2
République du Niger MESS/RS
|
UNIVERSITE ABDOU MOUMOUNI DE NIAMEY Faculté des
Lettres et Sciences Humaines
Département de Géographie
|
Accès à l'eau à Fonéko
(Commune Urbaine de Téra) dans le cadre de l'hydraulique rurale
Mémoire de Maîtrise
Présenté et soutenu par MOUSSA
Yayé
Sous la direction de Membres du jury
Dr BONTIANTI Abdou Président
Chargé de recherche au GAME/IRSH/UAM Pr BOUZOU MOUSSA
Ibrahim
Codirection Professeur UAM
Dr ALAIN Bonnassieux Assesseur
Laboratoire des Dynamiques Rurales/Université de Dr DAMBO
Lawali
Toulouse2 Le Mirail Assistant UAM
ISSAKA Hamadou
Attaché de Recherches au GAME/IRSH
Année académique :
2010-2011
3
TABLE DES MATIÈRES
TABLE DES MATIERES 2
TABLE DES FIGURES 7
TABLE DES PHOTOGRAPHIES 8
TABLE DES TABLEAUX 9
SIGLES ET ABREVIATIONS 10
DEDICACE 12
REMERCIEMENTS 13
RESUME 14
ABSTRACT 15
INTRODUCTION GENERALE 16
CHAPITRE 1 : PROBLEMATIQUE ET APPROCHE
METHODOLOGIQUE
18
1.1. Problématique 19
1.1.1 Contexte et justification 19
1.1.2 Les hypothèses et les objectifs de l'étude
23
1.1.2.1. Les hypothèses 23
1.1.2.2. Les objectifs 23
1.1.2.2.1. Les objectifs globaux 23
1.1.2.2.2. Les objectifs spécifiques 23
1.1.3 Clarification des concepts 23
1.1.3.1. Eau potable 23
1.1.3.2. Accès à l'eau potable 24
1.1.3.3. Hydraulique 25
1.1.3.4. Hydraulique rurale 25
1.1.3.4.1. L'hydraulique villageoise 25
1.1.3.4.2. L'hydraulique pastorale 25
1.1.4 Revue de littérature 26
1.2. Approche méthodologique 29
1.2.1 Recherche documentaire 30
1.2.2 Les travaux de terrain 30
1.2.2.1. L'observation de terrain 30
1.2.2.2. Les entretiens 30
1.2.2.3. L'enquête par questionnaire 31
1.2.2.4. Les matériels et outils informatiques
utilisés 31
4
2.2.3. Les difficultés rencontrées 31
2.2.4 Justification du choix du sujet 31
CHAPITRE 2 : LE SECTEUR DE L'HYDRAULIQUE RURALE A TERA
33
2.1. Etat des lieux de l'hydraulique rurale dans le
département de Téra 34
2.1.1. L'hydraulique villageoise 34
2.1.2. L'hydraulique pastorale 35
2.2. Etat des lieux de l'hydraulique rurale dans la Commune
Urbaine de Téra 35
2.2.1. L'hydraulique villageoise 35
2.2.2. L'hydraulique pastorale 36
2.3. Les partenaires intervenant dans le secteur de l'hydraulique
dans le
département de Téra 36
CHAPITRE 3 : FONEKO, UN VILLAGE DU LIPTAKO GOURMA
38
3.1. La localisation du village de Fonéko 40
3.2. Un milieu naturel peu favorable au stockage de l'eau 40
3.2.1. Le climat 40
3.2.1.1. Les précipitations 40
3.2.1.2. Les températures 41
3.2.1.3. L'évaporation et l'évapotranspiration
42
3.2.1.4. L'action du vent 43
3.2.2. La situation hydrogéologique 43
3.2.2.1. Les aquifères alluviaux (superficiels) 43
3.2.2.2. Les aquifère du socle discontinu 43
3.3. Historique du village et les activités agropastorales
44
3.3.1. Historique et peuplement du village 44
3.3.2. Les activités agropastorales 44
3.3.2.1. L'agriculture 44
3.3.2.2. L'élevage 45
CHAPITRE 4 : LES SOURCES D'APPROVISIONNEMENT EN EAU
ET
LEUR MODE DE GESTION 46
4.1. Les sources d'approvisionnement en eau 47
4.1.1. La situation spatiale des points d'eau 47
4.1.2. Les mares 49
4.1.2.1. La mare de Salam 49
4.1.2.2. Le grand barrage (grande mare) 50
4.1.2.3. Le petit barrage (petite mare) 51
4.1.3. La rivière 52
4.1.4. Les puisards 53
4.1.5. L'utilité des points d'eau de surface pour les
populations de Fonéko 54
4.1.6. Le puits cimenté 54
4.1.7. Les forages 54
5
4.1.8. Les points d'eau non opérationnels 55
4.1.9. Les dangers de pollution des points d'eau de surface 56
4.2. Les modes de gestion institutionnelle et économique
des points d'eau à
Fonéko 57
4.2.1. Le mode de gestion institutionnelle de l'eau 57
4.2.2. La gestion des barrages 58
4.2.3. La gestion des forages 59
4.2.4. Le comité de gestion villageois des forages 59
4.2.5. Le mode d'accès aux points d'eau 60
4.2.6. L'usage de l'eau 60
4.3. Le mode de gestion économique des points d'eau 60
4.3.1. La vente de l'eau 61
4.3.2. Les recettes du comité de gestion 61
4.4. La recherche et le transport de l'eau 61
4.4.1. Les matériels de prise de l'eau 62
4.4.2. La corvée de l'eau 62
4.4.3. Le transport de l'eau 62
4.5. Les problèmes liés à la gestion des
points d'eau villageois 64
CHAPITRE 5 : LES IMPACTS SOCIO-ECONOMIQUES LIES A LA
SITUATION DE L'EAU 66
5.1. Impacts sur la santé des populations 67
5.1.1. La qualité des eaux de consommation 67
5.1.1.1. Les techniques de purification des eaux de surface
utilisées à Fonéko
68
5.1.1.2. Les maladies d'origine hydrique 69
5.1.1.3. Dates de contraction des maladies 72
5.1.1.4. La fréquence des maladies 72
5.2. Impacts sur les activités socio- économiques
72
5.2.1. Impacts sur la quantité d'eau consommée par
des ménages et la
satisfaction des besoins humains fondamentaux 73
5.2.1.2. Des besoins humains fondamentaux non satisfaits 74
5.2.1.3. Estimation des besoins en eau des ménages 75
5.2.2. Un élevage mis en épreuve 75
5.2.3. La problématique de la construction des maisons
76
5.3. Les contraintes liées à la corvée de
eau 77
5.3.1. Les tensions autour des points d'eau 77
5.3.2. La distance parcourue pour la recherche de l'eau 77
5.3.3. Le temps consacré à la recherche de l'eau
78
5.3.4. La question des moyens de transport 79
5.3.5. Le coût de l'eau 80
5.3.6. La disponibilité de l'eau dans le temps et dans
l'espace 80
RECOMMANDATIONS ET CONCLUSION GENERALE 84
RECOMMANDATIONS 85
CONCLUSION 86
BIBLIOGRAPHIE 88
WEBLIOGRAPHIE 93
6
ANNEXES 94
7
TABLE DES FIGURES
Fig 1. Localisation de la zone d'étude 39
Fig 2. Les moyennes annuelles de la pluviométrie de
Téra de 1979 à 2009 41
Fig 3. Les moyennes annuelles de la Température de
Tillabéry de 1978 à 2008 42
Fig 4. La distribution spatiale des ponts d'eau villageois 49
Fig 5. Mode de transport de l'eau au niveau des points d'eau
63
Fig 6. Taux de fréquentation des sources d'eau du village
68
Fig 7. Les types de maladies hydriques identifiées
auprès de certaines personnes d'après
les personnes interrogées 70
Fig 8. Les types de maladies hydriques dont ont été
atteintes certaines personnes
interrogées 71
Fig 9. La satisfaction en termes de quantité 74
Fig 10. Flux des populations au niveau des points d'eau avant le
tarissement des mares82 Fig 11. Flux des populations au niveau des points d'eau
après le tarissement des mares 83
8
TABLE DES PHOTOGRAPHIES
Photo 1.Un troupeau des vaches sur le point d'être
abreuvé au niveau d'un forage 45
Photo 2. La mare de Salam 50
Photo 3. Une femme s'approvisionnant en eau au niveau de la
grande mare et en arrière
plan on voit des chèvres qui s'abreuvent 51
Photo 4. Un troupeau de vaches s'abreuvant dans le petit barrage
52
Photo 5. Vue de la kori en saison sèche 53
Photo 6. Une femme s'approvisionnant en eau au niveau d'un
puisard creusé dans le
fond d'une mare tarie. 53
Photo 7. Des usagers au niveau de l'un des deux forages 55
Photo 8 forages non opérationnels Photo 9 puits
cimentés non
opérationnels 56
Photo 11. Le gardien des forages devant sa hutte 59
Photo 12. quelques types de transport de l'eau 64
Photo 13. Construction inachevée à cause du
problème de l'eau située dans l'enceinte de
l'école 76
Photo 14. Usagers en attente aux forages 79
9
TABLE DES TABLEAUX
Tableau 1. Situation de l'hydraulique dans le
département de Téra en janvier 2009. 34
Tab 2. Années de contraction des maladies 72
Tableau 3 : conséquences du déficit de
l'eau dans le village 73
Tableau 4. Quantité d'eau nécessaire par
jour et par ménage 75
Tab 5. Temps consacré à la recherche de
l'eau au niveau des forages 79
Tab 6. Période cruciale de la question de l'eau
à Fonéko 81
10
SIGLES ET ABREVIATIONS
AEP : Adduction d'Eau Potable
BAD : Banque Africaine de Développement
CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique
CSI : Centre de Santé Intégré
DDH : Direction Départementale de l'Hydraulique
DG : Département de Géographie
DIEPA : Décennie Internationale de l'Eau Potable et de
l'Assainissement
FCFA: Franc de la Communauté Française
d'Afrique
FE : Forage Emirats
FICOD: Fonds d'Investissement aux Collectivités
Décentralisées
FLSH : Faculté des Lettres et Sciences Humaines
GAME : Département de Géographie et de
l'Aménagement de l'Espace
GPS: Grobal Positionnement System/ Système de
Positionnement Global
INS: Institut National de la Statistique
IRSH : Institut de Recherches en Sciences Humaines
LASDEL: Laboratoire d'Etudes et de Recherches sur les
Dynamiques Sociales et
le Développement Local
OFDES: Office des Eaux du Sous-sol
OMD: Objectifs du Millénaire pour le
Développement
OMS: Organisation Mondiale de la Santé
ONU: Organisation des Nations Unies
PC : Puit Cimenté
PDERLG: Projet de Développement de l'Elevage dans la
Région du Liptako
Gourma
PEA : Poste d'Eau Autonome
PEM: Point d'Eau Moderne
PNUDH: Programme des Nations Unies pour le
Développement Humain
PSE: Projet Sectoriel Eau
PVDT : Projet de Valorisation Dosso Tillabéri
11
RN: République du Niger
RN: Route Nationale
TCE : Taux de Couverture en Eau
UAM : Université Abdou Moumouni
UBT: Unité Bétail Tropical
UEMOA: Union Economique et Monétaire Ouest Africaine
UGE: Unité de Gestion de l'Eau
UNICEF: Organisation des Nations Unies pour l'Enfance
US: United States
WEB: World Wide Web
12
DEDICACE
Ce présent mémoire est dédié
à toutes les populations du monde rural sahélien qui n'ont pas
encore un accès immédiat à l'eau potable.
13
REMERCIEMENTS
La réalisation de ce travail n'aurait pas
été possible sans le précieux concours d'un certain nombre
de personnes dont nous ne pouvons pas tous les citer nommément, qu'elles
trouvent ici le sentiment de notre profonde gratitude. Mais, toutefois il
s'avère nécessaire de citer quelques noms.
En effet, nos remerciements vont à l'endroit de tous
les membres de notre famille pour leurs soutiens inlassables.
Ces remerciements vont à l'endroit du Docteur Bontianti
Abdou notre directeur de mémoire, qu'il reçoit notre profonde
reconnaissance, au Professeur Alain Bonnassieux qui sans hésiter et cela
en dépit de ses multiples préoccupations à accepter de
codiriger ce mémoire.
Nos remerciements s'adressent aux enseignants chercheurs du
département de géographie pour leur brillante et rigoureuse
formation à l'endroit des étudiants, nous les
félicitons.
Nous remercions le Docteur Issaka Hamadou pour non seulement
la lecture de notre mémoire ce qui a d'ailleurs permis de
l`améliorer mais aussi pour son aide en cartographie. Nous le remercions
pour la codirection de ce mémoire.
Nous remercions le doctorant Issa Abdou Yolehinza pour, ses
encouragements, et surtout pour nous avoir proposé ce sujet de
mémoire, qu'il trouve ici notre profonde gratitude.
Ces remerciements vont aussi à l'endroit de mes
camarades et amis étudiants de la faculté nous pensons
particulièrement à Ousseini Alfaga Ibrahim. A mes
collègues de service : Younsa Hassane, Abdoulaye Seyni Ibrahim, Sambo
Siddo Abdoulaye, Noma Ali, Madame Mansour née Rahina, Nassartebaye,
Boubacar Seïdou pour leur totale disponibilité et leur sens
élevé de sociabilité.
Nos remerciements s'adressent à Maman Mansour pour nous
avoir conçu les cartes de ce mémoire.
Les directeurs des services départementaux de
l'hydraulique, de l'élevage et les agents de la mairie de Téra
trouveront ici nos sincères reconnaissances pour leur
disponibilité et leur sens de compréhension.
Nous ne finirons pas cette page des remerciements sans pour
autant adresser notre profonde gratitude au petit frère Habibou Tahirou
pour notre prise en charge pendant tous les séjours à Téra
à l'occasion de nos recherches de terrain.
Un remerciement particulier à toute la population du
village de Fonéko Tedjo pour leur hospitalité, nous en sommes
reconnaissant.
RESUME
Ce présent mémoire examine la question de
l'accès à l'eau qui est aujourd'hui l'une des
préoccupations majeures, voire les défis auxquels beaucoup de
nations doivent faire face particulièrement celles du sahel1.
En effet, au sahel la maitrise de l'eau est un enjeu capital pour la
réussite de tout projet ou programme de développement durable. Au
Niger, depuis les décennies passées plusieurs centaines des
milliards de nos francs ont été injectés dans le secteur
de l'hydraulique. Mais, en dépit de ces efforts consentis par l'Etat et
ses partenaires, l'accès à l'eau pour les populations demeure
toujours une préoccupation majeure surtout en milieu rural où
l'eau considérée potable est pompée du sous-sol. Or
l'exploitation de ces eaux du sous- sol demande un coût exorbitant. Ainsi
près de la moitié de cette population rurale n'a pas encore des
points d'eau modernes à leur portée. Le village de Fonéko
Tedjo illustre bien cette problématique de l'accès à l'eau
pour les populations. C'est un village dont les populations parcourent
plusieurs kilomètres pour atteindre un point d'eau moderne ou
fréquenter les points d'eau superficiels en dépit des risques
réels de contamination de maladies. C'est dire là que les
difficultés liées à l'accès à l'eau ont des
conséquences préjudiciables sur le développement
socio-économique du village.
Mots clés : Accès à l'eau
potable, Fonéko Tedjo, Hydraulique
14
1 Région caractérisée par un
déficit hydrique.
ABSTRACT
What this memo examines the issue of access to water, which is
now one of the major concerns or challenges that many nations face particularly
those in the Sahel2. Indeed, in the Sahel water control is a crucial
issue for the success of any project or program development. In Niger, since
the past decades hundreds of billions francs were injected in the water sector.
But despite these efforts the government and its partners, access to water for
populations remains a major concern especially in rural areas where drinking
water is considered pumped from the basement. Yet the exploitation of these
waters from the basement demand an exorbitant cost, and nearly half of the
rural population do not have any modern water points within their reach. The
village of Fonéko Tedjo illustrates this problem of access to water for
people. It is a village whose people travel several kilometers to reach a
modern water points or frequent water surface despite the real risks of disease
contamination. That is to say that the difficulties related to access to water
have adverse consequences on the socio-economic development of the village.
Keywords: Access to drinking water,
Fonéko Tedjo, Hydraulic
15
2 Erea charactezed by a deficit water
16
INTRODUCTION GENERALE
Au Niger, l'accès à l'eau en quantité et
en qualité aux populations est depuis toujours un souci majeur pour les
populations comme pour les gouvernements. Des efforts considérables ont
été consentis au cours des deux dernières décennies
pour garantir aux populations un accès à l'eau. Depuis les
années 1980, près de 230 millions d'Euros, soit près de
152 milliards de FCFA, ont été ainsi investis dans la seule
hydraulique rurale pour équiper 17000 points d'eau3.
Globalement quelques 31000 points d'eau modernes ont été
construits pour un besoin de 470004. Cependant, en dépit des
ces moyens colossaux investis dans ce secteur et les résultats
escomptés, la problématique de l'accès à l'eau est
toujours une actualité et un défi majeur pour les dirigeants
surtout avec le rythme actuel de la croissance démographique (15.203.822
habitants, INS, 2010). Cette croissance rapide de la population entraine
davantage l'augmentation des besoins en points d'eau modernes. En effet, en
milieu rural où vivent 79,6% de la population (INS, 2010) et l'essentiel
du cheptel, la question de l'eau se pose avec beaucoup plus d'acuité,
car près de la moitié des populations n'ont pas accès
à une eau salubre. Dans les zones rurales la totalité de l'eau
potable est pompée du sous sol, ce qui demande beaucoup de moyens
matériels et financiers, surtout dans les régions de socle. En
effet, dans ces régions de socle, comme c'est le cas du
département de Téra (socle du Liptako Gourma), la construction et
la réussite de points d'eau modernes sont très aléatoires,
le taux d'échec lors des constructions des points d'eau peut atteindre
60%5. Du coup le nombre des points d'eau sont loin de couvrir les
besoins des populations. Cette situation d'insuffisance des points d'eau
modernes amène les populations à parcourir plusieurs
kilomètres pour s'approvisionner en eau au niveau des points d'eau
modernes et à consommer directement ou indirectement les eaux des mares,
rivières etc. malgré les risques évidents de contracter
des maladies. Le village de Fonéko sur lequel porte ce mémoire
illustre parfaitement cet état de fait. Ainsi, tout au long de ce
travail nous allons essayer d'évaluer la disponibilité de l'eau
dans le village, identifier et spatialiser les différents points d'eau,
montrer les difficultés majeures liées à
l'approvisionnement en eau, estimer les impacts socio-économiques
surtout les risques sanitaires auxquels ces populations sont exposées en
consommant les eaux non potables.
