Projet de fin d'étude
Le régime juridique des ententes
anticoncurrentielles.
Préparé sous la direction du :
Professeur Chifae EL MOUDDEN
2012
Présenté par: NISRINE NASSIRI
Faculté des sciences juridiques économiques et
sociales - Salé -
01/01/2012
À mes parents.
Remerciements
On dit souvent que le trajet est aussi important que la
destination. Les trois années du cycle de la licence m'ont permis de
bien comprendre la signification de cette phrase toute simple. Ce parcours, en
effet, ne s'est pas réalisé sans défis et sans soulever de
nombreuses questions pour lesquelles les réponses nécessitent de
longues heures de travail.
Je tiens à la fin de ce travail à
remercier ALLAH le tout puissant de m'avoir donné la foi et de m'avoir
permis d'en arriver là.
Mes remerciements vont également à mes
parents pour me permettre de suivre mes études dans les meilleures
conditions possibles, de m'avoir offert un refuge bucolique loin de la
tourmente urbaine et n'avoir jamais cessé de m'encourager tout au long
de mes années d'étude.
Je remercie infiniment le professeur Madame Chifae El MOUDDEN,
mon encadrante de mémoire dont la disponibilité, le savoir faire
et le soutien ne m'ont jamais fait défaut.
Pour le soutien technique, oral et moral qu'ils m'ont
apporté je suis très reconnaissante à Reda & Safaa.
Table des matières
Introduction
5
Chapitre I : Encadrement juridique des ententes
anticoncurrentielles 7
Section 1 : Notion de l'entente
8
Sous section 1 : Les éléments de
l'entente
8
Section 2 : Les catégories d'ententes
17
Sous section 1 : Les Formes d'ententes
17
A Ententes contractuelles
17
B Ententes organiques
21
C Ententes tacites
22
Sous section 2 : Les effets de l'entente
24
A Les ententes tendant
à limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la
concurrence par d'autres entreprises.
24
B Les ententes de prix
25
C Les ententes tendant
à limiter ou contrôler la production, les débouchés,
les investissements ou le progrès technique
25
D Les ententes tendant
à répartir les marchés ou les sources
d'approvisionnement
26
Chapitre 2 : Encadrement processuel des ententes
anticoncurrentielles 27
Section 1 : Les organes
28
Sous section 1 : Le tribunal
29
Sous section 2 : Le conseil de concurrence
30
Sous section 3 : Le conseil de gouvernent
35
Section 2 : Les sanctions
39
Sous section 1 : Les sanctions civiles
40
Sous section 2 : Les sanctions pénales
42
Sous section 3 : Les sanctions administratives
44
Sous section 3 : La preuve
45
Sous section 4 : Les exemptions.
47
Conclusion
50
Bibliographie
52
Introduction
Dans le processus de modernisation du droit marocain des
affaires, la loi sur la liberté des prix et de la concurrence a
constitué un moment essentiel puisqu'il s'agissait de protéger la
concurrence afin de stimuler l'efficience économique, améliorer
le bien-être des consommateurs, assurer la transparence et la
loyauté dans les relations commerciales. Il s'était
également agi de s'inscrire dans le cadre de la dynamique de convergence
réglementaire avec l'acquis communautaire, induite par l'accord
d'association liant le Maroc à l'Union européenne. Une dynamique
renforcée par le statut avancé qui accorde au rapprochement des
législations une place prioritaire.
La création et la mise en place effective de la loi
n°06-99 sur la liberté des prix et la concurrence,
promulguée par le Dahir du 5 juin 2000, est entrée en vigueur en
juillet 2001. Ceci coïncide avec l'entrée en vigueur de l'accord
d'association entre l'Union européenne et le Maroc en mars 2001. La loi
6-99 institue, donc, le principe d'interdiction des ententes et des abus de
positions dominantes (titre III de la loi) ainsi qu'un contrôle des
concentrations (titre IV de la loi). Nous nous limiterons, à la
réglementation des ententes. En vertu de l'article 6 de ladite loi,
fortement inspiré des articles 81 Amsterdam (ancien 85 du traité
de Rome), 36§a de l'accord d'association et 7 de l'ordonnance
française de 1986, «sont prohibées, lorsqu'elles ont pour
objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de
fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions
concertées, conventions, ententes ou coalitions expresses ou tacites,
sous quelque forme et pour quelque cause que ce soit (...)».
Le Conseil de la concurrence, en tant qu'instance de
régulation, ont confirmé l'intérêt des pouvoirs
publics pour une saine application des règles de la concurrence. Elles
traduisent également une évolution dans le mode de production du
droit économique qui désormais implique les partenaires, au
côté de l'Etat, dans la confection d'avis et de recommandations
destinés à aider à la prise de décision.
La nouvelle Constitution a consolidé cette
évolution. En effet, elle fait peser sur l'Etat l'obligation de garantir
la liberté d'entreprendre et la libre concurrence, en sanctionnant le
trafic d'influence et de privilèges, l'abus de position dominante et de
monopole, et toutes les autres pratiques contraires aux principes de la
concurrence libre et loyale dans les relations économiques. Le Conseil
de la concurrence est érigé au rang d'entité
constitutionnelle chargée, dans le cadre de l'organisation d'une
concurrence libre et loyale, d'assurer la transparence et
l'équité dans les relations économiques, notamment
à travers l'analyse et la régulation de la concurrence sur les
marchés, le contrôle des pratiques anticoncurrentielles, des
pratiques commerciales déloyales et des opérations de
concentration économique et de monopole.
"Insensiblement, et au delà des volontés
politiques, le tentaculaire droit de la concurrence ne cesse de renforcer son
emprise sur la théorie générale du contrat "1(*). Cette remarque est
révélatrice de la façon dont le droit de la concurrence
est perçu par les autres disciplines juridiques.
Cependant, au sein des pratiques anticoncurrentielles, l'entente
cristallise les inquiétudes car le contentieux qui l'entoure est
abondant, controversé et conquérant. L'intervention des
autorités régulatrices affriole la défiance. La vocation
quasi-universelle du droit des ententes perturbe et exaspère. Il suffit
pour s'en convaincre d'être attentif aux réactions doctrinales que
suscite chacune des décisions par lesquelles le Conseil de la
concurrence étend son champ d'action. Le Conseil condamne-t-il une
clause séparée d'une convention collective? Soumet-il à
son contrôle les personnes privées chargées d'une mission
de service public?
Le droit des obligations semble particulièrement
menacé car le contrat constitue souvent le principal vecteur d'ententes
anticoncurrentielles. En voulant obvier à des dysfonctionnements du
marché, l'on intervient nécessairement dans les contrats. Ceux-ci
sont annulés au nom d'une logique qui n'est pas la logique contractuelle
; le contenu des conventions est remodelé par le jeu des exemptions. Les
instruments mis à la disposition des autorités de la concurrence
façonnent les conventions 2(*) de façon plus ou moins despotique, mais avec
une précision jusqu'alors inconnue. L'on en déduit que le contrat
est pris d'assaut. L'on craint, une nouvelle fois, pour sa survie.
Droit boulimique, droit irrespectueux, droit sans fondement
stable et sans légitimité, les qualificatifs qui accompagnent le
droit des pratiques anticoncurrentielles font donc de lui un mal
aimé.
Le droit de la concurrence est mal perçu parce
méconnu. Curieusement, alors que la doctrine a fait de l'entente un
thème de cogitation privilégié, les interférences
entre droit de la concurrence et droit des obligations ont été
peu étudiées. Lorsqu'il est apparu que le contrat pouvait
constituer le moyen de confisquer les richesses au profit d'un petit nombre,
l'attention s'est obliquée vers d'autres mécanismes.
L'utilité du contrat n'a pas été réfutée,
mais l'on a commandé sa surveillance. Tant que la confiscation et
l'organisation du marché sont restées un phénomène
marginal, ce fut seulement une surveillance pénale. A mesure qu'elles se
sont sophistiquées, généralisées et
internationalisées, la surveillance est devenue administrative. L'on
peut dire, par une simplification sans doute réductrice, que le droit de
la concurrence au sens actuel a été le fruit de cette
évolution. Né aux Etats Unis, il s'est développé en
Europe sous l'impulsion des Communautés européennes.
Pour ce qui est des autorités de la concurrence :
autorités de régulations : le terme régulation est
utilisé de nos jours pour le démarquer du terme
réglementation, lequel en anglais se révèle être un
faux ami. Le terme régulation en anglais reçoit en matière
juridique le sens de réglementation en français,
c'est-à-dire des dispositions unilatérales et impératives
émanant des pouvoirs publics, ce que nous serions tentés
d'appeler public Policy. Comme l'a montré J. Chevallier, il ne
faut pas confondre déréglementation et
dérégulation. Au contraire, la déréglementation
appelle la régulation. La déréglementation n'opère
pas un passage vers la liberté totale, la liberté sauvage, sans
contrôle. C'est la régulation, avec une législation
abondante, qui se substitue à la réglementation. Il est certain
que le concept de régulation permet de décrire le retrait de
l'Etat de la régulation sinon sociale, du moins économique.
L'Etat n'est plus le seul régulateur. Il y a d'autres modes de
régulation que les modes étatiques, associant notamment les
acteurs économiques.
Cependant, ces autorités de concurrence ne disposent pas
du pouvoir d'annuler les conventions. Cela relève de la
compétence exclusive des magistrats et des arbitres. La nullité
est une sanction plus respectueuse de la volonté contractuelle mais son
usage dans le contentieux concurrentiel s'avère complexe.
Prétendre embrasser l'ensemble des relations unissant le
droit des pratiques anticoncurrentielles et le droit des contrats nous a
semblé une gageure. Nous avons préféré circonscrire
le champ de nos recherches.
Le plan de l'étude sera conforme à la double
démarche de l'encadrement juridique et processuel des ententes
anticoncurrentielles
Chapitre I: Encadrement juridique des ententes
anticoncurrentielles.
SAVATIER écrivait en 1965 à propos de la
technique de l'ordre public 3(*) :
"Du fait qu'elle ne s'intègre pas aux règles
générales du droit, cette technique a son efficacité
particulière. Le juge, même quand il n'y est pas adapté,
même quand elle le dépouille pratiquement d'une partie de sa
juridiction, doit la reconnaître. Mais on comprend qu'il s'en
défie parfois. Car, du fait qu'elle demeure essentiellement une
technique sans objet normatif, et à fins utilitaires, elle risque de
barrer, aux techniciens de l'Economie, les horizons dépassant leur but
immédiat : "l'Expansion". L'intérêt économique
qu'ils poursuivent est plus étroit et voit moins haut que le sens des
disciplines juridiques. Sans doute, la technique économique entend (...)
concourir lointainement à une Justice. Mais auparavant, dans les buts
trop courts qu'elle s'assigne, elle risque d'oublier la Justice. C'est en quoi,
malgré ses progrès, elle recèle un danger."
Face à ce danger, la théorie
générale du contrat joue une fonction correctrice. Elle constitue
un jalon, un élément de stabilité. A la lumière de
la notion du contrat, l'entente anticoncurrentielle peut être, et doit
être analysée. Ces deux notions sont unies par leur processus de
création : issues toutes deux d'un concours de volontés. Quant
aux autorités régulatrices, elles ne peuvent s'immiscer que si
elles démontrent que l'affectation de la concurrence est le fruit d'une
entente. Leur action peut conduire à une modification sensible de la
situation juridique des opérateurs. Cette intervention ne peut donc
être intempestive. Il existe deux fondements, qui correspondent aux deux
caractéristiques de l'entente anticoncurrentielle. L'entente se
caractérise par son processus de création : elle est issue d'un
concours de volontés. (Section 1), L'entente prohibée est
anticoncurrentielle, soit par le but qu'elle poursuit (Section 2 §1), soit
par le résultat qu'elle produit (Section 2 § 2).
Section 1: Notion de l'entente.
L'entente anticoncurrentielle, pratique prohibée par
l'article 6 de la loi 06-99 4(*), s'inspirant de l'article L 420-1 du code de commerce
Français, cette même réglementation remonte à 1953,
elle s'inspire à son tour des règles connues dans les principaux
pays occidentaux et, notamment de la réglementation américaine
issue du Shermanact5(*) de
1890 et du droit communautaire.
Pour qu'il y ait entente anticoncurrentielle, deux conditions
sont inéluctables. Il faut tout d'abord, une collusion, c'est à
dire une entente. Il faut ensuite, que cette collusion comporte une incidence
sur la concurrence, autrement dit entrave cette dernière, ayant pour
objet ou effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la
concurrence. Toute entreprise exerçant une activité de
production, de distribution et de service est concernée par cette
interdiction. C'est ce qui ressort de l'article 6 de la loi 06-99 et l'article
L.420-1 du code de commerce français. Le pourquoi du comment de cette
définition est de prédestiner les éléments
constitutifs de l'entente dénominant l'entente.
§1 : Les éléments d'entente.
A- Volonté de s'entendre.
Le rôle névralgique assumé par la
volonté témoigne de la parenté entre l'entente et le
contrat. De même qu'il ne peut y avoir contrat sans volonté de
contracter, il ne peut être question d'entente sans volonté de
s'entendre.
L'entente anticoncurrentielle est une notion objective : la
poursuite par les parties d'un but anticoncurrentiel n'est pas une condition de
l'incrimination. Mais l'entente elle même, définie comme un
concours de volontés autonomes, reste une notion subjective.
Parce que la volonté est un élément
constitutif de l'entente, «les entreprises ne sont sanctionnées
que pour des comportements qu'elles ont volontairement adoptés et non du
seul fait qu'elles se trouvent situées sur certains marchés
»6(*). Pour
être condamné, un comportement ne doit pas être
fortuit, ou imposé par la structure du marché.
L'hypothèse la plus fréquemment visée est celle d'un
marché oligopolistique. Il s'agit d'un marché
caractérisé par la présence d'un nombre très
contingenté d'offreurs, déambulant dans des conditions
identiques.
L'analyse économique révèle que leur
dépendance économique mutuelle est un frein à leur
rivalité concurrentielle. Du fait de leur petit nombre en effet, chacun
anticipe les réactions des concurrents, se détermine par rapport
à elles, et y répond fortement. Si l'entreprise
A décide de "casser ses prix", l'entreprise
B en aura immédiatement connaissance et va être
contrainte de procéder de même très rapidement pour
éviter une fuite de sa clientèle. Il est même possible que
B accentue le phénomène à la baisse.
Chaque opérateur va s'enliser dans une guerre des prix
dévastatrice. Plutôt que de s'y livrer, les entreprises vont
chercher à "maximiser leur profit joint "7(*), en se comportant comme si
chacune était en position de monopole. La simple rationalité des
opérateurs les pousse donc à des politiques d'alignement des prix
à la hausse plutôt qu'à la baisse.
C'est la structure du marché, et non une entente, qui
explique ce phénomène. On ne peut donc condamner les
entreprises du simple fait qu'elles adoptent des comportements
parallèles.
L'entente implique donc un accord de volonté, supposant
que les parties concernées agencent d'une autonomie de décision
suffisante les unes par rapport aux autres. Une simple tentative ou proposition
sans qu'il soit démontré qu'elle ait été
acceptée ne suffit pas. Par contre, il a été
considéré qu'un agrément d'un distributeur par un
producteur relevait de l'entente anticoncurrentielle (CA Paris, 28 janv. 1988;
Cass. 25 avr. 1989). 8(*)
Pour couronner le tout :
a- L'entente ne peut absolument pas résulter d'une
situation de fait: C'est-à-dire qu'elle ne se présume pas, elle
doit être prouvée par un agglomérat d'indices graves,
précis et concordants.
b- Les parties à l'entente n'étant pas
caractérisées que ce soit dans l'article L-420 du code de
commerce français, ni dans l'article 6 de la loi 06-99, ainsi,
semble-t-il que la qualification de l'entente est franc-tireuse de la
qualité de ses adeptes. D'une façon différente, ce sont
des entreprises indépendantes les unes par rapport aux autres,
même si elles ne se font concurrence, il ne leur est donc pas requis
qu'ils exercent une activité dans le même secteur où s'est
conclue l'entente. Le concours d'une entreprise à l'entente est le
critère d'incrimination et non pas l'exercice par celle-ci d'une
activité sur le marché concerné par l'entente. Mais tout
bien considéré, cette entreprise ne sera sanctionnée que
si son accord de volonté est exempt de vice.
c- Les ententes entre entreprises du même groupe ne
tombent pas sous le coup de l'interdiction de l'article 6 de la loi 06-99 ni
l'article L.420 du code de commerce français ou même l'article 81
du traité instituant la Communauté européenne9(*) (ancien art.85), dès lors
que ces entreprises du même groupe possèdent leur volonté
propre sur le plan commercial, financier ou technique. L'opinion selon laquelle
ces entreprises forment une entreprise unique auxquelles il ne peut être
stigmatisé de s'entendre avec elles-mêmes, ne semble pas
cohérente avec la logique économique du droit de la concurrence.
B- Atteinte à la concurrence.
La restriction de la concurrence peut être potentielle
ou actuelle. L'article 6 de la liberté des prix et de la concurrence
comme l'article L.420 du code de commerce français prohibent les
comportements anticoncurrentiels
« pouvant avoir » pour objet ou pour effet
de restreindre le jeu de la concurrence. Alors que l'article 81 du
traité instituant la Communauté européenne vise les
ententes « ayant » pour effet de fausser
la concurrence. Cependant, la disparité n'est pas rondelette dans la
pratique.
Les notions d'objet et d'effet établissent le lien de
causalité entre la perturbation de concurrence et l'entente. Ces
critères sont alternatifs : "la démonstration du
fait que la pratique a eu un effet sur la concurrence n'est (...) pas
nécessaire dès lors qu'il est établi que son
objet était anticoncurrentiel ou qu'elle aurait pu avoir un effet
anticoncurrentiel "10(*).
- La notion d'objet
anticoncurrentiel : est particulièrement
arachnéenne. Si on peut la rattacher à l'intention des parties,
ce ne peut-être que dans une conception "objective" de l'intention. On ne
peut exiger des autorités de la concurrence qu'elles prennent en
considération la psychologie des parties, qu'elles quêtent les
mobiles qui les aiguillonnent. L'intention se déduit de l'analyse des
termes de l'entente, du contexte et de l'expérience acquise. Ainsi
Madame SELINSKY juge-t-elle que l'intention anticoncurrentielle existe
"lorsque les professionnels transgressent la loi en toute connaissance de
cause, c'est-à-dire en ayant conscience des effets normalement
prévisibles des pratiques qu'ils entendent mettre en
oeuvre"11(*). Ne
saurait être absolutoire pour les entreprises, l'excuse
de l'ignorance ou de l'absence de conscience de la portée de leurs
actes.
Ajoutons à cela que, objet est entendu au sens
d'objectif, de « but poursuivi ».Pour le
supputer, « les autorités de concurrences ne se livrent
à l'évidence pas à une recherche de
l'intentionnalité des parties. ». L'autorité
régulatrice doit parfois s'attacher au contexte juridique et
économique de la pratique, en fonction des données du
marché en cause.
