les saisons 5 et 6 comptent moins de dix
épisodes mais ont une durée de cinquante deux minutes chacun.
Selon le Petit Larousse 2012 une saison est «
l'ensemble des épisodes d'une série
télévisée, diffusés à intervalles
réguliers pendant une période déterminé ».
Les sujets récurrents sont la quête du Graal, les
diverses quêtes secondaires ainsi que les problèmes de la vie
quotidienne. Il y a une dizaine de personnages que nous retrouvons presque
systématiquement durant les six saisons
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 8
Selon Hegel « l'homme n'est rien d'autre que la
série de ses actes ».1 La série évoque ici
donc une construction, une évolution due à l'ajout de nouveaux
éléments différents.
C'est un phénomène identique à celui
défini par Hegel qui se produit dans le cas des séries
télévisées. Kaamelott évolue au fil des
épisodes avec l'ajout de nouveaux personnages qui deviendront pour
certains d'entre eux récurrents. C'est le cas pour les chevaliers Yvain
et Gauvain qui sont respectivement le frère de la Reine et le neveu du
Roi. L'arrivée de ces deux personnages permet à l'auteur
d'exploiter davantage le filon des intrigues familiales. Le Tavernier ou encore
l'enchanteur Elias, rival de Merlin, sont deux autres personnages
ajoutés et qui enrichissent la série avec l'apport de nouveau
lieux et de nouvelles intrigues. L'arrivée de ces nouveaux personnages
perturbe donc tout l'univers de la série et crée alors des
situations nouvelles. Citons par exemple la rivalité entre Elias et
Merlin qui provoquera le départ de ce dernier dans la saison 5 ou encore
l'évolution du personnage de Lancelot qui, révolté par la
bêtise et la faiblesse des autres chevaliers, passera de serviteur
dévoué au Roi à traître qui décide de fonder
son propre camp. L'évolution se ressent aussi du point de vue de
l'espace puisque la série va progressivement quitter l'enceinte du
château et évoluer dans de nouveaux lieux tels que la taverne le
camp de Lancelot ou le domaine de Caïus.
Nous pouvons d'ailleurs faire la distinction entre
série et feuilleton. La série est constituée
d'épisodes que nous pouvons suivre indépendamment les uns des
autres, même si quelques éléments comme les personnages et
des événements font le lien, ayant un début et une fin. Le
feuilleton est constitué également d'épisodes mais avec
une fin ouverte permettant au scénariste d'introduire l'intrigue du
prochain épisode et un début récapitulant les
éléments essentiels de l'intrigue des épisodes
précédents. Si nous suivons ces définitions de
François Jost2, Kammelott serait dans un premier
temps une série et deviendrait partiellement dans le livre IV et
totalement dans les livres V et VI un feuilleton. Cependant, pour plus de
commodité, nous allons systématiquement employer le mot
série.
Nous retrouvons ces conditions en analysant plusieurs
séries, quelque soit le format et la nationalité ou leur genre
qu'il soit comique, dramatique, policier ou historique. La trame de fond, qu'il
s'agisse d'un commissariat, un hôpital, Rome, un quartier aisé,
une île ;
etc. et les personnages récurrents
constituent ce que nous pouvons nommer les invariants. Il en va de même
pour la forme qui évolue rarement .La durée, l'ambiance, la
réalisation, et l'habillage musical restent généralement
sensiblement le même de la naissance à la mort d'une série.
La seule constante est que cet habillage est intégralement
composé par Alexandre Astier.
1 Hegel (Friedrich), Encyclopédie des
sciences philosophiques en abrégé, 1830, Gallimard, 1990.
2 Jost (François), 50 fiches pour
comprendre les médias, éd. Bréal, 2012
Kaamelott est un parfait contre exemple puisque tout
a considérablement changé entre les quatre premières
saisons et les deux suivantes. En effet, la série est passée du
format court ou « shortcom » au format dit « américain
». Le nombre de plans et de décors s'est également
multiplié. Le casting s'est considérablement renouvelé
dans la saison 6. La trame de fond principal de la saison 6 s'est
déplacée de la Bretagne à Rome et l'habillage musical
ainsi que le générique ont été
retravaillés.
Il est également important de préciser que
généralement le genre conditionne la forme. Par exemple les
séries policières ou dramatiques, américaines et
européennes, ne sont jamais des formats vingt-six minutes ou
shortcom Cette durée est réservée aux sitcoms
telles que Friends, Hélène et les garçons mais
également à certains soap3 comme Plus belle la
vie, aux intrigues plus légères et évidemment
à Un gars, une fille, SDM ou CC.
Ainsi Kaamelott entre parfaitement dans cette
logique. Il s'agit d'abord d'un format court n'ayant d'autre prétention
que de faire rire le téléspectateur et évolue à un
format cinquante deux minutes (américain) à mesure que
son ambition dramatique grandit.
Pour mener à bien ce travail, nous allons
étudier la télévision qui est le support principal de
Kaamelott et plus particulièrement les séries
télévisées. Ensuite nous chercherons à
déterminer si Kaamelott appartient au registre de la parodie
ainsi que ces liens avec la LA. Enfin nous analyserons une sélection
d'épisode traitant tous de sujet postérieur au Moyen Age afin de
caractériser une autre spécificité de la série.
Toutes ces étapes vont nous permettre de vérifier notre
hypothèse de départ.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 9
3 Cette désignation provient du fait que les
premiers feuilletons radiophoniques américains étaient
produits1 et sponsorisés2 par des fabricants de
savons et autres produits d'hygiène comme Procter & Gamble,
Colgate-Palmolive et Lever Brothers. Aux États-Unis,
les premiers soap operas étaient radiodiffusés en semaine,
à une heure où ils pouvaient être suivis par les femmes au
foyer ; ces feuilletons sont donc conçus à l'origine pour une
audience majoritairement féminine.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 10
Kaamelott : Du
programme court
humoristique au
format américain
dramatique.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 11
1. Le phénomène des programmes courts
humoristiques.
Les programmes courts sont apparus sur les chaines de
télévision française depuis bientôt quinze ans. Il
en existe principalement deux sortes : les promotionnels et les fictionnels,
généralement humoristiques.
Les promotionnels sont des programmes de type « du
coté de chez vous » financé par une marque,
généralement une grande enseigne et, dans ce cas précis,
les magasins d'outillages Leroy Merlin. Nous pouvions y voir, sur TF1
juste après le journal de 20h, des particuliers présentant leur
maison qui était originale de par leur conception ou leur
décoration. Auchan, Leclerc, mais également
le ministère de l'intérieur pour les campagnes de
prévention de la Sécurité Routière adopteront ce
format avec plus ou moins de succès.
Mais ce qui nous intéresse dans ce travail
d'étude ce sont les fictionnels appelés aussi shortcom. «
Un gars, une fille » est la première du genre à
avoir connu un immense succès public et critique , diffusée sur
France2 avant le journal de 20h entre le 11 octobre 1999 et le 16 octobre
2003.
Suivront ensuite les succès de Caméra
Café, Kaamelott ou encore Scènes de
ménages, toutes diffusées sur M6 entre 2001 et 2012
(Scènes de ménages est en cours de diffusion mais aussi
de tournage). D'autres connurent moins de succès comme Que du
bonheur, Laverie de famille, Code barge diffusée sur TF1
ou encore La bande dehouf sur France2 et Caméra Café
: la boite du dessus sur M6.
Nous pouvons comparer tous ces programmes mais il existe des
aspects pertinents pour les distinguer.
Le premier en est l'origine. Pour Kaamelott et
Caméra Café il s'agit de programmes originaux
français alors que Un gars, une fille est une oeuvre venant du
Québec et Scènes de ménages est la libre
adaptation d'une série espagnole4. De plus Kaamelott
et Caméra Café sont tous les deux produits par la
société de production CALT à qui l'on doit
également Off prime et Héro Corp. Ce sont deux
séries créées par Simon Astier, le frère du
créateur de Kaamelott.
Caméra Café est le projet de deux
comédiens déjà célèbres avant la
série, Bruno Solo (La vérité si je mens, Jet
Set au cinéma) et Yvan Le Bolloch, animateur de
télévision qui a découvert Bruno Solo., dans le public
d'une de ses émissions. Ce sont les acteurs principaux de la
série mais également les plus connus du grand public, ce qui est
un critère important pour M6. En effet leur notoriété
réduit le risque d'échec.
Le projet Kaamelott naît lorsqu'Alexandre
Astier réalise en 2003 le court métrage DIES IRAE. Ce
court-métrage pose les bases de la future série de M6.
Nous y retrouvons la plupart
4 Escenas de Matrimonio
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 12
des personnages, un des décors principaux (la salle de
la Table Ronde) et le ton caustique qui caractérise la série.
DIES IRAE (jour de colère), est récompensé par le
prix du public au Festival Off-Court. A Trouville en 2003. Le titre
évoque la liturgie catholique ainsi qu'une oeuvre de Mozart. M6 tombe
alors sous le charme de ce projet et commande six épisodes pilote
à Astier.
Le Livre I sera diffusée en janvier 2005.
Il s'agit donc d'une commande à la suite du visionnage
par M6 d'un court métrage réalisé et écrit par un
artiste inconnu du grand public. Le risque est donc plus important pour la
chaine même si Kaamelott profite du fait de prendre la suite de
Caméra Café qui s'était installé à
cet horaire, 20h05.
Un deuxième critère différenciateur est
le diffuseur. Nous l'avons vu hormis Un gars, une fille, toutes les
shortcoms à succès sont diffusées sur M6. D'ailleurs
après avoir été programmée sur France2, nous avons
pu voir Un gars, une fille sur France4, Teva (groupe M6) et
aujourd'hui sur... M6 ! Il est même intéressant de souligner qu'
« Un gars, une fille » avait été proposé
à M6 en premier5.
Il existe également des différences au niveau de
la structure. Si certaines séries peuvent se suivre dans le
désordre grâce à des intrigues indépendantes
(Scènes de ménage, Un gars, une fille, Caméra
Café), ce n'est pas toujours le cas pour la série
Kaamelott. Même si les saisons 1 et 2 semblent
constituées d'épisodes n'ayant aucun lien d'un point de vue
narratif, quelques indices nous montrent le contraire (évocation
d'événement s'étant produit dans des épisodes
passés, personnage effectuant leur retour, etc)
Le nombre de comédiens présents à
l'écran et leur relation marquent aussi la différence entre ces
programmes. Pour Caméra Café et Kaamelott nous
constatons la présence d'une dizaine de personnages se connaissant tous
et ayant tous un lien relationnel (employeur- subordonnée, couple,
rival)
Scènes de ménages ou Un gars, une
fille utilisent un nombre de personnages plus restreints. Dans Un
gars, une fille, seuls Jean et Alexandra sont à l'écran, les
autres personnages sont hors champs. Concernant Scènes de
ménages, nous comptons huit comédiens (quatre couples) mais
l'originalité réside dans le fait qu'ils ne se connaissent pas,
ils ignorent jusqu'à l'existence des autres. Mais contrairement à
Un gars, une fille, nous voyons régulièrement d'autres
comédiens qui apparaissent plus ou moins fréquemment (amis,
parents, voisins).
5 Pellerin (Marc), Viot (François), M6
story, la saga de « la chaîne en trop », Flamarion,
2012
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 13
Enfin Kaamelott se différencie d'un point de
vue filmique. Lorsque Caméra Café, Un Gars, une
fille ou Scènes de ménages sont en plan fixe pour
tout l'épisode, Kaamelott est la seule shortcom a
utilisé plusieurs plans et même plusieurs décors pour le
même épisode.
2. La télévision, objet culturel
Pendant plusieurs décennies télévision
pouvait se concevoir de deux manières : offrir aux
téléspectateurs ce qui est susceptible de les intéresser.
C'est généralement ce que fait la télévision
privée (TF1, M6) afin de séduire le plus grand nombre.
Ou alors on estime que la télévision est un outil permettant de
développer la culture et qui permet de faire découvrir de
nouveaux horizons aux masses6. C'est ce qui est censé
être la mission du service public et le choix de quelques chaînes
comme ARTE. Cependant, depuis les années 1990, le service public se
préoccupe également de l'audience et propose des programmes moins
ambitieux qu'auparavant. De même nous pouvons regarder des programmes de
qualité sur des chaines privés, il ne s'agit là que d'une
tendance générale et non un schéma binaire. L'objectif
d'une chaîne privée étant d'engranger des recettes
publicitaires, elle doit donc proposer des programmes fédérateurs
et ne peut donc pas se permettre de prendre des risques sur sa programmation.
Nous aboutissons donc à des programmes consensuels pourvus de
personnages stéréotypés, des scénarios convenus et
des sujets pouvant plaire à tous et évitant de heurter certaines
couches de la population ou certaines communautés.
Il est également difficile de parler d'Histoire
à la télévision ou de diffuser du théâtre,
des concerts, bref d'imposer une certaine qualité culturelle. Le risque
pour le diffuseur est de paraître élitiste. C'est pourquoi les
rares pièces de théâtre diffusé à une heure
de grande écoute sont des vaudevilles ou des pièces de
boulevards. Comme pour les fictions, les décideurs choisissent
d'augmenter les chances de réaliser une large audience.
Cette question de la qualité et du respect de la
culture existe depuis la naissance de la télévision4
et continue de diviser professionnel de la télévision, de la
culture et téléspectateurs avertis.
Bien que, la tâche semble ardue pour les diffuseurs et
que la prise de risque soit nécessaire, il est tout de même
possible de produire des programmes de qualité à la
télévision (nous
6 Le sociologue Michel Crozier traitait
déjà cette question en 1966 dans son article
Télévision et développement culturel et Thomas
Yadan évoque à nouveau ce sujet en septembre 2006 pour le site
Evene.fr
http://www.evene.fr/celebre/actualite/culture-television-audimat-arte-bourdieu-divertissement-455.php
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 14
entendons ici, qualité ayant une valeur culturelle, la
culture légitime telle que la conceptualise Pierre Bourdieu en 1979 dans
La distinction).
3. Les séries, un atout majeur pour la
télévision du XXIème siècle.
Longtemps considéré comme un art mineur, la
télévision est en passe de prendre le dessus sur le cinéma
grâce à ses productions et qui relèvent en premier lieu de
la fiction.
Pendant des décennies les principales chaînes
américaines (network) et françaises misaient sur les programmes
de variétés, le sport ou encore le cinéma pour renforcer
leurs audiences. Désormais la recette du succès est la diffusion
de séries, principalement américaines.
Ainsi entre le 3 janvier 2011 et le 1er janvier 2012, 72 des
cent meilleures audiences en France étaient réalisés par
cinq séries américaines diffusés sur TF17. Il
s'agit soit de fiction basées sur des intrigues policières
(Mentalist, Les Experts, Esprits criminels) soit
médicales (Dr House, Grey's Anatomy,
Urgences)
La fiction française ne représente que quatre
petites places et il ne s'agit que de comédies familiales à
contrario des séries US destinés à un public plus avertis
ou adultes. En effet nous pouvons visionner dans ces productions des
scènes de crimes, d'autopsies, d'opérations chirurgicales,
entendre des dialogues plus crus, bien qu'édulcorés à la
traduction.
Les succès planétaires des différentes
déclinaisons de CSI (en France Les Experts), de
Lost, 24h Chrono et aujourd'hui Terra Nova ou encore
Mad Men le prouvent. Toutes ces séries sont unanimement
encensées par la critique et figurent désormais dans les pages de
magazines culturels tels que Télérama ou encore Les
Inrockuptibles.
Ces séries bénéficient toutes de
signatures cinématographiques, que ce soit les producteurs (Steven
Spielberg, Quentin Tarantino, Bryan Singer, Martin Scorsese...) ou les acteurs
(Kiefer Sutherland, Laurence Fishburne). Et désormais les séries
TV sont des tremplins vers le cinéma. Ainsi J. J. Abrahams, producteur
des séries Lost, Heroes ou encore Alias, est
devenu un des réalisateurs les plus prisés d'Hollywood, notamment
en adaptant les séries Star Trek et Mission Impossible
pour le grand écran.
Elles traitent de sujets réservés jusqu'ici au
cinéma tels que la drogue, l'homosexualité, la mafia, la mort,
etc.
La situation en France était encore différente
au début des années 2000. Les héros étaient soit
des familles sympathiques usant des ficelles du Vaudeville telles que
l'adultère, le quiproquo, les problèmes d'héritage, soit
des policiers intègres, père ou mère de famille, se
remettant très
7 TF1 réalise sur cette période 99 des
100 meilleures audiences. Source Médiamétrie
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 15
rarement en question ainsi que leur profession. Par ailleurs,
ils n'étaient que trop rarement crédibles principalement à
cause de leur ancienneté, par exemple Navarro et Cordier ont
passé la soixantaine depuis plus de vingt ans8 ! Tous ces
héros sont politiquement corrects, intègres (Joséphine
ange gardien, L'instit) et n'emploient que très rarement un
vocabulaire familier. Tous les héros de ces séries sont
déjà connus du grand public qu'ils s'agissent des sitcoms
françaises portés par des figures du théâtre et de
l'humour comme Rosy Varte, Jean Marc Thibaud, Marthe Vilalonga pour la
série à succès d'Antenne2 Maguy ou encore
Gérard Rinaldi l'ancien leader de la troupe comique Les Charlots
et héros de la série phare des années quatre vingt de
TF1 intitulée Marc et Sophie.
Seules les sitcoms de TF1 produites par AB Production comme
Hélène et les garçons, Le miel et les
abeilles pour ne citer que les plus connues mettaient en scène une
majorité d'acteurs totalement inconnus du grand public. Ce fut
également le cas en 2004 sur France3 avec le feuilleton Plus belle
la vie.
Les choses changent dans les années 2000 avec la
concurrence des séries américaines citées
précédemment. Elles vont mettre en porte à faux les
fictions françaises et les obliger à se remettre en question.
Ainsi, TF1 produira des épisodes de ses séries phares Julie
Lescaut et Brigade Navarro dans un format 52 minutes «
à l'américaine » contre 90 minutes auparavant. La
première évolution notoire survient avec Caméra
Café qui présente sous un jour critique le monde de
l'entreprise et impose ses dialogues dans la veine de Michel
Audiard9 sur M6 à 20h05 en 2001.
4. M6 et les programmes courts.
A cette époque M6 est encore « la petite
chaîne qui monte » et doit se démarquer de la concurrence en
prenant des risques. C'est ainsi qu'en 2001, elle bouleverse le PAF en
important l'émission de téléréalité Big
Brother, rebaptisée pour le marché français Loft
Story. La chaîne poursuit cette stratégie de
contre-programmation en diffusant des séries familiales
8
|
Roger Hanin incarnera un commissaire divisionnaire dans la
série Brigade Navarro à 83 ans. Pierre Mondy jouera le
Commissaire Cordier jusqu'en 2007 à l'âge de 82 ans. Idem
pour Yves Rénier, 63 ans pour le dernier épisode du
Commissaire Moulin. La départ en retraite, avant 2010, pour les
services actifs étaient alors fixées à 55 ans.
http://www.retraite.net/retraite-police-gendarmerie,d31-6.html
|
9 Scénariste, dialoguiste, réalisateur et
écrivain, on lui doit notamment les dialogues des films cultes Les
Tontons flingueurs, Les Barbouzes ou encore 100 000 dollars au soleil.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 16
américaines (Cosby Show, Notre Belle Famille, Une
nounou d'enfer) en face de la grande messe du 20h et du JT de 13h, et en
étant la chaîne « 0% foot » lors de la coupe du coupe du
monde de football en France en 1998. L'information sur M6, jusqu'en
décembre 2005, c'est le Six minutes un format court et tout en
image diffusé à 12h54 et 19h54, proposant l'essentiel de
l'actualité juste avant les grands journaux
télévisés de TF1 et France2.
C'est toujours dans cette politique de contre-programmation
que M6 diffuse des programmes courts et humoristiques tels que
Caméra Café, Kaamelott, Un gars, une fille
(pionnier du programme court humoristique en France diffusé pour la
première fois sur France2 en 1999). Depuis 2009 Scènes de
ménage a pris le relais à la suite des rendez-vous
d'informations de la chaîne. M6 a jugé bon de remplacer le six
minutes et de se pourvoir de journaux télévisés, aux
formats plus traditionnels, pour atteindre les nouveaux objectifs de la
chaîne, aussi bien en terme d'audience que d'image. Caméra
Café a également profité de l'engouement
suscité par Loft Story diffusé juste avant le six
minutes pour s'imposer. Cependant, , Kaamelott, est le
véritable déclencheur de ce renouveau de la fiction
française.
C'est effectivement la première fois en France que nous
avons pu voir une série comique d'une telle ambition, aussi bien sur le
fond, la légende du Roi Arthur, que sur la forme. Kaamelott se
reconnaît et se démarque rapidement par sa multitude de
décors, ses costumes d'époques, son importante distribution ou
encore sa figuration et qui plus est sur une chaîne privée
généraliste.
Canal+ emboîte alors le pas à M6 et commence
à produire des créations originales telles que Braquo,
reporters, Engrenages, Platanes, Maisons closes, Pigalle la nuit, Hard, Carlos,
Mafiosa, Kaboul Kitchen, etc. s'essayant avec succès à la
comédie, au drame, au policier mais s'adressant rarement à un
public familial.
France2 choisi une voie différente en adaptant des
classiques de la littérature française (Balzac, Maupassant) ou
anglaise (Agatha Christie) et la série familiale Fais pas çi,
Fais pas ça. France3 impose sa série Un village
français se déroulant pendant la Seconde Guerre Mondiale,
une saison correspondant à une année.
Pour toutes ces productions nous pouvons compter au moins une
tête d'affiche au générique. Citons par exemple les
populaires acteurs Antoine Duléry, Isabelle Gélinas, Bruno
Salomone, Gilbert Melki, Jean Hugues Anglade ou encore Eric Judor10.
Alors que Kaamelott est
10 Antoine Duléry (Petits meurtres entre
amis) a joué dans de grands succès populaire au
cinéma (Camping, Jean Philippe...).Isabelle Gelinas (Fais
pas ci fais pas ça) incarne l'amie de Jean Pierre Bacri dans
Didier d'Alain Chabat (également présent dans
Kaamelott).Gilbert Melki (Kaboul Kitchen) est patrick Abitbol
dans la trilogie La vérité si je mens (qui cumule plus
de 10 millions d'entrées).Bruno Salomone (Fais pas ci fais pas
ça) était Caius dans Kaamelott et à
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 17
composé essentiellement de comédiens inconnus du
grand public à l'exception du Maître d'Arme (Christiant Bujeau),
célèbre pour son rôle de Jean Pierre dans Les
Visiteurs. Cependant le succès de Kaamelott nous permet de
voir aujourd'hui de nombreux comédiens de la série dans d'autres
productions. Nous pouvons prendre pour exemple la série Off Prime
diffusé en mai 2007 sur M6. C'est une création de Simon
Astier dans laquelle nous retrouvons une partie du casting de Kaamelott
soit épisodiquement, soit de manière récurrente.
Simon Astier est également le créateur de la série
Hero Corps, diffusée sur France4 et Comédie, en
octobre 2008.
5. Evolution de Kamelott.
Kaamelott est la seule série française
dite shortcom à être passée au format
américain, c'est-à-dire des épisodes d'une
duréée de cinquante deux minutes(saison 5 et 6). Le seul exemple
d'évolution de format est le soap marseillais Plus belle la
vie. En effet France3 produit au rythme de trois par an des
épisodes au format américain et les diffusent en prime
time11.Les épisodes quotidiens diffusés du lundi
au vendredi depuis 2004 face au JT durent 26 minutes.
Nous avons vu précédemment que les shortcoms
sont soit destinés à la contre programmation face aux grands
rendez-vous d'informations que sont les 20h de TF1 et France2, soit des
produits d'appels pour ces JT ou le programme de la soirée, le prime
time.
La mutation opérée par Kaamelott peut
être expliquée de deux façons. D'abord il existe une
volonté de l'auteur de faire évoluer sa série. Nous avons
vu que le comique est souvent utilisé dans des formats plus courts que
le dramatique. Or l'évolution de Kaamelott est clairement
dramatique à partir de la saison 4 et son application est réel
dans la saison 5, saison du changement de format.
Kaamelott est d'abord un court métrage puis
une shortcom avec l'apport financier de M6 et devient une série au
format américain. C'est donc le succès critique et surtout public
qui permet cette mutation de la série et incite M6 à suivre
Astier dans cette voie. Ce succès ne
l'affiche de Brice de Nice avec Jean Dujardin (Un
gars, une fille) .Jean Hugues Anglade (Braquo) est le
protagoniste principal de 37°2 le matin de jean jacques Beneix,
Eric Judor est célèbre pour son du duo comique avec Ramzy
Bédia et pour avoir joué dans la sitcom H (Canal+).
11 Anglicisme. Terme employé par les
professionnels de la télévision et de la publicité pour
désigner la période de plus forte audience dans la
journée. En radio, il s'agit de la tranche 7h-9h
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 18
sera pas démenti avec ce nouveau format12.
La série passe du statut de produit d'appel pour inciter le
téléspectateur à rester sur M6 pour le prime
time et dans un deuxième temps devient prime time
elle-même.
M6 a déjà employé cette méthode
avec CC et continue avec SDM13. Mais d'autres
chaînes consacrent désormais leur prime time aux
shortcoms. Nous pouvons citer Teva (groupe M6) ou France 4 et les
soirées Un Gars, une fille ou Comédie (groupe Canal+)
avec Les Blondes (shortcom d'animation) ou encore Canal+ et la
série phénomène de la rentrée Bref. Astier
et jean Christophe Hembert apparaissent dans un épisode de la
deuxième saison dans lequel ils font référence à
leur personnage d'Arthur et Karadoc.14
M6 n'est pas seulement une chaîne mais un
groupe de télévision auquel appartient entre autres W9,
et Paris première. Sur ces deux chaînes nous pouvons voir
régulièrement des rediffusions de CC et
Kaamelott, soit par salve d'épisodes en cours de journée
ou bien lors de soirées spéciales.
6. La distribution et ses
spécificités.
a) Livre I à IV :
La distribution de Kaamelott peut être
divisé en deux catégories, les acteurs inconnus du grand public
et ceux ayant déjà une certaine notoriété.
AA n'aime pas les castings et recrute donc des acteurs qu'il
connaît bien et si possible avec lesquels il a déjà
travaillé. Le père, la mère la belle-mère et le
frère d'AA figurent dans la distribution de la série. Ce sont
avant tout d'excellents acteurs. Les personnages de Merlin, Perceval, Karadoc
entres autres sont interprétés par des acteurs qu'il
connaît depuis ses débuts dans la région lyonnaise. Le
point commun entre tous ces acteurs et le fait qu'ils soient parmi les
meilleurs dans leur domaine.
12 M6 fera sa meilleure audience 2009 pour un
samedi soir avec la diffusion le 18 octobre des trois premiers épisodes
de la saison 6 de Kaamelott.
http://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18486567.html
13 Devant l'immense succès de Scènes
de Ménages, M6 a consacré la soirée du 31 décembre
2011 à la série en diffusant un best of.
http://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/fiche/m6/divertissement/50235658/soiree-speciale-vos-meilleures-scenes-de-menages.html
14 Bref. Y a des gens qui
m'énervent.
http://www.canalplus.fr/c-divertissement/pid3848-c-bref.html
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 19
Kaamelott a la particularité d'être une
série qui accueille beaucoup d'acteurs déjà connus par la
télévision du grand public, le temps d'un ou quelques
épisodes. Nous citerons dans le désordre Bruno Solo, Yvan le
Bolloc'h15, Virginie Efira, Elie Semoun, Barbara Schultz, Marcel
Phillipot ou Didier Bénureau.
b) Livre V et VI
Suite au grand succès critique et publique de la
série, Le Livre V voit arriver beaucoup d'invités tels
Christian Clavier, Géraldine Nakache, Patrick Bouchitey, Guy Bedos ou
encore Alain Chabat. Pour M6 et CALT c'est un enjeu
considérable de propulser la série en prime time et ces grands
noms au générique sont un immense atout pour réaliser une
bonne audience.