Le travail est ainsi reparti en cinq chapitres :
Le premier chapitre est consacré à la
problématique et aux aspects méthodologiques.
3
www.pseau.org
4
www.afriqueavenir.org/.../l'acces-a-l'eau-potable-reste-encore-un-defi-au-niger
5 Direction Départementale de l'hydraulique de
Téra, rapport annuel, 2009.
17
Le deuxième chapitre donne à un bref aperçu
du secteur de l'hydraulique rurale dans le département de Téra en
général et la commune urbaine de Téra en particulier.
Le troisième chapitre décrit la zone d'étude
en abordant un certain nombre d'aspects naturels et socio-économiques en
relation avec le sujet.
Le quatrième chapitre est consacré aux sources
d'approvisionnement en eau et leur mode de gestion.
Et enfin, le cinquième chapitre traite des impacts
socio-économiques engendrés par le problème de l'eau dans
le village.
18
Chapitre 1 : Problématique et approche
méthodologique
Ce premier chapitre situe notre travail dans un contexte
théorique global en montrant la place qu'occupe la question de l'eau
dans les politiques nationales, internationales et dans la production
scientifique. Il traite aussi de la démarche scientifique adoptée
pour réaliser l'étude.
19
1.1. Problématique
1.1.1 Contexte et justification
Aujourd'hui, l'un des défis majeurs auxquels est
confronté le monde est certainement celui lié à l'eau (que
ça soit sa maîtrise, sa gestion ou son accessibilité).
Pourtant, les ressources en eau sont plus que suffisantes à
l'échelle mondiale pour les besoins domestiques, pour l'agriculture,
l'industrie. En vérité, le problème réside dans le
fait que certaines personnes notamment les pauvres sont systématiquement
exclus.6 En effet, 1,1 milliards de personnes soit 17% de la
population mondiale vivent sans accès à l'eau potable dans le
monde et 2,6 milliards de personnes manquent de bon assainissement soit deux
personnes sur six7. Ainsi chaque année 1, 8 millions de
personnes dont 90% d'enfants de moins de cinq ans meurent des maladies
diarrhéiques, 88% de ces maladies diarrhéiques sont imputables
à la mauvaise qualité de l'eau.8 L'eau non potable est
ainsi responsable de 80% des maladies dans le monde et trois millions de
personnes dont 90% sont des enfants de zéro à quatre ans, meurent
chaque année dans le monde, victimes des maladies dues à l'usage
de l'eau non sécurisée.9
Dans de nombreux pays, l'accès à l'eau, la
distribution et les moyens d'assainissement adéquats reflètent la
distribution des richesses. En effet, l'accès des ménages
à l'eau courante avoisine les 80% pour les plus nantis de la population
contre 20% pour les 20% les plus pauvres.10 En Amérique du
nord et au japon, l'usage de l'eau par habitant dans les secteurs
résidentiels est de 350 litres par jour, 200 litres en Europe contre 10
à 20 litres en Afrique subsaharienne et où les femmes doivent
parcourir environ six kilomètres portant 20 kilogrammes pour aller
chercher de l'eau11.
En Afrique subsaharienne, près de 340 millions de
personnes n'ont pas encore accès à une eau potable12.
Dans cette région, seuls 46% de la population rurale ont un accès
à l'eau potable contre 81% en milieu urbain. Une grande partie de la
population subsaharienne et à fortiori au Sahel est contrainte de boire
l'eau des fleuves et des eaux stagnantes (mares), impropres à la
consommation. Elle contracte ainsi des maladies d'origine hydrique telles que
la bilharziose, le choléra etc.
6 Programme de Nations-Unies pour développement humain,
2006.
7 www.academiedel'
eau.org
8 Organisation Mondiale de la Santé 2004.
9
www.unicef.fr/userfiles/L_Unicef_d_l'eau.pdf
10 Programme des Nations-Unies pour le développement
humain, 2006.
11 www.academiedel'
eau.org
12
www.sossahel.org
20
Au Niger, pays sahélien par excellence, la maitrise de
l'eau est une composante fondamentale dans la réussite de tout projet ou
programme de développement socio-économique durable. En milieu
rural, la totalité des besoins en eau potable est satisfaite à
partir des nappes souterraines dont l'exploitation demande beaucoup de moyens
financiers et matériels, d'où la difficulté
rencontrée par les différents régimes dans la construction
des points d'eau modernes pour toute la population. Néanmoins,
dès les années 1960, l'Etat s'est engagé dans la
construction des points d'eau modernes à travers l'office des eaux du
sous sol du Niger (OFEDS)13. La décennie internationale de
l'eau potable et de l'assainissement en 1981 (DIEPA, 1981-1990)14
est intervenue dans ce contexte pour stimuler et soutenir les politiques
nationales en matière d'eau et assainissement. En effet, dans le cadre
de cette décennie, des objectifs ambitieux ont été
formulés pour la desserte en eau potable par le Ministère du Plan
dans le Plan de Développement Economique et Social du Niger (PDESN) :
1987-1991, ainsi :
? Tout village administratif, quelle que soit sa
population, doit être pourvu d'au moins un Point d'Eau Moderne
(PEM)15, Puits Cimentés ou forage avec hydro pompe
à motricité humaine ;
? Tout habitant devait disposer de 25 litres d'eau par
jour, ce qui correspond à un PEM pour 250 habitants ;
? Tout village ou hameau de plus de 250 habitants,
même non administratif, doit donc être pourvu d'un PEM, s'il se
trouve à plus de quatre kilomètres d'un PEM ;
? Les normes d'hydrauliques prévoyant une Adduction
d'Eau Potable (AEP), s'applique à tout village de plus de 1500
habitants.
Dans le cadre de ce plan de Développement Economique et
Social 1987-1991, 52,4 milliards16 ont été
attribués au sous secteur hydraulique du Ministère des
Ressources
13 C'est un établissement à caractère
industriel et commercial crée en 1963, en vue de la réalisation
des forages et des puits en milieu rural. Mais il a cessé de fonctionner
depuis les années 1990.
14 La conférence des Nations-Unies sur l'eau de Mar Del
Plata en 1977, a décrété les années 1981-1990,
Décennie Internationale de l'Eau Potable et de l'Assainissement (DIEPA).
L'objectif assigné à ces dix années était de
favoriser à tous, l'accès à l'eau potable et aux solutions
d'assainissement améliorés.
15 Tout ouvrage réalisé ou
aménagé dans le règle de l'art, qui fournit une eau de
qualité acceptable avec un débit d'au moins 0,5
m3/heure (ordonnance n°93-014du 02 mars 1993, portant
Régime de l'eau modifié par la loi n°98-041 du 07
décembre 1998.)
16 Programme hydraulique nationale, 2000.
21
Animales et de l'Hydraulique. Le nombre des PEM passent ainsi
de 5120 en 1980 à 11055 en 1986 pour un besoin de 22000 en 1990, ce qui
correspond à un taux de couverture national de 78%.17
Après les résultats appréciables de la DIEPA, toujours
dans une perspective de maitrise de l'eau, le Niger a engagé une
série de réglementations à travers notamment
l'élaboration d'un Schéma Directeur de Mise en Valeur et de
Gestion des Ressources en Eau, d'un Code Rural pour une gestion rationnelle des
ressources naturelles, une politique de redéfinition du régime de
l'eau avec les tables rondes entre gouvernement et partenaires techniques et
financiers, la redéfinition des attributions de certains
ministères intervenants dans les domaines de l'eau. La stratégie
de la réduction de la pauvreté (2002) dans lequel est inscrit
officiellement le Programme Spécial du président Tanja. En effet,
dans le cadre de ce programme, 25 stations de pompages pastorales, 680 puits
villageois et pastoraux, 150 puits émirats ont été
construits et 423 pompes à motricité humaine étaient
réhabilitées entre 2001-200818. En 2010 le Niger a
d'adopté une ordonnance portant code de l'eau du Niger cela montre la
volonté politique et surtout l'intérêt accordé
à la question de l'eau. Dans l'ordonnance modifiant la loi
n°2000-12, est prévu la création d'un fonds d'accès
universel à l'eau pour assurer notamment l'approvisionnement des
populations des zones les plus reculés19.
Le Niger est soutenu dans ce secteur de l'hydraulique par
divers partenaires (Coopérations, Projets, ONG, Association etc.). On
peut en effet, citer entre autres : la Coopération Suisse à
travers le programme hydraulique Niger Suisse, la Coopération Belge, la
Coopération Japonaise, la Banque Mondiale, le Fonds Européen de
Développement (FED), l'Unicef, l'Agence Française de
Développement (AFD), l'Union Economique et Monétaire Ouest
Africaine (UEMOA) qui a financé 350 forages en 2007 pour une valeur de
2.800.000.000 FCFA. Au total, 1000 forages seront réalisés dans
les pays de l'Union, sur les 3000 prévus pour trois ans dans les huit
pays de l'Union.20
Malgré la diversité des actions menées et
des acteurs impliqués dans ce secteur de l'eau depuis des
décennies, l'accès à l'eau est toujours une
préoccupation majeure. Le taux de couverture nationale en
infrastructures hydrauliques est loin d'être satisfaisant, surtout en
milieu rural où réside près de 80% de la population et
où la totalité de l'eau potable est pompée du sous-sol. Ce
taux de couverture nationale en points d'eau modernes était de 52% en
1977, 54,21% en 2001, 57,96% en 2006, 62,01 en 2007 et 62,19 en 2008, ce qui
correspond à 29.388 points d'eau modernes existants pour un besoin de
47.256 en 200821. A travers ces chiffres, on se rend compte que
l'évolution de la couverte nationale en points d'eau modernes est
très
17 JEAN LUC Richard, 1990.
18 Le Sahel n°7643, 2008
19 Sahel dimanche n°1418 du 24 décembre
2010. PP-1
20
www.mediaterre.org/eau/actu.2007
21 http//www.stat...ohydr_2008.htm
22
lente. On observe aussi des disparités inter et intra
régionales. Téra est l'un des départements du pays
où la question de l'eau potable se pose avec beaucoup d'acuité en
raison de la configuration hydrogéologique de son sous-sol. En effet, ce
département fait parti du Liptako Gourma qui est une région de
socle. L'existence de ce socle cristallin fait que la construction des forages
n'est possible qu'au niveau des discontinuités (fractures, fissures) de
la roche. C'est pourquoi la probabilité d'échec lors de
construction des points d'eau modernes est très élevé,
elle est supérieur à 40%, et peut d'ailleurs atteindre
jusqu'à 60% en certains endroits.22Une fois ces ouvrages
hydrauliques installés, les débits recherchés sont
généralement inférieurs à
1m3/heure23. Ce qui montre les difficultés dans la
prospection des sites de productivité24 et les souffrances
des populations pour accéder à l'eau. Cette situation fait que le
taux de couverture locale en PEM est largement en deçà à
la moyenne nationale. A Fonéko, village rattaché à la
commune urbaine de Téra, situé à 22 kilomètres au
nord de la ville de Téra sur la route nationale n°5
(Téra-Yatakala), se pose un problème crucial d'eau. C'est un
village qui ne dispose pas de point d'eau moderne en son sein, les populations
sont contraintes de s'approvisionner en eau pendant une bonne partie de
l'année au niveau des retenues d'eau artificielles construites par
Boubou Hama25 dans les environs du village depuis les années
1960. Quant au niveau des forages, les populations parcourent environ huit
kilomètres allé et retour. Dans cette situation l'on est en droit
de se poser la question de savoir : quelle est la disponibilité de l'eau
dans le village de Fonéko? A cette question principale peuvent s'ajouter
les interrogations suivantes :
Quelles sont les sources d'approvisionnement en eau des
populations et d'abreuvage des animaux ?
Quel est l'usage l'eau ?
Quelle est la qualité de l'eau ?
Quelles sont les difficultés liées à
l'accès à l'eau ?
Quels sont les impacts liés aux difficultés
d'accès à l'eau ?.
22 Selon le directeur départemental de
l'hydraulique de Téra.
23 Direction départemental de l'hydraulique de
Téra
24 C'est la capacité d'un aquifère
à fournir par le biais d'un captage, un débit minimal susceptible
d'être exploité.
25 Homme de lettres, politique et originaire de
Fonéko Tedjo. Il fut président de l'Assemblée Nationale de
1960 à 1974.
23
1.1.2 Les hypothèses et les objectifs de
l'étude 1.1.2.1. Les hypothèses
· Les difficultés en matière
d'accès à l'eau tout comme la variation de la
disponibilité de cette eau dans le temps induisent des impacts
négatifs sur le développement socio-économiques du
village;
· La mauvaise répartition des sources
d'approvisionnement en eau du village limite l'accès à l'eau
potable aux populations, ce qui les amène à consommer de l'eau de
qualité médiocre voire mauvaise susceptible d'engendrer des
maladies d'origine hydrique.
1.1.2.2. Les objectifs
1.1.2.2.1. Les objectifs globaux
· Comprendre les conditions d'accès à l'eau
des populations et du bétail dans le village de Fonéko;
· Evaluer les contraintes liées à
l'accessibilité de l'eau dans le village
· Comprendre les risques sanitaires liés au mode
d'accès à l'eau dans ce village
1.1.2.2.2. Les objectifs spécifiques Il s'agit
essentiellement :
· D'identifier les différentes sources
d'approvisionnement en eau de la population de Fonéko Tedjo ;
· D'évaluer les besoins en eau des ménages
;
· D'évaluer la qualité des eaux de
consommation ;
1.1.3 Clarification des concepts
Avant tout travail scientifique il conviendrait de clarifier
les concepts clés nécessaires à la compréhension du
sujet dont il en est question.
1.1.3.1. Eau potable
L'OMS définit l'eau potable comme étant celle
dont la consommation est sans danger pour la santé. Pour que l'eau soit
qualifiée de potable, elle doit répondre à des normes
relatives aux paramètres organoleptiques (couleur, turbidité,
odeur, saveur),
24
physico-chimiques (température, ph, etc.),
microbiologiques (coliformes fécaux, streptocoques, etc.) et à
des substances indésirables et toxiques (nitrates, nitrites, arsenic,
plomb, hydrocarbures, etc.) Pour chaque paramètre, des valeurs limites
à ne pas dépasser sont établies. Le fait qu'une eau soit
potable ne signifie pas qu'elle est exempt d'agents pathogènes mais que
leur teneur a été jugée insuffisante pour
déclencher une maladie. Les normes de potabilité de l'eau sont
ainsi définies et peuvent être différentes d'un pays
à l'autre. Dans le code l'eau du Niger26, une eau potable est
définie comme étant une eau à l'état naturel ou
traitée dont les caractéristiques organoleptiques (saveur, odeur,
couleur,....), esthétique, physico-chimique et microbiologiques sont
conformes aux normes de qualités de l'eau en vigueur. C'est une eau apte
à la consommation humaine.
1.1.3.2. Accès à l'eau potable
Le dictionnaire Hachette 1993, définit l'accès
comme étant la possibilité d'accéder, de parvenir à
quelque chose. La notion d'accès rend compte de la plus ou moins grande
facilité avec la quelle on peut accéder à un service.
Appliquée à l'eau potable, elle se décline en termes de
disponibilité de la ressource, de permanence, de distance qui
sépare le ménage de son point d'eau et de qualité. En
termes de distance, on entend par accès raisonnable, l'existence d'un
point d'eau potable permanent à une distance inférieure à
200 mètres de la concession (OMS, 2003). En termes de coût,
l'accès à l'eau potable est plus difficilement mesurable puisque
le prix d'eau varie en fonction des milieux (urbain, rural) et du type
d'infrastructure. En milieu rural ce coût est plus ressenti du fait de la
pauvreté des ménages ruraux. En matière d'accès
à l'eau, des normes quantitatives ont été fixées.
Ainsi, l'OMS, propose un minimum vital de 20 litres par jour et par personne.
Au Niger, cette norme est de 25 litres d'eau par personne et par jour alors que
le PNUDH recommande 50 litres d'eau par jour pour qu'une personne puisse vivre
décemment. Au Niger selon les textes en vigueur en matière de
l'eau, toute la population tant urbaine que rurale doit disposer
raisonnablement de l'eau. Mais la réalité est tout autre car non
seulement il y a des disparités intra et inter zonales mais aussi il
existe des régions où les populations parcourent plusieurs
kilomètres pour s' approvisionner en eau au niveau des points d'eau
modernes. C'est le cas des populations du village de Fonéko Tedjo. Le
coût de l`eau est aussi l'un des facteurs majeurs limitant l'accès
à l'eau aux populations. En effet, les populations rurales payent l'eau
plus chère car elles ne disposent pas de robinet individuel.
26 Projet de loi portant code loi du Niger, version
finale 2010.
25
1.1.3.3. Hydraulique
Le dictionnaire Hachette, 1993, définit l'hydraulique
comme l'ensemble des techniques de captation, de distribution et d'utilisation
des eaux (irrigation, chutes motrices).
1.1.3.4. Hydraulique rurale
L'hydraulique rurale englobe tous les aspects relatifs
à l'approvisionnement en eau des populations rurales et du cheptel. Elle
se compose de l'hydraulique villageoise et de l'hydraulique
pastorale27.
1.1.3.4.1. L'hydraulique villageoise
Elle concerne l'équipement du monde rural en ouvrages
qui visent à assurer la satisfaction des besoins en eau des populations
rurales.28 Le code de l'eau du Niger définit l'hydraulique
villageoise comme étant le volet de l'hydraulique rurale relatif
à l'approvisionnement en eau des populations des centres ruraux de moins
de 2000 habitants.
