Introduction
Depuis quelques années déjà, le
phénomène du régionalisme gagne en importance et, ce
faisant, il devient une préoccupation majeure pour un nombre croissant
de chercheurs en sciences sociales (M. Boguikouma, 1999). Malheureusement,
comme l'a fait remarquer A. Hurrell (1995, p.332), peu de travaux à
caractère théorique portent sur la résurgence du
régionalisme que l'on observe dans des contextes non-européens
depuis une dizaine d'années. En fait, les principaux textes
portant sur ce phénomène se limitent à tenter de
prévoir les conséquences du phénomène sur le
commerce international et ou encore à en identifier les causes,
généralement sans se rapporter à une école ou
à un cadre théorique défini.
Il ressort de ce qui précède que corollairement
à la plupart des Pays en Développement (PED), le Rwanda n'est
pas en dehors du processus d'intégration régionale et il
appartient d'ores et déjà à plusieurs ensembles
économiques régionaux. Récemment, il a rejoint la
Communauté de l'Afrique de l'Est (CAE) même si la demande
d'adhésion a été présentée depuis 1996. En
plus de la CAE, le Rwanda a adhéré aux différentes
organisations régionales comme la Communauté Economique des Pays
des Grands Lacs (CEPGL), l'Organisation du Bassin pour l'aménagement de
la Kagera (OBK), la Communauté Économique des États de
l'Afrique Centrale, (CEEAC). Beaucoup d'écrits et de discours se sont
attachés à expliquer l'intégration du Rwanda à la
CAE. La plupart des analystes se posait la question de savoir comment un pays
traditionnellement francophone peut s'intégrer dans une
communauté constituée des pays anglophones.
C'est dans ce contexte que nous sommes entrés dans ce
débat en nous posant la question suivante : Quels sont les
facteurs qui expliquent l'intégration du Rwanda à la
CAE ? Cette question principale de notre étude a
été précisée par ces sous-questions de recherche
plus spécifiques: «Quels sont les facteurs
historico-géographiques qui expliquent l'intégration du Rwanda
à la CAE ? Quels sont les facteurs
économico-politiques qui expliquent l'intégration du Rwanda
à la CAE ?» En posant ces questions dans le cadre de ce
mémoire, l'objectif principal poursuivi est d'analyser les facteurs
d'intégration du Rwanda à la CAE. Plus spécifiquement,
notre objectif est d'analyser les facteurs historico-géographiques qui
sont à l'origine de l'intégration du Rwanda à la CAE et
d'analyser les facteurs économico-politiques qui expliquent
l'intégration du Rwanda à la CAE. A la suite des
considérations théoriques, les hypothèses suivantes ont
été formulées.
1. Les facteurs historico-géographiques expliquent
l'intégration du Rwanda à la CAE;
2. Les facteurs économico-politiques expliquent
l'intégration du Rwanda à la CAE.
Pour expliquer nos hypothèses, nous avons
formulé le sujet de recherche comme suit : « Les
facteurs d'intégration du Rwanda à la CAE ». Le
choix de ce sujet n'est pas le fait du hasard. L'Afrique de l'Est, en premier
lieu, a été le théâtre de nombreuses initiatives
régionales, qu'elles aient été lancées par les
anciennes puissances coloniales ou par les Etats nouvellement
indépendants de la région.
Il s'agit en deuxième lieu, d'une région en
pleine mutation. Celle-ci concerne d'une part, les efforts effectués par
le Kenya, l'Ouganda et la Tanzanie depuis 1996 pour la renaissance de la
CAE. Cette mutation fait référence aux importants
bouleversements géopolitiques et économiques qui secouent la
région d'Afrique orientale depuis quelques années. Son ouverture
sur le Rwanda et le Burundi, les pays traditionnellement appartenant à
la CEPGL.
Enfin, le choix de ce sujet peut également se justifier
à travers des différentes caractéristiques
économiques ou géographiques, qui naturellement devraient pousser
les différents états de l'Afrique orientale vers la
régionalisation. A titre d'exemple, l'Ouganda, le Burundi, le Rwanda
mais aussi l'est du Kivu souffrent de leur enclavement tandis que la Tanzanie
et le Kenya se concurrencent sur la maitrise de l'hinterland régional
(notamment grâce aux ports de Dar-es-Salaam et de Mombasa).
Pour rendre compte de notre démarche, nous avons
organisé le travail en cinq chapitres. Au préalable, une
introduction préliminaire présente le sujet de l'étude,
explique son intérêt, et fixe la démarche de la recherche.
Le premier chapitre cherche à dégager la
problématique d'intégration des PED. On traitera
également des défis de cette intégration des PED en
faisant allusion aux ensembles régionaux créés en
Amérique, Asie et en Afrique.
Le deuxième chapitre se propose de dégager le
cadre théorique. On s'attachera particulièrement à
l'inventaire des théories couramment utilisées dans
l'étude de l'intégration, à leur examen critique, à
l'explication de la théorie adoptée, à la formulation des
questions de recherche. Il sera aussi question de formuler les
hypothèses et d'opérationnaliser le cadre théorique
à l'aide des concepts, dimensions et indicateurs.
Le troisième chapitre porte sur la
méthodologie. Dans le cadre de la vérification des conjectures
théoriques, nous répondrons d'abord aux deux questions
fondamentales interroger qui ? et interroger comment? Ces questions nous
ont conduit au choix des interviewés et de la méthode.
Essentiellement inscrite dans une démarche de recherche qualitative,
notre approche privilégiera un recours à l'utilisation des
documents et à l'entrevue semi-dirigée via le
téléphone. L'analyse et l'interprétation des
résultats sera faite à partir de l'analyse de contenu qui met
l'accent sur des mots clés révélateurs,
dégagés à partir des conjectures théoriques.
Le quatrième chapitre étudie les facteurs
historico-géographiques d'intégration du Rwanda à la CAE,
analysés à partir de la langue, l'expérience historique
des royaumes de l'Afrique de l'est, l'Afrique de l'est comme berceau de
l'humanité, le contrôle colonial, l'indépendance,
l'enclavement du Rwanda et l'étroitesse de sa superficie.
Le cinquième chapitre étudie les facteurs
économico-politiques d'intégration du Rwanda à la CAE. Il
s'agit de la situation politique, la recherche du désenclavement du
pays, la vision 2020 du gouvernement Rwandais, la sécurité, la
recherche du marché vaste, la suppression des barrières
tarifaires et non tarifaires.
Chapitre I. La problématique de
l'intégration dans les Pays en Développement (PED)
I.1. Problématique de l'intégration en
Amérique
Plusieurs textes portant sur le régionalisme dans les
Amériques ne sont que des descriptions des principaux groupes
d'intégration ou du rôle que jouent certains acteurs dans la
formulation du régionalisme dans les Amériques. Ces textes sont
quelquefois agrémentés de prédictions ou d'observations
formulées par les auteurs sur les chances de réussite des
différents projets d'intégration (J. Monfils, 1997).
Le phénomène d'intégration en
Amérique commence à s'observer dans les années 50. Selon
T. Dos Santos (2002), au début des années 50, la pensée
économique latino-américaine produisit, surtout au sein de la
Commission Economique pour l'Amérique Latine (CEPAL), une abondante
littérature sur l'importance de l'intégration
économique.
Dans le sillage de la constitution du marché commun
européen en 1957, on voit surgir en Amérique latine l'Association
Latino-Américaine de Libre Echange (ALALE/ALALC) en 1960 (qui fut
remplacée en 1980 par l'Association Latino-Américaine
d'Intégration-ALADI), le Marché commun centraméricain en
1961, le Pacte andin en 1969 et toute une série d'initiatives qui
tôt ou tard allaient essuyer un échec patent ou connaître un
franc affaiblissement. Les causes sont multiples et fortement sujettes à
controverse à la fois théorique et idéologique, mais la
sagesse traditionnelle qui prévaut aujourd'hui semble indiquer un
ensemble de trois causes principales qui sont résumées ci -
dessous.
En premier lieu, l'inadéquation des politiques mises en
place dans le nouveau contexte du capitalisme mondial à partir des
années 70, à savoir la substitution aux importations comme
stratégie d'industrialisation et comme instrument de
développement.
En deuxième lieu, le fossé entre le cadre
juridique établi en vue de l'intégration régionale et
l'absence d'une ferme volonté politique pour sa mise en oeuvre.
En troisième lieu, l'instabilité politique et
les habitudes profondément ancrées de
discrétionnalité administrative dans la gestion des politiques
publiques qui furent portées à leur paroxysme par la
fragilisation ou la banqueroute des finances publiques à la fin des
années 70 et au début des années 80.
Il faut noter aussi la création du MERCOSUR, une
organisation importante créé dans la région. Cette
organisation a abouti à pousser des initiatives régionales qui
eurent un effet positif sur la destinée des Amériques. Le
MERCOSUR est un ensemble d'intégration commercial englobant les pays
comme le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay, la Bolivie, Venezuela, Equateur
et le Paraguay. Cet ensemble eut des difficultés (entreprises dans ces
pays rivalisaient pour contrôler le marché) au moment ou les
leadeurs de ces pays étaient des néolibéraux, comme par
exemple le Président Carlos Menem de l'Argentine et le Brésilien
Fernando Henrique Cardoso.
L'organisation a connu des difficultés comme l'a
souligné le Parlement de la Grande Bretagne dans son 7ème rapport
de la session 2006 - 2007, MERCOSUR « faces significant
challenges as its development has been hindered by national interests, internal
asymmetries, and disputes between members which have been even taken to the
WTO. The Argentina and Brazilian economic crises, subsequent devaluations and
trade disputes have been politically problematic to MERCOSUR»1(*).
De ce qui précède, on peut déduire que
même si le MERCOSUR a connu des difficultés, on remarque qu'il
peut servir d'exemple pour les pays africains dans la mesure où il a
réussi à asseoir à la fois une intégration
économique, commerciale, politique, sociale et culturelle.
I.2. Problématique de l'intégration en Asie
Le conflit Est - Ouest eut régulièrement un
ascendant sur les positions prises par les décideurs politiques
asiatiques. La Guerre Froide constitua une base construisant de la
collaboration dans les pays asiatiques durant tant d'années. Ainsi, les
questions sécuritaires et diplomatiques formèrent pendant cette
période les enjeux majeurs de la coopération au sein des diverses
institutions, et ce, jusqu'à son affaiblissement dans les années
80. La fin de la Guerre Froide causa un coup fatal en Asie; les relations des
pays asiatiques entre eux et celles avec les autres pays du monde changent
énormément.
Après la Deuxième Guerre mondiale, les
États asiatiques furent divisés entre les différentes
idéologies politiques de l'époque. La montée du communisme
en Chine, la Guerre du Vietnam et ultimement l'invasion du Cambodge ne sont que
quelques exemples des tensions au sein des institutions asiatiques. Sans
compter l'omniprésence de l'influence des deux superpuissances dans la
région. Quelques tentatives institutionnelles mirent les bases de la
coopération en Asie du Sud-est après la Guerre mondiale, mais
sans grand succès.
L'ASEAN constitue l'institution d'intégration
régionale la plus importante et ce, encore à ce jour. Elle fut
fondée le 8 août 1967, à Bangkok en Thaïlande par les
pays comme l'Indonésie, la Thaïlande, la Malaisie, Singapour, et
les Philippines. Les premières années de l'institution furent
donc caractérisées par la stagnation et l'apprivoisement mutuel.
Pour M. Heon (2008), pendant cette période,
l'organisation avança à cette époque par essais et
erreurs, elle atteignit néanmoins l'objectif de briser les
barrières psychologiques entre les membres en favorisant la discussion
sur tous les sujets; ce qui représente en soi toute une avancée
considérant les années tumultueuses et conflictuelles que
vécurent ces États.
C'est dans cet ordre d'idée que furent créer
d'autres ensembles régionaux comme la SEANZA (South East Asia, New
Zealand, Australia) créé en 1956 et le SEACEN (South East Asian
Central Banks) qui fut l'Association des Banques centrales d'Asie du Sud-Est.
Néanmoins, les deux institutions disposèrent d'une influence
limitée.
En sus de ce qui précède, la réussite
d'une coopération économique régionale de l'ASEAN
enrichirait les ensembles régionaux existants en Afrique. En effet,
même si l'intégration régionale au sens du
développement des échanges intra-régionaux fut un
échec au contraire, la coopération entre les pays de l'ASEAN aida
au développement des échanges extrarégionaux.
I.3. Problématique de l'intégration en
Afrique
Depuis le début des années 90, une relance du
processus d'intégration régionale se remarque dans les pays
africains; elle intervient après l'éclipse des années 80
qui avait succédé à l'effervescence
intégrationniste de la période des indépendances. Cette
recherche de l'intégration représente la croyance des leadeurs
africains que l'intégration est une condition fondamentale de la
réussite des efforts montrés en matière de
développement.
Selon le rapport de la CNUCED (2009), le continent a
progressé dans la création d'organismes sous-régionaux
d'intégration économique. Toutefois, contrairement aux attentes,
ceux-ci n'ont pas sensiblement accru les échanges commerciaux, les flux
d'investissement et la mobilité des personnes entre pays africains. Ne
pouvant pas identifier les problèmes auxquels font face tous les
ensembles régionaux, nous nous sommes limités aux organisations
comme la CEDEAO, SADC, CEPGL et la CAE.
I.2.3.1. La CEDEAO
La CEDEAO est une organisation d'intégration
régionale créée en 1975, regroupant 15 Etats
Ouest-Africains. La CEDEAO a pour missions de promouvoir la coopération
et le développement dans tous les domaines de l'activité
économique, d'abolir, à cette fin, les restrictions au commerce,
supprimer les obstacles à la libre circulation des personnes, des
services et des biens, l'harmonisation des politiques sectorielles
régionales. L'objectif majeur reste la constitution d'un vaste
marché commun ouest-africain et la création d'une union
monétaire.
La CEDEAO, depuis sa création, a initié de
nombreux programmes de coopération et d'intégration dans les
principaux secteurs économiques, notamment dans les domaines de la
promotion commerciale, la libéralisation des échanges, le
développement des infrastructures routières et de communication,
le développement de l'agriculture, de l'industrie et de
l'énergie. Toutefois, les résultats ne sont pas à la
hauteur des ambitions car, la plupart des décisions prises par les
instances politiques n'ont pas été appliquées. Les
résultats économiques décevants et la lenteur des
progrès en matière d'intégration régionale dans
cette partie de la région s'expliquent par divers facteurs.
Il y a eu une rivalité entre les pays Anglophones et
Francophones de la région. Les chefs d'État de l'organisation
sous régionale n'ont jamais accordé leurs violons aussi bien dans
la gestion de la crise libérienne qui a éclaté à la
frontière ivoiro-libérienne en décembre 1990, que dans
celle qui met à mal la légendaire stabilité ivoirienne.
Sur le dossier libérien, les chefs d'État de la sous
région n'ont pu saisir l'occasion pour parler d'une seule voix. (D.
Alassane Mahamidou, 2007).
En réalité, la CEDEAO n'a pu asseoir une
politique de sécurité régionale qui mette les pays
à l'abri des bandes armées reconverties en politiciens à
certains endroits, où les professionnels ont échoué. A cet
effet, il faut souligner les rivalités entre le Nigeria et la Côte
d'Ivoire. Le premier, anglophone, puissance démographique, pays
exportateur de pétrole, longtemps sous des régimes militaires et
instables, n'a jamais accepté l'hégémonie ivoirienne
fondée sur ses productions agricoles de cacao et de café et
surtout sur sa relative stabilité sous Houphouët-Boigny (D.
Alassane Mahamidou, 2007).
En ce qui concerne l'union douanière, dans l'ensemble,
les échanges intra-régionaux restent faibles. En 1980,
année d'entrée en vigueur de la communauté et 1985, les
échanges ont diminué; depuis 1985, ils ont progressé, mais
leur part dans les exportations totales des pays de l'Afrique de l'Ouest reste
insignifiante; il est vrai que d'importants échanges frontaliers ne
figurent pas dans les statistiques (D. Alassane Mahamidou, 2007).
La multiplicité des organisations intergouvernementales
est aussi un problème majeur en Afrique occidentale. Selon R. Lavergne
(1996), il existe dans cette région une quarantaine d'organisations
intergouvernementales (OIG), dont certaines tirent leur origine de la
période coloniale. La complexité des raisons qui ont
inspiré la création des organisations intergouvernementales dans
la sous-région s'est traduite par une prolifération
d'organisations à composition diverse ou ayant les mêmes membres,
ou certains appartenant à de nombreuses organisations.
Ce nombre grandissant d'organisations va provoquer plus tard
un chevauchement. Ceci parce que ces ensembles n'ont pas été
fondés à une même période et une manque de
mécanismes de conciliation des actions à mener.
Cette région de l'Afrique de l'Ouest a connu une
contrainte liée aux idéologies. Pour R. Lavergne (1996), le jeu
des divergences idéologiques a également influencée le
processus d'intégration régionale. La négociation des
règles d'origine de la CEDEAO et du protocole portant sur les
entreprises communautaires illustre bien ce phénomène. Les
gouvernements et les administrations nationales d'obédience socialiste
poursuivaient vigoureusement des politiques d'indigénisation et une
politique régionale favorisant une plus grande participation
indigène ou étatique. Par contre, les États membres
épousant l'idéologie du laisser - faire se sont opposés
à cette démarche en proposant une approche libérale
concernant la participation de pays tiers aux projets communautaires.
