_
IUFM - Université Aix-Marseille
MEMOIRE DE MASTER 2 MEEF
UE 46
Pablo CARRERAS
Image photographique, expression, communication et
interactions orales en classe de français enseigné comme langue
seconde d'hôte.
Un atelier photographique réalisé au sein
de l'Association pour la Solidarité avec les Travailleurs
Immigrés d'Aix-en-Provence.
Tutrice de mémoire : Brigitte BRUNET,
PIUMF
Maitre de stage : Josette MISRAKI,
Présidente de l'ASTI d'Aix-en-Provence
Année universitaire 2011/2012
Remerciements
Je tiens à adresser mes sincères remerciements
à Madame Josette MISRAKI (Présidente de l'ASTI d'Aix-en-Provence)
ainsi qu'à l'ensemble des formateurs-formatrices et du personnel de
l'association qui, au-delà de leur accueil et de leur bienveillance,
m'ont permis de réaliser ce travail et de m'épanouir dans cette
voie.
Je remercie également Anita pour l'aide qu'elle a su
m'apporter au moment de la réalisation de cet atelier photographique.
Mes remerciements vont également aux apprenants de
l'ASTI, et plus particulièrement aux personnes ayant volontairement
participé à mon dispositif alors que le temps était aux
vacances scolaires. Travailler ensemble dans un tel respect mutuel n'est pas
chose si commune dans le monde de l'enseignement et de la formation.
Je remercie pour son soutien et sa patience Madame Brigitte
BRUNET, ma tutrice de mémoire.
Mes remerciements vont également à Madame Carol
BATTISTINI et à Monsieur Guy OLIVERI pour leur soutien initial dans ma
volonté d'intégrer cette unité d'enseignement.
Enfin, j'adresse mes remerciements aux personnes qui ont pris
le temps de m'aider, de m'écouter et de m'aiguiller dans mes recherches
et dans l'élaboration de ce mémoire.
« Le langage fait un usage infini de moyens
finis. » (Wilhelm VON HUMBOLDT)
Sommaire
Introduction
3
1. Le cadre théorique de l'étude
3
2. Le contexte général de
l'étude
3
3. Une problématique : susciter
l'expression personnelle, la communication et les interactions orales en classe
de FLSH
3
4. Le cadre méthodologique
3
5. L'analyse des données
3
Conclusion
3
Bibliographie
3
Table des index
3
Table des annexes
3
Table des matières
3
Annexes
3
Introduction
Terre d'accueil, d'asile et d'immigration, la France
possède au sein de sa population, selon une estimation 2010 de
l'Insee1(*), 3.7 millions
d'étrangers, soit 5.8 % de la population totale. L'étranger se
définit, alors, comme une personne non citoyenne du pays dans lequel
elle réside, cela incluant les apatrides.
Une réalité sociale et sociétale
émerge de cet état de fait : de nombreux migrants se
retrouvent en situation de déséquilibre ou d'exclusion sociale du
fait d'une méconnaissance, ou d'un savoir trop partiel, de la langue du
pays d'accueil.
L'apprentissage de cette nouvelle langue, dite cible, peut
alors permettre une meilleure intégration des personnes migrantes au
sein de la société. Corollairement, l'accès à
l'éducation fait partie intégrante des droits internationaux
relatifs aux droits de l'homme tels qu'édictés par la
Déclaration universelle des droits de l'homme (article 26)
adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies
le 10 décembre 1948 (Hénaire & Truchot, 2003, p. 58). En 1960
et 1966, dans sa Convention relative à la lutte contre la discrimination
dans le domaine de l'enseignement et sa Recommandation concernant la condition
du personnel enseignant, l'Assemblée réaffirme ce droit (Ibid.).
Par ailleurs, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne
prévoit dans son article 14 (alinéa 1), relatif au Droit à
l'éducation, que « toute personne a droit à
l'éducation ainsi qu'à l'accès à la formation
professionnelle et continue » (Parlement européen, 2000, p.
7).
Suivant une approche socioconstructiviste, nous
étudierons la perspective d'un enseignement du français aux
adultes étrangers en tant que langue d'expression personnelle, de
communication et d'interaction. Se pose, de ce fait, la question de la
didactique à mettre en oeuvre afin de soutenir cette approche :
quel dispositif, quel outil, quelle configuration ?
Nous nous interrogerons, dès lors, au cours de ce
présent mémoire de recherche professionnelle, sur la
capacité de l'image photographique à déclencher le langage
verbal et l'expression personnelle, sur la réalité des enjeux
communicationnels et interactionnels en classe de langue et sur l'appropriation
langagière afférente. Ces thématiques, dont procède
notre problématique, seront étudiées au travers d'une
revue de littératures tant scientifiques, philosophiques, sociologiques
que professionnelles et placées dans un contexte
déterminé : une mission professionnelle au sein de
l'Association pour la Solidarité des Travailleurs Immigrés (ASTI)
qui prodigue des cours dits de français langue étrangère
(FLE) et d'alphabétisation à des adultes principalement migrants.
Enfin, une analyse effective de nos données, méthodologiquement
recueillies, tendra, pour conclure, à répondre à la
problématique et aux hypothèses soulevées.
1. Le cadre théorique de l'étude
1.1. L'image photographique
comme déclencheur langagier
1.1.1. L'image en relation avec
l'être et son langage
Nous n'étudierons pas, en l'espèce, l'exhaustif
historique de l'utilisation de l'outil image comme déclencheur du
langage verbal en relation avec l'être, phénomène
initié au cours du XXème siècle. Nous noterons,
cependant, que si les théories behavioristes considéraient
l'image comme une « chimère dépourvue de la moindre
signification fonctionnelle dans le comportement » (Denis, 1989, p.
40), les concepts cognitivistes tentaient, quant à eux, de
réintroduire l'image dans les problématiques psychologiques en la
rattachant, à l'instar du langage, à la fonction
symbolique (Ibid., p. 43). Langage et image peuvent être, ainsi,
liés ; tous deux tendent à confronter l'humain à son
intime, à ses pensées, à son être.
Explicitée par BOURRET et FARQZAID, la pensée
barthésienne souligne le pouvoir de séduction exercé par
les images sur les individus (Bourret, 1982, p. 189), sa
« portée dionysiaque » et « le rapport, si
intime, entre l'image, la vie et le mythe » (Farqzaid, 2010, p. 189).
De plus, « la photographie constitue une image qui conduit à
la connaissance de soi et de l'Autre » (Ibid., p. 15), qui unit
l'individu au monde, qui lie l'être humain à ses réflexions
intérieures, à des images extérieures et à des mots
(Baptiste, 2011 ; Bélisle, 2010, p. 166). VALERY (cité par
Merleau-Ponty, 1960a) parle, ainsi, du « peintre qui apporte son corps
», soit de l'auteur qui se définit structurellement et
émotionnellement en son temps en produisant ses actes d'expression et en
communiquant par l'image picturale. Par l'introspection, l'image, à
l'instar du langage « miroir de l'esprit » (Chomsky,
1975/1981, p. 13), renseigne l'auteur sur lui-même. Par la diffusion de
sentiments individuels, elle renseigne ses récepteurs sur l'auteur. Elle
va également au-delà, par un effet de miroir et de
réflexion, en les renseignant sur leur propre condition (Citterio,
Lapeyssonnie & Reynaud, 1995, p. 70). L'image dispose alors de la
capacité d'unir les êtres, de les faire échanger par le
langage, qu'elle sous-tend et, de ce fait, qu'elle permet de déclencher
(Muller, 2012).
1.1.2. L'image comme outil
didactique en classe de langue
Au cours du XXème siècle, des
courants de la didactique des langues ont placé l'image au centre de
leurs préoccupations professionnelles et scientifiques. Le courant
structuro-globale audio-visuel visait, ainsi, à placer les apprenants
dans des situations où l'image se révélait
prégnante tant dans la traduction des énoncés que dans le
travail de production (Muller, 2009b, p. 175). D'autres auteurs (DE MARGERIE,
YAICHE...) ont, par la suite, suivi cette perspective et ont mis en place
« des activités originales à partir de
photographies » (Ibid.).
Suivant ces perspectives didactiques, l'image peut être
utilisée comme support afin de susciter la communication verbale. En
effet, selon VIALLON (2002), l'outil iconographique est susceptible d' «
inciter les apprenants à s'engager entièrement (émotions,
sentiments) et à être réceptifs aux interactions avec les
autres » (p. 56). De plus, « en raison de son caractère
non discursif2(*) [...]
l'image est immédiatement accessible et peut être commentée
par des locuteurs, quel que soit leur niveau de compétence dans la
langue cible » (Muller, 2012). La photographie apparaît alors
comme un déclencheur, un objet de médiation et « une
incitation à penser » (Bélisle, 2010, p. 166) qui
favorise, dès lors, l'éclosion du langage et la quête de
sens. BOURRET (1982) présente « les avantages
généraux de l'utilisation de l'image en cours de langue
étrangère » en ces termes :
« - adéquation parfaite de la langue au
niveau du groupe, - focalisation de l'attention de tous sur un point [...]
mais en revanche, - personnalisation des réactions dans la mesure
où chacun peut être accroché par un détail
différent, - progression relativement facile, de la photographie
univoque à l'image polysémique, - possibilité de
trouver de nombreux documents inducteurs de réactions, - une
adéquation entre niveau de compréhension et maturité des
apprenants. » (p. 178)
Nous notons que l'auteur privilégie l'usage de l'image
et des documents iconographiques en ce qu'ils rendent les apprenants
« plus attentifs aux propos des autres » (Ibid., p. 182).
En effet, l'absence de document écrit place le groupe classe dans une
situation où « personne ne sait à l'avance ce qui va
être dit, d'où une meilleure écoute de l'autre »
(Ibid.).
1.1.3. L'image et le discours
créatif
La créativité renvoie à « la
capacité d'imaginer et de donner forme à des idées, des
choses », elle permet d'élaborer « des solutions
inédites, originales, efficaces à des
problèmes » (Aden, 2009, p. 173). ADEN (Ibid.) décline
alors sa pensée relativement à l'acte de parole et précise
que
« Parler est en soi un acte créatif puisque
nous varions à l'infini notre discours au moyen d'un nombre fini de mots
et de structures dans des situations jamais identiques. Pour donner forme
à nos intentions et nos idées, nous combinons des
stratégies verbales, non verbales, nous imaginons des métaphores,
des images, des analogies, nous utilisons l'humour et surtout des histoires.
» (p. 174)
La créativité est ainsi subordonnée
à l'existence d'un problème que l'individu se propose de
résoudre par l'expression langagière. Pour ce faire, il
repère, sélectionne et combine des informations ou indices
afférents à l'environnement du problème
étudié, il se réfère à des situations qu'il
juge comparables ou analogues (Lubart, 2003, pp. 17-19). LUBART signale,
toutefois, que la créativité se trouve assujettie aux traits de
personnalité et aux émotions de chacun (Ibid., chap. 3 et
4).
L'élaboration, en 1968, de la méthode
Photolangage, destinée dans un premier temps à des publics
adolescents, puis déclinée aux mondes de la formation pour
adultes et de la recherche universitaire (Baptiste, 2011), utilise le support
photographique pour inciter « à l'expression écrite et
orale, à la créativité » (Baptiste et al., 1991,
cités par Muller, 2009a, p. 93). Ainsi, en association avec une
thématique donnée, il s'agit pour les participants au dispositif
de choisir une ou plusieurs photographies et de commenter verbalement leur
rapport personnel à l'image (Baptiste, Ibid.). L'auteur
souligne :
« Les photographies, choisies pour leur forte
puissance suggestive, leur capacité projective, leur qualité
esthétique et leur valeur symbolique, viennent stimuler,
réveiller les images que chacun porte en soi [...] Le fait de prendre
conscience de ses propres images et de pouvoir en discuter dans un groupe peut
amener [...] un développement de la sensibilité
imaginative. » (Ibid.)
Une telle approche confronte, dès lors, les individus
aux fonctions de projection de l'image et permet le déclenchement d'une
expression personnelle créative (Muller, Ibid., p. 103).
1.2. S'exprimer,
communiquer et interagir oralement en classe de langue
1.2.1. Les enjeux de la
communication et de l'expression verbales
Un message est dit verbal lorsque ce dernier est
réalisé dans une symbolique écrite ou orale (Jakobson,
1963/1981). L'auteur élabore alors un schéma de la communication
verbale mettant en exergue ses facteurs constitutifs et les fonctions
afférentes.
Index 01
: Schéma de la communication verbale par Roman
JAKOBSON (Ibid.)
Il y a, de ce fait, communication lorsqu'il y a transmission
d'un message d'un sujet (destinateur) à un autre (destinataire). La
compréhension du message sous-tend, par ailleurs, le partage partiel ou
total, entre les différentes parties, d'un code commun.
S'exprimer et communiquer tend à faire parvenir chaque
individu à l'humain (Breton, 2003, p. 25), être social et
socialisé pris, dès sa naissance, dans une dynamique de partage
du monde avec l'autre. C'est, en effet, « dans les autres que
l'expression prend son relief et devient vraiment
signification » (Merleau-Ponty, 1960b, p. 53). En relation avec la
pensée de BRETON et de MERLEAU-PONTY, la fonction expressive,
définie par JAKOBSON, relative à l'émetteur du message,
permet à chacun d'informer l'autre sur sa propre identité
(Benveniste, 1974, p. 95), sur ses opinions et son être. Par l'expression
d'une subjectivité explicite ou implicite (Kerbrat-Orecchioni,
1980/2009, pp. 167-170)3(*),
le locuteur affecte son énonciation de marqueurs (tels les verbes
subjectifs) qu'il lui importe d'échanger avec l'autre, et s'inscrit
dans la réalité conative du discours (Ibid., pp. 113-132).
Communiquer verbalement est, donc, un acte qui tend à dépasser
les limites du soi et du pour soi pour s'intéresser à l'autre,
qui transforme une dualité originelle en une possible union. HEIDEGGER
(1959/1976) écrit, ainsi, que « parler n'est pas en même
temps écouter ; parler est avant tout écouter » (p. 241).
Les identités révélées se confrontent et se
co-construisent alors dans une situation dialogique dont MERLEAU-PONTY
(1945) narre les enjeux interpersonnels :
« Dans le dialogue présent, je suis
libéré de moi-même, les pensées d'autrui sont bien
des pensées siennes, ce n'est pas moi qui les forme, bien que je les
saisisse aussitôt nées ou que je les devance, et, même,
l'objection que me fait l'interlocuteur m'arrache des pensées que je ne
savais pas posséder, de sorte que, si je lui prête des
pensées, il me fait penser en retour. » (p. 407)
Relativement à sa fonction de communication (Vygotski,
1933/1985, p. 74), le langage verbal fraie un chemin (Heidegger, Ibid., p. 183)
vers l'autre, avec qui il est, dès lors, possible d'entrer en relation
et de partager ses représentations. L'être entier s'engage alors
dans l'acte de parole qui, déployé, « épanouit
l'ensemble de la personne » (Breton, 2003, p. 54).
Néanmoins, l'engagement dans une situation de
communication et d'expression verbales dans une langue étrangère
impose aux individus un travail langagier et identitaire supplémentaire.
Ces derniers doivent, en effet, dépasser les contraintes syntaxiques et
lexicales de la langue cible (Vigner, 2009, p. 104) ; ils doivent
également dépasser ce que CHAOUITE (2008) nomme
« l'altérité secondaire », soit
« l'altérité d'une seconde langue qui potentialise
[...] l'identité des sujets dans une autre langue, la diffracte dans une
dualisation de la mémoire (des mots et des traces) tout en la soumettant
à une quête de son unité » (p. 67).
1.2.2. La prégnance de
l'oral dans les interactions communicatives entre apprenants en classe de
langue
L'interaction se définit comme « un ensemble
d'actions sociales orientées vers la réalisation par les
partenaires de buts interdépendants, qui constitue un épisode
social » (Bange, 1992a). L'écrit et l'oral permettent ces
activités communicationnelles entre individus. Néanmoins, l'acte
de parole apparaît comme un moyen premier et privilégié
pour communiquer avec l'autre, pour interagir avec lui et apprendre à
produire verbalement, notamment dans le cadre d'une classe de langue où
la langue cible de l'apprentissage est en même temps « langue
de communication de la classe et support de l'interaction »
(Champion, 2009, p. 41), « l'objet d'apprentissage et l'outil »
(Moore & Simon, 2002). VIGNER (2009) souligne également que l'oral
est « aussi une façon d'entrer en relation avec les autres
» (p. 62). En effet, de telles interactions horizontales permettent une
communication directe entre les apprenants (Vasseur, 2007, p. 28). Par
l'échange oral et l'alternance des tours de parole (Kerbrat-Orecchioni,
2005, p. 112), ils doivent « adapter sans cesse leur message et
coopérer mutuellement pour pouvoir se comprendre » (Champion,
Ibid.), ils peuvent s'exprimer et prêter attention aux propos des autres
(Muller, 2012), ils peuvent collaborer ou négocier en cas de
désaccords, de malentendus (Kerbrat-Orecchioni, Ibid., chap. 2)4(*). Les interactions communicatives
et l'oral se trouvent, de ce fait, intrinsèquement liés à
une dynamique de co-locution, de co-construction et d'actions conjointes
(Champion, Ibid. ; Traverso, 2005 ; Vigner, Ibid.). En ce sens,
CHAMPION (Ibid.) préconise de favoriser et de valoriser la production de
tels actes oraux en classe.
1.2.3. L'implication des
apprenants dans la communication
L'existence d'un enjeu contextuel, auquel se
réfère le message, est une condition sine qua non
à toute situation de communication. Le contexte tend, en effet, à
impliquer le message dans une réalité à laquelle le
destinateur doit ou veut rattacher ses propos (Jakobson, 1963/1981). BANGE
(1992b) souligne « qu'une stratégie de réalisation des
buts de communication ne peut apparaître qu'en relation avec un but
de communication préexistant, un but social substantiel ».
L'implication effective des apprenants procède, dès lors, de
l'existence d'un enjeu communicationnel que ces derniers désirent
réaliser et ce en dépit des risques afférents à
toute prise de parole en langue étrangère pour des locuteurs
non-natifs (Ibid.).
Nous notons l'existence de situations où l'apprenant,
guidé par une initiative et un engagement discursif propres, s'inscrit
sciemment dans la réalisation d'un objectif de communication, individuel
et individualisant, « non planifié par le
professeur » (Muller, 2012). MOORE et SIMON (2002) qualifient de
« déritualisation » ce phénomène qui
inscrit son initiateur dans une « prise de pouvoir discursive
», dans une « reconfiguration de [son] territoire »,
dans un réengagement de son identité au-delà de son statut
d'élève. Par cet acte, il redéfinit le
« scénario engagé par l'enseignant », il
change de manière délibérée les normes
classiquement établies en cours de langue (Moore & Simon, Ibid.). Le
recours à l'humour par les apprenants, de par sa « vertu
relationnelle », relève également de cette même
intention de « suspendre momentanément la relation
déterminée par les statuts des participants », de
s'impliquer en tant que sujet-personne dans la situation de communication
(Bigot, 2005).
