Essai sur les élites traditionnelles au Maroc( Télécharger le fichier original )par El Mostafa AAOURDOU Université Moulay IsmaàŻl Meknes - Maroc - Master en science politique 2012 |
B- Socialisation des générations en politiqueLe mot « socialisation » est en lui-même équivoque, il comporte des sens variés. Cependant, l'usage s'est établi de désigner par lui le processus d'assimilation des individus aux groupes sociaux.160(*) La notion est extrêmement large, elle peut s'appliquer à tous les processus d'apprentissage ou d'intégration des enfants comme les adultes. En effet, le phénomène de socialisation politique est étroitement lié à la culture politique. Si celle-ci témoigne de sa spécificité et garantit sa continuité dans le temps, c'est parce qu'elle existe des processus capables de renforcer son particularisme et pourvoir sa reproduction. Ces processus sont purement immanents, car la socialisation politique échappe à l'emprise de l'école, c'est la spontanéité sociale qui s'en charge. L'intégration d'un milieu par la culture et par le comportement, est le domaine de l'élection de l'influence familiale161(*). Les modes de socialisation sont nombreuses et bien adaptés aux traditions culturelles particulières162(*). La socialisation peut être comprise dans le sens de conditionnement, elle serait ainsi, le processus par lequel les individus sont dès leur jeune âge contraints à adopter un mode de pensée et de comportement à des stéréotypes dominants163(*). En outre la socialisation peut être réfléchie en tant que modèle d'interaction, l'individu n'est pas passif devant la socialisation politique. Le modèle d'interaction permet de distinguer une socialisation primaire acquise dans l'enfance et une autre secondaire à l'adolescence et à l'âge adulte. La socialisation primaire conditionne les attitudes politiques chez certains. Pour d'autres, l'intégration politique, n'est réalisée qu'à travers des expériences personnelles, individuelles ou collectives. La solidarité entre culture politique et socialisation politique est très forte. Au Maroc, la culture bourgeoise enracinée dans la société, et la tradition de servir le pouvoir pendant des décennies voire des siècles couplés à l'intervention du protectorat au profit de ces catégories, ont permis la production et la reproduction des élites issues des mêmes familles. Il s'agit des familles bourgeoises et makhzens qui ont été reconduit dans le pouvoir, la familiarité de leurs membres avec les affaires publiques, facilite leur acquisition des positions importantes. La rotation des élites au Maroc diffère du concept préconisé par Pareto. Leur renouvellement obéit à d'autres conceptions. « Les changements que connaissent les élites fonctionnelles : ministérielles et parlementaires, sont édictées essentiellement pour affronter les vagues de mécontentements populaires ou pour annoncer de nouvelles orientations de la politique générale. Ils interviennent dans le cadre d'une politique de contenement des crises politiques qui menacent le pouvoir. Ce mouvement de changement tend à assurer la continuité du système et non son amendement »164(*). Il s'en suit la reproduction des mêmes élites et le maintien du statuquo. Ainsi, la rotation des élites est un mouvement interne, elle ne concerne que la couche sociale au pouvoir, sans qu'elle permette l'ascension des individus issus des couches inférieures. Les mêmes figures disparaît et réapparaît selon le besoin et suivant les exigences politiques de la période. Le mouvement des élites est éphémère, il n'est pas une stratégie, son objectif est d'étouffer toute demande de changement politique. Cette rotation n'est que partielle, elle épargne les individus qui occupent des postes sensibles au sein du système. Tous ces mouvements de rotation fermée, partielle et superficielle des élites, se passent sous contrôle et direction du pouvoir. Les manoeuvres éprouvées par le pouvoir pour assurer sa pérennité, en l'occurrence l'hérédité menant à la continuité des élites traditionnelles, s'affrontent avec les demandes de démocratisation de la vie politique. Comment les rapports sont entretenus entre l'hérédité et la démocratie ?
* 160 -Jean Marie Denquin, op.cit, p. 208. * 161 - Michèle Aliot Marie, op.cit, p .96. * 162 - Ibid, p : 97. * 163 - Jean Marie Denquin, op.cit, 1985, p. 211. * 164 -Mustapha Shimi, « les élites ministérielles et parlementaires » in revue Machrek maghreb, 1989. |
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