1.1.3.4.2. L'hydraulique pastorale
Elle désigne la politique de multiplication des points
d'eau et de modernisation de l'abreuvage qui fut mise en oeuvre au Sahel
à partir des années 195029. Son objectif était
de développer et d'intensifier l'élevage extensif en jouant sur
un facteur essentiel, l'accès à l'eau. Dans le code de l'eau du
Niger, l'hydraulique pastorale est définie comme étant le volet
de l'hydraulique rurale qui concerne les points d'eau réalisés en
zone pastorale ou équipés de superstructures spécifiques
à l'alimentation en eau du cheptel. La consommation en eau par le
cheptel est difficile à évaluer, le besoin en eau varie au cours
de l'année en fonction de la disponibilité fourragère, du
temps de déplacement des troupeaux, globalement en fonction des
conditions environnementales. En milieu sahélien, les normes en
matière d'accès à l'eau du cheptel sont estimées
à 25 litres par jour et par tête de gros bétail
(UBT=Unité Bétail Tropical)30 Mais
généralement, on adopte 40 litres par UBT et par jour comme norme
indicative.31 Au Niger, Le Ministère des Ressources Animales,
fixe cette norme à 30 litres par UBT et par jour.
27 Code de l'eau du Niger, version finale, 2010.
28 Atlas National du Niger, 2002.
29 Catherine Baroin, 2007, ethnologue,
spécialiste de Toubou et chercheuse à CNRS depuis 1997.
30 UBT est une de référence correspond
à un bovin de 250 kg de poids vif.
31 GADELLE François, 1989.
26
1.1.4 Revue de littérature
La recherche documentaire nous a permis de savoir
l'intérêt accordé à la question de l'eau par la
communauté internationale et cela malgré l'émergence des
problématiques globales comme le réchauffement climatique ou la
biodiversité. La question de l'eau reste ainsi au centre des politiques
de développement du 21eme siècle. Le thème de
l'accès à l'eau pour tous est donc une problématique
internationale à laquelle participent les institutions
financières internationales, les opérateurs privés
internationaux, les ONG et les pouvoirs publics des Etats, ce qui justifie
certainement les multiples tables rondes, conférences et forums de ces
trente dernières années sur la question de l'eau. Au centre de
ces rencontres étaient toujours les questions liées à sa
mobilisation, sa maîtrise, sa gestion, son accessibilité, etc.
C'est dans ce contexte qu'en 1977, au sommet des Nations Unies tenu à
Mar Del Plata, la décennie (1981-1990), a été
consacrée « décennie internationale de l'eau potable et
l'assainissement ». Le but était de procurer de l'eau potable et un
assainissement convenable pour tous en 1990. Mais à la fin de la
décennie, on a constaté que les objectifs assignés
étaient loin d'être atteints car les problèmes
d'assainissement se sont intensifiés et l'écrasante
majorité de la population africaine n'a pas encore accès à
l'eau potable. Deux ans après la fin de cette décennie, le 22
mars de chaque année est proclamé journée mondiale de
l'eau par la conférence des Nations Unies sur l'environnement et le
développement lors du sommet de la planète terre tenu à
Rio de Janeiro en 1992. Et 15 ans après la DIEPA, Les Nations unies ont
déclaré encore la période 2005-2015, «
décennie internationale d'action, l'eau source de vie » et se fixe
un programme mondial accordant davantage d'importance aux problèmes
relatifs à l'eau. Cette action est inscrite dans les OMD pour la
réduction de moitié d'ici 2015, du pourcentage de la population
qui n'a pas accès de façon durable à un approvisionnement
en eau. Ainsi pour atteindre ces Objectifs du Millénaire pour le
Développement (OMD), faudrait-il investir 180 milliards de dollars US
par an au lieu de 80 actuellement.32 Ainsi, vue le rythme actuel des
investissements dans le secteur, l'Afrique subsaharienne n'atteindra pas les
OMD en 201533. Aujourd'hui, la réussite du combat de l'eau
potable et de l'assainissement est une garantie pour réussir un
développement humain durable, c'est certainement pourquoi docteur Lee
Joog34 avait dit que « L'eau et l'assainissement sont
indispensables à la santé publique. Je dis souvent qu'ils en
constituent la base, car lorsqu'on aura garanti à tout un chacun quelle
que soient ses conditions de vie, l'accès à une eau salubre et
à un assainissement correct, la lutte contre un grand nombre de maladies
aura fait un bond énorme » Dans ce même ordre
d'idée, l'ancien secrétaire de l'ONU, Kofi Annan disait : «
nous ne vaincrons ni le sida, ni la
32 AlAIN Mathys est le directeur du programme
« Eau pour Tous » de Suez Environnement depuis 1999.
33www.btcctb.org:
Enjeux et perspectives de la gestion de l'eau potable en milieu rural,
expériences de la coopération belge dans le domaine de
l'hydraulique rurale et périurbaine en Afrique.
34 Dr LEE JOOG-Wook directeur général
de l'organisation mondiale de la santé.
27
tuberculose, ni le paludisme, ni aucune autre maladie
infectieuse qui frappe les pays en développement avant d'avoir
gagné le combat de l'eau potable, de l'assainissement et des soins de
santé de base ». L'accès à l'eau est
considéré comme un droit universel, un droit de
l'homme35. Et « le droit à l'eau consiste en un
approvisionnement suffisant, physiquement accessible et à un coût
abordable, d'une eau salubre et de qualité acceptable pour des usages
personnels et domestiques »36 « Le droit à l'eau est
indispensable pour mener une vie descente. Il est une condition
préalable à la réalisation des autres droits de l'homme
».37 Certains Etats, comme l' Uruguay, garantissent le
droit à l'accès à une eau salubre en quantité et en
qualité suffisante comme un droit constitutionnel. Au Niger aussi
l'accès à l'eau, et autres services sociaux de base sont des
droits fondamentaux, même si la réalité est toute autre.
C'est certainement pourquoi Ricardo Petrella38 disait que «
24 pays d'Afrique (au sud du Sahara et du Maghreb), sont incapables de
fournir de l'eau potable à l'ensemble de la population. Outre des
questions de volonté politique, se pose par conséquent la
question du financement des infrastructures ».
En dépit, de tous ces engagements de la
communauté internationale, la question de l'accès à l'eau
pour les populations est une préoccupation essentielle pour les
populations surtout des pays pauvres. Face à cette situation, il est
raisonnable de s'interroger sur l'efficacité des politiques
internationales en matière d'accès à l'eau potable.
Du point de vue production scientifique la question de l'eau
est au centre des recherches à travers le monde. Des chercheurs l'ont
abordée dans leurs travaux sous plusieurs angles. En effet, depuis 1985,
MICHEL R. dans une étude sur l'eau, relève que les maladies
hydriques sont responsables dans le monde de la moitié des
décès infantiles. Elles sont aussi responsables de l'occupation
d'un lit d'hôpital sur deux, de l'affaiblissement des personnes pour
travailler. En 1991, GOTTER. A et al, soulignent à travers des
études réalisées au Nicaragua que les enfants qui habitent
dans des maisons où la disponibilité en eau est faible, ont un
taux plus élevé (34%) de diarrhée par rapport à
ceux d'un meilleur approvisionnement.
Au Sahel, les études sur l'eau ne sont pas
récentes. Elles sont d'ailleurs jusqu'à une date récente
orientées vers le monde rural où la situation semblait plus
préoccupante. En se penchant sur la qualité de l'eau en milieu
rural, GUILLEMIN. F en 1984, a montré à travers des analyses sur
218 points d'eau au Burkina Faso que des forages sources d'eau supposées
potables sont bien souvent pollués. Il constate par ailleurs que les
points d`eau traditionnels sont les plus pollués et que cette pollution
est imputable à des facteurs physiques (structure géologique,
topographique), technique
35 Forum sur l'eau, Istanbul, 2009.
36 Observatoire général n°15, 2002
: Le droit à l'eau.
37 FABIEN Dupuis, diplômé de l'IPRIS,
doctorant spécialisé sur la Géographie de l'eau, partie
introductive de l'observation générale, réalisation de
l'Objectif du Millénaire pour le Développement n°7.
38 FABIEN Dupuis, diplômé de l'IPRIS,
doctorant spécialisé sur la Géographie de l'eau.
28
(absence de margelle et parois non aménagés) et
humains (comportement et mentalité). Donc considérés
potable peuvent être pollués. En 1985, DEYEUX, (D), dans son
ouvrage intitulé : l'eau, quels enjeux pour les sociétés
rurales, disait que « la qualité de l'eau de boisson fait davantage
à la santé publique que n'importe quel vaccin ou
médicament. ». Cela veut dire que l'eau de bonne qualité est
une arme redoutable pour combattre beaucoup des maladies. JEAN LUC Richard
quant à lui, en 1990, a abordé l'accès à l'eau dans
le cadre de l'hydraulique villageoise dans le canton de Gabi (Niger). DIOMA K,
en 1990, s'est intéressé à l'analyse des aspects
sanitaires liés à l'approvisionnement en eau en milieu
périurbain Boromo (Burkina Faso). Il relève que la consommation
d'eau issue du réseau de l'Office National de l'eau et de
l'Assainissement (ONEA) est faible et que cette situation est imputable
à des contraintes économiques (coût du service), et au
nombre élevé des puits que les populations
préfèrent utiliser. Or en zone urbaine l'eau des puits
traditionnels est généralement impropre à la consommation.
Cet auteur veut dire que la situation socio-économique des population
joue fortement dans l'accès aux sources d'eau potable. En 1993,
OUEDRAOGO M. qui a travaillé sur le milieu périurbain de
Ouagadougou, a évalué le degré de responsabilité de
l'eau dans l'émergence ou la persistance de certaines maladies. Abordant
essentiellement la question de la qualité de l'eau, il souligne que
seulement 6% des points d'eau échantillonnés peuvent être
considérés comme potable si l'on se réfère aux
normes de l'OMS en matière d'eau de boisson. En 1996, BALMER F. et al
ont posé la nécessité de la bonne gestion de l'eau du
sahel vue les conditions géographiques de la région. Cela est
indispensable quand on sait que le développement socio-économique
des pays sahéliens passent par a maîtrise de l'eau. En 1997,
PHILIPE Gombert a étudié la variabilité spatiale de la
productivité aquifère du socle sahélien en hydraulique
rurale, il relève ainsi que la productivité des forages
d'hydraulique rurale en zone sahélienne est difficilement
prévisible, dans les aquifères discontinus du socle les taux
d'échecs dépassent localement 50%. Ce même constat a
été fait par la direction départementale de l'hydraulique
de Téra et le taux d'échec lors des constructions des points
d'eau modernes peut atteindre 60% en certains endroits. En 2000, OLIVIER DE
SANDAN J-P et ELHADJ DAGOBI se sont intéressés à la
gestion communautaire des points d'eau en hydraulique villageoise en se
demandant à qui ce mode de gestion profite ? Sert-il
l'intérêt public ou bien d'autres opérateurs tels que les
comités villageois? Cette étude met en exergue le doute du
système de gestion des points d'eau ce qui abouti souvent aux
détournements et dysfonctionnement des points d'eau une fois que ceux-ci
tombent en panne. MENARD Claude en 2001, dans son article intitulé
enjeux d'eau : la dimension institutionnelle, a abordé trois aspects du
problème de l'eau ; les caractéristiques très
spécifiques du secteur, l'approche classique et les limites qu'elle
rencontre et enfin la dimension institutionnelle qui apparait incontournable
pour comprendre les très nombreux échecs dans les reformes des
systèmes d'approvisionnement en eau dans les pays en
développement. Pour MENARD donc la réussite des politiques en eau
passe par une bonne approche institutionnelle. En 2004, LISE Breuil dans sa
thèse de doctorat intitulé : renouveler
29
le partenariat public-privé pour le service d'eau dans
les pays en développement, il propose ainsi la conjugaison des dimension
contractuelle, institutionnelle et participative pour une bonne gouvernance de
l'eau. MAHAMAN T-A en 2005, dans son article intitulé : Le partenariat
public-privé dans le secteur de l'eau au Niger, a fait l'autopsie de la
reforme du secteur de l'eau au Niger. LAWALI Dambo, en 2007, dans sa
thèse de doctorat intitulé : usage de l'eau à Gaya (Niger)
: entre fortes potentialités et contraintes majeures, a centré
son étude sur l'estimation et la répartition spatiale des
ressources en eau, le cadre juridique et institutionnel régulant leur
mise en valeur, les différents secteurs d'utilisation de l'eau ainsi que
les contraintes affectant cette utilisation. APPOLINNAIRE K. quant à lui
en 2007, a abordé le problème de l'accès à l'eau
potable et les risques diarrhéiques dans les zones
périphériques de Ouagadougou à travers l'exemple de
Yamtenga. BOUREIMA Ousmane professeur en hydrogéologie mène
depuis quelques années des recherches sur la qualité de l'eau et
la vulnérabilité à la pollution des nappes souterraines
(dites de socle) dans le département de Téra. Ainsi, selon ses
travaux les teneurs des eaux en nitrates, nitrites ou sulfates et/ou en
chlorures dépassent parfois largement les normes fixées par
l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les rendant inaptes à
la consommation humaine. Ainsi donc, dans le département de Téra
près de 31% des eaux des points d'eau modernes (forages, puits
cimentés) considérés comme potables sont pollués
alors que les populations sont entrain de consommer ces eaux en s'exposant
à des risques sanitaires.
Au vue de tout ce qui précède, on constate que
la question de l'eau a été abordée sous plusieurs angles
et par divers acteurs, chacun selon la problématique qu'il veut traiter.
On constate aussi que loin d'être épuisé ou
dépassé, les questions liées à l'eau continuent
à nourrir les réflexions scientifiques et les programmes
politiques des Etats (exemple le Niger) où l'eau est l'une des
ressources fondamentales les plus rares et les moins maitrisées. C'est
pourquoi aujourd'hui encore une étude axée sur l'eau, quelque
soit l'angle sous lequel elle est abordée trouvera toute son importance,
surtout quand elle est orientée vers le milieu rural. En effet, comme
nous l'avons signalé un peu plus haut les recherches en matière
de l'eau sont aujourd'hui plus orientées vers les centres urbains et
périurbains que les zones rurales. C'est pourquoi, pour notre part, nous
avons abordé dans ce mémoire l'accès à l'eau en
milieu rural à travers l'exemple de Fonéko en examinant les
difficultés liées à l'accessibilité de l'eau et les
risques sanitaires majeurs auxquels les populations sont exposées en
consommant les eaux insalubres
1.2. Approche méthodologique
Ils sont constitués tout d'abord d'une recherche
documentaire (au niveau des bibliothèques, des centres de documentation)
et enfin d'une recherche sur le terrain à travers une collecte des
données.
30
1.2.1 Recherche documentaire
C'est la première étape de notre travail elle
nous a permis non seulement d'avoir les premiers éléments de
réflexion sur le sujet mais aussi d'apprécier les études
réalisées sur le sujet. Elle a commencé tout d'abord au
niveau des bibliothèques de la Faculté des Lettres et des
Sciences Humaines (FLSH), du département de Géographie, de la
Faculté d'Agronomie (FA), de l'Institut de Recherches en Sciences
Humaines (IRSH), au LASDEL, au service de la documentation du Ministère
de l'hydraulique, de l'environnement et de la lutte contre la
désertification, au Ministère des ressources animales, à
l'Institut National de la Statistique (INS), à la marie de Téra
et à la documentation du service départemental de l'hydraulique.
Des sites web ont été aussi consultés. Ce travail s'est
poursuivi tout au long de la rédaction de ce mémoire.
1.2.2 Les travaux de terrain
Ils sont intervenus après la recherche documentaire
ayant permis de rédiger la problématique. Ils sont
essentiellement constitués par une observation visuelle de terrain, des
entretiens, une enquête par questionnaire à administrer, une prise
des coordonnées géographiques des points d'eau et du village et
enfin la prise des images pour illustrer les faits.
1.2.2.1. L'observation de terrain
C'est le premier contact, la première phase de
terrain, elle a ainsi permis d'identifier les différents points d'eau
disponibles; d'appréhender la situation de l'eau dans le village
à travers l'observation directe. L'observation a permis de nous rendre
compte des souffrances des populations. Ces souffrances s'expriment en termes
de la distance parcourue pour accéder à l'eau, de temps
consacré à la recherche de l'eau etc. En un mot elle nous a
permis d'observer de visu les conditions d'accès à l'eau dans le
village.
1.2.2.2. Les entretiens
Ils se sont effectués au niveau des personnes
ressources. Tout d'abord au niveau du directeur départemental de
l'hydraulique et celui de l'élevage de Téra pour comprendre la
situation de d'hydraulique dans le département, avec le chef du village
de Fonéko, pour savoir la situation réelle de l'eau au niveau de
son village mais aussi avoir quelques informations générales sur
le village ; telles que l'historique du village, et aux élus locaux du
village pour savoir la place de l'hydraulique dans le plan de
développement communal, à l'infirmier du CSI de Fonéko
pour avoir le registre des maladies hydriques identifiées. A la fin de
ces entretiens nous avions pu non seulement comprendre la situation de
l'hydraulique dans le département de Téra mais aussi avoir les
premières informations qui ont servi à l'élaboration du
questionnaire et en partie la rédaction du document d'une manière
générale.
31
1.2.2.3. L'enquête par questionnaire
Les questionnaires sont destinés aux chefs de
ménages qui sont regroupés en 87 ménages (INS, 2006) et
pour se faire, nous avons adopté la méthode dite «
connaissance d'aptitude pratique » (CAP), qui consiste à
arrêter l'administration des questionnaires à un stade où
l'on constate que les personnes interrogées donnent presque les
mêmes réponses. Nous avons arrêté l'administration
des questionnaires à la soixantaine de personnes interrogées.
Cette méthode nous parait très intéressante car non
seulement elle permet de ne pas biaiser les résultats (lorsqu'il n'ya
pas de diversité dans les informations recueillies, les résultats
peuvent être biaisés) mais aussi de gagner du temps pendant la
collecte et le traitement des données. Le questionnaire est
composé de six grands titres que sont l'identification de
l'enquêté, les sources d'approvisionnement en eau, l'usage et la
gestion de l'eau, la qualité de l'eau, les moyens, techniques d'exhaure
et de transport de l'eau et enfin les difficultés liées à
l'accès à l'eau. Ces titres se composent de 79 questions. Pour la
saisie du document Microsoft Word 2007 a été utilisé,
Excel 2007 pour la conception des courbes, le sphinx pour la conception du
questionnaire, la saisie, le traitement et l'analyse de données et
Microsoft PowerPoint pour la présentation des résultats à
la soutenance publique.