Alain Chabat est l'un des acteurs les plus populaires du
cinéma français, en particulier depuis la réalisation
d'Astérix : Mission Cléopâtre qui compte plus de
quinze millions d'entrée au cinéma.
Christian Clavier est l'un des acteurs français
comptabilisant le plus d'entrées au cinéma et ayant joué
dans des pièces de théâtre mais aussi des fictions à
la télévision extrêmement populaire. Nous pouvons citer au
cinéma, les deux premiers volets d'Astérix, Les
Visiteurs de Jean Marie Poiré16, la trilogie Les
Bronzés, au théâtre Le père noël est
une ordure et La Cage aux folles et à la
télévision Les Misérables (TF1) et
Napoléon (France2).
Il est intéressant de préciser qu'Astier
travaille actuellement sur l'adaptation en dessin animée 3D de l'album
d'Astérix, Le domaine des Dieux17. Et qu'il a fait
une apparition dans le film Astérix aux jeux
olympiques18.Nous comprenons donc encore une fois ce besoin
pour Astier de s'entourer d'acteurs gravitant autour de son univers et de ses
références, qu'il s'agisse de la bande dessinée.(Astier a
déjà écrit 7 tomes de la BD Kaamelott) ou de
forme d'humour. René Goscinny et Albert Uderzo, les créateurs
d'Astérix, sont des maitres dans l'art de l'anachronisme
(Gaulle-Vingtième siècle) et de l'absurde. Ainsi, dans l'album
Astérix gladiateur, certains Romains vivent dans des HLM,
« habitation latine mélangée »19. Les
15 Bruno Solo et Yvan le Bolloc'h sont deux
comédiens de la série Camera Café,
diffusée sur M6 et produite par CALT. Kaamelott est le
programme qui a succédé à Caméra
café. Virginie Efira était, du temps de la première
diffusion télévisée, l'animatrice vedette de M6. Elle joue
également le premier rôle dans la sitcom Off Prime de
Simon Astier. On retrouve dans cette série de nombreux acteurs de
Kaamelott.
16 Voir le travail de M1 Kaamelott : Humour
parodie et réflexion
17
http://www.commeaucinema.com/tournage/alexandre-astier-pioche-dans-le-domaine-des-dieux,189574
18
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=18793598&cfilm=61259.html
19 Goscinny (René), Uderzo (Albert),
Astérix gladiateur, p22, Dargaud, 19644
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 20
habitations à loyer modéré datent de
195420. Ou encore dans l'album Les lauriers de
César21, nous pouvons lire sur le mur de la cellule des
deux Gaulois « Interdit d'interdire ». Jean Yanne est l'inventeur de
ce slogan « il est interdit d'interdire » lors d'une de son
émission dominicale sur l'antenne de RTL au printemps 1968. Ce slogan
sera repris par les étudiants lors des événements du mois
de mai de la même année22. Nous verrons par la suite
que le personnage d'Yvain emploie parfois un langage proche des
étudiants de mai 68.
Le Livre VI se situant 15 ans avant
Kaamelott, 80% du casting est renouvelé et est composé
d'encore plus d'acteurs connus parmi lesquels Pierre Mondy metteur en
scène de La cage au folles et héros de la
célèbre trilogie La 7ème compagnie,
Patrick Chesnais, Manu Payet.
Astier retrouvera Manu Payet en 2011 dans le film parodique
Philibert, capitaine puceau. Nous retrouvons parmi les personnages du
casting original de la série uniquement Arthur dans tous les
épisodes du Livre VI.
Pour clore ce chapitre il est intéressant de
préciser qu'AA utilise la technique du flashback sur une saison pour
raconter la genèse de son histoire. Dans l'album Les lauriers de
César23, Goscinny utilise le même
procédé pendant cinq pages pour expliquer aux lecteurs pourquoi
Astérix et Obélix sont à Rome. Nous apprenons donc que
l'intrigue démarre à Lutèce.Le précurseur de ce
procédé n'est autre qu'Homère dans
L'Odyssée.
7. L'intrigue.
A l'exception du Livre VI qui évoque la
genèse du Roi Arthur, Kaamelott se déroule de
manière chronologique. En effet, ce dernier se situe 15 ans avant le
Livre I et en grande partie à Rome. Le casting est donc
très différent de celui des Livres I à V.
Soulignons juste qu'Arthur est propulsé par le
sénateur romain Salustius. Ce dernier a eu vent de la légende de
l'enfant choisi par les dieux pour retirer Excalibur de son rocher et souhaite
ainsi contrôler les différents chefs Bretons. Salustius fait venir
à Rome Merlin pour que celui-ci rappelle à Arthur son enfance en
Bretagne. Arthur se retourne contre Salustius et dirige la Bretagne sans les
Romains. Enfin notons qu'Arthur avant de partir en Bretagne épouse une
Romaine de haut rang, Aconia, et lui fait la promesse de ne jamais toucher
à Guenièvre qu'il épouse pour raisons diplomatiques,
étant fille de Léodagan, nouveau roi de Carmélide.
20
http://www.union-habitat.org/les-hlm-de-%C3%A0-z/l%E2%80%99histoire-des-hlm/il-%C3%A9tait-une-fois-le-logement-social
21 Goscinny (René), Uderzo (Albert), Les
lauriers de César, pp6-11, Dargaud, 1972
22
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Yanne
23 Goscinny (René), Uderzo (Albert), Les
lauriers de César, pp6-11, Dargaud, 1972
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 21
L'action de Kaamelott se situe à la chute de
l'Empire romain d'Occident. Le roi Arthur a pour mission de
fédérer les peuples bretons afin d'en faire une nation unie et
indivisible. Arthur tient son autorité d'Excalibur, son
épée magique. « Celui qui retira l'épée du
rocher deviendra maitre de tout le royaume de Logres. » Arthur, devenu
roi, fait bâtir la forteresse de Kaamelott24 et cherche des
chevaliers à travers toute le royaume de Logres pour accomplir la
mission que Dieu lui a confiée : conquérir le Saint
Graal25. Une fois les chevaliers trouvés, Arthur fit
construire une table ronde afin qu'ils puissent se réunir autour pour
discuter des affaires du royaume et surtout de la quête du Graal.
Les Livres I, II et III servent surtout
à installer l'ambiance, à nous familiariser avec les lieux et les
personnages récurrents. On y découvre alors la mauvaise foi et la
bêtise de la plupart des protagonistes et un pauvre roi essayant de
diriger le tout, entre une mère castratrice et une femme peu attirante
et guère dégourdie pour espérer l'arrivée d'un
héritier.
Le premier bouleversement apparaît à la fin du
Livre II. Lancelot, alors second du roi supporte de moins en moins la
bêtise et l'incapacité de ses congénères à
avancer dans la quête du Graal et reproche à Arthur sa
clémence, sa bonté, voire son laxisme. Lancelot et Arthur en
viennent alors à se disputer vivement et, après un séjour
forcé de repos pour Lancelot, conviennent « d'un mi-temps »
pour que ce dernier puisse redevenir un chevalier errant et solitaire,
protecteur de la veuve et de l'orphelin.
A partir du Livre III, la narration change
légèrement et les épisodes deviennent moins
indépendants les uns des autres. Cependant, on peut encore les suivre
dans le désordre sans que cela perturbe le plaisir de spectateur.
Le tournant intervient à la fin du Livre III.
Arthur a une liaison avec Mevanwi, la femme de Karadoc. Or il est interdit pour
un chevalier de convoiter la femme d'un autre chevalier ou bien l'un des deux
devra mourir dans un duel.
Lancelot, quant à lui, est amoureux dès le
début de la reine Guenièvre. Le chevalier Bohort, cousin de
Lancelot, porte un message d'amour de Lancelot à Guenièvre et
celle-ci part rejoindre Lancelot dans son « futur camp » lorsqu'elle
apprend la liaison d'Arthur et Mevanwi. Le Livre IV démarre
avec une Bretagne sans reine et Guenièvre chez son amant, ennemi
d'Arthur, habitant dans un camp dans la forêt.
Lorsque Karadoc découvre que sa femme le trompe, Arthur
cherche un subterfuge pour éviter le duel prescrit par la Loi. Il trouve
donc une ancienne loi de Vannes (région d'origine de
24 CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott,
acte 1 : les moeurs et les femmes,
Livre II, 28 septembre 2005, M6 Vidéo
25 Le Graal est le récipient à l'aide
duquel Joseph d'Arimathie aurait recueilli le sang du Christ lors de sa
crucifixion.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 22
Karadoc et Mevanwi) autorisant l'échange
d'épouses. Naïvement, Karadoc accepte d'échanger Mevanwi
avec Guenièvre partie vivre avec Lancelot !
Cette situation déplaît aux dieux qui bannissent
du Ciel la Dame du Lac, protectrice et guide d'Arthur dans la quête du
Graal.Afin d'apaiser la colère des dieux (et peut être aussi de sa
belle-famille, pas franchement ravie de cette échange d'épouse),
Arthur va rechercher Guenièvre chez Lancelot, qu'il piège en lui
donnant un faux rendez-vous. Guenièvre commençait à se
lasser, de la vie en forêt, sans « gens » à son service.
A son retour, Lancelot découvre son camp dévasté et sa
belle envolée. Dès lors, il ne sera plus jamais le même.
L'échange d'épouses est donc annulé et tout semble rentrer
dans l'ordre.
Uther Pendragon est bien le père d'Arthur mais, selon
la légende, la conception d'Arthur n'a rien de naturelle. Uther
Pendragon est amoureux d'Ygerne de Tintagel, femme du Duc de Tintagel et
déjà mère d'Anna. Pour séduire sa belle, Uther va
demander à Merlin, son enchanteur, de lui concocter une potion de
polymorphie. Cette potion permet de prendre l'apparence d'un autre. Merlin fit
cette potion et Uther peut donc se faire passer pour le Duc de Tintagel,
meilleur ami d'Uther, et séduire Ygerne. De cette « union »
nait Arthur, héritier d'Uther Pendragon et du royaume de Bretagne.
Merlin est alors chargé de veiller sur Arthur. Merlin n'est pas non plus
né de façon naturelle. En effet, sa mère est une jeune
vierge pieuse et celle-ci fut visitée, une nuit où sa ferveur
s'était un peu relâchée, par un démon. Sa
mère devint alors une paria dans son village de Galles, mais sa
sincérité pour se repentir lui sauva la vie. Elle fut alors
veillée par les deux femmes jugées les plus pieuses du village
jusqu'à son accouchement. Merlin fut ensuite élevé dans
l'amour de Dieu chrétien ce qui contrebalance avec ses origines
démoniaques. Sur ce point la série est incohérente puisque
Merlin révèle à Lancelot avoir 884 ans. Il serait donc
né avant la naissance de Jésus Christ26.
Cependant le fait que Merlin ait des pouvoirs surnaturels
montre tout le paradoxe de ce personnage mi ange mi démon. Dans le sens
christianisme et paganisme.
Nous retrouvons ce paradoxe dans la série puisque les
chevaliers sont à la quête du Graal, objet chrétien, mais
sur l'ordre des Dieux qui sont la preuve de ce paganisme. Il y eut une longue
période transitoire dans la réalité entre le
polythéisme et le monothéisme chrétien.
Dans Kaamelott, les naissances « surnaturelles
» d'Arthur et Merlin sont quelquefois évoquées notamment
dans « Les défis de Merlin » et « Polymorphie ».
26 Kaamelott, Livre II, épisode 66, Merlin
l'archaïque
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 23
A noter que Perceval a également des origines
étranges. Il a été trouvé nourrisson par ses
parents, adoptifs par le fait, dans un cercle de culture. Ce fait est
évoqué dans l'épisode du Livre VI, «
Lacrimosa ».
La quête du Graal semble être l'axe majeur de la
série mais son évolution nous démontre finalement que
cette quête n'est finalement qu'un prétexte et que la
véritable intrigue principale de Kaamelott concerne Arthur
lui-même. La première partie de la série nous montre un
Arthur roi. La cinquième saison, Arthur renonce à la couronne et
tombe progressivement dans la dépression. Enfin la sixième saison
retrace son ascension politique.
8. La communauté de fans.
C'est un phénomène qui est apparu au
XXème avec l'essor de la société de
consommation et de la culture de masse. Des millions de personnes ont ressenti
le besoin de prolonger l'expérience et de partager leurs impressions sur
leur série, film ou encore artiste favori à travers des fans club
ou actuellement de forum ou des réseaux sociaux sur Internet.
C'est aux Etats Unis que cette pratique est né.
L'arrivée de produits culturels de Science fiction telles que Star
Wars ou encore Star Trek à la télévision et
au cinéma et même auparavant les Comics Books et les
héros Marvel de Stan Lee (Spiderman, X-Men,
Superman, Hulk...) ont largement contribué au
succès des communautés.
Au 21ème siècle nous avons constaté un
enthousiasme inégalé pour les séries
télévisées. Ce sont désormais les séries qui
assurent les meilleures audiences des chaînes de
télévisions, qui sont les plus téléchargés
sur internet, les plus vendus en DVD et sont sont portés sur grand
écran pour les plus populaires d'entre elles. Citons des séries
cultes comme Mission Impossible ayant déjà
été adaptés quatre fois au cinéma, Ma
sorcière bien aimée, Le Saint, Drôles de
dames, Star Trek ou encore Miami Vice. Notons que c'est
J. J. Abrahams créateur de série télévisées
(Lost, Alias, Heroes) qui a réalisé la
dernière version de Star Trek27.
Les séries ont un avantage considérable sur le
cinéma qui est de pouvoir fidéliser le spectateur. Il est en
effet plus aisé de développer la personnalité des
personnages sur 24 épisodes de 50 voire 25 minutes que sur 2h en moyenne
pour un film. Le spectateur a donc tendance à s'attacher aux personnages
ou à les détester mais ne reste pas indifférents. Il faut
donc suivre une série pour savoir ce qu'il va arriver à notre
personnage préféré. La spéculation entre deux
épisodes, généralement une semaine, va alors bon train.
C'est dans ce cadre que la
27
http://www.allocine.fr/personne/filmographie_gen_cpersonne=41000.html
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 24
communauté de fan est la plus intéressante. Le
fan communique son avis et ses envies sur la série et peut ainsi savoir
si ceux-ci sont partagés par les autres membres de la
communauté.
a) Son pouvoir d'influence.
C'est une communauté désormais
extrêmement influente qui a un réel pouvoir sur la vie ou la mort
des séries. Par exemple, la mort d'un personnage peut provoquer un tel
mécontentement dans la communauté que les producteurs peuvent
imposer aux scénaristes de réintégrer le héros dans
la série. L'exemple le plus célèbre est celui de la
série Dallas ou les producteurs ont du faire croire que le
personnage de Bobby Ewing avait rêvé pendant un an alors que ce
dernier était mort au début de la saison. Même si la
réintégration du personnage a été une bonne
nouvelle pour le public celui-ci a tout de même jugé l'astuce
scénaristique ridicule.
Pour l'instant Astier n'a pas eu à utiliser ce genre
de ficelles : le casting de Kaamelott étant toujours le
même (une prouesse pour une série de six saisons) et on ne compte
à ce jour aucun personnage important mort à l'exception de la
saison 6 particulièrement sanglante) ou même disparu. De plus
Alexandre Astier a déjà vivement exprimé son refus de se
laisser influencer, autant par les fans de la série que par le diffuseur
ou les médias, dans l'écriture de Kaamelott. Ainsi
lorsque certains magazine comme le mensuel Tétu, destiné
à un public majoritairement homosexuel, a décrit le personnage de
Bohort comme la figure du gay, Astier a décidé d'écrire un
épisode levant toute ambiguïté dans lequel nous pouvons voir
la femme de Bohort28. Cependant en agissant de la sorte nous pouvons
donc affirmer qu'il s'est laissé influencer par le magazine
Tétu.
b) Hypnoweb.
Hypnoweb est un site internet regroupant les
communautés de fans de dizaines de séries en cours de diffusion
ou non. Parmi celles ci nous retrouvons évidemment Kaamelott,
ainsi que quelques autres séries françaises (Caméra
Café, Off Prime de Simon Astier diffusés sur
M6, Engrenages et Braquo qui sont deux
créations originales de Canal +, Plus belle la vie ou Sous
le soleil qui est une série sentimental ayant connu un grand
succès sur TF1).
Pour appartenir à une ou plusieurs communauté
(généralement les fans d'une série le sont
également de plusieurs) il est conseillé de se créer un
compte pour profiter pleinement de cet espace. Dans la partie consacrée
à Kaamelott, nous avons accès à de très
nombreuses option. Il est ainsi possible de visionner les épisodes, de
lire un résumé bref ou long de et même
28 Kaamelott, Livre III, épisode 55 ,
Au bonheur des dames.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 25
l'intégralité des dialogues de l'épisode.
Il est également possible de débattre de la série (son
avenir, le rôle d'un personnage, la qualité d'un épisode,
l'actualité des comédiens) et de contribuer en proposant son
propre épisode ou ce que l'on appelle un fan art (dessin,
parodie, chansons en lien avec la série).
L'actualité des comédiens est un aspect
très important pour les fans et très avantageux pour les
comédiens. En effet, un fan de Kaamelott a tendance à
suivre les acteurs en dehors de la série puisque le fan a un a
priori favorable sur l'acteur. Pour l'acteur c'est l'assurance d'avoir
d'avoir un public déjà acquis pour ses projets hors Kaamelott. Il
existe de nombreux sites relayant l'actualité de la communauté
Kaamelott (Astier and co, On en a gros.etc).
Les dialogues des épisodes ont été
réalisés et mis en ligne par des fans de Kaamelott. Il
s'agit donc d'une version légèrement différente des
manuscrits édités chez Télémaque. Le mode de saisie
est différent puisqu'il s'agit d'une transcription des épisodes.
Nous constatons alors des différences flagrantes d"un point de vue
stylistique entre le forum et le manuscrit (« n' » sur le forum au
lieu « de ne » dans le manuscrit ou « f'rais » à la
place de « ferais »). Cela a pour conséquence de dynamiser le
texte et de se rapprocher à la sensation vécue en visualisant la
série. On se rapproche d'avantages du style télévisuel.
Alexandre Astier déplore le manque de rigueur des
internautes au cours d'un entretien que nous pouvons lire dans le recueil des
épisodes du Livre I. Il explique que la métrique est très
importante pour lui et pour les comédiens et qu'il ne peut pas
éviter certaines élisions. Par exemple, il écrit «
vous avez pas le temps » pour éviter que le comédien dise
« vous n'avez pas le temps » mais en revanche il écrira «
on n'a pas le temps » et non pas « on a pas le temps ».
L'internaute à tendance à choisir la faciliter et donc la
deuxième solution. AA précise « je pars quand même de
la phrase française clean. Ce qui n'est pas le cas de ceux qui ont
relevé les textes sur Internet »29.
C'est pourquoi après mure réflexion, nous
pouvons lire dans ce mémoire la version extraite du site internet pour
les épisodes diffusés sur celui-ci. Bien évidemment les
quelques fautes ou coquilles rencontrées sur le site sont ici
corrigées et la vérification avec la version papier est
systématique afin d'éviter de grossières erreurs
qu'auraient pu commettre les internautes ayant transcrit le texte.
29 Astier (Alexandre), Kaamelott livre 1, texte
intégral, p16, éd. Télémaque, 2009, Paris
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 26
Kaamelott :
De la Légende
Arthurienne à
Michel Audiard,
une série
construite sur
plusieurs niveaux
d'intertextualité.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 27
La Parodie de Daniel Sangsue30 recense, de
façon chronologique, et critique les différentes
définitions de la parodie et des notions qui en sont proches comme le
pastiche ou le burlesque. Ces différentes approches de la parodie vont
nous permettre de déterminer si Kaamelott en est une, et sinon,
comment peut-on définir cette oeuvre.
La parodie a longtemps été
considéré comme un sous genre, comme une régression ou une
vision péjorative du texte. Il nous a fallu attendre la fin du
XIXème et le début du XXème
siècle avec le Formalisme Russe pour que la parodie soit
considérée comme enrichissante
Tout d'abord parodie est emprunté au grec et
signifie «imitation bouffonne d'un morceau poétique»
(dérivé de «auteur de parodies», de «à
côté de» et de «chant», ou
ode)31
Nous pouvons également évoquer la racine latine
parodia, « para » signifie plusieurs et « oda »
signifie chant. Genette32 y voit le détournement de
rhapsodia, une diction détournée de la rhapsodie. Il
s'agit d'un détournement ou d'un travestissement d'une oeuvre tragique
en une oeuvre comique.
L'objectif de ce travail sur la parodie n'étant pas la
parodie en soi mais de définir Kaamelott et observer s'il s'agit d'une
parodie de la LA et d'analyser les différences intertextualités
que nous rencontrons à travers notre sujet d'analyse.
1. Les origines
Le premier à en parler est le philosophe Grec Aristote
dans son ouvrage La Poétique3. Il ne la
définit pas clairement et donc ne la considère pas comme un genre
à part entière, ses travaux sur ce thème restant
incomplets. Nous pouvons résumer qu'il aborde la parodie comme une
anti-Iliade, texte d'Homère datant de l'antiquité et
retraçant l'épopée de la dernière année de
la guerre de Troie. Les personnages bas deviennent alors les héros d'une
épopée.
Au XVIIIème siècle encore la parodie
n'est toujours pas reconnue à sa juste valeur mais comme un « trope
». Dans le traité des tropes (1730), le grammairien Du
Marais parle de « figure de sens adapté, consistant à
rapporter des paroles connues en leur donnant un sens différent de celui
qu'elles avaient originellement »33.
30 Sangsue (Daniel), la parodie, coll.
Contours Littéraires, Hachette, 1994
31.
http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/tlfiv5/advanced.exe?8;s=1871725245;Définition
du Trésor de Langue Française.
32 Genette (Gérard), palimpseste, Seuil,
1982
http://www.universalis.fr/encyclopedie/gerard-genette/
33 Sangsue (Daniel), la parodie, coll. Contours
Littéraires, p17, Hachette, 1994
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 28
L'Abbé Sallier, dans son Discours sur l'origine et
sur le caractère de la Parodie, affirme que cette dernière
doit avoir pour visée l'utile et l'agréable, de même que
tous les autres genres de poétique. On peut la regarder comme « une
fiction ingénieuse, sous le voile de laquelle on propose quelques
vérités. »34
Au XIXème siècle les choses vont
évoluer considérablement. Certains comme le philosophe Charles
Nodier dans Questions de littérature légales, ou encore
Joseph Marie Quérard dans Les Supercheries littéraires
dévoilées n'en parlent même pas, d'autres comme
Etienne Gabriel Peignot dans Amusement philologique reprennent
d'anciennes théories définissant toujours la parodie comme «
une petite poétique curieuse et amusante »35.
Progressivement au cours de ce siècle cette notion
prend de l'ampleur. Elle est confondue avec d'autres termes comme la
caricature, notamment dans L'histoire de la caricature antique de
Jules Champfleury (1865) ou par André Gill qui intitule son journal
satirique La Parodie, ce qui va fortement populariser ce terme. La
Monarchie de Juillet et le Second Empire sont des périodes propices
à la presse humoristique.
A la fin de ce siècle et avec le déclin du
romantisme36, la littérature réfléchit sur
elle-même et sur des notions comme la réécriture (des
auteurs et non des oeuvres comme il était monnaie courante avant
l'apparition de la notion de droit d'auteur qui apparait au
XIIème siècle en Angleterre). Proust débutera
par des pastiches, le poète Stéphane Mallarmé imitera
Baudelaire et le second degré s'installe dans le paysage
littéraire, comme une nécessité. Léon Bloy
écrira même en 1886 dans Le désespéré
que «l'invention n'est plus possible »37, ou encore
Guy de Maupassant dans Pierre et Jean « que reste-t-il à
faire qui n'ait été fait, que reste-t-il à dire qui n'ait
été dit? »38.
Octave Delepierre dans l'ouvrage « Essai sur la parodie
» apporte de nouveaux éléments notamment dans la distinction
entre parodie et burlesque. Selon lui le burlesque serait la déformation
d'un sujet existant en changeant par exemple de registre de langue. La parodie
est l'imitation d'un genre mais à partir d'un sujet nouveau. Elle serait
donc la dégradation
34 Ibid, p19
35 Ibid, p21
36 Selon le Trésor de la Langue
Française il s'agit d'un mouvement intellectuel, littéraire,
artistique qui visait à renouveler les formes de pensée et
d'expression en rejetant les règles classiques et le rationalisme, en
prônant la nature, le culte du moi, la sensibilité, l'imagination,
le rêve, la mélancolie, la spiritualité, en
réhabilitant le goût contemporain, la couleur locale, la
vérité historique. Romantisme, prédominance de la
passion sur la forme et de l'inspiration sur la règle (FLAUB.,
Corresp., 1871, p. 230). Le romantisme (...), en exaltant le
sentiment, l'imagination et l'intuition, allait provoquer un remaniement
profond de la pensée occidentale (Hist. sc., 1957, p.
1565).
37 Op cit., p22
38 Ibid., p23
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 29
d'une oeuvre plus ancienne sous une forme différente,
une vieille littérature qui ne respecte pas ses anciennes oeuvres.
Un autre point important dans les observations de Delpierre
concerne la réception. Toujours selon lui la réception est
différente selon le contexte historique. Par exemple, un texte du Moyen
Âge n'a pas le même poids, lu plusieurs siècles plus tard et
peut perdre de sa force satirique. Par sa dimension critique, il y a
désormais une dimension sociale et politique qui est en partie reconnue
à la parodie.
2. Le formalisme russe.
L'évolution majeure de la reconnaissance du genre
parodique est le fruit du travail des formalistes russes et plus
particulièrement celui de Mikhaïl Bakhtine. Mais revenons tout de
même sur les théories développées par d'autres
chercheurs russes avant lui.
Les théoriciens russes ont, dans un premier temps,
cherché à démontrer la littéralité des
objets littéraires ou plus simplement à définir ce qui
différencie la langue poétique de la langue quotidienne. Ensuite,
ils se sont attachés aux relations entre la nouvelle oeuvre (la parodie)
et son modèle (l'original). Pour Iouri Tynianov la parodie est un
procédé de destruction de l'ancienne oeuvre, dans le sens
où elle la dépasse et l'enrichit39. Il cite
Dostoïevski qui reprenait des procédés stylistiques de
Gogol, et parlant de stylisation plutôt que d'imitation. Mais pour qu'il
y ait parodie, il faut un décalage, un effet de discordance. Il parle de
« mécanisation » du procédé créé
par l'insertion de procédés tels que la contrepèterie, le
calembour, le détournement de vers célèbre, etc.
Tomachevski va plus loin en parlant de règle canonique lié aux
époques et que la parodie fait voler en éclat.
Le principe fondamental pour Bakhtine est que tout oeuvre ne
se conçoit qu'en rapport avec d'autres énoncés, ce qui est
le principe du dialogisme. Dans chaque discours nous comptons deux sujets,
l'homme qui parle et son groupe social et d'autre part « un
déjà dit ». Il affirme également que le dialogisme
est plus prédominant dans la prose que dans la poésie. Le roman a
tendance à être polyphonique bien que certains le soit plus que
d'autres. Il oppose notamment Dostoievski qu'il considère comme
l'inventeur du roman polyphonique à Tolstoi qui est davantage
monologique40.
