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Directeur Professeur Eric MAULIN.
L'Arctique : la problématique du prolongement du
plateau continental par les Etats côtiers.
Mémoire présenté par Mlle Meryem
QORCHI.
![](L-Arctique--la-problematique-du-prolongement-du-plateau-continental-par-les-etats-ctiers1.png)
Master II : Droit international public et
privé (section public).
Année Universitaire 2010/2011.
JE DEDIE CE MEMOIRE A :
Ma chère mère,
Affable, honorable, aimable : Tu représentes
pour moi le symbole de la bonté par excellence, la source de tendresse
et l'exemple du dévouement qui n'a pas cessé de
m'encourager.
Aucune dédicace ne saurait être assez
éloquente pour exprimer ce que tu mérites pour tous les
sacrifices que tu n'as cessé de me donner depuis ma naissance, durant
mon enfance et même à l'âge adulte.
Je te dédie ce travail en témoignage de
mon profond amour. Puisse Dieu, le tout puissant, te préserver et
t'accorder santé, longue vie et bonheur.
A la mémoire de mon défunt
Père
Aucune dédicace ne saurait exprimer l'amour,
l'estime, le dévouement et le respect que j'ai toujours eu pour
vous.
Rien au monde ne vaut les efforts fournis jour et nuit
pour mon éducation et mon bien être.
Ce travail est le fruit de tes sacrifices que tu as
consentis pour mon éducation et ma formation.
A Mes chers frères
Les mots ne suffisent guère pour exprimer
l'attachement, l'amour et l'affection que je porte pour vous.
Je vous dédie ce travail avec tous mes voeux de
bonheur, de santé et de réussite.
A tous les membres de ma famille, petits et grands et
à mes mais
Veuillez trouver dans ce modeste travail l'expression
de mon affection.
Je ne peux trouver les mots justes et sincères
pour vous exprimer mon affection et mes pensées, vous êtes pour
moi des frères, soeurs et des amis sur qui je peux compter.
En témoignage de l'amitié qui nous uni et
des souvenirs de tous les moments que nous avons passé ensemble, je
vous dédie ce travail et je vous souhaite une vie pleine de
santé et de bonheur.
REMERCIEMENTS :
A notre Professeur Eric MAULIN :
Nous avons eu le privilège de travailler parmi
votre équipe et d'apprécier vos qualités et vos
valeurs.
Votre sérieux, votre compétence et votre
sens du devoir nous ont énormément marqués.
Veuillez trouver ici l'expression de notre respectueuse
considération et notre profonde admiration pour toutes vos
qualités scientifiques et humaines.
Ce travail est pour nous l'occasion de vous
témoigner notre profonde gratitude.
TABLES DES MATIERES
INTRODUCTION
Partie I : Les aspirations des Etats à
étendre leurs plateaux continentaux arctiques :
A) Les demandes russe et norvégienne :
...................................................................................15
B) Les demandes canadienne, danoise et
américaine :
.........................................................27
Partie II : L'article 76 de la Convention de
Montego Bay de 1982 :
A) Interprétation de l'article :
..................................................................................................32
B) Le travail de la Commission des Limites du plateau
continental : ...............................39
Partie III : La protection des droits de
l'Humanité en Arctique :
A) Un patrimoine commun de l'Humanité :
.........................................................................49
B) Vers un traité sur l'Arctique :
.............................................................................................55
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
INTRODUCTION
L'océan Arctique et les mers adjacentes (mer de
Beaufort, mer de Barents, mer de Kara, mer de Laptev) constituent un espace
relativement restreint (2 000 km seulement séparent la
Sibérie du Groenland) dont le contrôle ou l'exploitation est
demeuré jusqu'à présent très limité. Certes,
cet espace a toujours revêtu un intérêt stratégique,
mais l'océan lui-même avait un intérêt
essentiellement scientifique car la majeur partie de ses eaux sont recouvertes
de glace toute l'année.
Cependant, l'intention des Etats côtiers sur la
région polaire arctique est devenue d'actualité suite à la
mission scientifique « Arktica 2007 », mise en oeuvre
par deux petits sous-marins russes le 2 aout 2007 dans le fond de
l'océan Arctique. Cette intention notamment celle, du Canada, Danemark,
Norvège, Fédération de la Russie et Etats-Unis, s'est
accentuée par le changement climatique rapide qui touche l'ensemble de
la planète. L'ampleur de ce changement a été
illustrée en 2004, dans le rapport « Impacts of a Warning
Arctic »1(*),
selon lequel le réchauffement de l'Arctique est deux fois plus
rapide que celui du reste du globe et par conséquent on assiste à
la réduction de la calotte polaire de 8% durant les 30 dernières
années.
Ce phénomène de changement climatique,
au-delà de ses effets négatifs sur la biodiversité de la
région arctique et sur la vie des populations autochtones qui
l'habitent, ouvrirait de nouvelles opportunités économiques pour
les Etats côtiers qui se montrent dans cette zone. En effet, la fonte du
pack (calotte polaire) va rendre navigable le Passage du Nord-ouest.
Il s'agit d'une voie de communication rapide entre l'océan Atlantique et
l'océan Pacifique, à travers l'Archipel arctique canadien et ceci
sans l'aide de navires brise-glace. Cependant, la navigabilité du
Passage du Nord-ouest permet de réduire de plus de 4000 milles marins le
parcours des routes de l'Europe à l'Asie ; d'un autre coté,
elle permet d'utiliser des navires plus grands que ceux qui transitent à
travers le canal de Panama. La fonte des glaces, permet d'un autre
coté, une exploitation plus facile des ressources naturelles de la
région ce qui peut avoir pour répercussion une augmentation des
avantages économiques de l'ensemble des Etats en question.
En Arctique, la question de la souveraineté des Etats
est cruciale ainsi, avec le changement climatique, les questions
énergétiques et économiques prennent une nouvelle
dimension ce qui fait apparaitre plus de revendications sur la scène
internationale. La tentative de la Russie, le 2 aout 2007, par la plantation de
son drapeau au fond de l'océan Arctique à 4 200 de fond2(*) a suscité beaucoup
d'intérêt ce qui a conduit à un vif débat et des
revendications de chaque Etat souverain de son droit. Il s'agit d'un geste
délicat du moment où les médias du monde entier ont en
parlé et ce, pour différentes raisons. On peut souligner d'abord
que la Russie a prouvé qu'elle continue à être un joueur
majeur en sciences, parce que planter un drapeau constitue un exploit
scientifique et technique incroyable. Non seulement il fallait descendre
à 4 200 mètres de profondeur sous une calotte glaciale, mais
il fallait aussi remonter au même endroit, là où se
trouvait le trou dans la glace. Ensuite, la Russie voulait également
rappeler qu'elle existe toujours comme pouvoir politique incontournable et
qu'elle entend réclamer, haut et fort, ses revendications en Arctique et
aussi mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour maintenir sa
position sur le plan international.
Bien qu'il n'existe pas un régime juridique
spécial pour l'Arctique, il existe un droit international public qui
constitue un cadre juridique pour les mers : la Convention des Nations
Unies pour le droit de la mer de 1982.
Aussi bien l'Arctique que l'Antarctique, qualifiés de
régions polaires, ne sont régis que par un seul article de cette
Convention, l'article 234. D'autres dispositions comme celles qui concernent
les mers fermées et les mers semi fermées (art. 122) ne leur sont
pas applicables en raison même de la définition desdites mers.
Par ailleurs, à l'Antarctique on trouve un texte juridique qui
régit les droits et les obligations des Etats en question, ce qui n'est
pas le cas en Arctique. Dans ce contexte, c'est durant l'année polaire
internationale (mars 2007-mars 2009) qu'en mai 2008 à Illulissat
(Groenland), que le gouvernement du Danemark invite quatre autres Etats
riverains (Canada, Norvège, Russie et Etats-Unis) dans le but d'adopter
une déclaration sur l'océan Arctique3(*). Un texte par lequel ils
s'engagent à respecter le droit de la mer, mais qui est resté
lettre morte.
C'est afin de rechercher un nouvel ordre économique
international que l'affirmation de la souveraineté nationale sur les
ressources a vu le jour. Dans son article 193, la Convention de Montego Bay,
reprend ce principe « les Etats ont le droit souverain
d'exploiter leur ressources naturelles [...] ». Un principe qui
sera de nos jours un des fondements du droit international public dans la
mesure où il va s'exercer dans le temps, de manière continue, et
dans l'espace4(*).
L'Arctique est une région polaire qui, semblable
à plusieurs autres zones géographiques, n'a fait l'objet d'aucune
définition ou délimitation généralement
acceptée, mais en principe on admet la limite du cercle polaire arctique
(66°30). En absence d'un régime international particulier et en cas
de contentieux entre les Etats côtiers, on recourt à l'application
des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de
1982 dont tous lesdits Etats font parties à l'exception des Etats-Unis.
L'ensemble des dispositions de la Convention, notamment l'article 76 sur la
définition du plateau continental, constituent une codification du droit
international général en matière de droit de la mer. Selon
cet article, la Convention met à la disposition des Etats parties la
possibilité d'étendre le plateau continental au-delà de
200 milles marins, une offre qui a généré les plus
importants contentieux entre Etats côtiers de l'océan Arctique
spécialement dans la Mer de Barents.
Le paragraphe 8 de l'article 76 de la Convention met en
exergue la procédure que les Etats côtiers doivent activer pour
réaliser les aspirations à un plateau au-delà de 200
milles. Une mission qui sera confiée à la Commission des limites
du plateau continental (CLPC) qui constitue une instance internationale dont
les fonctions sont de formuler des recommandations qui n'ont pas de
caractère obligatoire et sur lesquelles les Etats se basent pour fixer
les limites extérieures de leur plateau continental. Toutefois, ces
limites ont un caractère définitif et obligatoire, autrement dit,
l'Etat côtier ne peut pas - ultérieurement - les modifier de
façon unilatérale.
Sur la base de ces motifs, il est possible d'expliquer la
réaction rapide des autres Etats côtiers à la mission
russe. En effet, une semaine après, jour pour jour, Ottawa rappelle
à Moscou ses prétentions dans la région en
annonçant la création d'installations militaires dans
l'Extrême Nord Canadien5(*). Le Danemark ne tarde pas à réagir, le
15 aout il lance des expéditions scientifiques autour du Groenland.
Quant aux Etats Unis, ils avaient pris les devants en annonçant,
dés le 1 er aout, qu'ils suivaient « les actions des autres
pays qui défendent énergiquement leurs intérêts
nationaux »6(*)
(Partie I). Donc, le prospectif est que les tensions politiques internationales
risquent de se durcir compte tenu des intérêts économiques
en jeu et des conflits de souveraineté qui n'ont pas été
encore réglés. Elles vont en particulier se cristalliser autour
du partage équitable des ressources et du libre accès aux voies
maritimes en avançant, chaque partie, des fondements juridiques pour le
prolongement de son plateau continental sur lesquels se basera la Commission
des Limites du Plateau Continental pour remplir sa mission en cas
d'espèce et pour répondre à l'énigme de l'article
76 de la C.M.B. (Partie II).
L'Arctique, bien plus que l'Antarctique, présente un
caractère hautement stratégique. Alors que l'Antarctique est un
continent entouré de mer, l'Arctique est un océan entouré
de terre. Cependant, la réflexion juridique relative aux
conséquences du réchauffement en Arctique ne peut se confiner
à des questions de délimitation du plateau continental. Dans
l'intérêt de l'humanité toute entière,
l'élaboration d'un régime juridique protecteur de l'environnement
arctique parait essentiel (Partie III).
PARTIE I : Les aspirations des Etats à
étendre leurs plateaux continentaux arctiques.
L'article 76 de la Convention de Montego Bay prévoit
que tout Etat côtier dispose d'un plateau continental d'une largeur d'au
moins 200 milles, l'article 83, de la même convention, ajoute qu'en cas
d'une distance inférieure de 400 milles la délimitation devra se
réaliser par un accord entre les Etats concernés. Toutefois, la
largeur d'un plateau continental pourra être supérieure à
200 milles si certaines conditions sont remplies. Un Etat donné, sur la
base des dispositions de l'article 4 de l'annexe II de la Convention sur le
droit de la mer de 1982, qui revendique un plateau continental au-delà
de 200 milles doit faire part à la Commission de ses recommandations.
L'Arctique est entouré de plusieurs Etats,
actuellement deux d'entre eux disposant d'un littoral sur cet océan se
sont adressés à la Commission des limites pour déposer
leur demande qui n'ont pas été examinées par la Commission
de façon définitive et elles constituent ce qu'on peut qualifier
des demandes « pendantes », contrairement aux demandes
« à venir »7(*) des trois autres Etats concernés. Cependant, il
conviendra d'analyser en premier lieu les revendications de la Russie et de la
Norvège (A), tout en rapprochant la politique de l'une à l'autre,
et en second lieu, le position du Canada et du Danemark, d'une part, puis celle
des Etats-Unis (B), d'autre part.
A. Les demandes russe et norvégienne :
Lors de la troisième Conférence sur le droit
de la mer, le Secrétariat général des Nations Unies a
présenté une carte nautique, qu'il avait préparée,
pour montrer que la plus grande partie de l'océan Arctique le pied du
talus continental est à l'intérieur des 200 milles marins,
seulement dans la zone appelée Chukchi Cap, le pied du talus continental
d'une partie de la dorsale Mendeleyev et de toute la dorsale Lomonosov est
placée au-delà de 200 milles marins8(*). Sur cette zone de l'océan Arctique se
concentrent toutes les aspirations des Etats côtiers de la région.
Actuellement, en relation à cette région seulement la
Fédération de la Russie et la Norvège ont soumis à
la Commission des communications pour l'extension de leur plateau continental
au-delà de 200 milles marins respectivement.
Le 20 décembre 2001, la fédération de
la Russie a soumis à la Commission un dossier en application du
paragraphe 8 de l'article 76, partie VI de la C.M.B selon lequel :
« L'Etat côtier communique des
informations sur les limites de son plateau continental, lorsque celui-ci
s'étend au-delà de 200 milles marins des lignes de base à
partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale,
à la Commission des limites du plateau continental constituée en
vertu de l'annexe II sur la base d'une représentation
géographique équitable ... ».
Ainsi, le dossier présenté concernera les
limites extérieures du plateau continental de la Russie au-delà
des 200 milles marins à compter des lignes de base à partir
desquelles est mesurée la largeur de sa mer territoriale. Dans cette
communication9(*), la
Fédération de la Russie a affirmé qu'en ce qui concerne
l'océan Arctique, la dorsale Lomonossov et la dorsale Mendeleyev sont
des prolongements naturels du plateau sibérien et, donc, font partie de
plateau continental russe.