1.2.2.4. Les matériels et outils informatiques
utilisés
A l'aide d'un GPS de marque Garmin nous avons
inventorié les points d'eau, ce qui a permis d'établir une
cartographie pour ces points d'eau. Les logiciels Google Earth et Adobe
Illustrator CS3 ont permis la conception et la réalisation des cartes.
Un appareil numérique de marque Kodak a été utilisé
pour la prise des images.
2.2.3. Les difficultés rencontrées
Les difficultés sont liées essentiellement au
manque de certains documents traitant spécifiquement de notre terrain
d'étude. Ceci a fait que nous n'avions pas pu avoir certaines
données qui auraient amélioré davantage le document. A
titre illustratif, il n'existe pas une carte du village, ce qui nous a
amené à concevoir plusieurs cartes grâce à l'image
du village captée sur Google Earth et Adobe Illustrator CS3 nous
à permis la cartographie. Nous sommes aussi confrontés aux
difficultés relatives à la réalisation d'une enquête
en milieu rural, à savoir l'exactitude des dates des faits, la
pertinence des certaines informations. A titre illustratif, il nous a
été difficile de savoir l'année de contraction des
maladies hydriques au niveau d'un certain nombre de personnes
interrogées.
2.2.4 Justification du choix du sujet
Le choix de traiter ce sujet s'est matérialisé
à la suite d'une conversation avec Abdou Issa Yolehinza, un doctorant
que j'ai accompagné dans ses recherches de
32
terrain dans le département de Téra. Très
vite sur le terrain il s'est rendu compte du problème de l'eau dans
cette région. C'est ainsi que revenu à Niamey, il nous a
suggéré de prendre notre sujet de mémoire de
maîtrise sur l'accès à l'eau dans le département de
Téra dans le cadre de l'hydraulique rurale en prenant l'exemple du
village de Fonéko Tedjo. Ce village nous paraît en effet,
très problématique car ne disposant pas des points d'eau modernes
en son sein, les populations consacrent parfois une journée
entière pour la recherche de l'eau potable ou consommer les eaux de
surface en dépit des risques sanitaires majeurs. Cette situation induit
des impacts socio-économiques néfastes sur ce village. Il
faudrait aussi noter comme d'autres raisons justifiant le choix de ce sujet, le
fait que nous connaissons Téra pour avoir fait une partie très
importante de nos études. Nous connaissons donc, les souffrances
liées à la recherche de l'eau pendant certaines périodes
de l'année. A cela s'ajoute l'actualité de la question de l'eau
que ça soit au niveau des dirigeants politiques qu'au niveau de la
production scientifique
A travers la recherche documentaire, nous avions pu cerner
davantage les contours du sujet, savoir un peu sur l'état de la
connaissance concernant l'eau. Cela nous a permis de bien cadrer notre sujet et
d'y adopter une méthodologie convenable.
33
Chapitre 2 : Le secteur de l'hydraulique rurale
à Téra
Dans ce chapitre nous allons faire un bref aperçu sur
le secteur de l'hydraulique rurale dans le département en
général et dans la commune urbaine de Téra en particulier.
Il sera en fait question de faire part de l'évolution et de
l'état actuel du parc hydraulique du département à travers
une critique des chiffres. Nous faisons aussi cas des acteurs impliqués
dans ce secteur au niveau de ce département.
34
2.1. Etat des lieux de l'hydraulique rurale dans le
département de Téra
Nous allons ici aborder séparément
l'hydraulique villageoise et pastorale même si ce sont des secteurs
imbriqués dans le département de Téra.
2.1.1. L'hydraulique villageoise
Depuis 1992, avec la fin du programme « Autorité
du Liptako Gourma », le département de Téra, alors
arrondissement n'a pas bénéficié d'un programme
d'hydraulique villageoise. Aujourd'hui le département ne dispose pas
d'un schéma d'aménagement hydraulique même en projet. En
1999, il comptait 691 points d'eau modernes toutes catégories confondues
avec un taux de couverture en infrastructures hydrauliques de 23,4%. Au 31
décembre 2008, soit onze ans après, le parc hydraulique du
département ne compte que 925 PEM pour une population estimée
à 534.098 habitants, ce qui correspond à un taux de couverture de
47,55% très largement en deçà de la couverture nationale
qui est 62% (INS, 2006). A ce parc hydraulique, il faudrait y ajouter les
points d'eau de surface qui sont d'ailleurs trop utilisés pendant une
grande partie de l'année par les populations et le bétail. A
travers les chiffres du tableau ci-dessous, on constate que les points d'eau
modernes sont loin de répondre au besoin des populations. Cela
s'illustre par un taux de couverture très faible.
Population estimée au
31/12/2008
|
PC
|
F
|
Total PEM
|
Besoins en PEM
|
PEA
|
Mini AEP
|
TCE théorique
(%)
|
534.098
|
74
|
578
|
925
|
1019
|
2
|
22
|
47,55
|
|
Tableau 1. Situation de l'hydraulique dans le
département de Téra en janvier 2009.
Pc : puits cimenté, F :
forage, PEM : point d'eau moderne, PEA :
poste autonome, AEP : adduction d'eau
potable, TEC : taux de couverture en eau, DDH :
direction départementale de l'hydraulique
Source : Actualisation DDH/Téra janvier
2009.
35
2.1.2. L'hydraulique pastorale
Aucune infrastructure hydraulique à vocation pastorale
n'existe dans le département de Téra quand bien même
l'élevage figure en second rang dans les activités
économiques. Les points d'eau pastoraux sont constitués
essentiellement des mares, des retenus d'eau du fleuve et de quelques flaques
d'eau sur les trois affluents (le Gorouol, le Dargol et la Sirba)39
qui traversent le département. Cette situation laisse apparaître
le caractère aléatoire de l'hydraulique pastorale parce qu'elle
dépend des eaux des pluies et ne garantie aucune perspective pour le
développement de l'élevage dans le département.
2.2. Etat des lieux de l'hydraulique rurale dans la
Commune Urbaine de Téra Ici aussi, nous allons aborder
séparément l'hydraulique villageoise et pastorale.
2.2.1. L'hydraulique villageoise
Tout comme le centre urbain de Téra, la situation de
l'eau potable est assez préoccupante dans les villages rattachés
à la commune urbaine. Certaines populations parcourent près de
cinq à huit kilomètres par jour pour s'approvisionner en eau au
niveau des points d'eau modernes. Une bonne partie de cette population rurale
consomme directement l'eau de surface, contractant des maladies hydriques
(Cholera, bilharziose, conjonctivite, etc.). En dehors du réseau
d'adduction d'eau potable de la ville de Téra, la commune urbaine ne
compte que 90 points d'eau modernes composés comme suit :
? 69 forages à motricité humaine, dont 55
fonctionnels et 14 non fonctionnels ;
? 19 puits cimentés dont 13 fonctionnels et 6 non
fonctionnels ; ? 2 Mini Adductions d'Eau Potable, toutes fonctionnelles.
Le taux de couverture en zone rurale est estimé
à 50,93 % avec une grande disparité entre les sous
zones.40 Comme pour le département, le parc des pompes en
sont loin de répondre aux besoins en eau des populations et du
bétail. Ceci amène ces populations à consommer les eaux de
surface préjudiciable à leur santé. La commune urbaine de
Téra est ainsi confrontée à un problème accru en
eau pour les populations surtout pendant la période de canicule avec
l'augmentation de la consommation humaine et animale.
39 Tous des affluents de la rive droite du fleuve
Niger.
40 La Commune Urbaine de Téra est
subdivisée en un groupement de villages qu'ils ont appelé sous
zone et ces sous zones sont constituées autour des gros villages.
36
2.2.2. L'hydraulique pastorale
Comme au niveau départemental, aucune infrastructure
à vocation pastorale n'existe dans la commune urbaine de Téra.
Les points d'eau pastoraux sont constitués essentiellement des mares,
des retenus d'eau sur l'affluent le Dargol. Ainsi, après le tarissement
de certains de ces points d'eau, l'abreuvage du bétail se poursuit au
niveau de ceux qui sont affectés aux populations. Cette pratique
crée non seulement une situation de surexploitation de ces ressources
mais aussi entraine des tensions et ou des conflits entre les usagers autour de
ces points d'eau.
2.3. Les partenaires intervenant dans le secteur de
l'hydraulique dans le département de Téra
Depuis les années 1980, avec les séries de
Programmes d'Ajustement Structurel (PAS) et l'émergence des
Organisations Non Gouvernementales et des Associations, l'Etat s'est
progressivement désengagé de ses missions régaliennes. Les
secteurs sociaux de base (la santé, l'éducation, l'accès
à l'eau potable, etc.) sont désormais délaissés
à ces nouveaux acteurs, l'Etat ne joue qu'un rôle
d'accompagnement. Dans le département de Téra, le secteur de
l'hydraulique est pris en charge par les partenaires au développement.
Ces partenaires sont divers ainsi que leurs sources de financement et leurs
activités concernent la construction des points d'eau modernes, leur
réhabilitation et la sensibilisation des populations sur
l'hygiène tout au long de la chaine de l'eau (autour des points d'eau,
la prise, le transport et le stockage de l'eau). Ces partenaires sont
essentiellement constitués des Organisation Non Gouvernementales
(locales et internationales) ; des Associations, des Projets de
développement, des Coopérations (bilatérale,
multilatérale et décentralisée). Ils travaillent en
étroite collaboration avec la direction départementale de
l'hydraulique de Téra, et leurs stratégies d'intervention repose
fondamentalement sur une approche participative. Les coûts financiers de
leurs activités sont colossaux car la construction d'un seul forage
kardia peut coûter 20 millions de FCFA au minimum. Parmi ces partenaires
nous pouvons citer entre autre : le projet BAD, l'UEMOA, L'ONG Goy Ga
Zaâda, le Projet d'Appui à la Sécurité Alimentaire
(PASA), la Coopération Turque, l'Unicef, la Coopération
Japonaise, le PVDT, FICOD, l'Islamic Relief; Projet de Développement de
l'Elevage dans la Région du Liptako Gourma (PDERLG), la
Coopération Décentralisée Téra-Bonneville (commune
Française), la fondation Zayed etc.
Les deux forages du village de Fonéko Tedjo ont
été réalisés par l'ONG Goy Ga Zaâda et la
fondation Zayed
37
Le parc des pompes hydrauliques de Téra est loin de
répondre aux besoins en eau des populations du département.
Téra est d'ailleurs l'un des départements qui enregistre les plus
faibles taux de couverture en infrastructures hydrauliques du pays. Cette
situation met ainsi en épreuve la vie des populations.
38
Chapitre 3 : Fonéko, un village du Liptako
Gourma
Dans ce chapitre, nous allons faire la situation
géographique de notre zone d'étude et analyser certains aspects
physiques et socio-économiques afin d'avoir une compréhension
claire de cette zone d'étude.
39
Fig 1. Localisation de Fonéko dans la commune
urbaine de Téra
40
3.1. La localisation du village de Fonéko
Fonéko est construit au rebord d'une dune qui domine
la vallée s'étale entre Téra et le Fonéko. Le
village de Fonéko Tedjo est situé au nord-est de la commune
urbaine de Téra entre les latitudes 14°12'25.6» Nord et les
longitudes 00°44'32.7'' Est à 22 kilomètres de la ville de
Téra. Il est limité à l'est par le village de Diblo, au
nord par le village de Taratako, et de Namanderi et enfin au sud par le village
de Banizoumbou et la ville de Téra (chef-lieu de commune).Il est
traversé par la route nationale n°5 (Téra-Yatakala), ce qui
facilite l'accès au village en toute saison.
3.2. Un milieu naturel peu favorable au stockage de
l'eau
Les éléments naturels étudiés ici
sont ceux qui d'une manière ou d'une autre sont liés à la
problématique étudiée.
3.2.1. Le climat
Le climat est de type sahélien
caractérisé par deux saisons : une saison sèche et une
courte saison pluvieuse qui durent respectivement entre huit et neuf mois et
entre trois et quatre mois. La saison sèche se caractérise par
des fortes températures, fortes évaporations avec comme
conséquence l'assèchement rapide des eaux de surface.
3.2.1.1. Les précipitations
La Commune de Téra est comprise entre
l'isohyète 250 à 400 mm selon les années. Les eaux des
pluies alimentent et constituent les principaux points d'eau de surface
directement ou indirectement utilisées par les populations et le cheptel
pendant une bonne partie de l'année. Etant attendu que ces plans d'eau
de surface (mares) sont des systèmes hydriques isolés
(écoulement endoréique), sans apport en aval pendant une bonne
partie de l'année, la durée de leurs eaux dépend
naturellement de la quantité annuelle d'eau tombée. C'est
pourquoi les années de faibles pluviométries représentent
des menaces réelles pour les populations rurales et leur cheptel. Les
moyennes pluviométriques générales du département
de Téra ont été utilisées parce que la commune
urbaine de Téra à laquelle est rattaché le village de
Fonéko ne dispose pas d'une série longue de 30 ans. En effet,
nous utilisons ces données pluviométriques pour mettre en exergue
en même temps les variations de la pluviométrie d'une année
à l'autre et les impacts des années de faibles
pluviométries. Ainsi, à travers la figure n°2 on constate
que les années 1979, 1987, 1990, 1991, 1995 et 2003 ont
enregistré les plus fortes quantités de pluies de ces 30
dernières années dans le département de Téra, un
peu plus de 500 mm la saison pluvieuse. Par contre les années 1981,
1983, 1993 et 2006 ont enregistré les plus faibles quantités, un
peu plus de 200 mm toute la saison pluvieuse.
41
Fig 2. Les moyennes annuelles de la pluviométrie
de Téra de 1979 à 2009 Source, Amadou Boubacar, 2010
3.2.1.2. Les températures
Les températures les plus élevées sont
généralement enregistrées dans les mois de mars, avril,
mai et juin (saison sèche et chaude). Les basses températures
sont enregistrées en novembre, décembre et janvier (saison
froide). Au cours de ces dernières années, l'on a
enregistré des minima absolus annuels de 22,6°41. Les
fortes températures observées surtout pendant l'harmattan
favorise l'assèchement rapide des points d'eau de surface à
travers le phénomène de l'évaporation et
d'évapotranspiration. Ce qui du coup met en épreuve la vie des
populations et du cheptel. Les moyennes annuelles thermiques de la
région de Tillabéri sont ici utilisées parce que le
département de Téra à plus forte raison la commune urbaine
de Téra ne dispose pas d'une série longue de 30 ans, nous pensons
ainsi que les données générales de la région
peuvent être utilisées pour le département à titre
illustratif. Ainsi, à travers la figure ci-dessous on constate que
l'année a enregistré la moyenne thermique la plus faible
(35°) de ces 30 dernières années de la région de
Tillabéri. L'année la plus chaude est 1986 (38°), ceci
montre que les températures sont élevées dans cette
région.
41 Plan de Développement communal,
Téra, 2006.
42
Fig 3. Les moyennes annuelles de la Température de
Tillabéry de 1978 à 2008
Source :
www.ins.ne
3.2.1.3. L'évaporation et
l'évapotranspiration
L'évaporation (phénomène physique) et
l'évapotranspiration (phénomène biologique) sont des
phénomènes très importants au sahel, elles jouent un
rôle essentiel dans l'assèchement des eaux de surface. Elles sont
liées à la température, au vent, et à
`humidité de l'air. En effet, pendant la période des fortes
températures, l'évaporation devient très importante sous
l'effet de l'ensoleillement. L'évapotranspiration est accentuée
pendant cette période de fortes température car en ce moment les
organismes vivants réclament plus d'eau. Les fortes températures
déshydratent rapidement les organismes, du coup la consommation en eau
devient plus importante. Au Niger dans une moyenne pluviométrique
annuelle de 180 mm soit un apport de 228 km3/an, 98%
s'évaporent, seul 1% s'infiltre soit 2,3km3/an42.
C'est dire là l'extrême évaporation qui caractérise
le pays. Cette forte évaporation annuelle peut atteindre 2100 mm dans la
région de Tillabéri (région qui enregistre des fortes
températures).43 A Abalak, on peut estimer que
l'évaporation d'une surface d'eau libre est supérieure à
deux mètres. Ainsi, une mare d'une profondeur de 60 centimètres
perdra en deux mois plus de la moitié de son eau uniquement par
l'évaporation44. Cet assechement rapide des points d'eau de
surface met en épreuve ces populations et ces animaux dont leur vie en
dépend.
42 SEEN, Eau Potable, Hygiène et Santé
: Guide du cadre, 2008.
43
www.bibliotheque.refer.org/livre21/l2112.pdf
44 http ://
www.masht.fr/chroniques/eauazawagh.htm
43
3.2.1.4. L'action du vent
La situation des vents se caractérise par la
prévalence des vents secs et chauds avec un degré
hygrométrique faible (l'harmattan) pendant la saison sèche
(novembre à mai). Ils sont de vitesse relativement forte. Les vents
forts renforcent l'évaporation des cours d'eau de surface qui organise
en quelque sorte la vie du monde rurale. Ainsi, au Sahel, les vents et les
températures sont les principaux facteurs majeurs accentuant le
phénomène d'évaporation des eaux de surface. Du coup sous
leur influence la durée des retenus d'eau est très
limitée, trois à quatre mois après la saison des pluies
à Fonéko. Ils entrainent aussi le comblement des fonds des
cuvettes par des dépôts éoliens.
3.2.2. La situation hydrogéologique
L'eau souterraine est une ressource peu abondante dans les
régions arides et semi arides. Son exploitation dans le secteur du socle
cristallin se limite aux zones où la roche a subi le
phénomène de fracturation. Les fractures produisent des
discontinuités (failles, diaclases) dans le substratum géologique
pour permettre l'écoulement et l'emmagasinement de l'eau dans la nappe
phréatique. Dans la commune urbaine de Téra qui fait partie de la
région géologique qu'on appelle le Liptako Gourma, on distingue
deux types d'aquifères
3.2.2.1. Les aquifères alluviaux
(superficiels)
Ils sont tributaires des précipitations annuelles et
caractérisés par leur faible profondeur
(généralement deux à trois mètres). Ils sont
implantés dans les sables des kori et les limons en bordure du Dargol
(affluent du fleuve) et sont exploités à travers des puits, des
puisards.