Il convient pour l'autorité régulatrice de
« prendre en considération la nature, la quantité
limitée ou non des produits faisant l'objet des pratiques, la position
et l'importance des parties sur le marché concerné, le
caractère isolé de la pratique, ou au contraire, la place de
celui-ci dans un ensemble d'accords (effets cumulatifs). » ;
démystifie le conseil de concurrence. Dans cette dernière
situation, un accord vertical peut être parfaitement légitime mais
devient anticoncurrentiel au motif du verrouillage de marché par la
présence d'accords verticaux similaires.12(*)
Les ententes dont la mise en oeuvre achemine
nécessairement à restreindre la concurrence sont
sanctionnées. Pour mieux faire apparaitre cette logique : Les
ententes ne sont prohibées que si l'on peut prévoir, "avec un
degré de probabilité suffisant " que leur mise en oeuvre
produira des effets restrictifs.
Sous cette même logique, l'atteinte à la
concurrence est présumée. Dès lors, l'examen des effets
devient inutile. Cette analyse élucide qu'une entente puisse être
interdite sans jamais avoir reçu application ; possible donc,
est-il d'interdire un accord anticoncurrentiel avant même sa mise en
oeuvre, que des ententes anticoncurrentielles ayant échoué soient
cependant sanctionnées et que la simple tentative d'atteinte à la
concurrence soit punissable. La tentative d'entente n'est pas punissable ;
la tentative d'atteinte à la concurrence l'est.
L'objet anticoncurrentiel peut en pratique se défalquer
, soit de l'analyse des clauses juridiques du contrat constituant l'entente, si
l'en existe un, soit le cas échéant, et en l'absence de toute
formalisation écrite, de simples P.V de réunions qui peuvent
suffire à constituer la preuve de l'intention de restreindre la
concurrence. S'il s'avère que l'objet de l'accord en cause est
anticoncurrentiel, l'analyse de l'effet devient inutile.
- La notion d'effet
anticoncurrentiel : Lorsque l'objet n'est pas
anticoncurrentiel, les autorités de la concurrence s'attachent aux
effets anticoncurrentiels; cela permet de faire tomber sous le coup de
l'interdiction des articles 6 de la loi 06-99, L.420 et 81 du traité,
des accords pour lesquels il n'existe pas une intention de restreindre la
concurrence. Conjointement, la détermination de l'effet permet aussi et
surtout de prohiber des pratiques concertées qu'il n'est pas possible de
dépister avant leur mise en oeuvre. Monsieur BLAISE fait remarquer que
la référence du droit français à la simple
potentialité d'effet "montre qu'il n'est nullement nécessaire
de tenir compte des intentions des membres de l'entente. Il s'agit ici
de la simple potentialité objective d'une altération de la
concurrence ou des prix, en dehors de toute volonté des
participants, et même à l'insu de ceux-ci "
La première démarche consiste à
délimiter le marché en cause13(*), Comme pour l'article 86, celui-ci est fixé
par la matière de l'activité concernée puis par sa
configuration géographique. Or, si les critères utilisés
sont identiques, l'estimation diffère : elle n'intervient que pour
conjecturer l'importance de la distorsion à la concurrence,
c'est-à-dire de l'applicabilité du droit communautaire et de la
gravité de l'infraction. Dans l'affaire Windsurfing relative à un
contrat de licence, la requérante contestait l'existence d'un commerce
spécifique de composants isolés de planche à voile avant
1981. La cour reconnaît qu'il n'y aurait pas d'affectation possible de la
concurrence à défaut d'un tel marché. Si tel
n'était pas le cas en l'espèce, l'amende devait néanmoins
être réduite : « la gravité des infractions
est diminuée du fait que (...) le marché des composants
n'était pas très important par rapport au marché des
planches à voiles complètes » sur la période
concernée.
Une fois le marché délimité, plusieurs
éléments, que l'on retrouve dans le cadre de l'application de
l'article 86, sont pris en compte par la Commission pour apprécier la
distorsion d'une entente sur la concurrence. De façon plus explicite,
« Démontrer que la pratique chavire la concurrence ou est
susceptible de l'affecter à un tel point qu'il soit possible de
prévoir avec une assez bonne probabilité que cette pratique aura
sur le marché en cause des effets négatifs sur les prix, la
production, l'innovation, la diversité ou la qualité des produits
ou services » telle est la démarche. On voit donc que la prise
en compte de l'effet ne touche que le trouble constaté sur le
marché : sont examinés les effets potentiels, probables, de
l'accord sur le jeu de la concurrence. Le pouvoir de marché des
entreprises devient alors déterminant : plus ce pouvoir est fort,
plus l'effet de leur pratique sera durement ressenti.
Il est à dire que la notion d'objet porte en germe
celle de potentialité d'effet. On peut lire, dans les observations
générales formulées par le Conseil en introduction de son
septième rapport d'activité, que les pratiques
anticoncurrentielles sont prohibées "dès lors qu'elles ont un
objet ou même seulement une potentialité d'effet
anticoncurrentiel et qu'il est indifférent, à cet
égard, que ces pratiques aient eu peu ou
n'aient eu même aucun effet sur le marché "14(*). L'affirmation est
surprenante. Le droit français semble admettre qu'il existe "des
ententes interdites par nature ". C'est bien à cette
conclusion que conduit l'indifférence avouée à
l'égard de l'effet anticoncurrentiel. Ces développements restent
théoriques. Si l'on veut assimiler les notions d'objet et d'effet
anticoncurrentiel, il faut illustrer notre propos de quelques exemples, dont la
liste n'est pas exhaustive.
- Sont réprimées par les deux ordres juridiques
les ententes ayant pour objet ou pour effet de fixer les prix d'achat ou de
vente (article 6.2 de la loi 06-99, article 81, §1 du Traité de
Rome et L.420.2 du code de commerce français). La détermination
des prix par le libre jeu du marché est un facteur important de la
compétition économique. Les pratiques de prix imposés sont
donc sévèrement sanctionnées ainsi que les concertations
sur les prix et les marges. Les pratiques de prix conseillés sont, quant
à elles, jugées suspectes.
- Sont également sanctionnées les ententes ayant
pour objet ou pour effet de limiter l'accès au marché (article
6.1, 81.1, et L.420.1). Sont notamment visées les pratiques de quotas,
les accords fixant des normes de production et les pratiques de boycott.
En addition à ces dénominateurs communs des
éléments constitutifs de l'entente au regard du droit de la
concurrence Marocain et le droit de la concurrence Français et
communautaire, nous ajoutons brièvement :
- Le libre consentement : Dans un cas où à
l'occasion d'une opération de concentration réalisée par
lui, un groupe de distribution a fait savoir à l'ensemble de ses
fournisseurs qu'il entendait subordonner la poursuite des relations
commerciales à des conditions plus avantageuses, il n'y a
d'adhésion des fournisseurs que parce qu'il y a une atteinte à
leur autonomie de décision (Cass. Comm., 7 avr. 1988,
Société Rallye)15(*). Dans cette affaire, la cour de cassation a
cassé l'arrêt de la Cour d'appel en indiquant :
« ... Attendu que pour réformer la
décision n 95-D-34 du 9 mai 1995 du Conseil de la concurrence et
condamner la société Rallye au paiement d'une sanction
pécuniaire, la Cour d'appel énonce que l'acte par lequel un
distributeur à l'occasion d'une opération de concentration
réalisée par lui, fait savoir à l'ensemble des
fournisseurs d'une catégorie de produits ou à une partie
substantielle d'entre eux à des conditions supplémentaires par
rapport à celles qu'il avait acceptées, est susceptible
d'être visé par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du
1er décembre 1986 ; ... attendu qu'en statuant ainsi,
alors que l'accord allégué ne pouvait être qualifié
d'action concertée ou d'entente au sens de l'article 7 de l'ordonnance
du 1er décembre 1986 que s'il était établi que
les parties y avaient librement consenti en vue de limiter l'accès au
marché ou à la libre concurrence ; qu'ayant seulement
constaté que cette pratique prise à l'initiative de la
société Rallye, qui aurait été susceptible de
recevoir d'autres qualifications juridiques au regard de l'ordonnance
susvisée, avait été de nature à entraîner
l'adhésion des fournisseurs ou de certains d'entre eux et avait eu pour
effet d'affecter `leur autonomie de décision', la Cour d'appel a
violé le texte susvisé. »
- L'autonomie de décision : Le problème
peut se poser pour une société mère et ses filiales ou
entre filiales.
En raison du défaut de l'autonomie de la volonté
propre d'une entreprise, il ne peut y avoir entente. L'autonomie de la filiale
à l'égard de la société mère est
appréciée au niveau commercial et financier. Il n'y a pas
autonomie s'il s'agit d'une filiale à 100% mais également
à 50% et même 35% compte tenu de considération
structurelles ou tenant au marché. En réalité, tout le
comportement de la filiale à l'égard de la société
mère sera pris en considération. Les entreprises
liées entre elles ne doivent pas simuler la concurrence. La Cour d'appel
de Paris, dans son arrêt Société Herlicq du 19 septembre
1990 a indiqué :
« Considérant que des entreprises
appartenant au même groupe qui ont présenté des offres
distinctes mais préparées par des services techniques et des
bureaux d'études du groupe, prétendent trouver une justification
en alléguant la connaissance par le maître de l'ouvrage des liens
existant entre elles ; considérant cependant que s'il est loisible
à des entreprises unies par des liens juridiques et financiers mais
disposant d'une réelle autonomie technique et commerciale de
présenter des offres distinctes, elles doivent le faire en respectant
les règles de la concurrence ; qu'il est sans incidence que les
maîtres de l'ouvrage aient connu les liens juridiques unissant les
sociétés concernées dès lors qu'ils ignoraient
qu'elles constituaient une entreprise unique ou que leurs offres
procédaient d'une connivence ».
La théorie de l'autonomie de la volonté,
même contestée, est cardinale en droit des obligations. Elle
signifie que l'homme, face à la volonté du législateur,
est "apte à se donner sa propre loi "16(*). Elle allègue, dans
l'opinion commune, la force obligatoire de l'engagement souscrit par
l'individu.
La notion d'autonomie a en droit de la concurrence une
signification plus pragmatique. Toute connotation philosophique ou morale en
est absente. Elle n'est pas une théorie, elle n'est pas une
justification ; elle est une condition d'application d'une règle
prohibitive.
Seuls les agents autonomes sont susceptibles d'être
visés par l'article 81, paragraphe 1. L'autonomie ainsi exigée
est essentiellement économique, mais nous verrons, à travers
différents exemples, que des critères juridiques sont
également utilisés.
Certains opérateurs, parfaitement capables de
contracter, sont jugés comme non autonomes par le droit de la
concurrence. Ils ne sont pas considérés comme parties à
une concertation. Tout contrat n'est pas une entente. C'est le cas des accords
auxquels sont parties des intermédiaires de commerce (a) ou des filiales
(b).
a- Les auxiliaires de commerce.
Le problème des auxiliaires de commerce a
été amplement débattu en doctrine et en jurisprudence. Les
contrats conclus avec les représentants par lesquels ils s'engagent,
pour une partie déterminée du territoire de la Communauté,
"à négocier des affaires pour le compte d'une
entreprise, ou à conclure au nom et pour le compte de celle-ci", ne
sont pas visés par la prohibition. Ces contrats sont
considérés comme non restrictifs de concurrence : l'agent
agissant pour le compte du commettant, celui-ci ne peut pas se faire
concurrence à lui-même.
b- Les relations entre entreprises appartenant
à un même groupe.
L'autorité exercée par la mère sur sa
filiale interdisait de voir en elle "une entité économique
pouvant entrer en concurrence avec la société mère
".
C'est donc l'absence d'entrave à la concurrence qui
était invoquée à l'appui de la solution.
Le fondement a été encore affermi sur la
dépendance de la filiale par rapport à la société
mère. La première ne faisant qu'exécuter les instructions
de la seconde. Il ne peut y avoir entre elles concours de volontés. La
dépendance dont il s'agit est d'ordre économique. Juridiquement
les sociétés sont bien distinctes : elles ont chacune la
personnalité morale.
La Cour a consacré l'inapplicabilité de
l'article 85 aux accords et pratiques intragroupes, aux conditions que "les
entreprises forment une unité économique à
l'intérieur de laquelle la filiale ne jouit d'aucune autonomie
réelle dans la détermination de sa ligne d'action sur le
marché et (que) ces accords ou pratiques (aient) pour but
d'établir une répartition des tâches entre les
entreprises "17(*).
La société C.M.S. Dental est agent exclusif des
produits de la marque Komet façonnés en Allemagne par la
société Brasseler. Une clause additionnelle au contrat
d'exclusivité qui les lie a été rédigée,
tendant singulièrement à exclure la vente de ce matériel
par correspondance. Mise en cause, la société C.M.S. Dental
prétend que l'article 7 de l'ordonnance18(*) (nouveau L.420 du code de commerce français)
est sans application en l'espèce du fait qu'étant une filiale de
la société Brasseler, elle ne peut tomber sous le coup du grief
d'entente avec celle-ci. Le Conseil lui oppose "qu'elle n'était
devenue filiale de cette dernière qu'en 1990 " ; "qu'il
résulte de cette situation qu'en tout cas jusqu'à
l'année 1990, le contrat de distribution exclusive assorti de
sa clause additionnelle avait bien le caractère d'une entente au sens de
l'article 7 de l'ordonnance."
Une lecture a contrario de ce motif permet
d'établir qu'à compter de 1990, les liens de mère à
filiale font obstacle à l'application du texte.
La décision est confirmée par la Cour d'appel de
Paris 19(*), qui apporte
une précision intéressante. La société C.M.S.
Dental fait valoir devant la Cour qu'avant de devenir une filiale de la
société Brasseler, elle était déjà
"économiquement liée à elle ", et qu'elle ne
pouvait, de ce fait, avoir mis en oeuvre des pratiques d'entente. Il lui est
répondu que
"(...) le fait qu'elle ait depuis de nombreuses
années pour seule activité la diffusion en
France des produits fabriqués par la
société Brasseler avec laquelle elle est liée par un
contrat l'obligeant à respecter ses consignes de distribution (...) ne
(suffit) pas à établir qu'avant la prise de contrôle
réalisée en 1990, elle avait déjà perdu son
autonomie commerciale et financière à l'égard de son
fournisseur exclusif et n'était pas une entreprise distincte de
celui-ci."
L'élément intentionnel est, on le voit,
rigoureusement contrôlé. Seules les volontés autonomes sont
prises en ligne de compte par le droit des ententes, mais les entreprises ne
peuvent trop facilement se réfugier derrière des liens
économiques pour se soustraire à la sanction.
Eriger ainsi la volonté en élément
constitutif semble impliquer que l'on veille à son
intégrité. C'est le cas en droit des contrats. Le droit des
ententes n'est pas aussi scrupuleux. Les pressions éventuellement
exercées sur une entreprise pour qu'elle adhère à
l'entente ne sont que rarement prises en compte.
L'effet des ententes est donc jaugé dans leur contexte
juridique. Un même accord n'aura pas la même incidence s'il est
cloîtré ou s'il régit seulement les relations d'entreprises
qui ne représentent qu'une modique part du marché (d'où
les seuils de sensibilité) ou si au contraire, il est de pratique
générale et si courante qu'il en résulte un effet
cumulatif
- Le seuil de
sensibilité : La condition de sensibilité veut
dire que seules les ententes restreignant de manière significative,
sensible, le jeu de la concurrence sont prohibées. . Il paraît en
effet inutile de sanctionner les ententes d'importance mineure20(*)
D'ailleurs, ce seuil de sensibilité n'est pas
atteint-en cas d'accords horizontaux- tant que l'accord ne couvre pas au moins
cinq pour cent du marché en cause.
La règle du seuil de sensibilité est d'origine
prétorienne. Aucun texte de base, communautaire ou français, ne
l'a posée. Elle fut cependant proférée très
tôt en droit communautaire.
Quid que, la notion est fondamentale en droit communautaire.
Elle connaît en droit français un destin un peu turbulent. En
France, le Conseil de la concurrence a été longtemps hostile
à l'adoption d'un seuil de sensibilité. Officiellement, il n'y
pas de « petites affaires ». On a dit que le droit
français s'illustre du droit communautaire en ce que l'article L.420
incrimine la simple possibilité d'un effet sur la concurrence, ce qui
interdirait de mesurer les effets réels d'une entente.
- L'effet cumulatif : La
théorie de «l'effet cumulatif» autorise, pour toiser la
dangerosité d'une pratique, à prendre en considération
l'ensemble des pratiques identiques ou similaires développées sur
le même marché. C'est la conjonction de tous les accords et
comportements parallèles qui vont permettre de condamner une entente,
qui, à elle seule, ne relevait pas de la prohibition. La théorie
de l'effet cumulatif n'a aucune assise juridique. Aucune des ententes prises
«individuellement» n'ayant pour objet ou pour effet de porter
atteinte à la concurrence, le lien de causalité entre la
concertation et la perturbation du marché est distendu.
Finalement en matière de transports maritimes, le
règlement (CEE) n° 4056/86 ne vise que « les transports
maritimes internationaux au départ ou à destination d'un ou de
plusieurs ports de la communauté »21(*). Dans le sens où il ne
s'intéresse pas aux trafics extra-communautaires.
Néanmoins, le critère de l'effet
anticoncurrentiel dans le marché commun n'est pas exclu.
Par exemple, la société Neptune Orient
Lines, qui est une société américaine, a
été condamnée quand il s'agissait des accords portant sur
le trafic entre l'Europe et les Etats-Unis. En revanche, la même
société, dont le siège était cette fois-ci à
Singapour a été condamnée par la commission pour avoir
participé à des accords de fret portant sur le segment terrestre
entre l'Europe et l'Extrême-Orient. L'atteinte de la
société étrangère, dont le siège est
situé dans un pays faisant partie du trafic en cause est
cherchée. Or, en matière de transport maritime, de nombreuses
filiales sont essaimées à travers le monde, ce qui permet de
mieux répondre aux attentes des professionnels locaux. Il importe
seulement que la société filiale ou non soit partie à un
accord produisant un effet anticoncurrentiel à l'intérieur du
Marché commun.
Section 2 : Les catégories d'ententes.
Il a été dit liminairement que toutes les formes
de concertation sont issues d'un concours de volontés. La formule est
parfois expressément utilisée : "le concours de
volontés constitutif d'un comportement contraire aux
dispositions de l'article 50 de l'Ordonnance n° 45-1483 du 30
juin 1945 et de l'article 7 de l'Ordonnance du 1er décembre 1986
". On voit que la formule ne disociee pas entre les accords, conventions,
et pratiques concertées. Elle les englobe toutes.
D'autres dénominations sont parfois utilisées :
"manifestation d'un accord de volontés", "entreprises agissant de
concert", "consensus sur un projet". Le choix du législateur d'une
panoplie de termes proche révèle sa volonté d'adopter une
conception large qui permet d'étendre l'interdiction à toute
forme d'accord entre les entreprises.
§1 : Les formes des ententes.
Les accords se dédoublent donc en deux
catégories : ceux créant des obligations juridiques et ceux
créant de simples obligations morales. On peut ameuter dans la
première les ententes empruntant une forme contractuelle classique
(contrat de distribution, contrat de vente, contrat de licence...(A)) et les
ententes s'appuyant sur des structures organiques (B) telles que les
sociétés, les associations, les syndicats. On peut
intégrer à la seconde les engagements d'honneur22(*), mais aussi les memorandum,
protocoles...