Conformément à l'article 49 du
règlement intérieur de la Commission (CLSC/3/Rev.4et Corr.1), le
Secrétaire général a adressé une note verbale
à tous les Etats Membres de l'Organisation des Nations Unies et donc aux
Etats parties à la Convention, afin de les informer des limites
extérieures du plateau continental proposées dans le dossier
soumis par la Fédération de la Russie. La liste des
coordonnées géographiques ainsi que les cartes montrant les
limites extérieures du plateau continental proposées figurent
dans la communication russe.
En vertu de l'article 2 de l'annexe II du règlement
intérieur de la Commission, l'Eta qui soumet des informations à
la Commission pour décider qu'elles resteront confidentielles et dans le
cas de la Russie on remarque clairement qu'elle a usé de cette
faculté puisque, seul un résumé de sa demande est
disponible. Il s'agit d'un résumé qui contient une carte qui
trace les revendications russes (carte 1).
Il s'agit de la première demande faite en son genre
qui porte sur un gigantesque territoire océanique ayant la forme d'un
triangle dont la base s'étend de la frontière norvégienne
à l'Ouest, au détroit de Béring à l'Est, soit au
total 1,2 millions de km10(*). A l'ouest, la frontière revendiquée
par la Russie débute par une ligne droite qui part de la
frontière terrestre entre la Norvège de la Russie, et qui
s'étire en direction du pôle Nord.
Carte 1
![](L-Arctique--la-problematique-du-prolongement-du-plateau-continental-par-les-etats-ctiers2.png)
Cette revendication est très audacieuse, elle poursuivait
la théorie des secteurs à partir du pôle, à la
quelle la Russie est très attachée mais qui n'a pas de valeur en
droit international. Cette demande a été critiquée par les
autres Etats circumpolaires qui ont invoqué des fondements
différents et ont fait parvenir leurs observations.
Les autres Etats touchés par cette demande n'ont pas
tardé à faire parvenir leurs observations11(*). Aussi bien le Canada12(*) que le Danemark13(*) ont soulevé le manque
d'information à l'appui de la demande russe. Ils ajoutent aussi que leur
silence ne peut être vu sous l'angle d'une acceptation de la dite
demande. Les deux Etats rappellent que la demande de la
fédération de Russie et les recommandations de la Commission ne
préjugent pas la question de la délimitation du plateau
continental entre le Groenland et la Fédération de la Russie, et
entre le Canada et la Fédération de la Russie. Ainsi, selon les
dispositions de l'article 9 de l'annexe II de la CMB :
« Les actes de la Commission ne
préjugent pas les questions relatives à l'établissement
des limites entre Etats dont les côtes sont adjacentes ou se font
face ».
Concernant les Etats-Unis, ils ont communiqué des
observations beaucoup plus longues et détaillées sur le plan
scientifique. S'agissant de la délimitation dans la mer de
Béring, les États-Unis semblent approuver la demande russe qui
« est fondée sur la frontière établie dans
l'Accord du 1 juin 1990 entre les Etats-Unis d'Amérique et l'Union des
Républiques socialistes soviétiques relatif au tracé de la
frontière maritime entre ces pays, bien que la Douma n'ait pas encore
ratifié ce traité »14(*).
Les Etats-Unis soulignent aussi que la référence
à cette frontière est conforme aux intérêts mutuels
et aux attentes réciproques de la Russie et des Etats-Unis et aussi
à l'article 9 de l'annexe II de la Convention précité.
Cependant, les Etats-Unis restent douteux sur la validité de la demande
russe en raison de la présence des dorsales ainsi, ils suggèrent
à la Commission de ne pas se prononcer si elle n'est pas convaincue et
de demander plus de données et d'analyses15(*).
La communication russe, examinée par la CLPC, a fait
l'objet d'un rejet. La Commission a demandé à la Russie de
présenter des données additionnelles à l'appui de sa
demande. Ainsi, dans son rapport du 8 Octobre 2002, le Secrétaire
général des Nations Unies a rendu public un résumé
de ses recommandations. Il a déclaré :
« pour ce qui est de la mer de Barents et la
mer de Béring, la Commission a recommandé à la
fédération de Russie de lui communiquer, lors de l'entrée
en vigueur des accords de démarcation des frontières maritimes
conclus avec la Norvège dans la mer de Barents et avec les Etats Unis
dans la mer de Béring, les cartes et les coordonnées des lignes
de démarcation car celles-ci constitueront les limites
extérieures du plateau continental de la Fédération de
Russie au-delà de 200 miles marins dans la mer de Barents et la mer de
Béring respectivement ». Il ajoute aussi :
« pour ce qui est de l'océan Arctique central, la
Commission a recommandé à la Fédération de la
Russie de présenter un dossier révisé concernant
l'extension de son plateau continental dans ce secteur sur la base des
conclusions figurant dans les recommandations »16(*).
Autrement dit, toujours en se basant sur l'article 76 prg. 8
de la C.M.B, la fédération de la Russie peut présenter une
nouvelle communication à la Commission et par conséquent, elle a
organisé une activité de recherche scientifique avec le but de
recueillir des données additionnelles pour les soumettre à la
Commission dont la mission « Arktica 2007 » qui a une
signification politique, puisque sur la base de la C.M.B, l'extension du
plateau continental au-delà des 200 milles marins ne peut
dépendre en aucune façon d'une occupation ou d'une proclamation
expresse par un Etat côtier.
En raison de la confidentialité de la procédure
devant la Commission, il est impossible de savoir sur quel critères
indiqués dans l'article 76 la Russie a fondé sa demande.
Toutefois, une lecture combinée des paragraphes 1 et 3
de l'article cité, on peut remarquer que la nature du prolongement
naturel du territoire terrestre est une condition nécessaire mais qui
demeure insuffisante pour son inclusion dans le plateau continental d'un Etat.
Le paragraphe 1 souligne :
« Le plateau continental d'un Etat
côtier comprend les fonds marins et leur sous-sol au-delà de sa
mer territoriale, sur toute l'étendue du prolongement naturel du
territoire terrestre de cet Etat jusqu'au rebord externe de la marge
continentale [...] », le paragraphe 3 ajoute :
« La marge continentale est le prolongement immergé de la
masse terrestre de l'Etat côtier [...] ».
Un autre problème se pose, il s'agit en fait du
caractère obscure de l'orientation de la Russie des dorsales Lomonosov
et Mendeleyev. Elles font parties de quelle catégorie juridique de
l'article 76 ?
En effet, le paragraphe 3 de cet article porte sur les
dorsales océaniques « oceanic ridges » qui, selon
ses termes, ne peuvent pas être comprises dans la définition de
marge continentale « La marge continentale [...] ne comprend ni
les grands fonds des océans, avec leurs dorsales océaniques, ni
leur sous-sol ». Prg. 3 art. 76. Mais le paragraphe 6 du
même article mentionne aussi les dorsales sous-marines
« submarine ridges » et les hauts fonds «
submarine elevations », il stipule :
« Nonobstant le paragraphe 5, sur une dorsale
sous-marine, la limite extérieure du plateau continental ne
dépasse pas une ligne tracée à 350 milles marins des
lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la
mer territoriale. Le présent paragraphe ne s'applique pas aux
hauts-fonds qui constituent des éléments naturels de la marge
continentale, tels que les plateaux, seuils, crêtes, bancs ou
éperons qu'elle comporte ».
On constate clairement que la référence
à un paragraphe plutôt qu'à un autre pèse sur la
définition de la limite extérieure d'un plateau continental, ce
qui poussera la Commission, avant de décider, de préciser ces
notions vagues, ce qui fera l'objet de la deuxième partie de ce
travail.
La Norvège, quant à elle, a soumis un dossier
de revendication à la CLPL le 27 novembre 200617(*) en vue de faire valoir ses
droits dans trois secteurs distincts18(*) (carte 2). En avril 2009, la CLPC a validé la
majeure partie de la demande norvégienne : la Lacune de Barents
dans la mer du même nom aussi appelée « Loop
Hole », l'Ouest du bassin de Nansen dans l'océan Arctique et
la Lacune en banane dans la mer de Norvège « Banana
Hole ».
Carte 2
![](L-Arctique--la-problematique-du-prolongement-du-plateau-continental-par-les-etats-ctiers3.png)
Toutefois, la Commission a indiqué que son avis portant
sur la mer de Barents ne résolvait pas la question de
souveraineté dans la zone « disputée » avec
la Russie19(*).
Une autre question relative à la communication
norvégienne regarde l'extension du plateau continental dans le Sud de la
Lacune en Banane, dans la mer de Norvège, qui pourrait peser sur la
démarcation du plateau continental entre Norvège/Svalbard et
Danemark/Groenland, d'un côté, et entre Norvège et
Danemark/Iles Féroé, de l'autre. Le 20 septembre 2006, la
Norvège, le Danemark et l'Islande ont signé un mémorandum
qui fixera la procédure et les lignes directrices, sur lesquelles ils se
sont mis d'accord, pour tracer les lignes de démarcation de la zone en
question, il s'agit de « Agreed Minutes on the Delimitation of the
Continental Shelf beyond 200 Nautical Miles between the Faroe Islands, Iceland
and Norway in the Southern Part of the Banana Hole of the Northeast
Atlantic »20(*).
Toutefois, cet accord sera conclu seulement dès que la commission aura
examinée les communications présentées par les deux pays
intéressés et par conséquent les recommandations de la
Commission seront le point de départ pour la conclusion de l'accord
final de démarcation. Dans ce même ordre d'idées, le
gouvernement danois, dans les observations à la communication
norvégienne, a donné son consentement pour que la Commission
examine la communication, en précisant que ces recommandations
données sont sans préjudice à la délimitation
future du plateau continental entre les deux Etats.
Concernant le côté nord de cette même
zone, en février 2006, la Norvège et le Danemark ont signé
avec le Groenland un accord portant sur la délimitation du plateau
continental entre le Groenland et le Spitzberg qui est entré en vigueur
le 2 juin 2006 et qui établi une démarcation à
l'intérieur de 200 milles marins, mais ils ont renvoyé la
démarcation du plateau au-delà de 200 milles marins au moment de
l'établissement de la marge extérieure du plateau
continental21(*).
La délimitation de la frontière maritime
entre la Russie et la Norvège, dans la mer de Barents, qui a bien fait
l'objet de prés de quarante années de négociations a
été résolue le 27 avril 201022(*). Ainsi, il ne s'agit pas d'une
résolution totale, puisque les deux Etats connaissent encore un
différend à propos du régime juridique de la zone du
« Traité de Svalbard », ce qui engendre plusieurs
problèmes notamment portants sur la gestion de la pêche et
l'application des régimes de protection de l'environnement. Cette
région, si elle est considérée comme intéressante
c'est bien en raison des enjeux économiques qu'elle recèle.
Le fait que la Russie et la Norvège n'ont pas
parvenu à un accord quant à la frontière entre leurs
plateaux continentaux s'explique par une raison juridique, selon laquelle
l'article 83 de la CMB ne pose pas de méthode de délimitation
précise de cet espace maritime. Cet article dispose que :
« 1. La délimitation du plateau
continental entre Etats dont les côtes sont adjacentes ou se font face
est effectuée par voie d'accord conformément au droit
international tel qu'il est visé à l'article 38 du Statut de la
Cour internationale de Justice, afin d'aboutir à une solution
équitable [...] les Etats concernés, dans un esprit de
compréhension et de coopération, font tout leur possible pour
conclure des arrangements provisoires de caractère pratique et pour ne
pas compromettre ou entraver pendant cette période de transition la
conclusion de l'accord définitif. Les arrangements provisoires sont sans
préjudice de la délimitation finale [...] ».
Une lecture de ces dispositions nous mène à dire
qu'on ne fixe que le but à atteindre avec l'article 83 et non pas une
méthode à suivre pour y arriver23(*). Autrement dit, l'article prévoit, a fin
d'aboutir à une solution équitable dans le cadre d'une
délimitation d'un plateau continental entre les Etats concernées,
il faut le faire par voie d'accord. Le but est clairement
l'équité mais quelle méthode sera utilisée,
l'article reste muet.
Tandis que la Russie est favorable à la
« solution équitable » de l'article 83 par le
recours à la théorie des secteurs (légèrement
infléchie par le régime spécial réservé au
Svalbard), la Norvège adopte l'application du principe de la ligne
médiane. Ces deux prétentions contraires conduisent à un
chevauchement des zones revendiquées. La carte 3 fait apparaitre une
« zone grise » de chevauchement. Cette région
abriterait dans son sous-sol prés de 12 milliards de barils de
pétrole et de gaze24(*).
Carte 3
![](L-Arctique--la-problematique-du-prolongement-du-plateau-continental-par-les-etats-ctiers4.png)
Le 15 septembre 2010, entre la Russie et la Norvège, a
été signé un traité concernant la
délimitation maritime et la coopération dans la mer de Barents et
l'océan Arctique. Ce traité porte sur la zone disputée,
dont la surface était de 175.000 km², qui a été
partagée et que la frontière maritime passe au milieu, soit une
solution qui est assez favorable à chacune des parties25(*). Dès lors les deux
Etats peuvent débuter l'exploitation des ressources contenues sur leurs
zones respectives de souveraineté et trouver un règlement
définitif pour la gestion de la pêche qui pose toujours
problème.
Toutefois, la manière dont la Russie et la
Norvège abordent le grand Nord est très différente car
elle dépend de leurs configurations territoriales et leurs ambitions
géopolitiques propres. Force est de souligner que la Russie est un
territoire bien plus vaste et divers que ne l'est la Norvège, ce qui
peut avoir aussi des influences sur le caractère de ses ambitions. Sur
le plan géopolitique, l'Arctique est pour la Russie un
élément au sein d'une politique beaucoup plus vaste, alors que
pour la Norvège, il est l'essentiel de ses intérêts.
La configuration du territoire norvégien en
lui-même oblige cet Etat à adopter certaines stratégies
géopolitiques particulières. Disposant d'une large exposition
maritime et d'une faible profondeur des terres, la Norvège se trouve
obligée de s'orienter vers une politique de défense
particulièrement vigilante et à la conclusion d'alliances avec
d'autres puissances maritimes pour survivre. Ainsi, les diverses politiques
lancées par la Norvège à propos du Grand Nord
n'étaient pas nouvelles, c'était plutôt leur emballage qui
était différent. Le gouvernement s'est toujours
préoccupé de ces espaces nordiques et les a toujours inclus dans
ses grandes stratégies nationales de développement.
La vision de la Norvège pour le Grand Nord est de voir
se développer la mer de Barents comme une « mer de
coopération », un projet pacifique qui inclus la
coopération et la conciliation des intérêts russes et
norvégiens26(*).
