Consommation d'électricité et croissance dans l'uemoa : une analyse en termes de causalité( Télécharger le fichier original )par Idrissa Yaya DIANDY Université Cheikh Anta Diop de Dakar - D.E.A Economie, Spécialité Macroéconomie Appliquée, option Economie Internationale 2007 |
INTRODUCTIONL'énergie a joué un rôle majeur dans le développement humain et économique ainsi que dans le bien-être de la société. Par exemple, le bois de chauffage est utilisé depuis des siècles pour faire du feu, tandis que les premières civilisations utilisaient déjà le vent pour naviguer en mer. Les sociétés modernes utilisent de plus en plus d'énergie pour l'industrie, les services, les habitations et le transport. C'est particulièrement vrai pour le pétrole, qui est aujourd'hui le produit le plus commercialisé1(*), mais aussi pour l'électricité qui est indispensable dans les économies contemporaines caractérisées par l'omniprésence des technologies de l'information, de la communication et du digital. L'économie des pays d'Afrique ne cessant de croître, il est légitime de se soucier des défis énergétiques, qui constituent un obstacle à la croissance globale du continent, notamment la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Même si elle est dotée d'importantes sources d'énergies, qui restent très souvent inexploitées, le continent est marqué par la faiblesse de ses services énergétiques. Par ailleurs, bien que la disponibilité de l'énergie électrique ne constitue pas à elle seule la panacée aux problèmes économiques et sociaux se posant en Afrique, on pense néanmoins que l'approvisionnement régulier en électricité soit une condition nécessaire pour le développement économique et social du continent. Les statistiques montrent que la consommation d'électricité est fortement corrélée avec la richesse et un faible accès aux services énergétiques modernes est également corrélé avec le nombre de personnes vivant avec moins de 2 $US par jour (AIE, 2002). Même au niveau individuel, la recherche prouve aussi que le service de l'électricité semble être l'un des services les plus importants pour améliorer le bien-être de l'individu pauvre (AIE, 2002). Dans cette ère du numérique, il est vraiment difficile d'envisager le développement sans des services électriques adéquats. Ainsi, l'électricité et d'autres sources d'énergie moderne sont nécessaires pour le développement économique et social (AIE, 2002). Au moment où la consommation mondiale d'électricité par habitant s'est sensiblement relevée au cours des trois dernières décennies, celle de l'Afrique stagne. La consommation d'électricité par habitant en Afrique subsaharienne (Afrique du sud exclue) a baissé, passant de 132,6 kWh en 1980 à 112,8 kWh en 2000 (Banque mondiale, 2003). En outre, moins de 10% de la population ont accès à l'électricité. La consommation d'électricité est largement confinée aux secteurs intensifs en énergie que sont l'industrie et le commerce, et dans une moindre mesure les ménages ayant un revenu élevé. L'acuité avec laquelle se posent les problèmes d'accès à l'énergie électrique justifie certainement la définition d'une politique et d'une stratégie énergétiques tenant en compte de la forte corrélation qui existerait entre le développement d'un pays et l'énergie qu'il utilise, et en même temps des ressources financières limitées des pays africains2(*). En ce qui concerne les pays de l'UEMOA, le mouvement des réformes du secteur de l'électricité a commencé dans les années 1990 à la suite des programmes d'ajustement structurel imposés par les bailleurs de fonds internationaux (FMI, Banque mondiale). Généralement, les réformes se composent d'une restructuration, d'une privatisation et de l'introduction de nouveaux acteurs dans le secteur de l'électricité. Elles ont pour but d'améliorer les performances de gestion et de lever la contrainte financière qui empêche l'extension de l'électrification dans les agglomérations et surtout dans les zones rurales. La Côte d'Ivoire reste pionnière dans l'adoption des réformes dans la zone. Néanmoins, ces réformes n'ont pu empêcher les pays membres de l'UEMOA d'être confrontés, depuis plusieurs années, à une crise énergétique