En ce qui concerne la parodie, il montrera l'importance du
langage en citant des auteurs anglais ou allemands (Charles Dickens pour ne
citer que le plus connu), et soulignant l'emploi de toutes les couches du
langage littéraires parlé et écrit de leur temps et en
forçant le trait.
39 Ibid., p32
40 Problème de la poétique de
Dostoievski, M. Bakhtine, 1963
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 30
Il évoque également l'hybridation des langages
ou le mélange de deux langages sociaux dans le même
énoncé.
En ce sens, Kaamelott rentre parfaitement dans cette
définition de la parodie. Le Roi Arthur, mais pas seulement lui, passe
très souvent d'un langage protocolaire ou bien technique à un
langage plus familier et même, mais cela nous le verrons plus tard d'un
langage supposé médiéval à un langage plus
moderne.
Nous pouvons donc constater toute la complexité
à définir la parodie étant donné le
caractère polyphonique donné à ce terme. Nous pouvons tout
de même retenir la pratique d'imitation ou de transformation d'un texte,
un langage ou un thème. C'est également destiné à
un usage plus polémique pour dénoncer à travers
le langage social.
Il est encore plus difficile de différencier parodie de
pastiche mais ce n'est pas l'essentiel dans la démarche entreprise par
Bakhtine. Il accorde une plus grande importance à l'aspect
idéologique du genre. La parodie existe depuis l'antiquité, elle
est le pendant nécessaire, voire indispensable de toute oeuvre dite
sérieuse. Mais la parodie par le biais du rire, de la moquerie, de la
légèreté s'inscrit davantage dans la réalité
que les formes canoniques telles que l'épopée. C'est une lutte
contre les stéréotypes et la déformation angélique
de la réalité. Elle implique également une distanciation
de l'auteur créant alors une « conscience parodique ».
Pour résumer l'apport de Bakhtine nous pouvons
souligner qu'il considère la parodie non pas comme une simple technique
de renouvellement ou un moteur de l'évolution littéraire mais
qu'elle engageait également des postures sociales, culturelles ou encore
politiques.
3. La transtextualité de Genette.
Nous finirons par les théories de Gérard
Genette. Genette est le père de la transtextualité41
qu'il définit comme « tout ce qui met un texte en relation,
manifeste ou secrète avec d'autres textes ».
Selon Genette, et c'est une théorie que nous
appliquerons, tout texte est en relation avec des textes antérieurs. Il
distingue deux processus, la transformation et l'imitation. C'est aussi la
distinction que l'on peut faire de pastiche et parodie. Le premier imite un
style (écrire à la manière de) alors que le second s'en
prend à un texte. Il parle alors d'imitation caricaturale ou
pastiche satirique.
Dans notre cas, Kaamelott relève à la
fois de la parodie (appropriation des textes de la légende Arthurienne
sur le fond) mais également du pastiche (langage d'Audiard, que l'on
pourrait lui même qualifier à certains égards de
rabelaisien (un style gai, licencieux, grivois, parfois
41 Palimpseste, Seuil 1982
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 31
grossier et cynique), pour certains personnages comme Arthur
ou encore Léodagan et registre médiéval plus proche de la
représentation des écrit traditionnels relatant la légende
pour Lancelot ou encore Gauvain.
Pour Genette la parodie se réduit à « la
transformation textuelle à fonction ludique ».
Toutes ces définitions de la parodie allant d'Aristote
à Genette ne sont que des repères, certes indispensables, pour
entrer dans notre travail et mieux définir l'esprit Kaamelott
mais il s'agit de théories s'appliquant à des textes. Or
ici, comme nous avons pu le voir dans les parties précédentes,
nous sommes en présence d'un objet télévisuel. Bien que le
corpus soit un manuscrit des épisodes ou la transcription des
épisodes par des internautes c'est avant tout une série
télévisée qui a été retranscrite à
l'écrit dans un but pédagogique42 ou plus simplement
un produit dérivé ou objet de collection afin de satisfaire les
fans de la série toujours désireux d'en connaître davantage
sur leur série favorite.
Kaamelott est donc à la fois une parodie de la
légende arthurienne en en reprenant les bases narratives qu'ils
s'agissent de la quête du Graal par les chevaliers de la table ronde ou
les intrigues sentimentales comme la romance de Guenièvre et Lancelot.
Nous pouvons également parler des lieux, des protagonistes ou de
péripéties diverses que l'on retrouve dans le roman arthurien.
D'après la définition de Delpierre, Kaamelott est une
oeuvre burlesque détournant la légende Arthurienne mais ne peut
pas être considéré comme une parodie puisque la base est la
même.
Certaines oeuvres ne gardent que la base narrative et
transposent le récit dans un autre cadre historique. Prenons l'exemple
de Songes d'une nuit d'été du dramaturge anglais William
Shakespeare43 ».Cette pièce écrite entre 1594 et
1595 fut transposée en 2011 par Nicolas Briançon dans les
années 19708.
4.Le pastiche
Nous l'avons vu c'est également un pastiche par la
multiplicité de ses langages. Arthur est obligé d'adapter le sien
selon ses interlocuteurs. L'épisode Ambidextrie44 est un
très bon exemple. Il peut employer un langage très technique en
tant que chef de guerre avec Lancelot , son second.
42 l est précisé sur la quatrième
de couverture du manuscrit que c'est un outil idéal pour les
professionnels du spectacle et de l'éducation.
43
http://www.lexpress.fr/culture/scene/shakespeare-c-est-bon-pour-le-moral_1035325.html
44 59Kaamelott Livre I, épisode 35,
Ambidextrie
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 32
Arthur - Donc on reprend: Calogrenant est
posté depuis hier au
nord-ouest de la zone d'attaque.
Lancelot - Et Léodagan, sud-sud-est, un
peu plus en retrait avec
les cavaliers.
Cependant tous ses hommes n'ont pas ce niveau de
compréhension de la tactique militaire.
Perceval - J'aime pas bien ces histoires de
sud-est, de nord ouest et tous ces machins.
L'épisode est intitulé Ambidextrie. Ambidextre
signifie pouvoir se servir aussi bien de sa main droite que de sa main gauche,
notamment pour l'écriture. Ici Perceval ne sait pas faire la
différence la différence entre ces deux notions. Mais le dialogue
suivant nous permet de mieux comprendre ce choix de titre :
Perceval : D'accord ! Allez c'est bon (tire son
épée) j'les attends les
envahisseurs ! Ils vont s'prendre mon épée dans les
côtelettes ça va
les calmer pour un moment ! Ah j'ai hâte d'y être !
Ils vont s'frotter
à la fausse-patte du Pays d'Galles !
Lancelot : Les fausses-pattes c'est des
gauchers.
Perceval : Bah oui !
Arthur : Vous êtes pas gaucher vous.
Perceval : Ben si !
Lancelot : Vous dégainez d'la main
droite.
La confusion entre la droite et la gauche est ainsi
accentué. Perceval n'et pas un valeureux combattant. Nous pouvons le
vérifier dans de nombreux épisodes dont celui-ci qu'il n'est pas
un expert militaire et que cet univers le dépasse.
Lancelot : Le Seigneur Calogrenant est parti
il y a deux jours pour placer son armée en amon de la rivière.
Perceval : Ah, c'est pour ça qu'il est
plus là.
Lancelot : Bah oui, on l'a envoyé se
positionner en avance...
Perceval : Ah bon, moi j'croyais qu'il
était rentré chez lui alors j'me disais "il s'fait pas chier
quand même" !
Nous pouvons tout de même reconnaitre à Perceval
sa volonté de bien faire et de progresser. Il manifeste son enthousiasme
à pourfendre l'ennemi une fois qu'Arthur et Lancelot ont fini de lui
expliquer la marche à suivre. Pour cela ils abandonnent les
repères spatiaux, étrangers à
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 33
Perceval, et s'expriment par le biais d'élément
naturel que devra rencontrer Perceval sur son chemin (arbre, rocher,
rivières).
Ce lien à la nature est assez révélateur
de la personnalité de Perceval. Enfant naïf et
protégé par sa mère, dans la série par « sa
mamie », Perceval est un homme crédule mais d'une grande
bonté et d'une fidélité à toute épreuve.
Arthur est également un homme de son époque,
c'est à dire rustre et s'emporte facilement ce qui l'incite à
employer également un registre plus familier.
Arthur - (s'adressant à
Perceval) Mais vous êtes complètement con !
Ce langage est d'ailleurs partagé par la
majorité des protagonistes de la série. Ce registre familier ou
argotique, emprunté à Audiard, est une des clefs du succès
de la série.
D'autres personnages tels que Léodagan ne changent pas
de registre (pour ce cas il s'agit du familier). Citons également Yvain
qui s'exprime davantage comme un adolescent du XXIème siècle
qu'à la manière d'un chevalier du VIème ou du
XIIème siècle.
Yvain - (refusant d'aller au combat) Je
m'en fous, j'irai pas !
Et voici la réaction face aux menaces de son père
:
Yvain - (levant les yeux au ciel) Super
! Bonjour la pédagogie !
Nous reverrons plus en détail les particularités
d'Yvain dans la troisième partie.
Enfin, il est important de préciser que Kaamelott
réfléchit sur de nombreuses questions en lien avec le monde
des arts en général et de la littérature en particulier.
Ainsi plusieurs épisodes s'intitulent La poétique et
font clairement référence à Aristote45.
Nous pouvons voir Arthur enseigné à Perceval
l'art de raconter aux autres chevaliers de la Table Ronde des récits de
ses aventures épiques. Il cite alors Aristote et à son grand
étonnement Perceval précise que c'est « lui qui a
écrit La poétique. » Précisons que Perceval
ne sait pas lire. Il lui explique alors, qu'un tout est constitué d'un
début, un milieu et une fin.
45 Kaamelott, Livre III, épisode 27 et
28, La poétique
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 34
Arthur insiste sur la nécessité de susciter
l'intérêt du lecteur en allant à l'essentiel afin de ne pas
perdre le lecteur et qu'il faut parfois embellir la réalité.
Arthur fait remarquer à Perceval que tout le monde emploie cette
technique, même Lancelot et que c'est pour cette raison que ses
récits ont l'air vrai. En alternance ; nous voyons donc dans
l'épisode Perceval relater ses prétendues aventures aux autres
chevaliers et nous comprenons.
Dans un second épisode utilisant la même
mécanique, Arthur explique à Perceval ce qu'est un
élément déclencheur dans un récit. Les chevaliers
de la table ronde ont conscience, ou au moins quelques uns de leur importance
dans l'Histoire et de la portée de leurs récits. C'est pourquoi
il est primordial de soigner l'image de la légende. Par exemple Arthur
proteste contre Merlin qui surnomme le Roy « le sanglier de Cornouailles
». En représailles Arthur demandera au père Blaise, son
copiste d'appeler l'enchanteur Coco l'asticot dans l'un des
récits46.
De même nous pouvons voir Arthur enseigner l'art de la
poésie à Guenièvre et la notion de licence
poétique47
Guenièvre : Mais je vous en prie,
éclairez-moi de vos lumières, puisque vous êtes
soudainement devenu un expert en beau langage...
Arthur : Pas besoin de devenir un expert,
s'il vous plaît ! « Le vent, pareil à l'enfance, se joue de
l'arbre moqueur... » ?
Guenièvre : Oui, et ben ?
Arthur : Eh ben c'est nul. Nul, nul, nul,
zéro. « L'arbre moqueur », déjà ; ils peuvent
pas s'empêcher de foutre des épithètes à tout ce qui
bouge, ces poètes, même à ce qui bouge pas ! « La
fleur goguenarde », « L'abeille malicieuse », « Le roseau
pliable », « L'ourson rabat-joie ». Et même, des fois, ils
le mettent avant le mot, comme ça, ça fait genre : « Le gai
souriceau », « Le prompt madrigal », « La frisottée
moustache ». (Il lève les yeux au ciel.)
46 Kaamelott, Livre III, épisode 8,
Le sanglier de Cornouailles
47 Kaamelott, Livre II, épisode 19,
Le poème
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 35
Cette réflexion sur les arts et en particulier sur la
langue et le langage est un nouvel indice de l'originalité de ce
programme et un ingrédient essentiels pour la particularité de
son humour.
Astier est, finalement, très fidèle à la
légende et certaines intrigues qui paraissent anodines ne le sont pas.
Par exemple, dans l'épisode Le Chevalier mystère,
Perceval éprouve des difficultés à retenir son patronyme
et accomplit une quête sous le nom de Provençal le Gaulois. le
seigneur Perceval dans le roman inachevé Perceval ou le conte du
Graal de Chrétien de Troyes écrit en 1181 ne connait pas son
identité. Sa mère l'ayant toujours appelé mon enfant ou
par des surnoms propre à une mère pour son fils. Son
identité lui viendra miraculeusement en se présentant devant
Arthur.
Il est important de rappeler que l'action de Kaamelott
se situe à la chute de l'Empire Romain. Le roi Arthur a pour
mission de fédérer les peuples bretons afin d'en faire une nation
unie et indivisible. Arthur tient son autorité d'Excalibur, son
épée magique. Celui qui retira l'épée du rocher
deviendra maître de tout le royaume de Logres. Arthur, devenu roi, fait
bâtir la forteresse de Kaamelott48 et cherche des
chevaliers à travers toute le royaume de Logres pour accomplir la
mission que les Dieux lui ont confiée. C'est une incohérence de
la série puisqu'il devrait s'agir du Dieu unique de la
chrétienneté. : conquérir le Saint Graal49. Une
fois les chevaliers trouvés, Arthur fit construire une table ronde
autour de laquelle ils pourront se réunir pour traiter des affaires du
royaume et surtout de la quête du Graal.
Par la suite la chronologie devient plus confuse et nous fait
voyager à travers plusieurs siècles. Si la première partie
de Kaamelott (bien que ce ne soit pas systématique) semble se
dérouler autour du Vème siècle, les Romains
quittent la Bretagne en 410 dans une Bretagne encore en proie aux invasions
barbares et à la chrétienneté, Nous pouvons
également percevoir de nombreux indices sur l'incohérence
historique du récit. Ainsi Arthur et les siens sont au fait de culture
qui leur sont logiquement pratiquement inconnu. Nous pouvons notamment voir
Arthur réciter un poème chinois50. Ou encore jouer
d'un instrument oriental51. Nous suivons alors Arthur dans un moyen
Âge féodal radicalement différent du moyen Âge plus
« primitif » par bien des aspects (politique, religieux, culturelle ;
etc.).
Astier ne prétend pas respecter à la
règle une chronologie historique, ce n'est pas un travail d'historien
mais se servir de manière optimale de la Légende Arthurienne.
N'oublions pas que
48 Chabbert, (Christophe), Aux sources de Kaamelott, acte 1 :
les moeurs et les femmes,
Livre II, 28 septembre 2005, M6 Vidéo
49 Le Graal est le récipient à l'aide
duquel Joseph d'Arimathie aurait recueilli le sang du Christ lors de sa
crucifixion.
50 Kaamelott, Livre II, épisode 19, Le
poème 51Kaamelott, Livre 1, épisode 39, Le Oud
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 36
celle-ci n'est pas cloisonnée dans une période
bien précise mais a considérablement évolué au
cours des siècles. Ainsi les intrigues sentimentales (amours courtois
entre Guenièvre et Lancelot par exemple) prennent toute leur importance
dans les récits du XIIème siècle et plus
spécifiquement sous la plume de Chrétien de Troyes.
L'originalité de Kaamelott réside
également dans le choix de son sujet. C'est-à-dire la
légende Arthurienne, vieille de plus de 1500 an, connu de tous mais de
manière imprécise. La difficulté dans le traitement de ce
sujet est de choisir quelles partie de la légende l'auteur veut
exploiter. AA a choisi de ne pas respecter à la lettre telle ou telle
version mais de proposer la sienne.
Les premiers écrits datent du Moyen Âge (autour
de l'an mille) par Geoffroy de Monmouth52 Cependant, dans la
tradition orale et dans plusieurs poèmes d'anonymes, il est
déjà question des aventures de ce roi légendaire,
défendeur de la Bretagne face aux invasions des Saxons autour du VIe
siècle.
Après Geoffroy de Monmouth, il sera écrit
d'innombrables versions, toutes très différentes. Nous
retiendrons principalement les écrits de Chrétien de Troyes qui
mettront en avant le concept de l'amour courtois, ou fin'amor, et s'attachera
beaucoup au personnage de Lancelot, à la quête du Saint Graal et
relatera les amours de Guenièvre et Lancelot.
Comme nous venons de le voir dans ce chapitre, Kaamelott
n'est pas un pastiche ou une parodie de la LA mais une nouvelle version
reprenant les mêmes éléments (intrigues, lieux,
personnages) il s'agit d'hypertextualité que Genette définit
comme « toute relation unissant un texte B (hypertexte) à un texte
antérieur A (hypotexte) sur lequel il se greffe d'une manière qui
n'est pas celle du commentaire. » L'hypertexte est un texte
dérivé d'un autre texte préexistant au terme d'une
opération de transformation.
Il existe donc quelques points communs à toutes les
versions. Les personnages d'abord. On retrouve Arthur, sa femme
Guenièvre, Merlin, Lancelot du Lac le chevalier errant ou encore
Perceval le Gallois. Pour ce qui est des autres personnages, on trouve de
nombreuses divergences, qu'il s'agisse des prénoms, de la fonction ou de
l'importance dans les récits.
Il en va de même pour les objets. Tous les récits
s'accordent sur Excalibur, l'épée des rois, qu'Arthur a
retirée du rocher. Le caractère surnaturel d'Arthur et de Merlin
fait aussi partie des bases de la légende.
En revanche, la Table Ronde ne fait pas consensus. Parfois
elle est un objet très concret comme dans la série et a une
importance politique et symbolique (ronde pour que tout le monde soit
égal autour de cette table). Dans certains récits, elle ne serait
qu'une désignation
52 NABOUR, Eric, Kaamelott, Tome 1 : Au coeur du Moyen
Âge, Perrin, 2007
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 37
d'une confrérie et il existerait la table
carrée, la table ovale, etc. Dans la version d'un anonyme de la fin du
Moyen Âge, il y aurait plus de 1600 chevaliers à la Table Ronde,
ce qui nous permettrait de douter de son existence physique.
Astier s'inspire fort logiquement de la LA pour créer
des épisodes. Certains peuvent paraitre totalement absurdes et sans
rapport direct avec la légende tels que les épisodes Unagi
dans lesquelles nous pouvons assister aux entrainements de Perceval et
Karadoc à de nouvelles techniques de combats de leurs
inventions53. L'unagi est une anguille d'eau douce, on peut donc
rapprocher cet animal aux techniques d'esquives en se basant sur l'expression
« se faufiler comme une anguille » D'autres, notamment ceux
évoquant la romance de Lancelot et Guenièvre, sont directement
inspiré de la légende et plus particulièrement des romans
de Chrétien de Troyes. Mais il existe également de nombreuses
intrigues dont l'inspiration parait moins évidente pour les
néophytes. Ainsi l'épisode En forme de
Graal54 traite de la forme du graal. Nous assistons à
une réunion de la table ronde et plusieurs versions s'affrontent. Pour
certains il s'agit d'un vase ou d'une coupe, Bohort dit « un
récipient », Perceval évoque une pierre incandescente. A la
fin de l'épisode Perceval et Karadoc poursuivent le débat :
Karadoc : Franchement, vous êtes Joseph
d'Arimathie. Vous vous pointez devant Jésus qui pisse le sang. Dans quoi
vous le récupérez le sang ?
Perceval : Dans un bocal à anchois.
Déjà pour la contenance, j'peux pomper un demi-gallon de sang,
j'suis tranquille. Et surtout qu'après j'peux refermer le bocal, j'en
fous pas de partout dans mon sac. Si Joseph d'Arimathie a pas été
trop con, vous pouvez être sur que le Graal, c'est un bocal à
Anchois.
Intéressons nous à ce bocal à anchois.
Aux premiers abords il nous apparait simplement un gag de AA pour
démontrer à la fois la naïveté et le sens pratique du
Seigneur Perceval. Mais en effectuant quelques recherches sur l'origine du
terme graal, nous apprenons qu'il s'agit du mot désignant au Moyen
âge un plat à poisson.55 Or dans le roman de
Chrétien de Troyes Le Conte du Graal, Perceval trouve dans le
château du Roi Pêcheur « un graal merveilleux et une lance qui
saigne. Nous ne retrouvons nulle trace dans Kaamelott d'une lance qui saigne
53 Kaamelott, Livre 1, épisode 93,
Unagi, Livre 2, épisode 57, Unagi II, Livre 3,
épisode 16, Unagi III, Livre 4, épisode 51, Unagi
IV.
54 Kaamelott, Livre 1, épisode 18,
En forme de Graal
55Christine Ferlampin Acher, Denis Hüe, Mythe
et réalités, Histoire du Roi Arthur, Edition Ouest France
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 38
mais le graal est omniprésent. Dans la série le
graal est le récipient ayant servi à recueillir le sang du
Christ. Cette vision religieuse du graal n'est pas présente dans
l'oeuvre de Chrétien de Troyes. Ce sont les continuateurs de son oeuvre
qui donneront une fonction mystique à cet objet .Christian Ferlampin
Acher et Denis Hüe écrivent dans Mythes et
réalités, Histoire du Roi Arthur qu' il « revient
à Messinier en quelques 11 000 vers, de mener à sa fin la
quête du Graal, christianisant fortement le vaissel,
présenté désormais comme une relique de la passion du
Christ ».
Il parait donc évident à la lumière de
tous ses éléments que l'emploi du bocal à anchois n'est
pas anodin et qu'AA faisait directement référence au plat
à poisson du Moyen âge. Le champ sémantique autour du graal
comprend le bocal à anchois, le Roi pêcheur, unagi ou anguille.
La LA est une source d'inspiration considérable dans
des oeuvres modernes tel que la saga Star Wars de Georges Lucas ,
Stargate de Roland Emereich ou bien encore Le seigneur des Anneaux
de J.R Tolkien pour ne citer que les plus
célèbres56.
Ce qui différencie Kaamelott des versions
antérieures de la Légende, c'est la vision et la gestion de
l'échec, l'incapacité face à la mission confié par
les dieux à Arthur et le doute permanent qui finit par détruire
l'ensemble. La désacralisation de la légende Arthurienne.
Là où toutes les versions de la légende (excepté
Sacré Graal des Monty Pythons qui est dans le registre de la
parodie pure et dure) s'évertuent à montrer les qualités
et les valeurs des protagonistes. La magie représente un quart des
épisodes et est omniprésente dans Kaamelott et la
Légende Arthurienne. Il semble logique que des héros
dépassé par la réalité le soient également
par les phénomènes surnaturels.
La légende Arthurienne est constitué d'un
ensemble de texte écrit par des auteurs tels que Geoffroy de Monmouth ou
encore Chrétien de Troyes mais également d'auteurs anonymes tout
au long du moyen âge principalement. Cependant certains écrivains,
Philippe Sollers par exemple, continuent d'être inspirés par ce
sujet inépuisable.
A noter l'ambiguïté entre la croyance dans le Dieu
unique imposé par la récente chrétienté du Royaume
et malgré tout la présence des Dieux celtes qui guident Arthur
par l'intermédiaire de la Dame du lac.
AA a une particularité dans sa manière de
travailler qui est très intéressante. Il pense a un acteur puis
écrit en fonction de ce dernier, alors que la plupart des auteurs
pensent d'abord à
56
http://www.lequotidienducinema.com/index.php?option=com_content&task=view&id=327&Itemi
d=109
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 39
un rôle et l'attribue ensuite à un
comédien dont le profil correspond. Par exemple AA a envie de travailler
avec un acteur qu'il admire, François Rollin pour ne citer que lui. Et
ensuite, une fois que l'acteur accepte de travailler avec lui, il écrit
un rôle adapté à ce dernier. Rollin est
célèbre pour son personnage du Professeur Rollin qui est
très cultivé et aime étaler sa culture aux yeux de tous.
Le Professeur Rollin est réputé pour avoir « toujours
quelque chose à dire » quelque soit le sujet. AA écrit alors
un roi Loth finissant toutes ses phrases par une citation latine, rabaissant
constamment ses collaborateurs et ayant toujours le dernier mot. D'autres
auteurs écrivent d'abord leur personnage avec ses particularités
et réfléchissent ensuite à qui pourrait bien
l'incarner.
AA choisit donc des acteurs avec qui il souhaite travailler et
,selon leur jeu, leur parcours, il compose un personnage « sur-mesure
». L'intérêt de cette méthode est de pouvoir jouer
avec la transtextualité. En effet, AA peut faire référence
à travers un personnage à un autre texte Voici quelques exemples
qui vont nous permettre de démontrer cette particularité et son
efficacité comique, principalement tirés des épisodes
La Table de Breccan et Le Maitre d'armes.
La Table de Breccan est le seul épisode de
Kaamelott avec Yvan le Bolloch. Cet acteur a acquis une grande
notoriété en incarnant Jean Claude Convenant dans la série
télévisée humoristique Caméra Café
sur M6.
Astier a décidé (ou a été
contraint) pour les débuts de Kaamelott d'adresser un clin
d'oeil à Caméra Café.
Dans CC Yvan Le Bolloch incarne donc Jean Claude Convenant,
surnommé JC, représentant de commerce (VRP) pour une entreprise
qui fabrique des appareils de Fitness. Jean Claude est un très bon
vendeur mais il est aussi dragueur, bien que marié et père de
trois enfants, alcoolique et particulièrement inculte.
Le personnage de Breccan, artisan ayant fabriqué la
table ronde, dans Kaamelott à de nombreux points communs avec
le personnage de JC. Les deux ont une profession commerciale et savent parler
de leur produit. Breccan nous démontre ici tout son talent de camelot
:
Attendez, le cuir, ça restera toujours le cuir !
D'autant que je vous ai pas mis de la vache moisie ! Là, c'est de la
tannerie de luxe assemblée au crochet de six... Attendez, il y a du
boulot derrière, là.
On voit dans cet extrait la verve habituelle de Jean Claude
Convenant. Il semble vraiment s'y connaitre en expliquant la fabrication de sa
table avec de nombreux détails techniques (notamment le crochet de six
et la vache moisie, gage de bonne qualité).
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 40
Yvan Le Bolloch est l'auteur de Caméra Café
avec Bruno Solo qui incarne Hervé Dumont. Or, comme AA, Le Bolloch
et Solo sont de fins connaisseurs de Michel Audiard. Ses dialogues regorgent de
métaphores, d'argot et sont marqués par un rythme rapide. Nous
retrouvons un lexique propre aux truands, aux classes populaires et certaines
professions.
Ici, le procédé est le même. Le rythme est
soutenu, très accentué et le lexique ne parle qu'à un
artisan spécialiste en tannerie. « Assemblé au crochet de 6
», ici, le personnage utilise le jargon propre à sa profession,
jargon dont il est le seul à détenir la clé dans cette
scène, ce qui lui confère l'autorité sur les autres
En employant des termes techniques, il s'impose et veut faire
reconnaitre son savoir-faire, il démontre son autorité dans son
domaine.
Cet extrait des tontons flingueurs, dialogué
par Audiard, l'illustre parfaitement.
Raoul Volfoni :Mais moi les dingues, j'les
soigne, j'm'en vais lui faire une ordonnance, et une sévère,
j'vais lui montrer qui c'est Raoul. Aux quatre coins d'Paris qu'on va
l'retrouver, éparpillé par petits bouts façon puzzle...
