UNIVERSITE DE YAOUNDE II - SOA
THE UNI VER SITY OF YA OUNDE II - SOA
FACULTÉ DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES
ECOLE DOCTORALE DISCIPLINAIRE DE SCIENCE POLITIQUE,
RELATIONS INTERNATIONALES ET COMMUNICATIONS
FACULTY OF LAW AND POLITICAL SCIENCE
DISCIPLINARY POSTGRADUATE SCHOOL OF POLITICAL
SCIENCE INTERNATIONAL RELATIONS AND COMMUNICATIONS
L'UTILITÉ D'UNE COOPÉRATION
TECHNIQUE AU SUD DU SAHARA : LE CAS DES RELATIONS
CAMEROUN-UNESCO
|
Mémoire présenté et soutenu en vue de
l'obtention du Diplôme d'Études Approfondies (DEA) en Science
politique A dissertation submitted in fulfilment of the class
requirements for the award of DEA in political science Par
: By : Gérard Martial AMOUGOU Sous la
direction de : Supervised by:
Fabien NKOT Ph.D. Chargé de
cours
Année Académique 2006-2007
I. CONSTRUCTION DE L'OBJET D'ÉTUDE
A. CONTEXTE ET JUSTIFICATION
L'idée d'une coopération intellectuelle à
l'échelon mondial émerge lors de la première
réunion de la Société des Nations (SDN) tenue en 1920, au
cours de laquelle est reconnue la nécessité d'un organisme
d'éducation en complément à l'activité politique
des gouvernements. Le caractère permanent de cet organisme
rattaché à la S.D.N. va s'affirmer à travers la
création par l'Assemblée de cet organe, le 04 janvier 1922, d'une
commission internationale de coopération intellectuelle appelée
à se réunir au mois de juillet de chaque année, dont la
présidence revient au philosophe français Henri BERGSON. C'est
ainsi que, par la suite, un institut international de coopération
intellectuelle va s'établir le 24 septembre 1924 à Paris, les
autorités françaises se chargeant de le doter d'un budget. Une
organisation technique de coopération intellectuelle est ainsi
créée, sa forme actuelle étant l'oeuvre d'une
résolution de la S.D.N datant du 24 septembre 1931.
Un fait remarquable à noter est que l'esprit de cette
coopération intellectuelle réussit à transcender le drame
provoqué par l'émergence de la deuxième guerre mondiale.
Telle est la signification de la tenue d'une Conférence des Ministres
Alliés de l'Education (CMAE) le 16 novembre 1942, dont l'objectif est
« d'étudier les plans pour la création d'une organisation
permanente qui pourrait être établie sur une base internationale,
dans le but de promouvoir la coopération en matière
d'éducation dans l'après guerre », ainsi que l'atteste la
lettre écrite par la CMAE au gouvernement des États-unis
d'Amérique. Ainsi de manière progressive, et sur proposition des
délégations et personnalités intellectuelles, l'on est
passé de l'organisation des Nations Unies pour la reconstruction en
matière d'éducation et de culture (UNECREC) à
l'Organisation des Nations Unies pour l'Éducation, la Science et la
Culture (UNESCO)1, en passant par l'Organisation des Nations Unies
pour l'Education et la Culture (UNECO).
La reconnaissance officielle de l'UNESCO comme institution
spécialisée des Nations Unies sera effective après le
dépôt par la Grèce du vingtième instrument de
ratification de l'Acte constitutif2. Bien plus, les États
signataires de l'Acte se proposent dans le préambule « d'atteindre
graduellement par la coopération des nations du monde dans les domaines
de l'éducation, la science et de la culture, les buts de paix
internationale et de prospérité commune de l'humanité en
vue desquels l'Organisation des Nations Unies a été
1 United Nations for Education, Science and Cultural
Organization
2 Conformément à l'article XV dudit Acte
qui dispose que « la présente convention entrera en vigueur
lorsqu'elle aura été acceptée par vingt de ses signataires
».
constituée... » Aussi, fut-il décidé
à l'unanimité lors de la troisième session de la
Conférence, que le siège de l'Organisation sera installé
à Paris ; le 06 décembre 1946, le biologiste britannique, Julian
HUXLEY devint le premier Directeur Général de l'UNESCO qui,
à ses débuts, comprenait cinquante et un Etats membres.
Le Cameroun va adhérer à l'UNESCO le 11 novembre
1960, date marquant la signature de l'Acte constitutif par les autorités
politiques camerounaises. Les deux parties vont dès lors entretenir des
relations particulièrement étroites, se matérialisant par
les réalisations de l'institution spécialisée au sein du
territoire national camerounais, et par l'action du Cameroun à l'endroit
de l'UNESCO, notamment à travers le placement en son sein de
ressortissants camerounais.