3.2.2.2. Les aquifère du socle discontinu
Ils sont liés au socle discontinu. En effet, le socle
cristallin n'offre des ressources importantes en eau que dans les zones
d'altération étroitement liées à des fractures. Ils
sont constitués d'un ensemble de poches altérées poreuses
et perméables connectées entre elles par un réseau de
fractures. Ces mêmes fractures autorisent sous certaines conditions des
échanges avec les aquifères supérieurs. En
général, les altérites sont exploitées à
travers des puits cimentés et les couches profondes saines
fracturées quant à elles sont exploitées au moyen de
forages. Ainsi, toutes les régions bâties sur ce type
d'aquifère rencontrent des problèmes d'alimentation en eau
souterraine, c'est le cas du village de Fonéko. Ainsi, donc c'est la
structure géologique qui n'est pas favorable à la construction
des points d'eau modernes et non un désengagement de l'Etat. Selon les
témoignages recueillis auprès des villageois et du service de
l'hydraulique de Téra plusieurs forages ont échoués lors
de leur construction.
44
3.3. Historique du village et les activités
agropastorales
Les aspects humains concernent ici l'historique du village,
le peuplement et quelques activités socio-économiques.
3.3.1. Historique et peuplement du village
Fonéko est un mot composé du préfixe
« Foney » au pluriel qui signifie « les singes » et de
« ko » qui signifie baobab en sonraï, autrement dit les baobabs
des singes. En effet, autrefois le terroir renfermait un important peuplement
de baobab qui attirait les singes. Le terroir était certainement une
savane arborée. Le village est ainsi nommé Fonéko. Quant
on ajoute « Tedjo » qui veut dire « nouveau » en
sonraï, ça devient le nouveau Fonéko ou le nouveau site de
Fonéko en référence à la reconstruction du village
après les guerres tribales notamment avec les touareg. Le village est
fondé dans la deuxième moitié du 17eme
siècle, les fondateurs seraient venus soit de Gao soit du
Dandi45 Mais Hama Tandaké et ses frères
(KangaTandaké, Abdou Tandaké et Birdji Tandaké)
étaient les reconstructeurs du nouveau Fonéko en 1839. La vie du
village était organisée au bord de la mare de Salam. Selon le
RGPH, le village compte 734 habitants regroupés en 89 ménages.
C'est un village majoritairement sonraï, on trouve néanmoins des
peul et de touareg. Ainsi parmi les personnes interrogées, nous avons
trouvé 81,7% de sonraï, 11,7% de peul et 6,7 de touareg. La taille
moyenne des ménages est de 7 personnes, la taille minimum est de 2
personnes et le maximum est 15 personnes. L'âge moyenne des chefs de
ménages est de 42,98 ans, le minimum est de 25 ans et le maximum est 69
ans. Le niveau d'instruction est largement dominé par les personnes sans
instruction (43,3%), formation coranique (15%), Primaire (31,7%), secondaire
(5%), supérieur (3,5) et alphabétisés 1,7%.
3.3.2. Les activités agropastorales
Comme toutes les autres localités de la commune,
l'économie du village de Fonéko repose exclusivement sur
l'agro-pastoralisme auquel se greffent quelques activités
commerciales.
3.3.2.1. L'agriculture
L'agriculture est la principale activité des
villageois, 48,4% des personnes interrogées la pratiquent. La production
agricole est caractérisée par une agriculture de subsistance avec
comme principales spéculations les céréales (mil et
sorgho) qui représentent la base de l'alimentation. Elle est
pratiquée au moyen d'outillage rudimentaire (hilaire) et reste
tributaire des aléas climatiques (précarité des
précipitations, érosion) auxquels s'ajoutent les ennemis de
cultures en certaines années. C'est pourquoi, le village est
chroniquement déficitaire avec comme corollaire la malnutrition et
l'émigration des populations.
45 Boubou Hama, 1970.
45
3.3.2.2. L'élevage
L'élevage qui est pratiqué cumulativement avec
l'agriculture représente le premier recours en cas de déficit
céréalier. Il est ainsi, pratiqué par 21,1% des personnes
interrogées. C'est le développement de cette pratique par les
agriculteurs et les éleveurs que Amadou Boureïma46 a
appelé la stratégie anti-risque, c'est-à-dire
qu'aujourd'hui du fait des incertitudes climatiques au Sahel on assiste
à des éleveurs-agriculteurs et des agriculteurs-éleveurs.
Le troupeau se compose d'ovins, de bovins, caprins, d'âsins et de
camelins. Les propriétaires du cheptel sont plus
préoccupés par l'extension du troupeau que de la qualité
des animaux : c'est un élevage contemplatif. Dans ce village,
l'élevage est soumis non seulement à la dégradation de
l'environnement qui a des conséquences sur le pâturage
(précarité des fourrages) mais aussi au manque crucial en eau.
Cette situation bloque l'évolution du cheptel.
Photo 1.Un troupeau des vaches sur le point de s'abreuver
au niveau d'un forage Source : notre enquête
Ce chapitre a permis d'analyser les aspects naturels et
socio-économiques de la zone d'étude. Il a permis aussi de
comprendre la situation hydrogéologique du village de Fonéko.
Situation qui n'est pas favorable à la construction des points d'eau
modernes.
46 Amadou Boureïma est géographe au DG
/FLSH/UAM de Niamey.
46
Chapitre 4 : Les sources d'approvisionnement en eau et
leur mode de gestion
Dans ce chapitre, il est question d'inventorier, de situer
les points d'eau villageois dans l'espace. Nous allons ensuite critiquer en
même temps la situation spatiale et la disponibilité dans le temps
de ces points d'eau. Enfin, nous allons nous pencher sur les types de gestion
faite de ces points d'eau villageois.
47
4.1. Les sources d'approvisionnement en eau
Les sources d'approvisionnement en eau du village sont
constituées de deux forages, deux barrages construits par Boubou Hama
dans les années 1960, une mare quasiment comblée par les
dépôts dus aux écoulements hydriques et éoliens et
quelques puisards creusés dans le lit de la vallée qui longe le
village et dans les fonds des barrages après leur tarissement.
4.1.1. La situation spatiale des points d'eau
Le village de Fonéko ne dispose pas de point d'eau
moderne en son sein, les populations doivent parcourir une certaine distance
pour leur approvisionnement en eau. Ainsi, elles parcourent environ 300
mètres pour atteindre leur premier point d'eau (le petit barrage),
environ 400 mètres pour l'eau dans la vallée et au niveau des
puisards pendant la saison sèche. Cette distance à parcourir est
de 1 kilomètre pour le grand barrage, pour les forages ces populations
parcourent 4 kilomètres, 8 kilomètres allé et retour.
C'est pour dire que la situation des points d'eau par rapport au village ne
facilite pas l'accès des populations à l'eau. Ceci bouleverse la
vie socio-économique du village car tout le monde investit son temps
dans la recherche de l'eau. Cette situation est illustrée par la carte
n°2.
48
49
Fig 4. La distribution spatiale des ponts d'eau
villageois
4.1.2. Les mares
Ce sont les deux barrages (grand et petit) et la mare de
Salam. Ces points d'eau de surface assurent pendant une bonne partie de
l'année (du début de l'hivernage à janvier) la
satisfaction des besoins en eau du village. Qu'il s'agisse des besoins pour les
activités ménagères, l'abreuvage des animaux ou ceux
liés à la construction des maisons. Ceci témoigne de leur
forte sollicitation. Les eaux des mares sont utilisées par 95% par des
personnes interrogées.
4.1.2.1. La mare de Salam47
La mare de Salam est située au sud-ouest du village.
C'était dans le temps une grande mare qui assurait la satisfaction des
besoins en eau des populations et le cheptel du village. C'était
d'ailleurs autour d'elle que le village était organisé avant
d'être transféré à son site actuel en 1939.
Aujourd'hui elle est presque comblée sous l'effet de l'ensablement. Ses
eaux ne durent que quelques mois, généralement trois mois et sont
uniquement utilisées pour l'abreuvage des animaux et la fabrication des
briques en
47 Mare légendaire, dont Boubou Hama faisait
allusion dans ses écrits. Cette mare était dans le temps la
principale source d'eau pour le village.
50
banco. La briqueterie se développe aussi dans les fonds
des mares après leur tarissement.
Photo 2. La mare de Salam Source :
notre enquête
4.1.2.2. Le grand barrage (grande mare)
C'est la première mare artificielle creusée par
Boubou Hama en 1965, pour répondre au problème de l'eau dans le
village. Elle se situe à un kilomètre au sud du village.
Dès lors, elle assure la satisfaction des besoins en eau du village.
C'est pourquoi, elle est clôturée en matériau durable afin
d'empêcher l'accès directe aux animaux. Du fait de sa profondeur
(environ deux mètres de profondeur), sa grande capacité de
rétention, ses eaux durent un peu plus que les autres mares. Mais selon
les dires des populations rencontrées dans le village, elle est
menacée par l'ensablement dû essentiellement à
l'érosion hydrique. Les eaux de cette mare sont impropres à la
consommation humaine car c'est non seulement un système hydrique
isolé pendant plusieurs mois c'est-à-dire stagnant mais aussi les
règles d'accès ne sont plus respectées par les villageois.
Cette situation est due au fait que les clôtures de cette retenue d'eau
ne tiennent plus, du coup les animaux s'abreuvent directement dans les mares
avec tout ce qu'il y a comme urines et déchets. Par ailleurs les
populations aussi bien que conscientes du danger que cela peut entrainer, font
leurs baignades, lessives, vaisselles etc. dans ses eaux. La durée
moyenne de rétention d'eau au niveau de ces barrages est de 3 à 4
mois.
51
Photo 3. Une femme s'approvisionnant en eau au niveau de la
grande mare et en arrière plan on voit des chèvres qui
s'abreuvent
Source : notre enquête
4.1.2.3. Le petit barrage (petite mare)
C'est la seconde mare artificielle construit en 1968,
toujours par Boubou Hama dans une perspective de combattre le problème
de l'eau dans le village. Elle se situe au sud à environ 300
mètres du village. Sa proximité par rapport au village fait
qu'elle est plus fréquentée que la grande mare située
à un kilomètre du village. Ses eaux durent moins que celles de la
grande mare, sa profondeur n'est pas très importante (moins de deux
mètres). Elle est aussi menacée par le phénomène
d'ensablement du à l'érosion hydrique, mais moins accentué
qu'au niveau de la grande mare.
52
Photo 4. Un troupeau de vaches s'abreuvant dans le petit
barrage Source : notre enquête
4.1.3. La rivière
La rivière est située à environ 400
mètres du village. L'eau de la rivière est surtout
consommée pendant la saison des pluies. Les populations y creusent des
puisards dans son fond après son assèchement. Mais avant toute
consommation, l'eau de la rivière tout comme celle des mares sont
d'abord purifiées à l'aide des techniques traditionnelles de
purification telles que le filtre, nous en parlerons plus loin de ces
mécanismes de purification. Les eaux de cette rivière sont
utilisées par 86% des personnes interrogées.
53
Photo 5. Vue de la kori en saison sèche
4.1.4. Les puisards
Ils sont construits par les populations dans le lit mineur du
principal kori appelé Gorou Bera (grande rivière en sonraï),
qui longe le village et dans les fonds des deux mares après leur
assèchement. Leurs profondeurs varient selon les périodes de
l'année. Généralement un à deux mètres, les
puisettes en caoutchouc sont les plus utilisées. Du fait de leur faible
profondeur, les eaux de ces puisards sont exposées à des risques
de pollution diverses. Tout comme les mares, ils sont utilisés par 90%
des personnes interrogées du fait de leur proximité et de
l'éloignement des forages.
Photo 6. Une femme s'approvisionnant en eau au niveau d'un
puisard creusé dans le fond d'une mare tarie.
54
4.1.5. L'utilité des points d'eau de surface pour
les populations de Fonéko
Les points d'eau de surface sont très importants dans
la vie des populations rurales, du fait de l'insuffisance et ou de
l'éloignement des points d'eau modernes. Ils permettent ainsi de
satisfaire les besoins en eau de ces populations. A Fonéko, ces points
de surface organisent en quelque sorte la vie du village car assurant la
satisfaction des besoins en eau de ces populations pendant une bonne partie de
l'année (saison des pluies à janvier). Ils sont localisés
non loin du village contrairement aux forages, ce qui justifie d'ailleurs leur
forte utilisation. C'est pourquoi, le calvaire commence pour ces villageois
quand ces mares tarissent parce qu'ils vont s'orienter vers les forages
situés à environ 4 kilomètres du village.
4.1.6. Le puits cimenté
C'est le premier point d'eau moderne du village. Il est
foncé dans les années 1960, par Boubou Hama après
plusieurs tentatives de fonçage dans le village. Ce puits est
creusé dans le bassin d'un kori appelé
Arboudjé48 à 15 km du village au sud en allant vers
Téra. C'est là que les populations du village s'approvisionnaient
en eau potable jusque dans les années 1977, avant la construction des
forages à Diblo.49 Aujourd'hui, ce puits est essentiellement
utilisé par les populations nomades (peul et bella50),
situées à ses environs. Selon les témoignages du chef de
village, quand ils étaient jeunes, ils consacraient une journée
entière pour puiser de l'eau au niveau de ce puits. Et comme la distance
est longue pour celui qui est à pieds, la moitié de l'eau prise
dans les récipients est consommée en cours de route. C'est dire
que le problème de l'eau n'est pas récent dans ce village et
c'est d'ailleurs pourquoi le feu Boubou Hama avait fait de la question de l'eau
sa préoccupation majeure. C'est ce qui justifie tous les efforts
consentis dans ce domaine.
4.1.7. Les forages
Après plusieurs échecs de fonçage de
forages à l'intérieur et aux environs immédiats du village
par Boubou Hama et par l'Etat, du fait de la présence du socle au niveau
du village, les forages sont construits hors du village. En effet, dans les
régions de socle l'infiltration est très limitée, elle est
limitée au niveau des failles, des fractures de la roche. C'est pourquoi
lors du fonçage des puits cimentés ou des forages les
géophysiciens cherchent les endroits des fractures. C'est finalement
à Kabébangou 51 où
48 C'est un kori puissant qui envahit la route
n°5 (Téra-Yatakala), lors des fortes pluies et les usagers sont
obligés d'attendre des heures.
49 Village avoisinant, situé à environ
quatre km de Fonéko.
50 Nom local donné aux touaregs.
51 Vallée situé au nord-ouest à
3,5 km du village de Fonéko.
55
furent construits les forages qui doivent alimenter le village
de Fonéko. Ils sont au nombre de deux pour une population de près
de 800 habitants, à cette population il faut ajouter le bétail du
village ce qui rend difficile l'accès à l'eau aux
différents usagers.
Leur profondeur atteint 110 mètres environs. Ces
forages sont construits respectivement en 2006 et en 2007 par l'ONG Goy Ga
Zaâda52 et la fondation Zayed53. Les coûts de
leur réalisation avoisinent chacun un peu plus de 20 millions de FCFA.
Après le tarissement des mares, ils seront les seuls points du village.
Ce qui est à l'origine de leur surexploitation qui peut aboutir à
la diminution considérable des eaux contenues dans les réservoirs
de la nappe phréatique voire l'arrêt de l'alimentation comme c'est
le cas pour les puits cimentés. La surexploitation peut entrainer aussi
des tensions voire des conflits autours des ces points d'eau. En ce qui
concerne la construction de ces forages, la population a contribué
à hauteur de 20.000 FCFA par forage comme contribution forfaitaire
à cela il faut ajouter la main d'oeuvre locale.
Photo 7. Des usagers au niveau de l'un des deux forages
Source : notre enquête
4.1.8. Les points d'eau non opérationnels
Ils sont constitués de deux puits cimentés et
deux forages. Les puits sont situés non loin du village et sont
construits l'un en 1962 et l'autre en 1964, par Boubou Hama. Ces puits ont
ainsi assuré le besoin en eau potable des populations jusqu'aux
années 1990,
52« Goy Ga Zaâda » en sonraï veut dire
« Travailler pour prospérer », c'est une ONG locale
basée à Téra, oeuvrant depuis 2005, dans un processus de
réalisation et d'accompagnement d'infrastructures rurales communautaires
dans le domaine de l'approvisionnement en eau, du désenclavement du
territoire d'aménagement des bas-fonds dans les communes de Téra,
Bankilaré et Gorouol.
53 Fondation Zayed, projet intitulé «
Système Intégré d'Approvisionnement en Eau Potable en
Milieu Rural au Niger »
56
date de leur tarissement. Ce tarissement est dû au fait
qu'ils ne sont plus alimentés par la nappe phréatique. Les
forages quant à eux sont situés à environ un km au sud du
village juste à côté du grand barrage, et sont construits
par l'Etat en 1989, malheureusement ils n'ont fonctionné que pendant
trois années faute d'alimentation de la nappe phréatique. Cette
situation est très fréquente en région de socle, car
l'infiltration est faible et est limitée seulement aux endroits
où la roche dure a subi des fissures et/ou des fractures. Ainsi, les
points d'eau modernes construits sur ces fissures et fractures ont
généralement un débit faible et les réserves d'eau
emmagasinées dans les alvéoles de la roche peuvent
s'épuiser facilement.
Photo 8 forages non opérationnels Photo 9 puits
cimentés non
opérationnels
Source :notre enquête
4.1.9. Les dangers de pollution des points d'eau de
surface
Les points d'eau de surface de Fonéko
présentent de risques de pollution. C'est des eaux stagnantes dans
lesquelles les animaux pénètrent donc certitude d'uriner et de
faire des déjections. Cela dégrade davantage la qualité de
ces eaux. Quant aux populations, certaines satisfont leurs besoins (lavage
corporel, lessive, vaisselle etc.) dans ces mares en dépit des risques
de pollution des eaux. Les eaux de ces points d'eau de surface sont troubles
surtout vers leur tarissement. Mais, malgré l'évidence
de ces risques de pollution, les populations consomment les eaux de ces mares.