Cependant, elle mène une politique active en veillant à ses
relations de bon voisinage avec la Russie (délimitation du plateau
continental et des zones de pêches, dépollution nucléaire)
dans le but de renforcer cette coopération régionale. Dans ce
cadre, cette coopération bilatérale avec la Russie évolue
favorablement et englobe un grand éventail de domaines tels qu'en mer de
Barents, on trouve une coopération directe entre les autorités
des deux pays qui est généralement bonne. Ainsi, l'exploitation
à venir des ressources d'hydrocarbures on shore et off
shore, dans cette zone, peut constituer une base pour une
coopération économique, d'une part, et une coopération qui
portera sur les stocks halieutiques, les relations économiques, la
recherche scientifique et la gestion des pêches, d'autre part. On
remarque qu'il s'agit d'une coopération qui peut évoluer dans
tous les domaines27(*).
D'un autre côté et dans le même cadre de
la coopération régionale, on assiste à un certain nombre
d'institutions qui éprouve ce but et aussi le maintien de la
stabilité régionale. Il s'agit notamment, du Conseil de Barents
établie le 11janvier 1993 lors de la déclaration de Kirkenes,
à la suite d'une initiative norvégienne. Il a pour but de
favoriser les contacts entre les individus, et le développement
économique, ainsi que de créer de bonnes conditions pour les
échanges interrégionaux.
Ensuite, le Conseil nordique par lequel la coopération
nordique a beaucoup évolué, surtout depuis l'adhésion du
Danemark, de la Suède et de la Finlande à l'Union
européenne. Toutefois cette coopération, qui s'articule
essentiellement autour du Conseil nordique, cherche à maintenir une
collaboration informelle par des mécanismes permettant aux gouvernements
de se concerter dans les domaines essentiels. L'UE est concernée par la
région de Barents parce que la Suède et la Finlande en sont
membres, mais aussi en raison de son poids économique et politique dans
les relations globales de la Russie avec les pays occidentaux. A ce titre, l'UE
devrait développer sa coopération avec la Russie avec des
programmes déjà existants, tels que la « dimension nordique
2004-2006 », la politique de voisinage ou encore la participation aux
organismes de coopération régionale (Conseil de Barents, Conseil
régional de Barents, Conseil des Etats de la baltique, Conseil
nordique).
Enfin, le Conseil Arctique constitue un forum
intergouvernemental visant à aplanir les défis relevés par
les Etats arctiques, par exemple : protection de l'environnement et
amélioration des conditions de la vie économique, politique,
sociale et culturelle dans les pays concernés28(*).
On constate que cette coopération
multidimensionnelle et multi-institutionnelle permet à ces divers forums
d'imaginer des solutions pragmatiques aux questions soulevées avec
l'accord de toutes les parties concernées.
L'institut de Barents qui est opérationnel depuis 2006,
qui vise à devenir spécialiste des questions frontalières
et qui sera spécialisé dans la recherche sur les ressources et la
coopération dans ces régions, considère cette
région comme étant la périphérie centrale de
l'Europe.
Jusqu'ici ce n'est que la Norvège et la
Fédération de Russie qui sont les seuls Etats disposant d'un
littoral dur l'océan Arctique à avoir adressé des
notifications portant sur la délimitation de leur plateau continental
à la Commission des limites. S'ajoutera, comme on le verra un peu plus
loin, la position du Danemark et du Canada. S'agissant de celle des Etats-Unis,
la situation est différente puisque ces derniers n'ont toujours pas
ratifiés la Convention de Montego Bay.
B. Les demandes canadienne, danoise et
américaine :
Le Danemark et le Canada ont ratifié la Convention de
1982, respectivement, en 2003 et 2004. Toutefois ils n'ont pas encore fait
parvenir leurs données à la Commission des limites, mais des
communications officielles ont été faites qui laissent le
sentiment de l'existence de demandes de grande ampleur. Les Etats-Unis, quant
à eux, vu qu'ils n'ont pas encore ratifié la C.M.B en raison d'un
blocage au sein du sénat, ne peuvent faire parvenir leurs demandes et
les soumettre à la Commission.
La ratification de la C.M.B a un effet important : elle
permet à un Etat de fixer les limites extérieures de son plateau
continental au-delà de 200 milles marins (selon l'article 76 cité
ci-dessus), mais la demande doit être faite dans les dix ans suivants
cette ratification en la soumettant à la Commission des limites du
plateau continental des Nations Unies. Cependant, si un Etat ratifie la
Convention et souhaite obtenir la pleine reconnaissance internationale de
l'extension de son plateau continental au-delà de 200 milles marins
à partir des lignes de base, il doit suivre une procédure
définie à l'annexe II de ladite Convention et appliquer les
lignes directrices énoncées dans deux documents adoptés
par la Commission, il s'agit d'un ensemble de règles (Modus Operandi) et
les directives scientifiques et techniques.
Le Canada et le Danemark n'ont pas soumis leurs revendications
à la Commission mais ils devront le faire respectivement avant 2013 et
2014.
Cependant, le site des affaires étrangères du
Canada prévoit :
« Si la Dorsale Lomonosov, une chaine de
montagnes sous-marines, constitue une élévation
représentant un prolongement naturel de leur territoire terrestre, le
Canada et le Danemark/Groenland pourraient tous deux l'utiliser pour
établir les limites extérieures de leurs plateaux respectifs en
s'appuyant sur des données bathymétriques, sismiques et de
gravité. »29(*).
On remarque qu'il s'agit des revendications aussi
impressionnantes que celles de la Russie dans lesquelles les parties qualifient
la mer de Barents de prolongement immergés de la masse terrestre de leur
Etats. Ainsi, on peut remarquer qu'il est fort probable que les revendications
russes, canadiennes et danoises se chevauchent au niveau de l'océan
Arctique central.
A cet égard, le gouvernement canadien et celui de la
Russie, en affirmant « leur engagement à l'égard du
droit international, y compris le processus juridique structuré
décrit dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la
mer »30(*),
semblent vouloir remettre à la Commission la décision finale sur
la démarcation des limites respectives du plateau continental. De sa
part, le gouvernement danois, dans ses observations faites par rapport à
la communication russe, avait affirmé qu'il n'existe pas d'informations
sûres pour établir que le secteur du plateau continental
revendiqué par la Russie au-delà de 200 milles marins dans
l'océan Arctique chevauche la partie réclamée par le
Danemark.
De plus, la possibilité d'extension du plateau
continental existe déjà en droit interne. Aux termes de l'article
17 de la Loi sur les océans du Canada (L.C. 1996, ch. 31), le
plateau continental délimité par défaut à 200
milles n'exclut pas la possibilité d'un plateau continental
étendu. A cet effet, les coordonnées géographiques
peuvent, en vertu de cette loi, être fixées pour déterminer
des limites extérieures qui dépassent la ligne des 200 milles.
Cette mesure pourrait être prise par décret31(*).
Cet article prévoit :
« Le plateau continental du Canada est
constitué des fonds marins et de leur sous-sol -- y compris ceux de la
zone économique exclusive -- qui s'étendent, au-delà de la
mer territoriale, sur tout le prolongement naturel du territoire terrestre du
Canada :
c) soit, pour toute partie du plateau continental ayant
fait l'objet d'une liste de coordonnées géographiques de points
établie sous le régime du sous-alinéa 25a) (iii),
jusqu'à la ligne constituée des géodésiques reliant
ces points ».
Et l'article 25 a) (iii), de la même loi ajoute :
« Le gouverneur en conseil peut, sur la
recommandation du ministre des Affaires étrangères, prendre des
règlements : a) pour fixer les coordonnées géographiques
de points permettant de déterminer :
(iii) La limite extérieure de la zone
économique exclusive ou du plateau continental dans les secteurs
désignés par règlement où il estime que
l'application des alinéas 13(1)a) ou 17(1)a) ou b) entraînerait un
empiétement sur la mer territoriale d'un autre État ou sur un
espace maritime assujetti aux droits souverains d'un autre État,
placerait la limite à un endroit trop proche du littoral d'un autre
État ou serait inopportune pour quelque autre raison
[...] ».
Afin de pouvoir appliquer les critères de l'article 76
de la C.M.B, la Canada a lancé un programme de relevés
bathymétriques et sismiques. Une carte est fournie sur le site des
affaires étrangères du Canada qui représente l'ensemble du
programme de l'Arctique pour la période 2007-2012 (carte 4). Selon une
étude préliminaire, le Canada pourrait revendiquer un plateau
continental au-delà de 200 milles, comme indiqué sur la carte.
Ces revendications peuvent s'étendre jusqu'au large de l'Alaska32(*), ce qui attise la
méfiance des Etats-Unis.
Le Danemark et le Canada ont élaboré leurs
programmes de recherche. Le premier, en lançant le programme Danish
Continental Shelf Project33(*), et le second, par sa mise en oeuvre d'un
programme pour soutenir les projets de recherche étatique ou
privée, qui est appelé Polar Continental Shelf
Project34(*). Les
deux Etats ont aussi réalisé des expéditions
scientifiques, avec missions communes, dans la région arctique en
question.
Carte 4
Programme canadien de l'Arctique pour la période
2007-2012
![](L-Arctique--la-problematique-du-prolongement-du-plateau-continental-par-les-etats-ctiers5.png)
Parmi les cinq Etats côtiers de l'océan Arctique,
seuls les Etats Unis ne sont pas partie à la Convention de Montego
Bay.
Portant, la pression pour obtenir la ratification est assez
forte. Le Président G. W. Bush avait, en 2004, désigné la
Convention comme l'un des cinq traités dont l'approbation par le
Sénat est urgente. Durant la même année, le comité
des relations étrangères du Sénat américain a
recommandé au Sénat par neuf voix contre zéro de ratifier
ladite convention. Ainsi, force est de rappeler qu'il existe un lobbying
très important de la part des industriels et des associations
écologistes pour que la Convention sur le droit de la mer de 1982 soit
ratifiée.
Le sénateur américain R. G. Lugar met en
évidence :
«Russia is already making excessive claims in the
Arctic. Unless we are party to the Convention, we will not be able to protect
our national interest in these discussions.»35(*)
Durant une réunion des cinq Etats côtiers de
l'Arctique, à Illulissat le 28 mai 2008, J. Negroponte, numéro
deux du département d'Etat américain, a annoncé que les
Etats-Unis pourraient ratifier la C.M.B en 2009 et durant sa compagne, le
Président B. Obama s'est engagé à ratifier cette
Convention. Il en résulte qu'il est urgent que les Etats-Unis prennent
place à la table de l'océan Arctique36(*) puisque la première
puissance mondiale ne peut pas faire valoir ses recommandations sur le plateau
continental à la Commission et ne peut, non plu faire partie de cette
dernière.
Toutefois, l'absence des Etats-Unis, comme partie à la
Convention sur le droit de la mer, ne les empêche pas de soumettre et
faire parvenir leurs commentaires sur les revendications
présentées par les autres Etats. L'Arctique, est traversé
par de nombreuses dorsales, sur lesquelles (une grande partie) la Russie
revendique des droits souverains. En réponse à ces demandes, les
Etats-Unis contestent l'étendue des droits russes sur ces dorsales.
Cependant, le manque de clarté de l'article 76 de la
Convention de Montego Bay de 1982 ne fait que rendre la problématique
des droits des Etats sur les dorsales plus compliquée. En premier lieu,
cet article semble exclure les dorsales de la marge continentale, et en second
lieu, il parait autoriser les Etats à exercer leurs droits souverains
sur une dorsale jusqu'à 350 mille.
PARTIE II : L'article 76 de la Convention de
Montego Bay
Comme on l'a bien vu dans une première
partie, chacun des Etats côtiers de l'océan Arctique à
l'intention de déposer une demande à la Commission à fin
de matérialiser sa volonté de prolonger son plateau continental.
Ce droit de prolonger son plateau continental est prévu par la
Convention sur le droit de la mer de Montego Bay de 1982, tout
particulièrement par les dispositions de l'article 76.
Il s'agit d'un article qui a connu une certaine
ambigüité, mais aussi qui a fait l'objet de plusieurs travaux, par
des auteurs, concernant son interprétation (A). Toutefois, la
Commission, l'organe commérèrent pour traiter les demandes de
prolongement des plateaux continentaux, ne peut rester à l'écart
de cette question et doit aussi faire parvenir son travail et ses propos (B).
A. Interprétation de l'article :
La valeur des ressources minérales a rendu essentielle
la détermination des règles juridiques précises
édictées pour la réalisation d'une sécurité
juridique. Cette mise en oeuvre de ces règles relève d'un grand
arsenal juridique, il s'agit notamment :
· Les actes unilatéraux, tels la proclamation
Truman sur le plateau continental du 28 septembre 1945 et aussi les
différents textes et législations qui ont suivi cette date et
jusqu'à la première Conférence de Genève ;
· Les sources conventionnelles, on trouve la Convention
de 1958 sur le plateau continental ou celle de 1982 sur le droit de la mer et
précisément dans sa partie VI ;
· Les sources coutumières ;
· La jurisprudence, qui est le berceau de la
matière par sa richesse et qui a participé d'un droit
coutumier.
Le plateau continental se distingue des autres zones maritimes
en ce qui est un prolongement naturel, une attache naturelle si on reprend le
terme de Laurent LUCCHINI37(*). Qu'il s'agisse de la mer territoriale, de la zone
contiguë, de la zone économique exclusive ou de la haute mer, sont
des créations juridiques dépourvues de toute sorte d'attache
naturelle, alors que le plateau continental est ancré dans une
réalité physique38(*).
L'article 76 de la Convention de Montego Bay se qualifie par
sa complexité mais aussi par l'impressionnisme de ses règles.
Avec cet article, on se trouve placé face à une particularisation
de la règle de droit, à son individualisation39(*). Autrement dit, les
règles sont bien appelées à s'appliquer à des
situations particulières, pour cela, elles ont été
diversifiées pour bien s'accorder avec lesdites situations.
L'évolution profonde de la définition du plateau
continental et celle que reflète l'article 76 concerne à la
fois : les titres juridiques que l'Etats côtier peut détenir
sur ce plateau, le point qui sera examiné dans ce travail, d'un
côté, et la méthodologie et les techniques propres à
la fixation des limites extérieures de celui-ci.
En principe, le pouvoir que possède l'Etat côtier
de faire valoir un titre est une condition indispensable à toute
prétention ayant pour but l'exercice de souveraineté ou des
droits souverains sur une zone maritime déterminée.
Il est évident, toutefois, de rappeler que ce titre sur
un ou des espaces maritimes a comme base juridique la souveraineté que
l'Etat côtier exerce sur son territoire terrestre.
