6.2. La déshydratation
Seconde étape du traitement des boues, la
déshydratation intervient après l'épaississement. En
général, une boue est considérée apte à
être déshydratée quand sa concentration est
supérieure à 15 g/l. Le traitement produit alors des boues de
l'ordre de 15 à 30 % de siccité (150 à 300 g/l). La
siccité du produit conditionne la filière
d'élimination/valorisation :
? besoin pour compostage : siccité de l'ordre de 15
à 30 %
? incinération sans OM : siccité de l'ordre de
25 à 35 %
? co-incinération avec OM : siccité de l'ordre
de 15 à 30 %
? mise en décharge : siccité > 30 %
On distingue plusieurs techniques de déshydratation
:
Centrifugation : Depuis
quelques années, des fabricants proposent des modèles
combinés (épaississement/déshydratation) dits "haute
performance". L'emploi d'un polymère est toujours indispensable et la
consommation électrique est importante. Les ratios suivants sont
observés :
? polymère 3 kg/T pour boues I (7 kg/T pour boues bio.
et digérées)
? consommation électrique : 25 kWh/T MS pour boues I
(60 kWh/T MS pour boues bio. et digérées)
Il convient de souligner que la centrifugation est le
procédé le plus compact. Cette technique est recommandée
pour des installations avec des débits de boues épaissies
supérieurs à 20 m3/h. Depuis quelques années, des
fabricants proposent des modèles combinés
(épaississement/déshydratation) dits "haute performance". Pour
ces équipements, la boue à déshydrater est admise avec des
concentrations de l'ordre de 7 à 12 g/l et permet des siccités de
l'ordre de 18 à 27 %. Le centrât est de l'ordre de 1 g/l, le taux
de polymère varie entre 7 et 12 g/kg MS et la consommation
électrique est de 200 kWh/T MS.
Filtration : La filtration
peut être réalisée par différents
procédés (filtre à bandes & filtre à
plateaux). Il convient en outre, pour mémoire, de mentionner le filtre
sous vide, le filtre à disque et la presse à vis,
procédés aujourd'hui peu utilisés.
6.3. Les conditionnements
Conditionnement chimique : Lors
des opérations de déshydratation, il a pu être
observé que des réactifs pouvaient avantageusement être
utilisés. En effet, par la réalisation d'une floculation des
boues, la stabilité colloïdale est cassée et la taille des
particules augmentée. En général, le conditionnement est
de nature chimique (réactifs minéraux ou polymères
organiques - voir annexe 2.2) mais le conditionnement thermique existe
également (voir plus loin).
a- Les sels de fer : Le
conditionnement avec le chlorure ferrique (parfois le chloro-sulfate de fer)
est le plus courant pour les boues organiques car il réalise une double
opération de coagulation (neutralisation des charges) et de floculation
(polymérisation de type minérale). Le mélange est
réalisé dans un bac avec un temps de contact de l'ordre de 10 mn
et une agitation de 200 à 300 W/m3. En complément, l'ajout de
chaux après FeCl3 est souvent nécessaire pour améliorer la
filtrabilité, et dans certains cas, des polymères peuvent
être utilisés. La boue obtenue a un pH supérieur à
10. Cette opération est en général indispensable pour la
déshydratation avec des filtres presses. Le chlorure ferrique se
présente en général sous forme de solution commerciale
à 600 g/l, un poste de dosage est indispensable.
b- La chaux : Il convient de
signaler que la chaux peut être utilisée sur des boues liquides
:
? soit en amont d'un épaississeur de boues
fraîches pour bloquer temporairement les fermentations (ratio de 15
%),
? Soit sur des boues liquides avant épandages pour
réduire le taux de micro- organismes (pH >12 et, après 2 h,
abattement des CF de l'ordre de 104 - 105).
Sur les boues déshydratées, la chaux doit
être malaxée et la chaux vive permet d'éliminer une partie
de l'eau grâce à la réaction exothermique d'hydratation.
Avec des doses de l'ordre de 40 % de MS, le rendement d'abattement des CF de
l'ordre de 106 - 107.
La chaux se présente sous diverses formes, elle est
livrable sous forme de chaux vive (poudre ou granulés) ou de chaux
éteinte ou hydratée (Ca(OH)2), plus facile à manipuler
mais plus chère aussi. En général, la chaux éteinte
est diluée en suspension aqueuse et utilisée sous forme de lait
de chaux à des concentrations comprises entre 50 et 100 g/l (afin
d'éviter la déposition et la carbonatation). Il ne faut pas
confondre le lait avec l'eau de chaux utilisée en eau potable (1.6 g/l).