La consommation de ces eaux est justifiée par les populations par
l'éloignement des forages.
57
Photo 10. Des vaches dans une mare, danger de pollution de
l'eau Source : notre enquête
4.2. Les modes de gestion institutionnelle et
économique des points d'eau à Fonéko
Comme prévu dans les textes réglementaires en
matière de gestion de l'eau à l'échelle nationale, au
niveau des villages disposant d'un ou des PEM, un comité de gestion est
chargé de la gestion institutionnelle et économique (la vente de
l'eau) des PEM.
4.2.1. Le mode de gestion institutionnelle de l'eau
L'hydraulique villageoise est également
concernée par les mutations qui affectent la gestion publique de l'eau.
La gestion des infrastructures hydrauliques était entièrement une
affaire de l'Etat à travers ses structures techniques d'appui jusqu'en
1990. La gestion défaillante de l'Etat et surtout le contexte
démocratique, la décentralisation ont conduit à une
redéfinition du rôle de l'Etat. La loi sur la
décentralisation impose à l'Etat du Niger le désengagement
dans le secteur de l'eau et la responsabilisation des populations dans la
gestion des infrastructures hydrauliques. Le décret
n°97/368/8RN/MHE du 02 octobre 1997, déterminant les
modalités d'application de l'ordonnance n°93-014 du 02 mars 1993
portant régime de l'eau, règlemente la gestion des points d'eau
modernes et précise à son article 37 : « les points d'eau
publics appartiennent aux collectivités territoriales où ils sont
situés et font l'objet d'attribution en gestion aux communautés
bénéficiaires qui doivent assurer la gestion et l'entretien
». A cet effet, les dites communautés sont
représentées par des comités de gestion dont les membres
sont élus en leur sein par l'assemblée générale ou
par un particulier désigné par la dite assemblée. La
gestion déléguée est aussi prévue par les textes en
vigueur54, il
54 Ordonnance n°93-014du 2 mars 1993, portant
régime de l'eau, modifié par la loi n°98-041 du 7
décembre 1998.
58
s'agit en l'occurrence de concéder la gestion des
ouvrages hydrauliques à des acteurs privés, moyennant des
redevances. Ce mode de gestion a tendance aujourd'hui à se diffuser,
notamment en ce qui concerne les mini-adductions d'eau potable
(mini-AEP)55. Le code de l'eau du Niger adopté en 2010
définit les missions et les responsabilités des institutions
locales en matière de l'eau. En effet, l'article 26 responsabilise les
collectivités territoriales dans la gestion durable de l'eau avec la
participation effective de tous les acteurs concernés. Les domaines de
compétence transférés par l'Etat aux collectivités
territoriales sont déterminés par la loi. L'article 27 du
même code quant à lui détermine la création des
Unités de Gestion des Eaux (UGE) pour servir de cadre physique pour la
gestion et la planification des ressources en eau sur le territoire de la
République du Niger. La Commission de Gestion de l'Eau regroupe ainsi
des représentants de l'Etat et des Collectivités Territoriales,
des groupes socioprofessionnels concernés par la gestion des ressources
en eau. Les attributions, la composition, l'organisation et les
modalités de fonctionnement des Commissions de Gestion de l'Eau sont
fixées par voie réglementaire. L'article 39 de ce même code
de l'eau du Niger stipule que tout comité de gestion d'un point d'eau
public est crée par assemblée générale de la
communauté bénéficière. L'assemblée
générale approuve au préalable les statuts et
règlement intérieur du comité.
4.2.2. La gestion des barrages
Au niveau des barrages, il n'y a pas une structure
institutionnalisée chargée de leur gestion. Ces barrages
appartiennent à tout le village et pour y accéder il faut
simplement respecter les modes d'accès. Ces modes d'accès sont :
interdiction de satisfaire directement les humains (se laver, faire la lessive,
la vaisselle) dans les eaux, il est aussi formellement interdit d'abreuver ses
animaux directement dans le eaux. A leur construction, elles sont
gérées par un gardien délégué par le chef du
village pour empêcher l'accès des animaux et la satisfaction
directe de certains besoins humains. C'est pourquoi, dès leur
construction des séances de sensibilisation étaient
effectuées à l'endroit des populations. En effet, pour
pérenniser et bien gérer ces ressources, les populations ont
songé à les clôturer par les murs en banco.
Désormais, les animaux ne peuvent pas pénétrer à
l'intérieur de ces eaux. Mais aujourd'hui, on constate que la gestion
des mares est complètement défaillante, les clôtures sont
en partie dégradées, ce qui permet aux animaux de
pénétrer tranquillement dans les eaux de ces mares et pire
certains habitants du village se lavent, font la lessive, la vaisselle dans ces
eaux, ce qui augmente les sources de pollution.
55 Mahaman Tidjani Alou, 2005
59
4.2.3. La gestion des forages
Pour la gestion des forages, comme prévu par les
textes en la matière, un comité de gestion a été
mis en place depuis mars 2006 (date de la construction du premier forage)
à la suite d'une assemblée générale
organisée au niveau du village. L'assemblée a regroupé les
chefs de ménages du village, le chef du village, les élus locaux
au titre du village, le maire de Téra, le directeur départemental
de l'hydraulique de Téra, le chef du CSI du village.
4.2.4. Le comité de gestion villageois des
forages
Le comité de gestion des forages de Fonéko est
crée le 21 mars 2006 à la suite d'une assemblée
générale villageoise. Il est constitué d'un
président, d'un secrétaire général, d'un
trésorier, d'un agent chargé de l'hygiène et
assainissement formé par des agents de santé (il est
chargé de sensibiliser les populations sur les pratiques
d'hygiène que ça soit au niveau des points, du transport et au
stockage de l'eau dans les concessions), d'un gardien et de deux commissaires
aux comptes. Le bureau est renouvelable chaque trois mois. Le comité
ainsi mis en place sera appuyé par les agents techniques du service
départemental de l'hydraulique de Téra en ce qui concerne la
maintenance des forages. Pour le dépannage, des artisans
réparateurs sont formés et basés à Téra.
Ainsi, en cas de panne des pompes, le comité fait immédiatement
appel à eux.
Photo 11. Le gardien des forages devant sa hutte
Source : notre enquête
60
4.2.5. Le mode d'accès aux points d'eau
Les modes d'accès aux forages sont
déterminés par les statuts et règlements du comité
de gestion des forages. Les critères fondamentaux pour accéder
aux points d'eau sont les suivants : tout habitant du village et des hameaux
qui sont rattachés au village à un droit d'usage. Du fait de
l'imbrication de l'hydraulique villageoise et pastorale (c'est-à-dire
l'utilisation commune des mêmes points d'eau par les populations et les
animaux), un calendrier d'accès aux forages a été
établi pour les populations et le bétail par le comité de
gestion. Ainsi, le temps qui va de minuit à neuf heures du matin est
réservé pour l'abreuvage du bétail. De neuf heures du
matin jusqu'à la fin de la journée est réservé
à l'approvisionnement des populations. Il faudrait aussi respecter un
certain nombre des principes d'hygiène pour rentrer dans la
clôture des forages. Ainsi, il est formellement interdit d'y entrer avec
ses chaussures sous peine d'être amandé. En cas de violation,
l'usager est amandé à 100 FCFA avec la confiscation des
chaussures. Le respect du calendrier d'accès aux forages semble
difficile pour les usagers notamment les éleveurs à cause de la
période qui leur est consacré surtout pendant la saison froide.
Ainsi, l'abreuvage du bétail se fait pendant le temps
réservé aux populations non éleveurs, ce qui rend
l'accès à l'eau plus difficile pour ces populations et peut
créer des tensions entre usagers.
4.2.6. L'usage de l'eau
Comme partout ailleurs, l'eau est utilisée tout
d'abord pour la satisfaction des besoins humains fondamentaux (boisson,
préparation des repas, lessive, lavage, vaisselle etc.) même si
cette satisfaction est problématique à Fonéko. Elle est
aussi utilisée pour l'abreuvage du bétail et la construction des
maisons. Il convient de signaler qu'il n'ya pas de cour d'eau pouvant favoriser
les cultures de contre-saison. Les points d'eau existants ne suffisent pas pour
les besoins humains et animaux. Ainsi, toutes les personnes interrogées
utilisent l'eau pour la satisfaction de leurs besoins humains, 85% pour
l'abreuvage du bétail, 75% pour la construction des maisons en banco et
5% de ces personnes enquêtées prennent l'eau pour vendre. Mais ce
dernier usage à savoir la vente de l'eau n'est pas
développé car les ménages ruraux n'ont pas les moyens pour
payer l'eau à un prix élevé. Par ailleurs, la
moitié des ménages interrogés utilisent moins de 100
litres pour tous leurs besoins humains et animaux par jour, 13% consomment
entre 100 et 200 litres, 13% entre 200 et 300 litres. La proportion des
personnes qui consomment plus de 500 litres n'est que de 3%. A travers ces
chiffres on peut dire que les ménages qui consomment moins de 100 litres
sont des ménages moyens qui ont peu ou pas d'animaux à
abreuver.
4.3. Le mode de gestion économique des points
d'eau
La gestion économique des points d'eau implique la
vente de l'eau au niveau de ces points d'eau. La vente de l'eau en milieu rural
nigérien a été instituée pour constituer une caisse
pour la maintenance des points d'eau.
61
4.3.1. La vente de l'eau
Seule l'eau des forages fait l'objet de vente. Le bidon de 20
et 25 litres coûte cinq francs (5 FCFA) au niveau des forages. Du fait de
la situation économique et financière des ménages
villageois, une facture forfaitaire a été fixée à
200 FCFA par mois soit 1000 FCFA par ménage en cinq mois en raison de
douze bidons de 20 litres par jour. Le comité considère que les
forages ne sont pleinement utilisés que pendant cinq mois de
l'année, c'est-à-dire après le tarissement des mares. Pour
l'abreuvage du bétail les tarifs sont fixés comme suit : pour les
petits ruminants (moutons, chèvres, ânes etc.), le
propriétaire paye 25 FCFA par tête et par an et pour le gros
bétail (vaches, chameaux et.), c'est 250 FCFA par tête et par an.
Il convient de signaler que les tarifs appliqués aux différents
usagers sont relatifs à l'échelle du village. En ce qui concerne
les vendeurs de l'eau dans le village nous avons pu enquêter trois, ils
sont une vingtaine de charretiers, ils vendent le bidon de 20 litres à
50 FCFA et celui de 25 litres à 75 FCFA. La charrette prend 12 bidons de
20 litres et le charretier peut gagner en moyenne 900 FCFA par jour, ce qui
fait 27.000 FCFA par mois si le charretier travaille tout les jours. Cette
somme bien qu'en deçà du revenu du nigérien moyen qui est
de 40 000 FCFA, leur permet au moins de répondre à certains
besoins courants. Mais, il est difficile pour ce charretier de faire plusieurs
tours de charrettes au niveau des forages. Un charretier fait
généralement un seul tour par jour à cause des longues
files d'attente. C'est une activité qui n'est pas
développée à cause d'une part des difficultés
liées à la recherche de l'eau et d'autre part du niveau
économique des ménages villageois de pouvoir acheter l'eau
chère.
4.3.2. Les recettes du comité de gestion
Les recettes du comité sont l'argent des factures
d'eau recouvré auprès des ménages du village. Ces recettes
varient d'une année à l'autre et dépendent du temps
d'utilisation des forages, car les forages sont moins utilisés lorsque
les mares contiennent de l'eau. Toutefois, ces recettes atteignent
généralement 50.000 à 70.000 FCFA en cinq mois de pleine
utilisation, En 2010 le comité a recouvré jusqu'à 100.000
FCFA. Cet argent servira tout d'abord pour la maintenance les forages, dix
pourcent (10%) sont utilisés pour payer le gardien et le reste est
déposé dans un compte d'épargne ouvert au niveau de la
caisse crédit Mamar de Téra.
4.4. La recherche et le transport de l'eau
La recherche et le transport de l'eau impliquent plusieurs
acteurs selon qu'on est au niveau des mares ou des forages.
62
4.4.1. Les matériels de prise de l'eau
Jusqu'à une date récente le canari était
le principal récipient dans lequel les femmes rurales prenaient l'eau au
niveau de leur point d'eau. Aujourd'hui, d'autres récipients ont vu le
jour, c'est le cas des bidons jaunes de 20 litres. Ces nouveaux
récipients paraissent plus durables et pratiques pour le transport sur
les charrettes. C'est justement pourquoi la totalité des personnes
enquêtées les utilisent au niveau des forages. Les seaux en
plastique qui ont aussi remplacé ceux en métal, sont
utilisés généralement par les femmes au niveau des mares,
rivières et puisards. La totalité des personnes
interrogées utilisent les bidons jaunes de 20 ou de 25 litres, 83,3%
utilisent des seaux surtout au niveau des mares et des puisards et seulement
une personne y utilise le canari car pour eux, la canari parait incommode pour
le transport de l'eau pour plusieurs raisons. C'est un matériel
très fragile et surtout aujourd'hui que le transport de l'eau est
assuré par les charrettes or les canaris ne sont pas commodes pour ce
mode de transport. C'est pourquoi elle est surtout affectée pour le
stockage de l'eau de consommation à l'intérieur des
concessions.
4.4.2. La corvée de l'eau
Contrairement à beaucoup de localités du Niger
et même du Sahel où la corvée de l'eau est assurée
essentiellement par les femmes et les jeunes filles, à Fonéko,
les hommes et les jeunes garçons sont aussi impliqués dans la
recherche et le transport de l'eau. Ainsi, pendant la période
d'utilisation des eaux des mares et des puisards qui ne sont pas très
loin du village, les femmes et les enfants s'occupent de la recherche et du
transport de l'eau. Au niveau des forages, les hommes et les jeunes
garçons sont plus impliqués que les femmes dans la recherche de
l'eau à cause de l'éloignement de ces points d'eau, la
pénibilité de la recherche de l'eau au niveau des forages surtout
de l'utilisation des charrettes. C'est seulement les femmes des environs de ces
forages (hameaux environnants) et rarement les femmes du village qui y
viennent. En effet, selon les résultats des notre enquête, le
transport de l'eau au niveau des forages est assuré à 100% par
les hommes du village à 98,3% par les jeunes garçons et seulement
à 3,3% par les femmes. Cela veut dire que la totalité des
personnes interrogées ont dit que le transport de l'eau au niveau des
forages est assuré par les hommes, 98,3% disent aussi que les jeunes
garçons en moyenne 15 à 20 ans sont impliqués dans ce
transport. Seulement 3,3% de femmes sont concernées par le transport de
l'eau au niveau des forages.
4.4.3. Le transport de l'eau
L'essentiel du transport de l'eau au niveau des forages se
fait sur des charrettes. On dénombre une soixantaine de charrettes qui
ravitaillent le village en eau. Certains usagers utilisent parfois des motos,
des vélos et mêmes des ânes pour les populations bella. Au
niveau des mares et des puisards, les femmes transportent leurs seaux (seaux
63
en fer et en plastique) d'eau sur leurs têtes. En effet,
le tableau ci-dessous montre la forte prédominance de la charrette et la
tête dans le transport de l'eau. Ainsi, 50,5% des personnes
interrogées utilisent la charrette pour leur transport de l'eau, 43,1%
utilisent leur têtes pour ce transport. Certains utilisent des mots,
vélos et dos d'âne. Il est nécessaire de signaler que la
charrette (asine et bovine) joue un rôle très important dans la
vie des sociétés rurales. A Fonéko, elle assure
l'essentiel du transport de l'eau du forage au village. Ceux qui ne
possèdent pas de charrette, profitent généralement de la
solidarité de ceux qui en ont. Le nombre de citations dans ce tableau
ci-dessous dépasse largement la taille de l'échantillon parce que
l'usager peut utiliser plusieurs modes de transport. Il peut s'approvisionner
en eau aujourd'hui sur une charrette et demain sur sa tête ou un autre
mode de transport.
Fig 5. Mode de transport de l'eau au niveau des points
d'eau Source : notre enquête
64
Photo 12. quelques types de transport de l'eau
Source : notre enquête
4.5. Les problèmes liés à la
gestion des points d'eau villageois
En général, qu'elle ait été
assurée par l'Etat ou par les communautés villageoises, la
gestion des points d'eau modernes s'est avérée le plus souvent
défaillante. Cette gestion n'a guère réussi à
créer les conditions d'une gestion durable des ouvrages hydrauliques
d'où l'intervention croissante sur ce terrain de nouveaux acteurs
privés par le biais de la gestion
déléguée56. Mais à Fonéko, on
n'en est pas encore là, le comité de gestion fonctionne bien en
ce qui concerne la gestion financière. Toutefois, il y a des
problèmes au niveau du respect des statuts et règlements du
comité de gestion. Parmi ces problèmes liés à la
gestion, figure en premier lieu le non respect par certains usagers des
règles d'accès au niveau des forages, c'est-à-dire le
respect des statuts et règlements). En effet, pour les éleveurs,
il est difficile de respecter les horaires d'abreuvage prévus par le
comité de gestion surtout pendant la saison froide à cause du
froid. Ce qui, du coup, crée une situation de bousculade et de tension
autour des points d'eau entre les différents usagers. Ainsi, donc on
assiste à une situation de dérèglement des principes
d'accès aux forages. Les usagers consacrent de ce fait
énormément de temps au niveaux de ces forages. Ces mêmes
éleveurs refusent souvent de communiquer l'effectif exact de leurs
troupeaux, ce qui fait un manque à gagner pour la caisse du
comité. D'une manière générale selon le gardien des
forages, il est souvent difficile de recouvrer l'argent auprès des
ménages pour des raisons financières. Le non respect du mode
l'accès au niveau des mares par les populations est un problème
majeur. Au niveau des
56 Mahaman Tidjani Alou, 2005.
65
forages, un manque d'hygiène dans l'environnement
immédiat de ces points d'eau malgré l'existence d'un agent
chargé la question de l'assainissement. A tout cela, il faut ajouter de
la dégradation des superstructures, particulièrement les murs qui
paraissent mal fait dès au début.