La troisième forme de concertation, la pratique
concertée (C), est pourtant habituellement présentée comme
une exception à ce principe.
A- Les ententes contractuelles.
Ce sont des contrats au sens du droit civil,
c'est-à-dire des conventions ayant force obligatoire entre les parties.
Abstraction faite de leur forme, de leur statut juridique, de leur objet, de la
qualité de leurs signataires, toutes les conventions sont susceptibles
d'entrer dans le champ d'application de l'article 6 de la loi sur la
liberté des prix et de la concurrence.
Aussi, l'article L.420 du CCF perche le principe
d'interdiction de toutes les ententes, qu'elle qu'en soit la forme visant les
actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou
coalition. Il est clair qu'en conservant cette accumulation de termes plus ou
moins redondants, les rédacteurs de l'ordonnance ont voulu montrer leur
attachement à une notion d'entente qui fût la plus large possible.
Cependant cette interdiction n'est pas absolue car l'article 10 de l'ordonnance
admet, exceptionnellement, certaines causes de justification.
L'article 81 vise quant à lui « les accords
entre entreprises », les « décisions d'association
d'entreprises » et les « pratiques
concertées » mais n'en définit pas les concepts. Il est
vrai qu'il n'y aurait pas grand sens à vouloir les distinguer de
façon monolithique puisque les règles de la concurrence
s'attachent plus aux résultats économiques de l'accord.
Constatée par écrit ou simplement convenue
oralement, expressément ou tacitement, importe peu.
Il importe peu aussi, si la convention ait été
établie unilatéralement par une seule partie dès lors que
les autres parties aient adhéré à cette convention, soit
en la signant, soit en l'appliquant. Quant au statut juridique de la
convention, il peut s'appliquer aux conventions de droit privé comme aux
conventions de droit public.
Si l'objet de la convention se confond avec le contrat
lui-même, celui-ci peut être déclaré illicite en soi
dès lors que son objet est jugé anticoncurrentiel. Si par contre,
seul certaines clauses du contrat sont de nature à affecter le jeu de la
concurrence, la convention peut être maintenue sous condition de
supprimer ou d'aménager les clauses anticoncurrentielles. Les parties
à la convention peuvent être des entreprises concurrentes
situées au même stade de l'activité économique.
Les ententes contractuelles soulèvent deux
difficultés. La première est classique, elle concerne les accords
dits verticaux. La seconde, plus nouvelle, est liée aux recommandations
et directives émanant du producteur.
a- Les ententes verticales.
« Les ententes anticoncurrentielles peuvent
également être constituées par des conventions conclues
entre des opérateurs situées à différents stades du
processus de production et de distribution » (Cons. Conc., Rapp.
1997). Autrement dit, unissant des entreprises intervenants à un niveau
différent de la chaîne économique elles ont toujours
été peu suspectes car leurs membres ne sont pas en rapport de
concurrence. Par exemple un fabriquant et un distributeur, un sous-traitant et
un entrepreneur principal. Les entreprises ne sont pas concurrentes dans cette
circonstance, le recours à l'accord manifeste la volonté de
contrôler la chaîne de distribution d'un produit, en
écornant les coûts intrinsèques à cette
organisation. Le contrôle de la politique des revendeurs permet, par
exemple de dérober la pratique de prix trop élevés. Il
permet encore de combattre les risques de parasitisme. Les ententes empruntent
généralement une forme contractuelle contrat de
distribution : contrat de vente exclusive, contrat d'approvisionnement
exclusif, contrat de distribution sélective. Cet emprunt leur
confère une certaine stabilité.
Parce que leur fondement est contractuel, leur
juridicité n'est pas mise en cause. Elles sont valables ou
viciées, mais nul ne s'interroge sur leur nature juridique. Si elles
sont valables, l'ordre juridique leur prodigue sa protection. Si elles sont
illicites, elles sont annulées, ou leur contenu remodelé.
Le choix d'un accord vertical peut ainsi s'expliquer
schématiquement de deux manières.
D'un premier point de vue, l'entente exacerbe
l'efficacité des entreprises qui triturent leur coûts, cuirassent
leurs investissements. D'un autre point de vue, l'entente permet d'enfler le
pouvoir de marché des entreprises. Du premier point de vue, l'entente
paraît efficiente ; du second, elle semble dangereuse.
Cependant, la question qui se pose, est de savoir s'il
convenait de traiter les accords verticaux comme des ententes a
été autrefois très discutée.
Les adversaires de l'assimilation soulignant deux
arguments.
1- Un argument d'ordre pratique : L'interdiction des
contrats de distribution était impossible, car les réseaux de
vente étaient indispensables à l'économie.
2- Un argument de logique, ensuite : les parties à
l'accord de distribution n'étant concurrentes l'une de l'autre, l'on ne
voyait pas comment elles auraient pu renoncer à se faire concurrence.
Parce qu'aujourd'hui, on trouve plus rarement des contrats,
avec des clauses d'exclusivité par exemple qui entraînent une
protection territoriale absolue. Ce comportement est pratiquement toujours
sanctionné en droit de la concurrence en matière de restriction
verticale.
Quelques exemples de comportements condamnés que l'on
retrouve très souvent en matière d'entente verticale, il s'agit
des conditions générales de vente - alias ententes de
coopération commerciale- et la notion de réduction de prix qui
doivent apparaître sur les factures. Cependant, il est excessivement
simple d'imposer un prix en ne mettant pas sur les factures certaines remises,
ou ristournes puisque le commerçant ne pourra pas les prendre en
considération pour calculer son prix de revente.
Exemple 1: Dans l'affaire des produits cosmétiques
et d'hygiène corporelle, les fabricants avaient mis en place un
système de distribution qui interdisait la vente autrement qu'en
pharmacie, alors que lesdits produits ne constituaient en aucune manière
des médicaments. Les revendeurs autres que les officines
pharmaceutiques, par exemple les parfumeurs ou les magasins en grande surface
se heurtaient de la part des fabricants à un refus d'approvisionnement.
Le conseil de la concurrence dans sa décision du 9 juin 1987 a
estimé que les clauses d'exclusivité souscrites par les
fabricants en faveur des officines pharmaceutiques constituaient des
conventions tombant sous le coup de l'article 7. Elles limitaient la
concurrence par les prix et privaient les autres distributeurs de la vente des
produits. La Cour d'appel de Paris, puis la Cour de cassation ont donné
raison au conseil de la concurrence
Exemple 2: La société Philips Electronique
qui commercialisait des platines-laser, détenait 23% du marché
français de ce type de produits. La société accordait des
remises à ses distributeurs, mais à la condition qu'ils n'aient
pas revendu ses appareils en dessous d'un certain prix. C'était une
façon détournée de fixer des prix minimum à la
revente. Un revendeur qui se plaignait de ce système et qui avait subi
un refus de vente, saisit le conseil de la concurrence pour infraction à
l'article 7. La société invoquait pour sa défense le fait
que les remises, ainsi que le refus de vente, constituaient de sa part des
décisions unilatérales et non l'exécution d'accords de
distribution. Il est vrai que les revendeurs n'avaient pas formellement
donné leur accord aux mesures prises par leur fournisseur. Cependant
l'argument a été écarté par le conseil de la
concurrence. Le conseil a décidé que « les conditions
de vente et les engagements présentés à ses clients par la
société Philips sont acceptées explicitement ou tacitement
par les revendeurs... et constituent entre le fournisseur et les membres de son
réseau, des conventions susceptibles d'affecter la concurrence et
d'entrer dans le champ de l'application de l'article 7 de
l'ordonnance ».
Le fournisseur ici a essayé de démontrer que la
restriction de la concurrence n'est pas le résultat d'un accord
vertical, mais la simple conséquence d'une décision
unilatérale du fournisseur. Le conseil de la concurrence écarte
généralement cet argument. A partir du moment où un
fabriquant a mis en place un réseau de distribution, les
décisions qu'il prend dans le cadre de sa politique commerciale sont
l'expression d'un accord tacite consenti par ses revendeurs.23(*)
b- Les ententes horizontales.
« Les ententes anticoncurrentielles horizontales
peuvent revêtir des formes diverses telles que, par exemple des ententes
de prix ou de marges entre entreprises en principe concurrentes, la mise au
point et la diffusion de barème, l'élaboration et la diffusion de
recommandation ou directives en matière de prix ou de remises par des
organismes professionnels, des échanges d'informations ou des ententes
entre soumissionnaires à un même appel d'offres, des ententes de
répartition de marchés, des pratiques concertées visant
à exclure certaines entreprises d'un marché ou à en
limiter l'accès, des conditions générales de vente ou
d'achat, ainsi que leur application » (Cons. Conc., Rapp. 1997). Ces
ententes sont conclues entre des entreprises qui sont concurrentes les unes des
autres. Elles se situent au même stade du processus
production-distribution. Les concurrents coopèrent, or, cette
coopération entre eux, est loin d'une amitié. L'équilibre
trouvé au sein de l'entente est frêle : c'est ; pour
employer le vocabulaire de la théorie de jeux, un équilibre non
coopératif, qui repose sur l'intérêt individuel de chacun
des membres.
L'entente horizontale évoque le cartel, né au
milieu du XIXe siècle pour lutter contre les crises de surproductions.
Pour maximiser leurs profits, face à une demande exiguë, les
entreprises substituent l'accord à la concurrence : elles limitent
la production, fixent un prix de vente des produits, supérieur à
celui qui résulterait du jeu de confrontation.
Considérées comme étant les pires,
puisque ce sont des ententes entre concurrents qui vont avoir en
général un effet extrêmement carabiné sur la
concurrence. En matière d'ententes horizontales et contrairement aux
ententes verticales, il y a toujours eu condamnation, et c'est là
où les amendes les plus fortes ont été prononcées.
On retrouve d'ailleurs la même sévérité de
traitement au niveau européen et eu niveau du droit antitrust aux E.U.
Les comportements condamnés se retrouvent très souvent en
matière d'échange d'informations et d'appel d'offre, cela est
dû indirectement à la collectivité et aussi au consommateur
ou à l'utilisateur.
En matière d'échange d'informations, que l'on
peut retrouver au sein de quelques organisations professionnelles, il faut
savoir que les ordres des avocats ont été très souvent
sanctionnés pour entente parce qu'ils avaient édité tout
simplement des barèmes de prix pour leurs consultations. De même
les géomètres experts qui avaient édité des tarifs
et des contrats types ont été sanctionnées. Ainsi tout
comportement qui permettrait une entrave à l'accès au
marché peut l'être condamné.
Alors, qu'en matière de communications
électroniques, la quasi-totalité des affaires relatives aux
ententes qui ont pu être dénichées, ont trait aux accords
de vente exclusive de contenu d'appel : spécialement, les droits de
retransmission des matchs de football. Il s'agit des contrats passés
entre les fournisseurs de contenu, ou directement les titulaires des droits- en
premier lieu les fédérations sportives- et les diverses
plates-formes de distribution (télévision à péage,
télévision hertzienne, numérique, nouveaux médias).
Les batailles auxquelles se livrent les diffuseurs pour avoir accès
à ces droits- encore plus acharnées depuis l'arrivée des
opérateurs de télécommunications sur les marchés de
la télévision à péage et le lancement de leurs
offres « triple-jeu »- confirment l'importance
capitale du contenu premium pour la concurrence, dans les marchés
convergents de l'audiovisuel et des télécommunications.
L'accès à l'opérateur historique cypriote
des télécommunications (CYTA) au contenu d'appel, y compris aux
droits de transmission des rencontres de football du championnat national, par
le biais de deux accords avec le fournisseur de contenu LTV, n'a pas
reçu l'aval de l'autorité de la concurrence.24(*)La commission pour la
protection de la concurrence a déclaré contraire à la
disposition de la législation domestique sur la concurrence,
équivalente à celle prévue à l'article 81 CE, les
deux accords de distribution exclusive de contenu d'appel fourni par LTV, par
la plate-forme digitale de CYTA. La durée excessive de
l'exclusivité, de même que ses répercussions sur le
marché des services « triple-jeu », ainsi que la
puissance financière de l'opérateur historique, ont
été parmi les facteurs les plus importants qui ont amené
l'autorité à interdire les accords litigieux.
Aussi, la commercialisation en commun des droits
médiatiques pour les matchs de football en Pologne a fait l'objet d'une
enquête par l'Office polonais de la concurrence et la protection du
consommateur. Après les investigations entreprises, l'autorité a
condamné un accord de vente exclusive, passé entre la ligue
nationale de football et la chaine Canal +. En vertu de cet accord conclu suite
à un appel d'offre public-le diffuseur s'est vu attribuer les droits de
transmissions exclusives des matchs du championnat national pour quatre
saisons, de même par le biais d'une « clause
anglaise »25(*)
la priorité d'obtenir pour encore trois saisons
d'exclusivité.26(*)
B- Les ententes organiques.
L'entente peut prendre la forme d'un groupement pourvu de la
personnalité morale. Par exemple, des entreprises indépendantes,
n'appartenant pas au même groupe, constituent une société
commerciale qui centralise les commandes et assume la fonction centrale de
vente. La société est alors mandataire ou commissionnaire des
entreprises membres. Ou bien un groupement d'intérêt
général est constitué, qui agit dans
l'intérêt de ses membres. Ou encore les membres de l'entente
constituent une association ou un syndicat. Dans tous ces cas se pose le
problème de l'application de l'article 6 de la loi 06-99, et l'article
L.420, lorsque le groupement constitué induit des restrictions de la
concurrence.
Si le groupement ne peut être considéré en
soi comme une pratique restrictive de concurrence, il peut tomber sous la
qualification d'entente au moins dans deux cas :
1- Dans une première situation, le groupement a pour
objet statutaire des décisions qui sont par nature restrictives de
concurrence. Par exemple, le groupement a pour mission de fixer des quotas de
production attribués à ses membres ou de déterminer un
barème de prix.
2- Dans une deuxième situation, le groupement n'a pas
pour objet statutaire de générer des restrictions de concurrence,
mais, outrepassant ses pouvoirs, il favorise ou provoque des restrictions de
concurrence en la personne de ses membres. Il en est ainsi par exemple, des
associations ou chambres syndicales qui vont au-delà de leur mission de
simple défense des intérêts professionnels et qui, sortant
de leur mission statutaire, engendre des restrictions de concurrence, diffusant
à tire d'exemple des barèmes de prix ou donnant des consignes de
boycott de certaines entreprises.
Dans les deux cas, le groupement suffit à faire la
preuve de l'entente dont il constitue le moyen. Ces groupements tombent sous le
coup de l'article 6 de la loi sur la liberté des prix et de la
concurrence lorsqu'ils mettent en place ou tentent de mettre en place un
système corporatif, qui protège ses membres de la concurrence. Il
suffit alors, pour que l'infraction - de l'article 6 de la loi 06-99 et
naturellement L.420- soit constituée, que les organes compétents
du groupement prennent des décisions qui sont de nature à
affecter le jeu normal de la concurrence et qui s'imposent à ses
membres.
C- Les ententes silencieuses.
Toutes les formes de concertation requièrent un
élément intentionnel. L'hésitation était possible
pour les pratiques concertées que l'on a pu décrire comme de
«simples comportements de fait ». Mais la jurisprudence a
rappelé que l'intention restait un élément constitutif de
la pratique concertée. Elle a posé que cette catégorie
d'entente constitue une «forme de coordination entre entreprises, qui,
sans avoir été poussée jusqu'à la
réalisation d'une convention proprement dite, substituent sciemment une
coopération pratique entre elles aux risques de la concurrence
». Des auteurs mettent en exergue le caractère
déterminant de la volonté d'action que souligne le mot
"sciemment". D'autres la décrivent comme une discipline volontairement
consentie27(*). La
volonté constitue incontestablement le fondement de l'entente et la
mesure de ses effets. Ses protagonistes ont généralement
déterminé ses modalités d'application, son ampleur et ses
limites éventuelles.
La jurisprudence répondit par l'affirmative et essaya
de déterminer la notion de pratique concertée. Cette forme
d'entente «ne réunit pas tous les éléments d'un
accord mais peut notamment résulter d'une coordination qui
s'extériorise par le comportement des particuliers.»
Elle ajouta que «si un parallélisme de comportements ne peut
être à lui seul identifié à la pratique
concertée, il est cependant susceptible d'en constituer un indice
sérieux, lorsqu'il aboutit à des conditions de concurrence
qui ne correspondent pas aux conditions normales du marché,
compte tenu de la nature du produit, de l'importance et du nombre des
entreprises et du volume du dit marché.»
L'accord de volonté peut se déduire du
comportement des parties. La preuve peut en être procurée par un
faisceau d'indices matériels, ou par la méthode de la preuve
intellectuelle. On déduit l'entente de l'examen des conditions de
fonctionnement du marché.
L'action concertée se caractérise par une
situation de fait qui se révèle en l'absence de toute convention
juridiquement obligatoire. Déduite de comportement des entreprises en
cause. Alors qu'en réalité, très souvent les entreprises
cherchent à masquer un accord qui doit rester secret ou bien agissent de
concert sans vouloir s'engager dans les liens d'une convention trop
précise. L'action concertée soulève un double
problème de définition et de preuve de l'entente.
a- Définition de l'action
concertée.
Une action concertée peut être définie
comme une forme d'entente dans laquelle des entreprises, sans se lier
juridiquement, acceptent en pleine connaissance de cause, d'observer une
discipline commune de comportement. Elles renoncent à avoir des
comportements indépendants.
Monsieur KOVAR écrit qu'"à la
différence des accords, les pratiques concertées n'ont ni pour
objet, ni pour effet, de créer des engagements ou des obligations. Ce
sont de simples comportements de fait. ". Monsieur BLAISE considère
même que "la seule distinction logique reste donc celle qui oppose
les contrats, sous quelque forme qu'ils se révèlent, et qu'ils
soient ou non suivis d'action, aux actions concertées qui reposent sur
un simple accord non obligatoire.»
La même distinction est opérée en
jurisprudence. Elle avait déjà fait valoir que "si l'article
85 distingue la notion de "pratique concertée" de celle d'
"accords entre entreprises" ou de "décisions d'entreprises", c'est dans
le dessein d'appréhender sous les interdictions de cet article
une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir
été poussée jusqu'à la réalisation d'une
convention proprement dite, substitue sciemment une coopération
pratique entre elles aux risques de la concurrence »
Exemple : Des entreprises, concurrentes sur un même
marché, alignent spontanément et consciemment leurs prix sur ceux
qui sont pratiqués et publiés par l'entreprise chef de file. Il y
a une adhésion tacite de leur part à la politique du chef de
file. Elles renoncent à leur indépendance de décision.
Les éléments que peut comporter une action
concertée sont au nombre de deux. D'une part, elle est traduite par une
limitation ou une absence de concurrence, par exemple des prix similaires, non
compétitifs. D'autre part, elle comporte un élément
intellectuel, la renonciation à adopter un comportement
indépendant dans la certitude que les autres procéderont de
même. L'action concertée résulte de la réduction de
la marge d'incertitude qui est inhérente à toute concurrence.
b- Preuve de l'action concertée.
Les pratiques concertées posent immanquablement le
problème de l'acceptation des preuves indirectes, car la plupart du
temps la preuve de l'élément intellectuel ne peut pas être
rapportée directement. Il faut alors se fonder sur des
présomptions.