Après ce bref aperçu de la CEDEAO, il est
important d'en retenir un élément qui peut servir de
leçons pour l'Afrique de l'Est en matière d'intégration
régionale. Comme on l'a souligné ci - haut, un des facteurs qui
explique les défis de l'organisation est la rivalité entre les
pays Anglophones et Francophones de la région de l'Afrique de l'Ouest.
Il y a lieu de douter que ce phénomène de rivalité peut
aussi concerner l'Afrique de l'Est dans la mesure où des pays comme le
Rwanda (utilisant le Français et l'Anglais) et le Burundi (Francophone)
viennent d'adhérer à une communauté dont les pays
originairement membres sont purement Anglophones.
I.2.3.2. La SADC
La détermination de s'affranchir du joug
économique de l'Afrique du Sud et de juguler la crise économique
a conduit un certain nombre de pays de la sous - région de l'Afrique
australe à instituer une organisation de coopération
régionale. Ainsi, la conférence de coordination pour le
développement en Afrique australe (SADCC) a été
crée dans ces circonstances en Avril 1980 à Lusaka (Zambie) et
regroupant l'Angola, le Botswana, le Lesotho, le Malawi, le Mozambique, le
Swaziland, la Tanzanie, la Zambie et le Zimbabwe. Son objectif est de
renforcer l'intégration et la coopération sociale, politique et
sécuritaire parmi les 15 pays membres de l'Organisation.
La Namibie a rejoint la communauté en 1990, l'Afrique
du Sud en juillet 1994 lors du sommet de Gaborone et l'Ile Maurice en
août 1995 lors du sommet de Johannesburg (Afrique du Sud). Par la suite,
l'évolution de la donne politique dans la sous - région, ainsi
que la nécessite de s'y adapter conduiront à une transmutation
de la SADCC en SADC (Southern African Development Community) ou
Communauté de développement de l'Afrique australe par le traite
de Windhoek du 19 aout 1992 (J.B.N Wago, 1997).
I.2.3.3. La CEPGL
La CEPGL est une organisation internationale sous -
régionale réunissant trois pays frontaliers à savoir le
Burundi, le Rwanda et la R.D.C. Créée le 20 septembre 1976
à Gisenyi (Rwanda), elle tire ses origines dans les liens politico -
administratifs et économiques qui unissaient les trois pays depuis
l'époque coloniale. Le souci qui a présidé à la
création de la CEPGL fut d'abord le maintien de la
sécurité sur les frontières des États membre pour
l'intérêt des régimes en place. La CEPGL avait pour but
principal l'intégration économique et la coopération
transfrontalière entre ces trois pays mais les différents
conflits dans cette région du monde ont eu raison de lui dans les
années 90.
La CEPGL a pour principaux objectifs d'assurer la
sécurité des États membres et des populations de la
région, notamment par la sécurisation les frontières
communes des États membres, de concevoir et favoriser la création
d'activités d'intérêt commun pour aboutir à la
création d'une zone de prospérité commune, d'assurer et
favoriser les échanges commerciaux et la circulation des personnes et
des biens, de promouvoir une coopération étroite dans divers
domaines notamment le domaine social, scientifique, culturel, politique,
judiciaire, militaire, énergétique, des transports et des
communications (E. Ntumba Bukasa, 2009).
Il faut noter que cette communauté a fonctionné
jusqu'en 1996. La première guerre qu'a connue la R.D.C en octobre 1996,
précédée de la guerre d'octobre 1993 au Burundi et le
génocide contre les tutsis de 1994 au Rwanda ont créé des
moments d'arrêt des activités de la CEPGL. Comme on le verra plus
loin, c'est cette même année 1996 que le Rwanda a fait une demande
pour l'adhésion à la CAE.
Comme d'autres ensembles régionaux, la CEPGL a connu
des problèmes majeurs qui ont empêché ce dernier à
atteindre ses objectifs. Les trois pays qui composent la CEPGL ont
été caractérisés par les guerres et massacres
à grande échelle. Le Rwanda, le Burundi et la République
Démocratique du Congo connaissent des conflits dont les racines se
situent dans un passé lointain et récent idéologiquement
chargé et intellectuellement manipulé, mais dont les cultures des
peuples sont plus similaires que différents (A. Mwaka Bwenge, 2006).
Un autre facteur de l'échec est l'appartenance de ces
pays de la région des grands lacs à plusieurs autres ensembles
régionaux. Ceci a par conséquent rendu inefficace et a produit
des résultats décevants en termes d'intégration. Les
processus d'intégration régionale ont des objectifs, programme et
calendrier différents. En ce qui concerne la CEPGL, cela a conduit aux
chevauchements d'adhésion. Ce chevauchement d'adhésion a
entravé les efforts des ces trois pays.
De ce qui précède, on remarque que ce
phénomène de chevauchement observé chez les pays membres
de la CEPGL va concerner (ou concerne) aussi la CAE. En effet, certains
décideurs et auteurs commencent à envisager même une fusion
du COMESA, de la SADC et de la CAE.
I.2.3.4. La CAE
La description de la CAE s'avère d'une
nécessité absolue dans la mesure où elle constitue notre
sujet d'étude. Le processus d'intégration régionale de la
CAE date de 1933 avec la coordination des activités économiques
et politiques suivant les liens coloniaux (chemin de fer Kenya-Ouganda, le
Conseil monétaire d'Afrique de l'Est, l'Union postale, etc.). Le
processus a évolué au fil du temps et la CAE a été
créée en 1967. Dans la progression de l'histoire de la CAE, cette
dernière a été dissoute en 1977, et reconstituée en
2001 entre le Kenya, la Tanzanie et l'Ouganda. En 2006, elle a admis en son
sein le Burundi et le Rwanda qui en sont officiellement devenus membres le 18
juin 2007.
Il faut noter que même si la Communauté s'est
effondrée en 1977, elle avait accompli beaucoup de réalisations.
« Since the community's reestablishment in 1999, the community
has recorded a number of achievements. The achievements include: success in
establishing the organs of the community as stated in the EAC treaty,
establishment of the EAC custom union, strengthening of an East African
identity, harmonization of monetary and fiscal policies, improvement of
transport and communication systems, the launching of Lake Victoria Commission
and deepening of cooperation in different sectors»2(*) (D. Buberwa Kamala, 2006).
La CAE a pour but principal de piloter le programme
d'intégration économique, social et politique de l'Afrique de
l'Est, de manière à produire de la richesse et à
consolider la compétitivité dans la région en incitant la
production, les échanges et l'investissement. Selon l'article 5 (1) du
Traité établissant la communauté d'Afrique de l'Est, les
objectifs de la Communauté sont de développer des politiques et
des programmes visant à agrandir et à approfondir la
coopération entre les États membres dans les domaines politique,
économique, social, culturel, de la recherche, de la technologie, de la
défense, la sécurité, les affaires juridiques et
judiciaires, pour leur bénéfice mutuel.
Pour les nouveaux membres (Burundi, Rwanda), leur
adhésion à la CAE leur ouvre un potentiel énorme à
l'économie (une tendance à la baisse du prix des produits
de consommation, l'ouverture d'un marché de travail pour la main
d'oeuvre, un gain de transparence quant aux règles administratives et de
douane, appui dans la lutte contre la fraude et la corruption et un gain de
confiance du Secteur Privé et arrivée des capitaux
d'investissement). Un autre avantage est le marché de plus de 120
millions d'habitants, avec d'importantes ressources. Elle vient juste
après le Nigeria, en Afrique.
La Communauté s'est effondrée par suite de
différentes préoccupations concernant la répartition des
fruits de l'intégration. « The East African community
suffered great setbacks due to ideological and political differences. In 1977,
Kenya demanded to have more seats than Uganda and Tanzania in decision - making
organs. Disagreements caused by President Idi Amin of Uganda; socialism in
Tanzania, capitalism in Kenya»3(*) (S. Rwengabo).
Pour D. Percival (1996), « the development of
cooperation between the countries of the old East African Community has been
dogged by political differences. The former leaders of the region - socialist
President Julius Nyerere of Tanzania, Kenya's pro-western President, Jomo
Kenyatta and Ugandan dictator, Idi Amin proved to be uneasy bedfellows. The
final collapse of the East African Community, which survived for a decade up
until 1977, was provoked by disagreements over the benefits gained by each
state from the operation of common regional services such as the airline,
harbours and telecommunications. More recently, political divisions between
Kenya and Uganda have hindered the work of the 1994 East African Permanent
Tripartite Commission, which was set up to ease the way for normalized
relations between the three neighbors»4(*).
Chapitre II. Cadre théorique de
référence
II.1. L'adoption d'une théorie
Avant d'adopter l'approche théorique qui nous
intéresse, il importe d'examiner les fondements théoriques
couramment utilisées dans le domaine d'intégration
régionale afin de voir dans quelle mesure elles sont pertinentes pour
notre cadre d'analyse.
II.1.1. L'inventaire des théories
La construction du cadre théorique de
référence puise ses fondements essentiellement dans l'article
intitulé «Des fondements théoriques et
stratégiques de la construction communautaire » de
Naceur Bourenane, dans l'ouvrage « Intégration et
coopération régionales en Afrique de l'Ouest » sous la
direction de Réal Lavergne. Il discute de la théorie classique de
(volontariste et de l'instrumentaliste), d'une approche différente
axée sur le concept de la construction communautaire
privilégiant les actions de type stratégique telle que
proposée par N. Bourenane(1996).
II.1.1.1. La théorie classique volontariste
Naceur Bourenane (1996) situe les fondements théoriques
des modèles classiques de l'intégration régionale dans
trois écoles ayant dominé la pensée économique des
années 1960 : l'école néoclassique, l'école
marxiste et l'école développementaliste. Selon lui, les premiers
discours scientifiques sur l'intégration régionale se situaient
dans le prolongement de la théorie des avantages comparatifs et du
commerce international. Les recommandations des économistes
libéraux étaient en faveur de la libre circulation des facteurs
de production, ainsi que de la levée des barrières tarifaires et
non tarifaires.
La théorie classique de l'intégration se
développe à partir de la réflexion pionnière de
J.Viner (1950) qui s'intéresse aux effets de l'union douanière
sur l'échange international ; celui-ci montre que la formation d'une
union douanière, qui se traduit par l'institution d'un tarif
extérieur commun, engendre deux effets possibles, l'un de
détournement des échanges, au détriment des pays
non-membres, et l'autre de création des échanges au profit des
pays membres de l'union (B. Békolo-Ebé, 2001). C'est en fonction
de ces deux effets que l'on peut juger de l'incidence et des
conséquences économiques de l'union douanière. Les
développements ultérieurs, que l'on doit notamment à R.G.
Lipsey (1957) et J.E. Meade (1956), analysent l'incidence sur l'utilisation des
ressources du côté des consommateurs et les effets de
bien-être, et s'intéressent, avec C.A. Cooper et B.F. Massell
(1965) aux avantages que 1'union peut présenter en termes de
marché pour chaque économie membre. Ces travaux influencent
fortement le processus dans les PED (H. Myint ,1967 ; G. Meier,
1968 ; R.F. Mikessell (1970) et P. Robson, 1971).
En réduisant les barrières commerciales entre
des pays voisins, la mise en place d'unions douanières et de zones de
libre-échange pouvait être envisagée comme un
mécanisme de rationalisation de l'activité économique de
chaque pays, s'inscrivant ainsi dans le sens d'un renforcement progressif du
commerce international. D'inspiration marxiste-léniniste, une lecture
différente s'y oppose (Inotai, 1982 ; Benallègue, 1987). Selon
cette approche, l'intégration est le résultat d'une
évolution naturelle de l'économie capitaliste dominée par
la loi de l'internationalisation du capital.
Selon ces auteurs (op.cit), ce type
d'intégration serait générateur d'exclusion et de
paupérisation des petites entreprises et de nombreuses catégories
sociales, du fait même du mode de fonctionnement du marché. Ainsi,
dans les PED intéressés à poursuivre activement le
développement sous l'impulsion de l'État, l'intégration ne
devrait pas se faire selon le libre jeu des forces du marché.
L'intégration dans les PED devrait concerner en premier lieu la
production et obéir à une démarche d'utilisation
rationnelle des ressources disponibles, selon une approche planifiée et
centralisée de gestion des besoins et des moyens susceptibles de les
satisfaire, souligne N. Bourenane(1996).
Cette lecture comme le mentionne d'ailleurs N.Bourenane
(op.cit) se fonde sur un certain nombre de postulats qui n'ont pu
être vérifiés empiriquement, notamment l'efficacité
de la planification en comparaison avec le marché. L'analyse
préconisée par deux auteurs français (Marchal, 1965 ;
Perroux, 1966) marque un tournant dans les travaux sur l'intégration.
Ces auteurs proposent les éléments d'une lecture fondée
sur une prise en compte de la dimension historique des phénomènes
économiques et sociaux. Selon Marchal (1965), il y a lieu de distinguer
l'intégration comme résultat du développement, de
l'intégration conçue comme moyen et comme condition du
développement. L'intégration économique peut être
appréhendée comme le produit historique de la transformation des
structures techniques, économiques et sociales.
Elle peut aussi être définie comme une
démarche collective consciente, construite, de sociétés
humaines cherchant l'amélioration de leur bien-être à
savoir : un choix de politique économique (op.cit). Marchal(1965) montre
qu'en tant que produit de l'histoire des sociétés,
l'intégration est d'abord le résultat d'une transformation
sociale. Autrement dit, elle ne peut pas intervenir n'importe où, ni
dans n'importe quelle condition. Perroux (1966) poursuit la même
démarche, qu'il articule autour de trois questions : Qui intègre?
Comment? Et au profit de qui?
Sur le plan opérationnel, ces deux auteurs ne
s'éloignent cependant pas tellement des approches volontaristes de leurs
prédécesseurs ou de certaines approches théoriques du
développement des années 1960 (N. Bourenane, 1996). Pour Marchal
(1965), la mise en oeuvre de l'intégration doit se fonder sur
l'industrialisation comme vecteur intégrateur, et sur des forces
sociales capables de la supporter et de l'animer. Dans la même ligne de
pensée, Perroux (1966) emprunte aux théories du
développement et de l'industrialisation trois catégories
conceptuelles : les pôles de développement, les unités
motrices et l'industrialisation. Il présente l'industrialisation comme
mécanisme de développement, dans un contexte de protection
douanière, au profit de l'ensemble des pays concernés. Sur cette
base, Perroux (op.cit) fait la distinction entre trois
modalités d'intégration : l'industrialisation par le
marché, par les investissements ou par les institutions.
Cette lecture développementaliste et industrialiste de
l'intégration finit par conférer un caractère secondaire
à la dimension sociale dé l'intégration, niant ainsi la
démarche initialement préconisée, en la remplaçant
par une autre, à la fois techniciste et spatialisée (N.
Bourenane, 1996). Perroux (1966) a donc ouvert les perspectives d'une analyse
socio-économique et politique de l'intégration, pour s'en
éloigner ensuite, sous l'effet prégnant des théories du
développement.
II.1.1.2. La théorie classique instrumentaliste
Cette approche instrumentaliste des stratégies
d'intégration régionale se présente sous deux formes : une
approche institutionnelle, axée sur la mise en place des institutions
chargées de la promotion et du suivi du processus, et une approche
axée sur le choix des modalités d'intervention (N. Bourenane,
1996).
En ce qui concerne les institutions à mettre en place,
se retrouvent deux orientations non exclusives. La première donne la
primauté à la mise en place de structures multilatérales,
spécifiques et permanentes, chargées de définir et de
proposer aux États des programmes d'action et d'en suivre l'application
une fois qu'ils sont adoptés (op.cit). Les organisations
communautaires ainsi créées ont en propre leur siège, leur
personnel et leur budget de fonctionnement. Leurs décisions ont un
caractère supranational obligatoire et contraignant pour l'ensemble des
partenaires (N. Bourenane, 1996). La seconde donne la préférence
à l'institution de commissions intergouvernementales
spécialisées, se réunissant périodiquement, pour
préparer et prendre des décisions à mettre en oeuvre par
les pays et en évaluer par la suite l'exécution. Elles sont
constituées de hauts responsables qui représentent les
départements ministériels des États concernés lors
des travaux. Les personnes désignées sont ainsi susceptibles
d'être changées. Seules les structures ont une certaine
pérennité (op.cit).
Si on y regarde de près, on constate que la seconde
orientation a pris le dessus en Afrique comme le dit d'ailleurs (L.L, Ntumba,
1996). Les secrétariats et les autres organes communautaires restent
limités dans leur pouvoir et leur champ d'action, parfois même
dans leur indépendance d'action au niveau opérationnel
(N.Bourenane, 1996). Le vrai pouvoir se situe dans chaque cas auprès des
instances intergouvernementales, à savoir la Conférence des chefs
d'État et de gouvernement, le Conseil des ministres et les commissions
techniques spécialisées composées de commissaires des
États. Cela reflète le primat de la coopération sur la
construction communautaire et traduit le fait que les organisations
intergouvernementales n'expriment pas une volonté de
dépassement, mais au contraire de réaffirmation, des
souverainetés nationales (op.cit).
II.1.1.3. L'approche de la construction communautaire
privilégiant les actions de type stratégique
Cette approche telle que proposée par N.
