INTRODUCTION
Le lien entre l'inflation et la croissance économique a
fait l'objet d'un intérêt considérable au cours des
dernières décennies chez les macroéconomistes, les
décideurs et les banques centrales des pays développés et
des pays en développement. En particulier, la question sur le fait que
l'inflation soit nécessaire ou nuisible à la croissance
économique a entrainé un débat théorique et
illustré par des résultats empiriques. En fait, provenant du
contexte d'Amérique latine dans les années 50, la question a
généré un débat persistant entre les
monétaristes et les structuralistes. Les structuralistes pensent que
l'inflation est essentielle pour la croissance tandis que les
monétaristes la perçoivent comme nuisible au progrès
économique. En outre, certaines études empiriques ont
confirmé soit la relation positive ou négative qui existe entre
ces deux variables macroéconomiques.
Aujourd'hui, un consensus s'est élaboré autour
de la question à savoir qu'une inflation faible et stable relance la
croissance économique (Mubarik, 2005). En fait, des études
empiriques ont examiné la relation entre l'inflation et la croissance
économique de long terme et ont attesté que celle-ci pourrait
être non linéaire. La possibilité de non
linéarité a été d'abord identifiée par
Fischer(1993). En outre, Sarel (1996) a spécifiquement testé
l'existence d'une rupture structurelle dans la relation entre l'inflation et la
croissance économique. Ainsi, a un niveau (faible) d'inflation la
relation pourrait être positive, non existante, mais à des taux
élevés elle devient négative. Alors, si une telle relation
non linéaire existe il serait possible d'estimer un point d'inflexion,
ou le seuil, à partir duquel le signe de la relation change.
Ainsi, cette nouvelle vision de la relation entre l'inflation
et la croissance économique considère qu'il existe un seuil de
l'inflation, qui lorsqu'il est excédé a des effets
négatifs sur la croissance économique. Une étude
originale de Khan et Senhadji(2000) a estimé les niveaux seuils de
l'inflation des pays développés et ceux en développement.
Selon eux, les pays développés ont un seuil qui se situe entre
2et3% et les pays en développement, entre 7 et 11%. S'inspirant de cette
étude Yasir Mubarik(2005) a estimé de façon robuste le
seuil du Pakistan à 9%.
Les pays de l'UEMOA ont adopté, en 1999, un
pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de
solidarité dans lequel la commission bancaire de l'union a
fixé la norme d'inflation à un taux de 3% maximum. Au regard de
l'étude de Kahn et Senhadji, l'on est tenté de se demander si la
cible d'inflation dans cette zone est optimale. Cette question revêt un
intérêt quant à l'efficacité de la politique
monétaire. En effet, les indicateurs de la politique monétaire
dans le cadre de la BCEAO qui sont principalement les taux
d'intérêt directeurs et la masse monétaire dépendent
de cet objectif d'inflation fixé à 3%.
En se référant à la
théorie, particulièrement keynésienne, la politique
monétaire expansive pourrait relancer l'économie par une hausse
de la demande effective même si elle s'accompagne d'une inflation qui
paraît essentiel. Alors que dans la zone UEMOA, la politique
monétaire est restrictive et prudente pour éviter que l'inflation
excède la norme de 3% qui semble être dangereuse pour la
croissance économique. Les statistiques récentes de la BCEAO sur
l'évolution de l'inflation et la croissance économique de la zone
UEMOA montrent que de 2004 à 2007 l'inflation est passée de 0,5%
en 2004 à 4,3% en 2005, 2,3% en 2006 et à 2,4% en 2007 tandis que
pendant cette même période le taux de croissance économique
passait de 2,8% à 4,1% puis à 3,1% et à 3%.
A la lumière de ce qui précède, la norme
d'inflation de 3% est elle optimale? Quel pourrait être le seuil de
l'inflation dans l'UEMOA ? En d'autres termes, à partir de quel
niveau l'inflation serait elle néfaste pour la croissance
économique ?
En un mot, quelle est la nature de la relation entre
l'inflation et la croissance économique dans la zone UEMOA ?
Cette étude se fixe, donc, comme objectif principal
d'examiner la nature de la relation entre les grandeurs macroéconomiques
susmentionnées. Toutefois, de façon spécifique elle
s'emploie à analyser la cible actuelle et à déterminer le
seuil d'inflation de la zone UEMOA.
Dans le cadre de la politique du ciblage
d'inflation cette étude pourrait intéresser les autorités
de la politique monétaire dans leur choix d'objectif en ce qui concerne
le niveau d'inflation et qui dans la coordination des politiques, souhaitent
rehausser le niveau de la croissance économique. L'évaluation du
seuil de l'inflation, contribuant à l'efficacité des politiques
économiques, aide dans un environnement international, en proie aux
crises inflationnistes à améliorer le bien-être de la
population.
S'appuyant sur le modèle de seuil de
Hansen (1999), nous supposons dans notre démarche, que la relation
entre l'inflation et la croissance économique est non linéaire et
que l'inflation a un effet négatif sur la croissance économique
au-delà du niveau seuil qui est supposé se situer entre 7 et
11%.
Pour atteindre l'objectif que nous nous sommes fixés,
nous avons organisé le présent document en deux parties. La
première partie présente la relation inflation-croissance
économique dans la pensée économique à travers un
chapitre sur les contributions des approches doctrinales sur cette question et
un second mettant en exergue l'évolution du débat qui aboutit
à un consensus. La deuxième partie s'attèle à
montrer dans une approche économétrique la relation entre
l'inflation et la croissance économique dans les pays de l'UEMOA en
faisant une analyse de la structure économique de l'UEMOA avant de
vérifier à proprement dit la nature de la relation entre ces
deux grandeurs macroéconomiques.
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