Le simple parallélisme de comportements des entreprises
ne suffit pas pour faire présumer la concertation préalable. Il
est parfaitement possible, par exemple, que plusieurs entreprises concurrentes
augmentent leurs prix dans des proportions voisines, à quelques jours de
différence, sans qu'elles soient nécessairement concertées
au préalable. En effet, la science économique enseigne que sur
certains types de marchés, des stratégies d'alignement peuvent se
développer spontanément, en dehors de toute concertation.
(Marchés d'oligopole)
La preuve de l'action concertée ne peut résulter
que d'autres indices, venant de s'ajouter aux comportements parallèles.
- En premier lieu, l'on peut tenir compte du fait que les
entreprises concurrentes ont eu des contacts entre elles, qu'elles ont
correspondu ou qu'elles ont organisé des réunions en commun. Les
indices de la concertation doivent être suffisamment précis et
concordants.
- En second lieu, l'on peut aussi trouver un indice dans
l'extrême similitude des comportements des entreprises. Par exemple,
elles ont pratiqué le même jour des hausses de prix dont les
pourcentages étaient exactement les mêmes. Une similitude aussi
poussée ne peut alors s'expliquer que par une concertation
préalable.
Exemple : Affaire de levure de panification. Sur ce
marché, deux grandes entreprises de fabrication de levure étaient
en concurrence. Entre juillet 1983 et février 1986, étaient
intervenues 4 hausses générales des prix, à des dates
identiques et pour des montants pratiquement semblables. Le conseil de la
concurrence a estimé qu'il y avait entente entre les deux entreprises
car leur parallélisme de comportement ne s'expliquait ni par les
conditions du marché, ni par la poursuite d'un intérêt
individuel. Premièrement, selon le conseil de la concurrence par les
prix pouvait jouer sur ce marché (parce qu'en fait il ne fonctionnait
pas comme un marché d'oligopole, notamment à cause de la
possibilité pour les utilisateurs de recourir aux importations).
Deuxièmement, le fait que l'une des entreprises annonçait
à l'avances les hausses importantes auxquelles elle allait
procéder « ne pouvait correspondre à la recherche de
son propre intérêt que si elle était assurée que
(son concurrent) pratiquerait des prix identiques aux siens » et
qu'elle ne pouvait avoir cette assurance sans une entente préalable avec
son concurrent. Si elle n'avait pas eu cette assurance, elle aurait pris un
trop grand risque, celui de voir le concurrent maintenir des prix plus bas et
prendre des parts de marché.
§2 : Les effets d'ententes.
Compte tenu du nombre et de la diversité des ententes
anticoncurrentielles, il serait impossible d'en fournir une liste exhaustive.
L'article 6 de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence et
L.420 du code de commerce français se borne-t-ils à citer les
exemples les plus caractéristiques : Les accords ou pratiques
concertées qui tendent à limiter l'accès au marché
ou pratiques concertées qui tendent à limiter l'accès au
marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises,
ceux qui tendent à faire obstacle à la fixation des prix par le
libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur
baisse ( le cas « classique » des ententes tarifaires),
ceux qui tendent à limiter ou contrôler la production, les
débouchés, les investissements ou le progrès technique,
ceux qui tendent à répartir les marchés ou les sources
d'approvisionnement. Des pratiques visées par d'autres textes peuvent
également relever de l'article 6 lorsque celles-ci sont constitutives
d'entente.
A- Les ententes tendant à limiter l'accès au
marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises
(art6. Al.1) (artL.420. Al.1).
Ces ententes sont essentiellement des ententes d'exclusion et
peuvent prendre de diverses formes. Elles peuvent d'abord prendre la forme de
pratiques concertées telles que le boycottage, l'exclusion des
entreprises d'organisation ou groupement professionnels, l'application de
conditions discriminatoires de vente ou de subordination des ventes. Elles
peuvent ensuite prendre la forme de convention d'exclusivité de ventes
ou d'achat. Elles peuvent enfin prendre la forme d'engagement de non
concurrence.
B- Les ententes de prix/ Faire obstacle à la
fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant
artificiellement leur hausse ou leur baisse (art6. Al.2) (artL.420. Al.2).
Les ententes visées par cet article sont en premier
lieu les ententes horizontales de prix, c'est-à-dire toutes les formes
d'accords et de concertation intervenues entre entreprises concurrentes et
portant sur leurs prix et leurs conditions de vente tel que le rabais,
escomptes et remises diverses, ou sur les éléments de leur
fixation tel que les marges et les coûts de revient. Les pratiques
concertées qui, sans porter directement sur les prix de vente, ont pour
objet ou peuvent avoir pour effet de favoriser artificiellement la hausse des
prix, sont susceptibles de constituer des ententes de prix prohibées. Il
en est de même des barèmes de prix élaborés par des
organisations professionnelles et des échanges d'information de prix
entre entreprises concurrentes.
Les ententes visées par l'article6.2 et L.420.2 sont en
second lieu les ententes verticales de prix, c'est-à-dire les ententes
convenues entre les fournisseurs et les distributeurs ayant pour objet ou pour
effet de limiter la liberté commerciale des distributeurs. Ces ententes
peuvent se traduire par l'imposition d'un prix de revente ou d'une marge
minimum, par les prix de vente conseillés émis par des organismes
professionnels et par les pratiques d'opacité tarifaire.
Ces accords sont applicables par les parties dans les
relations qu'elles entretiennent avec les tiers, couvrent les échanges
d'information en matière de prix et de conditions commerciales. Dans
l'affaire VCH, la Cour a jugé que la fixation d'un prix, même
simplement indicatif, affecte le jeu de la concurrence par le fait qu'il permet
à tous les participants de prévoir avec un degré
raisonnable de certitude quelle sera la politique de prix poursuivis par leurs
concurrents.
C- Les ententes tendant à limiter ou contrôler
la production, les débouchés, les investissements ou le
progrès techniques/ Limiter ou contrôler la production, les
débouchés, les investissements ou le progrès technique
(art6. Al.3) (artL.420. Al.3).
Les ententes de limitation ou de contrôle de production
sont généralement mises en oeuvre dans des secteurs
d'activité en récession. Elles peuvent se traduire par des
accords de quotas qui déterminent forfaitairement les volumes de
production que les parties à l'entente ne doivent pas dépasser.
Ces accords sont éventuellement assortis d'un système de
pénalités pour dépassement et d'indemnités en cas
d'insuffisance de chiffre d'affaire. La limitation de production peut encore
résulter d'accords de spécialisation par lesquels les entreprises
décident réciproquement d'abandonner certaines productions au
profit de l'une ou plusieurs d'entre elles et de s'approvisionner auprès
de ces dernières.
Les ententes de limitation ou de contrôle des
débouchées sont des accords par lesquels des entreprises
concurrentes décident de renoncer à leur liberté
commerciale et de se concerter sur le montant de leurs ventes ou d'autres
recettes comme les recettes publicitaire. Ces ententes peuvent se traduire par
exemple par l'instauration de quotas de vente, d'un système de
contrôle des importations et par la constitution de structures communes
de vente.
Les ententes de limitation des investissements et de
progrès technique sont en quelque sorte des accords de crises qui visent
à limiter les investissements excédentaires, à geler les
investissements existants ou à fermer certaines usines. Les accords de
spécialisation, les accords d'approvisionnement exclusifs et les accords
de non concurrence relèvent également de cette
catégorie.
D- Les ententes tendant à répartir les
marchés ou les sources d'approvisionnement (art6. Al.4) (artL.420.
Al.4).
Ces ententes concernent tout particulièrement les
accords de partage géographique du marché, les accords de
répartition des clientèles et les ententes de soumission. Ces
dernières réunissent des entreprises qui désirent
répondre aux appels d'offres, notamment dans le cadre des marchés
publics, avec la volonté de se soustraire au jeu normal de la
concurrence. Ces entreprises s'entendent sur la répartition des
différents marchés en désignant d'avance l'entreprise qui
proposera la meilleure offre, les autres émettront des
« offres de couvertures ».
Il s'agit par exemple des accords de distribution exclusive
qui entraînent un partage des marchés permettant à un
vendeur d'être le seul à distribuer des produits
déterminés dans une zone géographique donnée. Cette
exclusivité peut être ouverte ou fermée suivant que des
vendeurs indépendants, ou parallèles, peuvent opérer dans
la zone fixée
I s'agit aussi des systèmes de distribution
sélective, considérés en règle
générale comme contraires à l'article 85 §1
lorsqu'ils sont fondés sur des critères quantitatifs mais
admissibles quand l'agrément des revendeurs est décerné
selon des critères de type qualificatif et objectif. Les contrats de
franchise peuvent aussi échapper à l'interdiction de l'article
85. Certaines clauses peuvent être valides, telles que des clauses de
limitation de concurrence à expiration de contrat, à condition
qu'elles soient limitées dans le temps et dans l'espace ; d'autres
clauses peuvent constituer des restrictions à la concurrence au sens de
l'article 85 §1, comme celles qui réalisent un partage des
marchés entre franchiseurs et franchisés et empêchent
ceux-ci de se livrer à une concurrence sur les prix.
En addition à ces types d'objet ou d'effet d'ententes
considérées comme éminemment nocives, l'article 81,
§1, en énumère 2 autres
- Le type d'entente qui vise celles qui consistent à
« appliquer à l'égard de partenaires commerciaux, des
conditions inégales à des prestations en leur infligeant de ce
fait un désavantage dans la concurrence ». L'affaire des
Carreaux de céramique dans laquelle des fabricants allemands avaient
convenu d'appliquer des remises cumulées aux seuls acheteurs allemands
et uniquement pour les commandes passées auprès d'eux, en est une
bonne illustration. On peut également ranger dans la catégorie,
les accords réciproques d'exclusivité par lesquels les fabricants
s'engagent à ne livrer qu'à certains types d'acheteurs qui, de
leur côté, s'engagent à acheter uniquement auprès de
ces fabricants.
- Enfin, Les clauses visant à « subordonner
la conclusion à l'acceptation, par les partenaires, de prestations
supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux,
n'ont pas de lien avec l'objet de ces contrats ». Ces clauses sont
susceptibles de se rencontrer principalement en matière d'accord de
licence de brevet, sous forme, par exemple d'obligation de s'approvisionner en
certains produits.
Chapitre II : Encadrement processuel des ententes
anticoncurrentielles.
La concurrence est l'ordinaire des marchés28(*), au sens de
préséance que l'on peut attribuer à ce terme. La
régulation a des rapports ambigus avec la concurrence. Il est
nécessaire d'éliminer cette ambiguïté pour faire
apparaître l'opposition de départ qui existe entre la
régulation et la concurrence pour mettre en lumière le
fonctionnement dialectique entre les deux. Selon la définition le
Professeur Marie-Anne Frison-Roche, « la régulation intervient
comme une sorte d'appareillage propre à un secteur,
intégré dans celui-ci - dont la réglementation n'est qu'un
outil des outils-, qui entrelace règles générales,
décisions particulières, sanctions règlements des
conflits, et qui inclut généralement la création d'un
régulateur indépendant.
Par cet appareillage juridique, le système de
régulation crée et maintien un équilibre entre la
concurrence et un autre principe que la concurrence29(*) dans des secteurs
économiques qui ne peuvent les crée ou les maintenir de leurs
propres formes, ou en appuyant seulement sur le cadre général du
droit de la concurrence ».
Peut être la cible d'une régulation, la
construction de la concurrence, qui se présente alors comme un outil
dont l'usage trouvera un terme lorsque le marché concurrentiel
fonctionnera effectivement. En cela, les deux notions s'illustrent, puisque la
concurrence est la finalité de la régulation mais ne s'opposent
pas, la régulation est temporaire, puisqu'elle a vocation à
disparaitre lorsqu'elle aura rempli son office, c'est-à-dire lorsque la
concurrence aura atteint sa maturité. Les procédés de
régulation concurrentielle sont destinés à construire et
maintenir des organisations économiques non spontanées et non
pérennes par leur seule force, tandis que le droit de la concurrence
vise principalement à sanctionner des comportements déviants, au
coup par coup, et à les ramener à l'ordre ordinaire de l'offre et
la demande.
Cependant, Madame DECOOPMAN relève que la "mission de
régulation dépasse largement le cadre du contrôle de
l'application des règles de droit et l'objet des injonctions n'est pas
simplement de critiquer et de sanctionner la violation des normes juridiques,
il est de façon plus positive mais aussi plus interventionniste de
parvenir au redressement d'une situation ou d'une pratique "30(*). Les interventions des
autorités de la régulation ont un rôle pédagogique
(expliquer ce qu'il n'est pas possible de faire et ce qui ne porte pas au
contraire atteinte au marché). Elles ont aussi un rôle correctif
(Section 1), qui consiste à rétablir les conditions de
fonctionnement concurrentiel du marché. Mais elles ont aussi un
rôle dissuasif (Section 2), avec l'objectif d'empêcher les
pratiques qui entravent le libre fonctionnement su jeu concurrentiel.
Le ministre de l'Economie, à l'occasion de l'installation
du conseil le 20 février 1987 a en en effet
rappelé : « ... La politique vous mettez en oeuvre
en matière d'amades aura sans nul doute une extrême importance,
elle ne saurait se concevoir comme un instrument répressif, une sorte de
`punition', mais elle doit constituer pour les entreprises un risque, une
menace sérieuse qu'elles ne sauraient écarter du calcul
économique préalable de l'adoption de comportements illicites, au
regard des avantages que ces entreprises escomptent retirer de la mise en
oeuvre de comportement anticoncurrentiels, doit exister l'inconvénient
économique d'amendes significatives en cas de
poursuites. »31(*)
Section 1 : Les organes.
La contexture du paysage institutionnel de la régulation
repose essentiellement sur une logique économique.
Ainsi, l'action des forces du marché fait parfois
apparaître des « défaillances de marché »,
c'est-à-dire des situations dans lesquelles le jeu libre de l'offre et
de la demande n'accoste pas à assurer une allocation optimale des
ressources dans la société. Les ententes anticoncurrentielles en
constituent les exemples les plus notoires. Or, l'identification d'une telle
défaillance justifie la substitution de la décision publique
collective au jeu du marché afin d'éliminer/corriger
l'inefficience constatée. Autrement dit, « la libre initiative des
acteurs économiques doit être balisée au nom de
considérations d'intérêt général ».
Cette intervention peut passer par l'adoption de règles diverses comme,
par exemple, les règles de concurrence ou des réglementations
spécifiques dans certains secteurs.
Bien que solidement justifiée économiquement, on
peut questionner le choix, pour un pays de taille modeste comme le Maroc, d'une
structure institutionnelle de régulation aussi morcelée.
§1 : Le tribunal : Régulation
juridictionnelle.
Le droit d'action est expressément prévu. Le droit
au juge découle en effet de l'article 6§1 de la Convention
européenne des droits de l'Homme (« C.E.D.H. »), selon lequel
« toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
équitablement, publiquement et dans un délai
raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par
la loi, qui décidera, soit des contestations sur ces droits et
obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute
accusation en matière pénale dirigée contre elle
». La garantie du droit à un recours juridictionnel est donc
rendue possible par le droit à être entendu par un tribunal
indépendant et impartial.
La mission du juge ne saurait s'assimiler à celle des
autorités régulatrices. Le juge n'assure pas la police des
marchés. Le juge a pour mission de mettre fin à un litige
concurrentiel et non pas celle d'organiser les règles du jeu. Ce
rôle est dévolu au Conseil de la concurrence.
Il n'est pas question de faire du magistrat un technicien de la
concurrence. Poursuivre une telle fin rendrait inutile le recours au juge :
celui-ci deviendrait un succédané d'autorité
régulatrice. De même, lorsqu'il est saisi sur recours contre les
décisions des autorités régulatrices, il doit être
capable de relever les erreurs manifestes ou les défaillances de
l'argumentation économique. Sa tâche est de vérifier que
les conditions indispensables à l'incrimination sont réunies
Le contrôle de légalité est interne
(contrôle des règles de fond) et externe (contrôle des
règles de compétence). C'est principalement le contrôle
interne qui nous intéresse. Lorsque nous invitons les juges à
être rigoureux dans la vérification que les éléments
de la qualification d'entente sont réunis, c'est à ce
contrôle que l'on fait allusion. Il semble pourtant que le contrôle
de légalité ait plus de force en droit des ententes. La
définition de l'entente est plus juridique, moins factuelle que ne l'est
celle de la position dominante. Dans cette dernière hypothèse, le
contrôle de légalité se limite souvent à un
contrôle de l'exactitude matérielle des faits.
On voit que le particularisme du droit de la concurrence dans la
définition de l'illicite est source de nombreuses perturbations. La
maîtrise de toutes les sources du droit de la concurrence et du
raisonnement inductif ainsi que la bonne intelligence par les juges des
mécanismes économiques, prendront du temps.
A- Juridictions pénales : En
application de l'article 67 de la loi 06-99 une procédure pour pratiques
anticoncurrentielles peut être engagée auprès d'une
juridiction pénale à l'encontre des personnes physiques, mais
sous certaines conditions. Des sanctions pénales ne peuvent en
être prononcées qu'à l'encontre de « toute
personne physique qui, frauduleusement, aura pris une part personnelle et
déterminante dans la conception, l'organisation ou la mise en oeuvre de
la pratique visée dans l'article 6 ». Le texte n'oblige pas
que ces participations « frauduleuses » et
« personnelles et déterminantes » soient effectives
à toutes les étapes du délit. Il suffirait qu'elles le
soient à celle de la conception, de l'organisation, ou de la mise en
oeuvre de la pratique prohibée, la rédaction de l'article 67
étant alternative.
L'action publique peut être mise en oeuvre par le premier
ministre, sur recommandation du conseil de la concurrence, qui adresse le
dossier au procureur du Roi « lorsque les faits lui paraissent de
nature à justifier l'application de l'article 67 ».
Par ailleurs, aucune disposition n'interdit au Parquet de
déclencher directement l'action publique ou à la victime de
pratiques anticoncurrentielles de se constituer de sa propre initiative partie
civile. L'action introduite sur le fondement de l'article 67 est
indépendante de celle engagée au titre de l'article 6.
B- Juridictions administratives : Le
tribunal administratif connait également des litiges concurrentiels,
mais bien avant la création des tribunaux administratifs, ces litiges
faisaient partie intégrante du contentieux administratif dont
connaissait le juge de première instance, il en est ainsi des
différents relatifs aux marchés publics, aux concessions et
relativement aux travaux publics qui illustrent cette régulation
confiée aux tribunaux administratifs.
Les attributions du tribunal administratif en rapport avec
l'activité économique comprennent les litiges relatifs aux
contrats administratifs, les actions en réparation des dommages
causés par les actes et les activités administratives, le
différent portant sur le recouvrement des créances publiques et
les recours en annulation pur excès de pouvoir contre les
décisions administratives.
C'est ce volet qui nous paraît proche du domaine de la
concurrence, il comporte l'ensemble des décisions prises par le Premier
ministre, en matière de pratiques anticoncurrentielles et de
concentration économique. Ces décisions sont susceptibles de
recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif
compétent.