Cependant, s'exprimer, communiquer et interagir oralement
renvoient invariablement à « un cadre (contrat)
psycho-socio-pragmatique » (Bromberg, 2007, p. 31), soit à des
contraintes sociales qui peuvent se définir en termes de
« vouloir dire » et de « pouvoir dire »
(Charaudeau, 1995, cité par Bromberg, Ibid., p. 30). Tout individu peut,
dès lors, pour des raisons inhérentes à sa
personnalité (Traverso, 2005), « refuser de rendre effective
la situation potentiellement communicative » (Bromberg, Ibid., p.
31), refuser la prise de risque langagière qu'elle sous-tend (Bange,
1992b).
1.2.4. Le professeur de langue
médiateur
La médiation implique « les capacités
de chacun, et notamment des plus démunis, à symboliser et
à imaginer » (Chaouite, 2008, p. 59), elle permet de
« renouer et [de] faire dialoguer les
« vérités » ou les intérêts
immédiats, symétriquement antagonistes, par
l'intermédiaire d'un tiers » (Ibid.). En ce sens, le
professeur de langue, dans son rôle de médiateur, tend au
développement et à la conscientisation des personnes
(Bélisle, 2010, p. 168). La gestion des rapports humains et sociaux
à l'intérieur de la classe, « lieu socialisé,
où s'établit un échange actif entre des partenaires ayant
leur place dans l'interaction » (Cicurel, 2002), lui incombe de ce
fait. Dans une logique de pédagogie de projet, il n'est plus l'unique
détenteur des savoirs et sa conduite du projet doit se positionner
au-delà des dérives « techniciste » et
« spontanéiste » (Bensalem, 2010, p. 80). Par la
mise en place de stratégies de guidage et d'étayage (Cicurel,
Ibid.), par la reformulation et le questionnement (Bélisle, Ibid., p.
167), il fait accoucher les apprenants de leurs connaissances culturelles et
langagières dans une démarche qui s'ancre dans la maïeutique
de Socrate. Un tel cadre didactique privilégie l'implication identitaire
des participants. Ses enjeux doivent, de ce fait, leur être
préalablement explicités en vue d'obtenir leur adhésion
effective, condition indispensable au bon déroulement du projet
(Bélisle, 2010, p. 168).
Une telle démarche de médiation peut être
utilisée en classe de langue dans une perspective tant
pédagogique (ou andragogique) qu'humaine afin de « rendre la
parole à ceux qui ne l'ont pas, [de] leur permettre d'exister tels
qu'ils sont, [de] respecter leur langage, tout en améliorant leurs
facultés d'expression » (Bourret, 1982, p. 178).
1.3. Vers une appropriation
de la langue ?
1.3.1. Appropriation et
élaboration du message verbal
· La subjectivité et l'implication de l'apprenant
dans le message
La situation de communication procède des relations qui
s'opèrent entre l'émission du « je/moi » et
son opposition au « tu/toi » et « au
il/lui » (Benveniste, 1974, pp. 99, 200). L'inclusion du
locuteur apparaît, dès lors, comme une condition sine qua
non à l'expérience discursive : « une
expérience humaine [qui] dévoile l'instrument linguistique [qui]
la fonde » (Ibid., p. 68). BENVENISTE (1970) définit
l'énonciation « comme un procès
d'appropriation » au cours duquel « le locuteur s'approprie
l'appareil formel de la langue et [...] énonce sa position de locuteur
par des indices spécifiques » (p. 14). GIACOMI (2006) souligne
ce même rapport entre usage et acquisition de la langue en
précisant que par le « je » l'apprenant se
pose « comme un être pensant et agissant par rapport aux
autres et au monde » (p. 27). En s'exprimant alors en tant que
sujet-personne, il se révèle « davantage susceptible de
s'approprier les données qu'en étant limité à une
identité d'élève » (Muller, 2012). De plus, en
réorientant « le potentiel communicatif des enjeux
discursifs », les différents phénomènes de
déritualisation et d'engagement énonciatif permettent à
l'apprenant « de redessiner les contours des interactions
d'apprentissage », de redéfinir « les formes, les
objectifs et les contenus » de la situation initiale et de
s'approprier les données nouvellement cadrées (Moore & Simon,
2002).
· L'expression personnelle créative dans le
message
Dans un contexte de classe de langue, contraindre des
apprenants à créer verbalement « valorise la fonction
poétique imaginative de la langue et encourage une implication
personnelle » (Muller, 2009a, p. 103), les incite à « ouvrir
et aiguiser leur liberté énonciative et discursive »
(Beacco, 2007, p. 242). En effet, afin de donner forme à leurs
idées, ils doivent convertir l'ensemble des inputs
reçus, leurs analyses relatives et les émotions
générées en mots (Aden, 2009, p. 175) ; ils doivent
mobiliser leurs compétences langagières, qu'ils agencent dans un
style propre, « caractère d'une prise de possession de la
langue » (Benveniste, 1974, p. 100). De plus, la réalisation de
tâches créatives permet de favoriser la prise de risque et de
valoriser la confiance en soi tout en développant un
apprentissage dans la langue cible (Aden, Ibid.). Ainsi, ADEN (Ibid.)
soutient que
"Maîtriser de mieux en mieux une langue c'est devenir de
plus en plus créatif dans cette langue, l'un n'étant pas la
conséquence de l'autre, mais les deux se renforçant dans une
boucle rétroactive. » (p. 174)
1.3.2. Appropriation et
situations d'interactions communicatives
Dans ses réflexions sur le langage, CHOMSKY (1975/1981,
p. 24) associe acquisition langagière et expériences
linguistiques. L'approche socioconstructiviste postule également un
rapport intrinsèque entre celle-ci et les interactions sociales. BANGE
(1992b) souligne, ainsi, l'existence d'un lien direct entre l'appropriation
d'une langue et son usage en tant que langue de communication. En effet,
l'apprenant en interaction doit mobiliser ses compétences
langagières et s'en approprier de nouvelles pour répondre
à la pression exercée par la situation de communication (Lambert,
1994) ; pour cela, il met en oeuvre « des stratégies
cognitives de traitement de l'information, des stratégies de
réalisation des pratiques langagières, des stratégies
linguistiques et discursives » qui participent à son
appropriation de la langue par le développement « de nouvelles
capacités communicatives » (Véronique, 2007, p. 87).
Concernant les situations d'apprentissage du français
enseigné aux étrangers, VIGNER (2009) soutient que c'est par la
prise de parole et les interactions afférentes que l'apprenant parvient
à « intérioriser un certain nombre de formes de la
langue » (p. 62). Sa pensée est appuyée, en ce sens,
par CHAMPION (2009), pour qui la communication permet le développement
de « procédures de répétition, de reformulation,
d'explication » qui participent à un apprentissage
métalinguistique (p. 41), et par GIACOMI (2006), qui définit
l'appropriation langagière en interaction en termes de capacités
dont doivent faire preuve de manière progressive les
apprenants :
« la capacité à référer
à soi par rapport aux autres, c'est-à-dire la possibilité
d'établir des relations interlocutives [...] ; la capacité
à référer au temps, par l'établissement de
relations d'antériorité et de postériorité [...] ;
la capacité à référer à l'espace [...] au
moyen d'adverbes et de prépositions [...] ; la capacité à
référer aux personnes, aux objets et aux entités [...] ;
la capacité à établir des relations intra- et
inter-syntagmatiques au moyen de connecteurs et de conjonctions ; la
capacité à prendre plus ou moins de distance par rapport à
son propre discours et au discours de l'interlocuteur [...] ; la
capacité, enfin, à maintenir une cohérence et une
cohésion dans la conduite des interactions. » (p. 27)
Ainsi, à travers la réalisation d'une
tâche dialogique en cours de langue, l'apprenant expérimente et
peut apprendre « à interagir de façon authentique dans la
langue cible » (Muller, 2012). L'interaction communicative permet,
dès lors, de recueillir et d'intégrer des savoirs qui n'auraient
pu voir le jour sans l'échange (Dubost, 2009, p. 130), qui pourront
être réutilisés a posteriori (Merleau-Ponty, 1945,
p. 407) et consolider l'interlangue des apprenants (Muller, Ibid.).
Favorisation de l'éclosion d'un message tant personnel
que créatif, promotion des interactions communicatives et appropriation
de la langue peuvent donc être corrélées. Néanmoins,
les mécanismes d'apprentissage d'une langue étrangère
varient selon les capacités cognitives de l'individu. LAMBERT (1994)
expose cet état en termes d'aptitudes individuelles « à
la discrimination perceptive, à la faculté d'induction, à
la conservation en mémoire et à la sensibilité
grammaticale ». Chaque apprenant dispose d'une capacité
linguistique propre qui lui permet un apprentissage plus ou moins rapide et
efficient en fonction de sa faculté, modelée par ses
connaissances en langue maternelle, à « traiter les
données du langage, [à] les coder et [à] les
mémoriser » (Ibid.).
2. Le contexte général de l'étude
2.1. L'ASTI, l'associatif
au service des adultes migrants
La construction identitaire et l'inclusion effective d'une
personne en milieu exolingue5(*) relèvent d'une problématique
sociétale qui touche pleinement les populations migrantes sur l'ensemble
des territoires internationaux. Il apparaît, en effet, difficile de
s'affirmer individuellement, de s'insérer socialement et culturellement
dans une société qui pratique des codes langagiers
différents de ceux plus ou moins anciennement acquis dans un contexte
culturel et social autre. Le monde environnant influe sur la personne. De ce
fait, une incapacité à se projeter pleinement dans l'expression
verbale et à communiquer avec autrui peuvent laisser apparaître
des fêlures identitaires, et empêcher le redéploiement d'une
identité parfois reléguée, au fil des rencontres
d'infortune et des discours, au rang d'une pure altérité.
Ainsi, centres de formation privés ou publics,
associations et écoles de langues se sont inscrits dans cette
réalité sociale en prodiguant des cours de français aux
populations adultes migrantes. L'ASTI d'Aix-en-Provence s'intègre dans
cette perspective et fait partie de la Fédération des
Associations pour la Solidarité avec les Travailleurs Immigrés,
mouvement de solidarité envers les personnes étrangères,
qui se bat pour le droit des personnes migrantes depuis les années
soixante. La création de l'ASTI dans le paysage associatif aixois
remonte à 1967 ; elle est un lieu d'accueil pour toutes les
personnes en difficulté d'adaptation. Elle est un lieu de partage,
d'entraides, d'échanges et de cohésion sociale (ASTI
d'Aix-en-Provence, 2011). Ses activités se destinent principalement aux
personnes d'origine étrangère ou étrangères,
désireuses d'acquérir une base langagière en
français afin de s'insérer pleinement dans la vie sociale de la
cité et d'obtenir, le cas échéant, un emploi (Ibid.).
2.2. Les objectifs
visés : de l'insertion culturelle à la promotion sociale des
adultes migrants
Les cours de français prodigués par l'ASTI
tendent au-delà de la simple transmission de connaissances
langagières. Il est, certes, nécessaire que les apprenants
apprennent le nouveau code cible, mais l'ensemble est pratiqué dans une
dimension tant actionnelle qu'humaine, dans une perspective à
visée culturelle et sociale. Ainsi, l'apprentissage du français
est perçu comme l'apprentissage d'un nouveau médium, soit
« un moyen de développer la personnalité, de
conquérir de l'autonomie et de s'introduire à part entière
dans la vie sociale » (ASTI d'Aix-en-Provence, 2011). L'acquisition
et l'utilisation effectives des savoirs langagiers placent alors les apprenants
dans une dynamique d'ouverture à l'autre, de communication et de
participation à la vie sociale de la cité. L'individu se sent,
ainsi, en interaction avec son monde et peut tendre vers son expression propre
et son élévation.
2.3. Une double
réalité enseignante : de l'alphabétisation au FLE
L'ASTI d'Aix-en-Provence prodigue à ses apprenants des
cours d'alphabétisation et de FLE. Nous proposerons, dès lors,
une mise en perspective des différentes définitions touchant
cette thématique du français enseigné comme langue non
première.
Les cours d'alphabétisation concernent les apprenants,
allophones ou non, qui « sont analphabètes ou
analphabètes fonctionnels6(*) [...], c'est-à-dire qu'ils ne savent ni lire ni
écrire aucune langue que ce soit ou bien qu'ils n'ont qu'une
maîtrise superficielle de l'écrit » (Adami, 2008, p.
19). Le contexte d'apprentissage et le processus d'acquisition de la langue
cible diffèrent, de ce fait, du FLE dans la mesure où la relation
entre l'oral et l'écrit se révèle soit inconnue, soit
aucunement maitrisée dans la langue première.
CUQ et GRUCA (2005) définissent le FLE en ces
termes :
« Le français est une langue
étrangère pour tous ceux qui, ne le reconnaissant pas comme
langue maternelle, entrent dans un processus plus ou moins volontaire
d'appropriation, et pour tous ceux qui, qu'ils le reconnaissent ou non comme
langue maternelle, en font l'objet d'un enseignement à des parleurs non
natifs. » (p. 94)
Placerons-nous, dès lors, notre étude dans le
cadre du FLE, dans celui de l'alphabétisation ou dans le cadre d'une
dénomination liant les deux pratiques ?
POCHARD (cité par Cuq & Gruca, 2005) refuse de
considérer l'apprentissage du français aux allophones
présents sur le territoire national sous le prisme du FLE, le
conceptualisant alors sous l'appellation de français langue seconde
hôte (FLSH), soit « la langue apprise dans le pays, la
région où cette langue est la langue dominante » (p.
97). CUQ et GRUCA (Ibid.) précisent, toutefois, que la
dénomination ne fait nullement l'objet d'un consensus.
Néanmoins, et ce après réflexion, nous
précisons que dorénavant, sauf référence expresse
à la typologie utilisée par l'ASTI, nous utiliserons, au cours de
ce présent mémoire, l'appellation de FLSH. En effet, nous
décidons, dans ce cas d'espèce, relatif au cadre de notre
étude, de ne pas opérer de dichotomie entre
alphabétisation et FLE ; cela en étant conscient des
différences didactiques relatives aux deux disciplines en ce qui
concerne leurs enseignements classiques ; cela en raison de la nature
originale de notre dispositif qui tend à placer les participants dans un
rapport de communication, d'interaction et d'expression personnelle qui
favorise la mobilisation des savoirs de chacun au-delà de leurs
capacités langagières premières.
3. Une problématique : susciter l'expression
personnelle, la communication et les interactions orales en classe de FLSH
3.1. La
problématique
Nos réflexions se tournent vers l'usage du
français en tant que langue nouvelle d'expression personnelle, de
communication et d'échange en classe de FLSH, vers l'utilisation de
l'image photographique en tant qu'outil pouvant favoriser l'éclosion du
langage verbal.
Ainsi, en quoi l'image photographique, utilisée comme
support didactique, peut-elle favoriser le déclenchement d'une
expression personnelle, d'une communication et d'interactions orales en classe
de français enseigné comme langue seconde d'hôte ?
3.2. Les
hypothèses
Ces deux hypothèses font suite au
précédent questionnement.
Proposer à des apprenants de l'ASTI un dispositif
didactique basé sur la favorisation et de la valorisation de
l'expression, de la communication et des interactions orales pourrait-il
permettre à ces derniers de s'exprimer, de communiquer et d'interagir
d'une manière ouverte et personnelle en classe de langue ? Cela
dans la perspective d'une appropriation du français en tant que nouvelle
langue privilégiée d'expression et d'échange avec l'autre,
nouvelle langue de communication.
De plus, l'image photographique s'avérerait-elle un
outil didactique capable de les impliquer dans une telle situation de dialogue
et d'échange de points de vue personnels, et ce quel que soit leur
niveau en français ?
3.3. L'atelier
photographique, un dispositif didactique en réponse à nos
questions
3.3.1. Une
hétérogénéité de fait des apprenants
Il convient de
préciser que, de par la mise en place même du projet, basée
sur le volontariat, l'ensemble du groupe se trouvait marqué par une
forte hétérogénéité de fait. Des apprenants
issus de deux groupes d'alphabétisation (incluant deux locuteurs natifs)
et des apprenants issus de deux groupes de FLE ont été ainsi
réunis. En référence à l'organisation7(*) des groupes officiée par
l'ASTI et aux compétences par niveaux définies par le Cadre
européen commun de référence pour les langues (CECRL)
(Conseil de l'Europe, 2001, pp. 49, 55, 61), nous prenons l'engagement
d'écrire que les capacités langagières des apprenants
s'inscrivaient, à l'oral, dans un cadre variant entre les niveaux A1 et
B2 (
Annexe 1). Nous ne sommes, cependant, pas
compétent pour qualifier individuellement chaque participant et ne le
ferons, donc, aucunement.
3.3.2. Une approche orale
actionnelle objectivée
La favorisation et la valorisation de l'expression
personnelle, de la communication et des interactions orales se trouvaient au
coeur des objectifs du dispositif didactique mis en oeuvre. L'image
photographique était alors utilisée comme un déclencheur
potentiel des échanges. Les apprenants avaient été, par
ailleurs, préalablement informés (
Annexe 2) des enjeux communicationnels qui
allaient leur être proposés, et ce afin d'obtenir leur
adhésion, condition indispensable au bon déroulement du
projet.
Quatre jours ont été consacrés
à la réalisation de cet atelier. Les différentes sessions
quotidiennes (
Annexe 3) ont permis la variation
des situations et des tâches à accomplir dans une approche
actionnelle telle que conceptualisée par le CECRL (2001) :
« La perspective privilégiée ici est
[...] de type actionnel en ce qu'elle considère avant tout l'usager et
l'apprenant d'une langue comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des
tâches (qui ne sont pas seulement langagières) dans des
circonstances et un environnement donnés, à l'intérieur
d'un domaine d'action particulier. Si les actes de parole se réalisent
dans des activités langagières, celles-ci s'inscrivent
elles-mêmes à l'intérieur d'actions en contexte social qui
seules leur donnent leur pleine signification. Il y a « tâche »
dans la mesure où l'action est le fait d'un (ou de plusieurs) sujet(s)
qui y mobilise(nt) stratégiquement les compétences dont il(s)
dispose(nt) en vue de parvenir à un résultat
déterminé. La perspective actionnelle prend donc aussi en compte
les ressources cognitives, affectives, volitives et l'ensemble des
capacités que possède et met en oeuvre l'acteur
social. » (p. 15)
3.3.3. La réception
d'images photographiques : vers une émergence des enjeux
d'expression, de communication et d'interaction soulevés ?
Au cours de cet atelier, nous avons
présenté aux apprenants un corpus de productions iconographiques (
Annexe 4). Si la première et la
dernière séquences se sont rapprochées d'un atelier dit de
Photolangage, en visant l'émergence d'une expression personnelle orale
devant l'autre et la mise en place d'une cohésion du groupe en tant
qu'ensemble unitaire porté par une conscience et un intérêt
communs, dans une approche bergsonienne de la socialisation définie en
termes d'émergence des individualités au travers du sentiment
d'appartenance à un groupe, la séance centrale du dispositif (
Annexe 3, pp. 60-61), sujet de notre future
analyse, a été envisagée dans une dynamique d'interaction
supérieure en sollicitant de manière prégnante
l'échange d'idées et la communication orale entre les
apprenants.