A ce titre on peut rappeler l'arrêt redu 18
décembre 1951 concernant l'affaire des Pêcheries
anglo-norvégiennes de la Cour Internationale de Justice, qui souligne
que :
« C'est la terre qui confère à
l'Etat riverain un droit sur les eaux qui baignent ses
côtes »40(*).
Ou encore, dans l'affaire sur le plateau continental de la Mer
du Nord, arrêt de 1969 rendu aussi par la CIJ :
« Le droit de l'Etat riverain sur son plateau
continental a pour fondement la souveraineté qu'il exerce sur le
territoire [...] »41(*).
Selon les dispositions de la Convention de 1958 :
« [...] l'expression plateau continental est
utilisée pour désigner le lit de la mer et le sous-sol des
régions sous-marines adjacentes aux côtes, mais situées en
dehors de la mer territoriale, jusqu'à une profondeur de 200
mètres ou, au-delà de cette limite, jusqu'au point où la
profondeur des eaux sur jacentes permet l'exploitation des ressources
naturelles desdites régions [...] ».
Si on analyse cet article, on constate qu'il met en
évidence un double critère : d'abord, un critère
fixe, qui est celui de l'isobathe des 200 mètres ; ensuite, un
critère évolutif, qui est celui de
l'exploitabilité42(*).
Sur ce second critère il y avait une grande
réticence des Etats en raison que cette exploitation ouvrait la voie
à une appropriation progressive des fonds marins, et c'est d'ailleurs
pour palier cet inconvénient, entre autres, que la troisième
conférence des Nations Unies sur le droit de la mer a été
organisée.
Par conséquent, on a admis un zone économique
exclusive d'une largeur de 200 Milles marins ce qui peut nous poser un
dilemme :
· Soit qu'on adopte la solution de l'unité,
c'est-à-dire intégration du plateau continental dans la ZEE de
200 milles marins ;
· Soit qu'on est pour la solution de dualité,
c'est-à-dire maintien de l'autonomie du plateau par rapport à la
nouvelle zone, ce qui pourra donner une possibilité d'un
élargissement au-delà des 200 milles.
Quant à la CMB de 1982, l'article 76 exprime le titre
alternatif que peut posséder un Etat sur le plateau adjacent à
ses côtes. Ce sont certes, deux titres différents de ceux
établis par la Convention de Genève, mais, comme ceux
prévus par la Convention de 1958, l'un est à limite fixe, et
l'autre, à limite variable.
Selon l'article 76, prg. 1 :
« jusqu'à 200 milles marins des lignes de base à
partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale, lorsque
le rebord externe de la marge continentale se trouve à une distance
inférieure ».
Ce titre peut être exercé à partir de la
limite extérieure de la mer territoriale, même si le calcul de la
distance des 200 milles est effectué à partir des lignes de base.
Cette distance est de nature conventionnelle, alors il s'applique aux Etats
parties à la Convention de 1982. Mais, la Cour Internationale de Justice
a estimé qu'il possédait aussi une valeur coutumière.
C'est ce qu'elle a souligné dans son arrêt de 1985 dans le litige
du plateau entre Malte et la Libye43(*), en prévoyant :
« Le critère de distance doit
dorénavant s'appliquer au plateau continental comme à la zone
économique exclusive, et cela indépendamment de la disposition
relative à la distance au paragraphe 1 de l'article
76 »44(*)
.
En d'autres termes, la distance étant ainsi reconnue
comme une règle coutumière est de ce fait opposable à
l'ensemble des Etats , qu'ils soient parties ou non à la Convention de
1982 et en l'occurrence aux Etats-Unis qui n'ont pas encore signé ladite
Convention.
Si on part du point du départ à savoir, la
proclamation Truman de 1945 sur le plateau on trouve la citation
suivante : « le plateau continental peut être
regardé comme l'extension de la masse terrestre de la nation
riveraine », on constate alors la naissance, bien que
discrète, de la notion de prolongement naturel. D'un autre
côté, dans le paragraphe 1 de l'article 76 nous donne une
définition plus claire :
« Le plateau continental d'un Etat côtier
comprend les fonds marins et leur sous-sol au-delà de sa mer
territoriale, sur toute l'étendue du prolongement naturel du territoire
terrestre de cet Etat jusqu'au rebord externe de la marge continentale, ou
jusqu'à 200 milles marins des lignes de base à partir desquelles
est mesurée la largeur de la mer territoriale, lorsque le rebord externe
de la marge continentale se trouve à une distance
inférieure ». Ainsi se poursuivent l'ensemble des
dispositions de cet article dans ces éléments de
définition à part le paragraphe 10.
La remarque qui peut bien être faite à ce niveau
est celle concernant la naissance d'un titre aura pour conséquence de
dissocier, au-delà des 200 milles, le régime appliqué aux
fonds marins sur lesquels peuvent s'exercer des droits souverains de l'Etat
côtier et le régime de la colonne d'eau surplombant ces fonds
demeurera celui de la haute mer.
On peut se poser une question, cette marge continentale, quels
sont les éléments qui la composent ? Le paragraphe 3 du
même article vient amener une réponse en précisant
que :
« La marge continentale est le
prolongement immergé de la masse terrestre de l'Etat côtier; elle
est constituée par les fonds marins correspondant au plateau, au talus
et au glacis ainsi que leur sous-sol. Elle ne comprend ni les grands fonds des
océans, avec leurs dorsales océaniques, ni leur
sous-sol », et c'est là où consiste le grand
débat.
A première vue, cette disposition est
intéressante à un double titre :
D'abord, elle trace la ligne limite45(*) entre les
éléments scientifiques et juridiques. En effet, le plateau
continental est une composante, parmi d'autres, de la marge continentale, mais
en même temps - au sens juridique - l'ensemble physique jusqu'au rebord
externe de la marge constitue ce plateau continental.
Ensuite, ce paragraphe exclut « les dorsales
océaniques » de la marge continentale. Mais si on consulte le
paragraphe 6, celui-ci, il sous entend que « les dorsales sous
marines » peuvent faire partie du plateau continental. Ce dernier
paragraphe souligne que, la limite des 100 milles au-delà de l'isobathe
2 500 ne peut pas être utilisée sur ces « dorsales
sous-marines », mais que les « haut fonds qui constituent
des éléments naturels de la marge continentale »
continuent de bénéficier des deux limites. Le problème qui
rend la problématique plus délicate c'est aucune de ces trois
élévations n'est définit dans la Convention de 1982.
Dans un dictionnaire scientifique, pour les dorsales
océaniques, c'est la définition suivante qui est
donnée :
« Un relief dépassant du fond des
océans, atteignant quelques centaines de kilomètres de large ou
plus et serpentant sur le fond sur 60 000 km de longueur. Les dorsales
océaniques dominent les plaines abyssales de 2 000 à
3 000 m et leurs sommets sont couverts par environ la même
épaisseur d'eau »46(*).
S'agissant de l'expression dorsale sous-marine, elle ne figure
pas dans un dictionnaire scientifique, puisqu'elle n'est pas un terme
scientifique. En effet, l'Organisation Hydrographique Internationale (OHI) a
définit le terme:
« [a submarine ridge is an] elongated elevation
of the sea floor, with irregular or relatively smooth topography and steep
sides »47(*).
Quant à la dorsale océanique, l'OHI la
définit comme:
«A long elevation of the deep ocean floor with
irregular or smooth topography and steep sides ».
Les deux définitions sont très proches l'une
à l'autre, et la différence entre les deux catégories de
dorsales semble difficile à détecter. C'est dire que les
définitions données par l'OHI ne nous éclairent par
vraiment. La seule différence qu'on pourrait bien souligner concerne la
localisation des différentes dorsales. Les dorsales océaniques
seraient dans les grands fonds des océans tandis que les dorsales
sous-marines se situeraient dans le fond de la mer.
Cependant pour bien comprendre la présence de dorsales,
un bref examen des travaux préparatoires à la Convention de 1982,
semble indispensable.
Au sein de la troisième conférence des Nations
Unies sur le droit de la mer, la question sur la définition de la limite
extérieure du plateau continental a été attribuée
au groupe de négociation 6, vu qu'il y en avait sept au total.
L'auteur B. H. Oxman, dans son article qui date de
198048(*), a fait une
remarque qui repose sur le fait que la disposition qui fait
référence à ce que la marge continentale ne comprend ni
les grands fonds des océans ni leur sous-sol (les dorsales
n'étaient pas encore mentionnée), lorsque l'article 76
n'était qu'une simple ébauche, avait une note de bas de page qui
mettait en exergue que les Etats se mettraient plus tard d'accord sur la
question des « dorsales océaniques
sous-marines »49(*). En analysant cette note, Oxman a souligné
que la formulation sous-entend les dorsales de type océanique, qui sont
évidemment différentes de celles sous-marines, autrement dit, il
s'agit des dorsales qui ont les mêmes caractéristiques que les
grands fonds des océans et leurs sous-sols.
Cet auteur poursuit en expliquant que les négociations
prévues dans la note de bas de page ont été accomplies
dans la première partie de la neuvième session50(*). Le principe selon lequel la
marge continentale n'inclut pas « les grands fonds des
océans » a été clarifié par l'addition
des mots « avec leurs dorsales océaniques », ce qui
veut dire que la limite extérieure du plateau continental dans ce cas
est de 200 milles. On remarquera aussi que l'adjectif
« sous-marine » qui figurait dans la note de bas de page a
disparu dans la version finale du paragraphe 3 de l'article 76.
Durant les négociations, il y a eu plusieurs
propositions, de la part des Etats participants, pour la formulation de
l'article 76. Parmi ces propositions on peut citer celle de l'URSS qui semble
être intéressante : l'URSS s'intéressait à la
formule « la marge continentale n'inclut pas les grands fonds des
océans avec leurs dorsales océaniques ... », elle
l'a trouvait insuffisante pour éviter la creeping jurisdiction
sur les dorsales, un phénomène qui consisterait pour un Etat
à utiliser les dorsales pour étendre son plateau continental
jusqu'au milieu de l'océan, ce qui selon l'URSS pouvait gêner la
navigation et autres activités ne reposant pas sur les ressources.
Un autre auteur, A. S. Meese a expliqué qu'un compromis
entre les intérêts de l'URSS et ceux des Etats disposant d'une
large marge a été trouvé à l'article 76 paragraphe
6 :
« Nonobstant le paragraphe 5, sur une dorsale
sous-marine, la limite extérieure du plateau continental ne
dépasse pas une ligne tracée à 350 milles marins des
lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la
mer territoriale. Le présent paragraphe ne s'applique pas aux
hauts-fonds qui constituent des éléments naturels de la marge
continentale, tels que les plateaux, seuils, crêtes, bancs ou
éperons qu'elle comporte ».
La première phrase de ce paragraphe est incluse pour
répondre à la crainte de l'URSS sur la creeping jurisdiction.
Sur les dorsales sous-marines, la limite de l'isobathe 2 500 n'est
pas applicable. La deuxième phrase a été
insérée pour les Etats ayant une marge continentale
étendue et qui voulaient profiter au maximum de la largeur de leur
marge, sans que la présence de « hauts-fonds qui constituent
des éléments naturels de la marge continentale » ne les
empêche de profiter de la limite de l'isobathe de 2 50051(*).
Cependant, en se basant et se référant aux
différentes propositions des Etats, on verra bien que l'expression
« dorsale océanique » semble signifier
« dorsale située dans les grands fonds des océans et
formée de croûte océanique ».
S'agissant de la notion de « dorsale
sous-marine », elle semble faire référence à des
dorsales qui ne sont pas dans les grands fonds des océans mais qui sont
le prolongement naturel du territoire terrestre de l'Etat et qui peuvent donc
faire partie de la marge continentale. En effet, comme sur ces dorsales la
limite de l'isobathe 2 500 mètres peut repousser la
frontière très loin, les rédacteurs ont
décidé d'imposer la limite des 350 milles afin d'éviter la
creeping jurisdiction.
Quant aux « hauts-fonds qui sont des
éléments naturels de la marge continentale », ils sont
des élévations qui ne sont pas dorsales, ils font partie de la
marge continentale, et ils peuvent être utilisés pour appliquer la
limite contraignante des 100 milles au-delà des 2 500 mètres
de profondeur52(*).
L'article 76 met en oeuvre une réelle énigme que
les auteurs sont restés impuissants pour la résoudre de
manière convaincante. Et par conséquent, la Commission des
Limites de Plateau Continental sera obligée d'y apporter une
réponse puisque, comme on le sait, l'océan Arctique est
traversé par de nombreuses dorsales (carte 5). De cela, la question est
loin d'être écartée et par conséquent elle fera
l'objet d'analyse du prochain paragraphe.
B. Le travail de la Commission des Limites du Plateau
Continental (CLPC) :
L'article 76, paragraphe 8 de la Convention de 1982 affirme
que :
« L'Etat côtier communique des
informations sur les limites de son plateau continental, lorsque celui-ci
s'étend au-delà de 200 milles marins des lignes de base à
partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale,
à la Commission des limites du plateau continental constituée en
vertu de l'annexe II sur la base d'une représentation
géographique équitable. La Commission adresse aux Etats
côtiers des recommandations sur les questions concernant la fixation des
limites extérieures de leur plateau continental. Les limites
fixées par un Etat côtier sur la base de ces recommandations sont
définitives et de caractère obligatoire ».
Carte 5
![](L-Arctique--la-problematique-du-prolongement-du-plateau-continental-par-les-etats-ctiers6.png)
La procédure pour l'examen d'une communication
présentée par un Etat au but de l'extension de son plateau
continental est réglementée par l'Annexe II de la
Convention et c'est la Commission des limites du plateau continental qui
est l'organe chargé de cet examen. Il s'agit d'un organe technique qui
n'exprime pas la volonté des Etats parties à la Convention et qui
comprend 21 membres, experts en matière de géologie , de
géophysique ou d'hydrographie, élus par les Etats parties
à la Convention parmi leurs ressortissants et qui exercent leurs
fonctions à titre individuel53(*). Ainsi, l'organisation du travail de cette Commission
est disciplinée par le Modus Operandi de la commission et le
Règlement intérieur de la commission.
Selon l'article 4 de l'Annexe II affirme que l'Etat
côtier qui se propose de fixer la limite extérieure de son plateau
continental au-delà de 200 milles marins doit soumettre une
communication dans un délai de 10 ans à compter de
l'entrée en vigueur de la Convention pour cet Etat.
