Paragraphe II : L'existence de la coopération
décentralisée dans les départements
du Mono et du Couffo
La synthèse de la pratique de la coopération
décentralisée dans les départements du Mono et du Couffo
(A) permettra de dégager les problèmes spécifiques dont le
regroupement constituera la problématique générale
à partir de laquelle le thème sera tiré (B).
A- Synthèse de la pratique de la
coopération décentralisée dans le Mono et le Couffo
Depuis la mise en oeuvre du processus de la
décentralisation, toutes les communes des départements du Mono et
du Couffo se sont engagées dans les actions de coopération
décentralisée. Ainsi, sont-elles en relation avec des villes
étrangères, des Organisations Non Gouvernementales (ONG)
internationales, des
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2008-2011
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
associations de villes aussi bien nationales
qu'internationales, des partenaires techniques et financiers (PTF). Pour ce
faire, elles signent des conventions de partenariat avec leurs associés.
Ces conventions définissent les domaines d'intervention de la
coopération, les objectifs visés, les délais
d'exécution des contrats, les obligations à la charge des parties
etc. (Force)
Il existe des partenariats Sud-Sud et des partenariats
Nord-Sud (force). Sur les douze communes concernées par cette
étude, neuf (09) sont en relation de partenariats actifs avec des villes
étrangères. Des regroupements de communes ont eu à signer
des accords de partenariat de territoire à territoire. Ces partenariats
étrangers de territoire à territoire actifs sont au total 16
(force), toute catégorie confondue. Les partenaires
sont d'origine africaine, européenne ou américaine
(force). La majeure partie d'entre eux est concentrée en Europe
: Hollande, Belgique, France et Allemagne. Les autres partenaires
bilatéraux sont aux États-Unis d'Amérique et en Afrique
(cf. tableau ci-dessous). (Force)
Cependant, il y a des communes qui n'ont pas de partenariat
avec des villes étrangères. C'est le cas de la commune
d'Athiémé : lors de la première mandature des élus
locaux, le maire d'alors a effectué un voyage en Italie dans le cadre de
la coopération décentralisée mais cette recherche de
partenariat n'a pas rencontré l'agrément des correspondants
italiens. Depuis, la commune d'Athiémé se contente de passer
seulement des accords de développement avec les PTF comme la
DANIDA17, PROTOS, la GIZ etc. Il en est de même pour les
communes d'Aplahoué et de Djakotomey. En dehors des relations
collectives qu'entretient la Communauté des Communes du Couffo (CCC)
avec la Communauté d'Agglomération de Saint-Omer (CASO), ces deux
communes n'ont pas de relations bilatérales avec d'autres villes
étrangères. (Faiblesse)
D'après l'étude des Plans de
Développement Communaux (PDC) de la deuxième
génération couvrant la période allant de 2011 à
2015, il y a des communes qui ont des problèmes identiques, des
ressources identiques et des ambitions identiques dans les départements
du Mono et du Couffo. Donc, elles ont en puissance la possibilité de
fusionner leurs efforts pour un développement communautaire. À
titre d'exemple, les communes d'Athiémé, de Lokossa et de
Houéyogbé disposent, chacune, des carrières de graviers,
de sable, des gisements de calcaire, des plantations de bananeraies et de
palmiers à huile. Les communes de Comé, de Grand-Popo et de Bopa
partagent des potentialités en matière de pêche. Les
plantations d'orange, les gisements de carrières de graviers et la
culture des produits de première nécessité sont des
ressources partagées par les communes de Lalo, de
Klouékanmé et de Toviklin. Les carrières de gravier, la
disponibilité des terres cultivables et la présence des cultures
de rente comme les orangers et les palmiers à huile sont des
potentialités partagées par les communes d'Aplahoué, de
Djakotomey et de Dogbo.
Par ailleurs, il est à souligner que les communes
d'Athiémé, de Lokossa et de Houéyogbé, suite aux
affres des eaux de Nangbéto et pendant les saisons pluvieuses, souffrent
des inondations.
