B- Principales limites de l'action des ONG et
nécessité d'un aggiornamento de
leurs stratégies :
La contribution des organisations non gouvernementales
à l'amélioration des conditions de vie des nigérians est
indéniable. Qu'elles s'engagent dans la lutte contre la pollution ou
contre les crimes financiers, elles marquent par leur capacité à
susciter le débat sur la gestion de l'industrie pétrolière
et à mettre les différents acteurs de celle-ci face à
leurs responsabilités. C'est alors à juste titre que les
relations entre les ONG et les autorités politiques nigérianes ne
sont pas toujours au beau fixe. Ces dernières, comme les compagnies
pétrolières d'ailleurs, hésitent à reconnaitre leur
responsabilité dans la situation économique et écologique
désastreuse du pays. Les acteurs de l'industrie pétrolière
au Nigéria refusent de collaborer de manière
régulière avec les organisations non gouvernementales et ne
tiennent compte que très insuffisamment des propositions qui leur sont
faites.
L'insuffisante collaboration entre les organisations non
gouvernementales et les différents acteurs de l'industrie
pétrolière au Nigéria réduit les résultats
de l'action de celles-ci. Leurs initiatives sont alors des plaidoyers d'une
cause qui semble perdue d'avance. Les efforts d'Amnesty International
pour susciter plus de responsabilité de la part des compagnies
pétrolières internationales n'ont, par exemple, pas encore permis
une réduction considérable de la pollution
pétrolière dans le delta du Niger. Les déversements
accidentels de pétrole dans la nature sont toujours d'actualité
et les causes sont généralement à rechercher dans le
manque d'entretien des installations pétrolières. Les droits des
populations des régions pétrolières à ces occasions
sont toujours très peu pris en compte. Celles-ci ne
bénéficient pas des indemnisations dont elles ont droit et sont
toujours expropriées au profit des projets de prospection
pétrolière. L'action des organisations non gouvernementales doit
alors se faire plus incisive. Elles doivent par exemple exercer un lobbying
auprès des institutions financières internationales pour que
leurs financements ne bénéficient dorénavant qu'aux
projets pétroliers « propres ». Le poids qu'ont les
investissements de certaines d'entre elles dans l'industrie
pétrolière déciderait les acteurs de la filière
nigériane à faire des efforts dans le sens d'améliorer
l'impact de leurs activités sur les populations.
Les ONG doivent également exercer des pressions
auprès des bailleurs de fonds pour que soient pris en compte, dans
l'attribution de prêts pétroliers, la volonté des acteurs
de se servir de l'argent reçu pour permettre un réel
développement de la région du delta du Niger et du Nigéria
en général. Les organisations non gouvernementales peuvent
utiliser des mesures plus radicales comme le boycott des stations services ;
l'organisation de campagnes internationales de lutte contre l'incurie ; la
signature de pétitions à l'endroit des autorités
politiques fédérales ou des compagnies pétrolières
; etc. pour inciter les acteurs du secteur pétrolier, les compagnies
553 - Cf. supra
Noah Noah Fabrice, Science po 5, Université de
Yaoundé II-Soa. Page 129
Enjeux énergétiques et insécurité
dans le golfe de Guinée : contribution à l'étude des
menaces liées a la ruée vers le pétrole au
Nigéria.
pétrolières en particulier, à adopter une
stratégie plus « humaine » dans leur gestion du secteur
pétrolier. Il est en outre important que les ONG renforcent leur
partenariat avec des organisations locales pour une action plus efficace.
Les organisations non gouvernementales sont des partenaires
importants du secteur pétrolier nigérian. Si leur action ne
rencontre pas toujours l'assentiment des acteurs de l'industrie, elle n'en
demeure pas moins essentielle à l'amélioration de la gestion du
secteur pétrolier nigérian. Il leur faut toutefois revoir leurs
stratégies afin de leur action ne s'apparente pas au mythe de
Sisyphe.
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