Médias et gestion des crises dans la région de l'extrême- nord du Cameroun: cas de l'épidémie de choléra dans le département du Mayo- Tsanaga( Télécharger le fichier original )par Grégoire DJARMAILA Université de Maroua Cameroun - Master professionnel en vue de l'obtention du diplôme d'ingénieur facilitateur de développement 2011 |
1-1-1-7-Epidémie :Selon le dictionnaire Littré enrichi « Epidémie » qui vient du latin médiéval epidemia et du grec épidêmia, signifie le développement d'une maladie. De manière littérale, une épidémie désigne l'augmentation rapide de l'incidence d'une maladie en un lieu donné sur un moment donné, sans forcément comporter une notion de contagiosité. En pratique, ce terme est souvent utilisé à propos d'une maladie infectieuse contagieuse. Faral (in Vie temps st Louis, 1942, p. 86) définit une épidémie comme « une apparition de cas de maladie, ou d'un phénomène de santé en excès du niveau attendu, c'est-à-dire de l'incidence habituelle dans une communauté ou dans une région ». En termes opérationnels, il y a épidémie lorsque le nombre de cas ou la valeur du taux d'attaque d'une maladie est très élevé. Ce taux constitue un niveau qui attire l'attention du personnel sanitaire sur l'éclosion d'un phénomène épidémique. Endémie, épidémie, pandémie Une endémie désigne la présence habituelle d'une maladie dans une région ou une population déterminée. Elle peut se développer en épidémie si les conditions environnementales le favorisent. Par la suite : · soit l'épidémie s'étend et devient une pandémie (cas du VIH), · soit l'épidémie régresse, l'incidence devenant très faible, nulle ou négative. Si elle reste localisée dans l'espace, elle devient une endémie limitée à certaines régions (cas actuel de la poliomyélite). Elle peut aussi éventuellement disparaître à la fin. Une épidémie peut également surgir sans qu'il y ait d'endémie préalable, par exemple à la suite d'un accident provoquant la dissémination du vecteur pathogène dans un environnement où il était jusqu'alors inexistant (prévalence et incidence initialement nulles). Dans de telles circonstances, seuls quelques cas suffisent pour provoquer un accroissement très significatif de l'incidence de la maladie et lui donner le caractère d'épidémique. 1-1-1-8-Le choléraSelon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), le choléra est une infection diarrhéique aiguë provoquée par l'ingestion d'aliments ou d'eau contaminés par le bacille Vibrio cholerae. Selon le Centre des Médias de l'OMS (WHO Media Centre), il y a chaque année 3 à 5 millions de cas de choléra, avec 100 000 à 120 000 décès. La brève période d'incubation, de deux heures à cinq jours, renforce la dynamique potentiellement explosive des épidémies. L'Encyclopédie Vulgaris Medical le définit comme une toxi-infection entérique épidémique contagieuse due à la bactérie Vibrio cholerae, ou bacille virgule, découverte par Pacini en 1854 et redécouverte par Koch en 1883. Strictement limitée à l'espèce humaine, elle est caractérisée par des diarrhées brutales et très abondantes (gastro-entérite) menant à une sévère déshydratation. La forme majeure classique peut causer la mort dans plus de la moitié des cas, en l'absence de traitement (de quelques heures à trois jours). La contamination est orale, d'origine fécale, par l'eau de boisson ou des aliments souillés. Le choléra a été la première maladie pestilentielle à faire l'objet, dès le XIXe siècle, d'une surveillance internationale. Sur le plan historique, il faut souligner qu'au XIXe siècle, le choléra s'est propagé à plusieurs reprises de son réservoir d'origine dans le delta du Gange, en Inde, au reste du monde, avant de se cantonner dans le Sud de l'Asie. Les six pandémies observées ont fait des millions de morts en Europe, en Afrique et dans les Amériques. La septième pandémie, qui sévit encore aujourd'hui, a commencé en 1961 dans le sud de l'Asie et a gagné l'Afrique en 1971 et les Amériques en 1991. La maladie est désormais endémique dans de nombreux pays et il est impossible actuellement d'éliminer l'agent pathogène dans l'environnement. (FADIBO Pierre : 2006). Dans une étude réalisée en 1983 sur l'évolution du choléra au Cameroun, intitulée « le Cholera au Cameroun de 1971-1988, Daniel Mfonfu et Deborah Agbor Tabi, du service de l'Epidémiologie au Ministère de la Santé Publique soulignent qu'au Cameroun, les premiers cas de choléra ont été signalés le 4 février 1971 par l'Hôpital Laquintinie à Douala en provenance de l'Ile de Djebale, une pêcherie au Nord de la ville (MFONFU, D et AGBOR TABI, D : 1983). Une deuxième entrée du choléra était par le département du Logone et Chari dans la cuvette du Lac Tchad en mai 1971. De 1971 à 1988, 12.076 cas de choléra dont 1.389 décès ont été enregistrés avec un taux de létalité de 11.5%. Les départements du Wouri et du Moungo dans la province du Littoral ont été les plus atteints ainsi que l'arrondissement de Batcham du département des Bamboutos dans la province de l'Ouest; les Iles et la ville de Muyuka du département de Fako dans le Sud-Ouest ; les départements du Logone et Chari, du Mayo Sava, et du Mayo Tsanaga dans l'Extrême-Nord. Quatre grandes éclosions épidémiques ont sévi dans le pays en 1971 dans la ville de Douala et le département du Logone et Chari ; en 1980 dans les départements du Mayo Sava et du Mayo Tsanaga ; en 1983 dans la ville de