Aussi, de nos jours, l'UNESCO reste l'une des institutions
spécialisées des Nations unies prisées par les
autorités Camerounaises. En effet, si l'on s'en tient aux cinq
précédentes années, l'on observera que le Directeur
Général de l'UNESCO, M. Koïchiro MATSUURA a foulé
à deux reprises le sol camerounais, répondant ainsi aux
invitations du chef de l'État Paul BIYA. En retour, celui-ci, sur
invitation du même Directeur, a assisté à la
34ème Conférence générale de l'UNESCO
tenue en 2007 en son siège à Paris. Ces types de rencontres dont
l'importance diplomatique est fort considérable témoignent de
l'estime réciproque présentée par les deux parties. Elles
témoignent également des attentes mutuelles opérées
par les deux parties concernées. Qui plus est, la pluralité de
domaines d'activités de l'UNESCO met celle- ci en rapport avec la
quasi-totalité des départements ministériels camerounais ;
tandis que la consolidation des relations avec la société civile
serait une recherche constante. Ainsi le Cameroun représenterait un
pôle important de la projection de l'UNESCO en Afrique Centrale, le
Bureau de l'UNESCO de Yaoundé couvrant également le Tchad et la
République Centrafricaine. D'ailleurs la dotation récente (en
2008) par les autorités camerounaises d'un important édifice aux
représentants de l'institution spécialisée des Nations
unies, témoigne de l'intérêt et de l'importance
accordés par celles-ci aux activités de cette institution
technique au sein du territoire camerounais.
C'est que les relations Cameroun-UNESCO en tant que domaine
des relations internationales sont tenues de réaliser un certain nombre
d'objectifs à même de contribuer à la constitution de la
paix dans l'esprit des hommes. Lesquels projets de développement
permettraient de déterminer les types de visibilité qui en
conditionnent simultanément la perception abstraite ainsi que
l'appréhension concrète. Mieux, c'est par ces cadres pratiques ou
symboliques qu'il est possible d'évaluer la pertinence ou l'efficience
de la coopération. Exprimé autrement, la coopération
instituée au sein des deux institutions passe également par
la réalisation d'un certain nombre de projets de
développement ayant des « affinités électives
»3 avec l'instauration et la consolidation de la paix au sein
des populations. Dans le cadre de cette étude qui porte sur
l'évaluation de l'utilité d'une organisation technique au sein
d'un État membre particulier4, il convient au
préalable, tout en déterminant l'intérêt et la
délimitation, de rattacher l'objet de recherche à la
littérature spécialisée, afin de pouvoir en
déterminer les spécificités.
B. INTÉRET ET LIMITES DU SUJET.
1. INTÉRET HEURISTIQUE
Jusqu'ici, les travaux5 portant sur la
coopération entre le Cameroun et l'UNESCO minorent, pour l'essentiel,
l'impact que peut avoir cette coopération auprès des individus et
partant, sur la société camerounaise dans son ensemble. Aussi,
notre conviction est-elle que cette coopération serait plus efficace si
les initiatives prises à partir du « haut » sont
secondées et appliquées de manière concrète et
permanente sur le terrain, de telle sorte qu'elles reflètent les
aspirations profondes du peuple.
Par ailleurs, au moment où la nouvelle donne est
caractérisée par le processus de compression du temps et de
l'espace du fait des technologies de l'information et de la communication, de
renforcement et d'intensification de l'interdépendance entre
sociétés, où « il devient de plus en plus difficile
de faire de l'État la composante exclusive et souveraine du
système international » (Badie et Smouts, 1999 :12), la
sécurité de celui-ci devient de plus en plus fonction de celle de
l'individu. Mais parce que les « effets de vernacularisation et de
`'domestication» » du processus de globalisation remettent en cause
toute idée de village planétaire, les sociétés
étant prompte à réinventer leur différence ; et si
d'aucuns promettent un « bel avenir » au nationalisme (Jaffrelot et
Dieckhoff), alors la nécessité d'un partenariat réel et
efficace entre l'État et l'individu s'impose dans ce contexte «
turbulent » marqué par « la mobilité de plus en plus
aisée de l'individu », et où « le système
international tend à lui concéder des ressources
spécifiques qui en font peu à peu un acteur propre des relations
internationales, face à une tutelle de l'État sans cesse plus
relâchée et de moins en moins puissante » ( Badie et Smouts,
ibidem). Et même s'il n'est pas aisé de déterminer avec
exactitude la forme que prendra la société de demain, il demeure
néanmoins vraisemblable
3 A considérer au sens weberien comme facteur
prédisposant, par opposition au facteur mécanique
4 Parce que le Cameroun appartient à une
catégorie precise des États dits Pays en développement
(PED)
5 Nous avions analysé les plus importantes,
parce que scientifiques, dans la partie réservée à
l'état de la question.
qu'on aura toujours affaire à une «
société des individus », d'où la coopération
Cameroun- UNESCO, pour être pertinente est tenue d'accorder de
manière effective, une place centrale à l'individu. Mais si l'on
convient avec Bachelard que « le vrai sans fonction est un vrai
mutilé », c'est aussi et surtout parce que la science (ou recherche
de la vérité) doit se doubler de l'utilité. (Bachelard,
1986 : 94)
2. INTÉRET PRATIQUE.
L'objectif essentiel de l'UNESCO étant de construire
la paix dans l'esprit des hommes, il va sans dire que le grand public est au
centre de ces principes fondamentaux. Aussi, la réalisation des
objectifs relatifs au partenariat Cameroun-UNESCO passe-elle par un
véritable « contrat social » de coresponsabilité entre
les autorités nationales et internationales, la société
civile et le public cible. Ce qui améliorerait les performances de la
diplomatie camerounaise.