La préparation et le transfert de la chaux exigent toujours un
matériel spécifique et une grande attention du personnel
(distribution par boucle du lait).
c- Les polymères : Les
polymères permettent d'améliorer le traitement des boues. Ils
sont en général organiques et de type cationique. Ils sont bien
adaptés à la déshydratation sur grille d'égouttage,
filtre bandes, centrifugeuses et, pour certaines applications, pour les filtres
presses. Le rôle des polyélectrolytes est double :
? D'une part ils permettent une floculation plus facile en
raison des longues chaînes ramifiées et une action coagulante est
obtenue pour les composés cationiques.
? D'autre part, la boue floculée présente une
forte diminution à la résistance spécifique et une
augmentation à l'hydrophilie particulaire et du coefficient de
compressibilité.
Le choix du polymère relève essentiellement de
tests. Dans le domaine des boues, le test de drainabilité est le plus
utilisé. De façon générale, les polymères
cationiques sont utilisés pour les boues organiques et fibreuses, les
anioniques pour les boues minérales.
Au niveau de la mise en oeuvre du traitement par
polymères, le produit est le plus souvent livré en poudre mais
des polymères liquides et réticulés peuvent
également être utilisés pour obtenir des rendements
supérieurs de l'ordre de 3 % avec des solutions à 50 %. Il
convient donc de diluer le produit avant incorporation dans les boues et l'on
distingue 4 phases (dispersion, hydratation, dissolution & maturation). Il
existe ainsi des postes pré-assemblés de préparation en
continue et automatique de polymères pour les unités de taille
grandes et moyennes. Les solutions préparées ont une
concentration de l'ordre de 2 à 5 g/l pour les cationiques et de 1
à 2 g/l pour les anioniques (la solution est très visqueuse). Le
temps de préparation dépend du polymère et de la
qualité de l'eau propre utilisée et est en général
proche de 1 h. L'admission de la solution se fait à l'entrée de
la centrifugeuse, au niveau du floculateur du filtre bande et en aval de la
pompe HP du filtre presse.
|
épaississeur
|
Grille
d'égouttage
|
centrifugeuse
|
filtre bande
|
flottateur
|
filtre
presse
|
-Polymère de
synthèse
-Chaux vive
-Chaux éteinte (lait)
-Sels de fer + chaux
|
++
++
++
|
+++
|
+++
++
|
+++
++
|
+++
|
+
+++
|
+ : conditionnement possible
++ : conditionnement occasionnel
+++ : conditionnement normal
Tableau 7 : utilisation des polymères dans
le traitement des boues
Type de boues
|
FeCl3 % au MS
|
CA(OH)2 % au MS
|
ERU primaire
|
2 - 3
|
10 - 15
|
ERU mixte
|
4 - 6
|
18 - 25
|
ERU biologiques aération pro
|
6 - 8
|
25 - 30
|
ERU/ERI (physico)
|
0 - 5
|
15 - 30
|
Tableau 8 : les doses de réactifs pour
déshydratation sur filtre presse
NB : il convient de souligner que le
traitement au chlorure ferrique ou à la chaux a une forte incidence sur
le tonnage de boues à traiter. Ainsi, 60 à 70 % de la masse
de FeCl3 se retrouve dans les boues et respectivement 80
à 90 % pour la chaux !
Le conditionnement thermique : Il est
possible de réaliser un conditionnement thermique des boues autour de
150 à 200 °C pendant 30 à 60 minutes. Selon la nature des
boues ainsi thermiquement traitées, 20 à 40 % de la
matière organique est solubilisée. La qualité du jus de
cuisson est très particulière (DBO de l'ordre de 3 à 6 g/l
et NH4+ de l'ordre de 1 g/l) et doit faire l'objet d'un traitement (recyclage
dans la filière "eau" : + 10 à 25 % de pollution). Ce
procédé de cuisson présente de nombreux avantages en
rapport avec le prix très élevé de l'investissement, en
effet, toutes les boues organiques peuvent être ainsi traitées et
les boues cuites s'épaississent très bien (120 à 200
g/l). Les boues cuites peuvent être déshydratées dans un
filtre presse avec une excellente siccité (taux de MS >50 %) et sans
réactif. L'association d'une digestion avec récupération
du biogaz et un conditionnement thermique est une option qui peut être
intéressante pour les grosses STEP. Mais il faut souligner le coût
très élevé de circuit chaud sous pression de 15 à
25 bars.
|