Au cours de cette dite séance, les apprenants,
répartis en binômes, ont reçu différentes
photographies à commenter (
Annexe 5). Cette modalité a permis à
chacun de rechercher des indices, d'échanger et de négocier, en
premier lieu, avec un partenaire sur une image donnée. Suite à
cette phase, chaque participant a pu s'exprimer, prendre position,
réagir aux propos de ses interlocuteurs, discuter et échanger
avec eux dans une logique de communication et d'interaction que nous avons
tenue à alimenter par un travail de médiation et le
questionnement.
Le tableau suivant informe sur le déroulement de la
séance et sur les apprenants.
Photographie n° et titre
|
Binômes8(*)
|
Niveaux au sein de l'ASTI
|
1. Amityville
|
Junko et Nadine
|
FLE 2 et Alphabétisation 3
|
2. Tristes gosses
|
Amina et Gaëlle
|
Alphabétisation 3
|
3. Le Désespéré
|
Alexandre et Carin
|
Locuteur natif et FLE 3
|
4. Juste avant le sourire
|
Fabien et Vince
|
Locuteur natif et FLE 2
|
Index 02 :
Informations sur le déroulement de la séance et sur
les apprenants
Afin de placer l'étude dans le contexte qui a
été le notre, nous précisons que Carin, Gaëlle et
Junko n'ont pas participé à la première séquence du
dispositif. Nous signalons également que Junko n'a pu assister à
l'ensemble de la séance, d'où les résultats d'analyse
ultérieurs répertoriés et sa disparition des
échanges à partir de l'étude de la photographie
n°3.
4. Le cadre méthodologique
4.1. L'annonce de la
méthodologie
Le dispositif méthodologique de ce mémoire
s'attache à l'observation des situations d'expression, de communication
et d'interaction orale au sein d'une classe de FLSH. L'ensemble de ces
phénomènes appartient à un cadre factuellement
défini : un atelier photographique au sein de l'ASTI
d'Aix-en-Provence avec un groupe d'apprenants hétérogène
et unique. Ainsi, une pratique basée sur ethnométhodologie nous a
semblé appropriée dans la mesure où nous nous astreignons
à n'étudier qu'un petit groupe de fait et à prendre en
compte les inévitables effets de la présence de
l'observateur-professeur dans les relations de communication.
Corrélativement à l'objet de notre étude,
axé sur l'usage de la langue française, nous nous orientons vers
une approche méthodologique mixte tant basée sur la
qualité des échanges oraux que sur la quantité de
certaines occurrences verbales produites par les apprenants locuteurs.
Méthodes qualitative (majoritaire) et quantitative (minoritaire) se
mêlent, ainsi, dans une analyse plurielle des données
recueillies.
Nous précisons que dans la mesure où les
interventions des locuteurs natifs présents dans le groupe participent
à la réalité communicationnelle du dispositif (les autres
apprenants réagissant à leurs propos), ces dernières font
l'objet d'une intégration effective dans le corpus et de
références au sein de notre analyse9(*). Cependant, nous bornant à l'enseignement du
français à des étrangers, elles échappent à
notre perspective d'étude et ne seront pas significativement
analysées.
4.2. Une technique de
recueil des données
4.2.1. L'enregistrement
audio
Le dispositif didactique mis en place dans ce présent
mémoire trouve sa pérennité dans l'enregistrement audio
des séances d'enseignement. L'ensemble des actes d'expression, de
communication et d'interaction trouve ainsi un support permettant le recueil
des données et leur transcription future. Les apprenants ont, par
ailleurs, été mis au courant de l'ensemble du schéma
méthodologique et ont accepté cet état de fait (une
utilisation et une diffusion limitées au cadre universitaire avec un
respect de l'anonymat).
4.2.2. L'éviction de la
vidéo
Il convient de préciser que l'éviction de
l'enregistrement vidéo est purement consciente et
délibérée. La caméra peut, en effet,
apparaître comme un distracteur, potentialisant des problèmes
d'estime de soi ou culturels par la capture de l'image physique, et
interférer sur le comportement des locuteurs. Cette prise de position
empêche, toutefois, la capture des émotions, de l'ensemble des
réactions faciales et corporelles, qui font partie intégrante du
langage humain et des situations de communication et d'interaction.
4.3. Une analyse du
terrain : une séance au coeur de la méthodologie
Afin de répondre à notre questionnement,
nous avons décidé, et ce par choix méthodologique, de nous
focaliser sur l'émergence de l'expression, de la communication et des
interactions orales au cours d'une séance précise10(*), centrale tant d'un point de
vue temporel que didactique, spécifiquement mise en place pour mettre
les objectifs de notre recherche en relation avec le terrain. Ce sont, donc,
les différents actes de parole et d'échange intervenus au cours
de cette séance qui ont fait l'objet de notre transcription (
Annexe 6) aux conventions précisées (
Annexe 7).
5. L'analyse des données
5.1. Le témoignage
des enjeux de l'expression et des interactions communicatives
5.1.1. L'expression de la
subjectivité des apprenants locuteurs
L'inclusion explicite du locuteur dans son énonciation
se manifeste au moment d'apporter son interprétation de l'image.
L'analyse de l'ensemble du corpus nous permet d'établir le graphique
suivant. Il référence les différentes occurrences des
pronoms déictiques « je » et
« moi », des verbes subjectifs et des modalisateurs
présents dans les énoncés des apprenants (l'
Annexe 8 propose un répertoire
clarifié des tours de parole -TP- utilisés, en l'espèce,
pour sa conception).
Index 03 :
Occurrences des marqueurs de la subjectivité explicite chez
les apprenants
Le graphique met en évidence un usage plus ou moins
important, selon les apprenants, du « je » et du
« moi », des verbes subjectifs et des modalisateurs. Vince,
Amina, Carin et Junko11(*)
sont les participants qui témoignent le plus d'une volonté de
modaliser leurs énoncés et de placer leur expression sur le champ
d'une subjectivité explicite. De ce fait, ils informent leurs
interlocuteurs qu'il s'agit d'un positionnement personnel. Notre cadre
théorique établit un lien direct entre l'inclusion effective et
explicite des apprenants locuteurs dans leurs discours et l'appropriation
langagière.
Les faibles occurrences desdits marqueurs chez Gaëlle
peuvent être mises en relation avec l'exemple suivant.
Index 04 :
Exemple n°01
079
|
P
|
et Gaëlle qu'est-ce que vous voyez dans cette
maison12(*) ?
[...] (elle désigne sa photographie) [...]
|
080
|
Gaëlle
|
c'est la maison allumée + euh le fantôme
(petit rire)
|
091
|
P
|
[...] Gaëlle ?
|
092
|
Gaëlle
|
aussi ? (petit rire)
|
172
|
P
|
alors Gaëlle qu'est-ce que vous voyez ?
+ d'après vous qu'est-ce ce ça peut vouloir dire cette
photo ? [...]
|
182
|
Gaëlle
|
un révolutionnaire
|
183
|
P
|
un révolutionnaire ? non: enfin pour Carin
peut-être pas pour vous ?
|
184
|
Gaëlle
|
je sais mais: + je (petit rire) + oui je
sais mais: un petit peu
|
Cet exemple témoigne des difficultés que
rencontre Gaëlle à s'exprimer et à rentrer
délibérément dans une communication orale avec l'autre.
Elle use, par ailleurs, de moyens alternatifs pour s'y soustraire et
éviter toute prise de risque langagière (en déviant
l'objet de la question, TP 79 ; en usant de malice, TP 92). Ainsi, son
énonciation ne s'avère jamais intentionnelle ; nous devons
en quelque sorte l'y contraindre par le questionnement (TP 79-172-183), ce qui
n'enlève nullement le malaise qui la gagne (TP 184). Néanmoins,
bien que cela la soustraie à l'élaboration d'une expression
personnelle subjective, sa capacité à se référer
aux propos d'autres participants nous renseigne sur le fait qu'en dépit
de ses difficultés d'expression orale, elle les écoute, les
saisit et peut les réutiliser dans le contexte (TP 182).
Le nombre d'occurrences sensiblement moins élevé
chez Nadine trouve son écho dans l'étude de l'exemple suivant.
Index 05 :
Exemple n°02
015
|
Nadine
|
c'est la maison d'une famille + la famille
qui vienne passer les vacances + d'été
voilà + ensuite il y a l'ange statue
là la statue de l'ange là ici + et c'est bon non
?
|
024
|
Nadine
|
il y a plein d'arbres + il y
a plein d'arbres et c'est + c'est
une XX
|
026
|
Nadine
|
il y a plein d'arbres + et oui c'est
le printemps ?
|
044
|
Junko
|
d'abord j'ai pensé comme eux
c'est la maison han- + hantée [...]
|
046
|
P (à Nadine)
|
et pourquoi tu as
pensé à une église ?
|
047
|
Nadine
|
ben après j'ai dit non c'est
pas une église parce que: y a y a un: + euh
non y a la fenêtre et le: le: le balcon là
|
050
|
P (à Nadine)
|
mais pourquoi tu as
pensé à une église au début ?
|
053
|
Nadine
|
parce que c'est comme + le la maison
on dirait que: c'est une église
|
063
|
Amina
|
moi je pense que c'est une maison [...]
|
076
|
Vince
|
je pense que c'était une maison
hantée [...]
|
Nous distinguons, en l'espèce, deux pratiques
énonciatives distinctes, où le « c'est »,
objectif, s'oppose au « je pense ou crois que c'est »,
subjectif. Dans cet extrait, contrairement aux autres participants (TP
44-63-76), Nadine se borne, dans un premier temps, à décrire ce
qu'elle voit (TP 15-24-26) dans un rapport de vérités objectives
à l'objet (« c'est », « il y
a »). L'apprenante use de ses sens mais ne tend pas encore à
la subjectivité explicite ou, délibérément, s'y
soustrait par un manque de confiance dans ses propos, qu'elle soumet
immédiatement à validation (« c'est bon non
? », TP 15). La répétition de notre question (TP 46-50)
tend, toutefois, à la redéfinir comme sujet de son discours
(« après j'ai dit », TP 47) et une modalisation
apparaît (« on dirait que », TP 53). Nous
signalons que l'apprenante aura, au fil de la séance, un recours de plus
en plus probant à une subjectivité explicite.
5.1.2. L'émergence des
interactions entre les apprenants
L'interaction peut donner lieu à des situations de
collaboration et de négociation conversationnelle entre les
participants.
· La collaboration entre apprenants
L'extrait suivant met en exergue une situation où une
apprenante se réfère délibérément aux
potentielles intentions d'une autre afin de l'assister dans son explication de
la photographie Amityville.
Index 06 :
Exemple n°03
056
|
Junko
|
et oui c'est peut-être elle a
pensé que avec [...] ?
|
057
|
Nadine
|
non
|
058
|
Junko
|
ah non d'accord (rires)
|
060
|
Junko
|
peut-être elle a pensé avec
luminée c'est comme + comme divine
|
061
|
Nadine (à P)
|
(coupe Junko)
qu'est-ce que toi tu penses ?
|
Réagissant aux hésitations
d'interprétation de Nadine, avec qui elle partage la photographie
à commenter, Junko tente d'expliciter personnellement la pensée
de sa camarade (TP 56-60). En interagissant de la sorte, elle se place dans une
double énonciation de la subjectivité
(« je/elle ») ; elle tend à substituer la
pensée de son binôme à la sienne (« elle a
pensé », TP 56-60). Le double usage de l'adverbe
« peut-être » (TP 56-60) prouve, cependant, qu'elle
est dans une logique de collaboration et non de récupération
simple des propos. Toutefois, Nadine ne ratifie pas la remarque de Junko (TP
57), qui accepte cette opposition avec le sourire (TP 58), et coupe court
à la seconde tentative d'explicitation de sa camarade en nous adressant
une question (TP 61). Nous notons que la réfutation de Nadine et sa
rupture du dialogue n'annihilent nullement la qualité discursive de la
démarche de Junko qui s'ancre, sciemment, dans un processus
d'interaction entre pairs.
Une situation de collaboration peut également naitre de
la volonté d'un apprenant de se référer au commentaire
d'un autre dans une perspective de co-construction énonciative.
Index 07 :
Exemple n°04
300
|
Carin
|
je pense c'est une personne qui se
sent comme ça mal + c'est une psychose
|
302
|
Vince
|
et pourquoi il se sent comme ça:: ?
|
Se référant à la proposition de Carin (TP
300), qui tend à caractériser le personnage de Juste avant le
sourire, et en posant ouvertement une question (TP 302), Vince est
à l'origine d'une tentative de collaboration. La promptitude de son
énoncé signale sa volonté à coordonner un sens
nouveau à l'image en relation avec la pensée de sa
camarade ; toutefois, son questionnement sur le pourquoi de l'attitude du
personnage ne sera pas singulièrement repris par les autres apprenants
et la situation est, faute d'échanges, avortée.
La découverte, par un participant, d'un nouvel indice
graphique peut entrainer l'émergence d'une co-construction et d'une
collaboration effectives, qui s'articulent autour du sens que cette nouvelle
information donne à l'image. Dans l'extrait suivant, les apprenants
réagissent au coeur brisé tenu par la jeune fille en pleurs de la
photographie Tristes gosses.
Index 08 :
Exemple n°05
094
|
Alexandre
|
elle a le coeur brisé
|
097
|
Vince
|
moi j'ai vu ça ? comme une
métaphore pour les rêves brisés ?
|
099
|
Carin
|
une métaphore de quoi ?
|
100
|
Vince
|
les rêves brisés les rêves
cassés
|
101
|
Alexandre
|
et sur le coeur on voit des dessins sur le coeur on voit le
dessin de la fille et le garçon si tu regardes bien
|
102
|
Junko
|
ah:
|
103
|
Alexandre
|
[...] qui s'aiment de petit enfant
|
104
|
Junko
|
ah:
|
105
|
Amina
|
oui oui ça je sais
|
107
|
Alexandre
|
[...] tu vois sur le coeur + brisé + au coeur rouge tu
vois la tête du garçon et de la fille tu le vois là ?
|
108
|
Vince
|
ensemble là ouais
|
109
|
Nadine
|
oui là là
|
110
|
Amina
|
il y a + il y a des + inaudible + des
jumeaux
|
115
|
Junko
|
je pense que c'est la fin de enfance ?
|
116
|
Vince
|
hum + oh je suis d'accord à ça
? [...]
|
La révélation d'un nouvel élément
graphique par Alexandre (TP 94) est à l'origine des interactions.
L'assertion est admise sans opposition et permet l'émergence d'une
émulation de plusieurs entités du groupe qui discutent
directement. Chacun réagit, à un moment donné, à
l'énoncé de l'autre par le questionnement (TP 99), la surprise
(TP 102-104) ou un acquiescement tant expresse (TP 105-108-109-116) que tacite
- dans ce dernier cas, les apprenants usent implicitement de l'indice pour
donner un sens inédit à l'image (TP 97-110-115).
· La négociation entre apprenants
Les désaccords sur un point particulier de l'image
peuvent donner lieu à des négociations conversationnelles entre
les apprenants. Les sensibilités individuelles se révèlent
un facteur d'opposition comme en témoigne l'extrait suivant où
deux conceptions d'analyse de l'image Juste avant le sourire se font
face : mêler le fond et la forme (Vince), se baser exclusivement sur
la forme (Alexandre).
Index 09 :
Exemple n°06
232
|
Vince
|
ça c'est du bois
|
233
|
Alexandre
|
ça c'est un rocher de pierre
|
234
|
Vince
|
ah ouais ?
|
238
|
Vince
|
ok + + moi j'ai vu le fil là
|
240
|
Alexandre
|
non c'est une grotte c'est de la pierre
ça c'est de la pierre
|
248
|
Vince
|
moi j'ai le même problème
là avec + moi j'ai vu un fil
|
249
|
Alexandre
|
une clé ?
|
253
|
Vince
|
[...] je pensais à un truc de migraine mal
à la tête + avec les yeux + avec les yeux
là + et même moi j'ai vu le le visage les yeux et la bouche et
tout ça mais ça le rouge pour moi c'est plutôt comme du
sang + du sang pour moi + euh et donc pour moi ça venait de XX des yeux
+ il y a quelque chose qui sort de la tête
|
256
|
Alexandre
|
moi je pense que c'est une roche
|
257
|
Vince
|
non moi je je suis d'accord que tout ça c'est
un roche oui ? + le derrière là ?
|
260
|
Vince
|
je croyais que c'était un miur
comme: + euh
|
Les deux apprenants sont en désaccord sur le sujet de
l'oeuvre. Vince écoute alors les remarques d'Alexandre (« ah
ouais ? », TP 234 ; « ok », TP 238) et lui
propose son interprétation de l'objet (TP 238-248-253). Par un tel
comportement, il signale à son interlocuteur qu'il accepte de
régler le désaccord par la négociation. Cependant,
Alexandre ne le suit pas sur ce champ conversationnel. En effet, dans une
logique de conflit énonciatif, il réitère à de
multiples reprises sa conception et converse sans tenir compte de
l'argumentation élaborée par son partenaire (TP 240-249-256).
Finalement, Vince adopte une double posture en ne se ralliant
spontanément qu'en partie à la position d'Alexandre. S'il accepte
l'assertion de l'autre (« c'est une roche oui », TP
257 ; il parlera par la suite d'un « miur », TP 260),
cela ne concerne, selon lui, que l'arrière plan (« le
derrière là ? », TP 257) et non l'ensemble de la
photographie ; le fond de l'image est, à son sens, ailleurs.
· Un cas particulier de négociation : le
malentendu
La situation suivante
diffère des cas précédents d'interaction pour deux
raisons : le professeur apparaît comme un interlocuteur
intrinsèquement impliqué et il réalise une
interprétation erronée de l'énoncé d'une
apprenante.
Index 10 : Exemple
n°07
122
|
Carin
|
je pense aussi que si il est sur une bombe parce que
il a un problème et [...] il va avoir plus de
problèmes
|
125
|
P
|
exactement quand on joue à un jeu
dangereux parfois on peut dire
|
126
|
Carin
|
non non psychologiquement je voulais dire
?
|
127
|
P
|
aussi oui oui
|
Carin n'acquiesce pas lorsque notre remarque ne correspond pas
à ce qu'elle a voulu dire (TP 126). La vivacité de la
réplique rétorquée, le ton utilisé et le double
usage du « non » prouvent qu'elle tend à la maitrise
de la signification de ses propos et qu'elle tient à ce que son
interprétation de la photographie ne soit pas altérée ou
mal interprétée par les destinataires. Le dialogue interactif a
permis de résorber le malentendu qui s'évanouit lorsque nous
comprenons notre erreur (TP 127).
Par le croisement de leurs interprétations
personnelles, les apprenants s'installent dans un cadre d'interaction
horizontale où la parole peut circuler, où chacun prend position
et écoute l'autre. Notre cadre théorique précise que de
telles situations permettent aux locuteurs et interlocuteurs une appropriation
de la langue cible, alors utilisée comme outil de communication et
d'interaction.
5.1.3. L'implication des
apprenants dans les interactions communicatives
L'étude du corpus met en exergue une implication
effective des participants, qui se manifeste au travers de trois
phénomènes que nous analyserons.
· La gestion des échanges initiée par les
apprenants
Les extraits suivants permettent de rendre compte de
situations au cours desquelles deux apprenantes prennent, de manière
délibérée, le contrôle des échanges et
modifient les rôles conversationnels habituels de la classe. Il s'agit
d'un phénomène de déritualisation.