Bourenane(1996) ouvre la démarche de la construction communautaire
à ce qui est stratégiquement utile et réalisable sur les
plans sociaux et techniques. La question des instruments de mise en oeuvre des
stratégies d'intégration fondée sur une telle
problématique devient ainsi seconde. En effet, le type d'institutions
à mettre en place, les mesures concrètes à promouvoir et
les échéances à fixer dépendront directement de la
nature et des éléments de la stratégie de construction
communautaire choisie, du contexte, de la nature des acteurs en présence
et des enjeux qui les réunissent. Pour une compréhension
mutuelle, il est important de définir les éléments
clés dans les termes de l'auteur.
II.1.1.3.1. Une convergence des stratégies
nationales
N.Bourenane (1996) préconise une démarche
pragmatique, fondée sur l'adoption d'une stratégie
réaliste et dynamique de l'intégration. Parmi les
éléments d'une telle approche, la première a trait
à la conception-même de la construction communautaire, qui doit
refléter des accords s'exprimant au triple plan sous-national, national
et international entre les partenaires directement concernés. Autrement
dit, la stratégie de construction régionale doit exprimer une
convergence de stratégies nationales particulières,
définies de façon démocratique.
II.1.1.3.2. Une démarche progressive et
flexible
Le deuxième élément requis d'une approche
plus pragmatique et réaliste se réfère à la
constitution des entités régionales. Contrairement à la
vision qui semble prévaloir sur le continent et qui tend à faire
de l'intégration régionale une démarche fondée sur
l'exclusion de l'appartenance d'un pays à plus d'une organisation
communautaire, le choix des groupements régionaux devra être
davantage le fait des opérateurs économiques, ce qui suppose une
démarche très souple, variable selon les objectifs des
différents intervenants (N. Bourenane). La définition des
programmes d'intégration et des objectifs temporels devra tenir compte
également de la nature des structures socio-ethniques des pays
considérés, de l'histoire récente des relations entre
leurs composantes humaines respectives et du contexte
géostratégique dans lequel ils évoluent.
II.1.1.3.3. Le rôle de l'État et les
Organisations intergouvernementales
L'intégration est ici repensée en tenant compte
des différents acteurs concernés et de leurs rôles
respectifs (N. Bourenane, 1996). Dans le nouveau contexte résultant de
la mise en oeuvre de programmes économiques articulés autour d'un
désengagement de l'État des espaces de production et
d'échange, l'État ne pourra plus systématiquement imposer
les cadres d'organisation et d'intervention aux acteurs économiques,
privés ou publics (op.cit). Au contraire, l'état devra
informer, suggérer et accompagner les actions, laissant ainsi place
à la dynamique sociale des échanges et de luttes qui
réunit les acteurs sociaux concernés.
Aussi, le devenir des institutions et des organisations
intergouvernementales a été repensé dans cette optique.
Les OIG doivent être réorganisées pour servir de
structures de propositions et d'appui aux opérateurs, au lieu de
continuer à fonctionner comme des prolongements et des excroissances des
États, sans prérogatives réelles (N. Bourenane, 1996).
Cette orientation aura le double intérêt, de libérer ces
entités de l'emprise stérilisante des pouvoirs en place et
d'ouvrir des perspectives à leur autofinancement partiel, par les
partenaires intéressés aux processus de construction
communautaire qui se mettent en place (op.cit).
II.1.2. L'examen critique des théories
Avant de choisir l'une ou l'autre de ces théories
ci-haut décrites, il faut d'abord procéder à un examen
critique de ces approches théoriques. Cet examen critique nous a
révélé ce qui suit :
Premièrement, la théorie classique volontariste
telle que discutée en haut nous semble à moitié douteuse
dans la mesure où cette approche n'est que partiellement
dépassée. Cette approche comporte des limites analytiques de
poids, surtout pour des pays de l'Afrique de l'Est dont l'intérêt
principal serait le développement et l'industrialisation. Il convient
par ailleurs l'union douanière prônée par cette
théorie est valable dans la CAE.
Deuxièmement, la théorie classique
instrumentaliste s'avère aussi inacceptable par le simple fait qu'elle
insiste sur un étatisme excessif dans le choix et la mise en oeuvre des
projets, un volontarisme démesuré en regard des contraintes du
terrain et une attitude mimétique à l'égard de ce qui a pu
être amorcé ailleurs. Cette attitude n'est pas compatible à
la CAE qui elle, se fonde sur des bases intrinsèques notamment les
valeurs socioculturelles des peuples de l'Afrique orientale.
II.1.3. L'adoption d'une théorie et son lien avec
le sujet de recherche
Pour ce faire, les résultats de notre examen critique
des théories portant sur l'intégration, nous incitent à
adopter l'approche de Naceur Bourenane (1996), construite sous forme
communautaire sur la base des actions stratégiques.
Selon cette approche, l'intégration est conçue
comme un processus de coopération progressif, gagnant chaque fois en
intensité, visant davantage le renforcement des économies
nationales en formation que leur dissolution dans un ensemble commun. La
politique d'intégration et les mesures qui en découlent ne
sauraient ainsi être une panacée dans la poursuite d'un programme
de relance ou de développement (N. Bourenane, 1996). Elles ne peuvent
être qu'un complément et non un substitut aux programmes
nationaux, et il est donc nécessaire pour tous les partenaires d'avoir
une vision claire des stratégies de développement national
(op.cit).
L'objectif visé serait de renforcer, par une
démarche communautaire, les secteurs ou les segments d'activité
économique d'avenir, en recherchant chez les autres partenaires, le
maximum de synergies. Une telle démarche devra dépasser le cadre
étriqué des arrière-pensées politiciennes et les
préoccupations égoïstes, souvent non
déclarées, à la base des actions d'intégration,
pour s'inscrire dans une dynamique d'apprentissage de la solidarité
réciproque et de la confiance, à l'échelle des
États et des opérateurs économiques (N. Bourenane,
1996).
Le mérite de cette approche c'est que l'État
n'est pas du tout négligé. Par contre, les structures publiques
sont des instruments de promotion. Le volontarisme dans les décisions
globales (choix d'objectifs et d'horizons temporels intéressant
l'ensemble) pourra ainsi se traduire sur le terrain par l'appui apporté
à des groupes déterminés d'acteurs,
considérés comme vecteurs et agents du changement(N. Bourenane,
1996). La détermination de leurs stratégies respectives, de leur
base économique, politique, sociale et géographique, et de leurs
projets futurs constitue un élément important dans le processus
de construction communautaire, ce qui est le fondement de la Communauté
de l'Afrique de l'Est.
En sus de tout ce qui précède, voici en
résumé le lien que nous avons établi entre l'approche
adoptée et le sujet de notre travail. Etant donné que l'approche
adoptée met l'accent sur la définition des programmes
d'intégration et les objectifs temporels en tenant compte de la nature
des structures socio-ethniques des pays considérés, de l'histoire
récente des relations entre leurs composantes humaines respectives et du
contexte géostratégique dans lequel ils évoluent, elle est
parfaitement compatible avec la CAE. L'intégration de la plupart des PED
dans des communautés régionales semble donc être
motivée par l'histoire partagée entre les pays formant la
communauté, sa position enclavée dans cette région, ainsi
que des raisons économico-politiques sous-jacentes. Nous allons donc
appliquer ces raisons d'intégration de la plupart des PED dans le cas
concret à savoir l'intégration du Rwanda à la CAE.
II.2. Problématique, question de recherche et
hypothèses de recherche
L'intégration est un processus qui a toujours
existé. Les peuples se sont rapprochés sous différentes
formes qui sont allées des formes brutales de guerre aux formes douces
d'échanges commerciaux et de mariages. Cependant, l'intégration
régionale, sous sa forme actuelle, est une révolution post
industrielle et un phénomène typique du 20ème
siècle, caractérisé par la libre circulation (des
marchandises, des services, des capitaux, des personnes, des idées, des
politiques, des valeurs et de la culture) à travers des
frontières communes, réalisée à travers la
suppression progressive des frontières identifiables des Etats
nations.
L'intégration régionale moderne est un processus
de restructuration fondamentale des frontières existantes des Etats
nations dans un super Etat, généralement un Super Etat
Economique. Au 20ème siècle, l'intégration
régionale était, dans son essence, un constat que
l' « Etat-Nation » tel qu'il a évolué
à travers les siècles depuis les grandes civilisations de
l'histoire ancienne et atteint l'âge mûr au 18 ème
siècle, était inadéquat sous la nouvelle ère de
l'information et de la communication à savoir que « l'Etat est
devenu trop petit pour les grandes choses et trop grand pour les petites
choses ». Il existe une dynamique visible et globale vers la
décentralisation. Il est aussi devenu une réalité qu'il
est peu probable que l'intégration régionale soit
gérée avec succès et de manière durable sans
gouvernements locaux efficaces. Cette compréhension relativise ce que
certains prennent plaisir à dire comme quoi « L'Etat Nation
est mort, longue vie au Super Etat ».
L'intégration régionale a peu progressé
ces dernières décennies en Afrique. Le pourcentage de commerce
intra régional est de 9% en Afrique occidentale et seulement de 4% en
Afrique centrale (Foroutan, 1998). Avec la résurgence des conflits
armés et des guerres civiles en Afrique de l'Ouest et du Centre,
l'intégration régionale a même reculé. La guerre en
Côte d'Ivoire a engendré une grande perturbation du commerce
intrarégional ainsi que des échanges avec les pays tiers. De
même, le conflit au Congo-Brazzaville et la paralysie du chemin de fer
pendant de longues périodes a déstabilisé les
échanges avec les pays voisins.
Depuis le début des années 90, une reprise du
processus d'intégration régionale s'observe en Afrique ; elle
intervient après l'éclipse des années 80 qui avait
succédé à l'effervescence intégrationniste ayant
caractérisé la décennie des indépendances. Cette
recherche de l'intégration, grâce à laquelle le
thème et la démarche sont à nouveau à l'ordre du
jour, reflète la conviction chez les décideurs des
économies africaines que l'intégration est une condition
essentielle du succès des efforts déployés en
matière de développement. Cette conviction s'est d'autant plus
consolidée que l'évolution de l'économie mondiale se
traduit par l'émergence de pôles économiques,
eux-mêmes résultats de regroupements et d'émergence de
pôles tels que la mondialisation est multipolaire
(B.Békolo-Ebé, 1993, 1994).
Sur le plan politique, les tentatives de la CEDEAO et de la
CEMAC d'apporter des solutions africaines aux différentes crises des
pays membres ont connu des échecs. Tous ces faits montrent que le
processus d'intégration régionale a été
caractérisé depuis longtemps par une crise structurelle et que la
nouvelle approche de l'intégration mise en place dans le cadre de la
zone franc au milieu des années 1990 n'a pas apporté les
remèdes appropriés. Il convient par ailleurs de mentionner que
les raisons qui motivent les pays à s'intégrer restent
partagées. Les structures socio-ethniques, l'histoire commune, le
contexte géostratégique dans lequel ces pays évoluent sont
autant de facteurs explicatifs de cette intégration comme le montre N.
Bourenane(1995).
Comme les autres pays du monde entier en général
et de l'Afrique en particulier, le Rwanda n'a pas échappé
à l'intégration dans la région et d'appartenir à
plusieurs ensembles économiques régionaux. C'est récemment
qu'il a rejoint la Communauté de l'Afrique de l'Est même si la
demande d'adhésion a été présentée depuis
1996. En effet, si on localise le Rwanda dans son contexte géographique,
il est situé au Centre Est de l'Afrique entre 1 et 3° L.S et entre 28
et 30° L.E. Il se trouve à 1,200 km de l'Océan Indien et à
2,200 km de l'Océan Atlantique, il partage ses frontières au Sud
avec le Burundi, à l'Est avec la Tanzanie, au Nord avec l'Uganda et
à l'Ouest avec la République Démocratique du Congo. Ce
contexte géographique d'enclavement du Rwanda fait que les produits
importés soient relativement chers et les produits d'exportation moins
compétitifs sur le marché mondial (J.D. Muhigira, 1991).
Au cours de l'histoire récente du Rwanda, ce dernier a
adhéré aux différentes organisations régionales
comme la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL),
l'Organisation du Bassin pour l'aménagement de la Kagera (OBK), la
Communauté Économique des États de l'Afrique Centrale,
(CEEAC). Suite aux crises qu'ont connues le Burundi (1993), le Rwanda (1994) et
la République Démocratique du Congo (1996), la CEPGL est devenue
inopérante. Les États membres de cette Organisation traversent
depuis plus d'une décennie, la plus grave crise politique de leur
existence, marquée entre autres par des conflits ethniques d'une ampleur
sans précèdent, une insécurité
généralisée et un blocage de longue durée des
institutions républicaines et des administrations (C.I. R. G. L, 2006).
L'autre organisation régionale à laquelle le Rwanda
avait adhéré est l'Organisation pour l'Aménagement du
Bassin de l'Akagera (OBK). Après le Génocide de 1994, cette
organisation n'a pas été aussi fonctionnelle, il semble qu'elle a
été abolie.
Quant à la CEEAC, le Rwanda s'est retiré de
cette organisation le 5 juin 2007. A cet effet, l'ancien
Ministre Rwandais des Affaires Étrangères Charles Murigande a
justifié ce retrait par le fait que le Rwanda « est
confronté aux problèmes liés aux multiples appartenances
aux Communautés Économiques Régionales ayant pour
corollaire la perte et la déperdition des maigres ressources
(Rapport de la Deuxième conférence des Ministres
Africains de l'Intégration, 2007). Cependant, en y regardant de
près, l'on remarque que le retrait est motivé par des raisons
géostratégiques et politiques. Sans entrer en détails, une
chose est certaine c'est que le retrait du Rwanda à la CEEAC, correspond
à son entrée à la CAE. Bien que les facteurs
d'intégration du Rwanda à la CAE soient nombreux, le
gouvernement Rwandais précise que « plus de 70% du commerce du
Rwanda se passe dans le rayon commercial de la CAE et que la
quasi-totalité des institutions rwandaises sont liées à
celle des pays de la CAE par des accords de coopération » (La
Nouvelle Relève, 2007).
Pour approfondir davantage cette question ayant trait aux
raisons ayant motivé l'intégration du Rwanda à la CAE,
nous nous sommes posé la question suivante : «Quels sont les
facteurs qui ont poussé le Rwanda à s'intégrer dans la
Communauté de l'Afrique de l'Est »?
Les réponses provisoires à cette question se
résument autour de deux hypothèses ci - après :
1. Les facteurs géographiques et historiques justifient
d'un côté l'intégration du Rwanda à la
Communauté de l'Afrique de l'Est;
2. Les facteurs économiques et politiques justifient
de l'autre côté l'intégration du Rwanda à la
Communauté de l'Afrique de l'Est.
II.3. Opérationnalisation du cadre
théorique
Afin d'opérationnaliser notre cadre théorique,
il nous revient donc à définir le concept clé de la
recherche, et en faire un concept opératoire, c'est-à-dire un
concept dont on détermine les dimensions et les indicateurs. C'est ce
que nous allons faire dans les lignes qui suivent.
II.3.1. La construction du concept
La construction du concept se fait d'abord par son
identification à partir des hypothèses. Ainsi, nous avons retenu
le concept « intégration » que nous avons
essayé d'expliquer.
II.3.1.1. Intégration
La notion d'intégration sera réservée ici
au processus résultant d'une démarche volontaire de deux ou de
plusieurs ensembles de partenaires, appartenant à des États
différents, en vue d'une mise en commun d'une partie de leurs
ressources. Ce processus a pour finalité l'émergence et le
renforcement de relations techniques et économiques
d'interdépendance structurelle, à effets d'entraînement
positif sur les revenus. Si on admet une telle définition, on se rend
compte que les entités géographiques produites par la
colonisation de l'Afrique (l'Afrique occidentale française,
l'Afrique-équatoriale française, l'Union douanière
d'Afrique australe (SACU), etc.) ne sont pas le résultat ou la
matérialisation d'un processus d'intégration (N. Bourenane,
1996).
Quant à Jean-Marc Siroën (2004, p. 3), lui voit
dans l'intégration régionale un moyen pour des pays
géographiquement proches entre lesquels les relations économiques
tendent à s'affranchir des frontières politiques pour favoriser
la formation des marchés intégrés. Pour Bourenane (1996,
p. 65), l'intégration est un « processus résultant
d'une démarche volontaire de deux ou de plusieurs ensembles de
partenaires, appartenant à des États différents, en vue
d'une mise en commun d'une partie de leurs ressources. Selon cet
auteur, ce processus a pour finalité l'émergence et le
renforcement de relations techniques et économiques
d'interdépendance structurelle, à effets d'entraînement
positifs sur les revenus.
La notion d'intégration devrait davantage être
couplée avec celle de construction communautaire. Cette dernière
rend compte de la nature collective d'un processus de construction d'un espace
collectif, entrepris de façon consciente, négociée et
irréversible, par des partenaires ayant choisi de partager un même
destin, dans un cadre politico-institutionnel préalablement
établi et choisi par eux, sur une base négociée, en se
fondant sur une vision stratégique de leur avenir en commun.