Douala, et en 1985 dans l'arrondissement de Batcham. La principale cause de choléra était le vibrion cholérique El Tor des sérotypes OGAWA et INABA. La transmission du choléra dans la zone côtière, les Provinces du Littoral et du Sud-Ouest était essentiellement hydrique tandis qu'elle était directe et inter-humaine dans les provinces de l'Ouest et de l'Extrême-Nord. Les flambées épidémiques et les poussées saisonnières de choléra étaient observées des la fin de saison de pluie et pendant la saison sèche dans le Sud du pays, et pendant la saison des pluies dans le Nord. Les facteurs favorisant la transmission du choléra étaient surtout la concentration ou le rassemblement humain ; le maniement et le transfert des malades et des cadavres ; des rites traditionnels sur les cadavres ; les repas en commun avec les mains, et le manque de respect de l'hygiène alimentaire ; et le manque de l'eau potable surtout à Douala. L'Etat a déployé des efforts énormes pour contrôler ce fléau en assurant l'approvisionnement de la ville de Douala et plusieurs villages en eau potable d'excellente qualité. L'étude sus-citée souligne qu'entre le 10 et 18 mai 1971, une autre épidémie de choléra s'est déclarée brusquement dans la Province de l'Extrême-Nord, touchant les départements du Logone et Chari, du Mayo-Danay, du Margui Wandala (Mayo Sava et Mayo Tsanaga) ; et du Diamaré. 1965 cas dont 265 décès ont été notifiés au 30 juin 1971. Le vibrion a été introduit dans la province par une famille venant du Nigeria à travers le Lac Tchad au village de Goulfey où l'épidémie s'est explosée pendant la fête de circoncision provoquant 808 cas du 7 au 27 mai 197. La transmission de la maladie était par contact direct, et contamination inter humaine favorisée par le repas en commun avec la main. A la fin de 1971, 2.696 cas de choléra dont 427 décès ont été enregistrés au Cameroun. Sur le plan épidémiologique, le choléra se diffuse de manière épidémique mais est endémique dans un certain nombre de pays. Au Cameroun, le nombre de cas notifiés en 2010 était de plus de 20 000 pour plus de 1000 décès dont 601 dans la seule région de l'Extrême-Nord, selon les données fournies par la délégation régionale de la Santé publique de l'Extrême-Nord. Ces chiffres sont en augmentation très sensible par rapport aux années précédentes. L'incidence réelle est très probablement supérieure. La maladie se développe principalement dans des conditions de vie défavorables : fortes concentrations humaines, hygiène et assainissement de l'eau insuffisants. Sept pandémies sont recensées : · 1re pandémie (1817-1825) : partie de l'Asie elle touche l'Afrique orientale et à partir de 1823 l'Asie Mineure et dans la foulée, la Russie, et l'Europe. · 2e pandémie (1826-1841) : l'épidémie se propage à partir de la Mecque vers l'Égypte puis l'Europe. · 3e pandémie (1846-1861) : l'épidémie partie de la Chine touche le Maghreb (en particulier l'Algérie) puis l'Europe. · 4e pandémie (1863-1876) : elle touche l'Europe du Nord, la Belgique en 1866, puis la France, l'Afrique du Nord et l'Amérique du Sud. · 5e pandémie (1883-1896) : l'épidémie diffuse à partir de l'Inde vers l'est et l'ouest sur plusieurs continents. · 6e pandémie (1899-1923) : à partir de l'Asie, l'épidémie se répand en Russie et de là en Europe centrale et occidentale. · 7e pandémie (depuis 1961) : la 7e pandémie, partie de l'Indonésie en 1961, envahit l'Asie (1962), puis le Moyen-Orient et une partie de l'Europe (1965), et s'étend ensuite en 1970 au continent africain, et en 1991 à l'Amérique latine. C'est en Afrique, où le choléra sévit désormais de façon endémique, que la situation est la plus préoccupante aujourd'hui. Au Cameroun, l'épidémie tend à être endémique dans toutes les régions. Les facteurs de risque et charge de morbidité Selon l'OMS, la transmission du choléra est étroitement liée à une mauvaise gestion de l'environnement. On trouve dans les zones à risque typiques les bidonvilles périurbains, qui ne disposent d'aucune infrastructure de base, ou les camps de réfugiés ou de personnes déplacées, où les besoins minimums en eau propre et en assainissement ne sont pas assurés. Les catastrophes, avec l'interruption des systèmes d'approvisionnement en eau et d'assainissement, ou des déplacements de populations dans des camps mal équipés et surpeuplés, ont pour conséquence d'augmenter le risque de transmission du choléra, si jamais le bacille est présent ou s'il est introduit. Il n'y a jamais eu d'épidémies à partir des cadavres. Le choléra reste à l'échelle mondiale une menace pour la santé publique et c'est un indicateur clef de l'insuffisance du développement social. On a d'ailleurs observé récemment sa réémergence, parallèlement à l'augmentation continuelle des populations vulnérables vivant dans de mauvaises conditions d'hygiène. Le nombre des cas de choléra notifiés à l'OMS continue de croître. De 2004 à 2008, cette augmentation a été de 24% par rapport à la période 2000-2004. Rien qu'en 2008, 56 pays ont notifié 190 130 cas, dont 5143 mortels. Mais de nombreux cas ne sont pas recensés à cause des limitations des systèmes de surveillance et de la crainte de sanctions limitant les voyages et les échanges commerciaux. On estime que le bilan véritable de la maladie se chiffre à 3-5 millions de cas et 100 000-120 000 décès par an. |
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