Index 11 :
Exemple n°08
014
|
Amina
|
c'est la maison de quoi ?
|
017
|
Amina
|
oui c'est ça + vous vous qu'est-ce que
vous pensez ?
|
018
|
P
|
[...] c'est exactement ce que j'allais dire [...]
maintenant [...]
|
020
|
Amina
|
c'est à nous de juger ?
|
039
|
Amina
|
on les laisse ? c'est normal
|
040
|
Nadine
|
non mais vas-y ? nous on a fini
|
041
|
Amina
|
non non non vas-y ?
|
Les interventions d'Amina sont une manifestation de son
implication. Réceptive au concept, elle questionne (TP 14) puis replace
ouvertement Nadine dans la réalisation de la tâche lorsque
celle-ci se soustrait, à son sens, aux objectifs du dispositif (TP 17).
Par la reprise à son compte des enjeux d'expression et de communication
de la tâche (TP 17-20), elle se positionne sciemment dans le rôle
du professeur-médiateur et modifie le schéma classique des
relations de classe. Au-delà de l'apprenante, elle se
révèle l'interlocutrice autonome qui veut respecter les codes
conversationnels et savoir ce que pense l'ensemble du groupe (TP 39-41), dans
lequel elle s'inclut (« nous », TP 20), et par extension,
exprimer, le moment venu, ce qu'elle pense elle-même des
photographies.
Index 12 :
Exemple n°09
061
|
Nadine (à P)
|
(coupe Junko) qu'est-ce que toi tu penses
?
|
062
|
P
|
ah moi je pense: + alors Amina avait quelque
chose [...] à dire
|
178
|
Nadine
|
dis-lui d'expliquer comme elle veut ?
|
186
|
Nadine
|
prends ton temps tranquille on n'est pas
pressés ? (rires)
|
252
|
Nadine
|
c'est vrai que aujourd'hui Vince il n'a pas
parlé beaucoup
|
348
|
Nadine
|
bon dis-nous ? qu'est-ce que ce toi tu en penses
?
|
A son tour, Nadine déritualise le format classique du
cours et prend l'initiative d'une conduite du débat, avec, notamment, un
significatif « prends ton temps on n'est pas
pressés » destiné à Gaëlle (TP 186). Elle
inverse, par deux fois, la charge de l'interprétation et nous demande de
nous exprimer sur les images (TP 61-348), ce qui atteste de son engagement dans
l'activité et de son désir de communiquer avec l'ensemble des
parties présentes, sans souci de forme (pour preuve, l'utilisation de
l'impératif et l'informalité du ton, TP 178-348). Dans le premier
cas (TP 61), bien que cela réponde à notre volonté
d'établir un contexte de libéralisation de la parole, nous
hésitons à lui fournir prématurément notre
ressenti, et préférons favoriser le débat entre apprenants
en donnant la parole à Amina (TP 62).
A deux autres reprises, l'apprenante se soucie de la parole de
ses partenaires et notamment de celle de Vince, qu'elle nomme directement (TP
252). Face aux difficultés d'expression de Gaëlle, elle nous
interpelle et nous précise comment procéder pour l'inciter
à parler (TP 178). Ces remarques reflètent à nouveau sa
capacité à s'approprier spontanément, en de tels moments,
le format discursif, à s'impliquer en tant que sujet social dans une
situation de communication où tous ont droit à la parole et
doivent être écoutés. Le fait qu'elle nomme un autre
apprenant par son prénom (« Vince », TP 252), soit
sa référence sociale, est également
révélateur de cet état d'esprit.
· La dimension humoristique initiée par les
apprenants
Tout au long de la séance,
les apprenants ponctuent leurs énoncés de plusieurs remarques
humoristiques. Trois plaisanteries peuvent être observées dans
l'extrait suivant.
Index 13 : Exemple n°10
195
|
Vince
|
euh je crois moi je pense qu'il a vu cette photo
là (désigne et montre sa photographie)
(rires)
|
196
|
As & P
|
(rires)
|
197
|
P
|
[...] on fait un diptyque (met les images face
à face puis côte à côte)
|
199
|
Carin
|
« c'est moi ça »
?
|
200
|
P
|
avant après
|
201
|
Vince
|
euh moi parfois quand j'ai un couchemar
[...]
|
202
|
Amina
|
XX ton cauchemar tu m'appelles comme ça
(petit rire)
|
En reliant les deux photographies, Vince initie, en
l'espèce, l'introduction d'une plaisanterie, qui joue sur le verbal et
le non-verbal (TP 195), et provoque un éclat de rire
généralisé (TP 196). Nous n'éludons nullement son
intervention et préférons rebondir sur sa pertinence (TP 197).
Carin poursuit dans ces deux mêmes directions et imagine la
réaction du Désespéré qui se
découvre sous les traits du personnage de Juste avant le sourire
(TP 199) ; nous réagissons de la même manière
qu'auparavant (TP 200). Enfin, Amina raille explicitement Vince lorsque ce
dernier fait référence à ses cauchemars pendant son
analyse de l'image n°3 (TP 202). Par l'usage de l'humour, les participants
se libèrent et livrent leurs représentations du monde et de
l'instant ; ils s'expriment en tant que sujets sociaux et destinent
leur(s) remarque(s) directement à leur(s) interlocuteur(s). Ils
témoignent de leur confiance dans la relation de groupe et de leur
intérêt quant à la relation plurielle d'interaction et de
communication avec l'autre.
· La recherche du lexique initiée par les
apprenants
Les apprenants, par le questionnement sur le lexique,
témoignent de leur intérêt vis-à-vis de la langue
cible et s'engagent délibérément dans la dynamique d'un
apprentissage métalinguistique.
Index 14 :
Exemple n°11
006
|
Nadine (à Junko)
|
[...] c'est une maison athée hein
? euh han- +
|
010
|
Junko
|
c'est quoi athée ?
|
011
|
Nadine
|
c'est quelqu'un qui croit pas en Dieu
|
012
|
Junko
|
ah (petit rire) c'est la maison athée
alors on commence comme ça
|
021
|
Vince
|
le cave en bas ? + Pablo + qu'est-ce le contraire de
le cave le cave en bas ? c'est quoi le ?
|
022
|
P
|
[...] le grenier
|
076
|
Vince
|
[...] quand j'ai vu + une maison avec les lumières
allumées dans le grenier j'ai pensé aux
fantômes
|
Junko réagit à un terme nouveau dont elle ignore
le sens (TP 10). Une fois défini par sa partenaire (TP 11), elle
s'empresse de le réutiliser (TP 12). Vince nous interroge directement
sur le « contraire de le cave en bas » (TP 21) et
réutilisera le mot « grenier » au moment de sa prise
de parole (TP 76). Il y a, chez les deux apprenants, une remobilisation
spontanée et contextualisée de ce vocabulaire inédit,
nécessaire à une mise en forme juste de leur pensée quant
au sens de l'image.
Nous notons, finalement, que l'émergence de telles
situations de communication et d'interaction est révélatrice d'un
contexte : une classe de langue composée d'adultes autonomes et
alertes, produits d'expériences sociales et culturelles variées.
Notre cadre théorique nous permet également de préciser
que ces différents phénomènes participent à
l'appropriation de données et de moyens de communication dans la langue
cible, en l'occurrence le français.
5.2. La résolution
du problème de sens par une expression personnelle créative
5.2.1. Des signes graphiques
à l'expression d'un sens personnel créatif
Chaque photographie confronte les apprenants à une
intention définie par un artiste. Nait, de cet état de fait, une
recherche de sens que ces derniers doivent résoudre par une
création verbale personnelle. Chaque individu repère et
sélectionne les indices graphiques qu'il juge importants. Il les
commente alors en fonction de son propre spectre de pensées et
d'analyse. Nous distinguerons trois types de créations : la
scénarisation de faits corrélés, l'approche sensible et la
référence à soi.
· La scénarisation de faits
corrélés
Index 15 : Exemple n°12 (Amina en
réaction à l'image Tristes gosses)
090
|
Amina
|
il y a quelqu'un qui a kidnappé des enfants +
un petit garçon et une petite fille + ils ont mis dans une salle + ils
ont pris une bombe + ils ont allumé ils ont pris le petit garçon
il est assis sur une bombe et lé petite fille + elle elle est assis
à côté elle elle pleure pour quelqu'un qui si elle entend:
elle pleure là-bas ils vont venir l'aider et les libérer + parce
que elle + le petit garçon elle lui il bouge pas il est resté
assis comme ça + timide XX triste et lé fille elle est assis
à côté et elle pleure pour quelqu'un qui
l'entend pour venir les libérer [...]
|
120
|
Amina
|
c'est pour ca ils sont en danger [...]
|
128
|
Amina
|
je dis + euh + les deux enfants là ils sont
trop petites pour venir assis tout seul pour: + faire + mourir tout
suite
|
Index 16 : Exemple n°13 (Amina en
réaction à l'image Le
Désespéré)
167
|
Amina
|
[...] c'est quelqu'un qui rentrait à la maison
+ il tombe dessus sa femme et quelqu'un il a tué sa
femme et là + parce que il
va pas expliquer qui a tué son sa femme maintenant là qu'est ce
qu'il doit dire si lé police elle est venue il va dire c'était
lui qui l'a fait + et là (rires) ils vont
l'envoyer et c'est pas lui + là il est il est
|
Dans les deux cas proposés, Amina élabore des
scénarii à forte consonance dramatique et policière,
créés à partir de son analyse personnelle des indices
graphiques (TP 90-167), qui l'obligent à une réelle construction
narrative au niveau de la coordination des faits. Chez-elle, chaque situation
s'intègre dans un schéma temporel où passé,
présent et futur se mêlent le temps d'une image ; les
personnages échappent à leur destin (« ils sont en
danger », TP 120 ; « ils sont trop petites pour venir
assis tout seul » TP 128 ; « et c'est pas
lui », TP 167) qu'elle codifie en mots en imaginant le hors-champ et
le hors-temps des cadres (« ils vont venir l'aider et les
libérer », TP 90 ; « mourir tout
suite », TP 128 ; « il va pas expliquer »,
« si lé police elle est venue il va dire »,
« ils vont l'envoyer », TP 167). Par ailleurs, elle
n'hésite pas à reformuler certains passages, qui font appel
à des notions grammaticales qu'elle n'a pas encore
étudiées, dans une logique de mobilisation et de
systématisation de la langue comme le prouvent ces trois variations
syntaxiques d'une même idée.
Index 17 : Exemple n°14
090
|
Amina
|
[...] elle pleure pour quelqu'un qui si elle entend:
elle pleure là-bas ils vont venir l'aider et les libérer
[...] elle pleure pour quelqu'un qui l'entend pour venir les
libérer [...]
|
120
|
Amina
|
[...] c'est pour ca la petit fille elle elle est en
train de pleurer si y a quelqu'un il est derrière pour venir
|
Au fil des reformulations, nous notons que l'apprenante tend
à préciser le rapport spatio-temporel qu'elle désire
créer entre les pleurs de l'enfant et l'intervention salvatrice d'un
tiers présent aux alentours.
· L'approche sensible
Index 18 : Exemple n°15 (Carin en
réaction à l'image Tristes gosses)
122
|
Carin
|
[...] si il est sur une bombe parce que il a un
problème et si on fait rien après après
(petit rire) + il va avoir plus de
problèmes
|
126
|
Carin
|
non non psychologiquement je voulais dire
?
|
Index 19 : Exemple n°16 (Carin en
réaction à l'image Le
Désespéré)
157
|
Carin
|
oui je pense qu'il il a passé quelque chose de
horreur qu'il a vu ou qu'il a fait peut-être c'est un
révolutionnaire qui qui a + tué
quelqu'un + il se sent pas + il se sent très::
+ +
|
159
|
Carin
|
je pense peut-être qu'il a tué quelqu'un
sans sans sans le voul-
|
161
|
Carin
|
vouloir il + + il a de sentiment
de:: peur de regret + hum + + je pense qu'il va + +
qu'il va être (doucement) fou:
(petit rire) + +
|
164
|
Carin
|
oui il va devenir fou + parce qu'il se sent pas bien
du tout psychologiquement ?
|
Dans les deux cas proposés, Carin, s'intéressant
davantage au fond qu'à la description formelle de l'objet, tend à
se focaliser sur les états émotionnels (la violence, la peur,
l'horreur, la folie, le regret) des sujets représentés. Elle
place son expression sur le champ d'une détresse psychologique (la
double occurrence de l'adverbe « psychologiquement »,
TP126-164) qui les accable et les dépasse comme le soulignent ses
énoncés : « si on ne fait rien [...] il va y avoir
plus de problèmes » (TP 122) ; « sans le
vouloir », « il va être fou »,
« il va devenir fou » (TP 161-164). L'apprenante
témoigne, ainsi, de sa vision intérieure et sensible de telles
représentations picturales.
· La référence à soi
Index 20 : Exemple n°17 (Vince en
réaction à l'image Le
Désespéré)
201
|
Vince
|
euh moi parfois quand j'ai un
couchemar quand je me lève je je me présente
comme ça dans la glace ah c'est pas vrai c'est pas vrai + + et
les yeux parlent ça + + quand j'arrive et je tiens les
chevaux
|
Vince se projette dans l'oeuvre et commente l'attitude du
Désespéré en lien avec son vécu similaire
de la sortie d'un cauchemar (« quand j'ai un couchemar »,
TP 201). L'homme n'est plus caractérisé, il est un homme simple
pris dans la torpeur du réveil à l'instar de tout un chacun,
à l'instar de Vince, locuteur et sujet pensant, qui se
réfère à ses émotions personnelles pour
créer un sens à l'image. Il articule alors son énonciation
autour du « je » (cinq occurrences, hors
reformulations).
Qu'ils fassent preuve, selon leur personnalité,
d'intentions narratives, d'approches poétiques et sensibles ou
d'introspections, les apprenants s'expriment, communiquent et créent
oralement en français. Ces exemples témoignent de leur
application à élaborer, chacun à leur manière et
dans une récurrence des thématiques qui leur est propre, une
expression orale non conventionnelle, construite pour répondre aux
interrogations posées par le support image. Ainsi incités par la
quête de sens, ils improvisent, inventent et se risquent à la
création d'histoires originales ou intimes en français, ils
jouent avec leurs idées, mettent des mots sur leurs émotions et
se placent dans un rapport structurel avec la langue cible. Notre cadre
théorique précise qu'une telle dynamique d'expression personnelle
créative permet l'appropriation de données langagières.
5.2.2. De l'usage directe de
l'analogie avec d'autres images
Face à la réception de ces photographies
jusqu'alors inconnues, les apprenants mobilisent leur mémoire visuelle
et tentent de dresser des parallèles avec d'autres images
présentes dans leur répertoire mental. Les extraits suivants
permettent de distinguer deux types d'analogie reliant la photographie
Juste avant le sourire aux films d'horreur et à d'autres
oeuvres picturales.
· L'analogie avec les films d'horreur
Index 21 : Exemple n°18
225
|
Amina
|
mort-vivant
|
229
|
Amina
|
c'est des morts-vivants
|
231
|
Amina
|
non c'est les vamp- + les gens + dans les dans les
clips de Michael Jackson maintenant ils sortent du cimetière
(rires)
|
284
|
Amina
|
c'est un masque
|
287
|
Amina
|
un masque de bois
|
295
|
Amina
|
oui tu sais les vieilles arbres là dans
les +
|
297
|
Amina
|
ancienne arbre + il était
morte il était très très très vieille
arbre + il était morte maintenant il a
pris une + comment s'appelle une partie: du bois elle a fait
un trou et fait masque + un masque + je sais pas ?
|
301
|
Amina
|
c'est un vampire
|
309
|
Amina
|
oui + c'est un mort + vampire
|
312
|
Amina
|
c'est comme un vampire
|
321
|
Amina
|
oui dans + quand on regarde les films dans le truc
comme ils vont faire mort-vivant le cimetière il voulait faire comme
ça peut-être ?
|
339
|
Amina
|
ça + attends + souvent quelqu'un qui est
mort longtemps + il a pris son tête
|
342
|
Amina
|
ou quelqu'un ou les animaux avant tu sais là
ils vont montrer le tête et vont mettre
|
345
|
Amina
|
il a pris la tête
|
L'apprenante s'appuie sur l'aspect monstrueux du personnage
pour construire son analogie. Elle y décèle la présence
d'un visage glauque qui n'a plus rien d'humain
(« mort-vivant », « c'est des
morts-vivants », TP 225-229). Elle compare alors le protagoniste de
l'image aux zombies du clip Thriller de Michael JACKSON (TP
231). Plus tard, elle reprend les idées du masque (TP 284) et de la
texture boisée (TP 287), précédemment émises par
d'autres participants, et les approfondit (TP 295-297). La construction de son
analogie se révèle perturbée par la difficulté
à caractériser le sujet et ses motivations (« un
masque, je sais pas », TP 297 ; « il voulait faire
comme ça peut-être », TP 321), problématique
centrale pour l'ensemble du groupe. Tout au long de l'étude de l'image,
l'individu prend, ainsi, diverses identités : un mort-vivant
sortant d'un cimetière (TP 225-229-231-321), une personne portant un
masque taillé dans du bois mort (TP 297), un vampire (TP 301-309-312) et
un cadavre (TP 309-339). Cela tranche avec ses interventions
précédentes, plus spontanées, mais le problème
suscité l'invite à fournir un effort d'expression plus fort et
plus long. Elle clôt finalement sa pensée dans un renvoi à
une scène macabre où fossoiement de tombes et décapitation
post mortem se côtoient (TP 339-342-345). Celle-ci renvoie
explicitement à une imagerie filmique (« quand on regarde les
films dans le truc comme ils vont faire mort-vivant le
cimetière », TP 321) morbide
et horrifique dans laquelle elle veut ancrer, depuis le début, son
énonciation. De par son aspect non conventionnel et orignal, cette
solution fait preuve d'un réel désir d'expression
langagière et d'un sens personnel créatif inédit et
certain.
· L'analogie avec des oeuvres picturales
Index 22 : Exemple n°19
300
|
Carin
|
je pense c'est une personne qui se sent comme
ça mal + c'est une psychose
|
346
|
Carin
|
il parait très Le Cri +
Le Cri le tableau norvégienne Le Cri
sur angoisse + il ressemble un peu de
la même manière
|
En fin de séance, Jeanna se réfère
à la ressemblance de la photographie Juste avant le sourire
avec Le Cri d'Edvard MUNCH. La sensation de mal-être
qui se dégage du personnage (« c'est une personne qui se sent
comme ça mal + c'est une psychose », TP 300 ;
« angoisse », TP 346) et sa connaissance en art lui
permettent de construire son analogie avec le tableau expressionniste. Analogie
qu'elle agence en usant d'un vocabulaire propre à la comparaison
(« parait », « ressemble »,
« de la même manière », TP 346).