Bien plus, ce travail se veut également d'être
un outil didactique à la disposition des autorités publiques
nationales ou internationales et du profane ou autre personne privée
intéressée. Tant il ne fait aucun doute qu'une meilleure
compréhension de l'UNESCO, ainsi que du type de rapport qu'elle
entretient avec l'État, notamment subsaharien, permettrait à ce
dernier d'appréhender ladite institution au mieux de ses «
intérêts ».
3. LE CADRE SPATIO-TEMPOREL.
Terminus a quo : Notre travail
s'étendra sur la période allant de 1960 à 2008, afin de
mieux apprécier l'évolution de ladite coopération qui
débute avec la naissance de l'État au Cameroun. Toutefois, un
accent particulier sera accordé à la période allant de
1999 à 2008. En effet, 1999 marque l'entrée en lice de l'actuel
Directeur général, le revirement de la politique de l'UNESCO en
faveur de la décentralisation, ainsi que la redéfinition des
programmes de l'UNESCO en faveur de l'Afrique. Cette date rappelle
également la veille du forum de Dakar relatif à l'EPT, en
conformité avec les Objectifs Millénaires du Développement
(OMD), définis lors de l'Assemblée générale des
Nation unies tenue en 2000.
Terminus ad quem : Nos recherches couvriront
pour l'essentiel l'espace géographique de la province du centre. La
descente sur le terrain pourrait nous amener auprès des radio
communautaires de Sa'a et de mbalmayo ; mais également auprès du
site de Ngoksa, localité abritant le Centre de Ressources
Éducationnelles (CRE). L'objectif étant de
pouvoir en évaluer le fonctionnement et l'impact sur
les populations. Toute autre information sur les espaces éloignés
proviendra pour l'essentiel du bureau régional de l'UNESCO, de la
Commission Nationale pour l'UNESCO, et des différents sites internet
relatifs aux activités de l'UNESCO, ainsi qu'à sa
coopération avec le Cameroun.
4. LIMITES DANS LE SUJET.
La coopération entre le Cameroun et l'UNESCO couvre une
multiplicité, voire une `multiplexité' de domaines que nous ne
pourrions épuiser dans le cadre limité de cette modeste
contribution. Nous pensons toutefois que l'évaluation de la pertinence
de cette coopération nous conduit à nous intéresser
prioritairement aux projets « phares », principalement à
l'impact de certains programmes de financement relatifs à
l'éducation et à la communication. De manière plus
précise et dans la mesure où les deux domaines
susmentionnés sont concernés par une pluralité de secteurs
d'activités chacun, nos recherches s'appesantiront sur le processus
d'éducation pour tous issu du forum de Dakar, au niveau du
Cameroun, et sur le fonctionnement des radios rurales pour ce qui est de la
communication. A ce niveau encore, il nous sied pour une meilleure
précision, de centrer notre analyse sur la Scolarisation Primaire
Universelle (SPU) pour ce qui est de l'EPT, et de se concentrer sur les radios
communautaires des localités de Sa'a et de Mbalmayo, afin d'en avoir une
meilleure appréciation de l'impact au sein des populations riveraines.
C'est dire que l'idéal de limitation reste prioritaire.
La priorité accordée à une telle
limitation n'est pas uniquement le fait d'un besoin d'amélioration de
l'intelligibilité de l'action de l'UNESCO au Cameroun. C'est aussi qu'en
effet, toute connaissance manquant de précision, mieux « qui n'est
pas donnée avec ses conditions de détermination précise
n'est pas une connaissance scientifique ». Et pour l'auteur de la
formation de l'esprit scientifique, « une connaissance
générale est presque fatalement une connaissance vague. »
(Bachelard, 1986 : 72) Nonobstant ces aménagements, il reste tout de
même que l'on ne saurait faire table rase des autres secteurs
concernés par la coopération, compte tenu des liens
établis entre ceux-ci, ainsi que de leur transversalité
associée à la mise en congruence des différents acteurs -
agents engagés réciproquement dans un rapport fonctionnaliste et
interactionniste.
Autant dire que les autres domaines ne seront pas pour autant
délaissés. Car l'on ne saurait par exemple parler de la SPU sans
faire le lien avec les autres niveaux d'éducation, qu'ils fussent
formels ou informels. De même, le choix porté sur les
localités de Sa'a et de
Mbalmayo n'interdit pas un intéressement sur les autres
radios financées sous l'égide de l'UNESCO, et même sur
l'environnement communicationnel camerounais dans son ensemble. Dans le
même sillage, la science et la culture qui restent des thèmes
classiques, ainsi que les nouveaux domaines qui concernent les questions
liées aux droits de l'homme et au genre, seront mentionnés tout
au long de notre recherche, soit dans le cadre de l'éducation qui reste
un domaine transversal, ou encore au niveau du financement des projets. Enfin,
l'opérationnalisation des différents projets nécessite une
concertation permanente des fonctionnaires et spécialistes provenant
d'horizons diverses.
C. CONCEPTS ET ÉTAT DE LA QUESTION
1. CLARIFICATION CONCEPTUELLE
1-1. COOPERATION TECHNIQUE.
La coopération est définie de manière
laconique comme une action de participer à une oeuvre commune. Elle
suppose donc la collaboration, si ce n'est la coresponsabilité. Aussi,
serait-elle de plus en plus considérée dans le contexte
international comme une politique par laquelle un pays
(généralement du Nord) apporte son soutien au
développement des nations moins avancées.