Vue l'état des ressources hydriques disponibles pour
le village, on se rend compte qu'un véritable problème en eau se
pose dans le village. C'est un village sans point d'eau moderne en son sein.
Les populations consomment ainsi les eaux de surface et parcourent plusieurs
kilomètres pour atteindre les points d`eau modernes. Cette situation
induit des impacts socio-économiques préjudiciables pour le
développement du village. C'est pourquoi il est urgent d'entreprendre
des initiatives visant à rendre l'eau plus accessible aux
populations.
66
Chapitre 5 : les impacts socio-économiques
liés à la situation de l'eau
Ce dernier chapitre traite des conséquences
engendrées par les difficultés liées à la recherche
de l'eau dans le village. Tout d'abord nous allons aborder les
conséquences liées à la consommation de l'eau non potable
sur la santé des populations. Ensuite, les activités
socio-économiques menacées par le problème d'eau seront
identifiées. Et enfin, nous allons estimer les contraintes majeures
liées à l'accès à l'eau dans le village.
5.1. Impacts sur la santé des populations
La consommation de l'eau non salubre est à la base
d'une manière ou d'une autre de beaucoup de maladies.
5.1.1. La qualité des eaux de consommation
En Afrique subsaharienne particulièrement au Sahel une
grande partie des populations surtout en milieu rural consomme directement des
eaux de surface qui sont à leur portée immédiate. Au
Niger, près de 45% des populations des zones rurales disposent de l'eau
potable et environ 20% des décès d'enfants âgés de
moins de cinq ans sont imputables à des maladies d'origine
hydrique57. A Fonéko, les sources d'eau de consommation sont
diverses. Ainsi, la qualité de l'eau est liée au type de point
d'eau. En effet, l'eau est de bonne qualité au niveau des forages a
affirmé le directeur départemental de l'hydraulique de
Téra. Les autres points d'eau qui sont composés des mares,
puisards et l'eau de la vallée pendant l'hivernage sont impropres
à la consommation humaine à cause de leur état chimique
(eau trouble et très chargée en matériaux en suspension
surtout vers l'assèchement des mares). Les eaux des mares sont
stagnantes et les populations comme les animaux y pénètrent
directement et cela peut entrainer des pollutions diverses (pollution
organique, bactériologique). Et malheureusement à cause de leur
accès plus facile que les eaux des forages, les populations consomment
ces eaux impropres et contractent des maladies. En effet, 95% des personnes
interrogées consomment l'eau des mares au moment où celles-ci y
contiennent de l'eau, 90% et 86,7% des enquêtés consomment aussi
respectivement les eaux des puisards et de la vallée pendant la saison
des pluies. La consommation exclusive des eaux des forages n'intervient
qu'après le tarissement des mares. La forte consommation des eaux des
mares est à l'origine des maladies hydriques même si par ailleurs
ces eaux subissent des traitements traditionnels de purification.
67
57
www.unicef.org/french/bycountry/niger_44789.htm
68
Fig 6. Taux de fréquentation des sources d'eau du
village Source : notre enquête
5.1.1.1. Les techniques de purification des eaux de
surface utilisées à Fonéko
En milieu rural, les populations qui n'ont pas un
accès immédiat aux points d'eau potable, utilisent un certain
nombre de méthodes pour purifier les eaux de surface afin de pouvoir les
consommer. A Fonéko, avant toute consommation des eaux de surface, les
femmes utilisent des techniques de purification de l'eau. Ces techniques sont :
l'utilisation du sulfate d'alumine localement appelé « Lalin »
pour le traitement chimique et les mécanismes filtrants pour
séparer l'eau des matériaux en suspension et dans une moindre
mesure des micros organismes (bactéries, virus, etc.). En effet, un
morceau de sulfate d'alumine permet quand il est agité pendant quelques
instants dans l'eau de rendre cette dernière claire en déposant
les particules en suspension au fond du récipient qui la contient. Mais
sa forte teneur rend le goût de l'eau aigre, non agréable à
boire. Le filtre quant à lui est un morceau de tissu avec lequel on
enferme le récipient et on verse l'eau par dessus pour pouvoir
séparer l'eau des particules en suspension. C'est une méthode
efficace qui est surtout vulgarisée pendant les campagnes contre le ver
de guinée. La technique de filtrage de l'eau est l'une des armes
utilisées pour la lutte contre le ver de guinée.
69
5.1.1.2. Les maladies d'origine hydrique
Les maladies liées aux eaux stagnantes qu'on rencontre
au Sahel en général et au Niger en particulier sont très
nombreux. On peut citer par exemple la dracunculose (le ver de guinée),
le cholera, la bilharziose, etc. A Fonéko, on rencontre la
majorité de ces maladies hydriques. Le ver de guinée avant son
éradication dans le village il y a un peu plus d'une décennie,
chaque année la contamination était presque totale dans le
village. Selon le témoignage d'une personne interrogée il y avait
eu une année où même un chien avait contracté le ver
de guinée. A travers notre enquête, 90% de l'échantillon
ont répondu qu'ils connaissent des personnes qui ont souffert des
maladies causées par l'eau.
Ainsi, les maladies les plus citées par les personnes
interrogées sont la bilharziose 48,3%, qui est l'une des affections
parasitaires majeures qui touche le continent africain, on la retrouve au
niveau des fleuves, et retenus d'eau stagnantes. Le vecteur de cette maladie
est un ver vivant dans le système sanguin de l'hôte, les larves
développés dans l'eau pénètrent ainsi dans la peau
d'une personne en contact avec l'eau58. La bilharziose peut
entrainer des troubles du foie, des intestins et de la vessie.
Le ver de guinée ou dracunculose, ver d'Afrique ou
encore filariose de Médine (42%), est dû à un ver
appelé le dracunculus médinensis vivant dans les eaux stagnantes.
Les méthodes traditionnelles de traitement couramment utilisées
consistent à enrouler le ver sur un bâton et l'extraire ainsi de
la peau de la malade. C'est un processus lent et dure pendant plusieurs jours
voire des semaines. Il existe des médicaments pour traiter la
dracunculose, nous avons ainsi le thiabendazole, le métronidazole, le
mébendazole. En 1986, on a enregistré 3,5 millions de cas dans le
monde contre 25 000 en 2006. Au Niger, des vastes programmes ont
été déployés depuis 1991, lorsque les
autorités sanitaires ont constaté sa forte prévalence
(environ 33 000 cas dans 1700 villages). Actuellement le taux
d'éradication de la maladie est 99,99%.59
Les maux de ventre, selon les résultats de notre
enquête (40%) de personnes interrogées ont senti des maux de
tête après avoir consommé l'eau des mares.
Les dermatoses (1,7%), sont dues au contact entre la peau et
les eaux troubles contenant des particules qui peuvent mettre la personne
à gratter son corps.
Les effets urinaires ( 31,70%) sont dues à la
consommation des eaux insalubres provoquant des brûlures dans
l'urètre pendant la miction (au moment ou la personne malade urine ou
après la miction. Ces brûlures sont généralement
accentuées à l'extrémité du pénis ou sur
l'ensemble de l'urètre. Ces effets urinaires fonctionnent aussi par
vague avec des périodes de calme et des épisodes très
douloureux. Les jets
58 Hassane Issoufou Djamila, 2006.
59
http://www.afrique.avenir.org/2010/08/31/des
résultats -«
probants-»-sont-enregistrés-au-niger-dans-le-cadre-de-l'eraducation-du-ver-de-guinée
70
d'urine sont alors plus faibles qu'à la normale et il
faut parfois faire un effort conscient pour pouvoir uriner et ou sortir les
dernières gouttes d'urine. Dans certains cas extrêmes, ces
symptômes peuvent aboutir à une rétention d'urine.
Les infections urinaires (5%), elles sont dues par la
colonisation de l'urètre par des bactéries avec la consommation
des eaux insalubres. L'absence de traitement peut mener à des
complications sévères. Elles peuvent se soigner par des
antibiotiques.
Le cholera (26,70%), il est une toxi-infection
entérique, épidémique et contagieuse. Il est dû
à la bactérie vibrio cholerae ou bacille virgule. Il se
caractérise par des diarrhées brutales et très abondantes.
C'est une maladie qui tue facilement en l'absence de traitement dans les
quelques heures ou jours. Il a une épidémie récurrente,
pour l'éviter, il faut une éducation sanitaire
c'est-à-dire d'hygiène et d'assainissement.
La conjonctivite (3,30%), elle est due souvent à un
manque d'hygiène (milieu insalubre). La conjonctivite bactérienne
peut être provoquée par différents germes (staphilococcus,
streptococcus, haemophilius). Elle se caractérise par des
secrétions purulentes, inflammation de l'oeil et peut se traiter par
antibiothérapie locale. Ces maladies sont généralement
observées en saison sèche et en début de saison des
pluies. La saison sèche coïncide avec une période pendant
laquelle les eaux sont troubles avec l'assèchement des mares. Le
début de l'hivernage quant à lui se caractérise par le
transport et le dépôt des matériaux divers nuisibles pour
la santé dans les fonds des mares. Sur la figure, on constate que le
total des pourcentages des différentes maladies dépasse le cent
pour cent du fait qu'une même personne peut contracter plusieurs
maladies.
Fig 7. Les types de maladies hydriques
identifiées auprès de certaines personnes d'après les
personnes interrogées
Source : notre enquête
71
La moitié des enquêtés soit 50% ont
répondu qu'ils ont personnellement souffert des maladies hydriques.
Parmi ces maladies les plus fréquentes sont le ver de guinée
(23,3%), la bilharziose (15%) et les effets urinaires (10%) par contre le
cholera et la conjonctivite sont les moins fréquentes. Comme l'illustre
la figure suivante (figure.6)
Fig 8. Les types de maladies hydriques dont ont
été atteintes certaines personnes interrogées
Source : notre enquête
Toutes ces maladies sont imputables à la consommation
des eaux non potables. Lors de nos entretiens avec les personnes ressources ou
les agents techniques nous nous sommes adressés à l'infirmier du
village qui à confirmé l'existence de ces maladies hydriques sauf
le ver de guinée qui a été éradiqué dans la
localité depuis quelques années. Nous avons voulu avoir le
registre des maladies hydriques identifiées au CSI, mais il n'est pas
à jour et même s'il l'est ne peut pas refléter toute la
réalité du fait de la mentalité des populations rurales et
le manque des moyens financiers. En effet, en milieu rural et même en
ville, il est difficile qu'on se présente dans un centre de santé
par exemple pour des maux de ventre ou même d'autres maladies plus
dangereuses. Ainsi, seule la moitié des personnes interrogées a
répondu qu'elle se présente au niveau du centre de santé
intégré du village. Ces malades sont soit soignés sur
place ou orientés à Téra. Il nous a été
impossible d'avoir le coût des soins.
72
5.1.1.3. Dates de contraction des maladies
Du fait des imprécisions dans les dates données
par les enquêtés, nous avons décidé d'établir
des échelles pour pouvoir caller les années de contraction des
maladies. Nous avons établi donc les échelles suivantes : de
moins de 10 ans, de 10 ans à moins de 20 ans et en fin de 20 ans et
plus. Ainsi, 26,7% des maladies sont contractées il y a 20 ans ou plus,
25% il ya moins de 10 ans et seulement 11,7% il ya 10 ans ou plus. C'est dire
que l'existence des maladies hydriques ne date pas d'aujourd'hui et ça
présente une menace réelle pour les populations même si le
ver de guinée est quant à lui éradiqué il ya
quelques années (un peu plus de dix ans) selon le chef de village.
Année contraction des maladies
|
Nombre des citations
|
Fréquence en %
|
Moins de 10 ans
|
15
|
39,5
|
De 10 moins de 20
ans
|
7
|
18,4
|
De 20 ans et plus
|
16
|
42,1
|
Total
|
38
|
100
|
|
Tab 2. Années de contraction des
maladies
Source : notre enquête
5.1.1.4. La fréquence des maladies
Les populations qui consomment les eaux stagnantes, notamment
celles des mares, contractent les maladies surtout pendant le début de
l'hivernage avec les toutes premières pluies qui peuvent mobiliser,
transporter et déposer des micros organismes et ou autres
matériaux nuisibles se trouvant dans les bassins des vallées,
dans les fonds des mares. En effet, 47,5% des personnes interrogées
affirment que ces maladies sont contractées au début de
l'hivernage. Elles sont plus fréquentes pendant la saison sèche
52,5%. La saison sèche correspond à un moment où les eaux
de surface s'amenuisent et deviennent très chargées ou même
polluées sous l'effet de la forte utilisation et de certaines pratiques
qui dégradent davantage la qualité des eaux.
5.2. Impacts sur les activités socio-
économiques
Les difficultés liées à l'accès
à l'eau induisent des conséquences socio-économiques sur
les populations du village. Ainsi la quasi-totalité des personnes
interrogées n'arrivent-
73
elles pas à satisfaire leurs besoins fondamentaux. Ce
tableau met en exergue les impacts du déficit de l'eau sur les
principales activités socio-économiques du village de
Fonéko. En effet, 63,6% des personnes interrogées ont dit que
leurs besoins humains fondamentaux ne sont pas satisfaits, 26,1% pour la non
satisfaction de l'abreuvage des animaux et 10,2% pour les activités
socio-économiques en général.
Conséquences du déficit de
l'eau
|
Nombre des
citations
|
Fréquence en %
|
Non satisfaction des besoins humains
|
56
|
63,7
|
Non satisfaction de l'abreuvage
|
23
|
26,1
|
Blocage des activités socio- économiques en
général
|
9
|
10,2
|
Total
|
88
|
100
|
|
Tableau 3 : conséquences du déficit de
l'eau dans le village Source : notre enquête
5.2.1. Impacts sur la quantité d'eau
consommée par des ménages et la satisfaction des besoins humains
fondamentaux
Au Sahel, chaque personne ne dispose en moyenne que seulement
dix à vingt litres d'eau pour la satisfaction de tous ses besoins
contrairement aux populations des certaines régions (Amérique du
Nord, Europe, Japon). Cette situation peut être liée à
l'insuffisance des points d'eau, la distance qui sépare les points d'eau
et les ménages, le coût de l'eau, etc. Ce déficit en eau
dans cette région (Sahel) entraine des impacts négatifs sur la
vie socio-économique des populations. Selon les résultats de
notre enquête 92% des enquêtés n'ont pas la quantité
nécessaire pour satisfaire les différents besoins liés
à l'eau d'une manière générale. Ce qui montre une
fois encore l'existence réelle du manque d'eau dans ce village, du coup
c'est toute la vie socio- économique qui est menacée.
74
A Fonéko, l'insuffisance des points d'eau, la
disponibilité de l'eau dans le temps, la distance à parcourir
font que les populations n'ont pas la quantité nécessaire pour
faire face à leurs besoins en eau. En effet, 12,18% des personnes
interrogées prennent moins de 100 litres, 25,89% de 100 à 200
litres, 8,38% de 400 à 500 litres, et 10,91% de 500 litres et plus. Il
faut noter que la consommation des fortes quantités d'eau de certains
ménages peut s'expliquer par l'abreuvage des animaux.
Fig 9. La satisfaction en termes de quantité
Source : notre enquête
5.2.1.2. Des besoins humains fondamentaux non
satisfaits
Les besoins humains fondamentaux liés à l'eau
sont les quantités nécessaires pour la boisson, le lavage du
corps, la vaisselle, la cuisine, le lavage des habits, la construction des
maisons etc. La satisfaction de ces besoins est nécessaire pour qu'une
personne puisse vivre décemment et surtout pour pouvoir éviter un
certain nombre des maladies dues notamment à l'insatisfaction de l'un ou
de ces besoins. A Fonéko, les quantités d'eau nécessaires
à la satisfaction de ces besoins sont loin d'être atteintes,
ainsi, 63,3% des personnes interrogées ont suggéré que
leurs besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits, ce qui se traduit par une
réduction de l'hygiène corporel, vestimentaire et même
l'hygiène dans les concessions. Selon les témoignages des
certaines personnes rencontrées dans le village, il est très
fréquent de voir dans le village des ménages passer des nuits
sans diner à cause du manque d'eau pour préparer les repas, ou de
faire plusieurs jours sans se laver le corps à plus forte raison les
habits. Tout ceci montre que la question de l'eau est le principal mal dont
souffrent les populations de Fonéko.
75
5.2.1.3. Estimation des besoins en eau des
ménages
Pour avoir les besoins en eau, nous avons demandé aux
populations la quantité d'eau qu'elles consomment par jour et par
ménage et la quantité nécessaire pour la satisfaction des
besoins. On constate que les populations n'ont pas cette quantité
indispensable pour répondre à leurs besoins. Le tableau ci-dessus
donne cette estimation des quantités d'eau nécessaires pour la
satisfaction des besoins des ménages. Ainsi, 3,3% seulement des
personnes interrogées ont besoin de moins de 100 litres, 20% de 100
à 200 litres, 4% de 200 à 300 litres, 20% de 500 à 600
litres, 6% de 600 à 700 litres et 8% de ces personnes interrogées
ont besoin de 700 litres et plus. Les ménages qui ont un fort besoin en
eau sont ceux qui ont des animaux domestiques.
Quantité nécessaire
|
Nombres citations
|
Fréquence en %
|
Moins de 100 litres
|
2
|
3,3
|
De 100 à moins de 200 litres
|
12
|
20
|
De 200 à moins de 300 litres
|
4
|
6,7
|
De 300 à moins de 400 litres
|
12
|
20
|
De 400 à moins de 500 litres
|
12
|
20
|
De 500 à moins de 600 litres
|
4
|
6,7
|
De 600 à moins de 700 litres
|
6
|
10
|
De 700 litres et plus
|
8
|
13,3
|
Total
|
60
|
100
|
|
Tableau 4. Quantité d'eau nécessaire par
jour et par ménage
5.2.2. Un élevage mis en épreuve
L'élevage est la seconde activité
économique du village après l'agriculture bien qu'il soit
menacé ou même bloqué par le problème d'eau. Selon
les personnes rencontrées le problème d'eau est le principal
facteur limitant de l'essor de l'activité à l'échelle
du
76
village. En effet, 38,3% des personnes interrogées ont
suggéré que l'abreuvage des animaux n'est pas satisfait et 11,7%
ont dit carrément que l'activité est bloquée par le
problème d'eau. C'est d'ailleurs pourquoi beaucoup des gens ne
s'adonnent pas à l'élevage surtout en ce qui concerne le gros
bétail.