Cependant, la Réunion des Etats parties à la
Convention a établi que : « dans le cas d'un Etat
Partie pour lequel la Convention est entrée en vigueur avant le 13
mai 1999, il est entendu que le délai de 10 ans visé à
l'article 4 de l'Annexe II de la Convention est considéré comme
ayant commencé le 13 mai 1999 »54(*). Ce délai de 10 ans est
toutefois contesté par divers Etats, en particulier les pays en voie de
développement, qui n'ayant pas les moyens technologiques et les
connaissances scientifiques nécessaires, ont une difficulté
à recueillir des données suffisantes pour présenter une
communication à la Commission.
La question est d'une importance particulière parce
que, s'il est vrai que les droits d'un Etat côtier sur le plateau
continental sont indépendants de l'occupation effective ou fictive,
aussi bien que de toute proclamation expresse, l'Etat côtier
intéressé qui ne présente pas une communication à
la Commission pour l'extension de son plateau continental au-delà de 200
milles marins ne pourrait pas exercer ses droits sur cette portion du plateau
continental. La solution dans ce cas est bien la suivante : la
présentation des communications partielles afin de respecter le
délai de 10 années, mais étant entendu que des
données complémentaires pourraient être communiqués
à la Commission successivement.
Il semble raisonnable d'affirmer, même si la Convention
est silencieuse sur ce point, que dans l'hypothèse qu'un Etat laisse
passer le délai de 10 ans, le même Etat serait privé du
droit de fixer la limite extérieure de son plateau continental
au-delà de 200 milles marins. En effet, une telle interprétation
répondait à l'esprit même de la Convention, qui laisse
à l'Autorité internationale des fonds marins l'administration des
ressources des fonds marins au-delà des juridictions des Etats
côtiers dans l'intérêt de l'humanité.
Par une première lecture et en raison de la
règle sur le délai de 10 années, on peut bien soutenir que
la Commission est compétente à recevoir seulement les
communications rédigées par les Etats partie à la
Convention. D'ailleurs, selon une lecture systématique de la Convention,
on peut en déduire, clairement, que si la Convention a
décidé de donner des droits à des sujets autres que les
Etats contractants elle l'a fait explicitement.
Dans ce cas, l'Etat côtier intéressé doit
présenter la communication par l'entremise du Secrétariat
général des Nations Unies. Sur la base de l'article 50 du
Règlement intérieur, le Secrétaire général
avise la Commission et tous les membres des Nations Unies, notamment les
Etats parties à la Convention, de la réception, en rendant
publique le résumé de la communication et toutes les cartes
marines et les coordonnées de la nouvelle limite extérieure du
plateau continental. Ces formes de publicité de la communication sont
censées favoriser la présentation d'observations par les autres
Etats intéressés, sans distinction entre Etats contractants et
Etats non contractants, toutefois, l'examen de la demande sera confidentiel et
seulement à la présence des représentants de l'Etat
côtier requérant55(*).
La Commission fait une évaluation purement technique de
la communication et, dans ce but, elle va élaborer un document - les
Directives scientifiques et techniques de la Commission - où les
données que les Etats côtiers doivent présenter et les
modalités pour les apprécier sont indiquées. Toutefois, il
faut imaginer que, si le respect des Directives dans la présentation
d'une communication n'est pas un critère d'admission pour
l'évaluation de la demande par la Commission, les Directives mêmes
peuvent être utilisées par la Commission pour interpréter
les termes techniques de l'article 76.
En se basant sur le point 4 de l'Annexe I du Règlement
intérieur, deux ou plusieurs Etats côtiers, qui ont un
différend, peuvent s'entendre pour présenter à la
Commission des demandes conjointes ou individuelles, comme ce fait le cas pour
la demande du 19 mai 2006, présentée par la France, l'Irlande,
l'Espagne et le Royaume Uni en relation à l'extension du plateau
continental dans la zone de la Mer Celtique et du Golfe de Gascogne56(*). Par contre, selon le point 5,
a) du même Annexe, dans le cas où il existerait un
différend terrestre ou maritime, le Commission ne peut pas examiner la
demande présentée par un Etat partie à ce
différend, à moins d'un accord préalable de tous les Etats
parties au différend. Dans ce cadre, on peut citer l'exemple de la
Norvège qui a donné son consentement à la CLCS pour
examiner la communication de la Fédération de Russie du 20
décembre 2001, qui intéresse, entre autres, une demande
d'extension du plateau continental dans la zone disputée de la Mer de
Barents.
L'interprétation de cette norme est, toutefois,
douteuse, parce qu'il n'est pas clair si l'assentiment d'un Etat partie au
différend qui n'est pas partie à la Convention est aussi
nécessaire. Selon la pratique limitée de la Commission, on trouve
qu'elle met en évidence le fait de ne pas prendre de décisions en
attendant la solution de la question à travers la négociation
directe entre les Etats intéressés.
Ce qu'on vient de voir jusqu'à présent, c'est
quelques éléments techniques et organisationnel de la Commission,
et il est temps de passer à l'interprétation de cette Commission
de l'article 76 de la Convention, sachant bien que la dite commission avait
bien compris il y a longtemps que cet article allait poser problème et
elle a tout publié dans ses « directives scientifiques et
techniques » qui date du 13 mai 199957(*).
Dans le but de ramener son apport sur la question, la
Commission va d'abord, étudier cas par cas tout en commençant par
l'analyse de la communication de la Fédération de Russie.
La commission commence d'abord par nous faire part de
l'ampleur des incertitudes soulevées par les dispositions de l'article
76 :
« Aucun des termes n'est défini de
façon précise. Le terme « dorsale » semble
avoir été choisi intentionnellement, mais le lien entre
« les dorsales océaniques » du paragraphe 3 et
« les dorsales sous-marines » du paragraphe 6 n'est pas
clair. Les deux expressions sont à distinguer du terme
« hauts-fonds » employé au paragraphe 6. Elle
rappelle aussi que ces distinctions ne doivent pas se baser sur les
appellations et noms géographiques utilisés jusqu'à
présent, en raison de leur caractère flou, mais sur la base des
éléments d'appréciation scientifique.
Ensuite, la Commission passe à une
énumération des différents types de
dorsales :
« Les dorsales existant dans la mer peuvent
résulter de différents processus géologiques. On distingue
notamment :
1- Les dorsales formées par l'expansion du plancher
océanique et les processus extrusifs et intrusifs volcaniques et
magmatiques qui y sont associés ;
2- Les dorsales nées le long des failles
transformantes, qui font partie intégrante du processus d'expansion des
fonds océaniques ;
3- Les dorsales nées d'une activité
tectonique ultérieure s'étant traduite par une surrection de la
croûte océanique ;
4- Les dorsales résultant d'un volcanisme
lié au mouvement de la croûte au-dessus d'un point chaud.
Celles-ci sont généralement composées de reliefs
volcaniques ou monts sous-marins soudés et apparaissent
généralement sur la croûte océanique ;
5- Les dorsales formées par l'interaction des
plaques océaniques ;
6- Les dorsales créées par un sur volcanisme
régional lié à des panaches anormalement chauds dans le
manteau ;
7- Les dorsales associées aux frontières de
plaques actives et à la création de système d'arcs
insulaires. Celles-ci peuvent se présenter sous la forme d'arcs
volcaniques actifs ou inactifs (résiduels) ainsi que d'arcs externes ou
internes. Elles témoignent généralement des
différentes étapes de la formation des systèmes d'arcs
insulaires et peuvent être la résultante de variation de facteurs
tels que la vitesse et la direction de la convergence, ainsi que la nature de
la plaque en subduction ;
8- Les dorsales nées d'une déchirure
lithosphérique (étirement et amincissement) de la croûte
continentale. Ce processus aboutit généralement à des
formes de relief plus larges, tels que les plateaux et les massifs marginaux,
mais crée parfois d'étroits lambeaux de croûte continentale
séparés par des fragments de croûte océanique ou de
croûte continentale très étirée ».
Cette liste, faite par la Commission, comme elle-même
l'a indiqué, n'est pas exhaustive. Ainsi, si on tient compte du
critère de la composition crustale des dorsales, les cinq
premières catégories de dorsales énumérées
par la Commission, composées de roches basaltiques océaniques,
sont des dorsales océaniques, alors que les trois autres
dernières n'en sont pas. Mais la Commission souligne que ce
critère ne suffit pas alors on va devoir faire appel à d'autres
critères. En d'autres termes, les dorsales des cinq premières
catégories, qui correspondent en principe aux dorsales
océaniques, celles de catégorie 2 et 3 sont parfois difficiles
à classer.
La Commission ajoute un élément
intéressant58(*) :
« Des îles peuvent exister sur certaines
dorsales [...] auquel cas il serait difficile de considérer que ces
parties de la dorsale appartiennent aux grands fonds ».
Une lecture de cette disposition nous mène à
dire qu'une dorsale qui remonte à la surface pour former une île
ne pourrait pas être une dorsale océanique, puisqu'elle ne serait
pas située dans les grands fonds. Il s'agirait donc d'une dorsale
sous-marine. Cette interprétation donnerait raison à l'Islande
qui considère la dorsale Reykjanes comme une dorsale sous-marine.
Cependant, la commission a précisé dans son
rapport qu'elle se basera sur des considérations scientifiques et
juridiques telles que le prolongement naturel du territoire terrestre, la
morphologie des dorsales et leur rapport avec la marge continentale et vu que
la question est délicate, la Commission s'est décidée
qu'elle va examiner cas par cas « tous les cas de figure
étant difficiles à prévoir dans le détail, la
Commission juge approprié d'examiner la question des dorsales au cas par
cas ».
A ce niveau la Commission se trouve confrontée
à plusieurs cas, notamment celui de la Fédération de la
Russie, qui met en jeu des dorsales. Après le dépôt de la
communication russe les Etats-Unis on fait parvenir leur observation et ils
commencent par rappeler que le paragraphe 3 de l'article 76 dispose que :
« La marge continentale est le prolongement
immergé de la masse terrestre de l'Etat côtier [...] elle ne
comprend ni les grands fonds des océans, avec leurs dorsales
océaniques, ni leur sous-sol ».
Ils militent d'abord clairement en faveur du caractère
océanique, selon leurs critiques, de la dorsale Alpha-Mendeleyev
revendiquée par la Russie, ensuite, ils examinent sans pour autant
présenter plus de données que pour la première dorsale, la
dorsale Lomonosov en indiquant qu'elle ne fait pas partie des marges
continentales ni de la Russie ni d'aucun autre Etat. Cette position sous entend
que les Etats-Unis rejettent ab initio une éventuelle
prétention canadienne ou danoise sur la dorsale Lomonosov.
S'agissant de leur position concernant les dorsales
sous-marines, les Etats-Unis affirment que : « La question
des rides est rendue plus complexe par la disposition du paragraphe 6 de
l'article 76, qui fait mention des « rides sous-marines ».
A ce sujet, le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique croit comprendre
que la Russie ne s'est pas fondée sur la première phrase de ce
paragraphe pour déterminer la limite extérieure du plateau
continental au-delà de 200 milles marins. En outre, cette disposition ne
pourrait pas être appliquée en l'espèce ».
C'est dire que les Etats-Unis évacuent la question des dorsales
sous-marines sans donner de fondements ou d'explications précis à
leurs propos.
Le Vice-ministre des ressources naturelles de la
Fédération de Russie dans sa réponse à la
déclaration des Etats-Unis, a précisé que la Russie fonde
toute son argumentation sur l'origine continentale des dorsales Lomonosov et
Mendeleyev. Effectivement il est généralement admis que la
dorsale Lomonosov a une origine continentale59(*). La Division des affaires maritimes des Nations Unies
a interprété l'article 76 en précisant que si la dorsale
Lomonosov, ou une partie de cette dorsale, est située à
l'intérieur de l'enveloppe de la marge continentale, tracée
à partir du pied du talus continental, il y a toute chance qu'elle soit
considérée comme une dorsale sous-marine susceptible
d'étendre la largeur de plateau continental russe.
Quant à la dorsale Mendeleyev, elle est beaucoup moins
connue, donc son origine est contestée60(*). Les géologues se divisent entre ceux qui
disent que c'est une formation d'origine océanique et ceux qui affirment
qu'elle est en partie continentale. Mais la Commission, dans son rapport, a
bien affirmé qu'il n'est pas certain que l'origine crustale d'une
dorsale soit déterminante pour exclure une dorsale de la marge
continentale d'un Etat.
On constate que les critères donnés par la
Commission de limites sont insuffisants pour répondre aux demandes des
Etats, et on ne peut pas tirer de conclusions sur le cas des dorsales
Mendeleyev et Lomonosov. Cependant, la question qui se pose est celle du
rôle de la Commission, ce groupe composé de scientifiques a
été mis en oeuvre afin de réponde à une situation
scientifique par des réponses juridiques. Or, à la question
« pensez-vous que les dorsales Lomonosov et Mendeleyev font partie de
la marge continentale de la Russie ? », un géologue a
répondu « Not a geological question, this is
politics ! »61(*). On constate alors qu'on revient toujours au
caractère politique de la problématique.
PARTIE III : La protection des droits de
l'Humanité en Arctique.
La Souveraineté permanente des Etats sur leurs
ressources naturelles est doublement encadrée par le droit international
public : d'un côté par le droit de la mer qui est un outil
à appliquer, et d'un autre côté, par le droit de
l'environnement qui reste un outil à développer.
L'idée de préserver les droits de
l'humanité en Arctique n'est pas nouvelle. Elle trouve une nouvelle
raison d'être face aux menaces qui pèsent aujourd'hui sur la
région.
Les intérêts de l'humanité sont à
préserver en deux sens. Le premier, porte sur la militarisation de
l'Arctique et par conséquent le désarmement de l'Arctique
apparait comme une « préoccupation commune à
l'humanité »62(*). Le second, concernera l'intensification des
extractions de ressources, l'expansion industrielle, le développement du
tourisme fragilisent l'environnement arctique. Les sources de pollution se
multiplient. Or, la protection de l'environnement est un droit de
l'humanité : « l'environnement est un englobant pour
l'humanité alors que celle-ci est elle-même un englobant qui
recouvre les nations et les hommes »63(*).
La protection de ce droit de l'humanité justifie la
mise en place d'un droit de finalité tourné vers la protection
environnementale et le désarmement. Cela implique non seulement une mise
en oeuvre efficace des conventions multilatérales
générales pertinentes (A), mais aussi l'adoption d'un instrument
complémentaire qui sera nécessaire pour une protection effective
de l'environnement dans la région (B) puisque, la difficulté de
parvenir à des solutions pour les controverses à l'extension du
plateau continental au-delà de 200 milles marins s'explique sur la base
du fait que si la procédure de l'article 76, paragraphe 8, a eu
succès, la conséquence juridique pour les fonds marins et leurs
ressources est d'être soustrait au patrimoine commun de
l'humanité, pour rentrer sous le contrôle de l'Etat
côtier.