C- Juridictions civiles : Les tribunaux
civils et les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître
des pratiques interdites par les articles 6 de la loi 06-99 et ordonner la
réparation des préjudices subis. Une action de
responsabilité civile fondée sur l'article 77 du DOC peut
toujours être intentée auprès de ces juridictions par celui
qui se prétend victime de pratiques anticoncurrentielles. Elle suppose
réunies les trois conditions de droit commun : l'existence d'une
faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et
le préjudice. Rappelons que les juridictions civiles sont seules
compétentes pour statuer sur le montant des dommages et
intérêts invoqué par les victimes de pratiques
anticoncurrentielles.
L'action en responsabilité civile peut être
accompagnée d'une action en nullité d'un engagement, en
application de l'article 9 de la loi 06-99, cette action ne pouvant être
introduite qu'auprès des juridictions civiles. L'article 6 de
l'ordonnance de la loi 06-99 ayant pour but de préserver le libre jeu de
la concurrence sur un marché et de sauvegarder l'intérêt
général, on peut estimer que la nullité prévue
à l'article 9 peut être invoqué par toute personne
intéressée et non par les seules victimes des pratiques
interdites.
Si pour établir la faute, les juridictions civiles
décident, en application de l'article 38 de la loi 06-99 de demander
l'avis du conseil de la concurrence sur l'application de l'article 6 de la
même loi aux faits dont elles ont été saisies, les parties
sont renvoyées pour une procédure contradictoire parallèle
devant le conseil, sauf si ce dernier dispose d'informations déjà
recueillies au cours d'une procédure antérieure. Le cours de la
prescription est suspendu par la consultation du Conseil (article 39). Dans
tous les cas, l'avis émus par le conseil dans l'affaire les concernant
leur est communiqué en même temps qu'à la juridiction.
La comparaison entre les démarches adoptées
respectivement par les juridictions civiles et par le Conseil de la concurrence
met en évidence les différences d'approche d'une même
convention entre les deux ordres d'instances
§2 : Le conseil de la concurrence.
Avant la décision du Conseil, l'analyse
développée par les juridictions était purement juridique,
empreinte des grands principes gouvernant le droit civil : droit de
propriété, (absence d') abus de droit, force obligatoire des
contrats...
Le droit des ententes n'avait pas vocation à
protéger le consentement. Il répond à une logique
fonctionnelle : supprimer ou prévenir l'atteinte au marché. C'est
pourquoi le Conseil de la concurrence est un organisme de régulation de
la concurrence et non un juge des contrats ; il ne s'attache que
grossièrement à vérifier l'intégrité des
consentements.
Au Maroc, l'importance de l'innovation introduite par
la loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence est largement
illustrée par la création d'un conseil de la concurrence auquel
cette loi lui consacre la plupart des articles (de l'art 14 à l'art 46).
Cet organe a été effectivement installé depuis 2001
.Toutefois, Ce n'est qu'en mars 2002 que le Conseil adoptera, son
règlement intérieur. Ainsi on doit reconnaître que son
action demeure encore bloquée malgré le besoin énorme qui
pèse sur le marché.
En droit comparé, notamment en France puisqu'il est
clair que l'on n'a fait que reprendre assez fidèlement les dispositions
de la loi française. Le conseil de la concurrence est une
autorité administrative indépendante créé par l
ordonnance du 1er décembre 1986.
Cette instance avait été unanimement
saluée en tant qu'espace et organe consultatif de régulation des
mécanismes du marché. Dans une économie libérale,
le rôle du droit est en effet de servir de cadre juridique au
fonctionnement régulier de ses mécanismes, de ses acteurs,
d'assurer l'effectivité de la compétition économique,
d'arbitrer la partie que joue les compétiteurs, de réguler ce jeu
et donc de limiter l'espace livré à ce jeu lorsque les effets de
la compétition se révéleraient insupportables, porteraient
une atteinte grave à l'économie du pays et à
l'intérêt des consommateurs. De plus, on a pu considérer
que l'efficience du dispositif de régulation constituait une dimension
essentielle dans les négociations internationales et dans l'attraction
de l'investissement étranger. Le conseil de la concurrence a longtemps
été cantonné à un rôle d'autorité de
sanction, intervenant principalement ex post. Certes il pouvait
déjà agir sur les comportements et les structures de
l'économie, grâce à son pouvoir d'injonction et à sa
fonction consultative ». La fonction de régulation suppose le
recours à des instruments souples et flexibles dont la Conseil a
progressivement été doté et qui témoignent de son
rôle de régulateur de la concurrence.
Ces diverses techniques offertes au Conseil de la concurrence
dans son rôle de régulateur doivent-elles être
condamnées de la morale ?
Comme vous l'avez sans doute déjà vu, la morale des
affaires, si tant est qu'elle existe, n'est pas une morale
évangéliste. Contrairement peut-être à ce que l'on
pourrait croire, ces techniques de clémence traduisent moins un
phénomène d'acculturation juridique imposée par les
Etats-Unis d'Amérique que la reconnaissance de nouvelles
représentations communes. Le droit pénal connaît
déjà la notion de repentir actif. Ce n'est donc pas une totale
nouveauté. En outre, en cette matière, le droit de la
concurrence, ces procédures s'inscrivent dans des tactiques judiciaires
tant des autorités de concurrence que des acteurs économiques. Il
semble que ces programmes européens et français soient efficaces
et efficients.
Efficaces : L'objectif de ces techniques est de détecter
rapidement les pratiques anticoncurrentielles pour y mettre fin. Elles sont
particulièrement efficaces dans les « zones grises » du droit
de la concurrence.
Efficients : Les mesures seraient efficientes dans la mesure
où elles se traduiraient pour les autorités de concurrence par
une réduction des coûts d'enquête et de leur durée
et, pour les entreprises par une stratégie permettant de comparer les
bénéfices obtenus ou à obtenir avec la réduction de
la peine encourue. La sécurité juridique est sauve.
A- Composition :
- les membres du conseil :
Conformément à l'article 18 de la loi 06-99 et
l'article 1 de son décret d'application, le conseil de la concurrence se
compose de 13 membres :
· Le président nommé par décret, par le
premier ministre.
· Six membres, représentant l'administration,
nommés par le premier ministre sur proposition de l'autorité
gouvernementale dont ils relèvent
- un représentant du ministre
chargé de la justice.
- un représentant du ministre chargé de
l'intérieur.
- un représentant du ministre chargé des
finances.
- un représentant du ministre chargé des affaires
générales du gouvernement.
- un représentant du secrétariat
général du gouvernement.
- un représentant du ministre chargé du plan.
· Trois membres choisis en raison de leur compétence
en matière juridique, économique, de concurrence ou de
consommation, nommés par le premier ministre.
· Trois membres exerçant ou ayant exercé
leurs activités dans les secteurs de production, de distribution ou de
services, sont nommés sur proposition des présidents de la
fédération des chambres de commerce d'industrie et de services,
de la fédération des chambres d'agriculture , de la
fédération des chambres d'artisanat et de la
fédération des chambres des pêches maritimes.
Tout membre du conseil de la concurrence a l'obligation
d'informer le président du conseil de la concurrence des
intérêts qu'il détient et des fonctions qu'il exerce dans
une activité économique (art.20al.3). Il est également
tenu de s'abstenir de donner avis dans une affaire ou il a un
intérêt ou s'il représente ou a représenté
une partie intéressée (art.20 al.4).
Ainsi, deux remarques peuvent être signalées au
niveau de cette première section, la première c'est que le
législateur s'efforce de réunir les diverses compétences
requises pour mener à bien les missions d'avis, de conseil et de
recommandation. Deuxièmement on constate qu'en dehors des conditions
d'appartenance à un profil déterminé et de la proposition
faite par les responsables des secteurs représentés, la loi ne
pose aucune condition de qualification précise, d'expérience,
d'âge, de déchéance ou d'incompatibilité et de cumul
ou de non cumul des fonctions et emplois publics et privés32(*).
- Les organes du conseil :
Le fonctionnement du conseil de la concurrence est assuré
par cinq organes :
1- Le président du conseil :
Il exerce ses fonctions à plein temps. En dehors du fait
qu'il assure la direction générale et la coordination des organes
relevant de son autorité au sein du conseil ,il désigne le
rapporteur général ,le ou les rapporteurs pour l'examen et le
suivi de chaque affaire et faire appel à toute expertise
nécessitant des compétences techniques particulieres.il convoque
le conseil pour réunion et demande qu'il soit placé aux
prés du conseil des rapporteurs.il est informé par les membres du
conseil des intérêts qu'il détiennent et des fonctions
qu'il exercent dans une activité économique .le président
demande à l'administration de procéder à toute
enquête utile.
Le président ne peut communiquer une pièce mettant
en jeu le secret des affaires, sauf dans le cas où la communication ou
la consultation de ces documents est nécessaire à la
procédure ou à l'exercice des droits des parties en cause .les
pièces considérées sont retirées du dossier.
2- les rapporteurs :
Sont chargés d'examiner les affaires qui leur sont
confiées par le président, de procéder à l'audition
des parties en cause, d'établir les rapports et d'assister aux
séances du conseil sans voix délibérative.
Les rapporteurs sont nommés auprès du conseil,
à la demande du président, par arrêté du
1er ministre sur proposition de l'autorité gouvernementale
dont- ils relèvent.
3- le rapporteur général :
C'est lui qui anime et suit le travail des rapporteurs.il
présente des observations orales lors des séances du conseil.il
assiste à ces dernières sans voix délibérative .le
rapporteur général est désigné par le
président du conseil parmi les rapporteurs.
4- les membres du conseil :
Les membres du conseil de la concurrence participent aux
délibérations.
5- le secrétariat permanant :
Il est chargé :
-D'assister le président dans l'administration du
conseil.
-De l'organisation des séances du conseil sous
l'autorité du président ; à cet effet, il
procédé à la convocation des membres du conseil et des
rapporteurs, et le cas échéant des parties en cause.
-De la gestion du courrier.
-De la constitution et du suivi des dossiers à toutes les
phases de la procédure et de la communication aux parties en cause du
rapport du rapporteur et des documents annexes.
-De l'enregistrement des saisines et des documents annexes et de
la notification aux demandeurs des avis des conseils et des recommandations du
conseil.
-De dresser le rapport annuel des activités du conseil
auquel seront annexés les avis, les conseils ou les recommandations
émis par le conseil.
-Etablir les procès verbaux des
délibérations du conseil de la concurrence.
-Tenir un registre spécial des procès verbaux du
conseil.
Apres avoir traité la composition du conseil de la
concurrence, il convient d'examiner par la suite les attributions de ce
dernier.
B- Attributions :
- Le conseil de la concurrence est un simple organe
administratif sans aucun pouvoir de décision ni au sens administratif ni
au sens judiciaire. Dans ce cadre il peut être consulté par un
certain nombre d'autorités et d'institutions, mais ces dernières
ne sont obligées de lui demander des avis que dans des questions
précises.de toute façon, les avis, les conseils et les
recommandations qu'il fait en réponse aux consultations à lui
demandées ne s'imposent jamais aux instances qui les ont
sollicités. Si celles-ci sont parfois obligées de le consulter la
loi ne les force jamais à suivre ses avis, conseils ou
recommandations.
- Devant cette situation force est de se demander à la
limite, quel est l'intérêt de créer un organe qui ne sert
à rien ? en réalité, nonobstant la nature purement
consultative ,sans aucune force légale exécutoire, de sa mission,
le conseil de la concurrence conserve une utilité indiscutable.la
diversité d'origines, de formations, d'expériences et
d'intérêts de ses membres donne à ses opinions la
crédibilité ,l'objectivité et l'impartialité qui
peuvent manquer aux décisions administratives .
- - Le conseil, assume alors une mission consultative
générale dans le domaine de la régulation administrative
de la concurrence .il exerce également une fonction consultative
particulière dans le cadre de la surveillance des opérations de
concentration, des pratiques anticoncurrentielles et des manipulations des
prix, susceptibles d'altérer le champ de la concurrence. Nous pensons
que dans le premier cadre, le conseil intervient comme un organe de politique
générale de l'Etat en matière de concurrence alors qu'il
joue dans le seconde cadre le rôle du censeur préventif ou
préjudiciel. Ceci explique le caractère facultatifs de sa
consultation dans le premier domaine et obligatoire dans le second.
Le rôle consultatif du conseil :
Si on revient à l'article 15 et 16 de la loi 06-99 on
constate que dans le rôle consultatif du conseil de la concurrence, il y
a la consultation facultative (§1) et la consultation obligatoire
(§2).
- Consultation facultative :
Sont habilitées en vertu de l'article 15 de loi 06-99
à consulter le conseil de la concurrence, à titre facultatif,
quatre catégories d'autorités et d'instituions :
- - les commissions permanentes du parlement, pour les
propositions de lois relatives à la concurrence.
- -le gouvernement33(*) pour toute question concernant la concurrence.
- -les juridictions compétentes sur les pratiques
anticoncurrentielles relevées dans les affaires dont elles sont
saisies.
- -sur toute question de principe concernant la concurrence les
conseils de régions, les communautés urbaines, les chambres de
commerce, d'industrie et de services, les chambres d'agriculture, les chambres
d'artisanat, les chambres de pêche maritimes, les organisations
syndicales et professionnelles ou les associations de consommateurs reconnues
d'utilité publique.
- Consultation obligatoire.
L'article 16 de la loi prévoit que le conseil de la
concurrence doit être obligatoirement consulté sur tout projet de
loi ou de texte réglementaire instituant un régime nouveau ou
modifiant un régime en vigueur ayant pour effet :
- -de soumettre l'exercice d'une profession ou l'accès
à un marché à des restrictions quantitatives (par exemple
taxis, les officines pharmaceutiques34(*)).
- -d'établir des monopoles ou d'autres droits exclusifs ou
spéciaux sur le territoire national ou dans une partie de celle-ci (par
exemple création d'un périmètre de protection autour d'un
marché d'intérêt national).
- -d'imposer des pratiques uniformes en matière de prix ou
de conditions de vente (fixation des prix des produits de première
nécessité).
- -d'octroyer des aides de l'état ou des
collectivités locales. C'est la mise en place des aides
financières pour faire face à des besoins urgents dans certaines
zones ou pour soutenir des entreprises par crainte de
déséquilibre grave du marché.
- On remarque que la liste de l'article 16 est limitative.la loi
n'emploi pas une formule générale qui aurait contraint le
gouvernement à consulter le conseil sur tout projet de texte
réglementaire de nature à faire obstacle au jeu de la
concurrence.
Certains spécialistes marocaines estiment que cette
institution n'est pas adaptée à la réalité
économique locale. La taille du marché domestique et le poids du
Maroc dans le commerce mondial ne justifient pas, selon eux, la création
d'un conseil de la concurrence. Compte tenu de la fragilité du tissu
économique local, la survie des entreprises passe par
l'accélération des regroupements et fusions. Or, quelles sont,
dans ce cas, les limites des pratiques anticoncurrentielles telles que
l'entente ou la concentration économique, si l'on sait que ces
regroupements et ces ententes constituent un moyen efficace pour
résister à la concurrence étrangère?
Pour l'heure, la mission de cette institution reste
principalement et foncièrement consultative puisqu'il ne peut se
prononcer de lui-même sur certaines affaires.
§3 : Le conseil de gouvernement.
A- Le premier ministre et ses auxiliaires.
- Pouvoirs règlementaires du Premier ministre.
En vertu de la loi 06-99 sur la liberté des prix et de la
concurrence et son décret d'application, le Premier ministre est
doté d'un ensemble de pouvoirs réglementaires et administratifs
et des prérogatives à caractère décisionnelles qui
en font de lui l'autorité administrative principale chargée de
l'application du droit de la concurrence.
Le 1er ministre est titulaire constitutionnel du
pouvoir réglementaire, il exerce par le biais de l'exécution des
orientations du conseil des ministres, et la coordination de l'action
administrative en matière économique.
L'exercice des activités économiques et de la
concurrence donne souvent l'occasion à ce type de mesures
générales du premier ministre, il organise par décret les
modalités d'application de la loi sur la liberté des prix et de
la concurrence.
- Pouvoirs décisionnels du Premier ministre.
Le premier ministre nomme le président et les membres du
conseil de la concurrence ainsi que les rapporteurs. Le règlement
intérieur et le rapport d'activité du Conseil de la concurrence
sont soumis au Premier ministre.
Tous les avis rendus par le conseil de la concurrence sont
immédiatement transmis par le président du conseil de la
concurrence au Premier ministre qui décide de la suite à leur
donner. En matière d'ententes, il est habilité à
reconnaitre par décision que certains accords notamment entre PME ou
agriculteurs ne sont pas considérés comme des pratiques
anticoncurrentielles. De même il peut désigner les fonctionnaires
spécialement habilités à procéder aux
enquêtes de la concurrence, le Premier ministre peut aussi entreprendre
toute investigation et saisir le conseil de la concurrence de tous faits
pouvant une entente et procéder à toutes enquêtes qu'il e
de juge utile en matière de concurrence.
Le premier ministre soumet obligatoirement au conseil de la
concurrence pour avis, tout projet de texte législatif ou
réglementaire ayant pour effet de restreindre le jeu de la concurrence
ou l'accès au marché.
Le premier ministre est habilité par la loi 06-99 à
ordonner des mesures conservatoires ou à saisir le procureur du Roi aux
fins de poursuites judiciaires, en cas de non respect des dispositions de
ladite loi.
Le premier ministre peut ordonner la publication des
décisions prises en matière de lutte contre les ententes dans des
journaux d'annonces légales ou leur affichage dans les lieux qu'il
indique. Les décisions du Premier ministre sont susceptibles de recours
devant la chambre administrative de la cours suprême.
B- La commission interministérielle de
prix.
La commission interministérielle des prix est un organe
capital dans la réglementation des prix. Elle est chargée
d'étudier les questions relatives à la réglementation des
prix qui lui sont soumises pour avis.
En effet, l'avis de la commission interministérielle des
prix est sollicitée pour :
· Les accords d'homologation des prix et des produits ou
services
· La fixation des prix des produits, bien ou services
· La libéralisation des prix des produits, biens ou
services
· La libéralisation des prix des produits, biens ou
services ;
La commission interministérielle des prix se
réunit sur convocation du Premier ministre ou l'autorité
gouvernementale déléguée par lui à cet effet chaque
fois que les circonstances l'exigent. Cette commission comprend :
· Le Premier ministre ou l'autorité gouvernementale
déléguée par lui à cet effet ou son
représentant, président ;
· L'autorité gouvernementale chargée de
l'intérieur ou son représentant ;
· L'autorité gouvernementale chargée des
finances ou son représentant ;
· L'autorité gouvernementale chargée de
l'agriculture ou son représentant ;
· L'autorité gouvernementale chargée de
l'industrie et du commerce ou son représentant ;
· L'autorité gouvernementale chargée de
l'emploi ou son représentant ;
· L'autorité gouvernementale chargée du plan
ou son représentant ;
· L'autorité gouvernementale chargée de
l'économie sociale, des petites et moyennes entreprises et de
l'artisanat ou son représentant ;
· Et les représentants de l'autorité
gouvernementale dont relève le secteur d'activité concerné
par les travaux de la commission.
Les représentants précités sont
nommément désignés par l'autorité gouvernementale
dont ils relèvent pour une période de 2 ans renouvelable. Le
secrétariat de la commission est assuré par la direction des prix
et de la concurrence. Les débats de la commission font l'objet de
procès-verbaux signés par le président et transmis par lui
à tous les membres.