Le manque d'eau touche aussi les activités agricoles
à plusieurs niveaux. En effet, le village ne dispose pas de cours d'eau
qui peut être exploitée dans le cadre des cultures de contre
saison, même si ces cultures paraissent indispensables dans le combat
légendaire pour l'autosuffisance alimentaire. Dans ce village aussi, du
fait que l'essentiel du transport de l'eau des ménages soit
assuré par les charrettes, 11,7% des personnes interrogées
affirment que la réquisition des charrettes pour la recherche de l'eau
leur empêche d'apporter du fumier dans leurs champs, or ces fumiers sont
importants pour accroitre la productivité surtout avec cette
dégradation continue des sols.
5.2.3. La problématique de la construction des
maisons
Le problème de l'eau touche toutes les
activités socio-économiques sans exception dans ce village. Il
joue fortement sur la construction des maisons. En effet, dans le village, au
fur et à mesure que les mares tarissent, il n'est pas possible de
construire ou de parachever une construction déjà entamée
pour faute de l'eau. Il faut parfois plusieurs saisons de pluies pour
construire une maison. Les maisons inachevées sont ainsi très
fréquentes dans le village. Ainsi, 45% des personnes
enquêtées ont signalé que le problème l'eau bloque
la construction des maisons comme l'illustre l'image suivante. Pour une
personne interrogée cette situation bloque le développement du
parc de l'habitat.
Photo 13. Construction inachevée à cause du
problème de l'eau située dans l'enceinte de
l'école
Source : notre enquête
77
5.3. Les contraintes liées à la
corvée de eau
Les contraintes liées à l'approvisionnement en
eau sont multiples et interviennent à plusieurs niveaux. Dans certaines
régions d'Afrique subsaharienne, il faut parcourir plusieurs
kilomètres pour s'approvisionner en eau. Ainsi, la distance
habitat-point d'eau et le temps mis habitat-point d'eau, la charge
transportée sont les principales souffrances endurées par les
populations pour s'approvisionner en eau.
5.3.1. Les tensions autour des points d'eau
Les tensions sur les ressources en eau ne cessent de
s'accroître à travers le monde, il faudrait aujourd'hui desservir
dix fois plus de consommateurs qu'il y a deux siècles.60 Ces
tensions sont dues très souvent à l'insuffisance de ces
ressources, de la diversité des usagers et surtout leur non respect de
la file d'attente. C'est le cas à Fonéko où ces ressources
sont déjà insuffisantes avec une forte utilisation par des
acteurs souvent divergents, ce qui engendre des tensions entre usagers. En
effet, 85% des personnes interrogées ont reconnu l'existence des
tensions autour des forages. Mais généralement elles ont lieu
entre les enfants et leur fréquence est régulière pour
certains et négligeable pour d'autres. Le mode de règlement est
généralement l'intervention du gardien pour moraliser les usagers
en querelle. L'amande ne sera appliquée qu'en cas de persistance des
querelles et elle est fixée à 100 FCFA par usager. Ainsi, parmi
les personnes enquêtées seuls 8,3% ont reconnu des cas d'amande
infligée à des usagers.
Les conflits autour des forages ne sont pas aussi
fréquents que les tensions, seuls 10% de enquêtés ont
confirmé l'existence des conflits. Les modes de résolution
demeurent toujours l'intervention du gardien pour moraliser les usagers en
conflit puis l'amande interviendra en cas de persistance. Ainsi, parmi les six
cas de conflits identifiés, il ya eu 3,3% d'amande contre 6,7% de
réconciliation par le gardien. Pour les conflits majeurs le
comité de gestion n'a jamais fait face, mais a déjà
prévu des dispositifs de règlement. Ainsi en cas de ce genre de
conflit, comme par exemple l'utilisation d'une arme blanche,
l'intéressé est traduit par le gardien au niveau du comité
puis au chef de village selon son ampleur, en cas de persistance l'affaire sera
traduite à la mairie et enfin à la justice en présence du
président du comité, du chef de village, du maire, des
élus locaux au titre du village et du directeur départemental de
l'hydraulique.
5.3.2. La distance parcourue pour la recherche de
l'eau
La distance à parcourir est l'une des principales
difficultés à l'accès à l'eau potable dans les pays
pauvres. Certaines populations au Sahel doivent parcourir en moyenne six
kilomètres pour s'approvisionner en eau salubre au point le plus proche.
Au Niger, les
60 Programme des Nations-Unies pour le
Développement Humain, 2006.
78
textes réglementaires en matière d'hydraulique
prévoient que chaque personne doit avoir un point d'eau situé
à 200 mètres de sa concession, et que tout village même non
administratif de 250 habitants, doit disposer d'un point d'eau moderne. Mais la
réalité est tout autre. L'OMS aussi considère 200
mètres comme distance raisonnable qui doit séparer une personne
du point d'eau. A Fonéko, les populations parcourent 300 mètres
pour atteindre la mare la plus proche, un kilomètre pour le
deuxième mare et près de quatre kilomètres pour les
forages soit 20 fois que les normes requises. Cette situation donne
respectivement en terme de distance à parcourir un peu moins d'un
kilomètre pour le point d'eau le plus poche, deux kilomètres pour
la deuxième point d'eau et huit kilomètres environ pour les
forages. En effet, 30% de personnes interrogées trouvent que la distance
à parcourir est une difficulté majeure pour les populations
à s'approvisionner en eau potable et 98,3% disent qu'elles consomment
l'eau des mares à cause d'une part de l'éloignement des forages
et de la perte de temps d'autre part. Cet état de fait amène les
populations à abandonner d'autres activités toutes aussi
fondamentales pour consacrer la quasi-totalité de leur temps à la
recherche de l'eau.
5.3.3. Le temps consacré à la recherche de
l'eau
Les normes raisonnables en matière de temps à
consacrer pour la recherche de l'eau est de l'ordre de 30 minutes,
dépassé ce temps l'usager n'a pas accès à l'eau. A
Fonéko pour s'approvisionner en eau, on consacre assez du temps et cela
à deux niveaux. Au niveau du trajet et au niveau de l'attente une fois
aux forages. Au niveau du trajet à cause de l'état sablonneux de
la piste, les usagers peuvent consacrer une à deux heures surtout ceux
qui sont à pieds. Une fois arrivé au niveau des forages, l'usager
peut consacrer plusieurs autres heures (trois heures au minimum) voire une
journée entière à cause de l'insuffisance des points d'eau
pour une population de près de 800 habitants (INS, 2006) à
laquelle il faut ajouter le bétail du village. Ainsi 81,7% de personnes
interrogées ont reconnu qu'elles consacrent assez de temps pour la
recherche de l'eau. Cette situation est exacerbée après le
tarissement des mares qui est généralement observé
dès le mois de janvier. Ainsi, une seule des personnes
interrogées consacre moins de 5 heures pour la recherche de l'eau, tout
le reste consacre plus de 5 heurs ou très souvent une journée
entière. A travers le tableau ci-dessous on se rend compte que la
recherche de l'eau au niveau des forages est un véritable calvaire pour
les populations, ce qui d'ailleurs les amène à consommer les eaux
des mares. En effet, 98,3% des personnes interrogées ont dit qu'elles
consomment l'eau des mares à cause de l'éloignement des forages.
Pour la recherche, seul 2% des enquêtés consacrent moins de 5
heures aux forages alors que 34% y consacrent de 10 à 15 heures, 40%
consacrent de 10 à 15 heures et 24% consacrent de 15 heures ou plus. Le
temps moyen consacré aux forages est de 2,86 heures. Cette situation
amène les populations à passer toute leur journée à
la recherche de l'eau, au détriment des autres activités.
79
Temps de la recherche de l'eau
|
Nombre des
citations
|
Fréquence en %
|
Moins 5 heures
|
1
|
2
|
De 5 à moins de 10 heures
|
17
|
34
|
De 10 à moins de 15 heures
|
20
|
40
|
De 15 heures et plus
|
12
|
24
|
Total
|
50
|
100
|
|
Tab 5. Temps consacré à la recherche de
l'eau au niveau des forages
Photo 14. Usagers en attente aux forages Source
: notre enquête
5.3.4. La question des moyens de transport
Le transport est aussi un élément très
important pour l'accès à l'eau dans les zones rurales. A
Fonéko, l'eau est prise dans des bidons de 20 et 25 litres, le transport
est
80
essentiellement assuré par les charrettes du village.
C'est pourquoi avoir une charrette est nécessaire non seulement pour le
transport de l'eau mais aussi pour d'autres activités quotidiennes
telles que l'apport du fumier dans les champs. Ainsi le ravitaillement du
village est-il assuré par une soixantaine de charrettes. Selon notre
enquête, 13% de personnes interrogées disent qu'elles consomment
les eaux non potables parce qu'elles n'ont pas de moyens de transport pour
aller prendre de l'eau au niveau des forages.
5.3.5. Le coût de l'eau
Le coût de l'eau est aussi l'un des facteurs limitant
de l'accès à l'eau potable aux populations pauvres que ça
soit dans les villes ou dans les campagnes. Les populations rurales et celles
pauvres en général, paient l'eau plus cher. Dans
l'arrêté n°0007/MEH/LCD/CAB/ du 25 01 06 portant tarif d'eau
aux Bornes Fontaines, les prix de l'eau sont fixés comme suit : le
tonneau de 200 litres coûte 50 FCFA, le bidon et le sceau de 20 litres
à 5 FCFA. Le bidon de 20 litres est ainsi vendu en ville par les
vendeurs d'eau (garoua) à 25 à 30 FCFA voire 35 FCFA en certains
endroits en fonction de la distance parcourue par rapport à la borne
fontaine. A Fonéko, le bidon de 20 litres coûte 5 FCFA au forage
donc le même prix qu'en ville, les populations trouvent d'ailleurs
raisonnable ce prix par contre elles trouvent cher et même inaccessible
l'eau qu'elles achètent à 50 FCFA le bidon de 20 litres et 75
FCFA celui de 25 litres au niveau des charretiers dans le village. C'est
pourquoi Généralement cette eau est achetée par les
fonctionnaires et commerçants qui ont les moyens financiers, et rarement
les populations ordinaires qui n'achètent qu'un ou deux bidons.
5.3.6. La disponibilité de l'eau dans le temps et
dans l'espace
A Fonéko le problème d'eau est «
légendaire » néanmoins, l'ampleur n'est pas la même
durant toute l'année, comme le montrent les deux cartes ci-dessus
(n°3 et n°4). En effet, pendant la saison des pluies, quand les mares
contiennent de l'eau, le problème d'eau est moins senti car les
populations se contentent de ces eaux. La période cruciale pour elles
débute après le tarissement des mares généralement
à partir de janvier et atteindra son pic pendant la saison sèche
chaude (mars, avril et mai). Pendant cette période, populations et
bétails affluent vers les forges. Ce qui est à l'origine des
bousculades entre usagers et la perte de temps au niveau de ces points d'eau.
Les résultats de nos enquêtes illustrent fort bien cet état
de fait. Ainsi, 76,7% des personnes enquêtées ont dit que le
problème de l'eau est plus accentué en saison sèche, 11,7%
en cas de panne et 11,7% aussi vers la fin de saison sèche.
81
Période cruciale du problème
d'eau
|
Nombre des citations
|
Fréquenc e en %
|
Saison sèche
|
46
|
70,8
|
En cas de panne
|
7
|
10,8
|
Après le tarissement des
mares
|
5
|
7,7
|
Fin saison sèche
|
7
|
10,8
|
Total
|
65
|
100
|
|
Tab 6. Période cruciale de la question de l'eau
à Fonéko
la carte n°3 nous permet de savoir les flux des
populations vers des points d'eau villageois. En effet, ces flux sont faibles
vers les forages de la saison des pluies jusqu'à vers janvier. La raison
fondamentale est l'éloignement de ces points d'eau mais surtout la
disponibilité de l'eau non loin du village. Les flux sont par contre
très importants vers les points d'eau de surface. Cette tendance se
renverse à partir de l'assèchement de ces points d'eau de
surface.
82
Fig 10. Flux des populations au niveau des points d'eau
avant le tarissement des mares
La carte n°4 montre et explique les grands flux des
populations vers les forages à partir du début de la saison
sèche. A partir de cette période (saison sèche) les
forages sont les principales sources d'approvisionnement en eau des
populations. On note aussi la fréquentation des puits creusés
dans les fonds des mares et le kori.
83
Fig 11. Flux des populations au niveau des points d'eau
après le tarissement des mares
La question de l'eau est la principale préoccupation
des populations de Fonéko Tedjo. La recherche de l'eau occupe tout le
temps des villageois. Cette situation les amène non seulement à
abandonner les autres activités toutes aussi fondamentales mais aussi
à consommer des eaux insalubres préjudiciables à la
santé.
84
Recommandations et conclusion
générale
85
RECOMMANDATIONS
Pour une amélioration de la situation en eau des
populations de Fonéko nous formulons les recommandations suivantes :
A l'Etat et ses partenaires
· De continuer les prospections hydrogéologiques
afin de pouvoir trouver des sites favorables dans le village ou ses environs
immédiats pour l'implantation des points d'eau modernes pouvant
réduire les souffrances des populations ;
· Construire d'autres points d'eau à vocation
strictement pastorale pour relancer non seulement le développement de
l'activité mais aussi empêcher la surexploitation des points d'eau
déjà existants. Cela diminuera certainement les tensions autour
de ces points d'eau ;
· Lutter contre l'ensablement des barrages qui assurent
l'alimentation en eau des populations et du bétail pendant une bonne
partie de l'année;
Aux populations de Fonéko:
· Une bonne gestion des barrages s'avère
indispensable. Cette gestion passe non seulement par l'interdiction aux animaux
de pénétrer dans les mares mais aussi l'interdiction des
populations de satisfaire certains besoins (lessive, vaisselle, baignade etc.)
dans les mares.
· Réhabiliter les clôtures des barrages
afin d'éviter l'entrée des animaux dans les eaux qui est une
source de pollution;
· Traiter les eaux de surface avant toute boisson afin
de limiter les risques sanitaires ;
· Aux agents de santé du village : sensibiliser
les populations en matière d'hygiène et d'assainissement surtout
concernant la consommation des eaux des mares ;
· Et enfin, encourager les populations à
consommer l'eau des forages considérée comme potable et cela
à tout prix, car comme disait l'autre : « la santé n'a pas
de prix, elle a un coût ».
86
CONCLUSION
La question de l'accès à l'eau pour tous est
devenue une préoccupation internationale à la quelle
s'interrogent et participent les institutions financières
internationales, les grands opérateurs privés internationaux, les
organisations non gouvernementales et les pouvoirs publics. Aujourd'hui, il
faut desservir dix fois plus de consommateurs qu'il ya deux
siècles.61 Cette situation est plus accentuée dans les
pays pauvres, notamment au Sahel où l'eau potable est l'une des
préoccupations essentielles non seulement pour les dirigeants mais aussi
pour les populations. Au Niger, depuis l'indépendance, plusieurs
programmes et reformes ont concerné le secteur de l'eau ce qui a permis
de parvenir à un certain résultat. Mais, aujourd'hui encore plus
que jamais l'eau potable figure parmi les principales préoccupations des
gouvernants en termes d'accès aux services sociaux de base pour les
populations. En effet, pour un besoin de 47000 points d'eau modernes il
n'existe que 31000 points d'eau modernes soit un taux de couverture de
62%.62 Ces chiffres ne tiennent pas compte de 35% à 40% des
points d'eau modernes estimés non fonctionnels en milieu rural ainsi que
des fortes disparités inter et intra régionales. Les populations
notamment celles des zones rurales sont ainsi condamnées à
consommer les eaux de surface constituées pendant la saison des pluies
malgré l'évidence des dangers majeurs des maladies hydriques.
Pour leur approvisionnement en eau potable une partie non négligeable de
ces populations rurales parcourent plusieurs kilomètres en consacrant
souvent des journées entières. Pour illustrer cet état de
faits, le village de Fonéko Tedjo en est un bon exemple. En effet, le
village ne dispose pas de points d'eau modernes en son sein pour des conditions
géologiques (présence du socle). Les populations consomment
pendant une bonne partie de l'année (début saison de pluies
à février) les eaux des mares et plus tard se tournent vers des
forages situés à environ quatre kilomètres du village.
Cette situation est à l'origine d'un certain nombre des maladies
hydriques et le blocage des certaines activités socio-économiques
du village. Ce qui justifie les hypothèses posées dans ce
travail. Ainsi, la première hypothèse selon laquelle les
difficultés en matière d'accès à eau tout comme la
variation de la disponibilité de l'eau dans le temps induisent des
impacts néfastes sur le développement socio-économique du
village est vérifiée car la quasi-totalité des personnes
interrogées soit 91,7% ont estimé qu'elles n'ont pas la
quantité d'eau nécessaire et 93,3% disent que leurs besoins
fondamentaux ne sont satisfaits. Et 38,3% de ces personnes interrogées
disent que l'abreuvage de leurs animaux n'est pas satisfaits, pour d'autres
(11,7%) c'est l'activité pastorale en entier qui est bloquée. Et
enfin, la deuxième hypothèse selon laquelle la mauvaise
répartition des sources d'approvisionnement en eau du village limite
l'accès à l'eau potable aux populations, ce qui les amène
à consommer de l'eau de qualité médiocre voire mauvaise
susceptible d'engendrer des
61
www.pseau.org
62 Allocution du Ministre de l'eau du Niger, le 22
mars 2010, http//
:www.afrique.org/.../l'acces-a-l'eau-potable-reste-encore-un-defi-au-niger
87
maladies d'origine hydrique est aussi vérifiée.
En effet, 98,3% des personnes interrogées ont affirmé qu'elles
consomment l'eau des mares parce que les forages sont loin du village. Et 90%
de ces personnes disent qu'elles connaissent des personnes qui ont souffert des
maladies hydriques et le 50% des personnes interrogées ont
personnellement souffert de ces maladies hydriques.
88
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