A. Un patrimoine commun de l'Humanité :
Le réchauffement climatique confère aujourd'hui
une dimension nouvelle au différend entre les Etats côtiers de
l'Arctique. D'ici vingt ans, la banquise permanente dans le secteur de
l'archipel canadien devrait disparaitre et cette route maritime deviendra alors
applicable. Conscients du potentiel de la région, le Canada et les
Etats-Unis se livrent à un véritable ping-pong juridique64(*). Selon le Canada le passage
est situé dans les eaux intérieures alors que, de l'avis des
Etats-Unis, mais aussi de l'Union Européenne et du Japon, il s'agit d'un
détroit international. Si le passage est bel et bien situé dans
les eaux intérieures canadiennes, le Canada pourra y exercer la
plénitude et l'exclusivité des compétences. Si, en
revanche, le passage constitue un détroit international, les navires y
bénéficieront d'un droit de passage en transit65(*).
En effet, ce qu'on peut constater c'est que le changement
climatique a une double conséquence. D'une part, une conséquence
positive, puisqu'on assiste à l'ouverture de nouvelles routes maritimes,
ce qui pourra bien réduire la durée et les frais d'un transit.
D'autre part, une conséquence négative, du moment où le
taux de la pollution va augmenter en raison de la navigation dans ces nouvelles
voies maritimes.
La région arctique ne souffre pas d'un vide juridique.
On trouve des instruments aussi bien d'origine nationale ou régionale
que communautaire qui assurent la protection de l'environnement dans les Etats
concernés. D'autre part, il y a des conventions multilatérales
générales déjà promulguées qui permettent de
résoudre une grande partie des problèmes qui se posent dans la
région. Les conventions multilatérales relatives à
l'environnement ou au patrimoine commun de l'humanité présentent
un intérêt tout particulier.
Au début, on ne pouvait citer la notion « du
patrimoine commun de l'humanité » et l'idée qu'une
partie de l'Arctique puisse appartenir à l'humanité a
germé. La proposition a connu une ébauche de
concrétisation dans un projet de convention relatif au
Spitsberg66(*). Celui-ci
qui avait été élaboré lors de la conférence
de Christiana en 1912, n'est jamais entré en vigueur. Ce projet conserve
un intérêt assez particulier puisqu'il posait un certain nombre de
principes qui ne sont pas sans rappeler les critères du patrimoine
commun de l'humanité : le Spitsberg ne pouvait pas faire l'objet
d'appropriation et devait être « ouvert aux ressortissants et
tous les Etats », une large place était laissée aux
activités scientifiques aussi, on a prévu un régime de
neutralisation et enfin une commission internationale du Spitsberg devait
être créée67(*).
Cependant, face au changement climatique qui menace
l'écosystème arctique, l'idée de confier cette
région à l'humanité a connu une réminiscence.
Ainsi, certains auteurs ont même proposé, vu
l'intérêt exceptionnel de l'Arctique, d'assurer sa
préservation en tant qu'élément du « patrimoine
mondial de l'humanité toute entière »68(*). De la même
manière, il serait bien souhaitable, que certaines
« connaissances et pratiques »des peuples autochtones de
l'Arctique, qui présentent un intérêt d'un point de vu
écologique, puissent être inscrites sur la liste du patrimoine
culturel immatériel de l'humanité69(*).
En pratique, certains sites naturels sont d'ors et
déjà classés au patrimoine mondial de l'Unesco. Il en va
ainsi, depuis 2004, pour le fjord glacé d'Illulissat sur la côte
ouest du Groenland ou de certains autres sites situés en Alaska. Le fait
de protéger plus de sites et de zones ne peut s'avérer impossible
mais ce qu'on peut constater c'est que seuls les territoires terrestres
bénéficient de ce statut privilégié. L'océan
Arctique est soustrait à cette protection et par conséquent on
assiste à un non classement des zones maritimes au patrimoine
mondial.
Toutefois, l'article 2 de la Convention relative au patrimoine
mondial qui définit la notion de patrimoine naturel, précise que
cette qualification ne peut viser que « les sites naturels ou les
zones naturelles strictement délimitées, qui ont une valeur
universelle exceptionnelle »70(*). Il est à craindre que l'exigence d'une
délimitation stricte posée par la Convention ne conduise à
écarter les propositions généreuses qui visent à
classer au patrimoine mondial l'ensemble de la région arctique ou
même l'océan Arctique dans son intégralité. Est-ce
suffisant ? Probablement pas, seul le statut de patrimoine mondial est
insuffisant pour contrecarrer les menaces qui pèsent sur l'Arctique.
Ainsi, qualifier l'Arctique de patrimoine commun de
l'humanité, par le biais d'un nouveau cadre conventionnel, à
l'instar de ce qui s'est produit pour les fonds marins ou pour la lune,
paraît difficilement envisageable, car la région ne répond
pas aux critères généralement admis pour procéder
à une telle affectation. L'Arctique est notamment sous juridiction
nationale et est militarisée, il est dominé par une politique de
partage.
Le professeur René-Jean Dupuy, dans son ouvrage
« les régions polaires, apanage de
l'humanité » a bien souligné l'idée selon
laquelle, les frictions entre souverains dans cette zone démontrent
assez combien cette région demeure à l'écart du concept de
patrimoine commun de l'humanité. Ceci nous pousse aussi à dire
que jusqu'à aujourd'hui, les Etats riverains ont été en
effet manifestement plus enclins aux solutions de partage qu'aux formes
indivises71(*). Et ce qui
constitue aussi une limite pour un cadre conventionnel pour la protection de la
région. Vu que les intentions des Etats côtiers sont
départagées on ne peut assister à la naissance d'un
mécanisme multilatéral.
Ainsi, n'est-il pas préférable de ne pas
concentrer le débat sur l'affectation de l'Arctique au patrimoine commun
de l'humanité sur l'opportunité d'y étendre le
modèle organiste conçu pour les fonds marins et la lune. Le
concept n'implique pas la nécessité d'un service public
institutionnalisé. Il se réalise avant tout par la mise en place
d'un droit de finalité. Tel est le régime applicable à la
faune à l'environnement. La protection de l'environnement suffirait
ainsi, à elle seule, à soumettre l'Arctique à un tel
régime selon toujours le professeur René-Jean Dupuy. On peut dire
alors que les conventions environnementales sont d'une grande aide pour
préserver les droits de l'humanité future en Arctique.
Il en va ainsi notamment de la Convention-cadre des Nations
Unies sur les changements climatiques et de son protocole. Les
conséquences du réchauffement, non seulement sur
l'écosystème, mais aussi sur les populations locales, ne sont
plus à démontrer. Le Protocole de Kyoto, qui est entré en
vigueur le 16 février 2005, développe une stratégie de
réduction des gaz à effet de serre et constitue ainsi un
instrument essentiel dans la lutte contre le réchauffement. Si le
Danemark, l'Islande, la Norvège et la Suède y sont parties, les
Etats-Unis l'on signé, mais ont finalement refusé de le ratifier.
Quant au Canada, bien que partie au Protocole, il menace de revenir sur son
engagement.72(*)
En Arctique, on trouve autres éléments qui
suscitent l'intérêt. Il s'agit notamment de la pollution
transfrontière. Comme son nom l'indique, cette pollution ne connait pas
de limites ou de frontières. Elle peut facilement endommager un Etat et
passer chez un autre et il est quasiment impossible de la faire arrêter.
Dans cette région, on trouve la « brune arctique »
qui est produite par la combinaison de polluants atmosphériques qui sont
acheminés des régions industrialisées vers l'Arctique, par
les vents dominants. Elle présente des conséquences similaires
aux pluies acides. Aucune Convention internationale ne traite
spécifiquement de la brune arctique. Toutefois, on l'a trouve dans le
champ d'application de la Convention sur la pollution atmosphérique
transfrontière. La brune arctique se situe en effet dans les deux
premiers kilomètres de l'atmosphère. Par ailleurs, elle prend
bien sa source physique dans une zone soumise à la juridiction d'un Etat
et exerce des effets dommageables dans une zone soumise à la juridiction
d'un autre Etat, après avoir parcouru une longue distance.
Cette Convention présente un caractère essentiel
et elle comprend différents protocoles qui combattent plusieurs formes
de pollution. L'un d'entre eux, relatif aux polluants organiques persistants
(POPs), adopté en 1998, fait directement allusion à l'Arctique.
Les polluants organiques persistants sont
particulièrement nuisibles à l'écosystème arctique.
Ils ont aussi un impact dramatique sur la santé des autochtones. Les
POPS sont des molécules qui, contrairement aux autres polluants, ne sont
pas définies en fonction de leur nature chimique mais à partir de
certaines propriétés, à savoir : la toxicité,
la persistance dans l'environnement, la bioaccumulation dans les tissus vivants
et l'augmentation des concentrations le long des chaînes alimentaires et
le transport à longue distance.
En 2004 on assiste à l'entrée en vigueur de la
Convention sur les polluants organiques persistants, c'est une Convention
spécifique au POPs. Dans son préambule, elle souligne
« que l'écosystème arctique et les populations
autochtones qui y vivent sont particulièrement menacés en raison
de la bioamplification des polluants organiques persistants, et que la
contamination des aliments traditionnels de ces populations constituent une
question de santé publique ». Ainsi, dans son premier
article, la Convention évoque le principe de précaution pour
protéger la santé humaine et l'environnement contre les effets
des POPs.
L'un des principes fondamentaux du droit de l'environnement,
le principe de précaution comprend un certain nombre d'obligations
à la charge des Etats qui font l'objet de normes de plus en plus
contraignantes. Fondamentalement, c'est une règle très
générale de conduite, de nature prudentielle, en vertu de
laquelle, « pour protéger l'environnement des mesures de
précaution doivent être largement appliquées par les Etats
selon leurs capacités » (principe 15 de Rio).
L'idée générale, c'est que les mesures
pour l'environnement doivent anticiper, prévenir, et combattre les
causes de dégradation de l'environnement. Ceci implique aussi que ce
principe impose aux Etats des obligations continues, dont la connaissance
évolue avec les progrès des connaissances scientifiques73(*).
La Convention sur les polluants organiques persistants bannit
la production et l'usage de neuf pesticides et exige la mise en place
d'alternatives de production industrielle ainsi que l'établissement d'un
système de gestions des déchets. Le Canada, la Finlande,
l'Islande, la Norvège et la Suède ont ratifié ladite
Convention, contrairement à la Russie et aux Etats-Unis qui se sont
contentés de la signer.
En Arctique, la biodiversité est menacée non pas
seulement par les conséquences de la pollution, mais aussi de la
présence humaine. Pour parer cette dégradation progressive,
différents instruments sont applicables.
La Convention sur le commerce international des espèces
de faune et de flore sauvages menacées d'extinction de 1973, la
Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant
à la faune sauvage du 23 juin 1979 ou encore la Convention relative aux
zones humides d'importance internationale de 1971 permettent de lutter contre
la détérioration de la diversité biologique, tout au moins
lorsqu'elles ont été ratifiées par les Etats arctiques.
Comme on peut le voir, ces instruments n'assurent qu'une
protection partielle. Cependant, dans le but de la compléter, la
Convention de 1992, relative à la diversité biologique, a vu le
jour. Ainsi, cette Convention ne se réfère pas explicitement
à l'Arctique, mais elle contient des dispositions qui, néanmoins,
présentent un intérêt pour la région. Dans son
article premier, elle prévoit que les Etats sont responsables de la
conservation et de l'utilisation durable de leurs ressources biologiques.
Toutefois, la portée de la Convention de 1992 reste
limitée en Arctique puisqu'elle ne s'applique pas en Alaska dans la
mesure où les Etats-Unis ont refusé de la ratifier.
Outre ces dispositions générales relatives
à la protection et à la préservation du milieu marin, et
plus spécifiquement concernant la protection environnementale de
l'océan Arctique, la Convention sur le droit de la mer de 1982, dans son
article 234, consacre une disposition spécifique aux « Zones
recouvertes par les glaces ». Selon cet article, dans
l'hypothèse où ce type de zones est compris dans la zone
économique exclusive, les Etats côtiers sont autorisés
à adopter des actes unilatéraux non discriminatoires et à
les faires appliquer de manière à prévenir ou maitriser la
pollution du milieu marin par les navires. Ainsi, si l'on admet que
l'océan Arctique constitue une mer semi-fermée, ce qui n'est pas
le cas, les Etats riverains ont l'obligation de coopérer de
manière notamment à coordonner la protection et la
préservation du milieu marin. Encore une fois, comme on le sait, les
Etats-Unis ne sont pas liés par ce texte.
Depuis la catastrophe pétrolière de l'Exxon
Valdez, qui avait souillé les côtes de l'Alaska en 1989 et qui a
causé une grande marée noire, la communauté internationale
semble avoir pris conscience de la vulnérabilité de l'Arctique
aux pollutions par hydrocarbures. Dans ce contexte, les conventions
générales relatives à la prévention de la pollution
par les navires ont vocation à s'applique, on peut citer, entre autres,
la Convention pour la préservation de la pollution marine par les
opérations d'immersion effectuées par les navires et
aéronefs signée à Oslo le 15 février 1972 et de la
Convention internationale pour la prévention de la pollution par les
navires (MARPOL), signée à Londres le 2 novembre 1973 et de son
protocole signé le 17 février 1978.
S'agissant de la pollution radioactive, cette dernière
demeure un sujet de préoccupation dans la zone arctique. Cependant, la
Convention sur l'assistance en cas d'accident nucléaire de 1986 ou
la Convention sur la sureté nucléaire de 1994 et son
protocole demeurent des instruments utiles en Arctique. S'ajoute aussi, la
Convention de Bâle de 1989, relative au contrôle des mouvements
transfrontières de déchets dangereux et leur élimination
apparait aussi essentielle en Arctique. A l'exception des Etats-Unis, les Etats
arctiques y sont parties.
Les conventions multilatérales, comme on vient de voir,
constituent des outils adéquats pour lutter contre les pollutions
d'origine globale en Arctique. Le plus souvent, les instruments juridiques
existent mais c'est la volonté politique qui fait défaut.
Comme le montre l'ensemble des conventions qu'on vient
d'examiner, la participation aux conventions concernées n'est pas
toujours unanime de la part des Etats arctiques. Il y toujours des Etats qui ne
signent pas, ou s'ils signent ne ratifient pas.
D'autre part, il est aussi vrai que certains traités ne
sont pas suffisamment adaptés à cette région. La
protection de l'écosystème arctique en ressortirait grandie si
les conventions susceptibles de s'y appliquer intégraient des
dispositions spécifiques sur la question.