Index 23 : Exemple n°20
271
|
Fabien
|
mais je ne pense pas que ce soit une peinture
[...] c'est pas peint enfin si c'est un peintre en tout cas il s'est
gavé le mec
|
283
|
Vince
|
et même moi je connais un peu des artistes de
graffiti qui sont super qui sait tout faire ouais
|
286
|
Fabien
|
ah ouais qui arrive à faire la peau comme
ça
|
288
|
Vince
|
ouais qui arrive à faire tout les yeux XX
parfaitement ouais c'est énorme avec les X XX c'est super
|
Suite à l'interrogation de Fabien sur la nature
originelle de l'oeuvre (TP 271), Vince met en parallèle l'image
étudiée avec les techniques picturales de graffers qu'il
a auparavant vus à l'ouvrage (TP 283). L'analogie procède, en
l'espèce, d'une situation d'interaction. En effet, Vince la construit
relativement à la réaction de son partenaire :
« qui arrive à faire la peau comme ça » (TP
286) ; « ouais qui arrive à faire tout [...]
parfaitement » (TP 288). La photographie peut, ainsi, être, selon
lui, une peinture ou un graffiti.
Par l'analogie, les apprenants mobilisent leurs connaissances
en arts visuels (clip vidéo, cinéma, peinture, graffiti) et
apportent des solutions personnelles et inédites aux problèmes
posés par les images. Ces solutions sont, elles-mêmes, des
créations langagières qui participent à l'usage de la
langue cible et à son appropriation.
Conclusion
Au travers de ce mémoire, nous avons tenté
d'accorder usage de l'image photographique et déclenchement de
l'expression personnelle, de la communication et des interactions orales dans
l'apprentissage du français enseigné comme langue seconde
d'hôte.
Certes, l'oeuvre iconographique de par sa charge culturelle,
mythologique, sémantique et sémiologique peut impliquer les
apprenants dans une recherche personnelle de sens qui trouve sa finalité
dans l'acte de parole et l'écoute de l'autre. Certes, l'image tend
à questionner l'individu, à le contraindre à la
réflexion et à la résolution d'un problème
l'impliquant dans son rapport au monde. Certes, elle l'encourage à
déployer sa créativité et son imagination, à
valoriser son vocabulaire, à se référer à soi,
à l'autre, au temps et à l'espace, à libérer ses
capacités d'expression et de communication. Néanmoins, il ne
convient nullement, de négliger les variables subjectives, liées
à l'âge, à la psychologie (notons la confiance en soi et en
ses propos) et à l'expérience linguistique, sociale et culturelle
de chaque apprenant, qui influeront sur ses pensées et ses prises de
parole, à l'influence du groupe et du contexte sur l'individu. Ainsi, le
cas de Gaëlle, apprenante qui n'accepte que partiellement l'entrée
dans les champs de l'expression et de la communication orales, est
symptomatique des limites de notre dispositif qui s'appuie, au-delà des
capacités langagières intrinsèques, sur l'implication
socio-psychologique effective de chacun comme le démontre l'exemple
d'Amina, apprenante prolixe aux connaissances langagières moins
approfondies, mais plus prompte à s'engager dans la communication et
l'échange oral, à dépasser ses connaissances du moment
pour s'exprimer de manière personnelle et créative. Il n'est
cependant pas impossible qu'une telle situation puisse être
contrecarrée par la mise en place d'un étayage
individualisé, hors contexte de groupe, et d'une
répétition de séances similaires pour placer
progressivement tout apprenant mal à l'aise dans une
sérénité plus propice au déploiement de l'acte de
parole.
Le dispositif mis en oeuvre a permis de favoriser
l'éclosion d'une expression personnelle orale chez les apprenants
impliqués et de placer l'enseignement/l'apprentissage de la langue
parallèlement au champ des enjeux communicationnels et interactionnels.
En prenant position, en créant verbalement, en réagissant et en
se référant aux propos des autres (professeur inclus), en les
questionnant, en initiant sciemment une conduite des débats et une
déritualisation des schémas de classe classiques, en s'accordant
ou s'opposant, en négociant et en argumentant, les apprenants
s'impliquent dans une recherche de sens, communiquent et interagissent en
réaction à l'image. Ils expriment leurs pensées et leur
individualité, se redéfinissant, ainsi, en tant que locuteurs
sociaux, personnes-sujets de leur énonciation. Cet ensemble
d'éléments se révèle propice à
l'appropriation de la langue ; et la validité de
l'effectivité d'une favorisation de l'expression personnelle, de la
communication et des interactions orales n'exige pas, à notre sens, un
cumul exhaustif de ces comportements chez chacun, en dépit de leurs
apparitions, à des degrés différents, chez, notamment,
quatre apprenants (Amina, Carin, Junko et Vince). En effet, suite à
notre analyse, nous notons que lesdits enjeux soulevés par la
séance se révèlent empreints d'une polymorphie certaine
comme nous le signale l'exemple de Nadine, qui, bien qu'elle ne prenne que peu
part aux actes de commentaires personnels, fait preuve d'une capacité
à réagir aux prises de parole des autres participants et à
s'impliquer dans les autres motifs communicationnels sous-tendus par les
photographies. Son comportement reste lié à un souci de
comprendre l'image par le regard de l'autre et l'écoute de sa
pensée.
A nos questionnements, nous répondons, ainsi, que si
l'image photographique permet de favoriser l'émergence d'une expression
personnelle, d'une communication et d'interactions orales en classe de FLSH (et
ce quel que soit le niveau en langue des apprenants), elle reste
néanmoins dépendante de facteurs humains. De plus, ce
mémoire se borne à l'analyse d'un groupe classe unique
(composé d'adultes aux profils socioculturels et langagiers
définis) et ne peut, de ce fait, tendre à l'éviction de
certains biais inhérents à ce type de recherches basé sur
la communication. La multiplication des séances types, destinées
à différents groupes, aurait pu permettre une mise en perspective
et en condition plus riche de la problématique initiale. La
réalité du terrain ne put permettre la réalisation d'une
telle démarche et la confrontation de données multiples. Nous
pensons, pour conclure, reproduire ce dispositif, qu'il conviendra de moduler
et d'améliorer, à des situations professionnelles futures
d'enseignement du français en tant que langue étrangère ou
seconde d'hôte.
Bibliographie
La présente
bibliographie est réalisée conformément à
l'adaptation francophone des normes APA 6ème
édition.
Adami, H. (2008). Le rôle de la littératie dans
le processus d'acculturation des migrants. In Conseil de l'Europe, Etudes
de cas élaborées pour le séminaire sur
L'intégration linguistique des migrants adultes 26-27 juin 2008
(pp. 19-28). Accès
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/migrantssemin08_listdocs_FR.asp
Aden, J. (2009). La créativité artistique
à l'école : refonder l'acte d'apprendre. Synergies
Europe, 4, 173-180. Accès
http://ressources-cla.univ-fcomte.fr/gerflint/Europe4/europe4.html
ASTI d'Aix-en-Provence (2011). Bilan d'activités
2011. Aix-en-Provence : ASTI.
Bange, P. (1992a). Analyse conversationnelle et
théorie de l'action. Paris : Didier.
Bange, P. (1992b). À propos de la communication et de
l'apprentissage de L2 (notamment dans ses formes institutionnelles).
Acquisition et Interaction en Langue Étrangère,
1. Accès http://aile.revues.org/4875
Baptiste, A. (2011). Photolangage, La photographie comme
langage depuis 1968, Présentation. Accès
http://www.photolangage.com/presentation.php
Beacco, J.-C. (2007). L'approche par compétences
dans l'enseignement des langues. Paris : Didier.
Bélisle, C. (2010). La création de la
méthode Photolangage®. In F. Laot (Dir.), L'image dans
l'histoire de la formation des adultes (pp. 153-170). Paris :
L'Harmattan.
Bensalem, D. (2010). En quoi la pédagogie de projet
permet-elle de donner du sens à l'enseignement du français??
Synergies Algérie, 9, 75-82. Accès
http://ressources-cla.univ-fcomte.fr/gerflint/Algerie9/algerie9.html
Benveniste, E. (1970). L'appareil formel de
l'énonciation. Langages, 17, 12-18.
doi:10.3406/lgge.1970.2572
Benveniste, E. (1974). Problèmes de linguistique
générale, 2. Paris : Gallimard.
Bigot, V. (2005). Négociation de la relation et
processus d'appropriation en classe de langue. Acquisition et Interaction
en Langue Étrangère, 22. Accès
http://aile.revues.org/1716
Bourret, J.-F. (1982). Iconographie et communication : l'image
comme source d'activité langagière authentique. In M. Petit,
Actes du colloque tenu à l'Université Lyon II en mars 1981.
Didactiques des langues étrangères : Français,
Allemand (pp. 177-193). Lyon : Presses Universitaires de Lyon.
Breton, P. (2003). Eloge de la parole. Paris : La
Découverte.
Bromberg, M. (2007). Plaidoyer pour une
psycho-socio-pragmatique de la communication. In C. Chabrol & I. Orly-Louis
(Ed.), Interactions communicatives et psychologie (pp. 27-42). Paris :
Presses Sorbonne Nouvelle.
Champion, F. (2009). Parole de migrant : Le mot et ses
indices. Paris : L'Harmattan.
Chaouite, A. (2008). L'interculturel comme art de
vivre. Paris : L'Harmattan.
Chomsky, N. (1975/1981). Réflexions sur le
langage. Paris : Flammarion.
Cicurel, F. (2002). La classe de langue un lieu ordinaire, une
interaction complexe. Acquisition et Interaction en Langue
Etrangère, 16. Accès http://aile.revues.org/801
Citterio, R., Lapeyssonnie, B., & Reynaud, G. (1995).
Du cinéma à l'école. Paris : Centre National de
Documentation Pédagogique, Hachette.
Conseil de l'Europe (2001). Un cadre européen
commun de référence pour les langues : apprendre, enseigner,
évaluer. Paris : Didier.
Cuq, J.-P. & Gruca, I. (2005). Cours de didactique du
français langue étrangère et seconde. Grenoble :
Presses Universitaires de Grenoble.
Denis, M. (1989). Image et cognition. Paris : PUF.
Dubost, M. (2009). Dialogue et différentiation.
Trans-paraître, 2, 122-145. Accès
http://www.europhilosophie.eu/recherche/spip.php?rubrique167
Farqzaid, B. (2010). L'image chez Roland Barthes.
Paris : L'Harmattan.
Giacomi, A. (2006). Appropriation d'une langue seconde en
milieu naturel et interaction. Skholê, hors-série 1,
25-33. Accès
http://www.aix-mrs.iufm.fr/recherche/publ/skhole/index.php?som=1&quoi=m1&lequel=8
Heidegger, M. (1959/1976). Acheminement vers la
parole. Paris : Gallimard.
Hénaire, J., & Truchot, V. (2003). Les indicateurs
du droit à l'éducation?: le défi d'une mise en oeuvre.
Thématique, 11, 57-80. Accès
http://www.cifedhop.org/Fr/Publications/Thematique/thematique11/thematique11.htm
Jakobson, R. (1963/1981). Essais de linguistique
générale. Paris : Les Editions de Minuit.
Kerbrat-Orecchioni, C. (1980/2009). L'énonciation
(4ème éd.). Paris : Armand Colin.
Kerbrat-Orecchioni, C. (2005). Le discours en
interaction. Paris : Armand Colin.
Lambert, M. (1994). Les profils d'apprenants comme mode de
description et d'explication à la variabilité des apprentissages
en langue étrangère. Acquisition et Interaction en Langue
Etrangère, 4. Accès http://aile.revues.org/1258
Lubart, T. (2003). Psychologie de la
créativité. Paris : Armand Colin.
Merleau-Ponty, M. (1945). Phénoménologie de
la perception. Paris : Gallimard.
Merleau-Ponty, M. (1960a). L'oeil et l'esprit. Paris
: Gallimard.
Merleau-Ponty, M. (1960b). Signes. Paris :
Gallimard.
Moore, D. & Simon, D.-L. (2002). Déritualisation et
identité d'apprenants. Acquisition et Interaction en Langue
Etrangère, 16. Accès http://aile.revues.org/1374
Muller, C. (2009a). La créativité dans les
commentaires de photographies en classe de français
langue étrangère. Synergies Europe, 4,
89-104. Accès
http://ressources-cla.univ-fcomte.fr/gerflint/Europe4/europe4.html
Muller, C. (2009b). La photographie, déclencheur
d'interactions en classe de langue : négociations entre apprenants.
Les Cahiers de l'Acedle, 6 (1), 173-196. Accès
http://acedle.org/spip.php?article2441
Muller, C. (2012). La photographie, un outil pour communiquer
en classe de langue. Les Cahiers de l'APLIUT, 31 (1). doi:
10.4000/apliut.2224
Parlement européen (2000). Charte des droits
fondamentaux de l'Union européenne. Luxembourg : Office des
publications officielles des Communautés européennes.
Traverso, V. (2004). Grille d'analyse des discours interactifs
oraux. In J.-C. Beacco, S. Bouquet, & R. Porquier (Dir.), Niveau B2
pour le français : textes et références (pp.
119-148). Paris : Didier.
Vasseur, M.-T. (2007). Les "données de terrains" au
coeur du dispositif de recherche. Les Cahiers de l'Acedle, 4, 21-35.
Accès http://acedle.org/spip.php?article603
Véronique, G.-D. (2007). Contacts de langues et
contacts de cultures : quelques propositions d'analyse. In C. Chabrol & I.
Orly-Louis (Ed.), Interactions communicatives et psychologie (pp.
81-89). Paris : Presses Sorbonne Nouvelle.
Viallon, V. (2002). Images et apprentissages?: le discours
de l'image en didactique des langues. Paris : L'Harmattan.
Vigner, G. (2009). Le français langue seconde?:
comment apprendre le français aux élèves nouvellement
arrivés. Paris : Hachette.
Vygotski, L.S. (1933/1985). Pensée et langage.
Paris : Messidor-Editions sociales
Table des index
Index 01 : Schéma de la communication
verbale par Roman JAKOBSON (Ibid.)
3
Index 02 : Informations sur le déroulement
de la séance et sur les apprenants
3
Index 03 : Occurrences des marqueurs de la
subjectivité explicite chez les apprenants
3
Index 04 : Exemple n°01
3
Index 05 : Exemple n°02
3
Index 06 : Exemple n°03
3
Index 07 : Exemple n°04
3
Index 08 : Exemple n°05
3
Index 09 : Exemple n°06
3
Index 10 : Exemple n°07
3
Index 11 : Exemple n°08
3
Index 12 : Exemple n°09
3
Index 13 : Exemple n°10
3
Index 14 : Exemple n°11
3
Index 15 : Exemple n°12 (Amina en
réaction à l'image Tristes gosses)
3
Index 16 : Exemple n°13 (Amina en
réaction à l'image Le
Désespéré)
3
Index 17 : Exemple n°14
3
Index 18 : Exemple n°15 (Carin en
réaction à l'image Tristes gosses)
3
Index 19 : Exemple n°16 (Carin en
réaction à l'image Le
Désespéré)
3
Index 20 : Exemple n°17 (Vince en
réaction à l'image Le
Désespéré)
3
Index 21 : Exemple n°18
3
Index 22 : Exemple n°19
3
Index 23 : Exemple n°20
3
Table des annexes
Annexe 1 : Les compétences par niveaux
telles que définies par le Cadre européen commun de
référence pour les langues (2001)
3
Annexe 2 : L'affiche de présentation de
l'atelier photographique destinée aux apprenants
3
Annexe 3 : Une présentation succincte des
séances
3
Annexe 4 : Le corpus photographique utilisé
au cours de l'atelier
3
Annexe 5 : Les images photographiques
distribuées aux apprenants au cours de la séance objet de
l'analyse
3
Annexe 6 : La transcription des données
relatives à la séance objet de l'analyse
3
Annexe 7: Les conventions de transcription
3
Annexe 8 : Les marqueurs de la subjectivité
chez les apprenants
3
Table
des matières
Sommaire
3
Introduction
3
1. Le cadre théorique de l'étude
3
1.1. L'image photographique comme
déclencheur langagier
3
1.1.1. L'image en relation avec l'être et son
langage
3
1.1.2. L'image comme outil didactique en classe de
langue
3
1.1.3. L'image et le discours créatif
3
1.2. S'exprimer, communiquer et interagir oralement
en classe de langue
3
1.2.1. Les enjeux de la communication et de
l'expression verbales
3
1.2.2. La prégnance de l'oral dans les
interactions communicatives entre apprenants en classe de langue
3
1.2.3. L'implication des apprenants dans la
communication
3
1.2.4. Le professeur de langue médiateur
3
1.3. Vers une appropriation de la langue ?
3
1.3.1. Appropriation et élaboration du
message verbal
3
· La subjectivité et
l'implication de l'apprenant dans le message
3
· L'expression personnelle
créative dans le message
3
1.3.2. Appropriation et situations d'interactions
communicatives
3
2. Le contexte général de
l'étude
3
2.1. L'ASTI, l'associatif au service des adultes
migrants
3
2.2. Les objectifs visés : de
l'insertion culturelle à la promotion sociale des adultes migrants
3
2.3. Une double réalité
enseignante : de l'alphabétisation au FLE
3
3. Une problématique : susciter
l'expression personnelle, la communication et les interactions orales en classe
de FLSH
3
3.1. La problématique
3
3.2. Les hypothèses
3
3.3. L'atelier photographique, un dispositif
didactique en réponse à nos questions
3
3.3.1. Une
hétérogénéité de fait des apprenants
3
3.3.2. Une approche orale actionnelle
objectivée
3
3.3.3. La réception d'images
photographiques : vers une émergence des enjeux d'expression, de
communication et d'interaction soulevés ?
3
4. Le cadre méthodologique
3
4.1. L'annonce de la méthodologie
3
4.2. Une technique de recueil des
données
3
4.2.1. L'enregistrement audio
3
4.2.2. L'éviction de la vidéo
3
4.3. Une analyse du terrain : une
séance au coeur de la méthodologie
3
5. L'analyse des données
3
5.1. Le témoignage des enjeux de
l'expression et des interactions communicatives
3
5.1.1. L'expression de la subjectivité des
apprenants locuteurs
3
5.1.2. L'émergence des interactions entre
les apprenants
3
· La collaboration entre apprenants
3
· La négociation entre
apprenants
3
· Un cas particulier de
négociation : le malentendu
3
5.1.3. L'implication des apprenants dans les
interactions communicatives
3
· La gestion des échanges
initiée par les apprenants
3
· La dimension humoristique
initiée par les apprenants
3
· La recherche du lexique
initiée par les apprenants
3
5.2. La résolution du problème de
sens par une expression personnelle créative
3
5.2.1. Des signes graphiques à l'expression
d'un sens personnel créatif
3
· La scénarisation de faits
corrélés
3
· L'approche sensible
3
· La référence à
soi
3
5.2.2. De l'usage directe de l'analogie avec
d'autres images
3
· L'analogie avec les films
d'horreur
3
· L'analogie avec des oeuvres
picturales
3
Conclusion
3
Bibliographie
3
Table des index
3
Table des annexes
3
Annexes
3
Annexes
Annexe 1 : Les
compétences par niveaux telles que définies par le Cadre
européen commun de référence pour les langues
(2001)
Annexe 2 : L'affiche de
présentation de l'atelier photographique destinée aux
apprenants
Annexe 3 : Une présentation succincte des
séances
Caractéristiques communes à l'ensemble
des séquences :
Durée : 2 heures
Position du professeur-médiateur : guidage
et étayage individuels ou de groupe, reformulation, questionnement,
gestion appropriée des tours de parole, réponses aux questions
posées par les apprenants
Séquences réalisées avec l'aide
d'Anita.