Dans le même ordre d'idée, il y a lieu de
distinguer entre l'intégration régionale et l'intégration
économique. Cette dernière recouvre l'intégration
d'activités économiques, de secteurs ou de segments de
filières, dans une perspective de rationalisation de la gestion des
ressources et de maximisation des profits et des revenus. De ce point de vue,
la dimension géographique, notamment la proximité spatiale, n'est
pas toujours déterminante, contrairement à la notion
d'intégration régionale qui est d'abord fondée sur la
définition de l'espace géographique et physique. Plus qu'un
simple support aux activités à intégrer, l'existence de
cet espace devient un préalable, un facteur déterminant, dans
l'émergence et la concrétisation du sentiment d'appartenance
culturelle et politique à un ensemble déterminé, d'une
vision partagée de l'avenir.
Dans les écrits sur le sujet, on tend souvent à
confondre ces deux conceptions. Pourtant, elles ne se recoupent que
partiellement. Bien plus, l'intégration économique ne peut
s'opposer à l'intégration régionale, lorsqu'elle favorise
l'intégration de régions lointaines, aux dépens des
espaces les plus proches. Ainsi l'intégration régionale se
distingue des notions apparentées en ce qu'elle est volontaire
(contrairement à l'union, qui peut ne pas l'être), construite sur
une base collective, recouvrant la mise en oeuvre d'un processus de
construction communautaire (et dépassant le simple processus de
coopération), et régionale, c'est-à-dire fondée sur
un espace de proximité géographique (ce qui la distingue de
l'intégration économique sui generis).
D'autres auteurs ont analysé le nouveau
régionalisme, et plus particulièrement l'intégration
régionale économique, à l'aide d'approches purement
économiques ou transactionnalistes. Les auteurs associés à
ces écoles tendent à définir le régionalisme en se
basant sur ses manifestations observables plutôt qu'à tenter
d'expliquer le phénomène (J.J. Schott, 1991). Certains ont
adopté une définition formelle du régionalisme. Ainsi, ils
emploient cette expression uniquement pour désigner une situation
où des États traitent les produits importés
différemment selon leur provenance (création d'accords de
libre-échange, d'unions douanières, de marchés communs ou
conclusions d'accords préférentiels (J.J. Schott, 1991).
Par ailleurs, d'autres auteurs donnent un sens plus large au
concept de régionalisme. Ils font allusion à un
phénomène plus diffus qui existe lorsque l'on peut constater que
l'activité transnationale est plus soutenue entre les pays d'une
même région qu'entre ces mêmes pays et le reste du monde. Un
peu comme le faisaient les pluralistes il y a quelques années pour
étudier l'intégration régionale (K. Deutsch, 1957&
D.Puchala, 1970). Ces auteurs s'appuient sur l'observation des transactions
transnationales pour prouver l'existence de «régions» et pour
identifier les pays qui en font partie. Dans la majorité des travaux de
ce type, les indicateurs mesurent les flux commerciaux. On s'attarde aussi,
dans certains cas aux mouvements de capitaux et de main d'oeuvre (A.
Bollard et D. Mayes, 1992 et R.C. Hine, 1992 et A. Sapir, 1992 & C.A. Primo
Braga, R. Sadafi et A. Yeats, 1994).
II.1.6.2. Les dimensions
Afin d'opérationnaliser notre cadre théorique,
il est important de préciser les dimensions de l'intégration. Il
s'agit de préciser les facteurs de l'intégration
régionale notamment en Afrique. Après avoir analysé la
littérature, nous avons retenu deux dimensions :
l'intégration d'inspiration historico-géographique et
l'intégration d'ordre politico-économique.
La première dimension s'adresse à la
vérification des composantes ci-après : l'histoire et la
géographie. Cette étude vise donc à dégager les
aspects historico-géographiques qui ont favorisé
l'intégration du Rwanda à la CAE.
La deuxième dimension traite des composantes politiques
et économiques. Cette dimension met en évidence l'importance de
la recherche de marché et de sécurité dans
l'intégration du Rwanda à la Communauté de l'Afrique de
l'Est.
II.1.6.3. Les indicateurs
Le cadre théorique devient opérationnel avec les
indicateurs aux dimensions d'inspiration d'intégration. Ce faisant, en
commençant par la première dimension en l'occurrence
l'intégration d'inspiration historico-géographique. Après
avoir analysé notre cadre théorique, nous avons
décidé de retenir quatre indicateurs.
1. Les aspects linguistiques: ceux-ci
renvoient aux caractéristiques linguistiques telles que la langue
commune. Par exemple, si les pays ont une langue commune, il y aura une forte
chance que l'intégration se réalise ;
2. Un destin commun: On peut présumer
que, plus les pays partagent un destin commun, plus il y a une interaction
entre leurs peuples, ce qui suggère une
intégration ;
3. La proximité géographique entre les
pays: Est-ce les pays sont proches les uns autres? Si c'est le cas,
l'intégration a de fortes chances d'avoir lieu ;
4. L'espace physique favorable : On
évoque ici le milieu favorable tel que le sol riche, un bon climat, la
présence des ressources naturelles, etc. Si c'est le cas, le pays a
tendance à s'intégrer.
En ce qui concerne la deuxième dimension traitant de
l'intégration d'ordre politico-économique, l'analyse du cadre
théorique nous a permis de trouver les indicateurs
ci-après :
1. L'enclavement d'un pays : Plus le
pays est enclavé, plus ce pays cherche à s'intégrer vers
des pays désenclavés ;
2. La politique en place: Si le pays a mis en
place une politique favorable à l'intégration, il y aura de
fortes chances que l'intégration se réalise;
3. L'insécurité : Il est
admis que l'intégration régionale conduit à étendre
les actions à des domaines aussi divers que la défense et la
sécurité. La plupart des pays se mettent ensemble pour assurer la
sécurité ;
4. Le marché : Plus le
marché des pays est étroit, plus ces pays ont tendance à
se regrouper, ce qui leur permet d'être non seulement
complémentaires mais aussi compétitifs dans cette ère de
mondialisation.
Avec ces indicateurs qui nous permettent d'analyser le concept
(l'intégration) dans la réalité, nous disposons
maintenant d'un cadre théorique opérationnel. Ce faisant, nous
sommes désormais en mesure de procéder à des tests
empiriques afin de corroborer ou de réfuter nos hypothèses de
recherche. Nous procédons donc à l'étape suivante de
notre démarche scientifique à savoir les tests empiriques
dans la méthodologie de recherche.
Chapitre III. Méthodologie de recherche
III.1. La préparation du test empirique
Les recherches sur les facteurs d'intégration du Rwanda
à la CAE sont insuffisantes voire même inexistantes. Les
données de cette étude tiennent compte des résultats de
quelques recherches réalisées par des chercheurs
étrangers, complétées par des données issues d'un
questionnaire adressé aux personnes ressources mais qui ont
refusé d'être citées nominativement. Pour ce faire, nous
avons répondu à deux questions : interroger qui ? Et
interroger comment ?
Etant donné que nous ne pouvons pas interviewer toutes
les personnes ayant une connaissance sur la CAE, nous avons choisi un
échantillon des interviewés. Il n'existe pas de formule magique
ou mathématique permettant de déterminer la taille idéale
d'un échantillon exemplaire (F. Depelteau, 2000). Certains chercheurs
mentionnent que 30 cas constituent un seuil acceptable (op.cit). Mais la
plupart des spécialistes soulignent, à juste titre, qu'il ne
sert à rien de continuer à observer des gens ou des
phénomènes lorsqu'on a atteint le point de saturation (J.P.
Deslauriers, 1991 in F. Depelteau, 2000). Cela signifie que l'observation
des cas supplémentaires n'apporte plus rien de nouveau et qu'elle
n'apprend rien de nouveau au chercheur qui semble avoir tout vu et tout
entendu.
Ainsi, comme l'explique J.P. Deslauriers(1991) cité par
F. Depelteau, 2000), « il y a des signes qui annoncent la fin
prochaine de la recherche. Le chercheur se rend compte qu'il a réponse
aux questions posées initialement et aux autres soulevées par le
terrain, lorsqu'il connaît à l'avance les réponses de ses
interlocuteurs. Lorsque les périodes d'observations deviennent de moins
en moins fructueuses, les données répétitives, et que la
cueillette de renseignements apporte un rendement décroissant, il vaut
mieux s'arrêter, car la prolongation de la recherche ne produira plus
aucune donnée nouvelle ». En somme, en l'absence de
critères précis, on se contente de celui de la saturation.
« Tout dépend du chercheur, du sujet, des
circonstances. Certains projets de recherche peuvent se réaliser en
quelques semaines alors que d'autres demandent plusieurs années.
Plusieurs recherches sont réalisées avec un nombre relativement
restreint d'entrevues. Certains auteurs prétendent que les recherches
recourant à l'entrevue intensive recueillent habituellement entre 10
et 30 entrevues, centrées autour d'une dizaine de points et de
sous-questions. Il faut se rappeler que le chiffre 30 constitue le point
à partir duquel il devient possible de procéder à des
opérations statistiques » (F. Depelteau, 2000).
En sus de tout ce qui précède, « la
recherche qualitative ne donne pas une importance première aux nombres,
mais elle ne les écarte pas pour autant. Le concept même de
saturation des catégories implique un élément de
répétition, de comparaison réitérée de
plusieurs cas. Cependant, la recherche qualitative ne donne pas la
première place aux nombres : lorsque les répétions
sont suffisantes, on cesse de les accumuler, car on présume que
même en continuant l'énumération, les nouveaux cas ne nous
apprendraient rien qui ne soit déjà connu (J.P. Deslauriers,
1991) cité par F. Depelteau, 2000 ».
A cet effet, nous avons choisi la technique
d'échantillonnage non probabiliste, celle de l'échantillon
typique (exemplaire). A la question « interroger
qui ? », nous avons interviewé trois personnes selon
leurs connaissances du sujet. Deux de ces personnes travaillent au
Ministère en charge de l'intégration à la CAE et une autre
travaille à Arusha (Tanzanie) au Secrétariat de la CAE. Ces
personnes interviewées sont toutes de nationalité rwandaise.
Etant donné notre statut de diplomate au Canada qui ne nous permet pas
de nous rendre directement au Rwanda pour mener une étude exhaustive,
nous avons utilisé une entrevue semi-dirigée via le
téléphone. Cette entrevue constitue donc un complément aux
documents disponibles sur le sujet.
III.1.3. Observer comment ?
Après avoir répondu aux questions
« interroger qui? », nous abordons la dernière
question ayant trait à la réalisation d'un test
empirique : « interroger comment? ».
Répondre à cette question, c'est adopter une manière de
recueillir des données (méthodes) ou des faits empiriques qui
permettent de tester les hypothèses de recherche grâce à
leur analyse.
A cet égard, M. Grawitz (1990) citée par F.
Depelteau, 2000 mentionne trois techniques de collecte des
données : les techniques documentaires (analyse de documents et de
contenu), les techniques vivantes(les interviews, les tests, les questionnaires
et les mesures des attitudes et des changements) et, finalement, les
techniques d'études de collectivités et de groupes
(enquêtes de terrain, expérimentation sur le terrain ou en
laboratoire et recherche-action). M. Angers (1992) cité par F. Depelteau
(2000), distingue trois méthodes (méthode expérimentale,
méthode historique et méthode d'enquête) et six techniques
principales de recherche (l'observation en situation, l'entrevue de recherche,
le questionnaire ou le sondage, l'expérimentation, l'analyse de contenu
et l'analyse statistique.
Lamoureux (1995) cité par F. Depelteau(2000) mentionne
trois types de méthodes(les méthodes exploratoires, descriptives
et explicatives) et six outils de collecte de données (l'observation,
l'analyse de contenu, les questionnaires, les entrevues, l'analyse des
données chiffrées et les tests). M.F Fortin (1996) cité
par F. Depelteau (2000) distingue ces méthodes selon qu'elles produisent
des mesures objectives ou subjectives. Tandis que B. Gauthier (1990)
cité par F. Depelteau(2000) explique comment utiliser l'observation
directe, l'entretien non directif, les histoires de vie, l'analyse de contenu,
le sondage, la mesure des attitudes, l'évaluation de programmes, la
simulation sur ordinateur et la recherche-action. Loin d'être exhaustif,
il nous semble que le choix des méthodes pour la collecte des
données dépend essentiellement des objectifs de la recherche.
Ainsi pour notre cas, les méthodes doivent permettre de
répondre à notre double objectif : analyser les facteurs
historico-géographiques d'intégration du Rwanda à la CAE,
analyser les facteurs économico-politiques d'intégration du
Rwanda à la CAE. Conformément à ces objectifs, plusieurs
données ont été donc requises pour la structuration de la
démarche méthodologique. Comme le dit Glaser et Strauss (1967),
la validation et les critères de scientificité résultent
de la stratégie de triangulation. Cette stratégie s'est faite
à tous les niveaux de la recherche et consiste à un
procédé de comparaison constante entre les informations.
Selon C. Gagnon (in Miles et Huberman, 1994), la
triangulation réfère actuellement à l'utilisation d'une
multitude de sources de données ainsi qu'à la convergence de
points de vue appuyés par des recherches similaires ou des
théories. « Triangulation has also come to mean
convergence among researchers (agreement between field notes of one
investigator and observations of another) and convergence among
theories »5(*) (A.M. Huberman et M.B. Miles, 1994). Elle peut
aussi être envisagée comme un processus de codification et
d'interprétation, lequel doit être fait en collaboration avec
d'autres chercheurs (A. Mucchielli, 1996).C'est pourquoi, la validation de
l'analyse et de l'interprétation qui est présentée dans
ce travail va reprendre l'apport des différentes sources de
données du processus de triangulation.
III.2. La réalisation du test empirique (la collecte
et l'analyse des données)
La réalisation d'un test empirique se fait par le choix
et l'utilisation d'un mode d'investigation de la réalité,
communément connu sous le nom de méthode de collecte des
données. Le test empirique se termine par une analyse des
données.
III.2.1.1. L'utilisation de documents
Le terme document renvoie ici à toute source de
renseignements déjà existante à laquelle le chercheur
peut avoir accès (R. Landry, in B.Gauthier., dir. 1997). Pour notre cas,
les documents utilisés portent sur les documents administratifs tels que
les rapports divers, les documents de presse comprenant les journaux (notamment
le New times et la Nouvelle Relève) et les publications scientifiques
(articles, mémoires, thèses).
III.2.1.2. L'entrevue semi-dirigée via le
téléphone
Les données ont été aussi recueillies
selon la méthode de l'entrevue semi-dirigée via le
téléphone6(*).
Il fournit un cadre dans lequel les différents interviewés
peuvent exprimer leur connaissance personnelle dans leurs propres termes (C.
Deschamps, 1993, R. Mayer et Quellet, 1991). L'entrevue semi-dirigée
permet de connaître ce qui est significatif pour les individus en
engageant un dialogue avec eux, tout en respectant les thèmes à
l'étude (Je. Poupart, 1997). Cette technique de collecte de
données est souvent utilisée dans des démarches qui
interrogent les réalités sociales selon la perspective des
acteurs sociaux (idem). Il s'agit d'une forme d'interview qui laisse assez de
liberté à l'interviewé pour faire apparaître des
éléments d'analyse imprévus tout en convergeant les propos
vers les facteurs d'intégration du Rwanda à la CAE.
Dans la société contemporaine de plus en plus
médiatisée, l'entrevue est un moyen privilégié
d'obtenir des informations utiles et pertinentes afin de mieux comprendre,
saisir et interpréter l'expérience humaine (C. Gagnon,
2006).Cependant, cette méthode même si elle efficace pour la
recherche, demeure subjective. L'entrevue est une conversation, un dialogue
dont l'articulation du sens se construit en interaction, où chacun des
protagonistes agit sur l'autre, l'influence par ses caractéristiques
propres (C. Gagnon, 2006). C'est pourquoi comme le dit d'ailleurs R.K. Yin
(1989), «since interview is subject to the problems of bias, poor
recall, and poor or inaccurate articulation, a reasonable approach is to
corroborate it with information from other sources»7(*).
Dans cette étude, l'entrevue semi-dirigée via le
téléphone a été un outil important dans la
mesure où nous étions en mesure à la fois de
découvrir ce qui est à la base de l'intégration du Rwanda
à la CAE.
III.2.2. L'analyse et l'interprétation des
résultats
Les procédures d'analyse et d'interprétation
varient en fonction de la diversité des documents étudiés
(R. Landry in B.Gauthier, 1997). En ce qui concerne l'analyse des documents
administratifs(les rapports) et les documents de presse (articles,
mémoires, thèses, journaux), nous avons fait recours à
l'analyse de contenu. L'analyse de contenu est une méthode de
classification ou de codification dans diverses catégories des
éléments du document analysé pour en faire ressortir les
différentes caractéristiques en vue d'en mieux comprendre le sens
exact et précis (R. L'écuyer, 1988) cité par F. Depelteau
(2000).
Dans le cadre d'analyser nos données, nous avons
d'abord transcrit les entrevues semi-dirigées que nous avons
administrées via le téléphone. Comme la plupart des
entrevues se sont déroulées en Kinyarwanda et en Anglais, il a
fallu transcrire en traduisant simultanément, ce qui a rendu la
transcription un peu longue dans la mesure où à chaque
transcription, nous devrions réécouter l'entrevue et la relire
pour s'assurer d'avoir bien traduit les propos des interviewés. Dans
cette étape de transcription, nous avons essayé de reproduire le
plus fidèlement possible les propos des interviewés.