Il en résulte, que les instruments internationaux
permettant de lutter contre les pollutions d'origine locale sont clairement
insuffisants. C'est pour cette raison, que certains auteurs plaident pour
l'adoption d'un « traité arctique » de
manière à prévenir à une protection optimale du
pôle septentrional. Une question qui sera traitée dans le
paragraphe suivant.
B. Vers un traité sur l'Arctique :
Faut-il le rappeler, il n'existe pas à ce jour pour
l'Arctique de système comparable à celui du traité sur
l'Antarctique, qui réglerait de manière globale la question des
usages militaires, celle de l'exploitation des ressources naturelles, ou encore
celle de la protection de l'environnement.
L'Antarctique, comme on le sait, n'est pas un
élément du patrimoine commun de l'humanité, il constitue
plutôt une réserve naturelle, consacrée à la paix et
à la science. La non-appropriation et l'utilisation pacifique sont
également des caractéristiques qui cadrent cet espace. Elles
peuvent, cependant, exister en dehors de tout patrimoine commun, pour des
raisons politiques ou de sécurité.
En Antarctique, l'idée qui a été
privilégiée est belle et bien celle de sanctuarisation de cette
région à des fins de protection de son environnement. Au centre
du régime, on a, l'interdiction de toute activité relative aux
ressources minérales, autre que la recherche scientifique (article 7 du
protocole de Madrid). L'exploitation de ces ressources est, de la sorte,
radicalement prohibée.
Concernant l'Arctique, une partie de la doctrine n'a pas
manqué de faire remarquer que s'agissant à tout le moins de la
sauvegarde de l'environnement, les activités menées dans la
région ne l'étaient pas pour autant dans un vide juridique
complet.
L'année géophysique internationale a
constitué le point de départ du régime antarctique. Il est
possible dès lors, de se laisser aller à quelques rêveries
juridiques et d'imaginer que cette nouvelle année polaire donnera
l'impulsion nécessaire à l'élaboration d'un traité
arctique.
Le régime juridique arctique est constitué, en
grande partie, de soft law. Certes, la coopération
environnementale a fait l'objet de traités bilatéraux et elle est
forte existante. Un certain nombre d'entre eux concernant l'échange
d'informations, tel le Joint Pollution Contingency de 1974
passé entre le Canada et les Etats-Unis et son équivalent
passé entre le Canada et le Danemark en 1984 ou le Protocole de 1984
relatif à la coopération scientifique et technique en Arctique
entre le Canada et l'ex-URSS ; la protection du milieu marin, comme par
exemple : l'Accord de coopération entre le Canada et le Danemark
concernant le milieu marin du 26 Aout 1983 ; pour le déplacement
des déchets dangereux on trouve l'Accord du 28 octobre 1986 relatif aux
déplacements transfrontières des déchets dangereux conclu
entre le Canada et les Etats-Unis ; ou encore la protection de certaines
espèces animales, comme l'Accord sur la préservation de la harde
de Caribous de la Porcupine passé entre le Canada et les Etats-Unis en
1987.
Au-delà de ces instruments bilatéraux, quelques
conventions régionales ont été conclues. Dès 1911,
les quatre Etats riverains de la mer de Béring signaient un
traité relatif aux phoques à fourrure. Ainsi, la chasse à
la baleine fut réglementée dès 1946 par la Convention
internationale. Plus tard, les cinq Etats arctiques sur le territoire desquels
se situent les ours blancs ont adopté une convention assurant la
protection de cette espèce.
La région arctique fait aussi partie du champ
d'application de la Convention pour la protection du milieu marin de
l'Atlantique du Nord-est (OSPAR) de 1992 et de la Convention Nordique pour
la protection de l'environnement de 1974.
Par ailleurs, le régime arctique, contrairement
à celui applicable en Antarctique, est composé en grande partie
d'accords non contraignants. Au premier rang d'entre eux figurent la
Stratégie pour la protection de l'environnement arctique et la
Déclaration du même non signées par les huit Etats
concernés, il s'agit de la Déclaration sur la protection de
l'environnement arctique du 14 juin 1991. En 1998, le programme d'action
régional pour la protection du milieu arctique contre la pollution
causée par les activités terrestres est venu compléter ces
accords.
Ainsi, si un réseau institutionnel a récemment
vu le jour en Arctique, il ne comprend pas, proprement parler, d'organisations
internationales. Il se compose principalement des forums intergouvernementaux
tels le Conseil arctique, le Conseil Euro-arctique Barents ou le Conseil
Nordique des ministres74(*).
Par le biais de ses groupes de travail, le Conseil arctique,
nourrit des réflexions essentielles sur le développement durable
en Arctique. L'un d'entre eux, consacré à la protection de
l'environnement marin, a formulé des principes directeurs relatifs
à l'extraction offshore du pétrole et du gaz. D'autres
groupes se sont penchés sur la protection de la biodiversité ou
sur la menace que constituent les POPs. Ces travaux souffrent toutefois de leur
faible autorité juridique75(*).
On remarque alors qu'il y une grande insuffisance du
régime dans cette région. Dans ces conditions, l'idée d'un
traité sur l'Arctique, dont la finalité première ou au
moins l'un des principaux objectifs, serait la protection de l'environnement,
et qui permettrait de combler en la matière les lacunes de la
réglementation existante, paraît évidemment
séduisante.
L'idée avait déjà été
avancée, il y bien longtemps. Mais doit-on appliquer le même
modèle de l'Antarctique sur la région de l'Arctique ?
Le régime arctique est sous-développé par
rapport à celui applicable en Antarctique. La protection du continent
austral est assurée par des instruments relativement protecteurs, tels
que la Convention de Canberra sur la conservation de la faune et la flore
marines de l'Antarctique de 1980, ou encore le Protocole de Madrid au
traité sur l'Antarctique.
Bien qu'une grande partie des Etats arctiques soient aussi
parties au système antarctique, il est difficilement concevable de
vouloir s'en inspirer. Certes les deux pôles ont en commun leur
environnement fragile et leurs conditions climatiques extrêmes mais un
traité sur l'Arctique ne saurait se contenter de reproduire les
solutions en vigueur dans l'Antarctique. Une différence essentielle
sépare en effet l'une de l'autre zone : la présence de
populations sur le territoire de certains des Etats arctiques.
Cette donnée humaine fait échec à elle
seule à une transposition du modèle de la réserve
naturelle et de l'interdiction d'exploitation des ressources qui en constitue
le dispositif central. S'ajoute aussi que c'est une région touristique,
militarisée et où les activités économiques sont en
plein essor. Un régime sui generis devait alors
être conçu, qui réserve aux populations
précitées une place appropriée dans la gouvernance de la
région ainsi qu'une part adéquate des revenus tirés de ses
richesses. La déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples
autochtones, dépourvue en soi de valeur contraignante, pourrait trouver
là une occasion de voir plusieurs de ses dispositions
concrétisées76(*).
En Antarctique, le régime applicable s'articule
principalement autour des prétentions territoriales. C'est le gel des
revendications qui a rendu possible ce statut protecteur. Les circonstances
sont différentes en Arctique, région sous juridiction nationale
et menacée par des revendications de plus en plus larges. De plus, le
futur régime arctique devra se focaliser sur l'océan alors qu'en
Antarctique il est axé sur le continent.
Aujourd'hui, cette proposition ne fait pas encore
l'unanimité. Pour une partie de la doctrine, les accords de soft
law, précisément parce qu'ils sont contraignants, permettent
une participation plus large de la part des Etats. Par ailleurs, la soft
law serait encore trop récente pour que l'adoption d'un tel
traité puisse être concevable.
D'autres juristes, par contre, sont favorables à
l'adoption d'un traité arctique mais la portée du futur
instrument fait débat. Certains, se sont prononcés en faveur d'un
traité régional, alors que d'autres, proposent un traité
à vocation universelle.
Un traité à caractère régional se
voit réalisable du moment où la plus grande partie des menaces
pesant sur l'environnement arctique à ne pas faire l'objet d'un
traité sont d'origine locale. Aussi, un traité purement
régional serait probablement plus aisément conclu dans la mesure
où seuls les huit Etats arctique auront à se mettre d'accord, on
une minorité de partie à convaincre pour le signer.
Quant au traité à vocation universelle, il
permettrait de combler les lacunes des conventions multilatérales
existantes qui, bien que pertinentes pour la région arctique, n'y font
pas, le plus souvent, référence dans le cadre de dispositions
spécifiques. En outre, ce traité ouvrira une brèche
à la participation d'Etats non directement intéressés au
traité ce qui permettrait de contrebalancer les prétentions des
Etats arctiques et d'assurer une meilleure protection des intérêts
de l'humanité. Or, tant que la région arctique est sous
juridiction nationale, il sera utopique de penser que les Etats
concernés puissent convier tous les Etats du monde à des
négociations, puisque, comme on l'a bien pu le constater, chacun d'entre
eux essai de conquérir le plus de territoire pour le soumettre à
sa propre juridiction.
Si le régime juridique de l'Antarctique ne peut
être le modèle type à l'Arctique, alors comment
doit-être ou bien que doit-il contenir, ce futur traité, comme
principes de base ?!
D'abord un traité arctique devra prendre en compte la
singularité de la région et s'orienter vers un modèle
spécifique, probablement basé sur la notion de
développement durable77(*).
Il viendra combler les lacunes du droit positif. Il serait
aussi souhaitable qu'il formule le principe de précaution et qu'il
encadre davantage les conditions d'extraction des ressources.
Il pourrait aussi opter pour des dispositions audacieuses.
Ainsi, selon l'article 27 de la Déclaration des Nations Unies sur les
droits des peuples autochtones, le pouvoir de décision pourrait
être partagé entre représentants des peuples autochtones
riverains de l'Arctique et des Etats côtiers. Ce futur traité
devrait aussi garantir la préservation des connaissances et savoir-faire
des peuples autochtones, notamment ceux relatifs à la faune et la
flore.
Actuellement, la situation en Arctique n'est pas en totale
conformité avec les dispositions de la Déclaration de Nations
Unies précitée. Cette dernière interdit notamment le
stockage ou le déchargement de matières dangereuses sur les
territoires des peuples autochtones sans leur consentement préalable, or
les peuples de l'Arctique souffrent de la nucléarisation de la
région. C'est pour cette raison que quelques auteurs ont remis au
goût du jour l'idée de démilitariser l'Arctique. Soulignant
le caractère symbolique de cette région polaire pour
l'humanité et par conséquent, l'idée d'un traité de
démilitarisation de l'Arctique a été
avancée78(*). Il a
même été suggéré de s'inspirer du concept
développé dans l'océan Indien pour faire de l'Arctique une
« zone de paix »79(*).
Par ailleurs, un traité de
dénucléarisation a souvent été envisagé en
Arctique pour être souvent aussi écarté. La
non-militarisation a recueilli quelques succès, ce ci se
concrétise par le traité de Paris du 8 février 1920
relatif au Spitsberg. Tout en reconnaissant la pleine et entière
souveraineté de la Norvège sur l'Archipel, l'article 9 de ce
traité dispose que : « sous réserve des
droits et devoirs pouvant résulter pour la Norvège de son
adhésion à la Société des Nations, la
Norvège s'engage à ne créer et à ne laisser
établir aucune fortification dans les dites régions, qui ne
devront jamais être utilisées dans un but de
guerre ». Comme on peut bien le remarquer, ces dispositions font
clairement une référence à la mon-militarisation.
Il semble toutefois que, dans le reste de l'Arctique, le
principe de l'utilisation pacifique, malgré ses liens étroits
avec les doits de l'humanité, ne pourra être appliqué sans
quelques aménagements. Dans l'immédiat, il serait plus opportun
de commencer par un projet, de réduction progressive des armements, qui
pourrait plus facilement voir le jour qu'un traité de
démilitarisation complète.
Il en résulte que la démilitarisation n'apparait
pas en effet comme une priorité pour les Etats arctiques :
récemment, le gouvernement canadien annonçait la construction de
nouveaux navires armés pour l'Arctique et d'un port en eau profonde dans
cette région.
En Arctique, les Etats ne semblent pas encore prêts
à reconnaitre qu'il est de l'intérêt de l'humanité
toute entière que l'Arctique soit à jamais réservée
aux seules activités pacifiques et ne devienne ni le
théâtre ni l'enjeu de différends nationaux, et qu'il est
conforme au progrès de l'humanité d'établir une
construction solide permettant de poursuivre et de développer la
coopération internationale.
Force est toutefois de constater que les Etats les plus
intéressés considèrent le cadre juridique existant comme
tout à fait suffisant, et sont défavorable à
l'élaboration d'un régime d'ensemble pour l'Arctique. C'est ce
qui a été déclaré, par les cinq Etats côtiers
lors d'une réunion tenue à Illulissat le 28 mai 2008. Les
représentants des cinq Etats ont aussi affirmé leur
volonté de renforcer leur coopération basée sur une
confiance mutuelle et la transparence. La sécurité de la
navigation maritime et la prévention des risques de pollution dans
l'Arctique sont une priorité.
De son côté, le ministre des Affaires
étrangères russes a insisté sur le respect par son pays
des lois internationales, et des décisions de la Commission des Limites
du Plateau Continental.
L'Union Européenne s'intéresse aussi de
près à la région Arctique. Le 20 novembre 2008, la
Commission européenne a adopté une communication intitulée
« l'union européenne et la région
arctique ». Sur la base de cette déclaration, l'Union
Européenne déclare :
« [...] inextricablement liée à la
région arctique par une combinaison unique d'éléments
historiques, géographiques, économiques et scientifiques. Trois
Etats membres, le Danemark, la Finlande et la Suède, possèdent
des territoires dans Arctique. Deux autres Etats arctiques, l'Islande et la
Norvège, appartiennent à l'Espace économique
européen. Le Canada, la Russie et les Etats-Unis sont des partenaires
stratégiques de l'UE. Les zones européennes de l'Arctique sont
une priorité de la politique concernant la dimension septentrionale.
Au-delà des zones relevant de la souveraineté des Etats,
certaines parties de l'océan Arctique sont situées en haute mer
et relèvent des fonds marins gérés par l'Autorité
internationale des fonds marins »80(*).
L'Union Européenne affirme que :
« Aucun régime spécifique
instauré par un traité ne s'applique à l4arctique. Aucun
pays ou groupe de pays n'exerce sa souveraineté sur le Pôle Nord
ou sur l'océan arctique qui l'entoure. Il y a plusieurs
frontières maritimes sur lesquelles les Etats riverains de l'Arctique
sont en désaccord sur la délimitation des zones
économiques exclusives. Les soumissions présentées
à la Commission des Limites du Plateau Continental des Nations Unies
peuvent entraîner un chevauchement des revendications. En outre, les
interprétations divergent en ce qui concerne les conditions de passage
des navires dans certaines eaux de l'Arctique, surtout dans le passage du
Nord-Ouest »81(*).