Encore appelée assistance technique, la
coopération technique fournit en général des services
indépendants en matière de formation et d'expertise. Elle ne
nécessite pas d'autres apports ou d'autres types d'objectifs
précis tels que ceux définis par des projets matériel,
financier et humain, dans le domaine d'expertise de la partie donatrice en vue
de soutenir celle bénéficiaire dans son aspiration au
développement. Dans la perspective de Domergue, elle remplit une double
fonction : « elle peut d'une part aider à combler l'écart
entre le potentiel national de compétence technique et les besoins qui,
dans ce domaine, découlent des programmes de développement,
d'autre part, elle sert à renforcer et à compléter la
capacité nationale de formation de personnel qualifié. »
Aussi peut-on dire que la coopération technique renforce les effectifs
en même temps qu'elle apporte en qualité. (EVINA, 1982 : 72)
La coopération technique, de ce fait concerne un
domaine particulier, spécialisé, de l'activité ou de la
connaissance qui consiste en des applications de la connaissance
théorique,
dans le domaine de la production et de l'économie. On peut
de ce fait citer, entre autres, les conseillers techniques, experts sur le
terrain et les prestations matérielles.
Nonobstant ces indications, il importe de confesser un
léger penchant pour la conception réaliste qui voudrait
qu'à l'heure de la mondialisation, la coopération ne saurait se
définir comme une faveur qu'un État ou groupe d'État
accorde à un autre : elle sert les intérêts des
différentes parties (Kissinger, 2003). Ceci d'autant plus qu' « une
véritable coopération ne se limite pas à l'aide,
c'est-à-dire à l'octroi de flux financiers ou de projets de
développement du Nord vers le Sud », elle consiste plutôt en
« l'aménagement des règles (...) en vue de permettre aux
pays les plus faibles de trouver leur place dans des échanges
internationaux en forte croissance » (Brunel, 1997 : 4).
1-2. DÉVELOPPEMENT
Le développement est un concept polysémique qui
désigne sommairement « un accroissement dans le revenu moyen par
tête diffusé largement parmi les groupes professionnels et sociaux
qui dure au moins deux générations et devient cumulatif »
(Higgins) Dans son aspect formel et plus ou moins complète, il se
définit comme une configuration des mutations mentales et sociales
rendant une population apte à accroître cumulativement et
durablement son produit réel global. Mieux le développement
désigne un « changement des structures mentales et des habitudes
qui transforment les progrès particuliers en progrès tout social.
Cette conception qui est sans rappeler la vision d'Adam Smith, et qui
déborde assez la dimension économique, se retrouve
confirmée sous la plume de Nga Ndongo (1998) pour qui le
développement peut se concevoir comme un processus dynamique de
changement de l'environnement, naturel ou sociétal, en vue de la
transformation de l'humaine condition » (Mbida, 2006 : 23) Aussi, suivant
la catégorisation du sociologue camerounais, trois dimensions
principales se rattachent au développement : à savoir la
dimension quantitative, plus visible et se traduit par l'acquisition et
l'accumulation « d'une certaine qualité de biens ou par la
réalisation d'un certain nombre de performances économiques ou
sociales statistiquement mesurables » (idem) La dimension qualitative
intègre la donne culturelle, voire spirituelle à la notion. Le
développement compétitif enfin s'illustre de plus en plus dans le
nouveau contexte mondial marqué par une compétitivité sans
précédent, où la « survie » est fonction des
capacités d'adaptation et d'amélioration constante des
performances individuelles et/ou collectives. « Etre
développé (ici), c'est être à l'abris d'une
domination extérieure. Se développer, c'est agir pour sa
libération et son émancipation » (idem : 24)
Certains facteurs restent indispensables à
l'émergence du développement. Nga Ndongo en a
répertorié trois principaux6 que sont la raison, la
démocratie et la science ou technologie. Plus encore, Mc Clelland, dans
une perspective psychologique va également desceller une sorte de «
virus mental » baptisé Need for Achievement,
déterminant dans l'expansion sociale, économique et culturelle
des peuples. Il s'agit d'une posture, si ce n'est d'un état d'esprit
à même de pousser continuellement les hommes dans leur devenir
historique, à `bien' et à `mieux' faire qu'auparavant.
Plus fondamentalement, le concept de développement tel
que nous l'appréhendons dans le cadre de la coopération
instituée entre le Cameroun et l'UNESCO, devrait, tout en
préservant les dimensions sus évoquées, focaliser
davantage d'attention sur l'aptitude des acteurs sociaux (individuels ou
collectifs) à l'appréhender dans une perspective inclusive. Vu
sous un tel angle, le développement plutôt qu'une finalité
devient un moyen par lequel l'individu se réalise en tant qu'être
humain au plein sens du terme. Considéré ainsi comme un «
acteur actif » et non plus seulement comme une «
réalité passive » à l'égard de laquelle on
imposerait des « plans de sauvetage », l'individu désormais
placé au centre de tout processus de développement devient
potentiellement un acteur à part entière de l'Histoire. Il s'agit
en effet de la dimension anthropologique du développement qui postule
que les avis et aspirations des populations riveraines soient pris en compte
dans l'opérationnalisation des programmes de développement. C'est
ce que Massimo Tommasoli appelle « Le développement
participatif ».