17 Danish International Development Agency.
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
En examinant minutieusement les PDC des communes des
Départements du Mono et du Couffo, un constat s'impose. Certaines
ambitions inscrites dans le PDC d'une commune se retrouvent dans les PDC
d'autres communes. Par exemple :
? Le « projet 1 :
opérationnaliser le projet communal de pépinière de
palmier à huile sélectionné pour un coût de 25 000
000 de FCFA», le « projet 2 : acquisition
de matériels et équipements de transformations et de conservation
des produits agricoles » et le « projet 3 :
aménagement et gestion durable des carrières »
inscrits dans les PDC de la commune d'Athiémé se retrouvent
dans ceux des communes de Lokossa et de Houéyogbé.
? De même, le « projet 1 :
doter la commune d'un tracteur niveleuse à 250 000 000 de
FCFA », le « projet 2 : promotion de
l'éco tourisme à 6 000 000 de FCFA» et le «
projet 3 : élaborer le schéma directeur
d'aménagement des communes à 250 000 000 de FCFA» se
retrouvent dans les PDC de Lalo, de Toviklin et de Klouékanmé.
Alors, les potentialités et opportunités autour
desquelles les communes pourraient se réunir pour concevoir et mener
ensemble des actions synergiques pour le développement local existent.
À titre illustratif, les communes de Lokossa, d'Athiémé et
de Houéyogbé pourraient se mettre ensemble pour créer un
établissement public de coopération intercommunal (EPCI) ou usine
d'extraction et de commercialisation de gravier18 . Ce faisant,
elles iront à la recherche de partenaires capables de les appuyer
à acquérir des machines appropriées à
l'exploitation et à la commercialisation de ces graviers19.
Cela participerait davantage à la mobilisation des ressources propres.
Or, ces activités sont menées par des exploitants
privés.
Il existe dans les départements du mono et du Couffo
des regroupements de communes dont la plupart sont régies par la loi du
1er juillet 1901 relative à la libre association des
personnes. Il s'agit en l'occurrence de l'Association des Communes du Mono et
du Couffo (ACMC) regroupant les 12 communes, de l'Association des Communes du
Couffo (ACC20) qui est née du schisme des communes du Couffo
d'avec l'ACMC, la Communauté des Communes du Couffo (CCC)21,
le Conseil Intercommunal d'Eco Développement des Lagunes
Côtières (CIED-Lagunes Côtières)22 et le
Groupement Intercommunal du Mono (GI-Mono)23. (Force)
18 Les carrières de graviers
font partie du patrimoine de l'Etat. Mais l'Etat ne les exploite pas et ce sont
les entreprises privées qui le font et payent des taxes à la
commune et à l'Etat. Les communes, ayant la capacité de
créer des établissements ou des entreprises publics, peuvent,
pour accroître leurs revenus, soit créer individuellement ces
établissements ou entreprises et les doter de moyens, soit les
créer de concert avec leurs homologues dans une perspective
d'intercommunalité et toujours les doter de moyens et en devenir
actionnaires. Ce faisant, elles solliciteront ensemble l'appui des partenaires
au développement ou de leurs homologues du Nord pour l'acquisition de
ces moyens.
19 Les graviers ne sont pas les seules ressources pouvant
les unir. Chaque fois qu'elles ont intérêt à se mettre
ensemble pour la gestion des affaires les reliant et dépassant leurs
forces, elles peuvent se mettre ensemble pour solliciter des partenaires. Les
graviers ne sont utilisés ici qu'à titre illustratif.
20 L'ACC est composée de
toutes les communes du Couffo à l'exception de celle de Dogbo.
21 La CCC regroupe pour le moment trois communes du Couffo
à savoir Aplahoué, Djakotomey et Dogbo.
22 Le CIED est composé des
communes d'Abomey-Calavi, de Comè, de Grand-Popo, de Kpomassè et
de Ouidah.
23 Le GI-Mono est composé de toutes les six communes
du Mono.