Moi quand on m'en fait trop j'correctionne plus, j'dynamite... j'disperse... et
j'ventile...
B.BLIER, Les tontons flingueurs
Ici, nous comprenons que le locuteur veut tuer quelqu'un et
qu'il s'y connait en assassinat. A l'image nous le voyons préparer une
bombe mais ses paroles nous suffisent pour comprendre ce qu'il fait. Il emploie
ici des expressions populaires « je vais lui montrer qui c'est Raoul
» et de nombreuses métaphores « on va l'retrouver,
éparpillé par petits bouts façon puzzle. »
Dans l'épisode « La tête est les jambes
» de Caméra Café Hervé à parié
avec sa fiancée sur JC pour battre leur collègue Nancy, à
une épreuve de triathlon, alors que sa fiancée à
parié sur Nancy. Le perdant doit venir en short au bureau. Hervé
dit à JC :
Hervé Dumont : Dis donc Jean Claude,
c'est pas que j'sois complexé par mes mollets mais j'ai une image ici
alors pas de galanterie hein. La Nancy tu l'écrabouilles, tu la
pulvérises, tu la disperses.
B.SOLO, Caméra café
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 41
On retrouve la même idée que chez Audiard pour
éliminer l'adversaire. « Disperser » figure même dans
les deux répliques.
L'emploi de la métaphore est fréquent dans les
trois oeuvres que sont Caméra Café, Kaamelott, et les
dialogues d'Audiard.
Marina Yaguello dans l'ouvrage Alice au pays du langage
parle de « substitution dans l'axe vertical d'un terme figuré
à un terme propre ». 57« Disperser » ici
signifie la battre à la course. Chez Audiard c'est aussi une
métaphore, mais l'emploi d'une bombe donnerait un résultat plus
proche de la dispersion qu'une simple victoire sportive. Dans Caméra
Café c'est un hommage à Audiard, le terme « disperser
» étant peu approprié à la situation.
Parlant du fait que le cuir de la table tache Breccan dit !
« Par contre, il faut essayer de pas trop manger comme des porcs
». Les porcs mangent salement, les chevaliers doivent éviter
d'en faire autant pour ne pas abimer la table.
Toujours selon Yaguello, « la métaphore est un
défi à la redondance, comme l'est toujours le langage
poétique. La valeur expressive en est donc plus forte »
Caméra Café se situant au XXIème
siècle, les auteurs peuvent se permettre de citer ouvertement un auteur
passé. Dans Kaamelott l'exercice serait plus périlleux
étant donné que l'intrigue se situe plusieurs siècles
avant la naissance de Michel Audiard !
Michel. Riffaterre définit l'intertextualité
comme « la perception, par le lecteur, de rapports entre une oeuvre et
d'autres qui l'ont précédée ou suivie »
La frontière est mince entre la citation, clairement
identifiée, le plagiat ou l'on cite quasiment mot pour mot mais sans
laisser d'indice, de trace du texte cité et enfin l'allusion, ce qui est
ici le cas.
Il est évident ici que la filiation entre
Caméra Café et Kaamelott est bien
au-delà d'un interprète commun mais d'une écriture et
d'une référence commune, Audiard
Nous le voyons également énumérer les
qualités de la table et devancer le client sur ses différentes
utilisations possibles :
BRECCAN --Ah et puis là, je vous ai mis du costaud, vous
pouvez
y aller ! Mettons pendant un banquet, s'il faut faire danser cinq
ou six dames dessus, ça bougera pas !
ARTHUR -- C'est pas tellement l'ambiance.
BRECCAN -- Ah bah après, moi, je connais pas le
détail, hein !
57 YAGUELLO, Marina, Alice au pays du langage, Seuil (1
mars 1981)
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 42
Nous voyons donc une référence
supplémentaire à JC et là encore un rythme « à
la Audiard ». Mais ceci est tout à fait normal vu que le style
Astier, sans être un plagiat, utilise les mêmes codes à
savoir le rythme, l'emploi de métaphore et une certaine forme
d'argot.
AA dans le Livre II fera un deuxième clin
d'oeil à Caméra Café en faisant jouer Bruno Solo
dans l'épisode « Les Drapeaux ». Bruno Solo joue
Hervé Dumont, dit Vèvère, le collègue syndicalise
de JC.
Dans Kaamelott son personnage s'appelle Herveig et
est le responsable des drapeaux pour faire des signaux à l'ennemi. Son
rôle est de parlementer, négocier, il est le lien entre Arthur et
le camp d'en face. Sa fonction est donc très proche de son rôle de
syndicaliste dans Caméra Café et les conclusions les
mêmes que pour JC /Breccan.
Notre deuxième exemple concerne donc le personnage du
Maitre d'Armes. Nous le découvrons dans l'épisode éponyme,
s'évertuant à pousser Arthur dans ses derniers retranchements en
le provoquant pour que celui-ci s'entraine au combat efficacement. C'est un
personnage récurrent que nous retrouvons dans les six saisons.Le
rôle du Maître d'armes est interprété par Christian
Bujeau. Ce dernier s'est fait connaitre du grand public pour son rôle de
jean Pierre dans Les Visiteurs de Jean Marie Poiré.
Les Visiteurs est l'un des grands succès du
cinéma comique français sorti en 1993. L'action se déroule
en l'an de grâce 1123 . Godefroy de Montmirail et Jacquouille la
Fripouille se retrouve propulsé en 1992. Les deux héros font
alors la connaissance de leur descendance dont Beatrice de Montmirail, la
descendante de
Godefroy.et son mari Jean Pierre.
Le début de l'action se passe au Moyen Age et la suite du
film au XXème siècle mais les deux héros parlent dans un
français supposé être du XIIème siècle. En
réalité la plupart des termes médiévaux ont
été inventés par les scénaristes du film, Jean
marie Poiré et Christian Clavier. Le premier point commun entre
Kaamelott et Les Visiteurs est donc la période historique
servant de trame à l'histoire.
Le second est donc la présence de Christian Bujeau. Si
ce dernier a été choisi par AA ce n'est pas uniquement pour ses
qualités d'acteur mais pour ses talents à l'épée.
Christian Bujeau étant lui-même expert en combat
médiéval.et
chorégraphe sur Kaamelott. L'emploi de l'acteur pour ses
spécificités est donc ici totalement justifié. AA voulait
Bujeau et écrit donc un rôle taillé pour lui. Le Maitre
d'Armes étant un personnage créé pour Kaamelott
tout comme Breccan et Herveig.
Nous trouvons de nombreuses similitudes entre le langage du
Maitre d'Armes et celui des héros des Visiteurs.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 43
JACQUOUILLE :Ne buvez pas messire , c'est une folie , vous aller
vous transformer en boue , en chauve souris ou en cul de nonne ! GODEFROY :
Bois , je verrai bien si tu te transformes en cul de nonne !
JACQUOUILLE : Pouah ! Ca puire !
JACQUOUILLE : (effrayé) Aahh ! Messire ! Un
Sarrasin . Messire , un Sarrasin dans une chariotte du diable. C'est tout
ferré , y a point de boeuf pour tirer
Le procédé consiste a légèrement
transformé des mots contemporain telle que chariot en cha-riotte et lui
attribuer un objet de notre temps. Dans cet exemple il s'agit d'une Renault 4L
de La Poste.
Ici un extrait de l'épisode Le Maitre d'armes :
LE MAITRE D'ARMES -- « Gonzesse », c'est une formule
! Je ne le pensais pas ! Si j'avais voulu taper dans les potins, j'aurais
très bien pu parler du vôtre, de père !
ARTHUR -- Quoi ?
LE MAITRE D'ARMES -- Au hasard, l'épisode de la grange
de Brigit.
ARTHUR -- Quelle grange ?
LE MAITRE D'ARMES -- Celle où il s'était endormi
dans le foin et où il s'est fait chier dessus par un bouc !
Nous voyons ici une méthode souvent employé dans
Les Visiteurs, l'anecdote. Ici celle du père d'Arthur.
Nous remarquons également la présence de termes
contemporains tels que « potins » ou « gonzesse ». AA
n'invente pas de mot contrairement à Poiré et Clavier. Au
néologisme il préfère l'anachronisme. Cependant ce sont
deux termes argotiques.
Dans Les Visiteurs, Béa reproche souvent
à son mari d'être « atrocement vulgaire ». Or nous avons
déjà décrit le Maitre d'armes comme étant le
personnage le plus grossier de la série. Même si dans
Kaamelott la vulgarité est un une méthode pour
énerver le Roi et le stimuler au combat.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 44
LE MAITRE D'ARMES (off) -- Ha, ha. Sire ! Je vous
attends ! À moins que vous ne préfériez qu'on dise partout
que le Roi est une petite pédale qui pisse dans son froc à
l'idée de se battre ?
LE MAITRE D'ARMES --Il y a pas de « doucement » qui
tienne ! Vous allez me faire le plaisir de vous remuer un peu les miches. Sire
! J'ai l'impression de me battre contre une vieille !
La vulgarité, le contexte historique, la fonction du
personnage sont autant d'éléments qui appuient l'hypothèse
d'un auteur choisissant d'abord ses acteurs et écrivant ensuite leur
rôle. Mais là encore une fois le vrai lien entre Les Visiteurs
et Kaamelott, c'est Audiard.
En effet, Jean Marie Poiré le réalisateur et
co-auteur avec Christian Clavier des Visiteurs a débuté
sa carrière de scénariste avec Michel Audiard. En 1968, Audiard
réalise Faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards
sauvages sur une idée du jeune Jean Marie Poiré. Deux ans
plus tard, Poiré est le scénariste du film d'Audiard Le cri
du cormoran le soir au dessus des jonques. Il n'est donc pas
étonnant de retrouver chez Poiré des similitudes
d'écriture avec son maitre tout en ayant son propre style. Poiré
est plus moderne dans son écriture ce qui le met moins à l'abri
d'être passé de mode. Poiré et Clavier écriront
plusieurs films ensemble et Clavier, aussi acteur, sera un des invités
principaux de la saison 5 de Kaamelott.
Nous voyons donc avec le décryptage de ces deux
épisodes que l'auteur à ses références, dont une
très forte, Michel Audiard, et qu'ils s'inspirent des personnages de ses
références pour en écrire d'autres et les proposer aux
acteurs ayant incarné ses personnages. C'est le cas du Maitre d'armes,
de Breccan ou encore d'Herveig, tous né de l'imagination d'AA auxquels
on pourrait ajouter notamment Christian Clavier , héros des
Visiteurs, en juriste hystérique et hautain, traits de
caractère communs à nombres de ses personnages les plus
célèbres ou encore François Rollin et son roi Loth que
personne d'autres ne pourrait incarner.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 45
Les traces de
contemporanéité
dans Kaamelott, une
astuce scénaristique
pour évoquer le
siècle du
téléspectateur.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 46
1. Présentation du corpus
Pour appuyer l'hypothèse que Kaamelott se
démarque singulièrement des autres productions françaises,
et ce, tout formats confondus par son intertextualité et ses
anachronismes nous allons nous appuyer sur quelques épisodes issus de la
saison 1 choisi sur un critère bien défini. Pour rappel les
saisons sont aussi appelés livres, elles sont au nombre de six dont
quatre aux formats shortcom.
Nous allons donc nous pencher sur l'analyse des
épisodes ayant pour intrigues des sujets toujours d'actualité,
nous appellerons cela des traces de contemporanéité.
Cependant, ce n'est pas cette période qui nous
intéresse pour constituer le corpus mais plutôt la
corrélation entre le contexte médiéval (au sens large du
terme comme nous venons de l'expliquer) et le XXIème
siècle.
Comme nous l'avons vu précédemment les fictions
françaises sont généralement assez frileuses, même
si ce constat a considérablement évolué depuis
Kaamelott, et reste bien souvent dans des intrigues classiques
(histoire de couple, de famille, de travail) et toutes ancrées à
notre époque. Nous pouvons donc déjà affirmer que le fait
de proposer une série se situant à une période historique
remontant à plus de deux siècles est un gage
d'originalité. En effet certaines productions comme Un Village
français se déroulent pendant la Seconde Guerre Mondiale et
que la majorité des fictions de France 2 se déroule au
XIXème siècle ou dans la première partie du
XXème siècle. Et l'on peut également souligner que ces
séries sont généralement vraisemblables et dramatiques
alors que Kaamelott adopte un ton humoristique.
Mais ce qui marque une réelle différence avec
toutes ces productions est la liberté totale prise sur la chronologie et
cette manière d'assumer l'anachronisme. Ici l'anachronisme est un
ressort humoristique, un prétexte scénaristique pour
déclencher le rire chez le téléspectateur. Nous pouvons
peut être invoquer un désir chez l'auteur de choisir ces sujets
contemporains pour dénoncer ou simplement mettre en lumière
certaines questions d'actualité encore brûlantes aujourd'hui.
Toutefois, Astier a souvent répondu dans
différentes interviews ne pas vouloir utiliser Kaamelott comme
un pamphlet politique et donc qu'il n'y pas à voir d'engagement
idéologique dans son écriture58.
58 Chabbert, (Christophe), Aux sources de Kaamelott,
acte III : l'art de la guerre, Livre IV, 26 septembre 2007, M6 Vidéo
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 47
2. Contextualisation des thèmes
analysés.
Dans le Livre 1 il est question de la torture, de
l'adolescence et la gestion de l'âge bête, de la peine de mort, de
la sexualité chez les prêtres, du code du travail, de la retraite
et enfin des sondages d'opinion.
Tous ces thèmes sont des questions de
société revenant plus ou moins régulièrement dans
l'actualité.
Systématiquement, chaque nouvelle guerre nous
amène son lot de torture toutes plus ignobles les unes que les autres
(évoquons la gégène durant la guerre d'Algérie de
1954 à 1962 par l'armée française59 ou encore
les différents humiliations dont sont coupables les GI américains
lors des guerres d'Irak et d'Afghanistan)
L'adolescence est une notion récente à
l'échelle de l'humanité. Nous pouvons estimer l'essor de ce terme
juste après la seconde guerre mondiale. Avant cette date « les
jeunes » n'existaient pas, n'étaient pas considérés.
Il n'y avait pas réellement de stade intermédiaire entre
l'enfance et l'âge adulte. L'émancipation de la jeunesse se
développera dans la culture occidentale à travers la culture (le
rock, les yéyés) ou encore la forte politisation d'une
génération qui ne veut pas vivre la même jeunesse que leurs
parents et grands parents éduqués dans l'atrocité des
conflits mondiaux et se révoltera. Nous pouvons citer les
événements de mai 68 en France ou encore les manifestations
pacifistes aux USA contre la guerre au Vietnam.
L'adolescence est donc une période difficile à
gérer aussi bien pour le jeune que pour ses parents. Synonyme de
rébellion, il est aussi appelé l'âge bête.
La peine de mort est un sujet extrêmement
récurrent dans l'actualité. Si elle fut abolie en 1981 en France
par François Mitterrand, ce n'est pas encore le cas dans de nombreux
pays, les USA en tête. A chaque nouveau fait divers, notamment les actes
pédophiles, nous pouvons entendre, particulièrement venant de
l'extrême droite, s'élever des voix réclamant sa
réhabilitation. C'est également un sujet polémique
concernant La Chine60.
60
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/polemique-faut-il-boycotter-les-jo-de-pekin-2008_470183.html
En 2008 de nombreuses associations ont appelé au boycott
des jeux Olympiques de Pékin pour protester contre les nombreuses
violations des droits de l'homme en Chine.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 48
La sexualité des prêtres est également un
sujet très souvent liés aux très nombreuses affaires de
pédophilie au sein de l'Eglise catholique. Il s'agit plus
précisément de la question du mariage des prêtres afin
d'éviter les frustrations et ainsi les empêcher de commettre
l'irréparable. Nous savons que la question de la sexualité est un
sujet tabou pour les différentes religions et que sa pratique est dans
de très nombreux cas considérés comme pêché.
L'Eglise catholique est encore aujourd'hui réticente à
l'homosexualité61 ou encore au port du préservatif.
S'il y a bien un sujet que l'actualité traite
quotidiennement c'est bien celui du monde du travail et par extension du code
qui le régit. Le code du travail français est un recueil
organisé de la plupart des textes législatifs et
réglementaires applicables en matière de droit du travail, et qui
concerne essentiellement les salariés sous contrat de travail de droit
privé, les salariés du secteur public étant
généralement soumis à des statuts particuliers. Chaque
jour de nouveaux conflits éclatent en France et partout dans le monde
dans des entreprises et il ne passe plus une journée, surtout dans cette
période de crise, sans que nous n'entendions parler d'un plan social
entraînant des licenciements ou la fermeture pure et simple de sites de
production. C'est également quotidiennement que des propositions de lois
sont soumises à l'Assemblée nationale modifiant le Code du
travail. Sa première mouture date de 1910 bien qu'elle ne fût
achevée qu'en 1922.
La retraite est un autre des thèmes contemporains
abordé par la série à se trouver souvent sous les feux de
l'actualité sociale. Encore une fois le contexte de la crise encourage
les gouvernements à se pencher sur le problème épineux de
la répartition et de la cotisation des retraites. La retraite correspond
à l`âge légal à partir duquel un salarié peut
arrêter de travailler. Les victoires sociales combinées à
l'allongement de la durée de vie est à l'origine de ce droit pour
les salariés. Cette notion contemporaine du mot retraite date du
XXème siècle. La retraite désigne aussi
l'arrêt d'un combat militaire, battre en retraite.
Enfin le dernier sujet abordé est celui des sondages
d'opinions. Il faut remonter à 1936 pour trouver la trace du premier
institut de sondage aux USA. L'objectif était de recueillir les attentes
et les souhaits des citoyens américains en vue des élections
présidentielles. Désormais nous sommes sondées tous les
jours sur tous les sujets qu'ils soient d'ordre sociaux, politiques ou encore
culturels. Les instituts français les plus célèbres sont
Ifop, Tns Soffres, Opinion Way. La méthode est toujours la même,
un panel représentatif de la population est interrogé
61 Dans son ouvrage-confession Lumière du
monde le pape Benoit XI écrit que « L'homosexualité est
injuste, s'oppose à la volonté de Dieu et est inconciliable avec
la vocation de prêtre ».
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 49
sur une ou plusieurs questions. Par exemple, pour quel
candidat voterez vous en 2012 à l'élection présidentielle,
« Etes vous pour la réouverture des maisons closes », «
Pensez vous que le sélectionneur de l'équipe de France de
football devrait démissionner ». Désormais avec les
nouvelles technologies (Internet et SMS) tout le monde peut répondre
à ces sondages sans faire partie d'un panel.
3. Analyse des épisodes.
Dans cette partie nous allons donc observer de plus
près les épisodes présentés dans le chapitre
précédent, afin de trouver des traces de
contemporanéité dans la langue, le sujet abordé ou les
références présentes. Astier a une écriture
très riche et utilise de nombreux procédé pour nourrir ses
scénarios et ses dialogues. C'est pourquoi il est difficile, voire
douloureux, de choisir d'étudier un aspect plutôt qu'un autre
même si ici l'objectif est clairement de montrer que le vingtième
siècle est très présent dans les aventures de
Kaamelott. La méthode est sensiblement la même pour
chaque épisode puisqu'il s'agit de mettre en exergue le sujet
traité et de la transposer à notre époque. Une fois ce
travail effectué, nous nous penchons sur la situation et les dialogues
et les différents procédés pour rendre l'épisode
amusant même lorsque celui-ci évoque la torture par exemple.
a) Arthur et la Question
Le premier sujet contemporain abordé dans la
série est la torture. Ce thème sert d'intrigue à
l'épisode 13 intitulé Arthur et la Question. Le titre
est une référence au livre autobiographique La Question
d' Henri Alleg sorti en 1958 et traitant de la torture des civils durant
la guerre d'Algérie.
Mais c'est également le nom du processus
d'interrogation des sorcières et des hérétiques par les
inquisiteurs au XIIIème siècle. Dans un premier temps
les bourreaux expliquaient à leurs victimes la façon dont ils
allaient les torturer espérant que celles- ci soient suffisamment
terrifiées pour passer aux aveux. Soit les victimes cédaient soit
le bourreau commençait son office. Dans la majorité des cas,
aveux ou non la victime était torturée.
Michèle Janin-Thivos dans son article intitulé
« Torture inquisitoriale et nudité : la pudeur en question »
paru dans la revue Rives méditerranéennes 2008/2 (n° 30)
nous brosse le tableau de ces pratiques que l'on pense, à tort,
d'un autre temps :
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 50
« Le XVIIIe siècle a popularisé une
image violente et sanguinaire du tribunal de l'Inquisition. Mais la torture est
un moyen de pression intégré à un processus juridique
précis. Pratiquée par la justice séculière comme
ecclésiastique, elle est destinée à la production de la
preuve suprême : l'aveu. Elle vise à l'obtenir par des moyens
autant psychologiques que physiques : les inquisiteurs encadrent cette pratique
et confient à la justice séculière le soin de faire couler
le sang. »
Alberto Bondolfi de l'Université de Lausanne
évoque le lien entre religion et torture dans l'extrait de son article
« La pensée et la pratique chrétiennes face à la
torture : éléments pour un bilan critique » paru dans la
Revue d'éthique et de théologie morale 2008/1
(n°248)
« Celle-ci faisait partie des pratiques auxquelles
les premiers chrétiens ont été exposés. Des
citoyens romains ont été torturés pendant l'Empire. Saint
Augustin, dans la Cité de Dieu, s'est opposé à la torture
qui ne peut être, selon lui, un moyen d'enquête judiciaire ou une
preuve de culpabilité. Malgré cela, la torture fut encore
utilisée au Moyen Âge. Incmar de Reims continuait à la
légitimer. Le pape Nicolas Ier la condamna en 866, mais il ne fut pas
plus écouté que saint Augustin en son temps. Malheureusement, la
torture fut approuvée comme lutte contre les hérétiques :
en 1244, Innocent IV confirme la loi pénale de l'empereur
Frédéric II. La torture appartient même au système
juridique à l'époque prémoderne et, parfois encore
jusqu'aux constitutions du XXe siècle ».
Lors d'une réunion de la table ronde est
évoquée le cas d'un voleur de bétail qui ne veut pas
avouer son méfait et dénoncer son complice qui court toujours.
Léodagan et Calogrenant souhaitent le torture pour le faire avouer mais
Arthur, soutenu par Bohort est farouchement opposé à la
torture.
Léodagan (à Arthur) - C'est
vrai que c'est curieux, cette manie de pas vouloir torturer. Ca vient de quoi
ça ?
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 51
Arthur - Ca vient que chez moi, il y a pas de
torture, voilà. Bohort - Et c'est très bien
comme ça.
Le seigneur Galessin appuie également son Roi :
Galessin - Ah oui, c'est très bien !
C'est moderne !
Arthur, comme souvent, est très évasif et
n'explique pas les raison de son refus. Nous pouvons donc supposer qu'il s'agit
d'une question d'éthique. Léodagan et Calogrenant essaye alors de
le convaincre
Léodagan (à Arthur) - La
torture, c'est pas ce que vous croyez ! Quand c'est fait par un pro, il y a pas
une goutte de sang.
Calogrenant - Le simple fait de
déballer les outils, le gars, il craque !
Cependant Arthur est sceptique :
Arthur - Et s'il craque pas ?
Léodagan - Ah bah là, c'est la
boucherie...
Cet extrait est révélateur des caractères
et des méthodes d'Arthur, Bohort, Léodagan et Calogrenant.
Arthur est un souverain « moderne », civilisé
qui souhaitent se démarquer des chefs barbares d'un monde révolu.
Son objectif est avant tout l'unification réelle et la pacification de
la Bretagne. Une fois la nation unie il souhaite la développer dans le
bien de la population (éducation notamment, développement de
l'agriculture pour éviter les famines, protection de la population,
etc). Il est également opposé à l'esclavage ou la peine de
mort comme nous le verrons plus tard.
Léodagan est plus vieux qu'Arthur et d'une autre
tradition. Arthur a été éduqué au sein de
l'armée romaine ou il a reçu des cours de stratégie
militaire mais également un enseignement plus classique
(mathématiques, latin, grec, Histoire, etc.).Léodagan est
surnommé le
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 52
sanguinaire et son père Gustan, le cruel. Arthur ne fut
pas élevé par son père Uther Pendragon,
réputé pour sa cruauté. Il cherche plutôt à
s'en démarquer. Léodagan considère son gendre comme un
mou, lui qui est obsédé par le renforcement de la
défense.
Bohort est un être raffiné, sensible,
détestant la violence1 et refusant souvent le combat au
détriment et au péril des autres chevaliers. Il règne une
certaine ambiguïté quant à son orientation sexuelle
auprès des autres membres de Kaamelott mais le
téléspectateur découvre son épouse lors de la
saison 32. Il se situe donc naturellement dans le camp opposé
à la torture par son pacifisme.. Il se laisse également
guidé par sa couardise comme en témoigne ce dialogue de
l'épisode de la saison 3, Le fléau de Dieu II dans
lequel Arthur négocie avec Attila, chef des Huns :
Bohort : Sir, donnons lui les femmes, je vous en
conjure !
Arthur : Les femmes lesquelles ?
Bohort (en colère) : Toutes !
Les duchesses, les rombières, les boniches et qu'est-ce qu'on en a
foutre ? (tout le monde le regarde d'un air étonné)
Parfaitement, s'il faut que je donne ma femme, je la donne et les
vôtres avec !
Maître d'armes : Mais juste une question,
on a pas encore évoqué l'éventualité de combattre.
J'ai dis une bêtise là .
Bohort : Combattre Attila ? Vous êtes des
dingos !
:
Calogrenant est également issu de traditions
ancestrales et est roi de Calédonie. Sans être aussi rude que
Léodagan, il prône toutefois un pragmatisme permettant de
justifier l'emploi de la torture et autres méthodes peu orthodoxes. La
fin justifie les moyens pourrait être son leitmotiv.
La suite de l'épisode est conçu pour confirmer
l'aspect barbare, voire ludique de la torture.
Arthur - Mais le gars qui se fait broyer le
pied, qu'est ce que ça peut lui foutre qu'on lui brûle, en plus
?
Léodagan : Non mais c'est pour la mise en
scène un peu.
Léodagan : Mais sinon vous avez rien
d'plus festif, là, de...
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 53
Ce qui est souvent reproché à la torture, au
delà de son existence en soi, c'est le plaisir que prennent les
tortionnaires, ou au minimum leur absence de scrupules. Il y a une
déshumanisation qui provoque le transfert de moyen d'action inhumain
mais utile à un divertissement populaire.
Les généraux français de la guerre
d'Algérie se justifient en évoquant un mal nécessaire
inhérent à la guerre. Mais au delà de l'aspect pratique il
y a une cruauté inqualifiable et sans doute évitable. Que dire
alors des G I posant en photo avec des prisonniers de guerre empilés les
uns sur les autres3 ou bien encore en train d'uriner sur des
morts62.
Astier pose donc ici à la fois le problème de la
torture comme mal nécessaire mais également comme spectacle. Au
Moyen Age les jeux sanguinaires divertissaient la foule (combat de joute, duel)
les pendaisons et autres exécutions étaient publiques et ce
jusqu'en 193963.
b) Compagnons de Chambrée.
L'homosexualité n'est pas évoquée
qu'à travers le personnage de Bohort mais également dans
l'épisode Compagnons de chambrée.
Arthur de retour de combat trouve dans son lit un homme de
foi. Après un léger malentendu ce dernier se rend compte qu'il se
trouve dans la chambre du Roi et qu'il n'y pas de chambre disponible et qu'il
doit donc partager le lit avec le Roi. Arthur, bien que peu rassuré,
souhaite dormir mais l'Archevêque engage la conversation.