Séquence 1 : « Premiers pas dans
le Photolangage. »
Nombre de séances : 2 (lundi)
Durée de chaque séance : 1 heure
Nombre d'apprenants : 7
Séance 1
1ère phase :
présentation générale du concept de l'atelier
photographique ; présentation des apprenants ; recueil des
représentations concernant la photographie (caractéristiques
d'usage, éléments propres : titre...).
2ème phase :
première approche visant à démystifier l'outil image,
à mettre en exergue la validité de points de vue pluriels en
réaction à un objet unique en initiant un commentaire
groupé de la photographie suivante :
3ème phase :
démarrage de la séance de Photolangage ; présentation
de la tâche : « vous êtes libres de choisir une
photographie qui vous parle, qui vous donne des émotions que vous avez
peut-être envie de partager ; vous la présenterez, ensuite,
aux autres, vous expliquerez votre choix et vous donnerez un titre
à votre photo ; chacun pourra dire ce qu'il pense du choix de l'autre et
exprimer son avis sur sa photo. »
4ème phase :
choix des photographies et explications ; discussions sur les commentaires
et les photographies ; notification au tableau des mots-clés, des
éléments prégnants des pensées des apprenants pour
un retour en fin de séance.
Séance 2
1ère phase :
présentation de la tâche : « chacun de vous va
dire/proposer à son voisin un sentiment, une émotion, une
idée ou un thème ; il va devoir ensuite choisir une image
qui lui fait penser à ce sentiment..., et expliquer son choix aux
autres ; je vous donne un exemple... »
2ème phase :
définitions des thèmes, choix des photographies et
explications.
Séquence 2 : « La balade
photographique : de l'oeuvre personnelle aux mots. »
Nombre de séances : 2 (séance
1 : mercredi ; séance 2 : vendredi)
Durée de chaque séance : 2 heures et
1 heure
Nombre d'apprenants : 8
Séance 1
1ère phase :
retour sur le travail de la journée précédente ;
présentation de la tâche : « nous allons nous balader
dans le centre-ville d'Aix ; mais avant vous allez recevoir un appareil
photo jetable ; vous prendrez en photo ce que vous voulez, c'est vous qui
choisissez ; par contre, vendredi, vous aurez à choisir une de vos
photos et vous écrirez un petit texte pour expliquer ce que vous avez
voulu montrer, dire ou exprimer ; si vous êtes d'accord, votre
travail sera montré aux personnes de l'ASTI qui pourront voir ce que
vous avez fait et vous lire. »
2ème phase : La
balade.
Séquence 3 : « Expression,
communication et interactions orales. »
Nombre de séances : 2 (jeudi)
Durée de chaque séance :
approximativement 1 heure
Nombre d'apprenants : 8
Séance 1
1ère phase :
retour sur le travail de la journée précédente ;
présentation de la tâche : « maintenant vous allez
travailler à partir d'une image que nous allons vous donner ; je
vous propose d'écrire ce que vous voyez et ce que vous pensez de cette
image : les émotions, les idées, ce qu'il se passe... ;
si vous avez des difficultés, vous n'êtes pas obligés de
faire des phrases, écrivez juste des mots ; vous donnerez un titre
à l'image et direz ensuite aux autres ce que vous avez pensé de
la photo. »
L'image utilisée : Titre non
trouvé (Robert Capa, 1939)
2ème phase :
travail individuel ; présentation de ses commentaires et
réflexions par chacun ; interactions ; notification au tableau
des mots-clés.
Séance 2 (la séance au coeur de notre
méthodologie de recherche)
1ère phase :
présentation de la tâche : « maintenant, vous allez
travailler par deux ; nous allons distribuer à chaque groupe une
photographie ; -vous en avez l'habitude maintenant- vous expliquerez,
ensuite, aux autres, votre vision de la photo, ce que vous pensez (vos
émotions, vos sentiments, vos idées...) et voulez dire sur la
photo ; et bien-sûr chacun sera libre d'exprimer ce qu'il pense de
l'image des autres. »
2ème phase :
définition des binômes ; distribution des
photographies ; travail en groupes et interactions en leur sein ;
légers guidages et étayages si cela est nécessaire (10
minutes).
3ème phase :
présentation de la première photographie par les apprenants
concernés ; description, commentaires et réflexions ;
interactions et échanges entre les apprenants concernant le sens de
l'image ; retour sur l'ensemble des sens donnés, et, le cas
échéant, brèves remarques historiques et artistiques sur
l'image ; passage du groupe suivant...
Les images utilisées : voir Annexe 7
Séquence 4 : « Retour au
Photolangage. »
Séquence 2 (fin) : « La balade
photographique : de l'oeuvre personnelle aux mots. »
Nombre de séances : 2 (séance 1 de
la séquence 4 ; séance 2 de la séquence 2)
(vendredi)
Durée de chaque séance : 1 heure
Nombre d'apprenants : 9
Séquence 4
Séance 1
1ère phase :
présentation de la tâche : « vous allez refaire ce
que vous avez fait lundi : vous exprimez sur une photo que vous avez
choisie ; vous êtes toujours libres de choisir une photographie qui
vous parle, qui fait naitre en vous des émotions que vous avez
peut-être envie de partager ; vous la présenterez, ensuite,
aux autres, vous expliquerez votre choix et lui donnerez un titre ; chacun
pourra bien-sûr dire ce qu'il pense du choix de l'autre et exprimer son
avis sur l'image. »
2ème phase :
choix de la photographie et explication par chaque apprenant ; discussions
sur les commentaires et les photographies.
Séquence 2
Séance 2
1ère phase :
présentation de la tâche : « vous vous souvenez que
mercredi nous sommes sortis au centre-ville d'Aix pour prendre des
photos ; les voici ; comme je vous l'avez déjà dit, je
vous propose de choisir une de vos photographies, d'écrire un petit
texte dessus (par exemple : pourquoi vous avez pris cette photo, ce
que vous voulez exprimer...) et de lui donner un titre ; vous êtes
libres ; ceux qui n'étaient pas là mercredi, vous pouvez
choisir une photo parmi celles sur la table et expliquer pourquoi vous avez
choisie cette photo... »
2ème phase :
distribution des tirages ; travail individuel (dictée à
l'adulte pour certains apprenants en alphabétisation ayant des
difficultés à l'écrit) ; aide sur le lexique et la
syntaxe si demandée ; correction des fautes les plus probantes avec
les apprenants (dans un souci non pas de perfection vis-à-vis de la
norme mais de respect de la pensée de chacun qui trouve sa
pérennité dans l'écrit).
Les apprenants présents à la séance du
mercredi mais absents à celle de ce vendredi ont pu réaliser ce
travail ultérieurement.
Annexe 4
: Le corpus photographique utilisé au cours de
l'atelier
Nous signalons que les images suivantes s'avéraient
libres de droit ou régies par une licence Creative Commons, permettant
une telle utilisation en classe, au moment de la réalisation du
corpus.
http://www.flickr.com/photos/israelmendoza/3782010367/sizes/l/in/photostream/
http://2.bp.blogspot.com/_K_O2LOG8S4w/TPZPcgr_0RI/AAAAAAAACUE/4iSxa6evdy8/s1600/8%2BGustave%2BCourbet%2BAutoportrait%2B1844-45.jpg
http://oniifez.deviantart.com/gallery/?offset=24#/d1f4slo
http://msrben.deviantart.com/art/Rois-Renes-sous-la-Neige-118205082?q=boost%3Apopular%20aix%20en%20provence%20neige&qo=9
http://prettydiana.deviantart.com/art/Aix-en-Provence-270537786?q=boost%3Apopular%20aix%20en%20provence%20ville&qo=2
http://ruthsantcortis.deviantart.com/art/Maltese-cuisine-125416739?q=boost%3Apopular%20cuisine&qo=22
http://www.flickr.com/photos/aletadreves/6212656478/sizes/o/in/photostream/
http://garnalfaya.free.fr/images/ecoliers.jpg
http://2.bp.blogspot.com/_dWyutA1IDWw/SRmFIKtKvII/AAAAAAAACMs/oQdn-DHaesQ/s400/Doisneau4.jpg
http://www.polkamagazine.com/uploads/fixture/photo/thumbnails/988x688_1910beddb5fca865a34c731774c3dc38fbc5567e.jpg
http://khap.deviantart.com/art/Weird-fountain-101082632?q=boost%3Apopular%20aix%20en%20provence%20ville&qo=33
http://autre-chose.deviantart.com/art/scene-de-vie-243-210153203?q=boost%3Apopular%20scene%20de%20vie&qo=57
http://www.flickr.com/photos/nwardez/3827023660/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/socodevi/6817092164/sizes/l/in/photostream/
http://chabi-asseles.deviantart.com/art/Kabylie-271006714?q=boost%3Apopular%20kabylie&qo=2
http://vengallery.deviantart.com/art/Holi-162200027?q=boost%3Apopular%20india%20holi&qo=69
http://www.flickr.com/photos/worldworldworld/4169533699/sizes/o/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/aigle_dore/5951747455/
http://www.flickr.com/photos/seanjc/6463075909/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/sylvainbourdos/5111086548/sizes/l/in/photostream/
http://harlequinesque84.deviantart.com/art/Children-of-India-78958309?q=boost%3Apopular%20india&qo=38
http://www.flickr.com/photos/mox07/3973493953/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/mafate69/3877088827/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/globetraveller/6459218357/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/44676123@N08/4729343152/sizes/z/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/photonquantique/3935849892/sizes/o/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/23912576@N05/3115301393/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/lesmontsdore/6813509653/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/lesmontsdore/5343857848/sizes/l/in/set-72157624852062351/
http://www.flickr.com/photos/tranuf/383034221/sizes/l/in/photostream/
http://3.bp.blogspot.com/_Gi8Tjqkvz_w/TSMRUPQd7ZI/AAAAAAAABfE/3U9gtX4c8As/s1600/max+ernst1.jpg
http://www.humano.com/assets/BlogPost/2281/Max-Ernst_3_462x462.jpg
http://2.bp.blogspot.com/_j5MvVCKMPvE/TQj7Equ6nHI/AAAAAAAAACE/zaJU5JIPEJ8/s1600/basquiat_post2.jpg
http://www.flickr.com/photos/piccalillidays/5501139526/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/nickcummins/4238176443/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/cpchen/3284649913/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/65073487@N00/3052794799/
http://1.bp.blogspot.com/_RP-zmwCdAYw/RwQiEsQ8GsI/AAAAAAAAAAw/jwRezQb1Ios/s400/1476198554_4a12b5cfe6_o.jpg
http://www.flickr.com/photos/26002962@N07/4999706826/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/johnspooner/403718366/sizes/l/in/photostream/
http://www.flickr.com/photos/monch_18/6312211085/sizes/l/in/photostream/
Les photographies suivantes sont issues d'une pratique de
notre entourage ou personnelle, d'où l'absence de
référence quant à leur paternité.
Annexe 5 : Les images photographiques
distribuées aux apprenants au cours de la séance objet de
l'analyse
Image photographique n°1 :
Amityville (Kousto, 2011)
Image photographique n°2 : Tristes
gosses, Berlin Germany (Mafate 69, 2009)
Image photographique n°3 : Le
Désespéré (Gustave Courbet, 1843-1845), reproduction
photographique (s.n., S.d.)
Image photographique n°4 : Juste avant le
sourire (Antoine Monmarché alias Monch, 2011)
Annexe 6 : La transcription des
données relatives à la séance objet de l'analyse
001
|
Amina
|
(découvre sa photographie) hu:: eh ben dis
donc aïe aïe aïe (rires)
|
002
|
Junko
|
(découvre sa photographie) pourquoi pourquoi
pourquoi ?
|
003
|
P
|
parce que parce que parce que ?
|
004
|
Junko
|
d'accord
|
005
|
Vince
|
(découvre sa photographie) j'adore ?
(petit rire)
|
006
|
Nadine (à Junko)
|
alors qu'est-ce que tu en penses ? c'est une maison
athée hein ? euh han- +
|
007
|
P
|
+ athée ?
|
008
|
Nadine
|
NON ? (rires)
|
009
|
P
|
(rires) si c'est une maison athée ? il
n'y a pas de Christ dedans
|
010
|
Junko
|
c'est quoi athée ?
|
011
|
Nadine
|
c'est quelqu'un qui croit pas en Dieu
|
012
|
Junko
|
ah (petit rire) c'est la maison athée alors on
commence comme ça
|
(10 minutes passent)
Image photographique n°1 :
Amityville (Kousto, 2011)
|
013
|
P
|
regardez ? + Nadine et Junko vont vous présenter la
photo ?
|
014
|
Amina
|
c'est la maison de quoi ?
|
015
|
Nadine
|
c'est la maison d'une famille + la famille qui vienne passer
les vacances + d'été voilà + ensuite il y a l'ange statue
là la statue de l'ange là ici + et c'est bon non ?
|
016
|
P
|
oui mais alors ça ?
|
017
|
Amina
|
oui c'est ça + vous vous qu'est-ce que vous
pensez ?
|
018
|
P
|
voilà elle est forte Amina + elle prend ma place
+ c'est exactement ce que j'allais dire + là vous la décrivez +
c'est très bien maintenant + réfléchissez + mais
vous en êtes capables ? c'est comme quand tu regardes un film
|
019
|
As
|
(éclats de rire)
|
020
|
Amina
|
c'est à nous de juger ?
|
021
|
Vince
|
le cave en bas ? + Pablo + qu'est-ce le contraire de le cave
le cave en bas ? c'est quoi le ?
|
022
|
P
|
*the attic* ? le grenier
|
023
|
Fabien
|
le grenier ouais grenier ouais
|
024
|
Nadine
|
il y a plein d'arbres + il y a plein d'arbres et c'est + c'est
une XX
|
025
|
P
|
ECOUTEZ NADINE ? ECOUTEZ NADINE ? + alors Nadine ?
|
026
|
Nadine
|
il y a plein d'arbres + et oui c'est le printemps ?
|
027
|
Amina
|
(éclat de rire)
|
028
|
Alexandre
|
déjà c'est c'est la nuit + c'est la nuit
|
029
|
Nadine
|
oui c'est la nuit (rires)
|
030
|
P
|
alors alors on va aller autrement + quand vous regardez
cette photo vous pensez à quoi + sans la décrire ? + quel est
le sentiment que ?
|
031
|
Alexandre
|
une maison hantée
|
032
|
Nadine
|
oui voilà (rires)
|
033
|
P
|
EH BEN DITES LE si vous voyez une maison hantée ?
|
034
|
Vince
|
tu penses on a + inaudible
|
035
|
Nadine
|
elle l'a dit tout à l'heure (désigne
Junko)
|
036
|
As
|
inaudible
|
037
|
Alexandre
|
inaudible
|
038
|
P
|
ECOUTEZ LE GENDARME ?
|
039
|
Amina
|
on les laisse ? c'est normal
|
040
|
Nadine
|
non mais vas-y ? nous on a fini
|
041
|
Amina
|
non non non vas-y ?
|
042
|
Alexandre
|
mais non
|
043
|
P
|
non:: ? + + allez n'ayez pas peu- ? Junko prends la
parole ?
|
044
|
Junko
|
d'abord j'ai pensé comme eux c'est la maison han- +
hantée + mais: elle a dit non mais c'est une église ? elle a dit
c'est une église elle a pensé de ça ?
|
045
|
Nadine
|
oui: pourquoi pas ?
|
046
|
P
|
et pourquoi tu as pensé à une église ?
|
047
|
Nadine
|
ben après j'ai dit non c'est pas une église
parce que: y a y a un: + euh non y a la fenêtre et le:
le: le balcon là
|
048
|
Alexandre
|
une statue
|
049
|
Junko
|
il y a la fenêtre
|
050
|
P
|
mais pourquoi tu as pensé à une
église au début ?
|
051
|
Amina
|
(rires)
|
052
|
Junko
|
parce que c'est comme + luminée
|
053
|
Nadine
|
parce que c'est comme + le la maison on dirait que: c'est une
église
|
054
|
P
|
dans la forme ?
|
055
|
Nadine
|
oui voilà ?
|
056
|
Junko
|
et oui c'est peut-être elle a pensé que
avec cette luminée et c'est comme il y a une esc- + comment on dit ?
|
057
|
Nadine
|
non
|
058
|
Junko
|
ah non d'accord (rires)
|
059
|
P
|
ah ben elle peut penser pour toi après c'est oui ou
non
|
060
|
Junko
|
peut-être elle a pensé avec luminée c'est
comme + comme divine
|
061
|
Nadine
|
(coupe Junko) qu'est-ce que toi tu penses ?
|
062
|
P
|
ah moi je pense: + alors Amina avait quelque chose par rapport
à la forme de la maison à dire
|
063
|
Amina
|
moi je pense que c'est une maison + y a les gens qui ont
habité d- dans la maison maintenant + ils sont morts + ça fait
longtemps qu'ils ont habité dedans et maintenant ils sont
morts
|
064
|
Alexandre
|
une maison hantée
|
065
|
Amina
|
oui maintenant lé lé maison c'est maison de
famille + qui (petit rire)
|
066
|
Alexandre
|
(petit rire) il y a tout qui bouge dedans
|
067
|
Amina
|
oui moi c'est ca que j'imaginais + avec les les nuages qui
(mime les nuages qui bougent) + dehors tout ça avec les
arbres + moi je pense ça
|
068
|
Nadine
|
oui
|
069
|
Junko
|
oui c'est vrai personne n'est là-bas mais avant
peut-être il y a beaucoup de gens: et puis c'était animé:
mais maintenant il y a +
|
070
|
Nadine
|
plus de il y a plus euh +
|
071
|
Junko
|
plus des arbres plus de nature mais peut-être + il y a
les lumières peut-être il y a quelqu'un mais: juste
seulement pour les vacances + qui viennent
|
072
|
Nadine
|
et oui il y a de la lumière
|
073
|
Vince
|
un gars comme moi ? + un peu comme moi qui y
va (rires)
|
074
|
Nadine
|
c'est une maison hantée c'est ça hantée
?
|
075
|
P
|
s'il y a un fantôme dans la maison c'est une maison qui
est hantée + oui oui oui + et vous vous en pensez quoi de cette photo ?