Parce qu'il existe déjà un vaste cadre juridique
international qui s'applique à l'arctique (Convention de Montego Bay et
autres accords multilatéraux), l'Union Européenne n'est pas non
plus partisante de la création d'un régime spécifique
à l'Arctique.
« Il conviendrait de préconiser la mise
en oeuvre dans leur intégralité des obligations
déjà existantes plutôt que de proposer de nouveaux
instruments juridiques. Ceci ne devrait cependant pas exclure les travaux
visant à poursuivre l'élaboration de certains cadres, les
adaptant aux nouvelles conditions ou aux spécificités de
l'Arctique »82(*).
CONCLUSION :
L'article 76 de la Convention des Nations Unies sur le droit
de la mer de 1982 a « juridicisé » le
plateau continental physique qui commence à la limite extérieure
de la mer territoriale pour se terminer sur le rebord externe de la marge
continentale. Cette étude, sur ce cas particulier de l'Arctique,
consacrée au plateau continental susceptible de s'étendre
au-delà des 200 milles marins avait pour objectif de démontrer
les revendications et les motivations que peuvent avoir et avancer les Etats
afin de réaliser ce prolongement, d'une part, et comment cette soiffe
peut être une limite à un instrument de protection de
l'environnement dans la région, d'autre part.
Cet espace maritime situé sous la mer relève de
l'Etat côtier qui peut faire valoir un titre à exercer ses droits
souverains. Ce titre est alternatif dans la mesure où il est à la
fois une limite fixe et variable. Fixe, par la règle conventionnelle et
coutumière d'une distance de 200 milles marins, et variable, par
l'application du critère du prolongement naturel du territoire
terrestre. Dans la pratique la question n'est pas si simple vu
l'ambigüité de l'Article 76 de la C .M.B, d'une part, et
l'existence des dorsales, notion non définie par la Convention, dans
l'océan Arctique, d'autre part.
L'Etat côtier qui entend se prévaloir des
dispositions de la Convention doit déposer une demande à la
Commission des Limites du Plateau Continental, demande consistant à
présenter les données et autres renseignements concernant le
tracé des limites extérieures du plateau continental quand il
s'étend au-delà de 200 milles. Après examen de la demande,
la Commission émet des recommandations. L'Etat côtier seul fixe la
limite extérieure du plateau continental prolongé sur la base de
ces recommandations.
Le plateau continental ne comprend ni les grands fonds, ni les
dorsales océaniques. Les Etats situés sur une dorsale
océanique peuvent-ils revendiquer un plateau continental étendu
sur cette dorsale ? Pour les autres dorsales sous-marines, la limite
extérieure du plateau continental ne peut dépasser une ligne
tracée à 350 mille de lignes de base. Si un haut-fond sous-marin
est une dorsale, l'article 76 est-il applicable ? La CLPC a estimé
dans ses Directives qu'elle examinera la question des dorsales au cas par
cas.
Prolonger son plateau continental est bel et bien un droit
conféré par la Convention de Montego Bay, mais il en
découle aussi des obligations, notamment concernant la protection de
l'environnement. Bien que les Etats côtiers partagent cette obligation,
ils n'arrivent pas à se mettre en accord sur l'idée
d'élaborer un traité Arctique. Chacun affirme que le
régime existant actuellement est suffisant.
La fonte des glaces, effet du réchauffement climatique,
libère les ressources des fonds marins, et s'approprier ces ressources
est le but des Etats côtiers et aussi leur motivation pour revendiquer
plus d'espace maritime possible. Le drapeau planté par la Russie est
sans conséquence juridique. C'est un acte qui fait preuve de la
possession de moyens technologiques qui pourront servir à l'exploitation
des ressources de l'Arctique où l'accès n'est pas abordable
à tous les Etats. En Arctique, de nouvelles routes maritimes s'ouvrent
et pas conséquent, les revendications territoriales se multiplient.
L'année polaire 2007/2008 est l'occasion de
dépasser cette approche territoriale et de s'orienter vers un droit de
finalité. L'application de conventions environnementales est pertinente
mais ne comble pas les lacunes. L'avenir du bassin arctique est entre les mains
des Etats côtiers, qui doivent se décider à coopérer
avant qu'il ne soit trop tard.
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ü Danemark : Notification concernant le
texte soumis par la Fédération de Russie à la Commission
des limites du plateau continental, 26 février 2002, doc.
De l'ONU.
ü Déclaration prononcée le 28 mars 2002 par
le Vice-ministre des ressources naturelles de la Fédération de
Russie lors de la présentation de l'exposé de la
Fédération de Russie à la Commission, 2 avril 2002.
ü Directives scientifiques et techniques de la Commission
des Limites du Plateau Continental, 13 mai 1999, doc. CLCS/11.
ü Etats-Unis d'Amérique :
Notification concernant le texte soumis par la
Fédération de Russie à la Commission des limites du
plateau continental, 18 mars 2002.
ü Norvège : Notification
concernant le texte soumis par la Fédération de Russie à
la Commission des limites du plateau continental, 2 avril
2002.
ü Nations unies, les océans et le
droit de la mer, rapport du secrétaire
général, additif 57 session doc. De l'ONU.
IV. Jurisprudence :
ü Affaire des pêcheries, arrêt du 18
décembre 1951, CIJ, Recueil 1951.
ü Plateau continental de la mer du nord, arrêt du
20 février 1969, CIJ, Recueil 1969.
ü Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte),
arrêt du 3 juin 1985, CIJ, Recueil 1985.
Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne),
arrêt du 24 février 1982, CIJ, Recueil 1982.
* 1 Le rapport a
été élaboré par l'Arctic Climate Impact
Assessment (ACIA), un projet international du Conseil arctique et de
international Arctic Science Commitee pour l'étude du
phénomène du changement climatique dans l'Arctique et ses
conséquences futures. Il peut être consulté sur
www.acia.uaf.edu.
* 2 Voir « La Russie
a lancé une expédition pour préempter
l'Arctique », Le Monde du 3 Aout 2007.
* 3 Déclaration
d'Illulissat, Groenland, conférence sur l'océan Arctique, 27-29
mai 2008.
* 4 Claire VEDRINE,
Ressources en Arctique et revendications étatiques de
souveraineté ; Revue Générale du Droit
International Public, 2009-1, p. 150.
* 5 Voir «
l'Arctique pour tous » et « le Canada réagit aux
revendications russes et entend renforcer sa présence en
Arctique », le Monde du 12 et 13 aout 2007.
* 6 Catherine LE BRIS, Le
dégel en Arctique : Briser la glace entre Etats dans
l'intérêt de l'humanité, Revue Générale
du Droit International Public, 2008-2, p. 329.
* 7 H. De Pooter; L'emprise
des Etats côtiers sur l'Arctique, A.PEDONE 2009 p. 31.
* 8 UN Doc,
A/CONF.62/C.2/L.98/Add.2, 3 mai 1978, official records of the Third United
Nations Conference on the Law of the Sea, vol. IX.
* 9
www.un.org/Depts/los/clcs_news/submissions_files/submission_rus.htm.
* 10 Carte soumise à la
CLPC sur :
www.un.org/Depts/los/clcs_news/submissions_files/rus01/RUS_CLCS_01_2001_LOS_2.jpg.
* 11
www.un.org/Depts/los/clcs_new/submissions_files/submission_rus.htm.
* 12 Canada : Notification
concernant le texte soumis par la Fédération de la Russie
à la Commission des limites, doc CLCS.01.2001.LOS/CAN du 26
février 2002.
* 13 Danemark :
Notification concernant le texte soumis par la Fédération de la
Russie à la Commission des limites, doc CLCS.01.2001.LOS/CAN du 26
février 2002.
* 14 H. De Pooter;
L'emprise des Etats côtiers sur l'Arctique, A.PEDONE 2009 p.
36.
* 15 Ibid.
* 16 « Les
océans et le droit de la mer », Rapport su secrétaire
général, 8 octobre 2002 (UN DOC. A/57/57/Add.1).
* 17 La Convention est en
vigueur pour la Norvège du 24 juillet 1996, donc ce pays a
respecté le délai de 10 années pour la présentation
d'une communication à la Commission sur la base de l'article 76 prg. 8.
* 18 V. la carte de la
soumission norvégienne sur le site :
www.regjeringen.no
* 19 F. Costadau ; La mer
de Barents : un nouvel enjeu géostratégique, l'Harmattan
2011, p. 108.
* 20
www.regjeringen.no/en/dep/ud/Documents/laws-and-rules/retningslinjer/2006/Agreed-Minutes.html
* 21 Agreement
between the Government of the Kingdom of Norway on the one hand, and the
Government of the Kingdom of Denmark together with the Home Rule Government of
Greenland on the other hand, concerning the delimitation of the continental
shelf and the fisheries zones in the area between Greenland and Svalbard.
2 juin 2006.
* 22 F. Costadau ; La mer
de Barents, op cit. note 20.
* 23 Arrêt CIJ du 3 juin
1985, affaire du plateau continental Libye/Malte, recueil 1985,
§28 ;
* 24 H. De Pooter;
L'emprise des Etats côtiers sur l'Arctique, op. cit,
note 15, p. 41.
* 25 F. Costadau ; La
mer de Barents : un nouvel enjeu géostratégique,
l'Harmattan 2011, p. 109.
* 26 Ibid. p. 70.
* 27 V. du Castel ; La
mer de Barents : vers un nouveau « grand jeu » ?, IFRI 2005 p.
18.
* 28 Ibid. p. 18 et
19.
* 29
www.international.gc.ca/continental/collaboration.aspx?lang=fra.
* 30 Déclaration commune
sur la coopération économique entre le Canada et la Russie, 29
novembre 2007, disponible sur :
www.international.gc.ca/commerce/zubkov/joint_state-fr.asp.
* 31 Revendications
controversées du Canada à l'égard des eaux et des zones
maritimes arctiques, bibliothèque du parlement ; 10 janvier 2008 p.
16.
* 32 H. De Pooter;
L'emprise des Etats côtiers sur l'Arctique, op cit,
note 15 p. 46.
* 33
<a76.dk/lang_uk/main.htm>.
* 34
<polar.nrcan.gc.ca/index_e.php>.
* 35 R.G. Lugar: the law of the
sea convention: the case for senate action;
www.brookings.edu/sppeches/2004.
* 36 A. King: the urgent
need for the United States to take its full place at the Arctic table; p.
349.
* 37 Académie de la
mer ; le plateau continental étendu aux termes de la Convention des
Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982, optimisation
de la demande ; Pedone 2004 p. 10.
* 38 Ibid.
* 39 Ibid. p. 11.
* 40 CIJ. Rec., 1951 p. 133.
* 41 CIJ. Rec., 1969 prg. 19 et
39.
* 42 Académie de la mer;
op cit. note 38. p. 12.
* 43 Les côtes des deux
Etats étant séparées par moins de 400 milles.
* 44 CIJ. Rec. 1985 p. 33.
* 45 Académie de la mer,
op cit, note 38. p. 16.
* 46 M. BREUIL, Dictionnaire
des sciences de la vie et de la terre ; Nathan, 2007, p. 167.
* 47 H. De Pooter;
L'emprise des Etats côtiers sur l'Arctique, op cit,
note 15, p. 55.
*
48http://heinonline.org/HOL/LandingPage?collection=journals&handle=hein.journals/ajil71&div=25&id=&page.
* 49 H. De Pooter;
L'emprise des Etats côtiers sur l'Arctique, op cit,
note 15, p. 57.
* 50
http://heinonline.org/HOL/LandingPage?collection=journals&handle=hein.journals/ajil75&div=20&id=&page
* 51 H. De Pooter;
L'emprise des Etats côtiers sur l'Arctique, op cit,
note 15, p. 62.
* 52 Ibid, p. 64.
* 53 Article 2, prg. 1 de
l'Annexe II de la Convention.
* 54 Décision, SPLOS/72,
29 mai 2001, alinéa a).
* 55 Articles 51 et 52 du
règlement intérieur de la Commission.
* 56
www.un.org/Depts/los/cics_new/submissions_files/submission_frgbires.htm
* 57 Disponible sur :
www.un.org/Depts/los/clcs_new/commission_documents.htm
* 58 H. De Pooter;
L'emprise des Etats côtiers sur l'Arctique, op cit,
note 15, p. 80.
* 59 Ibid. p. 86.
* 60 Ibid. p. 87.
* 61Ibid. p. 88.
* 62 C. LE BRIS, Le
dégel en Arctique : Briser la glace entre Etats dans
l'intérêt de l'humanité, Revue Générale
du Droit International Public, 2008-2, p. 344.
* 63Ibid.
* 64 Ibid. p. 333.
* 65 Article 28 de la
Convention sur le droit de la mer de 1982 ;
* 66 Ibid. p.345.
* 67 D. Bardonnet ; Le
projet de convention de 1912 sur le Spitsberg et le concept de patrimoine
commun de l'humanité p. 30.
* 68 J. Dufour
« l'Arctique, militarisation ou coopération pour le
développement ? » disponible sur :
www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=6417
* 69C. LE BRIS, Le
dégel en Arctique : Briser la glace entre Etats dans
l'intérêt de l'humanité, op cit. note 63 p.
329.
* 70Ibid. 346.
* 71 Ibid. p 347.
* 72 Ibid. p 348.
* 73 Ce principe a
été repris dans plusieurs textes juridiques, tels : la
Convention de Bamako de 1991 sur l'interdiction d'importer des déchets
dangereux en Afrique (art. 4) ; la Convention-cadre sur le changement
climatique de 1992 (art.3)...
* 74 V. première partie
p. 27.
* 75 C. LE BRIS ; le
dégel en Arctique : briser la glace entre Etats dans
l'intérêt de l'humanité, op. cit. note 63 p.
354.
* 76 F. DOPAGNE ;
Remarques sur les aspects institutionnels de la gouvernance des
régions polaires, AFDI, 2009, p.612.
* 77 C. LE BRIS ; le
dégel en Arctique : briser la glace entre Etats dans
l'intérêt de l'humanité, op. cit. note 63 p.
356.
* 78 E. PELLETIER ;
Militariser l'Arctique, disponible sur :
www.ledevoir.com
* 79 Déclaration faisant
de l'océan Indien une zone de paix ; A/Rés/2832 (XXVI), 16
décembre 1971.
* 80 Commission des
communautés européennes, communication de la commission au
conseil et au Parlement européen, l'Union européenne et la
région arctique, Com(2008) 763, 20 novembre 2008, p. 2.
* 81 Ibid. p. 11.
* 82 Ibid. p. 12.
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