Evèque : Ah je... j'voulais vous
demander, et c'est un petit peu l'objet de ma visite ici, que pense le peuple
breton du concept du Dieu unique, ça les inquiète ça
ou...
Arthur : Le Dieu unique je sais pas mais moi
qui couche avec un Evèque ça peut les inquiéter oui.
Evèque : Nan parce que bon, la
chrétienté tout ça, c'est bon, c'est assez jeune faut que
l'idée fasse son chemin... Mais je m'demandais justement si on pouvait
pas faire dans un premier temps cohabiter l'idée du Dieu unique avec
l'idée de vos Dieux anciens à vous.
Arthur : Voilà, et d'ailleurs
éventuellement c'qu'on pourrait faire, c'est parler de tout ça
demain !
62
http://www.sudouest.fr/2012/01/12/une-video-montre-des-soldats-americains-uriner-sur-des-cadavres-en-afghanistan-602909-4803.php
63
http://www.lepoint.fr/c-est-arrive-aujourd-hui/17-juin-1939-video-le-guillotine-weidmann-est-le-dernier-condamne-a-perdre-la-tete-en-public-17-06-2012-1474256_494.php
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 54
Le prêtre fait semblant d'écouter Arthur mais
poursuit en précisant son propos :
Evèque : Bien sur. Mais je prends un
exemple tout a fait au hasard, est-ce que... est-ce que l'idée de
l'homosexualité c'est quelque chose de répandu chez vous c'est
heu..
Arthur : J'sais pas, pas plus qu'ailleurs
j'suppose.
Evèque : Ah nan parce que nous figurez
vous, nous on s'tâte hein, pour savoir si on doit l'autoriser ou
l'interdire...
Arthur : L'interdire ? Pourquoi faire ?
Evèque : (criant) Eh ben voilà
! Eh ben c'est exactement c'que j'leur dit ! Voilà ! Moi je fais partie
de ceux qui se battent pour qu'on l'autorise, et même qu'on l'encourage !
Voilà !!
Dans cet extrait, il est clairement sous entendu que
l'évêque est homosexuel ce qui produit ici l'effet comique. Mais
au delà de cet effet, nous voyons ici de quelle façon Astier
évoque l'hypocrisie de l'Église sur les questions se rapportant
à la sexualité
C'est cet implicite qui est intéressant.
L'évêque ne dit pas « moi je suis homosexuel donc je suis
évidemment pour l'homosexualité » mais il dit qu'il est pour
et même pour l'encourager. C'est évidemment excessif, il n'y a pas
plus à l'encourager qu'à l'interdire mais en disant cela il
n'avoue pas ouvertement son homosexualité tout en la faisant
comprendre.
Les autorités chrétiennes souhaitent interdire
l'homosexualité, seule l'union d'un homme et d'une femme est
tolérée. Et c'est encore mieux si cette union n'est
consommée qu'après le mariage et si l'épouse garde sa
virginité jusqu'à ce jour. Aujourd'hui encore le Pape et
l'ensemble de la communauté Chrétienne (politique compris)
relaient une parole hostile à l'union de deux hommes ou de deux femmes
assimilant cela à la zoophilie par exemple64.
«Si les forêts tropicales méritent notre
protection, l'homme (...) ne la mérite pas moins», a
résumé Le Pape Benoit XVI avant de plaider une fois de plus pour
le mariage, «lien de toute la vie entre un homme et une
femme».
64 Le député UMP Jacques Myard a
déclaré à l'antenne de la radio le Mouv' " Vous me dites
qu'il faut prendre en compte l'homosexualité car elle existe, moi je dis
oui, mais, la zoophilie, elle existe aussi, on fait quoi alors?". Ce n'est
malheureusement pas un cas isolé au sein de ce parti
Astier tourne le sujet à l'absurde en faisant dire
à l'évêque qu'il souhaite encourager
l'homosexualité. Nous pouvons percevoir de la provocation dans ce
sketch, une de plus dans Kaamelott à l'encontre de la religion
souvent perçue comme soporifique voire dangereuse. Le meilleur exemple
est le personnage du répurgateur chassant les hérétiques
et demandant qu'on les envoie au bûcher. Nous pouvons le voir dans
l'épisode Monogame5 :
Demetra (souriante) : Bonjour.
Répurgateur (effrayé)
: Ah m'adresse pas la parole ! Hérétique ! Démon !
Il lui crache dessus. Sous le regard effaré du roi
et de sa maîtresse. Répurgateur (au roi)
: Excusez-moi. Pour moi les femmes, j'aime pas ça, c'est d'la
saloperie. (rit doucement) Vous me suivez là ? J'vous
attends...
Arthur a du mal à en croire ses yeux.
Dans cet épisode le répurgateur veut faire
signer à Arthur une loi sur la monogamie. Mais celui-ci ne veut pas
alors le répurgateur essaye de le convaincre :
Répurgateur : Bon attendez. Heu....
Vous signez la loi et puis de temps en temps vous pouvez allez voir toutes les
jeunes femmes que vous vouliez comme avant.
Arthur : Allez y, ouais, continuez.
Répurgateur : Et puis heu... Vous v'nez
m'voir en confession. Arthur : En confession ?
Répurgateur (voix off) : Oui,
j'vous expliquerez. Ça prend 5 minutes et après on est tranquille
on peut faire c'qu'on veut.
Une nouvelle fois, nous pouvons constater que c'est
l'hypocrisie de l'Eglise qui est pointée du doigt. Le repentir se fait
encore de nos jours mais davantage par les médias. Dominique Strauss
Kahn par exemple vient se confesser pour être pardonné au journal
de 20h de TF1 après ses écarts conjugaux et les
accusations de viol contre lui en avril 2011.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 55
c) Le cas Yvain.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 56
L'adolescence, ses difficultés et la pédagogie
à employer, et un terme récurrent dans Kaamelott.
Yvain, frère de Guenièvre, est
l'archétype de l'adolescent des XX et XIème
siècle. Pour illustrer nos propos nous allons nous pencher sur deux
épisodes en particulier, Le Cas Yvain6 et Le
Pédagogue.
Yvain apparaît pour la deuxième fois dans la
série après l'épisode Dîner
dansant7. Au cours duquel nous apprenons que Guenièvre a
un frère un peu plus jeune qu'elle. Ce sont les deux seuls enfants de
Léodagan et Dame Séli. Nous pouvons déjà voir dans
cet épisode de vives tensions familiales et l'immaturité
d'Yvain.
Léodagan : Un p'tit différent
familial vous pouvez supporter ça une fois d'temps en temps, non ?
Arthur : Une fois d'temps en temps ??? Ben
vous manquez pas d'air !
Séli : Tout dépend de ce que vous
appelez un « différent »
Arthur : A partir du moment où on
commence à péter la vaisselle j'estime que le terme est pas
excessif !
Il est difficile de déterminer l'âge d'Yvain mais
il semble qu'il s'agisse plutôt d'un jeune adulte que d'un adolescent.
L'adolescence est une conception extrêmement récente et donc il
s'agit ici d'un anachronisme. L'adolescent comme nous le décrivons dans
l'introduction du corpus est avant tout une nouvelle cible pour la
consommation, qu'elle soit culturelle ou non, est apparue à la fin des
années 50 et correspond à l'étape de la vie où
l'enfant s'émancipe mais n'est pas encore concerné par les
préoccupations de la vie d'adulte.
Cependant les traits caractéristiques de l'adolescent,
du à son évolution physiologique ont toujours existé.comme
en témoigne Jean Jacques Rousseau, dans ce passage de .Émile
(1762)
:
« [L.]homme en général n.est pas fait pour
rester toujours dans l.enfance. Il en sort au tems prescrit par la nature, et
ce moment de crise, bien qu.assés court, a de longues influences. Comme
le mugissement de la mer précède de loin la tempête, cette
orageuse révolution s.annonce par le murmure des passions naissantes
(...) [L.enfant] devient sourd à la voix qui le rendoit docile : c.est
un lion dans sa fiévre ; il méconnoit son guide, il ne veut plus
être
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 57
gouverné. (...) C.est ici la seconde naissance dont
j.ai parlé ; c.est ici que l.homme nait véritablement à la
vie (...). »65
L'enfant peut alors entrer dans une période de
rébellion, un refus de toute autorité, à commencer par
celle de ses parents. Il peut également se renfermer sur lui -même
et le contact avec les adultes peut s'avérer délicat. C'est aussi
la période de la vie où la sexualité apparaît et
où l'on commence généralement à se questionner sur
son orientation sexuelle.
Le refus de communication est l'un des signes nous
présentant Yvain comme un adolescent. Nous pouvons le constater dans cet
extrait du cas Yvain :
Arthur : (...)J'ai jamais entendu le ton de sa
voix !
Yvain se racle la gorge.
Arthur : Si là, voilà.
Ou encore dans cet extrait :
Arthur : Mais comment voulez-vous qu'j'le
sache il parle pas il bouge pas. Fait la gueule tout l'temps ! Dès qu'on
lui fait une remarque il lève les yeux au ciel ! (Yvain lève
effectivement les yeux) Tiens voilà !
Sa mère le défend, mettant en avant des
prétendues qualités artistiques et évoquant sa nature
sensible. Léodagan le préférerait plus viril et plus
intéressé à la vie militaire :
Séli : Mais il est sensible ! Vous
préféreriez peut être qu'il passe son temps à faire
des concours de pets !
Arthur (énervé) : Parce que
c'est là seule alternative que vous m'proposez, rien glander d'la
journée où faire des concours de pets ??!
Léodagan : Entre parenthèse
avec vos lubies d'vouloir lui faire faire du luth où je sais quelle
connerie...
Séli : J'y peux rien si c'est un
artiste, il écrit des poèmes magnifiques !
65 Rousseau (Jean Jacques), Emile, Flamarion, 1972
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 58
Yvain est contre la violence, encore un cliché sur les
adolescents depuis le mouvement hippie et les différentes manifestations
de la jeunesse s'opposant à la guerre (celle d'Algérie ou encore
celle du Vietnam).
Lorsque Léodagan rassure Arthur en évoquant la
bravoure de son fils au combat, ce dernier prend la parole :
Léodagan (souriant) : Mais vous allez
voir à la prochaine campagne hein, quand il y aura du combat, alors
là il va s'réveiller ! Yvain : M'en fous j'irais
pas.
Léodagan et Arthur :
Quoi ?
Yvain : Je refuse d'aller me battre pour
soutenir une politique d'expansion territoriale dont je ne reconnais pas la
légitimité.
Yvain s'exprime à la manière du milieu
estudiantin des événements de mai 68 et de la jeunesse
politisée refusant de combattre contre la décolonisation
notamment en Algérie66. Ce langage propre à cette
jeunesse déclarait également qu' « il est interdit
d'interdire » comme nous l'avons vu avec Astérix et
défiait la police et la les forces répressives en proclamant
« CRS SS » ou encore « Mort aux vaches »67
Suite à cela Léodagan s'en prend d'abord à
sa femme lui reprochant son éducation :
Léodagan : C'est vous qui lui avez mis
ces conneries dans le crâne, mais j'vous préviens hein, la
prochaine fois que j'le vois avec un luth, je lui casse sur la tête !
Séli lui répond qu'il devrait « être
fier d'avoir un fils un peu moins bourrin qu'la moyenne ! »
Séli est d'ordinaire un personnage dur laissant peu de
place aux sentiments mais laisse apparaître quelques failles lorsqu'il
s'agit de ses enfants et ses futurs petits enfants. Par exemple dans
l'épisode La tarte aux myrtille8, elle se projette
en grand mère faisant des tartes.
66
http://www.unef100ans.fr/spip/spip.php?article22
67
http://www.evene.fr/citations/theme/mai-1968-slogan.php
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 59
Il n'est donc pas si surprenant de la voir prendre la
défense de son fils même si l'on peut douter de la
sincérité de ses propos.
Léodagan menace alors son fils. Et la réponse de
son fils est surprenante :
Yvain (blasé) : Super. Bonjour la
pédagogie...
Arthur est gêné et leur propose de se réunir
pour « régler cette petite crise » (sous entendu la crise
d'adolescence) mais Léodagan ne tient compte des remarques ni de l'un ni
de l'autre :
Léodagan : Tu vas aller t'battre
où j't'en mets une ! Yvain : J'réponds pas
à la violence.
Sa mère intervient en l'encourageant à
défendre ses opinions ce qui a le don d'énerver Léodagan
:
Léodagan : Ah et vous si vous voulez pas
vous en prendre une par
ricochet j'vous conseille de pas la ramener hein, il ira au
combat !
S'en suit alors un dialogue de sourd entre le père et le
fils :
Yvain : Non j'irais pas.
Léodagan : Si tu iras !
Yvain : Non.
Léodagan : Si !
Yvain (soupirant) : Okay j'y vais.
Léodagan (se calmant) : Tout
d'même.
Yvain : Mais j'm'en fous. Je refuse de porter
les armes.
Yvain sait qu'il ne sortira pas gagnant et accepte donc à
cette condition ce qui est évidemment absurde.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 60
Pour terminer avec cet épisode, nous pouvons
également souligner le premier dialogue entre Séli et Yvain :
Séli entre dans la chambre d'Yvain, celui-ci est au
fond de son lit.
Séli : Bon allez ça fait 5 fois
qu'je viens maintenant vous vous levez.
Yvain : J'peux pas y aller j'ai une otite.
Séli : Dépêchez vous, le
cuissot de chevreuil c'est pas bon réchauffé !
Elle s'en va, Yvain soupire sur son oreiller.
Encore une fois nous sommes ici en présence de la
caricature de l'adolescent qui se sent persécuté par ses parents
et qui est prêt à toutes les excuses, notamment celle de la
maladie, pour échapper à des obligations. Bien souvent il s'agit
de l'école, ici c'est le fait de passer à table.
d) Le Pédagogue.
Dans l'épisode Le Pédagogue, Léodagan a
conscience du fait que son fils est en crise :
Léodagan : Il traverse une mauvaise
passe. C'est l'âge. Une petite crise, quoi...
Cependant Léodagan ne fait preuve d'aucune
pédagogie :
Léodagan : Ah mais je m'en occupe ! Je
viens de le coller trois jours sans bouffer. Si ça suffit pas, je
l'enferme dans une cage sans lumière. Mais j'attends lundi, pour
aviser.
Léodagan désespéré décide
de consulter Merlin. Généralement Merlin est le tout dernier
recours pour les chevaliers.
Après avoir constaté la brutalité de
Léodagan (privation d'eau, de nourriture, coups) Merlin lui conseille
d'écouter son fils. Léodagan trouve cette idée farfelue
mais finit par s'y résoudre.
Léodagan : Ecoutez son môme...
Merlin : Eh ben ?
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 61
Léodagan : Non mais pourquoi pas... De
toute façon, dans la vie, faut tout connaître...
Le dialogue suivant entre Yvain et ses parents illustre bien le
fossé entre les les deux parties. Le fils s'attend à être
frappé s'il s'exprime et Séli est perturbé par le
comportement de son mari. Yvain finit pas prendre la parole :
Yvain : J'estime ne pas avoir à subir les
fantasmes carriéristes d'une entité générationnelle
réactionnaire et oppressive.
Là encore, Yvain emploie le lexique de 1968 et de cette
jeunesse se rebellant contre toutes formes d'autorité, notamment celle
du père ou du professeur.
Les parents ne comprennent évidement pas ce « cri du
coeur ». Cependant Léodagan se satisfait de cette réponse
:
Yvain : Je peux partir maintenant ?
Léodagan : Tout à fait. Merci mon
grand..
Ces marques d'affection sont inhabituelles de la part de
Léodagan et cela crée un effet comique.
Léodagan pense pouvoir appliquer ce concept avec quiconque
discutera avec lui. Il décide d'appliquer cette méthode sur
Arthur au sujet de la construction de tourelle :
Léodagan : J'écoute ce que vous
avez à me dire au sujet des tourelles et je ne vous coupe pas.
Arthur : Et après ?
Léodagan : Et après j'aurai
entendu ce que vous avez à me dire et on pourra recommencer la
discussion sur des bases saines.
Seulement la méthode ne porte pas ses fruits et les deux
hommes s'emportent. Léodagan se rend donc dans le laboratoire de Merlin
pour lui reprocher l'échec de sa méthode.
Merlin lui apprend alors que l écoute mène à
la réflexion.
Léodagan : Quelle réflexion ? Vous
avez dit « l'écoute », vous avez pas parlé d'autres
choses !
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 62
Dans cet épisode il entremêle donc
l'évolution médiévale et la deuxième moitié
du XXème siècle, celle de « l'enfant roi ».
Il est d'ailleurs amusant de faire le lien entre cette expression et sa
signification.
Selon la définition de Jean-Marie Ledain, psychologue
scolaire, « l'enfant-roi est égocentrique, revendique et se plaint
constamment, refuse d'aider, a besoin de capter l'attention et de se faire
remarquer, est intolérant aux frustrations, est agressif et manque de
socialisation »68
Bernard Petre complète cette définition en
précisant encore que l'enfant-roi est le nombril de la famille, sans
limite et sans devoir, amoral, égoïste, seul, manipulateur,
considéré trop tôt comme adulte, à qui on passe tout
et dont on réalise tous les désirs. S'il est tyran, et nous
rejoignons ce point de vue, il est aussi victime de ses parents comme de la
société69.
Le ressort comique de cet épisode repose sur le
personnage de Léodagan qui est dépassé par ce monde en
mutation. Astier joue constamment de cette transition entre le Moyen Age
barbare et un monde médiéval plus raffiné.
e) Le code de chevalerie.
Dans cet épisode, le code de chevalerie a
été largement modifié par Léodagan et le
Père Blaise sur ordre d'Arthur. Mais celui ci s'attendait à une
traduction et non à un tel bouleversement.
Arthur : Bon allez, au boulot, ça
évitera d'penser au reste ! Père
Blaise, l'ordre du jour.
Blaise : Ah bah aujourd'hui j'ai rien moi.
Arthur : Rien comment ça rien ?!
Blaise : Ben on est une veille de pleine lune,
et normalement une
veille de pleine lune, c'est relâche.
Tous les chevaliers se lèvent.
Arthur : Oh là oh là oh là
popopop on se calme !
Ils se rassoient.
Arthur : Qu'est-ce que c'est qu'cette histoire
d'relâche ?
Blaise : Bah c'est écrit noir sur blanc
dans l'nouveau code de
chevalerie !
68 Intervention sur L'enfant roi de Jean-Marie Ledain,
le 27 janvier 2005, organisé par l'association de parents de
l'école Emanuel à Sprimont et l'UFAPEC
69 Colloque Enfant-roi ? Op. cit.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 63
Arthur : Le nouveau code ??
Blaise : Vous nous avez d'mandé de
dépoussiérer l'ancien, donc on a vu ça avec messire
Léodagan...
Léodagan : Ah ouais 'puis
c'était tout en ancien Celte hein, on en a chié.
Arthur : Non mais j'vous ai rien
d'mandé d'dépoussiérer du tout j'vous ai demandé de
le traduire c'est tout !
Blaise : Eh ben justement, quand on a traduit,
ça a donné relâche.
La suite de l'épisode relate les négociations
entre Arthur et les chevaliers. Pour Arthur cette nouvelle version est bien
trop laxiste, trop souple, Léodagan est plus partagé.
Léodagan : Oui parce qu'avec le
nouveau code, ils font plus de pause, mais du coup ben ils sont plus
reposés. Et moi j'pense au combat.
Arthur : Moi j'pense que si on met pas le
ohla tout de suite il vont finir par nous les demander pendant les combats les
pauses.
Blaise et Léodagan échangent un regard.
Arthur : Ils les ont déjà
demandé c'est ça ?
Blaise (cherche dans les papiers) : Heu
paragraphe 16 alinéa 4.... Léodagan : Ouais
c'est ça c'est ça sur les temps de pause....
Arthur : Bon, maintenant qu'on a
terminé avec les bons côtés d'la nouvelle traduction, on
peut p'tet la foutre en l'air et reprendre l'ancienne ?
Arthur emploie des arguments que l'on a pu entendre lors de la
mise en place des 35 heures qui consiste à penser que moins l'on
travaille, moins on a envie de travailler. Étonnamment Léodagan
fait preuve de plus de souplesse et rétorque que les pauses leur
permettront de se reposer. Là encore c'est l'argument en faveur de la
réduction du temps de travail et qui a fait ses preuves depuis. En effet
la France est l'un des pays où l'on travaille le moins mais ou la
productivité est la plus importante.
On peut également souligner le gag de Léodagan
recherchant cette loi dans ces papiers. C'est une critique de la lourdeur
administrative en général et pour le monde du travail en
particulier.
Léodagan tient également des propos illustrant
parfaitement la néc éssité d'un code du travail clair et
connu de tous, ce qui n'est malheureusement pas le cas. Dans bien des
situations les salariés ne le connaissent pas et se retrouvent
floués par leur employeur du fait de leur méconnaissance de leurs
droits.
Léodagan : Ah mais m'regardez pas
comme ça hein, si vous êtes pas content fallait vous les farcir
les négociations avec ces loustics là !
Arthur : Les négociations, mais
quelles négociations ?
Léodagan : Bah tant qu'ils
comprenaient rien à l'ancien code, on pouvait leur raconter c'qu'on
voulait seulement depuis qu'il a été traduit alors là
pardon hein ! Une pause par-ci une relâche par-là...Et puis 'c'est
intolérable' et puis 'un acquis est un acquis' ah nan mais alors...
Ici le parallèle avec la société actuelle
est évident, notamment avec l'évocation des acquis sociaux. Les
acquis sociaux étant des droits majoritairement obtenus après de
grandes luttes sociales comme les congés payés en 1936 ou la
retraite qui a été accordée par Le Conseil national de la
Résistance au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale.
Comme nous l'avons vu dans la présentation des
thèmes au chapitre précédent le code du travail date du
début du XXème siècle et n'a cessé
d'évoluer depuis. Ce code a pour but de fixer des règles, aussi
bien pour les salariés que pour l'employeur afin d'appliquer un cadre
légal. Des inspecteurs du travail sont chargés de surveiller que
ce code est bien respecté. Ce code est donc remis en question et
modifié très régulièrement par diverses
réformes ou chaque partie essaye d'y trouver son intérêt.
Régulièrement gouvernement patronat et syndicat se
réunissent pour « ouvrir des négociations », suite aux
prérogatives rendues par un « groupe de travail », afin de
satisfaire dans la mesure du possible l'ensemble des acteurs.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 64
Encore une fois Arthur réagit violemment :
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 65
Arthur : Nan nan nan mais y a rien à
négocier ! Moi les traines-
patins j'les remets au travail vite fait !!
Tous les chevaliers se lèvent.
Arthur (crie) : Asseyez-vous !!
Ils se rassoient.
Arthur : Mais qu'est-ce que c'est qu'ce cirque
aujourd'hui ?!
Blaise : Ben ça c'est la traduction de
l'article 13... "si l'honneur du
chevalier est bafouée pendant une assemblée, ce
dernier pourra
recourir à son droit de vidage".
Arthur : Son droit d'vidage ??
Blaise : Oui oui, j'suis d'accord avec vous
c'est pas la meilleure
traduction qu'on ai
Ce droit de « vidage » pourrait correspondre au droit
de retrait, c'est-à-dire le droit de se défendre pour le
salarié, en se syndiquant ou en portant une affaire au conseil des
Prud'hommes.
Nous pouvons aussi l'interpréter comme une obligation pour
les parties de se respecter et qu'aucune ne prévaut sur l'autre. Cela
peut se résumer par de grands principes tels que « les hommes
naissent libres et égaux en droit » ou encore « nul n'est
censé ignorer la loi. ».
A noter qu'une fois encore cet épisode comporte
également des éléments réels du Moyen Age et que le
code de chevalerie n'est pas une invention d'Astier. Voici le code par Saint
Jean de Terre Sainte (Jérusalem):
1-Tu croiras à l'enseignement de la Sainte Eglise du
Christ et tu lui
seras obéissant.
2-Tu défendras l'Eglise Chrétienne.
3-Tu respecteras les faibles et seras leur
protecteur.
4-Tu aimeras ta Patrie.
5-Tu ne reculeras jamais devant l'ennemi.
6-Tu combattras pour la Foi Chrétienne.
7-Tu ne diras que la Vérité et tu resteras
Fidèle à ta Parole.
8-Tu seras Généreux et Charitable envers ton
Prochain. Toujours
et en tout lieu tu agiras en Défenseur du Bien et de
la Justice
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 66
contre le Mal etl'Iniquité70.
Arthur a la décision finale, ce qui implique un rapport de
force en sa faveur. Il en est de même actuellement : c'est au
gouvernement de décider s'il applique ou non les accords convenus avec
les représentants des différentes parties.
Arthur : Dites moi je pensais à une
chose, il faut bien qu'elle soit
ratifiée par moi cette nouvelle traduction ?
Léodagan : Ratifiée ?
Arthur : Enfin j'veux dire, validée
quoi.
Léodagan : Ah oui oui.
Arthur : Parce que si j'refuse de la
signer...
Blaise : Ah ben là c'est l'ancienne
traduction qui s'applique.
Le dernier dialogue nous permet de constater la difficulté
de se défendre quand on ne connaît pas la loi.
Perceval : Mais j'croyais qu'on y avait droit
à ça, article 7 de j'sais
pas quoi là...
Arthur : Ah, alors attention, père Blaise
s'il vous plait, l'article 7.
Blaise lit en ancien Celte.
Arthur : Voilà, ça répond
à votre question ?
Perceval : Du coup on y a plus droit ?
Arthur : Vous voulez qu'on vous relise l'article
?
Perceval (Voix Off ): Non non, j'vous fais
confiance.
Si dans ce cas le code était traduit, Perceval pourrait
argumenter et faire appliquer ce fameux article 7. Mais dans cette situation il
y a un flou juridique et il n'a d'autre choix que de croire en
l'honnêteté de sa hiérarchie.
70 Massian (Michel), La Chevalerie, , coll.
« Terre entière », Dupuis, 1967
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 67
f) Létal.
La peine de mort est un des autres sujets contemporains
évoqués dans Kaamelott. L'épisode
Létal traite de ce thème. Létal signifie ce qui
concerne ou qui entraîne la mort. On parle également de dose
létale pour une injection.
Deux questions essentielles sont soulevées dans cet
épisode, l'aspect festif de la mise à mort et son existence
propre.
Au début de l'épisode, Arthur annonce à
Guenièvre que les pendaisons sont désormais privées.
Arthur : Y a plus d'peuple aux
exécutions. C'est fini ça, maintenant c'est privé.
Léodagan, Lancelot, père Blaise.
Guenièvre est déçue, la mise à
mort étant une des distractions favorites de la Reine et de ses
contemporains. Il serait même bon d'ajouter que c'est l'une de ses rares
activités.
Guenièvre : Oh ben non... j'avais choisis
ma toilette tout, j'me faisais une joie d'sortir !
Léodagan est très clair, c'est avant tout un
spectacle.
Léodagan : Moi j'ai l'impression que
c'qui vous échappe, c'est la notion de spectacle.
Arthur fait alors part de ses réticences pour la peine de
mort.
Arthur : J'vais vous dire, j'ai jamais
aimé qu'il y ai du public aux exécutions. Toute façon
j'aime pas ça les exécutions.
Lancelot : Ah bon ?
Léodagan : Mais pourquoi qu'est-ce qui
vous gêne ?
Arthur : J'sais pas. J'aime pas ça,
j'saurais pas vous dire pourquoi...
