La protection des droits de la personnalité par le juge camerounais( Télécharger le fichier original )par Pythagore NONO KAMGAING Université catholique d'Afrique Centrale - Master en droits de l'homme et action humanitaire 2009 |
1- La promiscuité et le laissé aller caractéristique des habitations du XIIe siècleJusqu à un édit d'Henri IV, les parisiens ont l'habitude de se baigner nue dans la seine143(*), la Reine de France accouche en public144(*), les palais royaux sont ouverts à tous ou presque, dans les habitations règnent, surtout dans les milieux ruraux, une promiscuité qui pourrait être jugée aujourd'hui d'intolérable. En 1787, visitant le Château de Versailles, Arthur Young note dans son journal de voyage : « De nouveau à Versailles. Lors de ma visite à l'appartement du Roi, qu'il avait quitté depuis à peine un quart d'heure, avec toute ces légères marques de désordre qui montraient qu'il y vivait, c'était un amusant spectacle de voir les têtes de voyous, qui se promenaient, sans être surveillés dans le palais et même dans la chambre à coucher du Roi, des hommes dont les maillons montraient qu'ils se trouvaient au dernier degré de la pauvreté, et j'étais la seule personne à se demander avec étonnement comment diable ils pouvaient s'y trouver. Il est impossible de ne pas aimer ce sans-souci, ce laissé aller, cette absence de toute suspicion. On n'aime le maître de la maison qui ne serait ni choqué, ni offensé de voir sa chambre ainsi occupée, s'il y retournait soudain ; car si on pouvait redouter qu'il en fût autrement, on s'opposerait à cette intrusion. C'est certainement une manifestation de cette facilité d'humeur qui m'apparaît si visible partout en France »145(*). L'idée, d'une part, qu'il puisse y avoir une « vie privée » et, d'autre part, que cette « vie privée » s'oppose à la vie publique est donc moderne146(*). Pourquoi l'apparition de cette conception de la vie ? 2- L'apparition de la distinction « vie privée » « vie publique »La distinction « vie privée » et « vie publique » est apparue avec la montée constante en Occident notamment, de l'individualisme. Opposer à autrui cette immunité de la « vie privée », c'est admettre, pour partie, la justesse de la remarque de Sartre : « L'enfer c'est les autres ». Il y a, d'une certaine manière, une contradiction de la société contemporaine, que le droit révèle, entre désir de solidarité et de solitude. Il faut aussi tenir compte de l'apparition des moyens d'atteinte à cette vie privée avec le développement considérable à partir du XIXe siècle de la presse à grand tirage puis de l'apparition « de la presse à sensation ». A l'origine, la presse était un moyen de communication très intellectuel. Premièrement parce que jusqu'à la fin du XIXe siècle, elle est réservée à une certaine élite. Cette presse a donc pour vocation l'information et la polémique politique147(*). Un journaliste se dénomme comme un « publiciste ». Puis, lorsque la société, en France notamment est largement alphabétisée, les journaux vont se répandre dans toutes les classes de la société. Ce sera l'âge d'or de la presse que l'on peut dater de la première moitié du XXe siècle. Tous ceux qui savent lire ne sont plus nécessairement ceux qui étudient. Le lectorat se modifie et les besoins du journaliste sont aussi modifiés. On va donc s'intéresser aux petites choses de la vie, aux états d'âme des artistes, aux fredaines des hommes politiques148(*). La réaction du droit se fera dans un premier temps attendre, puisqu'en France, notamment, la législation sera pendant longtemps muette sur la question. C'est seulement avec l'avènement de la loi du 29 juillet 1881 réprimant la diffamation et l'injure que l'on assiste à un début de réponse du droit face aux incursions répétées de la presse dans la vie privée des citoyens. Le domicile entretient une liaison étroite avec la vie parce qu'elle en constitue le cadre d'expression. B- LA LIAISON INTIME VIE PRIVEE ET DOMICILELe domicile est aujourd'hui un besoin essentiel dans les sociétés contemporaines, il entretien de ce fait une liaison étroite avec la vie privée (1). La liberté de la vie privée recouvre aussi trois distincts mais complémentaires (2). * 143 Ibid, p.176. * 144 Scène décrite par Mme Campan dans ses Mémoires, Mercure de France, 1999, p. 170 et s. * 145 Arthur Young, Voyages en France en 1787, 1788 et 1789, trad. SEE, Paris, 1931, t.1 p. 199. Cité par Bernard Beignier, op.cit, p. 176. * 146 Bernard Beignier, op.cit, p. 176. * 147 Ibid. * 148 Ibid, p.177. |