C- La direction de la concurrence et des
prix.
Le premier ministre confère par le décret
n°204532 portant délégation d'attributions et de pouvoirs au
ministère délégué auprès du premier ministre
chargé des affaires économiques et générales, la
mission d'élaborer, mettre en oeuvre et suivre, en coordination avec les
ministères concernés, la politique de la concurrence. A cet
effet, le ministère délégué auprès de
premier ministre chargé des affaires économiques et
générales dispose d'une direction de la concurrence et des
prix.
Créé par le décret du 4 février 1972,
la direction des prix veillait à la mise en oeuvre des dispositions de
la loi n°008-71 du 12 Octobre 1971 sur la réglementation et le
contrôle des prix (abrogée par la loi 06-99 sur la liberté
des prix et de la concurrence).
Ainsi, en matière prix, elle a pour mission de
réfléchir, d'étudier et de soumettre toutes suggestions et
propositions concernant :
· L'élaboration et le suivi de la politique des
prix ;
· La politique de contrôle des prix ;
· La politique de stock de sécurité. Avec
l'adoption de la loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence,
la direction des prix assure la coordination des travaux en matière des
prix dans le cadre de la commission interministérielle des prix dont
elle assure le secrétariat.
En matière concurrence, le ministère des affaires
économiques et générales assure l'élaboration de la
législation en matière de concurrence et la préparation
de la politique de promotion de la concurrence. A cet effet, elle est
chargé de :
· Préparer et veiller à l'application des
textes à caractère législatif et règlementaire
relatifs à la concurrence et aux prix ;
· Lutter contre les ententes illicites et les abus de
position dominante qui fausse le bon fonctionnement du marché ;
· De surveiller les opérations de concentration
risquant d'aboutir un déséquilibre excessif du
marché ;
· D'assurer la loyauté et la transparence dans les
relations commerciales entre les entreprises, et entre ces dernières et
le consommateur en supervisant, en relation aves les autres administrations
concernées, les enquêtes à caractère
économique ;
· De participer à la préparation, à la
négociation et à la mise en oeuvre des dispositions relatives
à concurrence prévues ;
· Dans les accords signés entre le Maroc et les
partenaires étrangers ;
· De représenter le Maroc devant les instances
internationales qui traitent de la concurrence.
D- Commission centrale.
La création de la commission centrale en elle-même
ne constitue point une innovation introduite par la loi seule la nature des
attributions ainsi confiées à la commission semble faire l'objet
de l'innovation. En effet, la commission dispose aujourd'hui d'une
compétence propre en matière de sanction laquelle
compétence faisait défaut sous l'égide du dahir de 1971,
elle se contentait d'étudier les questions relatives à la
réglementation et au contrôle des prix et de proposer toute mesure
à cet effet.
L'institution se fonde sur l'article 96 de la loi 06-99 et
l'article 21 du décret d'application de la loi, elle est
présidée par le premier ministre ou son représentant et
comporte comme membres, les autorités gouvernementales chargées
de l'intérieur, des finances, de l'agriculture, de l'industrie et du
commerce, de l'emploi, du plan, des affaires générales du
gouvernement et le cas échéant de celles dont relève le
secteur d'activité concernée ou de leurs représentants.
Sa composition s'apparente à celle d'une institution
administrative, alors que ses attributions et son fonctionnement s'approchent
de ceux d'une instance juridictionnelle.
E Le corps des contrôleurs des prix
Le corps des contrôleurs des prix est créé
par le décret n°2-80-687 du 30 Chaoual 1405 (19 Juillet 1985). Ce
corps est placé auprès des divisions économiques et
sociales des provinces et préfectures du Royaume.
La loi 06-99 relative à la liberté des prix et de
la concurrence prévoit dans son article 84 que : « les
infractions aux dispositions des titres VI et VII de la présente loi et
des textes prix pour leur application concernant les produits et services
visés au premier alinéa de l'article 83 ci-dessus sont
constatés par les agents du corps des contrôleurs des
prix. »
Ainsi, les contrôleurs des prix opèrent à
deux niveaux :
· Le contrôle des prix des produits, biens ou
services ;
· Le constat des pratiques restrictives à la
concurrence, tel le non respect de l'obligation d'affichage des prix, la non
délivrance de la facture, le refus de vente, la vente
subordonnée, la vente discriminatoire, le prix minimum imposé.
Section 2 : Les sanctions.
Les sanctions des ententes anticoncurrentielles sont diverses et
redoutables pour les entreprises. Elles peuvent obérer
considérablement leur patrimoine et limiter dans les mêmes
proportions leur liberté contractuelle. Ces sanctions ne se justifient
que dans la mesure où le dysfonctionnement du marché est issu
d'un processus volontaire.
Cependant, la finalité principale des sanctions en
matière d'entente est la dissuasion. Dans cette optique, les sanctions
doivent être rapides, certaines et substantielles. Or, l'analyse en droit
comparé montre clairement que les sanctions infligées sont
suffisantes. Bien que la tendance soit au durcissement des sanctions
infligées à des ententes injustifiables, les sanctions
prévues par le droit positif et surtout la volonté
nécessaire à leur mise en oeuvre effective ne sont pas
suffisantes pour dissuader véritablement le recours à ces
comportements.35(*)
Les amendes infligées aux entreprises sont la principale
forme de sanctions réprimant les ententes dans la plupart des pays. Les
gains tirés du comportement d'entente peuvent être
considérables, ce qui exige que les amendes réprimant ce
comportement soient aussi considérables. Pour que la dissuasion soit
efficace, ces amendes doivent être au moins égale au gain, que
l'entreprise aura toujours intérêt à participer à
l'entente, même si elle est découverte et donne lieu à des
poursuites36(*).
Le rapport rendu par le comité de la concurrence de l'OCDE
en 2002 est accablant. Certains pays ont imposé de très lourdes
amendes équivalant à des certaines de millions de dollars,
à des entités participant à des ententes. La plupart
d'entre eux n'ont cependant pas encore pris de mesures de ce type. Trop rares
sont encore les pays qui sanctionnent actuellement des personnes physiques pour
leur participation à des ententes. Durant une période allant de
1996 à 2000, seuls quatre pays ( les Etats-Unis, le Canada, l'Allemagne
et l'Australie) ont infligé des amendes à des personnes physiques
avec des montants pouvant dépasser 100 000 dollars US. Deux pays
seulement, le Canada et les Etats-Unis arrivant de très loin en
tête en la matière avec 28 décisions prononcées en
ce sens en 1999 et 18 en 2000. La durée moyenne de ces peines
était approximativement de 8 mois en 1999 et 10 moins en 2000 pour
atteindre désormais une durée moyenne d'une année et
demi.
Compte tenu de la sévérité de leurs
législations en la matière et de l'entrain des instances de
contrôle à les mettre en oeuvre, les quatre pays cités
émergent assez nettement dans la lutte contre ce fléau.
Ainsi, les sanctions infligées en matière d'entente
sont hétérogènes en raison de leur nature administrative,
civile, voire pénale selon les pays.
§1 : Les sanctions civiles.
La loi sur la liberté des prix et de la concurrence donne
l'impression qu'elle privilégie les sanctions pénales et
administratives en les spécifiant par des dispositions précises
et en les appliquant dans un grand nombre de situations. En
réalité, malgré cette apparence, ladite loi ne diminue en
rien l'importance des sanctions civiles qui demeurent applicable à
chaque fois que leurs fondements légaux ou contractuels le permettent.
Les fondements légaux de ces sanctions se trouvent dans les dispositions
générales du D.O.C. sur la responsabilité civile et les
clauses contractuelles qui déterminent les obligations et les conditions
convenues par la volonté commune des parties. Ces deux catégories
de sources ne sont pas abrogés et n'ont pas besoin
d »être répétées dans la nouvelle loi qui
se consacre à la délimitation du champ d'interventions des seules
sanctions pénales et administratives.
La nouvelle législation ne modifie point le régime
juridique de l'effet obligatoire des contrats, de la réparation en
nature ou par équivalent des dommages et de la clause pénale le
cas échéant. Dans des situations déterminées, elle
adopte une attitude plus directe et dans la mesure où elle
prévoit expressément la nullité de certaines conventions
et où elle ordonne le retour à la situation antérieure des
partie en leur imposant notamment la cessations des activités
préjudicielles, les restitutions ou d'autres modalités de
réparations équivalentes (article 9), la modification des projets
et la résiliation des accord (article 45), la transaction administrative
(article 48).
A- Sanctions rétroactives :
a- La nullité des actes de concurrence
irrégulière.
L'article 9 de la loi sur la liberté des prix et de la
concurrence applique la sanction de nullité édictée en
matière de droit commun par les articles 306 et s. D.O.C.
Cette nullité peut être invoquée par les
parties et par les tiers ; elle ne peut être opposée aux
tiers par les parties, elle est éventuellement constatée par les
tribunaux compétents à qui l'avis du Conseil de la concurrence,
s'il en est intervenu un, doit être communiqué.
Notion de nullité :
Peut être comprise comme la situation dans laquelle un acte
juridique est vide de sens et d'effet, il existe matériellement mais n'a
aucune valeur juridique. Absolue peut elle être, soulevée par tout
intéressé même non partie à l'acte critiqué,
ou parfois d'office par le tribunal et à toute phase de
procédure, la menace de cette sanction pèsera sur l'acte pendant
tout le délai de la prescription de quinze ans. Relative rend
plutôt à sanctionner des normes instituées pour la
protection des intérêts des parties au contrat ou d'une
catégorie déterminée d'intéressées. Elle ne
peut être invoquée que par la personne que la loi entend
protéger.
b- Le rétablissement de la situation
antérieure.
L'article 32 al.3 de loi 06-99 dispose que le Premier ministre
peut ordonner aux parties des mesures conservatoires susceptibles de comporter
la suspension de la pratique anticoncurrentielle et l'injonction de revenir
à l'étant antérieur. La notion de rétablissement de
la situation antérieure introduite par la loi nous semble trop vague
pour correspondre à une conception précise du droit positif du
fait du retour à l'état antérieur qui réagissait
les relations des parties en cause avant l'avènement de l'entente.
Des deux sanctions, nous pouvons observer que le concept de
nullité évoque une idée de vice entachant l'acte
concerné, alors que la connotation culturelle de l'expression
« rétablissement de la situation antérieure »
ne semble pas nécessairement sanctionner la défaillance d'une
condition de validité de l'acte ou l'inobservation d'une exigence
l »gale.
B- Mesures non rétroactives.
a- Notions générales.
Elles tendent à réaliser un retour à la
situation antérieure mais sans modifier les faits intermédiaires
ou sans porter atteinte aux intérêts constitués entre la
date de commencement des irrégularités et celle de leur
cessation.
Cette catégorie comporte de mesure de résolution et
résiliation classiques des contrats, cessations des faits intervenus
à l'occasion de l'exécution d'un contrat ou en dehors de toute
relation contractuelle et enfin, l'exécution en nature des engagements
pris par les parties.
b- La résiliation des engagements.
La réalisation est un procédé d'extinction
volontaire des contrats. La résiliation prévue par la loi 06-99
se fonde sur une injonction de la loi embarrassant une situation objective,
matérialisée par une décision administrative.
Spécialement dédiée aux parties à une
opération de concentration, quoiqu'en pratique, la résiliation
intervient même en dehors de tout acte de concentration.
Son régime juridique repose sur l'article 397 du D.O.C qui
remet les parties dans la situation où elles se trouvaient au moment de
la conclusion du contrat, et l'article 398 du D.O.C qui s'empresse pour
protéger les tiers en décidant qu'elle ne peut nuire à
leurs droits acquis sur les choses qui en font objet.
c- La résolution des contrats.
Rappelons que la loi sur la liberté de la concurrence ne
vise pas la résolution parce que cette mesure s'applique à un
litige provoqué par une violation des intérêts prives des
contractants, et qu'elle relève normalement de la compétence de
l'autorité judiciaire, alors que la loi en question prescrit des
sanctions à l'encontre des atteintes nécessairement aux
intérêts des parties en cause et sans attribuer
nécessairement la compétence de les décider aux
juridictions.
La résolution, trouve sa cause dans la date d'un
contractant, elle peut obéir à une clause contractuelle
amiablement respectée par les parties. Elle opère alors de plein
droit par le seul fait de l'inexécution de l'une des parties
contractantes.
d- La cessation des activités.
Certes, la loi sur la liberté de la concurrence n'utilise
nullement cette expression. Mais en recourant à la formule
générale des mesures conservatoires dont elle donne la suspension
de la pratique discutée. Il suffit de faire état de l'article 36
de la même loi pour observer que la décision du Premier ministre
peut ordonner aux intéressés de « mettre fin aux
pratiques anticoncurrentielles dans un délai
déterminé ».
A l'occasion de l'examen des sanctions civiles, les dommages
intérêts peuvent être visés, cette expression
recouvre toujours le sens d'une indemnité en argent destinée
à réparer par compensation le préjudice provoqué
par l'inexécution ou le retard d'exécution d'une obligation. Par
ailleurs, les dommages intérêts ne sanctionnent pas uniquement la
violation d'un engagement contractuel, ils tendent à préparer un
préjudice réalisé par un simple fait, un délit ou
quasi délit au sens du droit civil.
§2 : Sanctions pénales.
Le caractère pénal d'une sanction ne correspond pas
à un élément spécifique de sa consistance. Celle-ci
reste une mesure susceptible de plusieurs qualifications. Elle n'acquiert la
qualification pénale qu'aux termes de la loi en application du principe
de la légalité des délits et des peines qui s'impose en
raison de l'atteinte grave aux droits de libertés présentes et
futures qu'elle implique pour le condamné. En second lieu, une sanction
pénale ne peut être décidée et prononcée dans
une espèce, en principe, que par une juridiction statuant en
matière pénale. Mais en réalité, cette
caractéristique est très relative aujourd'hui. La sanction, en
tant que mesure de nature intrinsèquement administrative peut être
décidée par un tribunal et la sanction de nature purement
pénale peut l'être par une autorité administrative.
Du point de vue des effets, les sanctions pénales
comportent presque toujours un caractère afflictif et infamant aux
conséquences néfastes sur la psychologie et la
considération sociale du condamné et malheureusement souvent
aussi de sa famille et son entourage professionnel. La loi sur la
liberté de la concurrence prévoit directement et
expressément un nombre important de sanctions pénales :
l'emprisonnement des personnes physiques, l'amende, la confiscation, la
fermeture temporaire d'établissement, l'interdiction temporaire
d'exercer une profession ou une activité déterminée ou
toute activité commerciale avec l'interdiction d'être
employé à quelque titre que ce soit dans l'établissement
exploité même vendu ou donné en location gérance ou
à bail, et la publication des jugements, pour les personnes physiques et
les personnes morales même de droit public. La loi n'hésite pas
à augmenter les menaces en permettant l'application d'autres sanctions
prévues par le code pénal.
A- Sanctions portant sur des biens.
La loi prévoit l'amende qui, malgré sont montant
parfois très élevé, porte sur des sommes d'argent.
L'amende : Redoutable pour les PME et les entreprises plus ou moins
culturelles. La loi sur la liberté des prix et de la concurrence
réprime par l'amende les pratiques anticoncurrentielles notamment
l'entente. Il s'agit de la privation d'un condamné du
bénéfice d'une somme d'argent au profit su trésor public.
Le but répressif escompté dépend incontestablement de la
solidité financière du condamné. Malheureusement à
défaut de cette solvabilité, la loi permet le recours à la
contrainte par corps et par conséquent à l'emprisonnement et
à ses conséquences néfastes. Abstraction faite du
caractère illogique de la contrainte par corps, son maintien risque
d'engendrer une injustice impardonnable. En effet, on risque de voir que seuls
les délinquants incapables de payer l'amende subissent l'emprisonnement.
On risque aussi de rencontrer des délinquants cyniques et aguerris qui
préfèrent l'emprisonnement que la durée de contrainte par
corps au paiement d'une somme astronomique. L'article 67 stipule que toute
personne physique qui, frauduleusement ou en connaissance de cause, aura pris
une part personnelle dans la conception, l'organisation, la mise en oeuvre ou
le contrôle d'une entente, est punie d'une amende de 10 00 à
50 000DH
L'article 70 dispose qu'en cas d'infraction à la
disposition de l'article 6 et 7, les personnes morales peuvent être
reconnues pénalement responsables lorsque les circonstances de
l'espère le justifient, notamment la mauvaise foie des parties en cause
ou la gravité de leurs infractions, et sans préjudice, des
sanctions civiles susceptibles d'être appliquées par les tribunaux
compétents. La peine encourue est une amende dont le montant est pour
une entreprise de 2 à 5% du chiffre d'affaire hors taxes
réalisés au Maroc au cours du dernier exercice clos. Si le
contrevenant n'est pas une entreprise, l'amende est de 200 000 à
2 000 000 DH. En cas de récidive, dans un délai de 5
ans, le montant maximal peut être porté au double.
B- Sanctions frappant l'existence de
l'entreprise.
Il s'agit de mesures diverses et nombreuses dont l'objet ou
l'effet se traduit par l'élimination plus ou moins totale de
l'opérateur délinquant. Ces sanctions ne soulèvent point
de difficulté quand l'entreprise relève du secteur privé.
Elles posent un véritable problème de concevabilité pour
les entreprises publiques. La loi sur la liberté des prix et de la
concurrence admet l'application des sanctions pénales aux entreprises
publiques dans le cadre de leurs activités dénuées de
l'exercice de la puissance publique.
a- Interdictions : C'est ainsi que
l'interdiction légale, peine accessoire aux peines criminelles, prive le
condamné de l'exercice de tous ses droits patrimoniaux pendant toute la
durée de l'exécution de la peine principale, article 37 et s. du
code pénal. En matière délictuelle, article 40, les
tribunaux peuvent dans les cas déterminés par la loi et pour une
durée d'un à dix ans, interdire au condamné l'exercice
d'un ou plusieurs droits civiques, civils, et de familles visées
à l'article 26 du CP. L'interdiction d'exercer une activité joue
aussi comme mesure de sureté, article 61 du C.P. Aux termes de l'article
87 du CP, elle prive le condamné de l'exercice d'une profession,
activité ou art. Cependant, en terme de la loi 06-99, l'article 74 peut
interdire au condamné à titre temporaire et pour une durée
maximum d'un an, l'exercice de sa profession ou même d'effectuer tout
acte de commerce. Il ne peut sous les mêmes peines exercer, ni au titre
d'employé dans l'établissement qu'il exploitait, ni à un
titre quelconque Il ne peut non plus être employé dans
l'établissement qui serait exploité par son conjoint. Il n'y a
nul doute que le législateur veut toucher l'ensemble des
possibilités de détourner la sanction d'interdiction. Il importe
toutefois de remarquer qu'en dehors de l'hypothèse d'exercer dans
l'établissement d'un ascendant ou d'un descendant, il semble très
peu probable que le condamné puisse collaborer avec un tiers.
b- Dissolution de personne morale : Il
s'agit de l'anéantissement de l'être juridique structurant
l'exercice d'une activité économique. Peu importe que la
société soit commerciale ou civile, la dissolution signifie la
fin de son existence en tant que personne morale. On rappelle que la
liquidation judiciaire des biens des entreprises dont la situation est
irrémédiablement compromise implique déjà la
dissolution des sociétés. Sur le plan pénal, la
dissolution de la personne morale constitue une peine accessoire prévue
par les articles 36, 47 du C.P. La loi sur la liberté des prix et de la
concurrence ne la reproduit pas. Mais nous pensons que son attitude s'explique
par l'économie de redondances et que les dispositions de l'article 82
n'empêchent par son application. La dissolution d'une personne morale est
la sanction la plus grave qui puisse frapper une société
commerciale car elle revient à sa véritable mort.