Léodagan pense que ce n'est pas la peine de mort en soi
qui gène Arthur mais la méthode d'exécution, la pendaison.
Pour Lancelot c'est avant tout l'idée de justice qui prime.
Léodagan considère la justice comme un prétexte et
souhaiterait qu'Arthur mette en place un nouveau mode d'exécution plus
spectaculaire.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 68
Léodagan : Mais la justice me faites
pas marrer, ça dure des plombes le type remue à peine les doigts
d'pieds à quoi ça r'ssemble j'vous l'demande !
Arthur : Bah ça r'ssemble à une
pendaison à quoi voulez vous qu'ça r'ssemble on va pas faire
venir les danseuses et les montreurs d'ours.
Lancelot : La pendaison c'est sobre et
solennel, moi j'trouve ça parfait.
Léodagan : Prenez la roue, par
exemple, ça c'est festif. Le condamné est attaché et on
commence par lui casser les bras et les jambes, bon ben tout l'monde peut venir
avec son p'tit bâton, les gens participent, c'est convivial !
Actuellement, la peine de mort est encore en vigueur dans de
très nombreux pays. On peut citer pêle-mêle Les Etats
Unis
En France elle est abolie depuis 1981 à
l'arrivée au pouvoir de François Mitterrand et fut imposée
par ce pouvoir face à l'hostilité majoritaire de la population
française. Malgré tout à chaque fait divers sordide, et
particulièrement les infanticides (citons par exemple la tuerie dans
l'école juive de Toulouse) des voix, généralement
réactionnaires s'élèvent contre cette abolition.
Régulièrement le Front National met en avant cet argument dans
son programme électoral71.
Cependant, la visée du rétablissement de la
peine de mort serait, à en croire ses partisans, uniquement dissuasive.
Toutefois il est légitime de craindre une dérive de sa pratique
surtout s'il est mis en place dans le cadre d'un régime
non-démocratique voire totalitaire. Même dans un régime
démocratique la peine de mort peut être ordonnée sans que
l'on ait toutes les preuves de la culpabilité du condamné.
Combien de prévenus se retrouvent dans le couloir de la mort aux USA
alors que de sérieux doutes subsistent. Et il s'agit
généralement d'individus appartenant à des
minorités ethniques (afro-américain, latino-américains ou
encore d'origine arabes)72.
71
http://www.europe1.fr/Politique/Peine-de-mort-Le-Pen-veut-un-referendum-824557/
Marine Le Pen, Présidente du Front national,
déclarait le jeudi 15 septembre 2011au cours de l'émission Parole
directe sur «Je ferai sur ce sujet un référendum. Je
n'imagine pas d'imposer une décision telle que celle-là sans
demander son avis au peuple français. Ils choisiraient alors entre la
peine de mort et la perpétuité réelle, mais
réelle». Interrogée plusieurs fois sur sa position
personnelle, la présidente frontiste a répondu: «Moi je
suis avocat, je suis pour l'échelle des peines et je pense que la peine
de mort participe de cette échelle des peines».
72
http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2011/10/10/aux-etats-unis-la-peine-de-mort-est-une-continuation-de-la-segregation-raciale_1584856_3222.html
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 69
Arthur émet alors une idée qui pour le moins va
surprendre ses comparses de supprimer purement et simplement la peine de
mort.
Arthur : Bah j'vais vous l'dire, moi j'ai
pensé à un truc alors vous allez p'tet trouver ça con,
imaginez qu'on soit le seul pays, au monde, où on ne condamne plus...
à mort.
Lancelot et Léodagan le fixent.
Léodagan : Bon, écoutez Sire
j'suis désolé mais moi j'ai une diligence dans une heure, puis
faut qu'on ait bouclé hein. Puis j'ai pas trop le temps d'raconter des
conneries non plus.
Le lendemain Léodagan revient à la charge
proposant à Arthur un voyage afin de découvrir d'autres
méthodes d'exécution plus « festive ».
Léodagan : Mais vous avez tort de pas
vouloir régler l'problème hein si on veut rester le pays le plus
puissant il faut qu'on aie des exécutions spectaculaires ! Vous passerez
pas à côté !!
Arthur : Eh ben si figurez vous ! Parce que
j'vais décréter que l'île de Bretagne est la
première nation où la peine de mort n'existe plus voilà
!!
Léodagan a les yeux ronds comme des soucoupes.
L'argument avancé par Léodagan est assez
similaire à celui du Front national, à savoir la
démonstration de force rendant la peine de mort dissuasive. Cet argument
tend à démontrer que plus la répression est
impressionnante, plus elle est efficace.
L'argument principal en faveur de l'abolition est la lutte
contre la barbarie. En effet si l'on estime que le meurtre est un acte barbare
alors on ne peut pas faire subir à un assassin ce pourquoi on le
condamne. L'homme civilisé ne peut pas s'abaisser à la barbarie.
Arthur conclut l'épisode par une réflexion allant dans ce
sens.
Arthur Voix Off : Dans 5 où
10 ans, y a plus qu'les barbares qui le feront.
Cet épisode est un très bon exemple de la
volonté d'Astier de nous présenter Arthur comme un souverain
progressiste, ayant la volonté de rompre avec les pratiques barbares de
son époque même si évidemment le trait est fortement grossi
dans le cas de la peine capitale. Astier à travers d'Arthur donne
également son avis sur ce sujet en ne montrant aucune
ambiguïté à ce
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 70
sujet. Cela peut paraître désuet de se prononcer
en 2012 sur cette question mais les propositions du FN, notamment, et les
exemples que nous renvoie d'autres pays nous prouve que ce débat reste
hélas d'actualité.
g) La retraite.
Pour conclure, nous allons analyser l'épisode 99 de la
saison 1, La retraite73.
Perceval se demande au cours de cet épisode à
partir de quel âge il a le droit d'abandonner sa fonction de chevalier et
ainsi pouvoir gouter aux joies d'une vie paisible retiré dans sa maison
au Pays de Galles.
Perceval : Mais moi ça fait 10 ans
qu'j'retape ma cabane au Pays d'Galles, alors maintenant qu'elle tient debout,
j'aimerais bien pouvoir en profiter un peu !
Profiter de sa retraite. C'est aujourd'hui encore l'aspiration
de millions de travailleurs dans les pays où le droit à la
retraite existe. Nous pouvons compter deux éléments fondamentaux
pour que la retraite soit un moment agréable de la vie. Le premier est
la santé et le deuxième nécessite de
bénéficier de conditions matérielles décentes.
Actuellement de très nombreux travailleurs n'ont plus une santé
digne de ce nom bien avant l'âge de départ en retraite.
L'espérance de vie en bonne santé varie entre 59 ans et 74 ans
pour les anciens salariés. Bien évidemment les retraites de
travaux physiques ont une durée de vie plus réduite que ceux
exerçant une activité intellectuelle ou ce que l'on appelle plus
communément le travail de bureaux. La moyenne européenne est de
68 ans pour un homme et de 68 ans et 9 mois pour une femme. Or depuis le
début de la décennie 2000 la majorité des pays de l'Union
Européenne ont établi l'âge de la retraite à 65 ans
(hors régimes spéciaux). Perceval en 2012 ne pourrait donc
profiter de sa cabane que trois ans ! Les chiffres communiqués par le
ministère du travail sont encore plus alarmants74.
Perceval n'obtient pas de réponse précise du Roi
puisque ce cas de figure ne s'est encore jamais posé. Arthur pense
simplement qu'il s'agit d'un honneur d'être un chevalier et qu'il
faudrait mourir les armes à la main. Sans arrivée à de
telles extrémités, il est aujourd'hui considé-
73Kaamelott, Livre I, épisode 100,
La retraite.
74L'espérance de vie « en bonne
santé » rend compte non seulement de l'allongement de la
durée de vie mais aussi de cet allongement sans incapacité
majeure, liée aux maladies chroniques ou aux séquelles des
affections aiguës ou de traumatismes. En France, en 2005,
l'espérance de vie « en bonne santé » à la
naissance est estimée à 64,3 ans pour les femmes et à 62
ans pour les hommes, des scores comparables à ceux de pays voisins mais
un peu inférieurs à ceux observés dans les pays nordiques.
Pour les femmes et les hommes âgés de 65 ans, elle est
respectivement de 9,4 et 8,2 années. Entre 1995 et 2003,
l'espérance de vie en bonne santé à la naissance avait
augmenté d'un an et demi pour les femmes et d'une demi-année pour
les hommes, soit pour les femmes une amélioration plus rapide que celle
de la seule espérance de vie.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 71
ré que la retraite est un privilège et que son
âge légal doit être repoussée en fonction de
l'espérance de la vie, sans prendre en compte la
pénibilité ou des épisodes propres à la vie comme
une période de chômage ou de maternité.
Nous pourrions analyser l'intégralité des
épisodes tant cette série est riche de procédés
anachroniques et ce, dans tous les domaines qu'ils s'agissent des arts, des
questions de société, des moeurs, de la politique, de l'art
militaire, etc. La série regorge d'anachronismes plus ou moins grossiers
mais qui n'ont pas toujours la même utilité. Parfois il s'agit
simplement de références à des oeuvres ayant
inspirés AA comme la présence du sabre laser de la saga Star
Wars. Mais bien souvent il s'agit d'astuces scénaristiques afin
d'introduire un personnage, un fait ou un objet n'appartenant pas à la
légende arthurienne. L'un des exemples les plus parlants est la
présence d'Atttila, Roi des Huns (né vers 395 - mort en 453).
L'anachronisme est toutefois un terme inexacte puisque la LA
est elle-même extrêmement floue d'un point de vue chronologique.
Elle s'étire sur plusieurs siècles, les différentes
versions se contredisent, se complètent et les historiens s'interrogent
sur des faits n'ayant pour la grande majorité jamais existé.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 72
Conclusion
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 73
A partir de ce travail sur les références, la
stratégie des chaines de télévisions ou encore
l'étude de l'anachronisme nous pouvons percevoir plusieurs
éléments nous permettant d'affirmer que Kaamelott n'est
pas une simple shortcom commandé par une chaine de
télévision pour servir de locomotive au prime time mais
une oeuvre de fictions beaucoup plus complexe et beaucoup plus riches que les
autres productions françaises.
Il nous faudrait évidemment davantage de temps pour
pouvoir répondre pleinement à cette question en analysant bien
d'autres éléments tels que l'image par exemple, la
réception, en réalisant une comparaison avec les autres shortcom
et bien d'autres encore. Nous avons pu constater par moment que les shortcom
avait la même base (format, genre, moyen, diffuseur) et que la
comparaison peut avoir un avoir un réel intérêt.
Si nous nous en tenons au travail réalisé nous
pouvons tout de même en tirer quelques conclusions
La première est que bien que l'action se situe au Moyen
Age, la série n'oublie pas pour autant d'aborder des
problématiques contemporaines. L'auteur s'emploie à traiter de
sujets universels et à priori intemporels, tel que l'amour, la
séduction, le pouvoir, la mort, l'ivresse, la trahison... mais
également la torture, la peine de mort, la retraite ou encore
l'adolescence. Nous pourrions décréter un peu promptement que ces
questions ont été débattues de tous temps. Il est vrai que
la torture n'a pas été conçue par l'armée
américaine ou française au cours du 21ème siècle et
que la cruauté est sans doute aussi vieille que l'Homme. Mais sa remise
en cause est beaucoup plus récente. Désormais il faut la
justifier comme un mal nécessaire. Il en est de même pour
l'adolescence, étant à la base une transformation physiologique ;
nous pouvons donc affirmer qu'il y a toujours eu des adolescents. Cependant
Kaamelott ne s'intéresse pas à cet aspect des choses,
d'ailleurs Yvain ou Gauvain ne parle jamais de sexualité, mais bien
à l'adolescent tel que nous le connaissons depuis environ un
demi-siècle. Soit un palier intermédiaire entre l'enfance et
l'âge adulte avec ses propres codes, ses propres envie, ses propres
aspirations mais également ses angoisses et ses tourments. Nous
pourrions refaire cette démonstration pour les autres sujets (le travail
a toujours existé alors nous pouvons juger qu'une certaine forme de code
ou législation lui a toujours été lié) cependant
l'essentiel à retenir est que Kaamelott se place toujours du point de
vue contemporain pour traiter de ces sujets.
La visée dAA en introduisant ses sujets contemporains
est uniquement artistique. Il n'y a aucun courage en 2006 en tant qu'auteur
français à dénoncer la peine de mort, prendre position sur
la question de la pédagogie, revendiquer la nécessité du
code du travail.
Cependant A.A prétend parfois aller plus loin que la
recherche du rire et créer un anticonformisme évident à
ses yeux. Dans le dossier de presse de son long métrage David
et
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 74
Madame Hansen75 nous pouvons lire ceci :
« Ce qui m'anime depuis mes débuts est une colère contre la
conformité. Je suis un peu connu grâce à une série
très personnelle, sur laquelle je n'ai jamais triché et lorsque
l'on regarde Kaamelott dans son intégralité, je m'y
livre beaucoup. Arthur arrive toujours dans un pays où il combat des
règles comme la torture ou l'esclavage. Il est progressiste dans un
monde barbare et c'est pour cela qu'il s'en prend plein la gueule ».
Astier a déclaré dans plusieurs entretiens qu'il
ne votait pas et qu'il ne souhaitait pas traiter de sujets politiques. Le Roi
Arthur d'Astier n'est donc pas un Tintin du 21ème
siècle. En effet, Hergé, le père du célèbre
reporter Belge pour les enfants « de 7 à 77 ans » se servait
des aventures de son personnage pour diffuser des messages antisémites,
colonialistes ou encore anticommunistes76.
Astier se contente d'enfoncer des portes ouvertes à
notre époque, de réaffirmer de grands principes, de se placer du
bon coté de la barrière mais il serait exagéré de
parler d'épisodes engagés. Même un sujet d'actualité
comme le mariage homosexuel qui aurait pu être abordé par exemple
dans l'épisode Compagnons de chambrée, se contente
d'évoquer la position de l'Eglise sur l'homosexualité. Astier
aurait pu aussi en profiter par parler du mariage des prêtres mais il
n'en fera rien.
L'objectif de ses épisodes est donc uniquement de
divertir le téléspectateur en l'associant à des
problématiques où il se sentira davantage impliqué que
s'il s'agissait d'une question concernant uniquement le Moyen Age.
Le Moyen Age traité de façon contemporaine, par
son langage par ses sujets, par ses références est une des
raisons qui nous permet d'affirmer que Kaamelott est une série
française se démarquant des autres productions. Encore une fois
c'est une façon parmi tant d'autres de distinguer la série. Nous
avons également évoqué son changement de format. Nous
pouvons également citer la tournure dramatique que la série prend
à la fin de la saison IV. Des personnages obscurs, apparaissent ; Arthur
n'est plus roi ; la dépression, la mort, la mélancolie, la
trahison, la vengeance occupent une place prépondérante dans les
saisons V et VI. Cependant les personnages gardent le ton qui fait le
succès de la série avec un rythme et des répliques que
l'on croirait sorties d'un film de Michel Audiard. Ce qui permet ces
changements c'est le succès de la série qui a permis à
Astier d'obtenir un budget bien supérieur à celui attribué
pour les premières saisons. Nous pouvons en conclure que les moyens
changent, mais l'esprit reste.
75
http://astierandco.fr/, dossier de
presse de David et Madame Hansen 76Maxime Benoit-Jeannin, Les
guerres d'Hergé, édition Aden, Bruxelles 2007
Astier n'est pas un homme de télévision. Le
théâtre est son terrain de jeu d'origine et Kaamelott est
né au cinéma grâce au court métrage Dies Irae.
Kaamelott existe également en bande dessinée et connaitra
une suite au cinéma d'ici 2015 avec une trilogie, ce qui n'est pas sans
rappeler encore une fois les sagas Star Wars et le Seigneur des
Anneaux. Cette trilogie apportera encore une dimension
supplémentaire à « la saga Kaamelott » et la
fera entrer définitivement dans l'ère des films-mondes
qui donnent lieu à des formes étendues de consommation de
produits dérivés et créent de véritables univers
désormais entretenus via Internet »77.
Cette multiplicité de medium et de media
utilisés par Astier pour donner vie à sa version de la LA la
démarque encore davantage des autres productions
télévisées et lui confère donc, en partie, son
originalité.
Pour conforter l'hypothèse de l'originalité de
Kaamelott il existe de nombreuses pistes mais la plus pertinente
semble celle de l'analyse filmique. En effet nous venons de voir sur ce travail
de première année et davantage sur celui-ci que Kaamelott
ne ressemblait à aucune autre série française par son
écriture. Il faudrait donc analyser, et cela peut être l'objet
d'un projet futur de recherche, les spécificités de Kaamelott
d'un point de vue filmique.
Il peut s'agir de la temporalité, la durée
fictive des intrigues (un épisode peut évoquer un fait durant un
jour comme une heure) de l'utilisation des plans, du son, etc.
Cette nouvelle approche de la série nous permettrait de
l'analyser plus précisément qu'actuellement car bien que
pertinente les théories de Genette ne sont pas réellement
adaptées au genre télévisuel C'est également pour
cette raison que nous sommes ici en présence d'une analyse portant
uniquement sur le texte et non sur le son et l'image.
Nous le voyons donc, Kaamelott à un
véritable intérêt épistémologique et peut
encore faire l'objet de très nombreux travaux de recherches et ce dans
plusieurs disciplines.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 75
77 Sadoul (Georges), L'histoire du cinéma
mondial, Flammarion, Paris, 1999
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 76
Bibliographies
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 77
Livres
ASTIER, Alexandre, Kaamelott, Livre 1, Texte
intégral, Télémaque, 2009
Kaamelott : analyse de la série
humoristique
ASTIER, Alexandre, Kaamelott, Livre 2, Texte
intégral, Télémaque, 2009
ASTIER, Alexandre, Kaamelott, Livre 3, Texte
intégral, Télémaque, 2010
CHRETIEN DE TROYES, Lancelot ou Le chevalier de la
charrette, Le livre de poche, 1996
CHRETIEN DE TROYES, Romans de la Table Ronde, Folio
classique, 2010
BORON (de), Robert, Merlin. Roman du XIIIe
siècle, éd. Alexandre Micha, Genève, Droz,
T.L.F., 1979, rééd. 2000.
BORON (de), Robert, Le Roman de l'Estoire dou Graal,
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pion, C.F.M.A., 1927.
BORON (de), Robert, (cycle attribué à), Le
Roman du Graal, éd. Bernard Cerquiglini, Paris,
10/18 « Bibliothèque médiévale
», 1981.
FRAPPIER, Jean, Étude sur Yvain ou le Chevalier au
Lion de Chrétien de Troyes [1952],
Paris, SEDES, 1969.
AMOSSY, Ruth, L'argumentation dans le discours,
Nathan Université, 2000
DE SAINT MAURICE, Thibaud, Philosophie en série
saison 2, Ellipses Marketing 2010
FERLAMPIN-ACHER, Christine et HÜE, Denis, Mythes et
réalités, Histoire du Roi Arthur,
Edition OUEST-France, 2009
GENETTE, Gérard, Palimpsestes, La
littérature au second degré, Éditions du Seuil,
collection Essais, Paris, 1982,
JOST, François, 50 fiches pour comprendre les
médias, éd. Bréal, 2012
LE NABOUR, Eric, Kaamelott, Tome 1 : Au coeur du Moyen
Âge, Perrin, 2007
LE NABOUR, Eric, Kaamelott, Tome II : À la table du
Roi Arthur, Perrin, 2007
MAINGUENEAU, Dominique, Analyser les textes de
communication, Armand Colin, 2007
NOGUEZ, Dominique, L'arc-en-ciel des humours, Le
Livre de Poche, « biblio/essais»
SADOUL, Georges, L'histoire du cinéma mondial,
Flammarion, Paris, 1999
SANGSUE, Daniel, La parodie, coll. Contours
Littéraires, p17, Hachette, 1994
YAGUELLO, Marina, Alice au pays du langage, Seuil (1
mars 1981)
DEROIDE , Ioanis , Les séries TV, mondes d'hier et
d'aujourd'hui, Ellipses, 2011.
BOURDIEU, Pierre, la distinction, coll. Le sens
commun, éd. de Minuit, Paris, 1979
DVD
ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre I - Coffret 3 DVD,
28 septembre 2005, M6 Vidéo
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 78
ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre II - Coffret 3 DVD,
14 juin 2006, M6 Vidéo
ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre III - Coffret 3
DVD, 8 novembre 2006, M6 Vidéo ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre
IV - Coffret 3 DVD, 26 septembre 2007, M6 Vidéo ASTIER, Alexandre,
Kaamelott : Livre V - Coffret 4 DVD, 19 novembre 2008, Warner Home
Video
ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre VI - Coffret 4 DVD,
25 novembre 2009, Warner Home Video
CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte 1 : les
moeurs et les femmes, Livre II, 28 septembre 2005, M6
Vidéo
CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte II . la
Magie et l'Eglise, Livre III, 8 novembre 2006, M6 Vidéo
CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte III .
l'art de la guerre,Livre IV, 26 septembre 2007, M6
Vidéo
CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte IV :
géopolitique du royaume, 19 novembre 2008, Warner Home Video
ABIKER, A. BESSN et F. PLET-NICOLAS dir., Le Moyen Âge en
Jeu, DVD-ROM inclus, S. Pessac, Presses Universitaires de Bordeaux,
Eidôlon n°86, décembre 2009 :
WEBOGRAPHIE
http://www.strategies.fr/actualites/medias/147151W/le-marketing-et-l-art-ne-se-melangentpas-bien.html
http://www.linternaute.com/video/202457/l-integralite-du-chat-avec-alexandre-astier/
http://lecheminduphilosophe.wordpress.com/2009/05/28/le-genre-le-public-et-le-privecritique-feministe-de-la-dichotomie-public-prive-et-recours-a-la-notion-de-genre/
http://www.fabula.org/atelier.php?Les_relations_transtextuelles_selon_G._Genette
http://medievales.revues.org/6173
Mark Adderley et Alban Gautier, « Les origines de la légende
arthurienne : six théories », Médiévales [En
ligne], 59 | automne 2010, mis en ligne le 20 mars 2013, Consulté le 23
juillet 2012.
http://www.cairn.info/revue-reseaux-2011-1-page-137.htm#no11
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 79
Table des matières
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 80
Remerciements 2
Bilan de recherche 6
Kaamelott : Du programme court humoristique au format
américain dramatique
10
1. Le phénomène des programmes courts humoristiques
11
2. La télévision, objet culturel 13
3. Les séries, un atout majeur pour la
télévision du XXIème siècle. 14
4. M6 et les programmes courts. 15
5. Evolution de Kamelott. 17
6. La distribution et ses spécificités. 18
a) Livre I à IV : 18
b) Livre V et VI 19
7. L'intrigue. 20
8. La communauté de fans. 23
a) Son pouvoir d'influence. 24
b) Hypnoweb. 24
Kaamelott : 26
De la Légende Arthurienne à Michel Audiard, une
série construite sur plusieurs
niveaux d'intertextualité. 26
1. Les origines 27
2. Le formalisme russe. 29
3. La transtextualité de Genette. 30
4.Le pastiche 31
Les traces de contemporanéité dans Kaamelott,
une astuce scénaristique pour
évoquer le siècle du téléspectateur.
45
1. Présentation du corpus 46
2. Contextualisation des thèmes analysés. 47
3. Analyse des épisodes. 49
a) Arthur et la Question 49
b) Compagnons de Chambrée. 53
c) Le cas Yvain. 55
d) Le Pédagogue. 60
e) Le code de chevalerie. 62
f) Létal. 67
g) La retraite. 70
Conclusion 72
Bibliographies 76
Livres 77
DVD 77
WEBOGRAPHIE 78
Annexe 1
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 81
Dans la chambre royale...
Guenièvre (essaie d'engager la
conversation alors qu'Arthur lit) : Ah tiens aujourd'hui j'ai fait
taillé le rosier de l'arrière cour parce qu'il en avait
drôlement b'soin !
Arthur se demande ce qu'elle fait.
Guenièvre : Et vous, vous m'racontez pas
votre petite journée ?
Arthur (peu convaincant) : Ah ben !
Faut l'temps d'encaisser la votre déjà ! Pas toutes les
émotions d'un coup !
A la table ronde...
Galessin : Sire, moi je cherche juste à
comprendre...
Calogrenant : On réussi à mettre
la main sur le voleur de bétail, il refuse de donner l'nom d'son
complice qu'est c'qu'on attend ? Arthur : Qu'est c'qu'on
attend pour quoi ? Il veut toujours pas parler ?
Blaise : Heu... Toujours pas non... Il dit qu'il
nous emmerde. Calogrenant : En plus !
Galessin : On passe pour quoi j'vous l'demande !
Bohort : Mais qu'est c'que vous voulez qu'on y fasse ?
Calogrenant : C'est pourtant pas les solutions qui manquent !
Léodagan : C'est vrai qu'c'est curieux cette manie de
pas vouloir torturer ! Hum... Ca vient d'quoi ça ?
Arthur : Ca vient d'chez moi y a pas d'tortures,
voilà. Bohort : C'est très bien comme ça
!
Galessin : Ah ben oui c'est très bien !
C'est moderne. Calogrenant : En attendant l'complice il cavale
toujours !
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 82
Léodagan : Vous savez la torture c'est
pas c'que vous croyez ! Quand c'est fait par un pro y a pas une goutte de sang
! Calogrenant : Le simple fait de déballer les outils,
le mec il craque !
Arthur : Et si y craque pas ?
Léodagan : Alors là heu... C'est
la boucherie...
Dans une autre salle...
Venec (fait une démonstration de
ses produits) : Vous mettez le pied d'votre gars là-dedans, vous
fermez bien, vous tournez la vis jusqu'à que vous entendiez l'bruit
d'l'os.
Bohort : J'ai chaud... Je me sens pas
très bien...
Léodagan : Oh, ça c'est du
classique, hein, ça on en trouve à peu près partout.
Venec : Bon. Celui-là c'est
l'modèle adulte mais on a toutes les tailles.
Arthur : Mais qui c'est qui invente ces trucs
? Vous les connaissez les mecs vous ?
Léodagan : Ca ça a toujours plus
ou moins existé...
Venec : De temps en temps on tombe sur un
farfelu qui croit qu'il a inventé l'eau chaude, mais l'plus souvent
c'est une adaptation d'un modèle existant ! (prend un autre
objet) Ca par exemple c'est simple. Pour rester sur l'thème du
pied, vous dites à votre gars de bien marché au milieu d'la
pointe (sort un marteau énorme) et tac un coup ferme sur
l'dessus.
Léodagan : Pas mal, ça.
Bohort : C'est horrible cette chaleur, j'suis en
sudation, là !
Léodagan : Et l'autre là vous
avez la trappe là en dessous pou mettre des braises, ou pas ?
Venec : Non ça c'est le modèle au
dessus, il est un poil plus cher. Léodagan :
Ouais...
Arthur : Mais... Attendez, l'mec qui est en
train d'se faire broyez l'pied qu'est c'que ça peut bien lui foutre
qu'on lui crame en plus ?
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 83
Léodagan : Non mais c'est pour la mise
en scène un peu.
Venec : Tout c'qui est feu ça
impressionne bien !
Bohort : J'ai l'impression que j'fais des
palpitations...
Léodagan : Mais sinon vous avez rien
d'plus festif, là, de...
Venec : Si vous aimez j'ai ça
(sort une pince immense) C'est pour
arracher les noix.
Bohort (pas très
rassurés) : Les noix ? Les fruits.
Venec : Ah non. Les noix, les noix...
Grand silence...
Plus tard...