Nous disions que le corpus sera examiné à l'aide
de la méthode d'analyse de contenu. En nous fiant à nos
hypothèses, à notre cadre théorique, nous avons
rassemblé, préparé et classé les principaux
documents pertinents et les entrevues semi-dirigées que nous avons
analysés par la suite. Le mode d'analyse a été fait sur
la base des conjectures théoriques de l'approche adoptée
notamment les indicateurs. Nous avons inventorié les documents en les
numérotant selon le choix et la définition des codes.
Tableau 1. Les documents analysés
1. La régionalisation en Afrique orientale : Entre
impératif de développement et dynamiques politiques, Thèse
de doctorant
2. L'Afrique des Grands Lacs existe-t-elle ? Tiers-Monde,
Volume 27, Numéro 106, pp. 253 - 266
3. Lake Kivu regional trade in the nineteenth century, Journal
des Africanistes, 2, pp.6-30
4. Histoire de l'Afrique de l'Est, Kampala, Ouganda
5. L'intégration régionale en Afrique Centrale
comme stratégie d'insertion dans le nouveau contexte de mondialisation,
Thèse de maîtrise
6. Et demain l'Afrique, Stock, Paris
7. Regional Integration: A Political Federation of the East
African Countries? African Journal of International Affairs
8. Rethinking East African Integration: From Economic
to Political and from State to Civil Society, Africa Development
Journal
Tableau 2. Les entrevues analysées
A. Deux personnes qui travaillent au Ministère en charge
de l'intégration à la CAE
B. Une personne qui travaille au secrétariat de la CAE
à Arusha en Tanzanie
Notre analyse de contenu qualitative des documents et de
l'entrevue semi-dirigée via le téléphone a mis l'accent
sur des catégories à partir des indicateurs.
Tableau 3. Le choix et la définition des codes
Concept
|
Dimensions
|
Code
|
Définition des codes
|
Intégration
|
Les facteurs historico-géographiques de
l'intégration du Rwanda à la CAE
|
01
|
Langue commune = intégration
|
02
|
Destin commun = intégration
|
03
|
1. Proximité
géographique =intégration
2. Enclavement = l'intégration
|
04
|
Milieu favorable (sol riche, bon climat, ressources
naturelles = intégration
|
Les facteurs économico-politiques
d'intégration du Rwanda à la CAE
|
05
|
Politique
|
06
|
Situation sécuritaire
|
07
|
Le marché
|
Pour rendre le codage plus précis et pratique, nous
l'avons complexifié de cette façon.
Tableau 4. Analyse et interprétation des
résultats
Code
|
Signification du code
|
01.01-30-01
01.08-55-3
01.02-264-2
|
(Langue commune : Swahili = intégration, dans le
premier document, à la page 30, au paragraphe 1)
Langue commune : Swahili= intégration, dans le
huitième document, à la page 55, au paragraphe 3
Langue commune : Kinyarwanda=intégration, dans le
deuxième document, à la page 264, au paragraphe 2)
|
02.02-257-03
02.03-15-02
02.04-03-02
|
(Destin commun : royaume = intégration, dans
le deuxième document, à la page 257, au paragraphe 3).
Destin commun : royaume = intégration, dans
le troisième document, à la page 15, au paragraphe 2).
(Destin commun : berceau de l'humanité =
intégration, dans le quatrième document, à la page 3, au
paragraphe 2)
|
03.02-256-03
03.06-22.01
03. AB
|
(1.Proximité géographique= intégration,
dans le deuxième document, à la page 256, au troisième
paragraphe).
(2.Proximité géographique= intégration,
dans le sixième document, à la page 22, au paragraphe 1).
(3.Enclavement=intégration, dans les entrevues AB
|
04.02-257.AB
|
(Milieu favorable (sol riche, bon climat, ressources
naturelles = intégration), dans le deuxième document,
à la page 257et aux entrevues AB
|
05.05-59.AB
|
(Politique= intégration), dans le cinquième
document, à la page 59 et aux entrevues AB
|
06.07-28-AB
|
(Situation sécuritaire= intégration, dans le
septième document, à la page 28 et aux entrevues AB
|
07.07-28-AB
|
(Marché = intégration, dans le septième
document, à la page 28 et dans les entrevues AB)
|
Que peut-on tirer de ces tableaux ? Avant de tirer une
conclusion, nous reprenons d'abord nos hypothèses préalablement
formulées :
Hypothèse 1. Les facteurs
géographiques et historiques justifient d'un côté
l'intégration du Rwanda à la CAE;
Hypothèse 2. Les facteurs
économiques et politiques justifient de l'autre côté
l'intégration du Rwanda à la CAE.
Pour vérifier ces hypothèses, nous avons
regroupé huit principaux documents et transcrit deux entrevues, tous
analysant les facteurs d'intégration du Rwanda à la CAE. Nous
avons élaboré une liste des codes (de 01 à 07)
axés sur les énoncés révélateurs en rapport
avec les conjectures théoriques. Nous avons par la suite
procédé au processus de codage en rassemblant sur une liste
à part tous les éléments singuliers pertinents à
nos hypothèses ci-haut formulées.
L'analyse des résultats montre que les mots clés
sortant des documents et entrevues codifiés correspondent aux
hypothèses, c'est- à -dire ils sont suffisamment
révélateurs et pertinents pour corroborer nos hypothèses
de recherche. A cet égard, nous concluons que nos hypothèses de
recherche sont corroborées par les faits révélées
par notre analyse de contenu des documents et des entrevues
semi-dirigées via le téléphone.
III.2.3. Les difficultés rencontrées
Il convient de souligner que, pour mener une
étude exhaustive sur le sujet, il aurait été
intéressant de nous rendre au Rwanda. Ceci nous permettrait non
seulement de fouiller la documentation sur place mais aussi d'approfondir notre
questionnaire dans les entrevues à administrer. Une telle entreprise
aurait été ardue, à cause non seulement du temps
considérable qu'aurait exigé notre travail sur le terrain mais
aussi de vastes ressources économiques que cela implique. Qui plus est,
notre statut de diplomate du Rwanda au Canada réduit en quelque sorte le
temps pour un tel travail. C'est pour cela que nous nous sommes
contentés de quelques documents disponibles, lesquels documents sont
complétés par les entrevues semi-dirigées via le
téléphone.
Chapitre IV. Les facteurs historico-géographiques
d'intégration du Rwanda à la CAE
L'intérêt du Rwanda d'adhérer à la
CAE est une idée de longue date. Il s'agit d'une option logique car
l'appartenance du Rwanda à la CAE est d'abord naturelle si on l'analyse
sur le double plan géographique et historique (Ph.Apuuli Kasaija, 2004).
Ensuite la Communauté occupe une place sans commune mesure dans la vie
du Rwanda aussi bien sur le plan économique, politique. C'est ce que
nous allons discuter dans les pages suivantes. Mais avant d'y arriver, nous
expliquons d'abord la CAE. La CAE est constituée de cinq pays : le
Kenya, l'Ouganda, la Tanzanie, le Rwanda et le Burundi comme l'illustre la
figure 1.
Figure1. Les pays de la CAE
Source: Baruti Katembo, 2008
IV.1. Aspects historiques
Si nous nous référons aux différents
écrits, l'intégration du Rwanda à la CAE s'explique par
l'histoire. A cet égard, H. Ochwada (2004, p.55) mentionne que
« The East African sub-region comprising Kenya, Uganda, Tanzania,
Rwanda and Burundi possesses a common historical heritage dating back to the
pre-colonial period. During pre-colonial times people intermingled freely
without inhibition and restrictions of artificial boundaries of country
specific laws, trading among themselves within the sub-region and beyond.
Moreover, they intermarried and related variously, including participating in
political affairs of the communities within which they resided. Some Arab and
Waswahili traders from the East African coastal region, for instance,
established chiefdoms and kingdoms in areas as far as the Great Lakes of East
Africa in the nineteenth century prior to colonialism»8(*).
T. Zeleza (1993, p.303) confirme ceci de cette
façon « Family, clan and ethnic associations, both
real and affected, played an important role in the provision of trading skills,
capital and credit, and information. Traders formed alliances in foreign
countries through marriage and blood brotherhood. The careers of the famous
Swahili and Nyamwezi traders, such as Tippu Tip and Msiri who created
commercial empires in Kasongo and Katanga respectively, were built on shrewd
alliances with local rulers or people based on either marriage or fictional
kinship ties»9(*).
Depuis longtemps, le Rwanda a des liens communs avec les pays
de l'Afrique de l'Est. L'histoire de l'un ou l'autre des pays de l'Afrique de
l'Est se comprend par référence aux autres, qu'il s'agisse de
l'histoire précoloniale des populations africaines, de l'histoire
coloniale qui a vu la conquête par différentes puissances
européennes de l'ensemble de la région ou enfin de l'histoire
contemporaine, marquée partout par des politiques
ségrégatives originales, nous a communiqué l'agente du
Ministère en charge d'intégration au Rwanda. La CAE est
habituellement définie par le Kenya, l'Ouganda et la Tanzanie et elle a
été rejointe en 2007 par le Rwanda et le Burundi.
IV.1.1. Langue
Dans notre entrevue via le téléphone, un cadre
rwandais qui travaille au Secrétariat de la CAE à Arusha en
Tanzanie a révélé que la population de la région
de l'Afrique de l'Est présente depuis belle lurette des affinités
culturelles et linguistiques. De nombreux travaux ont aussi montré la
profonde filiation qui lie les langues d'Afrique noire. Plus
particulièrement, ils ont mis en évidence l'importance du swahili
qui permet une véritable intégration linguistique et culturelle
de l'Afrique de l'est. Le swahili est parlé par 30 à 40 millions
de personnes, réparties entre la Tanzanie, le Kenya, l'Ouganda, l'est de
la République démocratique du Congo (RDC), le Rwanda, le Burundi,
etc. C'est sans conteste la langue la plus diffusée dans cette partie de
l'Afrique. Elle a le statut de langue officielle en Tanzanie (avec l'anglais
bien sûr), et de langue nationale au Kenya.
Selon M.K. Dupreelle, 2001, le swahili est à la fois
une langue, une culture et une religion. Considéré comme une
langue du négoce, le swahili permet le développement des
réseaux commerciaux assez vaste, souvent informels du Rwanda avec les
pays qui forment la CAE. L'importance du swahili au Rwanda fut renforcée
par le retour de la diaspora rwandaise qui vivait en Tanzanie et au Kenya. Son
expansion à travers le pays est sans aucun doute en vitesse. Le swahili
constitue une langue d'enseignement dans les options littéraires du
secondaire.
Il semble, explique l'agente du Ministère rwandais en
charge d'intégration à la CAE que l'utilisation de cette langue
au Rwanda date de l'époque des missionnaires. Les missionnaires
européens et les explorateurs adoptèrent cette langue comme moyen
de communiquer avec les locaux. Dans la première moitié du
19ème siècle, des missionnaires, notamment l'Allemand Johan
Krapf, commencèrent à l'écrire avec l'alphabet romain.
Auparavant, il était transcrit exclusivement en arabe. Au-delà
des contraintes géographiques qui amènent le Rwanda, le Burundi
et l'Ouganda à traverser les pays voisins afin d'atteindre
l'océan indien, l'influence asiatique et musulmane du swahili joue d'une
certaine manière le rôle de catalyseur.
Comme l'explique notre interviewé du Ministère
rwandais en charge de l'intégration à la CAE, le swahili n'est
pas la seule langue qui véhicule la cohésion du Rwanda avec la
CAE. Le Kinyarwanda, appelé langue bantu, est une des multiples langues
d'Afrique de l'est. Il partage avec les autres langues bantoues la même
phonétique et, surtout, la même logique grammaticale et
syntaxique. Il est massivement parlé en République
démocratique du Congo dans sa partie est, parlé au Burundi, en
Ouganda et en Tanzanie.
Il convient de souligner que malgré certaines petites
différences qui existent, les peuples de l'Afrique de l'Est se
communiquent facilement dans leurs langues locales respectives. La langue
Kinyarwanda-Kirundi-Giha, étant plus proche des langues parlées
aux abords du lac Victoria (J.P. Chrétien, 1986, M.Guthrie, 1967).
IV.1.2. L'expérience historique de royaumes
La constitution des royaumes constitue un autre
élément culturel qui lie les peuples de l'Afrique de l'Est. Cet
ensemble correspond au sens large à l'Afrique du rift (Y. Lacoste,
1993). Il est formé principalement du Kenya, de l'Ouganda et de la
Tanzanie, auquel on adjoint le Rwanda, le Burundi et la région
congolaise du Kivu en raison de son exploitation minière
régionale spécifique, et plus globalement du fait de leur
enclavement et du brassage démographique qui les caractérisent
les trois.
L'Afrique orientale est définie par Y. Lacoste (1993,
p. 8.83) comme un ensemble qui passe par des alternances de scissions et de
rapprochements. L'administration des royaumes rwandais et burundais fut en
effet associée à celle du Tanganyika par l'Allemagne qui
rêvait d'une Mittel Afrika jusqu'en 1919. Confiée par la
Société des Nations à la Grande Bretagne jusqu'en 2003,
le Tanganyika fut alors intégré au rêve de Cécile
Rhodes, celui d'établir une Afrique anglaise, du cap au Caire.
Enfin, de 1923 à 1962, le Burundi et le Rwanda forma un
territoire belge centrale, en association avec certaines régions de
l'est du Congo. Dès 1900, des unions douanières virent le jour
entre l'Ouganda et le Mombasa. Ces efforts se sont poursuivis au-delà de
la seconde Guerre Mondiale et de l'accession aux indépendances. Les
migrations volontaires ou mouvements de refugiés, alliances politiques
et interventions militaires, relations commerciales officielles ou de
contrebande sont autant de facteurs qui contribuent à la construction de
l'Afrique orientale.
Si de nombreux enjeux sont locaux, l'implication des
populations et des destins exige, pour leur résolution, une dynamique
régionale favorable et inversement (A.Guichaoua, 1992). Plusieurs
autres facteurs semblent d'autre part favoriser l'émergence d'une
certaine intégration.
C'est le cas notamment de l'institution socioreligieuse du
bwami qui a ouvert des nouveaux horizons sur l'institution royale du mwami
telle qu'elle fonctionne au Rwanda, au Burundi, au Buha ou au Bushi
(J.P.Chrétien, 1986, p.257). On peut parler des liens commerciaux, par
exemple la diffusion des bracelets de raphia au Rwanda par les colporteurs
venus du Butembo (D. Newbury, 1980, p.15). Le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda
sont situés au carrefour de la grande voie nord-sud qui mène de
la vallée du Nil à celle du Zambèze (le Cap au Caire) avec
les routes est-ouest qui vont des comptoirs arabes sur les rivages de
l'océan indien vers la cuvette du Congo (Y. Lacoste, 1997, p.4).
Dans cette région de l'Afrique de l'Est, se dressaient
depuis des siècles des royaumes extrêmement organisés.
C'est le cas notamment des royaumes du Rwanda(le Rwanda actuel), du Burundi(le
Burundi actuel), de Toro, Nkolé et Buganda en Ouganda actuel, de Buha
(une partie de la Tanzanie), de Bushi (la partie est de la République
Démocratique du Congo). L'on voit bien qu'à l'exception de Bushi,
tous ces royaumes occupent actuellement des territoires des Etats de la CAE.
Ces royaumes se sont étendus au fil des années
en vastes royaumes. Les raisons expliquant le développement de ces
grands ensembles se trouvent donc dans la géographie, l'économie
et aussi le souci de sécurité et ce sont ces raisons qui
reviennent dans l'explication de l'intégration du Rwanda à la
CAE, le souligne le cadre du Secrétariat de la CAE. Seulement, une chose
est certaine, c'est que la partie où ont développé ces
royaumes appartient tout entière à l'Afrique tropicale,
région réputée être le berceau de
l'humanité.
IV.1.3. Le berceau de l'humanité
L'Afrique de l'Est, avec ses vallées et ses
régions montagneuses, possède les traces historiques les plus
anciennes du monde. Des crânes et des empreintes d'hominidés,
certains vieux de plus de 3 millions d'années, ont été
retrouvés dans différents sites, notamment les gorges d'Olduvai
en Tanzanie et le lac Turkana au Kenya. Si d'autres vestiges similaires ont
été retrouvés dans d'autres régions du continent,
la Rift Valley est toujours considérée comme étant le
berceau de l'humanité.
Il y a environ un million d'années, ces ancêtres,
plus proches de l'homme, se sont dispersés au-delà de l'Afrique
et ont atteint l'Europe et l'Asie. Il y a quelques 100 000 ans, l'homo sapiens
-ou l'homme moderne- faisait son entrée en scène. Il y a 10 000
ans, les Africains de l'est parlaient khoisan et vivaient de chasse, en
communautés. Les Pygmées étaient également
présents.