+ pareil des choses diff-
|
076
|
Vince
|
je pense que c'était une maison hantée +
ouais + je ne sais pas pourquoi mais quand j'ai vu + une maison avec les
lumières allumées dans le grenier j'ai pensé aux
fantômes
|
077
|
Fabien
|
oui moi aussi je pense que c'est une maison
hantée
|
078
|
As
|
inaudible
|
079
|
P
|
et Gaëlle qu'est-ce que vous voyez dans cette maison ? +
+ qu'est-ce que vous voyez dans cette maison vous ? (elle désigne sa
photographie) ah OUI ? celle là oui celle là c'est la votre
mais là nous on était en train de parler de cette photo
c'était la photo de Nadine et Junko et qu'est-ce que vous ?
|
080
|
Gaëlle
|
c'est la maison allumée + euh le fantôme
(petit rire)
|
081
|
Amina
|
et voilà (petit rire)
|
082
|
P
|
oui le fantôme
|
083
|
Alexandre
|
il vaudrait mieux pas habiter là dedans (petit
rire)
|
084
|
P
|
c'est une maison sataniste alors ? ou satanique ?
|
085
|
Carin
|
oh non ne dis pas ça ?
|
Image photographique n°2 : Tristes
gosses, Berlin Germany (Mafate 69, 2009)
|
086
|
P
|
alors Gaëlle et Amina ont cette photo à vous
présenter + +
|
087
|
Gaëlle
|
c'est deux enfants + +
|
088
|
Amina
|
il y a + +
|
089
|
P
|
allez-y on vous écoute ?
|
090
|
Amina
|
il y a quelqu'un qui a kidnappé des enfants + un petit
garçon et une petite fille + ils ont mis dans une salle + ils ont pris
une bombe + ils ont allumé ils ont pris le petit garçon il est
assis sur une bombe et lé petite fille + elle elle est assis à
côté elle elle pleure pour quelqu'un qui si elle entend: elle
pleure là-bas ils vont venir l'aider et les libérer + parce que
elle + le petit garçon elle lui il bouge pas il est resté assis
comme ça + timide XX triste et lé fille elle est assis à
côté et elle pleure pour quelqu'un qui l'entend pour venir les
libérer + c'est ce que j'ai pensé sur la photo
|
091
|
P
|
D'ACCORD ? ok ouais très très bien +
Gaëlle ?
|
092
|
Gaëlle
|
aussi ? (petit rire)
|
093
|
As & P
|
(rires)
|
094
|
Alexandre
|
elle a le coeur brisé
|
095
|
P
|
AH OUI ? regardez Alexandre ce qu'il vous dit elle a le
coeur brisé
|
096
|
Fabien
|
elle a le coeur brisé
|
097
|
Vince
|
moi j'ai vu ça ? comme une métaphore pour
les rêves brisés ?
|
098
|
P
|
une métaphore voilà j'étais en train de
penser à ça aussi
|
099
|
Carin
|
une métaphore de quoi ?
|
100
|
Vince
|
les rêves brisés les rêves cassés
|
101
|
Alexandre
|
et sur le coeur on voit des dessins sur le coeur on voit le
dessin de la fille et le garçon si tu regardes bien
|
102
|
Junko
|
ah:
|
103
|
Alexandre
|
c'est une séparation d'enfants + euh + d'enfants qui
s'aiment + qui s'aiment pas d'amour + qui s'aiment de petit enfant
|
104
|
Junko
|
ah:
|
105
|
Amina
|
oui oui ça je sais
|
106
|
P
|
platoniquement
|
107
|
Alexandre
|
et le garçon a un problème parce qu'il est assis
sur des grenades et la fille a le coeur brisé de voir que son copain a
des problèmes + tu vois sur le coeur + brisé + au coeur rouge tu
vois la tête du garçon et de la fille tu le vois là ? tu le
vois le ?
|
108
|
Vince
|
ensemble là ouais
|
109
|
Nadine
|
oui là là
|
110
|
Amina
|
il y a + il y a des + XX des jumeaux
|
111
|
As
|
inaudible
|
112
|
Alexandre
|
je pense hein ?
|
113
|
P
|
tu penses ce que tu veux et c'est très bien ce que tu
penses
|
114
|
Alexandre
|
je pense que ça eux c'est leur problème
|
115
|
Junko
|
je pense que c'est la fin de enfance ?
|
116
|
Vince
|
hum + oh je suis d'accord à ça ? + mais moi je
regarde qu'est-ce qui vole dehors
|
116 bis Les trois garçons discutent sur le pollen
qui tombe à l'extérieur.
|
117
|
Amina
|
voilà à vous
|
118
|
P
|
est-ce qu'on pourrait pas aussi comparer cet enfant qui est
assis sur une bombe ? + à peut-être + euh + à la
difficulté de l'enfance + dans ce monde + actuel + comme un enfant qui
serait assis + sur la guerre finalement + parce qu'à tout moment tout
peut exploser + et donc il + alors que c'est un enfant il devrait être en
train de jouer assis sur une chaise non il est assis sur une BOMBE qui va
exploser bientôt + alors comme tu le disais ils ont pu être
kidnappés + mais ils ont également + ils sont en danger
|
119
|
Alexandre
|
oui ils sont en danger
|
120
|
Amina
|
c'est pour ça ils sont en danger c'est pour ça
la petite fille elle elle est en train de pleurer si y a quelqu'un il est
derrière pour venir
|
121
|
P
|
oui c'est très très très bien
|
122
|
Carin
|
je pense aussi que si il est sur une bombe parce que il a un
problème et si on fait rien après après (petit
rire) + il va avoir plus de problèmes
|
123
|
Alexandre
|
il va sauter (petit rire)
|
124
|
As
|
(rires)
|
125
|
P
|
exactement quand on joue à un jeu dangereux parfois on
peut dire
|
126
|
Carin
|
non non psychologiquement je voulais dire ?
|
127
|
P
|
aussi oui oui
|
128
|
Amina
|
je dis + euh + les deux enfants là ils sont trop
petites pour venir assis tout seul pour: + faire + mourir tout suite
|
129
|
P
|
hun oui + finalement on les oblige là + ils sont comme
tu disais kidnappés + psychologiquement ou + physiquement ?
|
Image photographie n°3 : Le
Désespéré (Gustave Courbet, 1843-1845), reproduction
photographique (s.n., S.d.)
|
130
|
Alexandre
|
alors nous + alors moi ce que je pense c'est: + (à
Carin) tu veux expliquer toi ?
|
131
|
Carin
|
non mais
|
132
|
P
|
expliquez tous les deux ?
|
133
|
Carin
|
on a un peu des problèmes
|
134
|
Alexandre
|
ouais
|
135
|
P
|
ah ben deux versions différentes très bien
chacun dit la sienne ?
|
136
|
Alexandre
|
bon moi je pense que c'est + ou un: + comme il est
habillé comme il est: coiffé + comme sa moustache et son petit
bouc + il ressemble un peu à des mousquetaires de:: + +
|
137
|
P
|
d'Alexandre Dumas + des mousquetaires oui
|
138
|
Alexandre
|
voilà + des mousquetaires ou alors à un
pirate de: de: de bateau + et là je vois qu'il est
émotionné + il a + il doit avoir quelque chose de: de: grave de:
+ et là où ça m'intrigue le plus
|
139
|
P
|
il est ému voilà pas émotionné
il est ému
|
140
|
Alexandre
|
voilà ouais il est ému et là
où ça m'inquiète le plus + c'est c'est + ses ses bras +
ses bras et ses mains + je ne sais pas si vous voyez là ? + il a il a de
la peau là ou alors il a une maladie on dirait que c'est de la peau
morte
|
141
|
P
|
d'accord ouais + +
|
142
|
Alexandre
|
et + + il y a quelque chose de tragique qu'il voit hein ? +
|
143
|
P
|
donc d'après toi il voit quelque chose de tragique et
donc il réagit
|
144
|
Alexandre
|
il réagit voilà + il est très:
frustré + il est: + il est: + +
|
145
|
P
|
oui il est ému + il vit une émotion
|
146
|
Alexandre
|
il vit une grosse émotion
|
147
|
Fabien
|
c'est un tableau je crois non ?
|
148
|
P
|
ah ouais Fabien dit que c'est un tableau en effet c'est un
tableau
|
149
|
Alexandre
|
c'est un tableau peut-être oui oui oui
|
150
|
P
|
c'est une photo d'un tableau + parce que je ne pourrais
pas vous apporter
|
151
|
Nadine
|
il ressemble quand même à Johnny Depp hein
?
|
152
|
P
|
ah: c'est un pira:te des Caraï:bes ?
|
153
|
Nadine
|
(éclat de rire) voilà
|
154
|
Alexandre
|
ou alors un mousquetaire ?
|
155
|
Nadine & P
|
oui
|
156
|
P
|
alors Carin
|
157
|
Carin
|
oui je pense qu'il il a passé quelque chose de horreur
qu'il a vu ou qu'il a fait peut-être c'est un révolutionnaire qui
qui a + tué quelqu'un + il se sent pas + il se sent très:: + +
|
158
|
P
|
tu veux dire quoi ?
|
159
|
Carin
|
je pense peut-être qu'il a tué quelqu'un sans
sans sans le voul- +
|
160
|
Alexandre
|
sans le vouloir
|
161
|
Carin
|
vouloir il + + il a de sentiment de:: peur de regret +
hum + + je pense qu'il va + + qu'il va être (doucement) fou:
(petit rire) + +
|
162
|
Alexandre
|
de regret
|
163
|
P
|
il va être il devient fou
|
164
|
Carin
|
oui il va devenir fou + parce qu'il se sent pas bien du tout
psychologiquement ?
|
165
|
P
|
vous avez tous les deux vu ça finalement + alors pour
toi c'est un mousquetaire + pour toi un révolutionnaire
|
166
|
Alexandre
|
moi ce qui m'a impressionné + c'est ses ses boules + ce
qu'il a aux bras et à la main tu sais + la peau la peau qui tombe
|
167
|
Amina
|
oui et sinon + + moi je voyais c'est quelqu'un qui rentrait
à la maison + il tombe dessus sa femme et quelqu'un il a tué
sa femme et là + parce que il va pas expliquer qui a tué son
sa femme maintenant là qu'est-ce qu'il doit dire si lé police
elle est venue il va dire c'était lui qui l'a fait + et là
(rires) ils vont l'envoyer et c'est pas lui + là il est il
est
|
168
|
Nadine
|
(rires) oui pourquoi pas ? + et oui il est
surpris quoi
|
169
|
As & P
|
(rires)
|
170
|
Alexandre
|
ou alors ou alors il a gagné au loto
|
171
|
As & P
|
(éclats de rire)
|
172
|
P
|
ce sont bien mes numéros:: (mime le personnage du
tableau) + alors Gaëlle qu'est-ce que vous voyez ? + d'après
vous qu'est-ce ce ça peut vouloir dire cette photo ? + quand vous voyez
cette photo qu'est-ce que vous voulez dire en premier dans + les sentiments
?
|
173
|
Alexandre
|
qu'il est beau ?
|
174
|
As & P
|
(rires)
|
175
|
P
|
ça je sais que ? ce sont tes propres sentiments
vis-à-vis des hommes ?
|
176
|
Carin
|
il dit « je vieillis:: » (petit
rire)
|
177
|
Alexandre
|
(petit rire)
|
178
|
Nadine
|
dis-lui d'expliquer comme elle veut ?
|
179
|
P
|
oh elle le sait Gaëlle + vous avez carte blanche
|
180
|
Amina
|
si il va gagner au loto il va sourire et là il a pas
gagné au loto
|
181
|
P
|
alors non ? si ?
|
182
|
Gaëlle
|
un révolutionnaire
|
183
|
P
|
un révolutionnaire ? non: enfin pour Carin
peut-être pas pour vous ?
|
184
|
Gaëlle
|
je sais mais: + je (petit rire) + oui je sais
mais: un petit peu
|
185
|
P
|
je sais que vous savez + ben des mots simples + +
qu'est-ce qu'elle vous dit cette photo quand vous la voyez
|
186
|
Nadine
|
prends ton temps tranquille on n'est pas pressés ?
(rires)
|
187
|
P
|
ah c'est pas grave pour la prochaine fois
|
188
|
Amina
|
inaudible + elle est pas comme moi elle est venue +
inaudible
|
189
|
As
|
inaudible
|
190
|
Carin (à Vince)
|
et ça c'est pire
|
191
|
Vince (à Carin)
|
c'est un couchemar
|
192
|
Carin (à Vince)
|
et après il a regardé
|
193
|
Af
|
il est énervé
|
194
|
P
|
ah oui il est énervé on peut dire qu'il est
énervé il y a quelque chose qui s'est passé et vous deux ?
parce que vous n'avez pas parlé dessus ?
|
195
|
Vince
|
euh je crois moi je pense qu'il a vu cette photo là
(désigne et montre sa photographie) (rires)
|
196
|
As & P
|
(rires)
|
197
|
P
|
peut-être voilà on peut + on fait un diptyque
(met les images face à face puis côte à
côte)
|
198
|
As
|
ouais
|
199
|
Carin
|
« c'est moi ça » ?
|
200
|
P
|
avant après
|
201
|
Vince
|
euh moi hum + parfois quand j'ai un couchemar quand je me
lève je je me présente comme ça dans la glace ah c'est pas
vrai c'est pas vrai + + et les yeux parlent ça + + quand j'arrive
XX et je tiens les chevaux
|
202
|
Amina
|
XX ton cauchemar tu m'appelles comme ça
(petit rire)
|
203
|
P
|
les cheveux pas les chevaux + les cheveux comme
« je veux »
|
204
|
Vince
|
comment + cheveux + + je tiens les cheveux comme
ça
|
205
|
P
|
ouais et donc pareil Fabien ? vous avez des choses à
rajouter par rapport à ce qui a été dit ? + + alors
en fait cette peinture c'est un autoportrait + vous savez ce qu'est un
autoportrait
|
206
|
Fabien
|
non
|
207
|
Nadine
|
de qui
|
208
|
Fabien
|
de lui-même
|
209
|
Carin
|
du peintre
|
210
|
Vince
|
de l'artiste
|
211
|
P
|
est-ce que vous comprenez ce que c'est un autoportrait
|
212
|
Nadine
|
un autoportrait c'est: euh + c'est une photo non ?
|
213
|
P
|
non c'est pas juste une photo ça peut
être
|
214
|
Amina
|
c'était quelqu'un qui fait le peintre non ?
|
215
|
Alexandre
|
c'est lui-même
|
216
|
Vince
|
ouais c'est comme + inaudible
|
217
|
P
|
voilà un autoportrait c'est quand un peintre se
dessine lui-même + vous vous prenez votre appareil et faites
ça sur vous (click, mime une prise de photographie en
autoportrait) c'est un autoportrait
|
218
|
Nadine
|
ah ah c'est lui ah oui oui oui
|
219
|
P
|
alors il s'appelle Gustave Courbet + et + cette toile donc
cette peinture s'appelle et ça ça rejoint ce que vous dites
s'appelle Le Désespéré + Le
Désespéré et donc il n'a plus d'espoir + parce que
(désigne Amina) sa femme est morte parce qu'il est
désespéré (désigne Alexandre) en plus tu
l'as vu dans les couleurs donc tu sens qu'il y a quelque chose de tragique en
lui qui se passe
|
220
|
Alexandre
|
oui c'est au temps des ?
|
221
|
P
|
des Romains (petit rire) non Courbet ça doit
être entre 1850 et 1900 + + alors maintenant on va écouter Fabien
et Vince qui ont une photo très::
|
222
|
Nadine
|
allez allez-y messieurs ?
|
Image photographique n°4 : Juste avant
le sourire (Antoine Monmarché alias Monch, 2011)
|
223
|
Fabien
|
alors on a une photo un peu qui fait peur quoi + on on dirait
que quelqu'un porte un masque ou: + (à Vince) j'sais pas + ce
que tu en penses
|
224
|
Nadine
|
on dirait mort
|
225
|
Amina
|
mort-vivant
|
226
|
Vince
|
une bouche X un visage
|
227
|
Fabien
|
voilà qui porte un visage ou + j'sais pas on dirait que
+ qui fait peur
|
228
|
Vince
|
moi je trouve que c'est:
|
229
|
Amina
|
c'est des morts-vivants
|
230
|
Nadine
|
on dirait mort oui (rires)
|
231
|
Amina
|
non c'est les vamp- + les gens + dans les dans les clips de
Michael Jackson maintenant ils sortent du cimetière
(rires)
|
232
|
Vince
|
ça c'est du bois
|
233
|
Alexandre
|
ça c'est un rocher de pierre
|
234
|
Vince
|
ah ouais ?
|
235
|
P (à Amina)
|
toi j'ai compris que tu aimais les films d'horreur
|
236
|
Amina
|
(rires)
|
237
|
Alexandre
|
ça c'est un mur une casc- un mur dans un rocher + un
mur dans un rocher + et après + euh + c'est c'est un mur
|
238
|
Vince
|
ok + + moi j'ai vu le fil là
|
239
|
P
|
ah d'accord oui
|
240
|
Alexandre
|
non c'est une grotte c'est de la pierre ça c'est de la
pierre
|
241
|
Carin
|
je pensais que c'était sur ? XX
|
242
|
Fabien
|
c'est quelqu'un qui est comme ça + ça serait
comme ça tu verrais son pouce mais là tu le vois pas son pouce
c'est comme si il se prenait la tête quoi mais c'est bizarre on dirait
qu'il dirait qu'il crie
|
243
|
Carin
|
ici je pensais que c'est comme XX + il y a quelque chose qui
rend + inaudible
|
244
|
Vince
|
s'il y a + inaudible
|
245
|
Alexandre
|
s'il y a de l'eau là c'est comme une fontaine + une
roche
|
246
|
Fabien
|
moi j'ai un problème avec un truc ouais qui me
gêne
|
247
|
P (à Alexandre et Fabien)
|
laissez parler un peu Vince ? + après vous::
|
248
|
Vince
|
moi j'ai le même problème là avec +
moi j'ai vu un fil
|
249
|
Alexandre
|
une clé ?
|
250
|
P
|
laisse-le parler un peu ?
|
251
|
As
|
(rires)
|
252
|
Nadine
|
c'est vrai que aujourd'hui Vince il n'a pas parlé
beaucoup (rires)
|
253
|
Vince
|
hey: entre nous deux oui on a réussi + euh mais euh ici
moi je pensais à un truc de migraine mal à la tête + avec
les yeux + avec les yeux là + et même moi j'ai vu le le visage les
yeux et la bouche et tout ça mais ça le rouge pour moi c'est
plutôt comme du sang + du sang pour moi + euh et donc pour moi ça
venait de XX des yeux + il y a quelque chose qui sort de la tête
|
254
|
P
|
d'accord
|
255
|
Fabien
|
je ne sais pas
|
256
|
Alexandre
|
moi je pense que c'est une roche
|
257
|
Vince
|
non moi je je suis d'accord que tout ça c'est un roche
oui ? + le derrière là ?
|
258
|
Fabien
|
oui oui moi aussi je suis d'accord avec toi tout ça +
|
259
|
Alexandre
|
mais c'est bien fait parce que après
|
260
|
Vince
|
je croyais que c'était un miur comme: + euh
|
261
|
P
|
un lieu ?
|
262
|
Vince
|
un miur
|
263
|
P
|
un mieux ?
|
264
|
Alexandre
|
un masque un masque
|
265
|
As
|
mur
|
266
|
Alexandre
|
un mur une roche
|
267
|
P
|
mur
|
268
|
Vince
|
mur
|
269
|
Nadine
|
c'est un mur ça ?
|
270
|
P
|
il a dit qu'il pensait ? que c'était un mur ?
|
271
|
Fabien
|
mais je ne pense pas que ce soit une peinture parce que tu
vois que c'est une photo ça pas une peinture parce que tu vois bien les
mains quand même + tu vois les + c'est pas peint enfin si c'est un
peintre en tout cas il s'est gavé le mec
|
272
|
Alexandre
|
non mais les mains tu peux les mettre après
|
273
|
Vince
|
moi je connais un peu des artistes
|
274
|
Amina
|
(fait demander la photographie à ses
camarades)
|
275
|
Fabien
|
on voit un tatouage et tout on voit un tatouage + à un
moment
|
276
|
P
|
ah ouais ?
|
277
|
Fabien
|
ouais en bas du: + on voit un tatouage
|
278
|
Vince
|
un peu de ? *XXX*
|
279
|
P
|
comment ?