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
Née le 30 octobre 2004 à Grand-Popo, le but de
l'ACMC est centré sur la mobilisation des ressources pour le
développement des communes afin d'exécuter les activités
prévues par les PDC. Elle a servi de cadre de concertation entre les
maires. Elle a son siège à Lokossa, certes, mais elle n'est pas
fonctionnelle. En effet, les locaux loués pour abriter son siège
sont sans personnel et donc, toujours fermés. En outre, aucune action
visible n'a été observée depuis sa création, hormis
son association à la signature de la convention de coopération
décentralisée liant le département des Yvelines et le
GI-Mono. (Faiblesses)
L'ACC est née le 19 juin 2009 ; son siège est
à Aplahoué. Elle porte un projet à vocation intercommunale
qui est le grand marché du Couffo. Ses objectifs globaux sont : la
contribution au renforcement de la décentralisation dans le
département du Couffo, la promotion de la solidarité et du
développement dans l'espace socioculturel et économique du
département, la promotion des atouts socioculturels et agropastoraux des
communes membres. Depuis sa création jusqu'à aujourd'hui,
aucune action concrète n'est enregistrée. C'est un regroupement
de communes qui n'est pas non plus en relation de coopération
décentralisée. (Faiblesses)
La CCC, créée sous l'impulsion des
autorités locales de CASO, a son siège à Djakotomey. Son
ambition est l'aménagement urbain du département du Couffo. En
2011, les études de faisabilité du projet ont été
réalisées. (Force)
Les communes membres du CIED, quant à elles, s'engagent
à « construire un destin solidaire, une entité
économique et un creuset de dialogue et d'actions concertées
autour d'un patrimoine naturel, paysager et socioculturel à sauvegarder
et à gérer de façon durable ». Le CIED a son
siège à Grand-Popo et est fonctionnel. Il a eu à
concrétiser des actions telles que : l'installation d'un site
touristique à Avlékété, la construction de 120
latrines familiales dans cinq (05) villages du CIED, la formation en
pisciculture de 60 pêcheurs et maraîchers, l'installation de huit
(08) étangs piscicoles installés dans quatre (04)
villages<Mais, il n'est pas en relation de coopération
décentralisée.
Le GI-Mono est porté sur les fonds baptismaux le 25 mai
2010 à Lokossa. Le départ des communes du Couffo de l'ACMC et la
non fonctionnalité de celle-ci ont amené les communes du Mono
à former une association propre à elles qui regroupe Lokossa,
Bopa, Athiémé, Grand-Popo, Comé et
Houéyogbé. Cette intercommunalité est en relation avec les
départements des Yvelines. (Force)
Il est important de noter que ces regroupements intercommunaux
ne disposent pas d'EPCI et que la plupart ne sont pas en relation de
coopération
décentralisée24(Faiblesses). En effet, le
GI-Mono est uniquement en relation avec le département des Yvelines en
France et la CCC n'entretient des relations de coopération
décentralisée qu'avec la CASO. Ces partenariats sont insuffisants
car
24 Ceci ne signifie pas que
l'intercommunalité doit être forcement prise en compte dans les
actions de coopération décentralisée ni que les communes
doivent forcément être en partenariat ou avec leurs voisines
locales, ou avec les collectivités du nord. Elles ont la liberté
de le faire ou de ne pas le faire. En effet, aux termes de l'article 4 al 1 de
la loi n°2009-17 du 13 août 2009 portant modalités de
l'intercommunalité, l'intercommunalité ou coopération
intercommunale est une « forme de coopération entre communes
limitrophes ou proches, fondée sur leur libre volonté de
coopérer entre elles, notamment d'élaborer des projets de
développement ». Seulement, faut-il le souligner, leur contexte de
développement actuel, c'est-à-dire, le mouvement mondial, les
contraintes socio-économiques et développementalistes l'exige.
C'est pour elles une occasion de répondre à leurs besoins de
développement et d'hisser leur nationalité sur l'échiquier
international.
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
les défis à relever en matière de
développement socio-économique et culturel sont intenses. Or, en
cette ère de mondialisation, les communautés béninoises en
général et celles des départements du Mono et du Couffo en
particulier ont besoin25 d'une coopération
décentralisée pour relever les défis là où
l'État a échoué26.