§3 : Sanctions administratives.
Les sanctions administratives sont des mesures de coercition que
l'administration applique légalement aux personnes et aux entreprises.
Elles présentent indiscutablement un caractère exorbitant dans
une tradition juridique où le pouvoir de prononcer les peines
légales appartient à l'autorité judiciaire. La loi sur la
liberté des prix et de la concurrence qui régit même les
entreprises publiques qu'elles soit sous forme d'établissement public ou
d'entreprise nationale ou encore de collectivités locales. Sont prises
essentiellement par le premier ministre sur recommandation de conseil de la
concurrence.
Elles peuvent se traduire par :
A- Des mesures conservatoires comportant la suspension de la
pratique dénoncée ainsi qu'une injonction aux parties de revenir
à l'état antérieur (article 32)
B- Des injonctions aux auteurs des pratiques anticoncurrentielles
de mettre fin à ces pratiques dans un délai
déterminé ou imposer des conditions particulières.
Sur le plan juridique, les sanctions administratives
s'avèrent assez comparables aux sanctions pénales. En effet,
elles obéissent également aux principes de légalité
au sens large, de l'interprétation stricte de leur contenu, de la non
rétroactivité de leur application, et dans beaucoup de cas, au
contrôle judiciaire à posteriori.
Les sanctions administratives prévues dans notre loi sur
la liberté de la concurrence illustrent bien le choix du droit positif
conciliant prévention et répression. Les articles 91 s.
décident de l'avertissement et l'amende, l'affichage et l'insertion dans
les journaux des arrêtés ou extraits d'arrêtés
prononçant la confiscation, ou l'amende.
Le premier ministre peut également, d'office ou sur
recommandation du conseil de la concurrence, ordonner des mesures de
publicité des décisions prises aux fais des contrevenants
(article 41) constituant elle-même une sanction. Une sanction
infligée dans la discrétion risque d'avoir un effet
limité. La loi sur la liberté de la concurrence ne fait que
confirmer cette tendance en prévoyant la publication des
décisions judiciaires de condamnation, article 79, et des sanctions
administratives patrimoniales(amendes) article 92.
Par l'insertion dans les journaux et l'affichage, la loi essaie
de communiquer un message précis à une masse
indéterminée de destinataires. La publicité vise à
avertir les partenaires et les clients de l'entreprise à la fois pour
les dissuader de commettre la même infraction, et surtout pour les
appeler à un comportement prudent avec l'entreprise condamnée.
§ 4 : La preuve.
Par production d'écrits ou de témoignages, la
preuve directe des volontés collusives, est certainement la plus
satisfaisante. Les entreprises, peu sensibilisées au droit de la
concurrence et rarement poursuivies, n'hésitaient pas à rendre
compte par écrit du détail de leurs arrangements. Une saisie des
documents suffisait à établir l'illicite.
Ceci constitue désormais l'exception.
Les opérateurs se savent chaperonnés. Ils
s'évitent les accords formels : conscients d'enfreindre la loi et
fulminés d'amendes importantes, ils se gardent de conférer
à leur concertation un caractère ostentatoire. Les concertations
occultes peuvent parfois être attestées grâce au
rapprochement de documents insuffisamment probants en eux-mêmes, ou au
rapprochement de documents et d'un résultat objectivement
constaté, ou encore de déclarations et de documents.
La preuve de la volonté collusive s'enchevêtre
souvent avec la preuve de la concertation. Il est aujourd'hui bien admis que le
parallélisme comportemental constitue un indice de la volonté
collusive.
Les autorités de la concurrence sont parfois averties par
une similitude troublante dans les attitudes d'entreprises situées sur
un même marché. Cette similitude leur fait suspecter une
collusion. C'est donc un constat purement matériel - l'état du
marché à un moment x - et non un indice révélant
directement une concertation, qui déclenche l'action répressive.
Les autorités régulatrices adoptent un raisonnement à
rebours qui, «partant de l'observation de la
réalité économique, induit de la constatation d'un
effet anticoncurrentiel la réalisation des conditions du
contrôle »
En l'absence de preuves directes de la concertation, les
autorités françaises et communautaires induisent l'existence
d'une entente d'une situation anormale du marché.
L'anormalité provient de l'absence de justification au
parallélisme comportemental. En pratique, il est fréquent de
trouver une explication rationnelle à ce parallélisme. Il est
donc fondamental de la rechercher : on ne peut condamner des entreprises pour
avoir réagi de façon similaire mais spontanée à un
même contexte.
Monsieur WATHELET résume bien la situation :
«Si le comportement parallèle est imposé
par la structure du marché, il ne pourra en aucun cas servir d'indice
d'une concertation. Si, par contre, le parallélisme ne peut en aucune
manière s'expliquer en fonction de la structure du marché, la
concertation pourra être présumée. Entre ces deux
extrêmes, on trouve une infinité de situations pour lesquelles la
probabilité d'un comportement parallèle non concerté en
fonction de la structure du marché est extrêmement variable.
L'indice probatoire qu'il constitue sera alors d'autant plus
«sérieux» qu'il sera improbable au regard de la structure du
marché.37(*)
Les juges et autorités de la concurrence vont donc, au vu
d'une structure particulière du marché, déterminer la
probabilité d'un comportement spontané. D'une façon
générale, plus le marché est concurrentiel, plus la
probabilité d'une concertation est forte.
L'idée de probabilité, même si elle n'en
constitue pas le seul fondement, est en droit privé un
élément cardinal de la présomption. Sa force variable lui
confère une capacité d'adaptation précieuse en
matière de preuve. On dit qu'elle «se situe à mi-chemin
entre la possibilité et la certitude ».
Il existe deux explications "structurelles" au
parallélisme comportemental : l'existence d'un "Price leader"
et l'existence d'un oligopole.
La première justification est souvent invoquée par
les entreprises mais rarement retenue. La doctrine semble également lui
refuser ses faveurs. La situation de "Price leader" "se caractérise
par l'existence sur le marché d'une entreprise dominante qui en
raison de sa puissance peut contraindre ses concurrents à aligner
leurs prix sur les siens
Le marché objet de toutes les sollicitudes et de tous les
commentaires est en réalité le marché oligopolistique.
Nous l'avons déjà défini. Il est traditionnel de dire que
dans un tel marché, le comportement parallèle trouve sa cause,
non dans une concertation entre entreprises, mais dans les mécanismes de
ce marché. On dit que l'oligopole est un «facteur
d'immunité des comportements anticoncurrentiels «. C'est
l'interdépendance existant entre les entreprises qui l'explique.
Des indices additionnels positifs, directs ou indirects, peuvent
être requis une fois le parallélisme constaté. En droit
américain, de tels indices sont appelés «plus
factors». Selon Monsieur VOGEL, les "plus factors »
s'additionnent aux comportements parallèles.
Ils ont tous pour objet de révéler un accord de
volontés entre les entreprises participantes. Le droit américain
ne connaît pas de système de preuves négatives. Il ne faut
cependant pas surestimer son caractère protecteur : le juge se contente
souvent de preuves complémentaires bien dérisoires. A l'inverse,
on ne peut pas cacher la réticence très nette de certaines
autorités françaises et communautaires à se contenter de
preuves négatives.
En principe, il appartient aux autorités de la concurrence
d'apporter la preuve des volontés collusives.
La difficulté liée à la preuve de la
volonté collusive incite les autorités de la concurrence à
se satisfaire d'indices parfois insuffisants. Il est difficilement
tolérable qu'un droit aussi sévèrement répressif
que le droit de la concurrence puisse condamner des entreprises sans qu'il soit
établi avec certitude que leur attitude est, non pas la
résultante des conditions du marché, mais volontaire. Il n'est
pas davantage admissible que des comportements volontaires, mais
unilatéraux, d'opérateurs situés sur un marché peu
concurrentiel, soient sanctionnés.
L'on peut tout d'abord parer aux inconvénients qui
s'attachent aux présomptions en exigeant
que soient rapportés des indices positifs de
concertation. On peut ensuite éviter certaines incohérences et
iniquités en incitant les autorités de contrôle à
rechercher les parties intéressées par la concertation. Le
constat que l'objet de l'entente est directement contraire aux
intérêts d'un opérateur doit aboutir à sa mise hors
de cause. Cette solution nous paraît devoir être retenue même
si elle fait obstacle à l'incrimination d'entente. L'on doit enfin
exiger que soit démontré un engagement de la part des entreprises
concertantes. Contrairement à l'analyse généralement
développée, la qualification d'entente doit être
réservée aux hypothèses où les parties se sont
données des assurances, formelles ou non, quant à leur
comportement à venir. En l'absence de toute contrainte, quelle soit
juridique ou extra-juridique, l'infraction doit être
considérée comme non constituée.
§5 : L'exemption.
L'exemption est un mécanisme immunitaire. Elle institue
une dérogation à la règle prohibitive. Elle semble en
effet restituer aux parties une liberté que contrariait la prohibition.
Ce serait mal la concevoir. Les autorités de la concurrence
subordonnent le bénéfice de l'exemption à
différentes conditions. Dans une certaine mesure, l'exemption
apparaît comme une injonction non coercitive. L'entente est
exemptée (Union européenne) ou justifiée (Maroc et
France). Par facilité de langage, nous utiliserons le terme d'exemption
quel que soit l'ordre juridique concerné.
Les droits marocain, français, et communautaire
prévoient une double justification des ententes anticoncurrentielles:
justification par l'existence d'un texte législatif et
réglementaire, justification par le progrès économique.
A - justification par la loi.
Elle est prévue au premier article alinéa 1 de
l'article 8 de la loi 06-99, aux termes duquel : « ne sont pas
soumises aux dispositions des articles 6 les pratiques : qui
résultent de l'application d'un texte législatif ou d'un texte
réglementaire.
Idem pour l'article 10 de l'ordonnance du 1er
décembre 1986 qui stipule que « Ne sont pas soumises aux
dispositions des articles 6 et 8, les pratiques qui résultent de
l'application d'un texte législatif ou d'un texte réglementaire
pris pour son application.
La justification est conçue en terme stricts. Elle ne peut
résulter que d'une loi ou d'un décret ou d'un arrêté
ministériel. Une entente ne peut trouver sa justification dans des
circulaires administratives puisqu'elles n'ont pas de valeur
réglementaire. De même une pratique anticoncurrentielle
approuvée par une administration de tutelle, voire facilitée par
elle, ne saurait échapper à la prohibition de principe de
l'article 6. Il n'y a rien d'étonnant à cela, c'est la
règle qui gouverne les limitations à la liberté
d'entreprendre, dont la liberté de concurrence est une
conséquence.
Les auteurs d'une entente ne sauraient en conséquence se
justifier en prétendant que leur comportement constitue un moyen de
légitime défense aux pratiques illicites mises en oeuvre à
leur égard. Si ces entreprises s'estiment victimes de comportement
illicites des concurrents, il leur appartient de saisir les juridictions
compétentes pour les faire cesser et de prendre des mesures de
rétorsion en mettant elle-même en oeuvre d'autres pratiques
illicites
B- justification par le progrès
économique.
Aux termes de l'article 8, al2, les ententes ne sont pas
prohibées : lorsque : « ... les auteures
peuvent justifier quelles ont pour effet de contribuer au progrès
économique et que ses contributions sont suffisantes pour compenser les
restrictions de la concurrence et qu'elles réservent aux utilisateurs
une partie équitable du profit qui en résulte, sans donner aux
entreprises intéressées la possibilité d'éliminer
la concurrence pour une partie substantielle des produits et services en cause.
Ces pratiques ne doivent imposer des restrictions à la concurrence que
dans la mesure où elles sont indispensables pour atteindre cet objectif
de progrès ».
Tout comme l'article 10, al 2 de l'ordonnance du 1er
décembre 1986. « Ne sont pas soumises aux dispositions des
articles 7 et 8 les pratiques dont les auteurs peuvent justifier qu'elles ont
pour effet d'assurer un progrès économique et qu'elles
réservent aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en
résulte, sans donner aux entreprises intéressés la
possibilité d'éliminer la concurrence pour une partie
substantielle des produits en cause. Ces pratiques... ne doivent imposer des
restrictions à la concurrence que dans la mesure où elles sont
indispensables pour atteindre cet objectif de progrès. »
La lecture de ce texte montre que quatre conditions doivent
être réunies pour que joue l'exemption par le progrès
économique.
La première est l'assurance d'un progrès
économique. Cette notion de progrès économique est une
notion difficile à préciser sont l'évaluation ne peut
résulter qu'un bilan économique des pratiques anticoncurrentielle
relevées en mettant en comparaison leur avantage et leur
inconvénients.
Avant l'ordonnance du 1er décembre 1986,
L'ancienne commission technique des ententes, dans les années cinquante,
avant intenté la méthode dite du bilan économique. Pour
savoir si une entente était bénéfique ou nuisible - l'on
parlait encore à cette époque des bonnes et mauvaises ententes- A
l'actif, la contribution au progrès économique, AU passif la
restriction de la concurrence et les obstacles au développement du
secteur économique intéressé qui en résultaient. Si
le bilan était globalement positif, l'entente échappait à
l'interdiction. En France non plus, la méthode du bilan n'est plus
retenue. Elle laisse penser qu'il existerait deux voies pour parvenir au
progrès économique : la voie de la concurrence, d'une part,
et la voie de l'organisation des facteurs économiques par des accords
professionnels, d'autre part . Elle n'exige pas que l'entente soit le seul
moyen de parvenir au progrès. Elle se contente de mettre en balance la
somme des avantages et inconvénients constatés.
Deuxième condition, une partie équitable du profit
résultant du progrès économique doit être
réservé aux utilisateurs. Ainsi le progrès ne doit pas
uniquement profiter aux entreprises membres de l'entente, ni même aux
autres entreprises de la même branche. Le profit dit se répercuter
en aval. Par exemple si le progrès économique se traduit par une
hausse des prix, le bénéfice de l'article 8 al.2 ne peut
âtre accordé. En revanche si le progrès économique
se traduit par un meilleur accès aux consommateurs à un produit
ou à un service, l'entente relevée ne tombe pas sous le coup de
la prohibition.
Troisième condition, l'entente ne doit pas donner aux
entreprises intéressées la possibilité d'éliminer
la concurrence. L'on peut parler de la nécessité de conserver une
dose minimale de concurrence sur le marché. En effet si le
progrès économique peut justifier une certaine restriction de la
concurrence, il ne peut fonder l'élimination totale de celle-ci.
La quatrième condition consiste dans le respect du
principe de proportionnalité. La restriction de concurrence ne doit pas
aller au-delà de ce que peut tolérer l'objectif du progrès
économique. Aussi la dérogation de l'article 8 al2 doit-elle
puiser sa justification dans le progrès économique qui est la
conséquence directe et nécessaire de la restriction de la
concurrence. Le progrès ne doit pas pouvoir être atteint par
d'autres moyens.
La contribution au progrès économique peut
être vérifiée et affirmée par les pouvoir publics
pour certaines catégories d'accords. Le premier ministre, après
avis du conseil de la concurrence, peut justifier certains accords qui, en
rinciez tomberaient sous le coup de l'interdiction des ententes, dés
lors que ces accords « ... ont pour objet d'améliorer la
gestion des petites ou moyennes entreprises ou la commercialisation par
agriculteurs de leurs produits.. » (Article8. AL3).
C- La justification par la règle de raison
Inappliquée au Maroc ni même le droit
français interne ou communautaire ne recourent à une règle
de raison, puisque dans les deux systèmes, l'on connait
déjà une exception fondée sur le progrès
économique, qui laisse une assez grande latitude de décisions aux
autorités de la concurrence. Ces autorités font place à
une méthode qui rappelle celle de la règle de raison. Ce qui
caractérise ma règle de raison, c'est qu'elle fait intervenir la
justification au moment de la qualification retenue comme le cas
l'exemption.
Conclusion
Le droit des ententes est un droit qui se construit : il est de
formation récente. Cette jeunesse pourrait faire de lui un droit timide
et balbutiant ; il est au contraire conquérant et sûr de lui. Sa
principale conquête est le contrat, cible désignée par sa
soumission aux exigences de l'ordre public.
Les autorités de la concurrence ont pour seule mission de
réguler le marché. Elles n'interviennent que lorsque le jeu
normal de la concurrence est perturbé ou qu'il est susceptible de
l'être. Cela a pour conséquence qu'un contrat valable au regard de
la théorie générale des contrats peut être
considéré illicite par les autorités régulatrices.
Il existe peu de remèdes à cela. II faut accepter la
spécificité du droit de la concurrence, tout en veillant à
ce que le souci d'efficacité ne conduise à des résultats
trop contestables.
Le droit des ententes manifeste sa filiation au contrat.
L'entente anticoncurrentielle ne se caractérise par seulement par
l'atteinte au jeu normal de la concurrence qu'elle organise ou qu'elle provoque
: elle se caractérise également par son processus de
création. Comme le contrat, l'entente est issue d'un concours de
volontés entre entreprises. La notion se dédouble : les parties
doivent avoir la volonté de s'entendre et la volonté de chacune
doit croiser la volonté des autres, se lier à elles par une
volonté commune.
Sur le plan probatoire tout d'abord, il faut encourager le
recours à des indices positifs de la concertation. Les autorités
de la concurrence ne doivent pas se contenter d'énoncer qu'une
concertation est la seule explication possible à la perturbation du
marché. Cette pratique autorise tous les excès, elle est
condamnable.
Sur un plan substantiel ensuite, il faut inciter les
autorités régulatrices à rechercher si s parties qu'elles
incriminent ont un intérêt quelconque à l'entente.
L'emprunt par le droit des pratiques anticoncurrentielles d'une
sanction contractuelle soulève des problèmes parfois insolubles.
La compétence reconnue au juge, pourtant rompu à son usage, ne
résout rien.
La règle d'opportunité est parfois favorable aux
entreprises : une entente, bien qu'anticoncurrentielle, peut être
jugée opportune parce que ses inconvénients sont compensés
par ses avantages en terme de concurrence ou de progrès
économique. Elle est alors préservée par le jeu d'une
règle de raison ou d'une exemption.
Ces deux propositions ne font que tirer les conséquences
des conditions préalables à la prohibition. Elles permettent
d'expurger le vice des contrats soumis au contrôle. Elles apparaissent
comme des substituts à la nullité pour les autorités de la
concurrence : l'annulation relève de la seule compétence des
juges et, dans une moindre mesure, des arbitres.
Les relations entre le droit des ententes et le contrat sont donc
complexes. Entente et contrat peuvent en certains points vivre en symbiose. Le
droit des ententes anticoncurrentielles permet quelquefois de régler des
conflits que le droit classique s'était montré impuissant
à résoudre.