découlant principalement d'une offre insuffisante en énergie électrique face à une demande en forte croissance. Cette situation a pu être aggravée par la conjoncture défavorable pour les pays importateurs de pétrole, du fait de la hausse continue du prix des hydrocarbures qui a atteint en 2008 des niveaux jamais égalés. Afin d'éviter que des services énergétiques adéquats ne constituent un obstacle à l'atteinte des OMD, il est nécessaire de faire évoluer la politique des pays de l'UEMOA dans le secteur énergétique. L'approche qui a prévalu jusqu'ici visant l'augmentation de l'offre, essentiellement par l'extension du réseau électrique, a démontré ses limites. Le temps est venu de considérer véritablement le rôle joué par les services énergétiques modernes pour stimuler le développement humain (PNUD, 2005), car la croissance économique ne saurait être assurée sans connaître réellement la nature et l'importance de l'apport de l'électricité dans le développement. Par conséquent, la connaissance de la direction de la causalité entre la consommation d'électricité et la croissance économique est d'une importance capitale si des mesures appropriées de politiques énergétiques doivent être conçues. En dépit de la littérature en pleine expansion sur l'étude de la causalité entre la consommation d'électricité et la croissance économique, il y a peu de cas qui se sont intéressés à l'Afrique (Jumbe, 2004), à fortiori aux pays de l'UEMOA. En plus du souci de combler ce gap, nous nous concentrons sur l'électricité en raison du rôle pivot qu'elle a pu jouer dans les pays développés et dans le progrès technologique. Pour les pays de l'UEMOA, existe-t-il une relation entre la croissance de l'activité économique et la consommation d'énergie électrique ? Nous serions tentés de répondre par l'affirmative à cette question, tellement cette dernière a été déterminante dans l'essor des pays industrialisés. L'objectif général de cette recherche est d'analyser les relations complexes qui lient la croissance à la consommation d'électricité. Il s'agira de façon spécifique : · de vérifier l'existence d'une relation de long terme entre la consommation d'énergie électrique et la croissance économique ; · de déterminer la direction de la causalité entre ces deux variables, en vue de faire des suggestions sur la manière dont la question énergétique pourrait être abordée à l'avenir dans l'UEMOA. En outre, nous estimons que la question de la croissance est plus utilement analysée si elle est placée dans un contexte plus large et donc la prise en compte des formes d'énergie, ici la consommation d'électricité, rendrait l'analyse de la croissance encore plus pertinente. Le cas de l'UEMOA, une Union où les questions de convergence et de politique économique commune sont au premier rang des priorités, est d'autant plus intéressant que les conclusions tirées pourraient être utiles à l'analyse de blocs économiques régionaux de plus grande taille comme la CEDEAO. Dans cette optique, la méthodologie utilisée pour traiter notre thème a consisté : · Dans un premier chapitre, à dégager le profil énergétique de la région et à résumer la politique énergétique de l'Union. Une présentation du cadre macroéconomique a été faite au préalable. Cette partie permet d'avoir une vision d'ensemble et comparative de la situation économique de l'Union, ainsi qu'une appréciation de la situation énergétique et par conséquent des défis à surmonter dans le secteur de l'énergie électrique. · Ensuite, dans un deuxième chapitre, à faire une revue de la littérature théorique et empirique concernant la relation de causalité entre la consommation d'électricité et la croissance. · Enfin, un modèle vectoriel à correction d'erreur permettant de tester la causalité entre ces deux variables est exposé dans un troisième et dernier chapitre. Ce présent document est complété par une bibliographie et des annexes constituées essentiellement d'articles et de travaux. * 1 AIE, Manuel sur les statistiques de l'énergie, 2005. * 2 BAD, « Sénégal, Projet Centrale Electrique de St Louis », Rapport d'évaluation de la performance de projet, juillet 1983. |
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