Les entretiens avec les autorités de la
Préfecture de Lokossa assurant la tutelle des communes des
départements du Mono et du Couffo révèlent qu'il y a des
conventions de coopération décentralisée qui ne sont pas
soumises à l'approbation de l'autorité de tutelle (cf. tableau).
(Faiblesse)
TABLEAU n°1 : État des lieux des
partenariats étrangers (de territoire à territoire) actifs dans
les départements du Mono et du Couffo
DÉPARTE- MENTS
|
COMMUNES
|
En partenariat avec
des villes étrangères ?
|
Nombre de
partenaires ?
|
Partenaires
|
Partenariat approuvé ?
|
MONO
|
Athiémé
|
-
|
Non
|
0
|
-
|
-
|
-
|
Bopa
|
Oui
|
-
|
01
|
Crosne (France)
|
Oui
|
-
|
Comé
|
Oui
|
-
|
02
|
Ville de Guyancourt
(France) et Ouesso (Gabon)
|
Oui
|
-
|
Grand-Popo
|
Oui
|
-
|
02
|
Montjeron (France) et
Saint-Louis (Sénégal)
|
Oui
|
-
|
Houéyogbé
|
Oui
|
-
|
01
|
Echirolles (France)
|
Oui
|
-
|
Lokossa
|
Oui
|
-
|
01
|
Evere (France)
|
Oui
|
-
|
COUFFO
|
Aplahoué
|
-
|
Non
|
0
|
-
|
-
|
-
|
Djakotomey
|
-
|
Non
|
0
|
-
|
-
|
-
|
Dogbo
|
Oui
|
-
|
03
|
Roeselare (Belgique) ;
Kleve (Allemagne) et Riderkirk (Hollande)
|
Oui
|
-
|
Klouékanmey
|
Oui
|
-
|
01
|
Lanta (France)
|
Oui
|
-
|
Lalo
|
Oui
|
-
|
02
|
Canton de Saddle
(USA) et Municipalité de Fair Lawn
(USA)
|
-
|
Non
|
Toviklin
|
Oui
|
-
|
01
|
Illigen (Allemagne)
|
Oui
|
-
|
AUTRES
|
GI-MONO
|
Oui
|
-
|
01
|
Département des
Yvelines
|
Oui
|
-
|
CCC
|
Oui
|
-
|
01
|
CASO
|
Oui
|
-
|
Source : Produit à partir des
données recensées au STCCD (Préfecture de Lokossa),
janvier 2012.
En résumé, l'état des lieux ainsi
réalisé fait ressortir les atouts et les limites suivants :
Atouts
· Le recours des communes à la coopération
décentralisée pour la mobilisation des ressources
financières ;
· Existence d'une diversité de coopération
décentralisée ;
· Effort de regroupement des communes ;
25 Le besoin exprimé à ce niveau
ne signifie pas que la coopération décentralisée est une
panacée. Cependant, c'est une modalité de recherche de ressources
pour la satisfaction des besoins d'intérêt communal ou
intercommunal.
26 Le document de la Politique Nationale de
Coopération Décentralisée explique : « ... l'ancienne
forme de coopération entre gouvernements se révèle, chaque
jour, de plus en plus inadaptée, inefficace et incapable d'emporter
l'adhésion populaire si nécessaire à la promotion d'un
véritable développement auto-entretenu » (Page 8)
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2008-2011
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La coopération décentralisée dans les
communes des départements du Mono et du Couffo : atouts, limites et
perspectives
? Existence de regroupements de communes en relation de
coopération décentralisée ;
? Existence d'espaces contigus de développement.
Limites :
? Difficultés de recherches de partenaires (ou faible
maîtrise des stratégies de recherche de partenaires) ;
? Faible prise en compte de l'intercommunalité dans la
coopération décentralisée (ou regroupements intercommunaux
peu actifs et peu intéressés par la coopération
décentralisée) ;
? Absence de soumission de certaines conventions de
coopération décentralisée à l'approbation de
l'autorité de tutelle.
|