|
280
|
Vince
|
un peu de *XXX*
|
281
|
P
|
ah ouais peut-être
|
282
|
Fabien
|
on voit un tatouage là et un tatouage là un
qu'on voit tout en bas
|
283
|
Vince
|
et même moi je connais un peu des artistes de graffiti
qui sont super qui sait tout faire ouais
|
284
|
Amina
|
c'est un masque
|
285
|
P
|
un masque ?
|
286
|
Fabien
|
ah ouais qui arrive à faire la peau comme
ça
|
287
|
Amina
|
un masque de bois
|
288
|
Vince
|
ouais qui arrive à faire tout les yeux XX parfaitement
ouais c'est énorme avec les X XX c'est super
|
289
|
Amina
|
c'est un masque de bois
|
290
|
P
|
un masque de foire ?
|
291
|
Amina
|
de bois
|
292
|
P
|
AH:: de bois
|
293
|
Vince
|
c'est d'accord aussi mais je suis d'accord avec toi que +
inaudible
|
294
|
Alexandre
|
moi je vois un mur tu vois + où il a la
mousse
|
295
|
Amina
|
oui tu sais les vieilles arbres là dans les +
|
296
|
P
|
ah elle a des choses à dire oui ?
|
297
|
Amina
|
ancienne arbre + il était morte il était
très très très vieille arbre + il était morte
maintenant il a pris une + comment s'appelle une partie: du bois elle a fait un
trou et fait masque + un masque + je sais pas ?
|
298
|
Fabien
|
ah: et il le porte comme ça ah:
|
299
|
P
|
parfois oui comme elle dit même dans la nature on voit
les arbres qui ont des formes particulières ils sont morts ou
très très vieux ou ils ont pris la foudre et qu'est-ce que ?
|
300
|
Carin
|
je pense c'est une personne qui se sent comme ça mal +
c'est une psychose
|
301
|
Amina
|
c'est un vampire
|
302
|
Vince
|
et pourquoi il se sent comme ça:: ?
|
303
|
P
|
ah: peut-être essayez de savoir pourquoi elle ne se sent
pas bien cette personne ? enfin ou en tout cas qu'est-ce qui peut se passer
?
|
304
|
Fabien
|
c'est une photo sombre quoi elle est sombre
|
305
|
Nadine
|
très sombre oui + moi je dirais que
|
306
|
Alexandre
|
moi je pense que c'est une roche
|
307
|
P
|
je sais ? que tu penses que c'est une roche ? + mais
au-delà de la roche qu'est ce que ça te fait ressentir ?
|
308
|
Nadine
|
c'est un masque hein ?
|
309
|
Amina
|
oui + c'est un mort + vampire
|
310
|
P
|
Carin dit que c'est une psychose donc il y a de la folie
|
311
|
Alexandre
|
oui oui oui
|
312
|
Amina
|
c'est comme un vampire
|
313
|
P
|
oui on peut dire un monstre aussi + les vampires les
morts-vivants comme tu disais
|
314
|
Amina
|
un monstre
|
315
|
Fabien
|
on dirait de loin on dirait que c'est pas la même
photo de loin quand elle est loin t'as vu + on peut imaginer regarde quand
elle est de loin + inaudible
|
316
|
Alexandre
|
comment ça s'appelle + + en Afrique ils ont beaucoup
des ?
|
317
|
Nadine
|
des masques là
|
318
|
Alexandre
|
oui voilà
|
319
|
Fabien
|
il y a des cheveux là on dirait des cheveux enfin je
sais pas
|
320
|
Vince
|
il y a des ombres là
|
321
|
Amina
|
oui dans + quand on regarde les films dans le truc comme ils
vont faire mort-vivant le cimetière il voulait faire comme ça
peut-être ?
|
322
|
Fabien
|
j'sais pas elle est bizarre cette photo de près et de
loin c'est pas la même vision que tu vois + on dirait que c'est pas la
même j'sais pas ça représente quelque chose mais quoi
? de près et de loin peut-être que c'est moi qui
rêve mais je pense de loin on dirait j'sais pas c'est pas la même
photo on dirait de près et de loin
|
323
|
Vince
|
c'est possible que il porte quelque chose là
? (petit rire)
|
324
|
Amina
|
je ne pense pas ?
|
325
|
Vince
|
c'est comme il porte de l'eau (petit rire)
|
326
|
P
|
eh ben montre-leur de loin sinon + est-ce que vous voyez la
même chose ? alors Fabien dit que quand on
éloigne la photo on voit quelque chose de différent
|
327
|
Carin
|
non un autre point de vue différent
|
328
|
Vince
|
et si on la mit à l'envers ?
|
329
|
Fabien
|
à l'envers ?
|
330
|
Vince
|
ouais qu'est-ce que tu vois ? si c'est comme
à l'envers à l'envers c'est comme l'eau
|
331
|
Carin
|
oui c'est vrai ?
|
332
|
Nadine
|
je dirais que il a mis il a pris le masque
|
333
|
Fabien
|
de loin on dirait que c'est pas la même photo quand tu
regardes de près et de loin tu vois ce que je veux dire ?
enfin je ne sais pas si vous voyez ce que je veux dire
?
|
334
|
P
|
alors on dit que le point de vue + le point de vue
change
|
335
|
Fabien
|
le point de vue n'est pas le même + alors quoi je
ne sais pas je ne pourrai pas te dire
|
336
|
Nadine
|
moi je dirais que c'est un masque
|
337
|
Fabien
|
ouais c'est un masque mais j'sais pas
|
338
|
P
|
finalement en tout cas elle vous fait peur + Amina pense aux
films d'horreur et aux histoires de morts-vivants quand elle le voit + toi tu
penses à de la roche mais en même temps
|
339
|
Amina
|
ça + attends + souvent quelqu'un qui est mort
longtemps + il a pris son tête
|
340
|
Alexandre
|
l'homme de pierre
|
341
|
Nadine
|
non si si ?
|
342
|
Amina
|
ou quelqu'un ou les animaux avant tu sais là ils vont
montrer le tête et vont mettre
|
343
|
Alexandre
|
les hommes préhistoriques ? non
?
|
344
|
P
|
alors Amina tu parles d'un squelette + d'une personne + le
corps
|
345
|
Amina
|
il a pris la tête
|
346
|
Carin
|
il parait très Le Cri Le Cri le
tableau norvégienne Le Cri sur angoisse + il ressemble un peu
de la même manière
|
347
|
Vince
|
hun hun
|
348
|
Nadine
|
bon dis-nous qu'est-ce que ce toi tu en penses
?
|
349
|
P
|
qu'est-ce que moi j'en pense ? alors donc tu viens de
dire quelque chose (désigne Carin) + c'est qu'en fait
déjà c'est écrit en dessous (montre la signature de la
photographie, Monch) + alors normalement il y a un tableau qui a
été fait en 1850-1900 par un peintre expressionniste qui
s'appelait Munch et il a fait ce qu'on appelle Le Cri + c'était
un homme qui avait un visage à peu près pareil + si vous avez vu
le film Scream qui fait peur
|
350
|
As
|
oui
|
351
|
P
|
il avait le même visage que le masque que portent les
tueurs dans ce film là et donc il est là comme ça en plein
milieu d'un pont et il crie + donc il crie sa douleur ses psychoses et comme tu
disais (désigne Carin) donc c'est une
réinterprétation c'est un un hommage à cette peinture
là + alors moi je pense que c'est une peinture + ça peut
être une photo retouchée
|
352
|
Amina
|
c'est pas il a fait des poses ? + il a fait comme ça
à sa main sous le + il a fait comme ça à sa main + ah
c'est + il va faire comme ça à sa main ils vont faire une photo
pour envoyer personne
|
353
|
P
|
ah oui: + + mais après avec une photo on peut tout
faire c'est vrai que: + après je ne sais pas ? je ne peux pas vous dire
? + si vous pensez que c'est une peinture c'est une peinture
(désigne Alexandre) toi tu as raison sur la texture de
la roche mais quand tu es un bon peintre et que tu veux expérimenter tu
peux toujours essayer de faire des textures
|
354
|
Alexandre
|
oui parce que moi j'ai vu dans des endroits de la roche plus
tu t'approches eh ben tu t'imag- + tu vois le visage d'un être d'un
être humain
|
355
|
P
|
eh ben tu sais que Léonard De Vinci faisait ça +
il voyait dans les arbres dans les écorces des arbres des
visages13(*)
|
356
|
Alexandre
|
des visages
|
357
|
Nadine
|
ah bon ?
|
358
|
As
|
oui
|
359
|
P
|
dans la nature parfois tu te promènes et tu te dis
tiens on dirait quelqu'un qui crie qui pleure qui est heureux bon
généralement c'est plutôt triste mais ça
dépend de l'artiste aussi (petit rire)
|
360
|
Nadine
|
(petit rire) oui c'est sûr
|
361
|
Alexandre
|
et il y a des pierres par terre il y a des pierres que tu
regardes
|
362
|
Fabien
|
quand tu regardes les nuages tu t'imagines des trucs
|
363
|
P
|
ah oui
|
364
|
Fabien
|
quand tu regardes les nuages c'est vrai tu t'imagines des
choses + on dirait des formes d'animaux enfin
|
365
|
P
|
qu'est-ce que vous voyez vous dans les nuages
généralement ?
|
365 bis : Nous discutons, ensemble, sur ce que chacun
aperçoit quand il regarde le ciel et les nuages.
|
Annexe 7: Les
conventions de transcription
Alexandre14(*)
|
prénom de l'apprenant(e) identifié(e) comme
locuteur(-trice)
|
P
|
professeur
|
As
|
plusieurs apprenant(e)s
|
Af
|
apprenante non identifiée
|
Am
|
apprenant non identifié
|
(à P)
|
désignation directe d'un nouvel interlocuteur
privilégié
|
(coupe Junko)
|
commentaire sur les didascalies énonciatives
|
(rires) et (désigne)
|
commentaire sur le para-verbal et le non-verbal
kinésique
|
han-
|
mot tronqué
|
AH D'ACCORD
|
emphase intonative
|
X
|
segment incompréhensible (le X correspond au nombre de
syllabes)
|
inaudible
|
segment long inaudible et incompréhensible (bruit)
|
énoncé
énoncé
|
chevauchement d'énoncés
|
?
|
intonation montante
|
?
|
intonation descendante
|
:
|
allongement de la syllabe
|
::
|
allongement plus long de la syllabe
|
+
|
pose dans l'énoncé
|
+ +
|
pose plus longue dans l'énoncé
|
*XX*
|
langue autre que la langue cible
|
|
|
|
Annexe 8 : Les marqueurs
de la subjectivité chez les apprenants
Chez Amina
TP 063 : moi je pense que c'est une
maison [...]
TP 067 : oui moi c'est ca que
j'imaginais + [...] + moi je pense
ça
TP 090 : [...] c'est ce que j'ai
pensé sur la photo
TP 105 : oui oui ça je sais
TP 128 : je dis + euh + les deux enfants
là [...]
TP 167 : [...] moi je voyais c'est
quelqu'un qui rentrait à la maison [...]
TP 188 : [...] elle est pas comme moi
[...]
TP 202 : XX ton cauchemar tu m'appelles
comme ça
TP 297 : [...] un masque + je sais pas
?
TP 321 : [...] il voulait faire comme ça
peut-être ?
TP 324 : je ne pense pas ?
TP 352 : c'est pas il a fait des poses
? [...]
Chez Carin
TP 122 : je pense aussi que si il est
sur une bombe [...]
TP 126 : non non psychologiquement je voulais
dire ?
TP 157 : oui je pense [...] qu'il a vu
ou qu'il a fait peut-être [...]
TP 159 : je pense peut-être qu'il
a tué quelqu'un [...]
TP 161 : [...] je pense qu'il va + +
qu'il va être fou:
TP 241 : je pensais que c'était
sur ?
TP 243 : ici je pensais que c'est comme
[...]
TP 300 : je pense c'est une personne qui
se sent comme ça mal [...]
TP 346 : [...] il ressemble un peu de la
même manière
Chez Gaëlle
TP 184 : je sais mais: +
je + oui je sais mais: un petit peu
Chez Junko
TP 044 : d'abord j'ai pensé comme
eux c'est la maison [...] ?
TP 056 : et oui c'est peut-être
elle a pensé que [...]
TP 060 : peut-être elle
a pensé [...]
TP 069 : oui c'est vrai personne n'est là bas mais
avant peut-être [...]
TP 071 : [...] plus de nature mais
peut-être + il y a les lumières
peut-être [...]
TP 115 : je pense que c'est la fin de
enfance ?
Chez Nadine
TP 053 : [...] la maison on dirait que:
c'est une église
TP 045 : oui: pourquoi pas ?
TP 047 : ben après j'ai dit non
[...]
TP 151 : il ressemble quand même
à Johnny Depp hein ?
TP 168 : oui pourquoi pas [...]
TP 224 : on dirait mort
TP 230 : on dirait mort oui
TP 305 : [...] moi je dirais que
TP 332 : je dirais que il a mis il a
pris le masque
TP 336 : moi je dirais que c'est un
masque
Chez Vince
TP 05 : j'adore ?
TP 073 : un gars comme moi ? + un peu
comme moi qui y va
TP 076 : je pense que
c'était une maison hantée + ouais + je
ne sais pas pourquoi mais quand j'ai vu [...]
j'ai pensé aux fantômes
TP 097 : moi j'ai vu ça ? comme
une métaphore pour les rêves brisés ?
TP 116 : hum + oh je suis d'accord
à ça ? [...]
TP 195 : euh je crois moi je
pense qu'il a vu cette photo là
TP 201 : euh moi hum + parfois quand
j'ai un couchemar quand je me lève je
je me présente [...] quand j'arrive XX
et je tiens les chevaux
TP 228 : moi je trouve que c'est:
TP 238 : [...] moi j'ai vu le fil
là
TP 283 : et même moi je
connais un peu des artistes de graffiti [...]
TP 260 : je croyais que c'était
un miur [...]
TP 257 : non moi je je suis d'accord que
tout ça c'est un roche oui [...]
TP 253 : [...] ici moi je pensais
à [...] et même moi j'ai vu [...] mais ça
le rouge pour moi c'est plutôt [...] du sang
pour moi + euh et donc pour moi ça
venait [...]
TP 248 : moi j'ai le même
problème là avec + moi j'ai vu un fil
TP 323 : c'est possible que il porte
quelque chose là ?
TP 293 : [...] je suis d'accord avec toi
que
Les caractères gras mettent en évidence les
termes analysés. Les couleurs renvoient à celles du graphique.
Nous précisons qu'en cas d'utilisation du « moi » en
tant que pronom tonique (« moi, je »), nous ne
comptabilisons qu'une seule occurrence.
Résumé
Le présent mémoire s'attache à l'analyse
de l'expression personnelle, de la communication et des interactions orales en
classe de langue. Il procède de la capacité des images à
susciter le langage. L'image photographique est, en l'espèce,
considérée comme un déclencheur de messages verbaux. Le
dispositif didactique mis en oeuvre se place dans un contexte de
français enseigné comme langue seconde d'hôte avec des
apprenants adultes de l'ASTI d'Aix-en-Provence à qui nous avons
proposé de commenter des photographies. L'analyse d'une séance
spécifique nous a permis de nous focaliser sur l'émergence
d'interactions communicatives orales et d'une expression personnelle en classe
de langue. La photographie suscite des enjeux communicatifs qui favorisent
l'implication des apprenants et l'élaboration d'un discours
créatif. Ces derniers communiquent et interagissent entre eux, ils
inventent, s'expriment, jouent avec leurs idées et apprennent dans une
atmosphère qui allie étude, humour et déritualisation du
schéma de classe classique.
Mots-clés : apprentissage et
enseignement des langues - communication verbale - interaction orale -
photographie et image- expression personnelle créative
Abstract
This dissertation deals with personal expression,
communication and oral interactions analysis in foreign language classroom. It
is a product of the capacity of images to trigger language. Picture is, in this
case, considered as a means to induce verbal acts of communication. Our
didactic approach deals with French as foreign language context including adult
learners from l'ASTI d'Aix-en-Provence. We invited them to comment
photographs. The analysis of a specific session allowed us to focus on the
emergence of personal expression and communication acts and oral interactions
in language classroom. Photograph arouses and sparks off communicative issues
which induce students to get involved and develop a creative speech. They
communicate, discourse and interact with others, they contrive, dally with
their ideas and learn in an industrious but unconventional atmosphere where
they can use humor and modify the classical classroom scheme.
Keywords: foreign language teaching and
learning - verbal communication - oral interaction - photograph and picture -
personal creative expression
* 1 Source : Insee,
Population étrangère au sein de l'Union européenne en
2010.
* 2 L'auteur souligne que sa
présente étude exclut « les images dites
mixtes [qui] incluent du texte ». Nous la rejoignons sur cet
état de fait.
* 3 Par la
subjectivité explicite, « j'informe autrui de ce que je pense de
l'objet en question », « l'évaluation est
ouvertement rattachée à une source évaluative individuelle
». Par la subjectivité implicite, « j'informe autrui
d'une des propriétés (qui me semble être
caractéristique) de l'objet », « l'évaluation
est détachée du locuteur, ce qui produit un effet
d'objectivité. »
* 4 L'auteur définit
les « négociations conversationnelles » en termes de
« procédures visant à résorber le
désaccord », « de mécanismes d'ajustement des
comportements mutuels » opérés par les participants de
la situation d'interaction (p. 94). En ce sens, elles s'opposent,
au-delà de leur caractère commun de coopération, à
la collaboration, qui fait fi de tout conflit (p. 96).
* 5 Un milieu est dit
exolingue lorsque les interlocuteurs ne partagent pas la même langue
maternelle.
* 6 Depuis 1978, l'UNESCO
définit ainsi le concept : « une personne est
analphabète du point de vue fonctionnel si elle ne peut se livrer
à toutes les activités qui requièrent
l'alphabétisme aux fins d'un fonctionnement efficace de son groupe ou de
sa communauté et aussi pour lui permettre de continuer d'utiliser la
lecture, l'écriture et le calcul par son propre développement et
celui de la communauté. »
* 7 Les groupes
constitués par l'ASTI sont fonction des compétences et
capacités des apprenants en français. Il existe, au sein de
l'Association, quatre niveaux d'alphabétisation et trois de FLE.
* 8 Les prénoms
utilisés en l'espèce sont fictifs. Ils tiennent compte du sexe et
du pays d'origine des apprenants, ou de l'origine du prénom
réel.
* 9 De plus, cela
témoigne de la réalité exolingue dans laquelle se
retrouvent quotidiennement les apprenants étrangers.
* 10 Les pages 60 et 61 de l'
Annexe 3 et la page 20 du présent corps du
mémoire présentent cette séance.
* 11 Nous tenons compte dans
cette analyse des résultats dudit départ
prémédité de l'apprenante.
* 12 Les caractères
gras portent l'attention sur les éléments significatifs, objets
de notre analyse.
* 13 Erratum :
Léonard De Vinci affirmait, en réalité, la
visibilité d'éléments « dans les murs
barbouillés de taches ou les pierres de divers
mélanges. »
* 14 Les prénoms des
apprenants sont fictifs. Ils tiennent compte de leur sexe et de leur pays
d'origine, ou de l'origine du prénom réel.