Paragraphe II : Encadrement juridique et portée de
la coopération décentralisée
Quels sont les principes juridiques nationaux qui encadrent la
coopération décentralisée (A) et quelle est l'importance
du couplage intercommunalité-coopération
décentralisée et du contrôle de légalité
exercé par le préfet en la matière (B) ?
A- Les considérations juridiques de la
coopération décentralisée
au Bénin
Les communes des départements du Mono et du Couffo sont
sur le territoire de l'Etat béninois. Partant, c'est le cadre juridique
béninois qui s'impose à elles. Pour cette raison, après
l'exposé du cadre juridique et institutionnel (1), un regard sera
porté sur les objectifs, les principes et les domaines (2) de la
coopération décentralisée au Bénin.
1- Cadre juridique et institutionnel de la
coopération décentralisée au
Bénin
La coopération décentralisée au
Bénin trouve son fondement dans les articles 150 à 153 de la
Constitution béninoise du 11 décembre 1990. En effet, le
constituant béninois autorise la création des
collectivités locales qui seront gérées par des conseils
élus et ce, dans les conditions définies par la loi. Ainsi, la
loi n°97-028 du 15 janvier 1999 portant organisation de l'administration
territoriale de la République du Bénin a
énuméré les collectivités territoriales (en son
article 7) qui sont des personnes morales de droit public dotées de la
personnalité juridique et de l'autonomie financière (article 21
et suivants). L'autonomie financière suppose la mobilisation de
ressources propres. Or, « les budgets des communes sont loin de leur
permettre d'assurer les compétences transférées.
»70
Dans cette optique, la loi n°98-007 du 15 janvier 1999
portant régime financier des communes en République du
Bénin, en se basant sur les articles 17871 et
17972 de la loi n°97-029 du 15 janvier 1999 portant
organisation des communes en République du Bénin, dispose en son
article 57 :
« la promotion économique et socioculturelle des
communes est également assurée grâce :
- à la coopération entre communes ;
- à la coopération avec les
organisations non gouvernementales (ONG) nationales ou étrangères
;
- à la coopération avec les
collectivités décentralisées d'autres États
;
- au concours des institutions de financement. Dans ce cadre,
une institution de financement des collectivités locales est
créée ».
Par ce truchement, les collectivités locales
décentralisées ainsi créées ont la capacité
juridique d'entretenir de formelles relations avec leurs homologues
70 Document-cadre de la Politique Nationale de
Déconcentration et de Décentralisation (PONADEC), Page 23
71 L'article 178 de la loi n°97-029
dispose : « La commune peut adhérer à des organisations
internationales de villes »
72 L'article 179 dispose : «
lorsqu'une commune décide d'établir des relations avec des
organismes décentralisés étrangers ou d'adhérer
à une organisation internationale, elle en saisit l'autorité de
tutelle en bonne et due forme pour approbation »
Ghislain SOHOUNKO, ENAM (Cycle I), AGT, Promotion
2008-2011
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
étrangères et toutes autres institutions
autorisées par les textes. Ces relations dites de coopération
décentralisée doivent rester dans les limites imposées par
les textes en vigueur au Bénin.
De ce fait, le décret n°2005-764 du 09
décembre 2005 cité plus haut définit et donne les
modalités de la coopération décentralisée en
République du Bénin. Ce décret, après avoir
donné la définition et les principes généraux, les
objectifs et les domaines de la coopération décentralisée
ainsi que le rôle de l'État, a précisé son cadre
institutionnel en créant la Commission Nationale de Coopération
Décentralisée (CNCD) avant de faire cas des modalités de
gestion des ressources de la coopération décentralisée.
Le cadre institutionnel défini par ce décret a
été complété par le document de la politique
nationale de coopération décentralisée validée par
le décret n°2005-763 du 09 décembre 2009 portant approbation
de la Politique Nationale de Coopération Décentralisée.
Selon ce document, outre les acteurs principaux que sont l'État, les
collectivités locales (les communes) et la société civile,
les institutions intervenant dans la coopération
décentralisée sont :
- le MDGLAAT et ses directions techniques que sont la
Direction générale de l'Administration d'Etat, la Mission de
Décentralisation, la Maison des Collectivités locales et la CNCD
;
- le Ministère des Affaires étrangères
;
- le Ministère des Finances et de l'Economie ;
- le Ministère de l'Environnement.
Dans le souci d'accompagner les communes dans la mobilisation
des ressources à travers la coopération
décentralisée, le guide de la coopération
décentralisée a été élaboré. Ce guide
retrace la procédure à suivre en matière de
coopération décentralisée ainsi que les avantages
liés. Seulement, ce guide n'a pas été vulgarisé
depuis 2010.
2- L'essentiel du contenu de l'arsenal juridique
existant : objectifs, domaines et principes de la coopération
décentralisée
La coopération internationale en faveur du
développement local a pour objectifs
légaux73 :
- la promotion de l'amitié entre les peuples ;
- la promotion économique, sociale et culturelle ;
- la consolidation de la démocratie à la base.
Elle doit s'opérer nécessairement dans les domaines
suivants :
- l'appui institutionnel ;
- le développement local ;
- les échanges d'expertise ;
- les échanges à caractères social, culturel
et sportif ;
- la protection de l'environnement et l'amélioration du
cadre de vie.
Les collectivités locales ont l'obligation d'encadrer
leurs actions extérieures dans
la limite des compétences74 à elles
attribuées par la loi.
73 Cf. article 6 du décret n°2005-764 du 09
décembre 2009 portant définition et modalités de la
coopération décentralisée en République du
Bénin
Ghislain SOHOUNKO, ENAM (Cycle I), AGT, Promotion
2008-2011
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
Elles ne sont pas compétentes pour conclure des
conventions ayant trait au domaine régalien de l'État. Leurs
partenaires exclusifs sont les collectivités locales
étrangères, les ONG, les organisations internationales et tout
autre organisme ou structure du secteur public ou privé. Ces partenaires
doivent être ressortissants des pays avec lesquels l'État
béninois continue d'entretenir des relations diplomatiques. C'est dire
que les collectivités locales n'ont pas la possibilité
d'entretenir des relations ni avec des États souverains, ni avec des
ressortissants des pays dont le Bénin n'entretient pas ou plus des
relations diplomatiques.
Dans leurs relations avec leurs partenaires (premier
principe), elles ont la stricte obligation de s'abstenir de porter atteinte au
principe de l'indivisibilité de la République tel
qu'énoncé dans la Constitution. Elles doivent, à cet
effet, respecter la souveraineté de l'État béninois.
Le second principe est celui de la libre administration des
collectivités locales par des organes élus et dans les conditions
fixées par les textes. Cette disposition constitutionnelle est celle qui
justifie largement la coopération décentralisée car, elle
a servi de fondement à l'article 4 du décret n°2005-764
cité ci-dessus qui énonce : « Les communes s'administrent
librement ; à ce titre, elle gère la coopération
décentralisée dans le respect des lois et règlements en
vigueur ». C'est dire que, par la libre administration, elles
élaborent leur budget par des organes propres élus et vont
à la quête de leurs ressources dans les limites tracées par
les lois et règlements en vigueur. L'autonomie de gestion
accordée aux communes trouve son fondement dans ce principe. C'est cette
autonomie qui permet la libération des énergies locales, ouvrant
ainsi de nouvelles perspectives de coopération.
Enfin (3ème principe), en harmonisant le
développement de l'ensemble des collectivités locales,
l'État veillera à conférer plus de ressources d'appoints
aux communes qui bénéficient peu ou pas de dotations
extérieures liées à la coopération
décentralisée.
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