Venec : Ca c'est ce que j'appelle la gamme de
voyage : vous êtes en déplacement, vous avez pas envie d'vous
encombrez avec du barba, vous avez ça !
Léodagan : Et ça c'est pour ?
Venec : Alors là vous sectionnez
l'doigt au niveau de la première phalange.
Arthur : Ouais, c'est déjà moins
vicelard...
Bohort : Moins vicelard heu...
Arthur : `Fin je veux dire comparé au
reste, quoi.
Venec : Ca c'est du progressif. Vous coupez
une phalange, vous en coupez une deuxième, si l'gars cause toujours pas
revenez sur le premier doigt vous lui bouffez une phalange en plus (sort un
papier) non mais d'toute façon y a un fascicule livré avec, c'est
tout expliqué.
Léodagan : Ca on peut toujours en
prendre quatre ou cinq, heu, ça s'ra jamais perdu ça. Hein ?
Venec : Voilà, j'crois qu'on a fait
l'tour (sort un espèce de sécateur) Oh, sinon y a
ça aussi, c'est l'bel outil.
Arthur : Qu'est c'qu'on coupe avec ça
?
Venec : Ah c'qu'on veut. Mais enfin... C'est
plutôt pour tout ce qui est génital.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 84
Bohort : Ca... Ca vous ennuie si j'vomis ?
Le soir... Arthur parle enfin avec Guenièvre... Il
tient une cage entre les doigts.
Arthur : Vous mettez ce bout là dans
un orifice.
Guenièvre (choquée) :
Un orifice ???
Arthur : Oui, c'est au choix, enfin bon c'est
vrai que classiquement c'est plutôt le.... Bref. Vous prenez l'aiguille
et vous piquez le cul du rat. Bon là c'est un rat empaillé mais
c'est pour vous montrer. Le rat rentre dans l'orifice et il bouffe tout.
(Guenièvre est dégoutée et Arthur ravit) Hein ? Oui, oui
ça ? Hein ? Pfiou (voix off) Vous avez raison c'est plus sympa
quand on s'raconte nos journées !
Annexe 2
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 85
Quelque part... Demetra est en train de finir d'habiller
le roi quand le Répurgateur arrive.
Répurgateur : Ah Sire !
Arthur : Tiens Répurgateur qu'est c'que
vous faites là ? Répurgateur : Ah ben j'vous
cherchais...
Demetra (souriante) : Bonjour.
Répurgateur (effrayé) :
Ah m'adresse pas la parole ! Hérétique ! Démon !
Il lui crache dessus. Sous le regard effaré du roi
et de sa maitresse.
Répurgateur (au roi) :
Excusez-moi. Pour moi les femmes, j'aime pas ça, c'est d'la saloperie.
(rit doucement) Vous me suivez là ? J'vous attends...
Arthur a du mal à en croire ses yeux.
GENERIQUE
Dans une salle...
Arthur : Alors vous vouliez m'voir ?
Répurgateur : Oui, tout à fait,
heu... D'ailleurs au passage je vous remercie, hein, vous êtes toujours
à l'écoute d'autrui, heu... Vraiment quand on... quand veut
l'voir on peut l'voir (Père Blaise confirme, l'air
légèrement résigné mais ne dit mot) C'est...
C'est... C'est extraordinaire vous êtes vraiment un roi très,
très à l'écoute et ça c'est extraordinaire, hein
!
Arthur n'a écouté qu'à moitié
comprenant bien que le Répurgateur ne fait pas tout ces compliments
gratuitement.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 86
Arthur : D'accord. Alors qu'est ce que c'est que
ce fatras ? Répurgateur : Alors c'est un heu... C'est
une loi que je voulais soumettre à votre ratification, une loi toute
simple toute bête, voilà, faut juste signer, hein.
Blaise : Et le roi vous avait donné un
accord de principe, non ? Arthur : Ah ben non. Justement. J'me
souviens pas d'ça. Répurgateur : Ah oui, non,
non... Mais c'est bon ça... J'vais pas vous ennuyer avec des
réunions, des conférences, des blablas, hein ? D'autant que vous
avez autre chose à faire vous travaillez énormément et
puis heu... Et puis heu.. Le public apprécie, je crois, cette attitude
puisqu'il est vraiment... Le peuple vous acclame !
Arthur (pendant que le Répurgateur
parle -dans la partie soulignée) : Oui, oui on avance là.
(quand le Répurgateur a enfin fini) Oui, alors par rapport
à... La loi.
Répurgateur : Alors c'est heu... Ben
c'est heu... Tout à... Tout à était
prémâché, hein, c'est bon vous n'avez, j'vous dis que...
qu'à signer en bas à droite, voilà, comme ça.
Arthur (s'apprête à signer)
: Là ?
Répurgateur : Oui, ici là comme
ça. Parfait. Pardon... ici, hein. Arthur (ne signe
pas) : Oui à ce... Non, oui d'accord. Simplement remémorez
moi un p'tit peu de quoi il s'agit, à peu près.
Répurgateur : Pour la loi ?
Arthur : Oui pour la loi.
Répurgateur : C'est une loi heu... Qui
interdit le... La polygamie... (essaie de sourire)
Arthur balance sa plume et croise les bras.
Maintes explications plus tard...
Arthur : Donc si j'comprends bien on pourrait
plus avoir plusieurs femmes en même temps ?
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 87
Répurgateur : Heu... Non on pourrait
plus avoir plusieurs femmes.
Il sourit.
Arthur : C'est ça. Ce s'rait juste une
à la fois.
Répurgateur : Ah non. Juste une.
Arthur (réfléchit) :
Juste... Comment ça juste une ? J'comprend rien...
Répurgateur : Vous comprenez rien...
Bon heu... Vous par exemple...
Arthur (le coupe) : Non pas moi !
Répurgateur : Ah bon ? Bon... Alors
votre heu... (montre Lancelot) Vous par exemple.
Lancelot : Ah non ! Non, non. Moi ça
n'a rien avoir ! (fier) Moi j'ai juré de n'donner mon âme
qu'au véritable amour dont la pureté n'aurait d'égal...
Arthur (le coupe) : Voilà. Ce
non lui c'est chiant. C'est heu... C'est spécial lui.
Répurgateur : Bon beh alors vous par
exemple...
Arthur : Non pas moi ! (montre Blaise)
Ben prenez lui.
Blaise (se redresse, regarde Lancelot
puis le roi) : Moi ? Mais pfff...
Arthur : Oui non c'est vrai non... Bon beh moi
alors...
Répurgateur : Bon heu vous par exemple
heu... Votre femme c'est Guenièvre, notre reine bien aimée ?
Arthur : Oui et alors ?
Répurgateur : Bon. Alors vous
êtes d'accord que de temps en temps, hein, vous avez eu des p'tites
histoires, HEIN ? Hein vous allez pas l'nier ! Ca, hein, des p'tites histoires
avec des p'tites paysannes (Père Blaise parait amusé -comme
presque toujours depuis le début- alors que Lancelot a l'air
ennuyé) hein, qu'était toujours pas très propres,
hein, puis des p'tites jeunes filles qu'étaient dans votre lit pour des
raisons, hein, pas bien claires, hein, c'est pas joli joli, hein, c'est moche,
hein ? Bon d'accord.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 88
Bon. Alors votre femme c'est Guenièvre notre reine bien
aimée donc heu... Vous n'êtes qu'avec Guenièvre un point
final et c'est tout. Voilà, vous signez là, pardon.
Arthur (la pilule a du mal à
passer) : Je... Je suis qu'avec Guenièvre et... ?
Répurgateur : Et c'est tout. Un point
c'est tout. Heu... Point final. Vous ne... Vous n' allez qu'avec heu...
Guenièvre notre reine bien aimée qu'est... Qu'est notre reine
bien aimée. Vous signez, un point final, c'est tout. Pardon.
Arthur (faiblement) : Je vais....
(s'éclaircit la voix mais ne parle pas d'un ton plus assuré)
Je vais réfléchir un peu encore. Répurgateur : Mais
Sire....
Arthur : Non, non, non, non, non, non. Non
mais pas d'problème par contre c'est très
intéressant...
Lancelot (plutôt conquit-de toute
façon la loi ne le concerne pas vraiment) : Moi j'avais jamais
entendu parler d'ça mais heu... Pourquoi pas.
Blaise : Non c'est... c'est moderne c'est...
Arthur : C'est ça ! C'est
intéressant mais faut faire attention à c'que ça soit pas
TROP moderne, voilà. (Grand silence- Le roi baisse la main du
Répurgateur qui tient la plume pour signer la loi) Ca posez le,
ça posez le.
Enorme silence.
Dans la chambre du roi...
Guenièvre : Moi je dis que vous devriez
vous débarrassez de c'type avant qu'il ne répande ses
idées ridicules dans tout l'pays ! Arthur : Puis de
toute façon à force d'gonfler tout l'monde un d'ces quatre on va
le retrouver pendu à un arbre et il demandera pas d'où ça
vient !
Guenièvre : Une seule femme ! Quelle
idée !!
Arthur : Mais qu'est c'qui faut pas entendre
comme connerie alors !
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 89
Guenièvre : Et puis vous vous ennuierez
avec une seule femme vous, non ?
Arthur : Oh putain ouais !
Grand silence...
Guenièvre : Par contre il y a une chose
à laquelle on pourrait réfléchir... C'est à
autoriser la polygamie pour les femmes.
Arthur (tout sourire) : Non !
Guenièvre : Pourquoi non ? Arthur
(ne s'énerve pas) : Ah non ! Attendez ! Mais vous vous
rendez compte ! Après ça...
Guenièvre ne comprend pas très bien. Dans une
salle...
Répurgateur : Bon allez vous signez la
loi, s'il vous plaît... Arthur (crie un peu) :
Non ! J'vous ai dit. J'la signe pas ! Répurgateur : Bon
attendez. Heu.... Vous signez la loi et puis de temps en temps vous pouvez
allez voir toutes les jeunes femmes que vous vouliez comme avant.
Arthur : Allez y, ouais, continuez.
Répurgateur : Et puis heu... Vous v'nez
m'voir en confession. Arthur : En confession ?
Répurgateur (voix off) : Oui,
j'vous expliquerez. Ça prend 5 minutes et après on est tranquille
on peut faire c'qu'on veut.
Annexe 3
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 90
Guenièvre et Séli sont dans la salle
à manger.
Séli : Vous avez fait vos valises pour
demain ?
Guenièvre : Oui mère, ça
fait trois fois que vous me le demandez !
Séli : Vous avez fait préparer
votre chambre pour l'Evèque
Boniface ?
Guenièvre (la bouche pleine)
: Ca m'agace un peu de devoir
donner ma chambre à un Evèque...
Séli : Vous vous en foutez vous
êtes pas là.
Guenièvre : Et si Arthur revient plus
tôt que prévu ? Il va pas
dormir avec l'Evèque quand même !
Séli : Vous vous en foutez vous
êtes pas là !
GENERIQUE
Arthur arrive dans sa chambre l'air érinté, et
s'assoit sur son lit sans regarder derrière lui.
Arthur : J'ai pris la route juste après
le banquet, j'me sentais pas d'passer encore la nuit là-bas j'en avais
marre... Vous êtes là vous finalement ? J'croyais qu'vous passiez
trois jours en Carmélide ? L'Evèque se redresse dans le lit,
avec sa coiffe et ses chapelets. Evèque : Plait-il
??
Arthur (se relevant) : Mais qui
êtes-vous ?! Qu'est-ce que vous foutez là ?!
Evèque : Mais je vous rétorque la
même question mon p'tit père !! C'est à quel sujet ??
Arthur : Au sujet qu'vous aller vite fait
décaniller d'ici où j'appelle la garde !
Evèque : Ne vous donnez pas cette peine,
j'allais justement le faire. (criant) A moi !! A l'assassin !!
Arthur : C'est pas possible d'entendre ça
! Mais qui êtes vous ?!
Evèque : Je suis Monseigneur Boniface,
voyou ! (tend la main) Evèque de Germanie.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 91
Arthur : Ah... Ah c'est vous
l'Evèque... Ben j'suis Arthur, Roi des Bretons.
Evèque : Oh ! Oh Sire...
Enchanté... (lui fait le signe de croix) Que Dieu vous...
bénisse...
Plus tard...
Arthur : Bon je reconnais que c'était
pas très futé d'vous avoir donné ma chambre.
Evèque : C'est une idée originale
!
Arthur : C'est une idée d'ma femme
surtout. Elle en a dix par jour des comme ça.
Evèque : Oui mais quand vous dites que
c'est votre chambre, c'est votre chambre fixe ou bien c'est une chambre... une
chambre comme ça quoi...
Arthur : J'sais pas quoi vous dire moi, c'est ma
chambre.
Evèque : Ah oui ! Ah oui donc c'est
quelque chose qu'est quand même très admis, c'est bien bien...
carré quoi...
Arthur : Ben c'est à dire que comme
j'suis Roi, j'ai une chambre attitrée, voyez... J'tape pas aux portes
tous les soirs pour voir si on peut pas m'débarasser un coin.
Evèque : Mais voui. Mais alors figurez
vous j'me demandais justement... parce que vous savez ça m'fait penser
à quelque chose qu'on appelle, je sais pas si vous connaissez, qu'on
appelle couramment une chambre d'amis, voyez.
Arthur : Oui, nan mais on en a des chambres
d'amis nous aussi, mais y'a des amis dedans, voilà.
Evèque : Cela dit, c'est assez
innatendu pour moi de m'retrouver dans une chambre d'amis parce que pour une
visite protocolaire j'aurais imaginé quelque chose de plus... de...
Remarquez celle ci est cossue, hein !
Arthur : Oui, parce que c'est pas une chambre
d'amis, celle là. On en a des chambres un peu classes pour le gratin,
mais là c'est tout plein.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 92
Evèque : Aah oui ! Ah d'accord, ah
oui, oui oui, alors là elle est un peu chic hein... Et... pour les repas
on fait comment ?
Arthur : Nan mais alors, comment on fait
là, nan parce que nan là j'suis désolé mais j'ai 8
heures de cheval dans les pattes faut un peu qu'je... nan voyez...
Evèque : Oh si j'comprend ! Non mais
j'ai toujours l'habitude de prendre tout le lit alors... (lui fait de la
place) vous voulez un... (lui tend des chapelets)
Plus tard...
Ils sont tous les deux dans le lits, Arthur semble sur le
point de s'endormir.
Evèque : Ah je... j'voulez vous
demander, et c'est un petit peu l'objet de ma visite ici, que pense le peuple
breton du concept du Dieu unique, ça les inquiètes ça
ou...
Arthur : Le Dieu unique je sais pas mais moi
qui couche avec un Evèque ça peut les inquiéter oui.
Evèque : Nan parce que bon, la
chétienté tout ça, c'est bon, c'est assez jeune faut que
l'idée fasse son chemin... Mais je m'demandais justement si on pouvait
pas faire dans un premier temps cohabiter l'idée du Dieu unique avec
l'idée de vos Dieux anciens à vous. Arthur :
Voilà, et d'ailleurs éventuellement c'qu'on pourrait faire, c'est
parler de tout ça demain !
Evèque : Bien sur. Mais je prends un
exemple tout a fait au hasard, est-ce que... est-ce que l'idée de
l'homosexualité c'est quelque chose de répandu chez vous c'est
heu...
Arthur : J'sais pas, pas plus qu'ailleurs
j'suppose.
Evèque : Ah nan parce que nous figurez
vous, nous on s'tate hein, pour savoir si on doit l'autoriser ou
l'interdir...
Arthur : L'interdir ? Pourquoi faire ?
Evèque : (criant) Eh ben
voilà ! Eh ben c'est exactement c'que j'leur dit ! Voilà ! Moi je
fais partie de ceux qui se battent pour qu'on l'autorise, et même qu'on
l'encourage ! Voilà !!
GENERIQUE
L'évêque est seul dans le lit.
Evèque : Non mais c'est très
génant de de de vous voir dormir par terre, c'est votre chambre tout de
même !
La voix d'Arthur se fait entendre.
Arthur : Impeccable, vous inquiétez pas
j'vais dormir comme un loir !
Evèque : Mais si quelqu'un entre
qu'est-ce qu'il va penser ?!
Arthur : Justement si quelqu'un entre il pensera
moins de trucs si j'suis par terre !
Evèque : Bon alors qu'est-ce que j'fais,
j'éteins ?
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 93
Arthur voix off : Heu nan, laisser
allumé j'préfère.
Annexe 4
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 94
Arthur et Lancelot sont en armure dans un campement, au
milieu de la forêt.
Lancelot (regarde une carte) : Moi
j'essaie de trouver une solution...
Arthur : Parce que vous appellez ça une
solution vous ?
Lancelot : J'suis désolé, j'peux
pas en même temps commander à droite et à gauche, il faut
que je délègue les lanciers à Perceval ! Arthur
: Oh non mais aller j'vais l'faire laissez tomber.
Lancelot : Enfin vous allez pas tout faire !
C'est un d'vos hommes quand même ! (crie) Seigneur Perceval,
venez on a besoin de vous !
Voix de Perceval : J'peux pas j'surveille le
stock de pain !!
Arthur regarde Lancelot l'air de dire "j'vous l'avais
dit".
GENERIQUE
Toujours dans la forêt.
Lancelot : Le Seigneur Calogrenant est parti il
y a deux jours pour placer son armée en amon de la rivière.
Perceval : Ah, c'est pour ça qu'il est
plus là.
Lancelot : Bah oui, on l'a envoyé se
positionner en avance...
Perceval : Ah bon, moi j'croyais qu'il
était rentré chez lui alors j'me disais "il s'fait pas chier
quand même" !
Arthur : Bref... Alors nous quand on va arriver
dans la plaine, le Seigneur Calogrenant pourra lancer une attaque surprise par
la droite.
Perceval : Plutôt dans le sens du courant
de la rivière alors ? Arthur : Plut... mmoui nan
ça... j'sais pas vous dire ça...
Lancelot : Et en dernier recours le Seigneur
Léodagan se tient prêt avec 150 cavaliers qui arriveraient par la
gauche.
Perceval : Par la gauche ?
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 95
Lancelot : Par la gauche, oui...
Perceval : Nan mais par rapport au courant de la
rivière ?
Lancelot : Eh ben... ben j'en sais rien
moi...
Arthur : Mais qu'est-ce que vous venez emmerder
le monde avec votre rivière, vous ?
Perceval : Nan mais bon la gauche la droite,
c'est bien gentil, mais moi il m'faut du concret !
Plus tard...
Arthur : Mais c'est pas compliqué bon
Dieu, y'a Calogrenant à
droite Léodagan à gauche et nous on arrive par le
milieu !
Lancelot : C'est bon jusque là ?!
Perceval : Attendez moi si j'me souviens bien du
coin y'a la rivière
qui passe en travers...
Arthur (s'énerve) : Ah mais
merde avec votre rivière !!
Perceval : C'est un point de repère comme
un autre...
Lancelot (s'énerve aussi) : Mais
bon Dieu y'a pas besoin d'points
d'repère puisque les envahisseurs vont nous attaquer de
face !
Perceval : Nan mais de face ça va, c'est
le reste qui va pas.
Arthur (crie) : Mais quoi non d'un
chien ?!
Perceval : Ben la gauche la droite, moi j'aime
pas tous ces trucs !
Lancelot : Mais qu'est-ce que vous aimez pas
?
Perceval : Ces conneries d'gauche et droite,
ça veut rien dire ces
machins ! Selon comment on est tournés ça change
tout !
Arthur : Mais qu'est-ce que vous nous chantez
?
Perceval : Moi j'estime que quand on parle
techniques militaires il
faut employer des termes précis !
Lancelot : Bah heu oui... effectivement,
ça peut prêter à
confusion...
Arthur : Nan mais attendez, c'est pour vous
qu'on dit gauche et
droite, c'est pour pas vous embrouiller !
Perceval : Si ça m'embrouille !
Lancelot : Ah bon, on peut parler normalement
alors ?
Perceval : Professionnel.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 96
Arthur : Bon ben alors okay, on reprend depuis
le début. Donc, Calogrenant est posté depuis hier soir au
nord-ouest de la zone d'attaque.
Lancelot : Léodagan sud/sud-est un peu
plus en retrait avec ses cavaliers.
Perceval : Moi j'aime pas toutes ces conneries
de sud-est nord-ouest...
Arthur (s'énerve) : Quoi
qu'est-ce qu'y a qui va pas encore ??
Perceval : C'est un coup à s'planter
ça ! T'façon on dit l'nord, selon comment on est tourné
ça change tout !
Lancelot se retourne brusquement et s'en va, agacé.
Arthur tente de se maîtriser.
Plus tard....
Lancelot est revenu, Arthur et lui on l'air
blasés.
Perceval : Calogrenant ça va ! Maintenant
Léodagan il est où ?
Lancelot : Du côté de la
forêt près de la clairière là où y'a une
grosse pierre qui ressemble à une miche de pain.
Perceval : Voiiilààà !
Là c'est pro ! Là j'comprend ! Et quand
Calogrenant va arriver, il va couper par ou ?
Arthur : Du côté de la
rivière à gauche du...
Perceval : Ah ah ah attention !!
Arthur : Pardon. Du côté d'la
rivière là ou y'a les brebis qui
passent.
Perceval : D'accord ! Allez c'est bon (tire
son épée) j'les attends les
envahisseurs ! Ils vont s'prendre mon épée dans les
côtelettes ça va
les calmer pour un moment ! Ah j'ai hâte d'y être !
Ils vont s'frotter
à la fausse-patte du Pays d'Galles !
Lancelot : Les fausses-pattes c'est des
gauchers.
Perceval : Bah oui !
Arthur : Vous êtes pas gaucher vous.
Perceval : Ben si !
Lancelot : Vous dégainez d'la main
droite.
Perceval : Merde, comment on dit l'inverse d'une
fausse patte ?
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 97
Arthur : J'sais pas. On dit rien.
Lancelot : La vraie patte ?
Perceval : Attendez la vraie patte du Pays
d'Galles ça veut rien dire
! 'Voulez qu'j'passe pour un con ??
Arthur et Lancelot se contentent de le regarder sans rien
dire.
GENERIQUE
Plus tard dans le campement, Perceval parle avec un soldat
quand
Hervé de Rinnel arrive.
Hervé : Seigneur Perceval ! C'est le
chef de rang qui m'envoie, ils
ont discuté de la signalitique.
Perceval : Et alors ?
Hervé : Donc ce sera bras gauche en
l'air pour les lancés de flèches
et bras droit en l'air pour envoyer les lanciers.
Perceval soupire et ferme les yeux.
Perceval voix off : Toi un jour je te crame
ta famille, toi.
Annexe 5
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 98
Séli entre dans la chambre d'Yvain, celui-ci est au
fond de son lit.
Séli : Bon allez ça fait 5 fois
qu'je viens maintenant vous vous levez.
Yvain : J'peux pas y aller j'ai une otite.
Séli : Dépéchez vous le
cuissot de chevreuil c'est pas bon réchauffé !
Elle s'en va, Yvain soupire sur son oreiller.
GENERIQUE
Arthur, Yvain, Séli et Léodagan sont à
la Table Ronde.
Arthur : Quand vous m'avez demandé de
faire entrer votre fils à la
Table Ronde, j'me suis montré compréhensif.
Séli : Encore une chance !
Léodagan : C'est quand même bien le
moins qu'vous pouviez faire
!
Arthur : Ah j'suis très touchée
par votre grattitude ! J'vous rappelle
qu'j'ai viré Agravin pour lui faire une place !
Séli : Excusez-moi mais vous y avez
gagné au change !
Léodagan : Agravin, vous allez quand
même pas comparer mon
fils à c'débile !
Arthur : Ah mais vaut mieux pas comparer
effectivement, parce
qu'Agravin au moins il servait à quelque chose !
Léodagan : Eh ben j'aimerais bien savoir
à quoi !
Arthur : Il participait.
Léodagan : Ah bravo, ah vous parlez d'un
héros !
Arthur : Ah parce que celui là c'est un
héros ? Première nouvelle !
J'ai jamais entendu le ton de sa voix !
Yvain se racle la gorge.
Arthur : Si là, voilà.
Plus tard...
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 99
Séli : Peut-être qu'il parle pas
tout simplement parce qu'il à rien à dire.
Léodagan : T'as quelque chose à
dire ?
Yvain : Non.
Léodagan : Voilà, quand il a
rien à dire il dit rien, il a pas été élevé
chez les porcs, excusez-nous hein.
Arthur : Attendez on est à la Table
Ronde quand même on fait pas un barbecue ! Il est pas là pour
glandouiller il est censé participer activement à la quête
du Graal !
Séli : Mais il participe ! C'est pas
parce qu'il passe pas son temps à hurler et à taper du point sur
la table qu'il participe pas !
Arthur : Mais comment voulez-vous qu'j'le
sache il parle pas il bouge pas 'fait la gueule tout l'temps ! Dès qu'on
lui fait une remarque il lève les yeux au ciel ! (Yvain lève
effectivement les yeux) Tiens voilà !
Séli : Mais il est sensible ! Vous
préféreriez peut être qu'il passe son temps à faire
des concours de pets !
Arthur (énervé) :
Parce que c'est là seule alternative que vous m'proposez, rien glander
d'la journée où faire des concours de pets ??!
Léodagan : Entre parenthèse
avec vos lubies d'vouloir lui faire faire du luth où je sais quelle
connerie...
Séli : J'y peux rien si c'est un
artiste, il écrit des poèmes magnifiques !
Arthur : Ah super, bravo formidable !
Léodagan : Mais il est jeune, les
jeunes ne sont pas fait pour rester enfermés dans des donjons à
tailler l'bout d'gras autour d'une table...
Arthur : Justement s'il veut pas rester
autour d'une table il fallait pas m'le coller à la Table Ronde !
Léodagan (souriant) : Mais
vous allez voir à la prochaine campagne hein, quand il y aura du combat,
alors là il va s'réveiller ! Yvain : M'en fous
j'irais pas.
Léodagan et Arthur : Quoi ?
Yvain : Je refuse d'aller me battre pour
soutenir une politique d'expansion territoriale dont je ne reconnais pas la
légitimité.
Plus tard...
Léodagan : C'est vous qui lui avez mis
ces conneries dans le crâne,
mais j'vous préviens hein, la prochaine fois que j'le vois
avec un
luth, je lui casse sur la tête !
Séli : Ah mais c'est vous qui m'cassez la
tête ! Vous devriez être
fier d'avoir un fils un peu moins bourrin qu'la moyenne !
Léodagan : Fier ?! J'vais l'envoyer trois
mois à poil dans la forêt à
bouffer des asticots et des racines, j'vous garantis que quand
il
reviendra il fera moins de poêmes hein !
Yvain (blasé) : Super bonjour la
pédagogie...
Arthur : Attendez, moi je crois que vous avez
besoin d'être un peu
ensemble pour régler cette petite crise, hein, moi je
reprends en
attendant Agravin à la Table Ronde...
Léodagan : Tu vas aller t'battre
où j't'en mets une !
Yvain : J'réponds pas à la
violence.
Séli : T'as raison va ! T'a pas à
aller t'faire massacrer si t'en a pas
envie !
Léodagan : Ah et vous si vous voulez pas
vous en prendre une par
ricochet j'vous conseil de pas la ramener hein, il ira au combat
!
Yvain : Non j'irais pas.
Léodagan : Si tu iras !
Yvain : Non.
Léodagan : Si !
Yvain (soupirant) : Okay j'y vais.
Léodagan (se calmant) : Tout
d'même.
Yvain : Mais j'm'en fous je refuse de porter les
armes.
Tous le regardent.
