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Le trafic des enfants au bénin: analyse des conditions socio-juridiques et du cadre administratif

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par El-Oumar ABOUBAKAR
Université de Parakou - Maà®trise es sciences juridiques 2009
  

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B/ Causes socioculturelles

Au-delà de l'insuffisance de ressources économiques, se trouvent non seulement la dégradation de la solidarité traditionnelle (causes sociologiques) mais aussi l'influence d'une culture occidentale qui crée de fait de nouveaux besoins et incite à la cupidité (causes culturelles).

A travers la diversité culturelle qui décrit la société béninoise, l'enfant est perçu comme le «bénéfice» du père ou de la famille élargie et reste l'enjeu fondamental des comportements matrimoniaux. La richesse d'une famille sans enfants et même la monogamie à certains endroits sont considérées comme un signe de pauvreté, l'enfant constituant «l'assurance vieillesse» des parents.

Auparavant, parce qu'une famille était pauvre ou qu'un enfant devenait orphelin, il était courant dans les sociétés africaines, de l'envoyer vivre dans un autre ménage. De même, lorsqu'un enfant était trop indiscipliné, le père le confiait à l'un de ses parents qui se chargeait de son éducation. Le placement s'effectuait donc dans l'intérêt de l'enfant. Mais de nos jours, avec l'effritement de la solidarité organique, la dégradation des valeurs traditionnelles et la désagrégation des structures traditionnelles, le fait d'envoyer un enfant dans un autre foyer ou de l'accueillir n'a plus pour objectif premier de servir l'intérêt de l'enfant.

Malheureusement, depuis quelques années, la pratique de placement des enfants a connu une dérive grave qui a introduit une distorsion dangereuse pour la sécurité et l'avenir même des enfants victimes d'une exploitation sans pareille, à l'occasion du travail en milieu domestique ou dans le petit commerce. Il est plutôt question d'une transaction dans laquelle l'enfant sert de marchandise. L'enfant est donc traité comme un étranger dans la famille d'accueil et soumis à des travaux qui dépassent sa force, ses capacités de réflexion et d'action.

Par ailleurs, l'envie de ressembler et de copier les occidentaux a créé des comportements nouveaux, parfois incompatibles aux réalités locales (causes culturelles). L'esprit des adultes s'est mis au service du mal pour traquer, tromper et exploiter des êtres faibles qui autrefois étaient protégés et adulés. La recherche du gain facile pousse certaines personnes cupides et malhonnêtes (trafiquants et intermédiaires) à tromper les enfants et leurs parents par des manoeuvres frauduleuses. Ils se font domestiques ou dans des carrières de pierres (Abeokuta au Nigéria) ou dans des plantations (Côte d'Ivoire). Les parents, en laissant ainsi partir leurs enfants ont une vision culturelle positive du déplacement16.

En effet, par ignorance du danger que court leur enfant loin d'eux, ils les laissent partir avec des inconnus qui leur font de fausses promesses. Les trafiquants gagnent leur confiance en se faisant passer pour de généreux bienfaiteurs, en leur faisant des dons en nature ou en leur faisant la promesse de scolariser leur enfant, de leur apprendre un métier ou de les initier au commerce. Les parents et leurs enfants sont donc convaincus que le déplacement est une migration temporaire qui va générer une promotion économique et sociale de l'enfant et de la famille. Ils ignorent donc les dangers et la vraie nature du trafic.

Selon les leaders communautaires, il existe dans presque tous les groupes socioculturels du Bénin une tradition de migration. Ainsi, les Goun de Porto-Novo et ses environs, ont l'habitude de migrer vers les grandes villes du Bénin, en Côte d'Ivoire, au Gabon, au Congo. Les Ifè de Bantè allaient au Ghana. Aujourd'hui, ils s'orientent comme les Ani de Bassila et les Taneka de Copargo, tant vers les principales villes du pays que vers le Nigéria et le Togo.

Au sein du groupe socioculturel Wémè, presque chaque famille a déjà envoyé au moins une fois son enfant au Nigéria. Chez les Sahouè de Bopa, les Mina de Grand Popo, les Watchi de Comè et les Fon de Za-Kpota, la migration est beaucoup plus orientée vers Cotonou, la Côte d'Ivoire, le Nigéria. Chez les Batombu au nord du Bénin, le phénomène n'est pas très perceptible. A Banikoara et à Gogounou, par exemple, les populations voyagent beaucoup plus pour des raisons de mariage et de formation (étude et artisanat). Par contre, cette région reçoit les Gourmantché du Burkina-Faso, les kotocoli du Togo, les jeunes de l'Atacora, de Tchaourou qui travaillent dans le secteur agricole et quelques Peulh pour des raisons de pâturage17.

16 UNICEF : Etude Nationale sur la traite des enfants, novembre 2007, p. 33.

17 UNICEF : Etude Nationale sur la traite des enfants, novembre 2007, p. 33.

On peut citer également d'autres causes qui relèvent aussi bien des populations elles-mêmes que du manque de responsabilité des gouvernants. L'éducation inadaptée et peu attrayante offerte aux enfants favorise la déperdition scolaire. De même, le manque d'infrastructures scolaires entraîne le faible taux de scolarisation au Bénin.

Ainsi, les trafiquants profitent de la crise du système éducatif, de la mauvaise qualité de l'enseignement et du manque de matériels éducatifs pour établir un empire de migration bien établi.

Comme ce phénomène a des causes, indéniablement, il a des effets sur toutes les couches de la société. En effet, les conséquences se manifestent au niveau des enfants, des parents et de la nation.

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