Le contrat constitue, pour sa part, une référence
de choix pour les autorités de la concurrence lorsqu'il s'agit
d'apprécier l'existence d'un concours de volontés.
L'enrichissement est donc mutuel.
Bibliographie.
Règles juridiques :
*Loi n°
06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence. *Décret
d'application de la loi 06-99 n° 2-00-854 du 28 joumada Il 1422 pris pour
l'application de la loi n° 06-99 sur la liberté
des prix et de la concurrence. (B.O du 4 octobre 2001)
*Code de commerce français
* Le traité sur le fonctionnement de l'Union
européenne
*Ordonnance n° 86-1243 du 1
décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la
concurrence
Doctrine :
Ouvrages
généraux :
1- Auteur KESKIN , ALI CENK Titre
Pour un nouveau droit international de la concurrence [Texte imprimé] /
Ali Cenk Keskin ; préface de Jean-Marc Sorel Editeur/Copiste Paris :
l'Harmattan , DL 2009
2- Auteur ALBOTCHIRE , ADAMOU Titre Pratique
du droit de la concurrence et de la consommation [Texte imprimé] /
Adamou Albortchire, Virginie Cibert-Goton Editeur/Copiste Paris :
Éd. Eska , DL 2007
3- Auteur ABDELGAWAD , WALID Titre
Arbitrage et droit de la concurrence [Texte imprimé] : contribution
à l'étude des rapports entre ordre spontané et ordre
organisé / Walid Abdelgawad ; préf. de Eric Loquin
Editeur/Copiste Paris : L.G.D.J , 2001
4- Auteur MAINGUY ,
DANIEL Titre Droit de la concurrence [Texte imprimé] / Daniel
Mainguy,... Jean-Louis Respaud,... Malo Depincé Editeur/Copiste
Paris : LexisNexis-Litec , impr. 2010
5- Auteur MARIE-ANNE
FRISON-ROCHE Marie-Stéphane Payet Titre Droit de la concurrence
Editeur/Copiste Dalloz-Sirey, 2006
6- Auteur NOUR-EDDINE
TOUJGANI Titre Guide pratique du droit de la concurrence Publication
soutenue par le Projet PIC-Consomar -2006
7- Auteur M. DRISS
ALAMI MACHICHI Titre Concurrence Droits et Obligations des Entrprises au
Maroc Editeur/Copiste Eddif en partenariat avec l'économiste,
2004
8- Auteur JEAN-BERNARD BLAISE Titre Droit des
affaires : Commerçants, concurrence, distribution Editeur /Copiste
LGDJ
9- Auteur Editions Francis Lefebvre Titre Concurrence,
consommation, 2009-2010 [Texte imprimé] / [réalise par la
rédaction des Editions Francis Lefebvre] Editeur/Copiste Levallois :
F. Lefebvre , DL 2009
10- Traité sur le fonctionnement de l'union
européenne du 16 décembre 2002 Code de commerce
français du 15 mai 2001 Liberté des prix et concurrence
Approche préliminaire la LOI 06-99 Abdelwahed CHAIR,2000
11-
Dictionnaire d'économie et de sciences sociales ; Jean-Yves Capul et
Olivier Garnier . Ed : Hatier 2011.
Ouvrages spéciaux :
1-
L'application en France du droit des pratiques
anticoncurrentielles [Texte imprimé] / [Marie-Chantal Boutard Labarde,
Guy Canivet, Emmanuel Claudel, et al.] Editeur/Copiste Paris : LGDJ , DL
2008
2-
Auteur THEODOROS GALANIS Titre Droit de la concurrence et
régulation sectorielle : L'exemple des communications
électroniques Editeur/Copiste Bruylant, 2010
3-
Auteur RIEM, FABRICE Titre La notion de transparence dans le
droit de la concurrence [Texte imprimé] / Fabrice Riem ; préf. de
Laurence Boy Editeur/Copiste Paris Budapest Torino : l'Harmattan ,
2002
4- Titre: La protection juridique des entreprises en droit
communautaire de la concurrence BEAUCHESNE, BENEDICTE Date:
1991
5- Titre Transports maritimes et concurrence communautaire:
la confrontation Auteur BENEDICTE RAJOT Editeur/Copiste Economica,
2001
6- Titre Pratique du droit de la concurrence national et
communautaire Auteur ALAIN GUEDJ Editeur/Copiste Litec,
2000
7- Auteur ROMANO, FRANK Titre La mondialisation des
politiques de concurrence [Texte imprimé] / Frank Romano ; préf.
par Marie-Chantal Boutard-Labarde Editeur/Copiste Paris Budapest Torino :
l'Harmattan , 2003
8- Auteur HABIB KAZZI Titre Le
contrôle des pratiques anticoncurrentielles et des concentrations entre
entreprises dans une économie mondialisée Contribution
à l'étude de l'application internationale du droit
économique Editeur/Copiste Presses Universitaires d'Aix-Marseille -
P.U.A.M.01/2008
9-
Auteur Emmanuelle Claudel
Titre Ententes anticoncurrentielles et droit des
contrats
Revues juridiques :
1- Droit de la
concurrence et des orux Publications de la revue marcaine d'administration
locale et de développement Deuxième édition, 2009 2-
Deuxème Assises de la concurrence : Les autorités de la
concurrence interrelations et rapports avec les pouvoirs exécutif et
judiciaire : REMALD ; 2011. 3- Culture de la concurrence, L'an I du conseil
de la concurrence ; REMALD, 2010
Actes de colloques :
1- Auteur Sous la direction de WALID ABDELGAWAD Titre
Mondialisation et droit de la concurrence : les réactions normatives des
États face à la mondialisation des pratiques anticoncurrentielles
et des opérations de concentration : actes du colloque des 14 et 15 juin
2007, Dijon Editeur/Copiste Litec
2-
Auteur INSTITUT MAROCAIN DU DROIT DES ENTREPRISES. Colloque
(2002 ; Casablanca) Titre Le Droit de la concurrence [Texte imprimé] :
actes / du Colloque, Casablanca, 2002 ; [organisé par] Institut Marocain
du Droit des Entreprises (IMADE) Editeur/Copiste Casablanca : Institut
Marocain du Droit des Entreprises (IMADE) , 2002
Jurisprudence :
Direction générale de la concurrence, de la
consommation et de la répression des fraudes.
http://www.bercy.gouv.fr/fonds_documentaire/dgccrf/04_dossiers/concurrence/juris_cassation/them_ententes.htm
* 1 J. MESTRE,
chronique de droit des obligations, R.T.D.Civ. 1987, p.307.
* 2 Le terme de convention est
ici employé comme synonyme de contrat. Les deux notions sont parfois
distinguées. La convention est définie comme un accord de
volontés entre deux ou plusieurs personnes, en vue de produire
(créer, transmettre, éteindre) des effets de droit. Le
champ du contrat apparaît plus étroit. Il ne pourrait que
créer des effets de droit
* 3 R.
SAVATIER, "L'ordre public économique", Dalloz 1965, p. 37.
* 4 La loi sur la liberté
des prix et de la concurrence s'inscrit dans le cadre d'une série de
réformes entreprises par le Maroc aux fins de se mettre à niveau
par rapport aux législations en vigueur dans les pays partenaires
du Maroc. Il s'agit notamment de Dahir n° 1-00-225 du 2 rabii I 1421 (5
juin 2000) portant promulgation de la loi n° 06-99 sur la liberté
des prix et de la concurrence publié au Bulletin Officiel n° 4810
du 6 juillet 2000. Avant cette date, le droit de la concurrence était
régie par une loi dont les objectifs étaient entre autres de
maîtriser les mécanismes de détermination des prix dans le
cas où la concurrence ne joue pas entre les agents économiques et
d'atténuer les pressions inflationnistes. Mais ce cadre
législatif et réglementaire relatif au contrôle des prix,
était devenu inadapté face aux phénomènes de
libéralisation qui ont marqué l'économie nationale et
internationale, d'où la nécessité d'élaborer un
cadre législatif plus commode et plus approprié à notre
époque. Ceci étant, la nouvelle loi borne son champ
d'application (art. 1) à toutes les personnes physiques ou morales dont
les comportements ont un effet sur la concurrence sur le marché
marocain, à toutes les activités de production, de
distribution et de services et aux personnes publiques exerçant ces
activités et finalement aux accords à l'exportation ayant une
incidence sur la concurrence sur le marché intérieur marocain.
* 5 Le Sherman
Anti-Trust Act du
2
juillet
1890 est la première
tentative du gouvernement américain de limiter les comportements
anticoncurrentiels des entreprises : il signe ainsi la naissance du
droit de la
concurrence moderne. La
loi américaine porte le
nom du
Sénateur
John Sherman de l'
Ohio qui s'éleva contre
le
pouvoir
émergent de certaines
entreprises
constituées en quasi-
monopoles. L'expression
d'« anti-trust » vient du fait que la proposition de loi
visait à contrer les agissements d'un groupe pétrolier, la
Standard Oil, qui
était constitué en
trust et
non sous la forme d'une
société
dont les droits étaient, à l'époque, limités.
Ironiquement, lorsque la Standard Oil fut démantelée, elle avait
pris déjà la forme d'une société et le Sherman
Antitrust Act ne s'appliqua plus guère aux trusts. Il est
complété par le
Clayton Antitrust
Act de 1914.
* 6 L. VOGEL,"
L'influence du droit communautaire sur le droit français de la
concurrence", J.C.P. éd.
G., 1992, n°3550, p.33
* 7 Le père de cette
analyse fut E. H. CHAMBERLIN. Il la développa dans
l'ouvrage intitulé "La théorie de la concurrence
monopolitistique" (1950). Elle fut amplement reprise depuis. La théorie
de la maximisation du profit joint fut contestée par certains auteurs,
tel POSNER, qui firent notamment valoir que, même sur un
marché oligopolistique, le temps de réponse des concurrents peut
être relativement long ("Antitrust Law. An Economic perspective", The
University of Chicago Press, 1976.)
* 8 A.GUEDJ,
« Pratique du droit de la concurrence national et
communautaire », LexisNexis éd. p :30
* 9 Le traité sur
le fonctionnement de l'Union européenne est l'un des deux
traités
fondamentaux des institutions politiques de l'
Union
européenne avec le
Traité
sur l'Union européenne. Il portait le nom de traité
instituant la communauté européenne ou
traité CE avant l'entrée en vigueur le
1er
décembre
2009 du
traité
de Lisbonne. On l'appelle également couramment le
traité de Rome.
Nommé à l'origine « Traité
instituant la Communauté économique
européenne », il a constitué l'acte fondateur de la
Communauté
économique européenne (
CEE).
Il a été signé le
25
mars
1957 dans la salle des Horaces
et des Curiaces du
Capitole,
Rome, par l'
Allemagne, la
France, l'
Italie et les trois pays du
Benelux :
Belgique,
Luxembourg et
Pays-Bas, les
délégations ayant la volonté de s'engager dans un
processus irréversible. Selon son préambule, le traité
vise notamment à « établir les fondements d'une union
sans cesse plus étroite entre les peuples
européens ».
* 10 Rapport d'activité
du Conseil de la concurrence pour 1990
* 11 V.
SELINSKY, "L'entente prohibée", Thèse Paris, Librairies
techniques 1978, §397. Dans le même sens,
J. B. BLAISE, "Le statut juridique des ententes
économiques dans le droit français et le droit des
Communautés économiques", Thèse Paris, Librairies
techniques, 1964, § 143, p.172.
* 12 "L'application en France
du droit des pratiques anticoncurrentielles" L.G.D.J éd. P.96
* 13 La définition du
marché en cause permet d'identifier et de définir le
périmètre à l'intérieur duquel s'exerce la
concurrence entre entreprises. Elle permet d'établir le cadre dans
lequel la Commission applique la politique de la concurrence. Son objet
principal est d'identifier de manière systématique les
contraintes que la concurrence fait peser sur les entreprises données.
La définition du marché permet, entre autres, de calculer les
parts de marché, qui apportent des informations utiles concernant le
pouvoir de marché. Le marché en cause est délimité
tant au niveau des produits que dans sa dimension géographique. D'une
manière générale, le marché de produits en cause
comprend tous les produits et/ou services que le consommateur considère
comme interchangeables ou substituables (substituabilité) en raison de
leurs caractéristiques, de leurs prix et de l'usage auquel ils sont
destinés. Il convient également de prendre en compte les produits
et/ou les services qui pourraient être facilement commercialisés
par d'autres producteurs sans coût de réorientation important, ou
par des concurrents potentiels, à un coût raisonnable, et dans un
laps de temps limité. Le marché géographique en cause
comprend le territoire sur lequel les entreprises concernées sont
engagées dans l'offre des biens et des services donnés, sur
lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes et qui
peut être distingué de zones géographiques voisines parce
que, en particulier, les conditions de concurrence y diffèrent de
manière appréciable .Voir la communication de la Commission sur
la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire
de la concurrence (JO C 372 du 9.12.1997, p. 5).
* 14 Rapport d'activité
pour 1993, p. XIV.
* 15 A. GUEDJ
«Pratique du droit de la concurrence national et communautaire»
LexisNexis éd. P :31
* 16 D. F.
TURNER," The Definition of Agreement Under the Sherman Act : Conscious
Parallelism and Refusals to Deal" , 75 Harv. L. Rev., 655 (1962), cité
par A. PERROT et L. VOGEL
* 17 Décision
CHRISTIANI-NIELSEN, précitée. Dans le même sens,
arrêt BEGUELIN de la C.J.C.E. en date du 25 nov. 1971, aff.22-71 Rec.
949.
* 18 L'ordonnance du
1er décembre 1986 relative à la liberté des
prix et de la concurrence, modifiée par la loi du 15 mai 2001 sur les
nouvelles régulations économiques, a largement
dépénalisé les pratiques anticoncurrentielles
* 19 Cour d'appel de Paris, 15
septembre 1993, B.O.C.C.R.F. du 8 avril 1994 (pourquoi une publication si
tardive?), p. 142.
* 20 L'on parle aussi dans ce
cas d'une règle de minimis.
* 21 V. ART .1 sous
section 2 du règlement (CEE) n° 4056/86.
* 22 L'acte dont il est
difficile de rapporter la preuve : D.AMMAR, "Essai
sur le rôle de l'engagement d'honneur", Thèse Paris 1990, p.296.
Le reproche est adressé à M. Stewart Mc CAULAY
(auteur de «Non contractual relations in business : a preliminary
study», American sociological review, 1963, p.55) .
* 23 J.B
Blaise, « Droit des affaires : commerçants-
concurrence- distribution » L.G.D.J et DELTA éd, P.390-391
* 24 Commission de protection
de la concurrence (Epitropi Prostasias Antagonismou), 5 août 2007, Cyprus
Telecommunications Authority (CYTA) et Lumière TV ltd (LTV),
e-Competions, mars 2007-II, n° 12628, obs. LYKOTRAFITI (A.). A noter que
LTV est une entreprise publique.
* 25 La clause anglaise (A.
DECOCQ et G. DECOCQ, Droit de la concurrence interne et communautaire, op.
cit., p.238) consiste à permettre à l'entreprise liée par
une clause d'approvisionnement exclusif de retrouver sa liberté, si elle
trouve un fournisseur qui lui propose le même produit/service à un
prix inférieur, à condition de le notifier à son
fournisseur habituel.
* 26 Théodoris
Galanis, « Droit de la concurrence et régulation
séctorielle : L'exemple des communications
éléctroniques » Thèse 2010. ANT.N.SAKKOULAS
ATHENES et BRUYLANT BRUXELLES éd. P :775-776
* 27 J. SHAPIRA, G. LE
TALLEC et J.B. BLAISE, "Droit européen des affaires», p.
249.
* 28 FRISON-ROCHE, Marie-Anne
et PAYET, Marie-Stéphane, Droit de la concurrence, coll. «
Précis Dalloz », Dalloz, 2006.
* 29 Par exemple, le principe
de service universel - qui est une notion à l'origine
anglo-saxonne qui a été reprise par la Commission
européenne. Il s'agit d'"un service minimum donné, dont
la qualité est spécifiée, pour tout utilisateur,
à un prix accessible". Il s'agit, dans un
environnement concurrentiel en général, d'imposer aux producteurs
la fourniture de services de base permettant d'assurer l'accès
à une consommation minimale à tous les citoyens, et
cela à un prix "acceptable" (notion assez floue, évidemment
!). Les domaines concernés sont par exemple les
télécommunications ou les transports ferroviaires. Le
service universel postal, par exemple, consiste en une liste de services
précis (l'envoi des lettres de moins de 100 grammes, la distribution du
courrier, etc.) dont on estime qu'ils doivent être fournis à
tous les citoyens, à un prix accessible. Rien ne dit que le
service universel doive être fourni par un service public. Au
contraire, cette réglementation européenne a pour objectif
d'introduire de la concurrence tout en régulant et en contrôlant
les prestations fournies -, ou bien le principe de non-discrimination
* 30 N.
DECOOPMAN, "Le pouvoir d'injonction des autorités
administratives indépendantes", précité,
J.C.P. Ed. G, 1987, I, n°3303.
* 31 Page XXVI du rapport
annuel 1987
* 32 M. Drissi Alami
Machichi : concurrence <droits et obligations des
entreprises au Maroc > édition EDDIF P. 248
* 33 Seul le premier ministre a
qualité pour saisir le conseil, les ministres ne le peuvent pas.
* 34 M'hamed
MOTIK :<Droit commercial marocain> édition AL MAARIF AL
JADIDA Rabat
* 35 Sur ce bilan : VOGEL
(L.), « Efficacité des sanctions pénales et
civiles », Gaz. Pal.29 et 10 janv.2003, pp.12 et s ; CONTE
(P) , « Droit Pénal et concurrence », Cah, dr,
entr. 2000.21 ; OCDE, Les ententes injustifiables - progrès
récents et défis futurs, 5 mai 2003, CCNM/GF/COMP/TR (2003)7. Le
paragraphe 51 de ce rapport souligne qu' « En ce qui concerne
ces autres pays, beaucoup plus nombreux, il est difficile de déterminer
dans l'abstrait si les amendes autorisées par ces lois sont
appropriées. Cette détermination ne peut être faite qu'au
fil du temps, au fur et à mesure que des amendes sont calculées
et infligées dans certaines affaires concrètes. En toute
hypothèse, les données limitées qui sont disponibles
suggèrent que ces pays n'infligent pas encore des amendes approchant des
niveaux maximums ». En d'autres termes, « Dans la
majorité des pays, les amendes infligées dans des affaires
d'ententes n'ont pas été significatives, bien que certains pays
aient récemment prix, dans des affaires d'ententes n'ont pas
été significatives, bien que certains pays aient
été récemment prix (..), différentes mesures afin
de renforcer leur sanctions en matière d'ententes ».
* 36 Pour être dissuasive
et tenir compte du faible nombre de cas découverts, de nombreux experts
internationaux souhaitent que les amendes infligées aux entités
participant à une entente soient au moins deux à trous fois plus
élevées que les gains réalisés grâce à
l'entente : OCDE, Rapport sur la nature et l'impact des ententes
injustifiables et sanctions prévues contre les ententes par
législations nationales de la concurrence, op. cit, pts 13 et s.
* 37 M.
WATHELET, "Pratiques concertées et comportements
parallèles en oligopole
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