IV.1.4. Le contrôle colonial
Selon le cadre du Secrétariat de la CAE, certains
facteurs annoncent la possible construction d'une région plus ou moins
intégrée et homogène. Au plan historique et politique, le
destin des pays qui forment la CAE a en effet très vite
été placé sous le signe de la régionalisation par
ses colonisateurs. Les horreurs du commerce de l'esclavage et les attraits de
l'Afrique de l'Est furent connus de l'Europe et suscitèrent son
intérêt. En 1890, l'Allemagne et l'Angleterre signèrent un
accord définissant leurs "sphères d'influence" qui établit
formellement un protectorat anglais sur l'Archipel de Zanzibar. La plus grande
partie de l'actuelle Tanzanie, le Rwanda et le Burundi furent soumis au
contrôle des Allemands et prirent le nom d'Afrique de l'Est allemande
(appelée plus tard Tanganyika) alors que les Anglais s'emparaient du
Kenya et de l'Ouganda.
Le 19ème siècle fut aussi le temps des
explorateurs, parmi lesquels les célèbres Henri Morton Stanley et
David Livingstone. Au tournant du 20ème, les Européens avaient
fermement établi leur présence en Afrique de l'Est. Les
administrations coloniales anglaises et allemandes construisaient des chemins
de fer et des routes pour ouvrir leurs colonies au commerce, ainsi que des
hôpitaux et des écoles et encourageaient l'afflux des
missionnaires chrétiens. Les hautes terres fertiles et le climat
favorable convenaient aux agriculteurs européens, qui les
colonisèrent. A l'inverse, le Tanganyika comprenait des zones non
cultivables et envahies par la mouche tsé-tsé, ce qui rendait
l'élevage et l'agriculture impossibles (Florence, 2008).
IV.1.5. L'indépendance
Alors que la présence européenne se
renforçait en Afrique, le mécontentement envers l'autorité
coloniale grandissait et les demandes nationalistes pour l'indépendance
devenaient de plus en plus insistantes. Dans les années 50 et au
début des années 60, les divers mouvements nationalistes
s'unirent et gagnèrent en puissance à travers l'Afrique de l'Est.
La Tanzanie accéda ainsi à l'indépendance en 1961,
l'Ouganda, le Rwanda et le Burundi en 1962 et le Kenya en 1963.
L'indépendance et les années qui suivirent connurent des
trajectoires différentes selon les pays. Au Kenya, le chemin menant
à l'indépendance fut long et violent, en Tanzanie et en Ouganda,
ce fut relativement pacifique pendant qu'au Rwanda et au Burundi, les anciennes
rivalités entre les tribus furent un obstacle majeur (Florence, 2008).
Au Kenya, l'afflux des Européens avait augmenté
rapidement pendant la première moitié du 20ème
siècle, si bien qu'ils étaient environ 80 000 à s'y
être installés en 1950. Nombre de terres expropriées pour
leurs fermes avaient été prises aux Kikuyu. Ceux-ci
réagirent en formant une association d'opposition politique en 1920 et
provoquèrent la Rébellion Mau Mau dans les années 50, ce
qui marqua un point tournant dans la politique kenyane (Florence,
2008) ;
Au Tanganyika, l'administration impopulaire allemande continua
jusqu'à la fin de la 1ère Guerre Mondiale. Suite à la
défaite des Allemands, la ligue des Nations confia la zone aux
Britanniques, le Rwanda et le Burundi aux Belges. L'autorité britannique
fut tout aussi impopulaire même s'ils négligèrent le
développement du Tanganyika au profit des options plus lucratives et des
terres plus fertiles du Kenya et de l'Ouganda. Une conscience politique
s'organisa sous la forme d'unions et de coopératives entre agriculteurs,
à travers lesquelles s'exprimaient les revendications du peuple. Dans
les années 50, elles dépassaient les 400. Celles-ci s'unirent
pour former l'Association Africaine du Tanganyika (TAA), un groupe de pression
pour la cause nationaliste basé à Dar es Salam (Florence,
2008).
En Ouganda, les Anglais tentèrent de favoriser le
recrutement des puissants Baganda dans le service civil. Les membres des autres
tribus durent trouver d'autres moyens de s'imposer. Les Acholi et les Lango
choisirent par exemple l'armée. Un ressentiment montait, faisant germer
les conflits inter-ethniques qui déchirèrent l'Ouganda
après l'indépendance. Au Rwanda et au Burundi, la période
coloniale fut caractérisée par le pouvoir grandissant et les
privilèges accordés aux Tutsi par l'administration belge. Les
tensions de longue date existant entre Hutu et Tutsi explosèrent en un
tristement célèbre génocide en 1994.
IV.2. Aspects géographiques
Géographiquement parlant, le Rwanda est proche des pays
qui forment la CAE. Il partage ses frontières au Sud avec le Burundi,
à l'Est avec la Tanzanie, au Nord avec l'Ouganda et à l'Ouest
avec la République Démocratique du Congo. Il est donc normal que
le Rwanda s'intègre dans cette région. L'unité
régionale s'établit également au plan de la
géographie physique où l'ensemble de la région correspond
à une Afrique des hautes terres où circulation et échanges
rencontrent peu d'obstacles.
En plus d'un espace de hautes terres de 1000 à 2000 m
d'altitude, l'Afrique de l'est est délimitée essentiellement par
la pluviométrie et la végétation (J.P.Chrétien,
1986, p.257). Dans cette zone, on trouve les lacs Victoria, Albert, Edouard,
Kivu et Tanganyika, correspondant à des zones de fractures (Le Rift
occidental), à des barrières volcaniques (les Virunga) ou
à des dépressions tectoniques (op.cit.).
Cette région correspond à un environnement
naturel favorable, notamment sur le plan climatique. L'abondance des
précipitations et la longueur des saisons de pluies se prêtent
à une riche agriculture (J.P.Chrétien, 1986). Cette agriculture
est due à la qualité de ses sols dont les plus remarquables sont
les zones volcaniques qui couvrent de vastes étendues d'Afrique
orientale (E.Kodjo, 1985).
Etant donné que les frontières ont
été délimitées en défaveur du Rwanda
où certaines parties du Rwanda ont été annexées
à d'autres pays, il ya certains rwandais qui se sont trouvés
dans d'autres pays. L'intégration régionale permet donc au Rwanda
de garder le lien avec ses anciens citoyens qui se trouvent dans les nouveaux
pays. C'est une ambition louable dans la mesure où il n'y a pas à
l'heure actuelle un petit pays, qui avec un faible nombre d'habitants, peut
atteindre seul la puissance.
Ainsi, il semble que le gouvernement rwandais soit convaincu
que la puissance économique et politique va de pair avec
l'étendue et le nombre, nous a souligné l'agente du
Ministère rwandais en charge d'intégration à la CAE.
E.Kodjo (1985, p.350) l'a aussi mis en évidence en mentionnant dans son
livre « Et demain l'Afrique », l'avenir
appartient aux vastes ensembles géographiques dotés d'immenses
espaces aux ressources naturelles considérables et de centaines de
millions d'hommes. C'est dans ce cadre que le Rwanda a
intégré dans un espace de plus de 100 millions d'habitants.
Les Rwandais sont éparpillés un peu partout dans
les pays d'Afrique de l'Est dont entre le Burundi, l'Ouganda, la Tanzanie et la
partie est de la RDC. La délimitation du Rwanda a réduit la
vitalité des Rwandais car elle brise la cohésion qui a
caractérisé leurs relations avec les voisins. Au plan des
ressources énergétiques, les pays comme l'Ouganda et la Tanzanie
possèdent un potentiel ressource d'énergie, ce qui apparaît
comme un facteur d'intégration du Rwanda, un pays dont les ressources en
la matière sont limités.
Cette agriculture est associée à
l'élevage, qui occupe une place déterminante dans la plupart des
pays qui forment la CAE. L'agriculture et l'élevage coexistent non
seulement spatialement, mais aussi sur le plan économique (utilisation
des engrais, usage des chaumes), social (les fameux contrats de
clientèle qui ont fait couler tant d'encre et de salive) et culturel (la
symbolique de la vache évoquée en de multiples occasions de la
vie rurale). Selon J.P Chrétien (1986), quoiqu'une partie des
populations ait été jadis préférentiellement
attachée à l'élevage des bovins, il faut néanmoins
y voir, sauf rares exceptions, des groupes des pasteurs-agriculteurs, surtout
si on prend en compte les groupes l'activité globale des familles
concernées. Corollairement à l'ensemble de l'Afrique, l'Afrique
de l'est a vu ses frontières arbitraires et artificielles se
cristalliser, lesquelles frontières héritent de la colonisation,
avec une naissance et une exacerbation du nationalisme.
Chapitre V. Les facteurs politico-économiques
d'intégration du Rwanda à la CAE
V.1. La situation politique
L'intégration du Rwanda à la CAE est le
résultat de la situation politique qui prévaut dans la
région où les organisations auxquelles le Rwanda appartenait, ne
sont plus opérationnelles. C'est le cas de la CEPGL et l'OBK. Cette
intégration constitue le 6eme pilier du gouvernement Rwandais à
travers la vision 2020. Contrairement à la CEPGL, la CAE permet le
désenclavement du Rwanda de part et d'autre de deux corridors (le sud
-ouest : Tanzanie, et le nord-ouest : Kenya).
V.1.1. La CEPGL
Comme nous l'avons déjà démontré
dans les pages précédentes, la CEPGL est à l'heure
actuelle en sommeil en raison de la conjoncture politique de la
sous-région. Le Rwanda a dû donc chercher une autre alternative en
s'intégrant à la CAE qui semble active notamment après
les années 1996.
V.1.2. L'OBK
L'OBK a vu le jour en 1977. Elle réunissait le Rwanda,
l'Ouganda, la Tanzanie et le Burundi. Elle traitait toutes les questions
relatives aux activités liées aux ressources aquatiques du bassin
de la rivière de la Kagera. Son but était l'exploitation optimale
des ressources en eau du bassin, la mise en valeur des potentialités
hydroélectriques, des pêcheries, de l'exploitation minière,
de la protection de l'environnement, du tourisme, des transports et des
communications, mais aussi de l'agriculture et de l'élevage.
Corollairement à la CEPGL, l'OBK n'est plus
opérationnelle, ce qui ne permet au Rwanda de bénéficier
des projets en matière de liaisons téléphoniques,
notamment grâce au projet régional de
télécommunication qui reliait les quatre pays membres par des
réseaux hertziens. Il fallait pour le Rwanda de trouver une organisation
semblable permettant de prendre en mains certains des objectifs de l'OBK. La
CAE est donc mieux placée, d'autant plus qu'elle inclut le Kenya, un
partenaire de taille du Rwanda.
V.1.3. Désenclavement du Rwanda
Le contexte géographique du Rwanda montre que' il est
situé au Centre Est de l'Afrique entre 1 et 3° L.S et entre 28 et 30°
L.E. Il se trouve à 1,200 km de l'Océan Indien et à 2,200
km de l'Océan Atlantique. Le Rwanda partage ses frontières au Sud
avec le Burundi, à l'Est avec la Tanzanie, au Nord avec l'Uganda et
à l'Ouest avec la République Démocratique du Congo. Il
découle de cela un pays enclavé, ce qui fait que les produits
importés soient relativement chers et les produits d'exportation moins
compétitifs sur le marché mondial.
L'enclavement du Rwanda (figure 2) constitue l'une des
principales raisons qui a permis à s'intégrer à la CAE,
l'a souligné l'agent au Ministère en charge d'intégration
à la CAE. L'enclavement est une entrave pour l'économie du
Rwanda, ses relations politiques avec les pays constituant son voisinage et
ses principales voies d'accès. L'intégration du Rwanda à
la CAE lui permet de bénéficier des avantages des ports de
Mombasa et Dar-Es-Salaam.
Figure 2. L'enclavement du Rwanda
Le port de Mombasa au Kenya est géré par la
Kenya Port Authority, corps para-étatique créé en 1978. Il
s'agit du premier port d'Afrique orientale. Le volume d'activité du port
est fonction du volume d'import et d'export du Kenya, de l'Ouganda, du Rwanda,
du Burundi, du Kivu (est du RDC), du sud Soudan ainsi que de son niveau de
compétitivité vis-à-vis du port de Dar-es-Salaam en
Tanzanie. Il convient de mentionner aussi que le port de Mombasa joue un
rôle important pour le transit régional. Ce dernier constitue
depuis plus de 20 ans, environ 10% du trafic total (M.K.Dupreelle, 2001).
Le port tanzanien de Dar-es-Salaam constitue pour beaucoup
d'acteurs de la région une alternative intéressante aux
problèmes d'engorgement du port de Mombasa. Il s'agit du deuxième
port d'Afrique orientale avec un traitement annuel de trois millions de tonnes.
Il est à la fois lié au chemin de fer tanzanien et au Tazara. Le
port est actuellement dirigé par la Tanzania Harbour Authority, corps
parapublic également engagé dans un vaste programme de
privatisation.
La survie du Rwanda dépend absolument de ces deux
ports. Il est donc compréhensible que pour en bénéficier,
le Rwanda n'a d'autres choix que s'intégrer dans la communauté
qui regroupe les deux pays, à l'instar la CAE.
Il convient par ailleurs de mentionner qu'à l'heure
actuelle, les déséquilibres commerciaux sont assez
préoccupants. Bien que nous ne disposions pas des données pour le
prouver, il y a lieu de signaler par exemple que le Rwanda exporte en Ouganda
moins qu'il n'importe. C'est pourquoi, il nous semble que l'engagement du
Rwanda à la CAE est avant tout poussé par son enclavement. La
coopération, en matière de transport et de communication, est
vitale.
V.1.4. La vision 2020 du gouvernement Rwandais
L'intégration du Rwanda à la CAE est
influencée par les facteurs tant au niveau international,
régional et national. Particulièrement dans les années
1990, le modèle néolibéral (réformes structurelles,
marchés libéralisés, réduction du rôle de
l'Etat) s'est imposé aussi bien au niveau national, régional que
mondial comme une conditionnalité pour l'insertion à
l'économie mondialisée (M. Boguikouma, 1999, p.59). L'un des
éléments importants est l'ouverture des marchés afin de
promouvoir l'insertion.
Au niveau régional, le Kenya, l'Ouganda et la Tanzanie
se sont efforcés de faire fonctionner la CAE après une dizaine
d'années de sommeil. C'est dans cette situation que le Rwanda a fait une
demande d'adhésion en 1996. A cela s'ajoute, la politique nationale du
gouvernement rwandais qui prône pour l'intégration
régionale. C'est le cas notamment du 6 eme pilier de la vision 2020 qui
met l'accent sur l'intégration régionale.
Suivant l'exemple de Singapour, le Rwanda dépourvu des
ressources naturelles, s'est engagé résolument dans la voie
de la technologie afin d'être la plaque tournante de la région. En
effet, pour que cela se concrétise, il faut une intégration
régionale avec une zone de libre-échange où les biens
produits au Rwanda circulent sans entrave dans la région. Il convient de
mentionner que contrairement à la plupart d'organisations
régionales des PED, la CAE a un ambitieux programme de l'unification
territoriale.
Ceci constitue un atout pour le Rwanda où
l'étroitesse du pays génère des problèmes divers.
E.Kodjo (1985, p. 263) se posait déjà en 1985 comment le Rwanda
et le Burundi, pays de vingt-six mille trois cent trente-huit kilomètres
carrées, et vingt-huit mille kilomètres carrées de
superficie, aux ressources limitées mais à forte densité
de population (plus de quatre millions d'habitants chacun, qui seront en
toute vraisemblance plus de huit ou neuf millions d'ici l'an 2000)
pourront-ils survivre en tant qu'états indépendants ?
La prévision d'Edem Kodjo est sans doute parfaite car
le Rwanda a déjà plus de neuf millions d'habitants malgré
le génocide des Tutsis de 1994 qui a emporté plus d'un million de
Rwandais. Les dirigeants du Rwanda se sont rendu compte de l'ampleur du
problème et ils oeuvrent avec détermination à l'union avec
la CAE. Ceci permettra de supprimer aux antagonismes soit disant ethniques, qui
n'ont de valeur que dans le cadre d'Etats théoriques
« découpées à la diable », a la trame
précaire et dès le départ « inoculées
d'abâtardissement », pour reprendre une expression
d'Aimé Césaire, cité par E.Kodjo (1985, p.266).
En sus de tout ce qui précède, se demande
E.Kodjo (1985, p.272), le principe de l'intangibilité des
frontières, qui sembla si précieux au départ, n'est-il
devenu, au fil des ans un principe pervers aux effets négatifs pour
l'avenir des peuples d'Afrique ? A-t-il réellement su éviter
les multiples conflits de toute nature qui ont frappé l'Afrique de
l'est ? Le génocide au Rwanda, les massacres au Burundi et en RDC
constituent de belles illustrations. C'est pourquoi, l'intégration du
Rwanda a aussi des visées sécuritaires.
V.1.5. La sécurité
Sur le plan politique, l'intégration régionale
conduit à étendre les actions à des domaines aussi divers
que la défense et la sécurité, la diplomatie ou la
négociation internationale. L'idée sous-jacente c'est que
l'intégration économique ne peut se réaliser sans cet
environnement. A cet effet, M.Salih & J. Murkakis (1998) mentionne que
«the integration could enable the people of East Africa to resolve the
problem of insecurity that has dogged the politics of the Great Lakes
region»10(*).
«A new attempt toward integration could enable
citizens of the sub-region to stabilize, enhance and realize the full potential
of their human resources for progress and development. This would also lessen
the problem of refugees, which has impacted severely on the process of
development in East Africa. Indeed, East African states have previously
concentrated refugees from Rwanda, Burundi, Uganda and Somalia in the various
camps within the region. In other instances, refugees and immigrants have been
denied employment because of their citizenship»11(*) (M.Mamdani 2001; L.H.Malkki
1994; M.Turshen and C. Twagiramariya 1998).