Reconsidéré sous l'angle anthropologique, le
concept de développement va ainsi désigner « l'ensemble des
pratiques et des représentations sociales exprimées par des
sujets qui participent à des interventions de changement
planifié. » (Tommasoli, 2004 : 9) Cette définition semble
être la plus adaptée à notre étude dans la mesure
où « tous » les sujets impliqués à divers
échelons de la coopération Cameroun-UNESCO, peuvent s'approprier
des processus de transformation entraînés par elle. Le
développement participatif vise ainsi à « corriger une
contradiction de la coopération internationale selon laquelle le
rôle principal au sein des processus de changement programmé
serait confié à des planificateurs (hommes politiques, diplomates
et techniciens) dépositaires d'un savoir expert et non pas aux
protagonistes de ce changement » (idem : 10) Il s'agit au total d'un
regain d'intérêt sur les dimensions sociales du
développement et d'une réhabilitation du concept de participation
populaire dans les rhétoriques des acteurs de la coopération
internationale.
6 Qualifiés de « provincialistes »
par Roger Patrick Mbida.
2. ÉTAT DE LA QUESTION
2-1. LA PORTÉE DES TRAVAUX MAJEURS7
PORTANT SUR LA COOPÉRATION CAMEROUN-UNESCO
Raymond EPOTE (1976) est le premier à s'être
intéressé aux activités de coopération technique de
l'UNESCO au Cameroun. Son étude porte sur trois projets
spécifiques, à savoir : L'institut de pédagogie
appliquée à vocation rurale (IPAR-Yaoundé) ;
IPAR-Buéa ; institut national sur l'éducation (INE). Aussi,
parvient-il à un bilan mitigé des projets du fait de l'absence de
coordination au niveau de l'évaluation par les différentes
parties (UNESCO, PNUD et Cameroun), des problèmes institutionnels et la
carence d'une main d'oeuvre qualifiée. Surtout, l'auteur insiste sur le
fait que ces limites viennent se greffer autour d'un problème central
qui est celui de la difficulté des autorités camerounaises
responsables de l'éducation à montrer comment la philosophie de
la ruralisation de l'enseignement devra se traduire au sein des projets et
quelles méthodes précises devront être utilisées
pour rendre cette philosophie effective et opérationnelle. D'où
les experts UNESCO détachés sur le terrain évolueront en
dents de scie.
Jacqueline Toumba Kotto (1999) dans un rapport de stage de
D.E.S.S8 effectué au bureau sous régional de l'UNESCO
de Yaoundé, part d'une perspective historique et évolutive de la
coopération pour relever progressivement les nouveaux enjeux et champs
d'activités de cette coopération qui, globalement semble produire
des « résultats encourageants ».
MENYE ONANA Perpétue Félicitée (2003)
s'intéresse sur la préparation de la 32ème
session ordinaire de la Conférence Générale de l'UNESCO
par le Cameroun. Ici, l'auteur dans une perspective réaliste justifiera
sa démarche par le fait que « l'objet de l'étude de la
diplomatie et plus particulièrement l'étude de la théorie
des relations internationales, pour les étudiants des pays en
développement, est de chercher à changer l'environnement
international en la faveur de leur États ». Et le plus souvent,
cette entreprise se réalise par le biais de la « diplomatie
multilatérale au sein des organisations internationales ». (MENYE
ONANA, 2003 : 2). Plus précisément, il s'agit de voir comment le
Cameroun prépare la Conférence Générale de l'UNESCO
sous le prisme de son intérêt national, afin d'améliorer sa
visibilité diplomatique.
7 Il s'agit pour l'essentiel des travaux
universitaires, les revues et rapports provenant des instances
concernées ayant été délibérément mis
de côté, du fait de leur portée scientifique relative.
8 Diplôme d'Etudes Supérieures
Spécialisées
Au terme de son analyse, l'auteur tirera un avantage certain
dans l'acquisition d'un savoir opérationnel en diplomatie
multilatérale, même si elle relèvera une insuffisance des
moyens de communication humains et matériels alloués à la
commission nationale et à la Délégation Permanente, ainsi
qu'une absence de collaboration étroite au niveau du Cameroun.
Globalement, les différents travaux
sus-évoqués ont le mérite d'appréhender les
relations Cameroun-UNESCO dans un aspect bien spécifique qui, de ce
fait, en améliore l'intelligibilité.
Le mérite de Raymond Epote est d'avoir mené un
travail de terrain, d'où la portée empirique est
considérable. Toutefois, l'auteur semble moins s'intéresser aux
dysfonctionnements existants au sein de l'UNESCO même, problèmes
qui sont parfois communs à toutes les Organisations internationales.
Ensuite, il ne met pas véritablement en relief les raisons profondes qui
peuvent expliquer l'absence d'une plate-forme philosophique au sein des
pouvoirs publics camerounais. Enfin, il reste assez muet sur la clarification
de ce qu'il appelle « l'aspiration profonde des populations camerounaises
».
Jacqueline Toumba Kotto de son côté aborde les
relations Cameroun-UNESCO à partir d'une approche « historiciste
». Ce faisant, l'auteur appréhende l'organisation de ses origines,
afin de mieux évaluer son rôle dans un bureau hors siège.
Mais il s'agit moins d'un travail scientifique, qu'une exposition empreinte de
généralités, sans investigation profonde, des informations
sur l'UNESCO et de sa coopération avec le Cameroun. Ce d'autant plus que
« le résultat des différents travaux et études
effectués pendant le stage, (doivent rester confidentiels) » !