GENERIQUE
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 100
Arthur est dans son lit avec Guenièvre, il lit un
parchemin.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 101
Guenièvre : Je n'suis pas enceinte.
Arthur : Mmm.
Guenièvre : Je suis
désolée mais l'héritier j'ai peur que ce soit pas
encore pour cette fois.
Arthur : Vous savez entre votre frère
chevalier qui refuse de
prendre les armes et vous qui faites pas
d'héritier...
Guenièvre : Qu'est-ce que mon
frère vient faire là dedans ?
Arthur : Rien j'me comprends.
Guenièvre Voix Off : Eh ben vous avez
d'la chance.
Annexe 6
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 102
Perceval et Karadoc sont dans un campement militaire en
forêt, en train de manger.
Perceval : Vous vous rappelez quand on s'est
pris la peignée contre
les Saxons ?
Karadoc : Dans la forêt de Keridon ?
Perceval : Non celle du Printemps.
Karadoc : Ah ouais. Eh ben ?
Perceval : Ben j'ai pris un sacré coup
au moral quand même.
Karadoc : Ah c'est sûr c'était
un coup dur.
Perceval : Pas moyen d'remettre la main sur
cette gourde.
Karadoc : En plus c'était un cadeau
non ?
Perceval : Ma grand-mère, pour mes 11
ans.
Karadoc : Ah moche, moche.
GENERIQUE
Réunion un peu tendue de la Table Ronde :
Arthur : Bon, c'est quoi le problème
exactement ?
Léodagan : Le problème c'est
qu'c'est toujours un peu les mêmes qui s'tapent le salle boulot si vous
voyez c'que j'veux dire !
Arthur : Non j'suis désolé
j'vois pas non !
Léodagan : Alors dès qu'il
s'agit d'aller s'dorer les miches en Armorique pour demander aux filles si
elles ont pas vu le cul de Lulu alors là, là oui y a des
volontaires !
Lancelot : Non Sire ! J'étais
allé transmettre vos voeux à la fille du Roi Hoel !
Léodagan : Voilà ! Par contre
pour les accords de paix avec les Wisigoths, qui c'est qu'on envoie ? (se
désigne)
Arthur : Mais vous pouvez pas arrêter
d'vous bouffer l'nez sans arrêt pour des conneries...
Léodagan : Ah la paix avec les
Wisigoths c'est des conneries ?!
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 103
Arthur : Vous êtes autour de la Table
Ronde, il s'rait p'tet temps d'penser à être un peu plus
solidaires, ces réunions sont sacrées bon sang ! Elles sont
là pour souder notre fraternité contre le mal ! Rien ne doit se
mettre en travers de notre communauté !
Les portes s'ouvrent avec fracas, Perceval entre sans
aucune discrétion.
Perceval : Excusez Sire, c'est juste pour
vous dire que j'vais pas pouvoir rester aujourd'hui, faut qu'j'retourne
à la ferme de mes vieux, y a ma grand-mère qu'à
glissé sur une bouse c'est l'vrai merdier !
Il repart.
Plus tard...
Arthur : Bon allez, au boulot, ça
évitera d'penser au reste ! Père
Blaise, l'ordre du jour.
Blaise : Ah bah aujourd'hui j'ai rien moi.
Arthur : Rien comment ça rien ?!
Blaise : Ben on est une veille de pleine lune,
et normalement une
veille de pleine lune, c'est relâche.
Tous les chevaliers se lèvent.
Arthur : Oh là oh là oh là
popopop on se calme !
Ils se rassoient.
Arthur : Qu'est-ce que c'est qu'cette histoire
d'relâche ?
Blaise : Bah c'est écrit noir sur blanc
dans l'nouveau code de
chevalerie !
Arthur : Le nouveau code ??
Blaise : Vous nous avez d'mandé de
dépoussiérer l'ancien, donc on
a vu ça avec messire Léodagan...
Léodagan : Ah ouais 'puis c'était
tout en ancien Celte hein, on en a
chié.
Arthur : Non mais j'vous ai rien d'mandé
d'dépoussiérer du tout
j'vous ai demandé de le traduire c'est tout !
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 104
Blaise : Eh ben justement, quand on a traduit,
ça a donné relâche. Arthur à les yeux
exhorbités.
Léodagan : Ah mais m'regardez pas
comme ça hein, si vous êtes pas content fallait vous les farcir
les négociations avec ces lousitcs là !
Arthur : Les négociations, mais quelles
négociations ?
Léodagan : Bah tant qu'ils
comprenaient rien à l'ancien code, on pouvait leur raconter c'qu'on
voulait seulement depuis qu'il a été traduit alors là
pardon hein ! Une pause par-ci une relâche par-là...Et puis 'c'est
intolérable' et puis 'un acquis est un acquis' ah nan mais alors...
Arthur : Nan nan nan mais y a rien à
négocier ! Moi les traine-patins j'les remets au travail vite fait !!
Tous les chevaliers se lèvent.
Arthur (crie) : Asseyez-vous !!
Ils se rassoient.
Arthur : Mais qu'est-ce que c'est qu'ce cirque
aujourd'hui ?! Blaise : Ben ça c'est la traduction de
l'article 13... "Si l'honneur du chevalier est bafouée pendant une
assemblée, ce dernier pourra recourir à son droit de vidage".
Arthur : Son droit d'vidage ??
Blaise : Oui oui, j'suis d'accord avec vous
c'est pas la meilleure traduction qu'on ai trouvé...
Plus tard...
La réunion est terminée, seul Arthur, le
père Blaise et Léodagan
restent dans la salle.
Arthur : Dites moi je pensais à une
chose, il faut bien qu'elle soit
ratifiée par moi cette nouvelle traduction ?
Léodagan : Ratifiée ?
Arthur : Enfin j'veux dire, validée
quoi.
Léodagan : Ah oui oui.
Arthur : Parce que si j'refuse de la
signer...
Blaise : Ah ben là c'est l'ancienne
traduction qui s'applique.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 105
Léodagan : Ah oui non mais avant de
prendre une décision faut
voir les bons côtés hein...
Arthur : Les bons côtés ?
Léodagan : Oui parce qu'avec le
nouveau code, ils font plus de
pause, mais du coup ben ils sont plus reposés. Et moi
j'pense au
combat.
Arthur : Moi j'pense que si on met pas le
ohla tout de suite il vont
finir par nous les demander pendant les combats les pauses.
Blaise et Léodagan échangent un
regard.
Arthur : Ils les ont déjà
demandé c'est ça ?
Blaise (cherche dans les papiers) :
Heu paragraphe 16 alinéa 4....
Léodagan : Ouais c'est ça c'est
ça sur les temps de pause....
Arthur : Bon, maintenant qu'on a
terminé avec les bons côtés d'la
nouvelle traduction, on peut p'tet la foutre en l'air et
reprendre
l'ancienne ?
GENERIQUE
Nouvelle réunion de la Table Ronde.
Perceval : Mais j'croyais qu'on y avait droit
à ça, article 7 de j'sais
pas quoi là...
Arthur : Ah, alors attention, père
Blaise s'il vous plait, l'article 7.
Blaise lit en ancien Celte.
Arthur : Voilà, ça
répond à votre question ?
Perceval : Du coup on y a plus droit ?
Arthur : Vous voulez qu'on vous relise
l'article ?
Perceval Voix Off : Non non, j'vous fais
confiance.
Annexe 7
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 106
Arthur et Guenièvre sont dans leur lit.
Guenièvre : Je sais qu'vous aimez pas
ça mais c'est qu'un mauvais moment à passer... et puis le peuple
vous verra un peu au moins. Arthur : Y a plus d'peuple aux
exécutions. C'est fini ça, maintenant c'est privé.
Léodagan, Lancelot, père Blaise.
Guenièvre : Oh ben non... j'avais choisis
ma toilette tout, j'me faisais une joie d'sortir !
GENERIQUE
Guenièvre déjeune avec sa mère dans la
salle à manger.
Séli : Vous f'rez rajuster votre coiffure
quand même pour tout à
l'heure !
Guenièvre : Pourquoi qu'est-ce qu'y a
tout à l'heure ?
Séli : Ben la pendaison ! Vous allez pas
y aller comme ça on dirait
qu'vous vous êtes coiffée toute seule !
Guenièvre : Mère je me suis
coiffée toute seule !
Séli : Eh ben voilà, du coup vous
ferez rajouter votre coiffure.
Guenièvre : T'façon j'y vais pas
à la pendaison.
Séli : Quoi ??
Guenièvre : Non j'y vais pas.
Séli : Vous êtes pas bien ? Si la
Reine va pas aux pendaisons
qu'est-ce que vont dire les gens ?!
Guenièvre : Les gens diront c'qui
voudrons, d'autant qu'y aura pas
le Roi non plus ni vous ni moi ni personne.
Séli : Mais qu'est-ce qui vous prend
ça va pas bien !
Guenièvre : Le Roi a décidé
qu'les pendaisons n'étaient plus
ouvertes au public !
Séli : Ah non mais pour qui y s'prend
celui là ! Ca fait 500 ans
qu'on fait comme ça et lui toujours plus malin qu'tout
l'monde il
change !
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 107
Guenièvre : C'est l'Roi c'est lui qui
décide hein.
Séli : Oh non mais c'est dingue cette
histoire...Mais s'il a pas envie d'aller aux pendaisons il fait c'qui veut mais
qu'il empêche pas les autres de s'amuser !
Plus tard...Dans la salle de la Table Ronde :
Léodagan : Moi j'ai l'impression que
c'qui vous échappe, c'est la notion de spectacle.
Arthur : J'vais vous dire, j'ai jamais
aimé qu'il y ai du public aux exécutions. Toute façon
j'aime pas ça les exécutions.
Lancelot : Ah bon ?
Léodagan : Mais pourquoi qu'est-ce qui
vous gêne ?
Arthur : J'sais pas. J'aime pas ça,
j'saurais pas vous dire pourquoi... Léodagan : Oh mais
moi j'vais vous l'dire, ça vous plait pas parce qu'on doit être le
dernier pays à pratiquer la pendaison ! Voilà ! Et à une
pendaison j'm'excuse hein mais on s'emmerde.
Lancelot : C'est la justice, c'qui compte c'est
le résultat...
Arthur : Bah il m'semble oui...
Léodagan : Mais la justice me faites
pas marrer, ça dure des plombes le type remue à peine les doigts
d'pieds à quoi ça r'ssemble j'vous l'demande !
Arthur : Bah ça r'ssemble à une
pendaison à quoi voulez vous qu'ça r'ssemble on va pas faire
venir les danseuses et les montreurs d'ours.
Lancelot : La pendaison c'est sobre et
solennel, moi j'trouve ça parfait.
Léodagan : Prenez la roue, par
exemple, ça c'est festif. Le condamné est attaché et on
commence par lui casser les bras et les jambes, bon ben tout l'monde peut venir
avec son p'tit bâton, les gens participent, c'est convivial !
Lancelot : Non c'est atroce.
Léodagan : Mais pas du tout !
Arthur : Oh si ça craint, non
ça craint écoutez on passe quand même pour être un
pays moderne...
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 108
Léodagan : Un pays bourré
d'délinquance, les types ont pas assez peur ! Ca impressionne qui la
pendaison aujourd'hui hein, mais personne ! Tandis que vous prenez par exemple
l'écartèlement... Lancelot : Ah voilà !
Ca oui, ça c'est super !
Arthur : Ah non alors ça justement
ça ça craint !
Lancelot : Oui mais y a du suspens, les gens se
d'mandent si c'est les bras où les jambes qui vont lacher en premier.
Léodagan : Eh bah oui et puis ça a
un peu d'gueule au moins ! Alors vous on s'demande c'qui vous plairait
hein...
Arthur : Bah j'vais vous l'dire, moi j'ai
pensé à un truc alors vous allez p'tet trouver ça con,
imaginez qu'on soit le seul pays, au monde, où on ne condamne plus...
à mort.
Lancelot et Léodagan le fixent.
Léodagan : Bon, écoutez Sire
j'suis désolé mais moi j'ai une diligence dans une heure, puis
faut qu'on aie bouclé hein. Puis j'ai pas trop le temps d'raconter des
conneries non plus.
Plus tard... Arthur déjeune avec son
beau-père.
Léodagan : Moi j'vous propose un truc, un
de ces jours, on s'fait une p'tite virée en Gaule vous et moi comme
ça on voit un peu c'qui s'fait à côté, mais rien
qu'pour piocher des idées !
Arthur : Piocher des idées d'quoi ?
Léodagan : Sur les exécutions !
Arthur (se frappe la tête) : Ah
non mais vous êtes comme ça hein ! Léodagan
: Mais soyez pas borné !
Arthur : Vous êtes pas borné vous,
j'vous dis qu'j'aime pas les exécutions et il faut qu'on aille en Gaule
maintenant !
Léodagan : Mais c'est juste pour voir
!
Arthur (s'énerve) : Mais c'est
tout vu ! Déjà qu'j'aime pas voyager si c'est pour aller voir des
mecs se faire dézinguer merci ! Léodagan : Mais
vous avez tort de pas vouloir régler l'problème hein si on veut
rester le pays le plus puissant il faut qu'on aie des exécutions
spectaculaires ! Vous passerez pas à côté !!
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 109
Arthur : Eh ben si figurez vous ! Parce que
j'vais décréter que l'île de Bretagne est la
première nation où la peine de mort n'existe plus voilà
!!
Léodagan a les yeux ronds comme des
soucoupes.
Arthur : Non mais je sais je sais attendez...
Excusez moi c'est sortit comme ça, j'vais pas l'faire évidemment.
C'est l'idée oui l'idée, j'aime bien l'idée.
Léodagan : Sinon c'que j'peux vous
proposer, on attache le condamné, et on le balance sur un nid d'frelons.
C'est propre c'est sain. C'est rien qu'du naturel.
GENERIQUE
Arthur et Guenièvre sont dans leur lit.
Guenièvre : Alors ?
Arthur : On garde la peine de mort.
Guenièvre : Vous vous êtes
résigné ?
Arthur : Ben parce que j'ai pas eu l'choix !
N'empêche que ça
aurait été sacrément classe croyez moi.
Soi-disant qu'les gens sont
pas prêts...
Guenièvre : Ben pas de peine de mort,
c'est vrai qu'c'est un p'tit
peu déroutant...
Arthur : C'est l'avenir c'est tout, faites moi
confiance !
Arthur Voix Off : Dans 5 où 10 ans, y a
plus qu'les barbares qui le
feront.
Annexe 8
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 110
Arthur, Léodagan et Karadoc font étape à
la Taverne, incognitos (cachés sous des capuchons).
Arthur, inquiet : Ca va, y a pas trop de gens
qui vous connaissent ? Karadoc : Celui là
derrière j'l'ai jamais vu. Ceux là là bas c'est des
habitués.
Arthur : Alors tachez qu'ils vous reconnaissent
pas.
Léodagan : J'sais pas comment vous faites
pour les reconnaître, ils ont tous la même tête
d'alcoolos.
Karadoc : Lui, j'suis pas prêt
d'l'oublier. Il m'a vomi dessus. Regards perplexes d'Arthur et
Léodagan.
GENERIQUE
Karadoc : Brrr, j'en ai plein les pattes !
Arthur : Chuuut ! Karadoc bon dieu ! J'vous
dis que j'veux pas qu'on nous remarque !
Léodagan : Oh mais
détendez-vous vous aussi, hein, c'est pas la mort du p'tit ch'val...
Arthur : Non j'me détendrais pas ! Une
fois pour toute les chevaliers au bistrot c'est l'déshonneur,
voilà !
Léodagan : Oh j'vous signale quand
même qu'on marche depuis le lever du soleil !
Arthur : Ah ça va, j'connais le
couplet, on est fatigué, on est fatigué, vous me l'cancaner
depuis c'midi !
Léodagan : Ecoutez arrêter
d'vous agiter, j'vous signale que c'est vous qui nous faites remarquer !
Karadoc : Même si les gens savaient que
c'était nous, qu'est-ce que ça peut faire ? Ils s'raient contents
de voir que les chevaliers s'mélangent au peuple.
Léodagan : Mais ouais, ça
prouve déjà qu'on pète pas plus haut qu'nos culs...
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 111
Arthur : S'ils savaient qui ont est ils
penseraient qu'ils sont dirigés
par des rinces-pintes !
Karadoc : Meuuh nan...
Léodagan : On s'rait
pétés comme des coings, encore, mais enfin
là...
Karadoc : Allez ! (fort) Patron !
Trois quilles de pif !
Arthur ferme les yeux.
Plus tard...
Ils sont en train de manger.
Léodagan : A quoi ça r'ssemble
de becqueter avec les capuchons
hein !
Karadoc : En plus on crève de chaud
!
Arthur : Arrêtez d'couiner et
magnez-vous ! Dans deux minutes on
décarre !
Léodagan : Puisqu'on est incognito,
vous devriez en profiter pour
savoir c'qu'on pense de vous.
Arthur : Que qui pense de moi ?
Léodagan : Ben les grouillots ! Enfin,
le peuple quoi. (fort)
Tavernier !
Arthur : Mais qu'est-ce que vous faites ?!
Léodagan : Laissez faire.
Le tavernier arrive.
Tavernier : (siffle) Eh ben ils
avaient soif les capuchons ! J'vous
r'mets les p'tites soeurs ?
Arthur : Nan ça va c'est bon merci.
Karadoc : Ah bah si pour finir le fromage
!
Léodagan : Dites moi tavernier,
qu'est-ce que vous pensez... du
Roi Arthur ?
Tavernier : Du Roi Arthur ?
Léodagan : Ben oui, les chevaliers, la
quête du Graal, tout ce
merdier là.
Arthur : Ca va l'influencez pas non plus !
Tavernier : Le Roi Arthur... j'sais pas bien
quoi vous dire moi...
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 112
Léodagan : Penez pas qu'on est
dirigés par une troupe de mains-dans-les-poches ?
Tavernier : Aaah...
Arthur : Mais laissez-le parler !
Tavernier : Ah nan, j'dirais pas ça,
voyez, mais c'est vrai qu'le Graal tout ça... bon ben ça s'rait
bien qu'ça décolle un p'tit peu c't'histoire hein...
Karadoc : Mais qu'est-ce qu'il est sec le
brignolet ! Il doit pas être d'hier.
Tavernier : Nan il est bien. Nan parce que
j'vais vous dire, c'est vrai qu'au début les gens ils soutenaient bien,
mais bon ben avec le temps... pas d'Graal pas d'Graal, puis bon bah avec le
temps ils se sont essouflés.
Léodagan : Ben ça ça
m'étonne pas.
Arthur : Oh ça va hein...
Tavernier : Nan parce que l'plus emmerdant
quand on est on est un p'tit peu patriote comme moi hein, c'est de voir que
bon, on est même pas foutu de mettre la main sur un Graal, d'accord, mais
en Irlande, ils en ont déjà deux ou trois ! Eh !
Plus tard...
Léodagan : Par exemple, si vous aviez
le Roi Arthur juste devant vous là, qu'est-ce que vous lui diriez ?
Tavernier : Bon ben déjà, avec
deux trois potes tenanciers, on lui parlerait un peu de sa taxe sur les
boissons alcoolisées... A grand coup d'bâtons dans les jambes !
Léodagan : Ah oui, c'est vrai qu'on a mis
ça en place aussi... enfin quand j'dis nous, c'est les pignoufs du
gouvernement quoi ! Tavernier : Ah les fumiers... ils nous
piquent 6 pièces de bronze à chaque tonneau de jah-jah.
Karadoc : C'est vrai qu'c'est
dégueulasse.
Arthur, menaçant : Eh ! Vous voulez vous
la manger celle là ?
Tavernier : Heureusement, on s'est mis
à fabriquer nous même en sourdine pour nous même quoi...
sinon on s'en sortait pas.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 113
Léodagan, souriant : Ah... et vous
avez pas peur des contrôles nan ?
Tavernier : Ca m'effraie pas plus que
ça.
Léodagan : Ah oui... ben je s'rais
vous j'me méfierais, surtout dans les jours qui viennent.
Tavernier : J'vais vous dire hein, vu le
boulot que j'abats, hein, 3 heures d'sommeil par nuit, et quand j'vois les
malheureux trois ronds que j'arrive à peine à mettre à
gauche... j'aurais l'Roi Arthur devant moi, j'aurais qu'une envie, c'est d'lui
lacher mes chiens au cul.
Karadoc : Sire, comme un con j'ai
oublié ma bourse, vous pouvez m'avancer ?
Arthur et Léodagan ouvrent de grands yeux.
Tavernier, surpris : Sire ?
GENERIQUE
Léodagan : Ben moi j'peux vous dire
que si j'avais l'Roi Arthur devant moi, j'lui dirais gentilment c'que j'pense
de sa façon de baisser son froc devant les Romains !
Arthur: Qui qui baisse son froc ?!
Léodagan : Si j'l'avais d'vant moi !
Karadoc : Moi j'lui dirais d'arrêter de
faire son p'tit chef là, toujours à s'la raconter, Karadoc allez
faire ci, Karadoc allez faire mi...
Karadoc Voix Off : Il a un p'tit peu tendance
à prendre tout l'monde pour des cons !
Annexe 9
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 114
Perceval et Karadoc sont à la taverne.
Perceval : Moi, dès que j'pars en
retraite, j'vous laisse tous mes chevaux.
Karadoc : Ah ça c'est drôlement
gentil.
Perceval : Voilà, j'en ai deux, ils sont
à vous.
Karadoc : Vous en aviez pas trois ?
Perceval : Non, l'autre j'l'ai tué
sans faire exprès. Bon et puis sur les deux, y a l'mien, alors j'pars
avec. Il vous en reste un. Vous y f'rez gaffe hein, il a au moins 25 ans
c'bourrin. Il peut crever d'un jour à l'autre.
GENERIQUE
Perceval déjeune avec le Roi.
Perceval : Ca s'arrête à quel
âge la quête du Graal normalement ? Arthur : Hein
?
Perceval : La quête du Graal, à
quel âge ça s'arrête ?
Arthur, blasé : Commen à quel
âge, mais qu'est-ce que vous m'bavez encore...?
Perceval : C'est pour savoir parce qu'il faut
que j'm'organise.
Le Roi sent la colère monter en lui. Il prend une
inspiration.
Arthur : Vous devriez déjà
commencer par organiser le merdier qu'vous avez là dedans
(désigne la tête). Qu'est-ce que vous voulez savoir ?
(énervé) Allez, magnez-vous l'tronc mainenant ! Vous
m'dites c'que vous voulez et vous faites un effort pour que j'pane au moins le
sens de votre phrase ! Je commence à en avoir plein le dos et d'choper
des maux de tête à répétition à force de
jamais piger un broc de c'que vous racontez ! (criant presque) Alors
vous reprenez d'puis l'début, avec une tournure simple et directe ou
vous ramassez une tarte c'est clair ça ?!
Perceval : J'voudrais savoir à quel
âge on peut arrêter la quête du Graal. Parce que j'voudrais
prendre ma retraite.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 115
Il fait un geste pour se protéger.
Perceval : J'm'en ramasse une ou pas ?
Plus tard...
Arthur : Mais qu'est-ce que vous appelez
votre retraite exactement ?
Perceval : Bah le jour où j'plie les
gaules et qu'j'rentre chez moi. Arthur : Mais, enfin vous
allez pas partir comme ça ?
Perceval : Ah non, on va s'faire un p'tit
buffet quand même, on va s'boire un canon, on est pas des bêtes.
Arthur : Vous vous rendez compte que vous
êtes un chevalier d'la Table Ronde ?
Perceval : Eh ben ?
Arthur : Bah j'sais pas, le code voudrait
qu'on meurt au combat pour la gloire du seigneur, par exemple...
Perceval : Mais moi ça fait 10 ans
qu'j'retape ma cabane au Pays d'Galles, alors maintenant qu'elle tient debout,
j'aimerais bien pouvoir en profiter un peu !
Arthur : Mais enfin j'vais pas vous retenir
de force, moi, faites c'que vous voulez...
Perceval : Mais à quel âge on
peut ?
Arthur : Mais c'est pas une question
d'âge enfin arrêtez d'me bassiner avec ça ! Si vous voulez
partir vous partez, qu'est-ce que vous voulez qu'j'vous dise moi...
Perceval : Mais heu... maintenant ?
Arthur : La Table Ronde ça a jamais
été une obligation, vous êtes là de votre plein
gré j'vous rappelle.
Perceval : Ben quand même, quand vous
nous avez annoncé le coup d'la Dame du Lac, la Table le message et
tout... ça avait l'air obligé.
Arthur : C'était vivement
recommandé disons. C'est vrai que ça m'aurait mis de travers
qu'on m'dise non, mais... sur l'principe, la Table Ronde c'est pas
obligatoire.
Perceval : Donc on peut partir quand on
veut.
Arthur : Sur l'principe oui.
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 116
Perceval : Sur l'principe ?
Arthur : Sur l'principe vous pouvez partir.
Perceval : Non mais en vrai ?
Arthur : En vrai, si vous partez j'vous casse
la gueule, déjà. J'trouve ça intôlérable
d'avoir une chance pareille et d'vouloir mettre les bouts pour aller
bêcher un carré d'potager au Pays d'Galles ! Et puis alors si vous
partez maintenant, j'vous raconte pas la réputation d'péteux
qu'vous allez vous taper.
Perceval : Pour l'instant j'suis pas encore
parti hein, pourtant j'me tape déjà une réputation
d'péteux.
Arthur, après un temps : C'est pas
faux.
Plus tard...
Karadoc et Perceval sont à la taverne.
Perceval : Non mais j'ai bien senti
qu'c'était le coup dur pour lui. Karadoc : Ah mettez
vous à sa place, un chevalier qui s'en va... Perceval :
Ben ouais c'est l'prestige qui fout l'camp.
Karadoc : Alors qu'est-ce que vous avez
décidé ?
Perceval : Ben j'peux rester sur le Graal encore
quelques années...
Karadoc : Et si vous lui dites que vous
voulez rester qu'la d'mi journée, ça vous libérerait du
temps.
Perceval : Ben non mais moi ça
m'intéresse pas, j'veux rentrer au pays, alors...
Karadoc : Eh ben, vous négociez des
journées d'libre. Trois jours quête du Graal, trois jours chez
vous, trois jours quête du Graal, trois jours chez vous, trois jours
quête du Graal, trois jours chez vous, trois jours quête du Graal,
trois jours chez vous...
Perceval : Ah oui mais y a le voyage aussi,
j'mets trois jours pour rentrer au Pays d'Galles.
Karadoc : Eh ben, trois jours quête du
Graal, trois jours d'voyage, trois jours chez vous, trois jours d'voyage, trois
jours quête du Graal, trois jours d'voyage, trois jours chez vous, trois
jours d'voyage, trois jours quête du Graal...
Brossard Sébastien Kaamelott : humour
télévisuel et série intertextuelle 117
Perceval : J'négocie avec Arthur d'bosser
trois jours tous les 28 jours.
Karadoc compte sur ses doigts.
Perceval : Ah non mais c'est ça hein, pas
la peine de compter.
GENERIQUE
Karadoc : Y a aussi une possibilité,
c'est qu'vous preniez du travail à faire chez vous.
Perceval : Non, j'préfère bucher
bucher pendant qu'j'suis là, et avoir un vrai temps d'repos. Sinon au
bout d'un moment le corps il dit non.
Karadoc : Ou alors vous négociez d'partir
plus tôt d'la Table Ronde.
Perceval : Vous croyez qu'ça va passer
ça ?
Karadoc Voix Off : Sinon c'que vous faites,
trois jours mi-journée Table Ronde voyage, trois jours chez vous,
mi-journée chez vous voyage, trois jours Table Ronde...
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