L'intégration du Rwanda à la CAE est une
solution durable au problème des réfugiés rwandais. Selon
H. Ochawada (2004, p. 75), «the out-migration of impoverished peasants
from Rwanda and Burundi since the early 1950s, and who form about 40 per cent
of the population of Buganda or Banyamulenge of eastern Congo, would not be
considered as aliens or immigrants but as committed citizens to the progress of
the region»12(*).
On comprend, par exemple, l'importance prise par les
questions de défense et de sécurité au sein de la CAE
telles que le forum sur la sécurité et le développement
qui regroupe les pays qui forment la CAE. Illustrant cet aspect, l'agent au
Secrétariat à la CAE souligne que la CAE a joué un
rôle déterminant dans les conflits du Congo. C'est dans ce cadre
que l'intégration du Rwanda dans la CAE s'avère être un
investissement capital et fructueux. Cette adhésion contribuera à
stabiliser le pays au niveau politique et sécuritaire assurant ainsi les
bases d'un développement durable qui lui avait manqué depuis des
années. La libre circulation des personnes et des biens
prônée par l'intégration économique n'est possible
que dans un climat de paix et de sécurité, nous a
révélé l'agent du Ministère rwandais en charge
d'intégration à la CAE.
Le Rwanda et l'Afrique orientale dans son ensemble
représente un enjeu géostratégique important qui en fait
un pays et une région convoité. A ce point de vue, Yoweri
Museveni prône pour une défense commune afin d'assurer les
intérêts de la région. Il le souligne en ces termes
«the integration would command more defence potential to guard African
interests against encroachment by foreigners. He argued that the present small
African states individually, do not possess much defence
capacity»13(*)
(Ph.Apuuli Kasaija, 2004, p. 28).
Dans ce cas, le Rwanda est obligé à se tracer
les voies d'une paix véritable, durable et d'une stabilité,
indispensables au développement de leurs forces de production. C'est
pourquoi, la mise en place d'une organisation régionale
intégrale, garantissant la sécurité de tous les pays, est
la bienvenue. La CAE semble mieux placé à cet effet.
V.2. Aspects économiques
V.2.1. Un marché vaste
Pendant que le Rwanda s'est lancé dans un processus de
développement, il fait en même temps face au marché
étroit, une technologie et des capitaux insuffisants, des industries
avec une faible productivité. Pour surmonter ces enjeux, il faut une
intégration. Dans un marché régional de plus de 100
millions de consommateurs, la CAE apparaît être un marché
potentiel pour le Rwanda. Bien que le Rwanda appartienne au grand marché
de COMESA, 95% des exportations se font avec la CAE. A titre d'exemple, le
Rwanda a doublé son volume d'export ces dernières années
(M.K. Dupreelle, 2001). Le Rwanda vend dans cette région une importante
quantité de thé, café et autres produits agricoles
notamment les pommes de terre.
La question de la taille du marché est en effet
centrale au sein des processus d'intégration. Si l'on se
réfère à l'analyse classique d'Adam Smith, la division du
travail n'est possible que si les marchés sont étendus. Quand le
marché se révèle trop étroit, il faut avoir
recours au monde extérieur. Pour B. Boulassa(1961), l'étude d'une
intégration doit obligatoirement considérer les liens qui
existent entre la taille du marché et la croissance. Un marché
plus vaste est en effet censé favoriser le niveau de
productivité.
Il découle de cela que l'élargissement du
marché permet au Rwanda de développer le rendement des
productions et la diminution des coûts. Ce marché important,
accompagné d'un développement des échanges, a permis de
générer des gains de bien-être par la diversification des
produits. L'intégration est entrain d'engager les entreprises rwandaises
dans une spécialisation croissante des productions, avec une
réduction des coûts (M.Boguikouma, 1999).
L'étroitesse de son territoire, le Rwanda fait face
à une vulnérabilité extérieure qui limite les
possibilités de croissance interne et réduit son poids dans les
négociations internationales, a souligné l'agente du
Ministère en charge de l'intégration à la CAE.
L'intégration est donc motivée par la compétition dont le
Rwanda fait face dans le cadre de la nouvelle mondialisation de
l'économie.
V.2.2. Suppression des barrières tarifaires et non
tarifaires
La politique douanière constitue le facteur principal
d'intégration de la plupart des pays, en veillant à ce que, du
fait des changements dans les structures tarifaires, les modifications des prix
relatifs ne soient pas défavorables à une allocation optimale des
ressources et au bien-être (B. Békolo-Ebé, 2001). Ce sont
les modifications des prix et des quantités qui modèlent les
comportements des agents, pour favoriser le développement des
échanges entre les pays membres.
En termes d'intégration régionale, il est
traditionnellement démontré que l'ouverture des frontières
et l'abaissement des barrières tarifaires permettent une meilleure
exploitation des économies de dimensions (M.K. Dupreelle, 2001). Elle
rend possible l'ouverture de marchés plus vaste a des producteurs plus
efficients et elle suscite la mise en place d'une spécialisation
économique qui favorise la mise en place d'économies
d'échelle.
Le Rwanda attend donc de cette suppression des
barrières tarifaires et non tarifaires le développement de la
concurrence, la diminution des prix et la réduction de la segmentation
du marché. Ces économies d'échelle sont cependant
doublement bénéfiques lorsqu'elles se situent dans le cadre d'une
intégration économique.
En réponse à la petite taille du marché
et de leur influence limitée, dans un monde compétitif en voie de
globalisation rapide, le Rwanda s'est intégrée à la
Communauté de l'Afrique de l'Est. Yoweri Museveni, le président
actuel de l'Ouganda est du même avis. En 1998, il a suggéré
que « the countries of the East Africa Community (EAC) together
with Rwanda and Burundi must federate politically in order to command respect
from the other countries of the world. The federation would also enhance their
bargaining strength in multi-lateral institutions, as well as
bilaterally»14(*) (Ph. Apuuli Kasaija, 2004,
p.22). Il continue en soulignant que c'est
à travers l'integration que «Eastern Africa states would
command more respect from the world and an investor would be more attracted to
invest in a united East Africa than in just Uganda because of the bigger market
the former offers»15(*) (Ph.Apuuli Kasaija, 2004, p. 28).
Conclusion
Cette recherche a porté sur les facteurs de
l'intégration du Rwanda à la Communauté de l'Afrique de
l'Est (CAE). Le but du mémoire était d'appliquer la
littérature théorique des facteurs d'intégration sur le
cas concret à savoir l'intégration du Rwanda à la
CAE. Après avoir dégagé la problématique
d'intégration des PED, nous avons esquissé une importante
littérature sur le cadre théorique d'intégration
régionale. C'est à partir de ce cadre théorique que nous
avons formulé les hypothèses de recherche comme suit :
· Les facteurs géographiques et historiques
justifient d'un côté l'intégration du Rwanda à la
Communauté de l'Afrique de l'Est;
· Les facteurs économiques et politiques
justifient de l'autre côté l'intégration du Rwanda à
la Communauté de l'Afrique de l'Est.
La méthodologie a été
réalisée grâce à une analyse essentiellement
qualitative et centrée sur l'interprétation des mots clés
révélateurs. Les résultats auxquels nous sommes
arrivés, se présentent sous forme de bilan tout en ouvrant une
vision prospective pour les recherches futures.
En somme, l'analyse des facteurs
historico-géographiques nous révèle que les langues
communes parlées en Afrique de l'Est, l'expérience historique
commune des royaumes de l'Afrique de l'est, une colonisation quasi identique
sont autant des facteurs qui ont poussé voire même facilité
le Rwanda à s'intégrer à la communauté.
L'enclavement du Rwanda constitue un élément explicatif de taille
car il ne lui permet d'accéder à la mer et par conséquent,
l'importation et l'exportation deviennent difficiles. L'intégration
constitue donc une question de survie. Nos résultats montrent aussi que
compte tenu de l'étroitesse du pays et de l'explosion
démographique, le Rwanda connaît des problèmes de
densité élevée qui peuvent être résolus par
l'intégration comme l'a expliqué éloquemment E.Kodjo
(1985).
L'analyse des facteurs économico-politiques nous montre
que le contexte régionale, la politique nationale à travers la
vision 2020, la recherche de la sécurité et du marché
vaste, la suppression des barrières tarifaires et non tarifaires sont
autant de raisons économiques et politiques explicatives
d'intégration du Rwanda à la Communauté de l'Afrique de
l'Est. La situation qui prévaut dans la région c'est que les
organisations (notamment la CEPGL et l'OBK) auxquelles le Rwanda appartenait,
ne sont plus opérationnelles, la politique nationale du gouvernement
rwandais qui prône pour l'intégration régionale notamment
le pilier six de la vision 2020. L'intégration du Rwanda selon notre
analyse permet de résoudre pacifiquement le problème des conflits
frontaliers avec ses voisins tout en élargissant son marché
économique.
L'argument souvent utilisé dans la presse nationale
et internationale, selon lequel l'intégration du Rwanda à la
Communauté d'Afrique de l'Est et son retrait de la Communauté
Économique des États de l'Afrique Centrale est un symbole
d'enterrement du français au profit de l'anglais, doit être pris
avec précaution puisque le processus d'intégration date de
longue date. Il nous semble que les liens sont plus forts aujourd'hui avec
l'Afrique de l'est qu'avec les pays d'Afrique centrale.
La conclusion principale que nous tirons de ce mémoire
est que l'intégration du Rwanda à la communauté de
l'Afrique de l'Est est le résultat complémentaire entre d'un
côté les facteurs historico-géographiques et de l'autre
côté les facteurs économico-politiques. Autant que les
points communs tels que la langue, la culture, l'enclavement, le climat
stimule l'intégration des pays de l'Afrique de l'Est, autant ces
facteurs orientent les facteurs économico-politiques tels que nous les
avons expliqués.
En effet, il nous semble prématuré de dire que
l'intégration du Rwanda à la Communauté de l'Afrique de
l'Est produira des résultats positifs. Plutôt, il faut
considérer cette intégration comme une composante d'une
stratégie globale du Rwanda visant à inverser le cycle des crises
économiques et politiques auxquelles le Rwanda fait face. Le processus
actuel de relance de la CEPGL n'est -il pas un défi pour le Rwanda? Une
chose est certaine c'est que tant que les objectifs restent similaires entre la
CEPGL et la CAE, l'intégration du Rwanda à la CEA risque
d'être un échec. Cependant, il n'est pas question de
désespérer car cette adhésion peut contribuer à
stabiliser le pays au niveau politique et sécuritaire assurant ainsi les
bases d'un développement durable qui lui avait manqué depuis des
années.
En définitive, dans ce mémoire, nous sommes
conscients que notre mémoire n'aborde pas toutes les raisons de
l'intégration du Rwanda à la Communauté de l'Est et que
par conséquent nos conclusions restent partielles. L'analyse des
facteurs d'intégration du Rwanda à la Communauté de
l'Afrique de l'Est demeure encore le problème non encore
traité par la littérature. Aussi, nous n'avons pas non plus eu
la prétention de nous focaliser à analyser de manière
complète, ni de discuter tout le processus de la formation vers le
fédéralisme. C'est pour cela qu'en termes de ce mémoire,
une piste principale d'approfondissement se dessine. Les chercheurs sont donc
invités à explorer ce processus de la CAE vers l'union politique
en 2012.
Annexes
A. Guide d'entrevue (Deux agents du Ministère de
l'intégration du Rwanda à la CAE)
Quels sont les facteurs selon vous, à la base de
l'intégration du Rwanda à la CAE?
1. Historique
2. Géographique
3. Economique
4. Politique
B. Guide d'entrevue (Un cadre du Secrétariat de la CAE)
Quels sont les facteurs selon vous, à la base de
l'intégration du Rwanda à la CAE?
1. Historique
2. Géographique
3. Economique
4. Politique
Selon vous, y a-t-il une autre raison pouvant expliquer
l'intégration du Rwanda à la CAE ?
Si oui, laquelle ?
Bibliographie
1. Ouvrages
Békolo-Ebé (Bruno), Défis, enjeux et
perspectives pour l'Afrique à l'aube de l'IIIe Millénaire,
Leçon inaugurale, Rentrée solennelle des Universités du
Cameroun, Yaoundé, Ed.SA-RA, 1993.
Békolo-Ebé (Bruno), La Réforme de la
zone franche et les perspectives d'intégration en Afrique Centrale,
In Fiscalité et Intégration, Université de Libreville,
Presses Universitaires du Gabon, 1994.
Bourenane (Naceur), Des fondements théoriques
et stratégiques de la construction communautaire, in Réal
Lavergne (dir.), Intégration et coopération régionales en
Afrique de l'Ouest, Paris, Karthala, 1996.
Depelteau (François), La démarche d'une
recherche en sciences humaines : de la question de départ à
la communication des résultats, Québec, les presses de
l'Université Laval, 1998.
Deschamps (Chantal), L'approche
phénoménologique en recherche: comprendre en retournant au
vécu de l'expérience humaine, Montréal, Guérin
Universitaire, 1993, p.111.
Deslauriers (Jean Pierre), La recherche qualitative :
Guide pratique, Montréal McGraw-Hill Editeurs, 1991.
Deutsch (Karl Wolfgang), (sous la dir. de), Political
Community and the North Atlantic Area, Princeton, Princeton University
Press, 1957, p.46-56.
Florence, Histoire de l'Afrique de l'Est, Kampala,
Ouganda, 1998.
Gervais Lambony (Philippe), L'Afrique du sud et les
états voisins, Armand Colin, Paris, 1997, p.256.
Guthrie (Malcolm), The classification of Bantou
Languages, London, 1967.
Huberman (A.Michael) et Miles (B.Matthew), Data Management
and Analysis Methods. Handbook of qualitative research. Norman K. Denzin,
Yvonna S. Lincoln, éditeurs, Thousands Oak: Sage Publications, 1994,
p.428-443.
Lacoste (Yves), Dictionnaire de Géopolitique,
Flammarion, 1993, p.1680.
Lavergne (Réal), Intégration et
coopération régionales en Afrique de l'Ouest, Paris,
Karthala - CRDI, 1996, p. 406.
Lipsey (Richard), The Theory of Customs Unions: Trade
Diversion and Welfare, Paris, Economica, 1957.
Malkki (Lisa Helena), Purity and Exile: Violence, Memory,
National Cosmology among Hutu Refugees in Tanzania, Chicago, Chicago
University Press, 1994.
Mamdani (Mahmood) , When Victims Become Killers:
Colonialism, Nativism, and the Genocide in Rwanda, Princeton, Princeton
University Press, 2001.
Mayer (Robert) et Quellet (François),
Méthodologie de recherche pour les intervenants sociaux,
Boucheville, Québec, Edition, Gaetan Morin, 1991, p.537.
Meade (James Edward), The Theory of Customs Unions:
North Holland Publishing Company, 1956.
Meier (Gerd) , The International Economics of
Development, London, Harper and Row Publishers, 1968.
Mikessell (Raymond F), The Theory of Commons Market and
Developing Countries, in Robson, 1970.
Mucchielli (Alex) (dir.), Dictionnaire des
méthodes qualitatives en sciences humaines et sociales. Paris:
Armand Colin, 1996.
Myint (Han), Commerce internationae et PED,in
Samuelson, 1967.
Poupart (Jean), L'entretien de type qualitatif:
considérations épistémologique, théorique et
méthodologique. In : La recherche qualitative : Enjeux
épistémologique et méthodologique. Poupart, Des lauriers,
Groulx, La perrière, Mayer et Pires. Boucherville(Québec) :
Gaétan Morin éditeur, 1997, p.113-167.
Robson (Peter), International Economic Integration,
Penguin Modern Economic Readings, 1971.
Sader (Emir), Les défis de l'intégration
Latino - américaine, Alternatives, 2008.
Salih (Mohamed) and Markakis (John), `Introduction',
in Mohamed Salih and John Markakis, eds., Ethnicity and the State in
Eastern Africa, Uppsala, The Nordic Africa Institute, 1998.
Schutt (Daniel) , Le Mercosur : situation actuelle et
perspectives d'avenir, Montevideo, Uruguay, CEFIR).
Siroën (Jean - Marc), La régionalisation de
l'économie mondiale. Paris, La Découverte, 2004.
Turshen (Meredeth) and Twagiramariya (Clotilde),
«Favors» to Give and «Consenting» Victims: The Sexual
Politics of Survival in Rwanda', in Meredeth Turshen and Clotilde Twagiramariya
eds., What Women Do in Wartime: Gender and Conflict in
Africa, London, Zed Books Ltd, 1998.
Viner (Jacob), The Custom Union Issues, the Carnegie
Endorment for International Peace, 1950.
Wago (Jean - Baptiste ), L'Afrique face à son
destin: quel projet de développement en l'an 2000?, Paris,
Harmattan, 1997.
Zeleza (Tiyambe Paul) , A Modern Economic History of
Africa: Volume 1. The Nineteenth Century, Dakar, Codesria Book Serie,
1993.
2. Articles
Apuuli Kasaija (Phillip) «Regional Integration: A
Political Federation of the East African Countries?» African Journal
of International Affairs, Vol. 7, Nos. 1&2, 2004, p. 21-34.