Menye Onana Perpétue, enfin semble scruter l'action du
Cameroun dans l'UNESCO sous le prisme de l'intérêt national
camerounais. Ce faisant, elle s'inscrit dans la veine réaliste qui,
à son avis, est plus que jamais nécessaire dans un contexte de
coopération multilatérale. Cependant, elle semble parler de l'
« intérêt national » sans spécifier la notion
dans son contexte actuel. Car autant il est vrai que l'intérêt
national nécessite une reconsidération dans la conjoncture
actuelle, autant il n'a pas exactement la même signification au sein des
« pays en développement », tant il est vrai que les
études menées en politique comparée y relèvent des
trajectoires spécifiques, et parfois contradictoires (Gazibo, Badie).
De façon globale, ces différents travaux
semblent moins s'appesantir sur l'impact du contexte international dans
l'appréhension des relations Cameroun-UNESCO. En plus, le rôle
joué par l'individu est minoré lorsqu'il n'est pas simplement
ignoré ; d'où notre objectif
d'appliquer la méthode de la sociologie des organisations
à cette étude qui s'inscrit également dans la
littérature spécialisée des organisations
internationales.
2-2. LA COOPERATION CAMEROUN-UNESCO ET THEORIE DES
ORGANISATIONS INTERNATIONALES
L'intérêt porté aux Organisations
internationales est sans cesse grandissant, au regard des attentes
opérées à leur égard. On pourrait, sans
prétention à l'exhaustivité, citer la gestion des
problèmes de coordination dans la fourniture des biens publics mondiaux,
la santé, l'environnement, la paix. Elles permettent de définir
et stabiliser les droits de propriété des acteurs internationaux,
opèrent un minimum de redistribution des ressources à
l'échelle planétaire en dispensant une assistance technique, une
aide financière (Smoots et al..., 2006 : 405) Des demandes analogues
sont adressées à l'UNESCO dans le cadre de la protection du
patrimoine culturel mondial, de l'éducation de la santé, de la
communication, la science et les droits de l'Homme. C'est qu'une
pluralité d'activités relevant de ces différents secteurs
est opérationnalisée au sein des pays sous l'égide de
l'UNESCO qui, de ce fait est perçue comme un rempart contre les
aléas du système international issus de `l'anarchie hobbesienne'.
C'est pratiquement tous les aspects de la vie humaine qui relèvent peu
ou prou de sa compétence. D'où bon nombre de théories se
sont penchées sur la dynamique des organisations internationales. Dans
le cadre strict de notre objet d'étude, le fonctionnalisme de David
Mitrany semble le plus apte à poser la grille d'analyse la plus
convenable à l'étude de la coopération entre le Cameroun
et l'UNESCO.
David Mitrany qui en 1943 va publier A Working Peace
System, incarnera le fonctionnalisme, héritier de la
tradition fonctionnaliste. Théorie empirique mise en oeuvre par des
praticiens internationaux, elle se propose de renverser la tendance
internationale où chaque État était
considéré comme un « loup » par l'autre, afin
d'atteindre le stade de la « paix perpétuelle » chère
à Kant. Pour y parvenir, il était question de détourner
l'attention portée sur les États pour atteindre l'Homme. Ce
faisant, Mitrany substitua aux critères de la sécurité et
de l'intérêt qui sont flous et font généralement
l'objet des interprétations contradictoires, les critères de
paix, de bien-être et de participation comme finalité par
excellence de l'action internationale. Dès lors, des fonctions nouvelles
et précises vont de ce fait être envisageables en vue de
«développer le rôle et les attributions d'organisations
internationales fonctionnelles, seuls acteurs en mesure de remplacer
la confrontation par la
coopération ». Une telle approche très
technicienne de la vie internationale brillait de par sa progressivité
et son empirisme (ibidem : 96).
Toutefois, l'on observe que l'évolution de la
coopération avec les organisations internationales en Afrique
n'obéit véritablement pas au schéma tracé par les
adeptes de la théorie fonctionnaliste. Parce que les Pays en
développement (PED) sont des bénéficiaires de l'assistance
technique internationale, parler de la coopération Cameroun-UNESCO,
c'est également parler de l'assistance technique de l'UNESCO. Or le
principal défaut de ce courant de pensée, à en croire
Jean-Jacques Roche, c'est la prétention irréversible d'un tel
processus qui préconise le primat de la « nécessité
» sur la volonté politique, l'union politique devant
nécessairement être la résultante automatique de l'union
économique. (Roche, 2001 : 98) Pourtant, une lecture attentive des
régimes politiques sub-saharienne semble indiquer que l'État
n'est pas vraiment prêt à partager sa souveraineté, ciment
par excellence de sa revendication du monopole de la contrainte. De même
en Afrique tout comme ailleurs, « la dimension politique de la
coopération et son autonomie apparaissent souvent comme des facteurs
essentiels », certaines agences des Nations unies réputées
plus `fonctionnelles' et les plus techniques comme l'Unesco et l'Organisation
internationale du travail ont souvent été politisées
» (Smoots et al..., op.cit : 238).
Mais tout de même, le mérite de cette double
école qui se distingue du réalisme comme de la simple
coopération intergouvernementale, ressortit du fait qu'elle se
présente comme « des méthodes de découverte et
d'apprentissage d'un vouloir vivre en commun des États » (Roche,
op.cit : 99) C'est dire que l'émergence des institutions internationales
obéit à une volonté de créer un cadre favorable
à l'accession aux solutions « rationnelles » à travers
un effort de « dépolitisation » de certains enjeux.
Finalement, en dépit des critiques portées aux idées
fonctionnalistes et néo-fonctionnalistes, force est de noter que Mitrany
lui-même « a dû reconnaître en 1946 que l'Organisation
des Nations unies ne correspondait pas autant qu'il le souhaitait à ses
idées, sauf pour ce qui concernait les agences
spécialisées » (Smouts et al, idem : 238), à l'instar
de l'UNESCO ! L'exploration de la pertinence de la thèse de Mitrany dans
un État sub-Saharien va ainsi constituer le socle de notre
problématique.
D. DE LA PROBLÉMATIQUE
1. POSITION DU PROBLEME
Raymond Quivy affirme qu' « une recherche est par
définition quelque chose qui se cherche. » (Quivy, 1995 :21) Une
telle assertion pourrait se vérifier dans le cadre de notre
investigation sur les relations établies entre le
Cameroun et l'UNESCO qui, nous confrontent à une réalité
quelque peu ambiguë. C'est qu'aux yeux de ses principaux acteurs, (tant du
Cameroun que de l'UNESCO) il ne fait aucun doute que le Cameroun et
l'Institution spécialisée des Nations unies entretiennent une
« coopération fructueuse ». Paradoxalement la population
camerounaise semble « minorer », lorsqu'elle « n'ignore »
pas simplement l'utilité de l'UNESCO au sein du territoire national.
Autrement exprimé, cette coopération, de l'aveu des ses
promoteurs, connaît « une faible visibilité », si ce
n'est une vulgarisation assez limitée auprès des populations.
Pour étayer leur argumentaires, les promoteurs notent le fait que le
Gouvernement camerounais bénéficie d'un nombre assez important de
projets financés sous l'égide de l'UNESCO au sein de son
territoire, signe de la reconnaissance des « bons » rapports
établis entre les deux institutions. (Voir supra) «
Coopération exemplaire » également dans la mesure où
le Cameroun contribue au fonctionnement quotidien de l'UNESCO à travers
le payement de ses contributions, ainsi que par son action appréciable
au sein des différents organes de l'institution
spécialisée.
Ainsi, lors de son Discours d'ouverture à l'occasion de
la quatrième Conférence des Commissions Nationales pour l'UNESCO
de la région Afrique tenue à Yaoundé du 2 au 6 juin 2003,
le Premier Ministre camerounais, Peter MAFANY MUSONGUE acclamait avec
fierté la coopération avec « cette Organisation (...)
concrétisée jusque-là par un grand nombre d'actions
». Sur invitation du Chef de l'État camerounais, Monsieur
Koïchiro MATSUURA, Directeur Général de l'UNESCO en visite
officielle au Cameroun du 15 au 17 janvier 2004, dans son discours d'ouverture
ne manquera pas d'adresser ses remerciements pour la « coopération
fructueuse que le Cameroun entretient de longue date avec l'UNESCO et pour son
engagement personnel en faveur de la paix et d'une diplomatie de
proximité ». A l'ouverture de la Conférence des Ministres de
l'Éducation des États membres de la Communauté
Économique et Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC), tenue
à Yaoundé du 16 au 17 janvier 2004, le Pr. Joseph OWONA, Ministre
de l'Éducation Nationale et président de la Commission Nationale
de la République du Cameroun pour l'UNESCO, va à son tour dresser
une ébauche de bilan de la coopération Cameroun-UNESCO : «
Les relations que le Cameroun entretient avec l'UNESCO sont aussi vieilles que
le Cameroun même en tant que nation indépendante. C'est en effet
dès 1960 que le Cameroun a adhéré à l'UNESCO.
Depuis lors, cette Organisation se tient à nos côtés, dans
les domaines de sa compétence, pour aider notre pays à s'affirmer
comme nation libre et responsable de son destin, mais aussi comme nation du
savoir, de la science et de la paix ». Plus récemment le 23 octobre
2007 à Paris, le Chef de l'État camerounais dans son discours
tenu devant la 34ème Conférence générale
de
l'UNESCO, suite à « l'aimable invitation »
à lui adressée par K. MATSUURA, va reconnaître que : «
le Cameroun et l'UNESCO entretiennent une coopération fructueuse et
exemplaire ». Autant d'exemples qui sont là pour nous
révéler que des relations Cameroun-UNESCO seraient positives aux
yeux de ses promoteurs institutionnels, ainsi qu'ils le mentionnent au fil des
années, dans leurs discours respectifs9.