Baruti (Kafele), «Pan Africanism and Development: The
East African Community Model», The Journal of Pan African
Studies, vol.2, no.4, June 2008.
Békolo-Ebé ( Bruno), «
L'intégration régionale en Afrique : caractéristiques,
contraintes et perspectives», Mondes en Développement, Tome
29-115/116-81, 2001.
Bollard (Alan) & Mayes (David),« Regionalism and the
Pacific Rim», Journal of Common Market Studies, Vol. 30, Juin, 1992,
p. 195-209.
Chrétien (Jean - Pierre), 1986. L'Afrique des Grands
Lacs existe-t-elle ? Tiers-Monde, Volume 27, Numéro 106, pp.
253 - 266
Cooper, C.A, Massell, B.F, «A New Look at Customs
Unions Theory», Economic Journal, vol.75, 1965.
Dos Santos (Theotonio) «Amérique du Sud - MERCOSUR
- Europe : un projet historique», 2002, consultée le 24
juillet 2009 au site
http://www.alterinfos.org/spip.php?article1344
EAC. Traité pour l'établissement de la
communauté de l'Afrique de l'Est, Volume 2144, I-37437.
Hine (Robert Charles), « Regionalism and the Integration
of the World Economy», Journal of Common Market Studies, Vol, 30, No,
2, 1992, p. 115-1 23.
Hurreil (Andrew), «Explaining the Resurgence of
Regionalism in World Politics», Review of International Studies,
Vol. 21, October, 1995, p.332-333.
Kennes (Walter), « Les PVD et l'intégration
régionale». ACP - UE n° 165, septembre - octobre, 1997, p. 64
- 67.
Mutabazi (Ngaboyeka),« Politique d'intégration
économique des pays des grands lacs : lecture d'un
échec», in Reconstruction de la République
Démocratique du Congo. Le rôle de la société civile,
Cahiers des droits de l'homme et de la paix en région des grands lacs,
vol. 1, n° 1, 2004, 116-127.
Newbury, (David), «Lake Kivu regional trade in the
nineteenth century», Journal des Africanistes, 2, 1980, p.6-30.
La Nouvelle Relève, «Le Rwanda n'est plus
membre de la CEEAC», No 625 du 11 au 17 Juin 2007.
Ochwada ( Hannington),« Rethinking East African
Integration: From Economic to Political and from State to Civil
Society», Africa Development, Vol. XXIX, No. 2, 2004, p.
53-79.
Percival (Debra), «Rebirth of the East African
Community», No. 157, 1996, p.24.
Primo Braga,C.A , Sadafi, R &Yeats,A., « Regional
Integration in the Americas: All Over Again», The World Economy, Vol.
17, No. 4, juillet,1994, p. 577-601.
Rosecrance (Richard), « Regionalism and the PostCold War
Era», International Journal, Vol. 46, No. 3, 616, 1991, p. 373-393
Rwengabo (Sebastiano),« Geopolitics, Economic
Considerations and East African Cooperation», In a Paper prepared for
the CODESRIA - APISA - CLACSO. International comparative Research workshop on
«Hegemony, counter - hegemony and alternative hegemony: Implications for
the south», Indonesia, 2008.
Sapir (André), « Regional lntegration in
Europem», The Economic Journal, Vol. 102, No. 41 5, novembre, 1992,
p.1491 -1506
Sdiott, J.J., « Trading Blocs and the World
Economy», The World Economy, Vol. 14, No. 1, mars, 1991, p. 1-1 7.
3. Rapports
Conférence Internationale sur la Région des Grands
Lacs, Programme d'Action Régional pour le Développement
Économique et Intégration Régionale, Juin 2006 (Rev.
30 août 2006).
CNUCED, Renforcer l'Intégration économique
régionale pour le développement de l'Afrique. Rapport de la
Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement,
Newyork et Genève, 2009.
Rapport de la Deuxième conférence des Ministres
Africains de l'Intégration, 2007.
4. Thèses et mémoires
Alassane (Mahamidou Douka.), Le rôle des acteurs sous
- régionaux dans l'intégration économique et
politique : l'étude de cas de la CEDEAO, mémoire IEP,
Toulouse, 2007.
Boguikouma (Martin), L'intégration régionale
en Afrique Centrale comme stratégie d'insertion dans le nouveau contexte
de mondialisation, Thèse de maitrise, Université d'Ottawa,
Canada, 1999.
Buberwa Kamala (Diodorus), The Achievements and challenges
of the New East African Community Cooperation, an open lecture, United
Kingdom, The Business School - University of Hull, 2006.
Dupreelle, M.K., La régionalisation en Afrique
orientale : Entre impératif de développement et dynamiques
politiques, Thèse pour le doctorant en sciences économiques,
Université des sciences et technologies de Lille, 2001.
Gagnon (Caroline), Appréciation esthétique
des équipements de transport d'énergie (réseaux des
pylônes). Thèse de PhD, Aménagement, Université
de Montréal, Canada, 2006.
Kabamba (Bob), Interregionalité des pays des Grands
Lacs africains. Élaboration d'un modèle d'intégration
régionale et son application à la région des Grands Lacs
africains, Thèse, Université de Liège, Belgique,
2000.
Monfils (Joël), La politique du Brésil en
matière d'intégration régionale, mémoire,
Université Laval, 1997.
Muhigira, (Jean Damascene), De la compréhension du
comportement des Entreprises Rwandaises face à
l'exportation, Université du Québec à Chicoutimi,
1991.
Mwaka Bwenge (Arsene), D'une CEPGL à une autre:
quelles alternatives dans les stratégies actuelles d'intégration
et de coopération pour le développement?, Université
de Kinshasa, Centres d'Études Politiques, 2006.
Ntumba Bukasa (Eric), La RDC et le processus
d'intégration des pays des Grands Lacs comme voie de sortie de la crise
sécuritaire régionale, mémoire ENA, France, 2009.
5. Sites internet
http://www.icglr.org/common/docs/docs_repository/321cepgl_fr.pdf
http://www.orinfor.gov.rw/DOCS/Pilitique15.htm
http://www.unctad.org/TEMPLATES/Webflyer.asp?docID=11632&intItemID=1528&lang=2
http://en.wikipedia.org/wiki/Southern_African_Development_Community#Challenges_facing_member_countries
Table des matières
Introduction..........................................................................................1
Chapitre I - La problématique de l'intégration dans
les Pays en Développement
(PED)...................................................................................................5
I.1. Problématique de l'intégration en
Amérique.................................................5
I.2. Problématique de l'intégration en Asie
.......................................................7
I.3. Problématique de l'intégration en
Afrique....................................................8
I.2.3.1. La
CEDEAO.................................................................................9
I.2.3.2. La
SADC....................................................................................11
I.2.3.3. La
CEPGL..................................................................................12
I.2.3.4. La
CAE......................................................................................13
Chapitre II - Cadre théorique de
référence......................................................16
II.1. L'adoption d'une
théorie......................................................................16
II.1.1. L'inventaire des
théories...................................................................16
II.1.1.1. La théorie classique
volontariste........................................................16
II.1.1.2. La théorie classique
instrumentaliste...................................................19
II.1.1.3. L'approche de la construction communautaire
privilégiant les actions de type
stratégique............................................................................................20II.1.1.3.1.
Une convergence des stratégies
nationales..........................................20
II.1.1.3.2. Une démarche progressive et
flexible................................................20
II.1.1.3.3. Le rôle de l'État et les
Organisations intergouvernementales.....................21
II.1.2. L'examen critique des théories
...........................................................21
II.1.3. L'adoption d'une théorie et son lien avec le
sujet de recherche......................22
II.2. Problématique, question de recherche et
hypothèses de recherche......................24
II.3. Opérationnalisation du cadre
théorique.....................................................27
II.3.1. La construction du
concept................................................................27
II.3.1.1.
Intégration..................................................................................27
II.1.6.2. Les
dimensions............................................................................30
II.1.6.3. Les
indicateurs.............................................................................30
Chapitre III - Méthodologie de
recherche........................................................33
III.1. La préparation du test
empirique...........................................................33
III.1.3. Observer
comment ?..............................................................................................35
III.2. La réalisation du test empirique (la collecte et
l'analyse des données)...............37
III.2.1.1. L'utilisation de
documents............................................................37
III.2.1.2. L'entrevue semi-dirigée via le
téléphone.............................................37
III.2.2. L'analyse et l'interprétation des
résultats..............................................38
III.2.3. Les difficultés
rencontrées................................................................42
Chapitre IV - Les facteurs historico-géographiques
d'intégration du Rwanda à la
CAE....................................................................................................43
IV.1. Aspects
historiques...........................................................................44
IV.1.1.
Langue.......................................................................................45
IV.1.2. L'expérience historique de
royaumes....................................................46
IV.1.3. Le berceau de
l'humanité.................................................................48
IV.1.4. Le contrôle
colonial........................................................................49
IV.1.5.
L'indépendance............................................................................49
IV.2. Aspects géographiques
Chapitre V - Les facteurs politico-économiques
d'intégration du Rwanda à la
CAE...................................................................................................53
V.1. La situation
politique..........................................................................53
V.1.1. La
CEPGL...................................................................................53
V.1.2.
L'OBK.......................................................................................53
V.1.3. Désenclavement du
Rwanda..............................................................54
V.1.4. La vision 2020 du gouvernement
Rwandais............................................56
V.1.5. La
sécurité...................................................................................58
V.2. Aspects
économiques........................................................................60
V.2.1. Un marché
vaste..........................................................................60
V.2.2. Suppression des barrières tarifaires et non
tarifaires.................................61
Conclusion.........................................................................................63
Annexes............................................................................................66
Bibliographie.......................................................................................67
Table des
matières.................................................................................75
Résumé...............................................................................................78
Résumé
Notre recherche porte sur les facteurs d'intégration du
Rwanda à la Communauté de l'Afrique de l'Est (CAE). Au plan
théorique et méthodologique, notre démarche vise d'abord
à dégager la problématique d'intégration des PED,
ensuite à esquisser le cadre théorique de
référence, enfin à construire un cadre
méthodologique.
Cette recherche a été réalisée
grâce à une analyse de contenu centrée sur
l'interprétation des mots clés révélateurs. Au
plan empirique, notre recherche souhaite tester l'approche théorique des
facteurs d'intégration sur un cas précis, soit
l'intégration du Rwanda à la CAE.
L'analyse des facteurs historico-géographiques nous
montre que les langues communes parlées en Afrique de l'Est,
l'expérience historique commune des royaumes de l'Afrique de l'est, une
colonisation quasi identique, l'enclavement et l'étroitesse du Rwanda
sont autant des facteurs qui ont poussé voire même facilité
l'intégration du pays à la communauté.
L'analyse des facteurs économico-politiques nous
révèle que le contexte régional, la politique nationale
à travers la vision 2020, la recherche de la sécurité et
du marché vaste, la suppression des barrières tarifaires et non
tarifaires sont autant de raisons économiques et politiques explicatives
d'intégration du Rwanda à la Communauté de l'Afrique de
l'Est.
Mots-clés : Facteurs,
intégration, Rwanda, Communauté d'Afrique de l'Est, PED
* 1 Traduction : est
confronté à des défis importants comme son
développement a été entravé par les
intérêts nationaux, asymétries internes, et les
différends entre les membres qui ont même été soumis
auprès de l'OMC. Les crises économiques de l'Argentine et du
Brésil, des dévaluations ultérieures et les
différends commerciaux ont été des défis politiques
du MERCOSUR.
* 2 Traduction : Depuis
le rétablissement de la Communauté en 1999, la communauté
a enregistré un certain nombre de réalisations. Les
réalisations sont entre autres le succès dans
l'établissement des organes de la communauté comme indiqué
dans le Traité de l'EAC, l'établissement de l'union
douanière de l'EAC, le renforcement d'une identité Afrique de
l'Est, l'harmonisation des politiques monétaires et fiscales,
l'amélioration des transports et des systèmes de communication,
le lancement de Commission du Lac Victoria et l'approfondissement de la
coopération dans différents secteurs
* 3 Traduction : La
communauté de l'Afrique de l'Est a subi des revers en raison de grandes
différences idéologiques et politiques. En 1977, le Kenya a
exigé d'avoir plus de sièges que l'Ouganda et la Tanzanie dans
les organes de prise de décisions. Les désaccords causés
par le Président Idi Amin de l'Ouganda, le socialisme tanzanien, le
capitalisme au Kenya.
* 4 Traduction :
Développement de la coopération entre les pays de l'ancienne
Communauté de l'Afrique de l'Est a été miné par des
divergences politiques. Les anciens dirigeants de la région - le
Président socialiste Julius Nyerere de LA Tanzanie, le Président
du Kenya pro-occidental, Jomo Kenyatta et le dictateur ougandais, Idi Amin ne
s'entendaient pas. L'effondrement final de la Communauté est-africaine,
qui a survécu pendant une décennie jusqu'à 1977, a
été provoquée par des désaccords sur les avantages
apportés par chaque Etat dans l'exploitation des services communs
régionaux tels que le transport aérien, les ports et les
télécommunications. Plus récemment, les divisions
politiques entre le Kenya et l'Ouganda ont entravé le travail de la
Commission permanente tripartite de l'Afrique de l'Est (1994) qui a
été mise en place afin de faciliter la voie à une
normalisation des relations entre les trois pays voisins.
* 5
Traduction : La triangulation est également venu à signifier
la convergence entre les chercheurs (accord entre les notes de terrain de
l'enquêteur et les observations d'un autre) et de la convergence entre
les théories.
* 6 L'entrevue a aidé
aussi à confirmer ce que nous avons trouvé dans les
documents.
* 7
Traduction : Alors que l'entrevue est soumise à des
problèmes de partialité, faible rappel, et une faible ou
articulation imprécise, une approche raisonnable est de corroborer des
informations provenant d'autres sources.
* 8 Traduction: La
sous-région de l'Afrique de l'Est qui comprend le Kenya, l'Ouganda, la
Tanzanie, le Rwanda et le Burundi possède un patrimoine historique
commun qui remonte à la période précoloniale. Durant les
temps précoloniaux, les gens se côtoyaient librement sans
inhibition et restrictions de frontières artificielles de lois
spécifiques aux pays, des échanges entre eux au sein de la
sous-région et au-delà. En outre, ils se marièrent et ils
s'entraidaient de diverses façons, notamment en participant aux
affaires politiques des communautés dans lesquels ils résidaient.
Certains commerçants arabes et Swahili de la région
côtière de l'Afrique de l'Est, par exemple, a créé
des chefferies et des royaumes dans des domaines aussi loin que les Grands Lacs
de l'Afrique orientale au XIXe siècle, et ce avant le colonialisme.
* 9 Traduction: Famille, clan
et les associations ethniques réels et touchés ont joué un
rôle important dans la fourniture de compétences commerciales, de
capitaux et de crédit, et l'information. Les commerçants ont des
alliances dans les pays étrangers par le mariage et la fraternité
de sang. Les carrières du célèbre swahili et les
commerçants Nyamwezi, notamment Tippo Astuce et Msiri qui ont
créé des empires commerciaux à Kasongo et à
Katanga, respectivement, ont été construits sur des alliances
avec les chefs locaux habiles ou des personnes formées sur le mariage ou
les liens de parenté fictive.
* 10 Traduction:
L'intégration pourrait permettre à la population de l'Afrique de
l'Est de résoudre le problème de l'insécurité qui a
continuellement secouée la vie politique de la région des Grands
Lacs.
* 11 Traduction: Une
nouvelle tentative vers l'intégration pourrait permettre aux citoyens de
la sous-région à se stabiliser, renforcer et réaliser le
plein potentiel de leurs ressources humaines pour le progrès et le
développement. Cela permettrait également d'atténuer le
problème des réfugiés, qui a fortement pesé sur le
processus de développement en Afrique de l'Est. En effet, les pays de
l'Afrique de l'Est ont dans le passé accueilli des
réfugiés en provenance du Rwanda, du Burundi, de l'Ouganda et de
la Somalie dans les différents camps dans la région. Dans
d'autres cas, les réfugiés et les immigrés se sont vu
refuser un emploi en raison de leur citoyenneté.
* 12 Traduction: L'exode des
paysans pauvres du Rwanda et du Burundi depuis le début des
années 1950, et qui forment environ 40 pour cent de la population de
l'Ouganda ou Banyamulenge de l'Est du Congo, ne seraient pas
considérés comme des étrangers ou des immigrés mais
comme des citoyens engagés à l'avancement des la
région.
* 13 Traduction:
L'intégration recommanderait plus de possibilité de
défense pour protéger les intérêts africains contre
l'empiétement par des étrangers. Il a soutenu que l'actuel petit
Etats africains individuellement, ne possède pas beaucoup de
capacité de défense.
* 14 Traduction: Les pays de
la Communauté de l'Afrique de l'Est ensemble avec le Rwanda et le
Burundi doivent fédérer politiquement afin de imposer le respect
des autres pays du monde. La fédération permettrait
également de renforcer leur pouvoir de négociation dans les
institutions multilatérales et bilatéralement.
* 15 Traduction: Les Etats
d'Afrique de l'Est imposeraient plus de respect du monde et un investisseur
serait plus attiré à investir dans un pays uni d'Afrique de l'Est
que dans l'Ouganda seulement à cause du plus grand marché que ce
premier offre.
|