Le discours politique, bien que n'étant
forcément pas « cet instrument docile et transparent grâce
auquel la réalité des « choses » se laisserait
percevoir. », tout au moins reste t-il producteur de sens en ceci qu'il
« construit le monde social autant qu'il le reflète » (Le
Bart, 1988 :3, 5). Et si « le monopole de la parole légitime,
poursuit Le Bart, n'équivaut pas au droit de dire n'importe quoi »,
c'est parce qu'aux yeux de notre auteur, le discours signifie et fabrique une
vision commune de la réalité (idem, 10 et 31). Or si l'on reste
dans la perspective de la perception par le haut de la coopération
Cameroun-UNESCO, il n'est pas rare d'observer des regrets provenant des
mêmes personnalités qui se plaignent néanmoins de la faible
appropriation de la coopération par les masses, sinon de leur
insensibilité vis-à-vis de celle-ci. Aussi peut-on lire ici et
là :
« Cette coopération, au-delà des structures
traditionnelles de coopération, au-delà de la participation du
Cameroun aux activités traditionnelles de l'Organisation a connu des
faits marquants (qui)... ne sont malheureusement guère connus du grand
public Camerounais », regrette le Secrétaire Général
de la Commission Nationale de la République du Cameroun pour l'UNESCO,
Barthélémy MVONDO NYINA. Ou encore : « Il ne reste plus
qu'à sensibiliser le peuple camerounais qui n'est pas au courant de ces
grandes réalisations... », renchérira cette autre
autorité camerounaise habituée de la coopération
internationale10. Aussi pouvons nous dire sans grand risque de se
tromper que c'est fort de ce constat que les autorités camerounaises, de
concert avec les partenaires financiers internationaux, vont organiser un
séminaire portant entre autre sur le renforcement de la
visibilité des relations Cameroun-UNESCO. Ce
séminaire11, financé sous fond japonais pour
l'essentiel, va s'étaler sur une semaine entière (septembre 2007)
de sensibilisation du public de Yaoundé et de ses environs sur le bien
fondé de cette coopération.
9 Cette vision ultra positive de cette
coopération revient régulièrement dans les discours de
l'actuelle ministre de l'Education de base et Présidente de la
Commission camerounaise pour l'UNESCO, HAMAN ADAMA ; vision que partagent
également les fonctionnaires internationaux travaillant au sein du
Bureau régional de l'UNESCO, dont leur plus haut représentant
Bernard HADJAD
10 Il s'agit de Henri Matip Ma Soundjok,
Président du Conseil National de la Francophonie (CNF), dans une
interview accordée au quotidien `Demain le Cameroun', N°009,
novembre 2007, pp. 8-9.
11 Saluons à cet effet l'action
discrète, mais essentielle du diplomate camerounais Charles Assamba, qui
est à la base et à la mise en oeuvre de ce projet.
Ce qui précède nous laisserait
légitimement penser qu'il existerait une sorte de hiatus entre les
activités menées par l'UNESCO au Cameroun, et l'attitude du
public qui représente la finalité, si ce n'est la raison
d'être de cette coopération. Or, de l'avis du Directeur
Général de l'UNESCO, « l'épreuve de
vérité reste, bien entendu, ce que perçoivent
concrètement les populations dans leur vie quotidienne et qui est,
aujourd'hui, encore beaucoup en deçà des attentes ».
Lesquelles attentes devraient être à la mesure de la mission
confiée à l'Organisation dont l'action touche une panoplie de
domaines dont les principaux sont relatifs à l'éducation, la
communication, la science et la culture. Tandis que l'environnement et les
droits de l'Homme relèvent progressivement du nouveau champ de
l'UNESCO.
C'est que les pays africains n'ont pu investir suffisamment,
et ce jusqu'à ce jour, dans la recherche-développement
scientifique et technologique, ni dans les infrastructures humaines et
institutionnelles en matière de science et de technologie12.
Qui plus est, la vulgarisation de l'éducation dans tout l'étendu
du territoire est une préoccupation constante des autorités
camerounaises qui préexiste au forum de Dakar, et la sempiternelle
question de son adéquation au contexte interne, lui même en
interaction avec l'environnement international et/ou, à l'esprit du
temps, garde entièrement sa pertinence.
Car l'actuelle configuration des relations internationales
fait état d'une conjoncture dominée par une situation
d'interdépendance complexe, où l'État, bien que demeurant
un acteur primordial, doit désormais compter avec les autres acteurs non
moins importants à l'instar des firmes multinationales, des
Organisations Non Gouvernementales (ONG), des Organisations Internationales
(OI), et même les individus. De même, il va sans dire que
l'appréhension des notions telles que « l'intérêt
national » et la « puissance » devrait tenir compte de cette
nouvelle donne. Aussi, est-il permis d'observer cette complexité du
système international dans le cadre des relations établies entre
le Cameroun et l'UNESCO qui, bien que n'étant pas un bailleur de fonds
et encore moins une institution opérationnelle doit « pourtant
veiller à ce que l'éthique mondiale en matière de paix, de
justice et de solidarité par le biais de la coopération
internationale dans les domaines de l'éducation, de la science, de la
culture et de la communication soit à la fois moralement observée
et appliquée de manière tangible. »13 C'est dire
que la coopération Cameroun-UNESCO est tenue d'atteindre les objectifs
sus-mentionnés, le financement se devant de produire son impact
auprès des populations cibles.
12 Ce constat est également fait par les
membres de la Commission nationale camerounaise pour l'UNESCO, dans un document
rédigé en 2005, portant sur les faits marquants et
opportunités de cette coopération.
13 Tirée de l'allocution prononcée par
K. MATSUURA lors de son investiture en 1999
Mais plus fondamentalement, au-delà de cette
coopération dont le bilan semble être positif aux yeux des hauts
responsables du Cameroun et de l'UNESCO, l'on parvient tout de même
à s'interroger sur l'utilité de la coopération technique
au sud du Sahara. Exprimé autrement, peut-on réellement concevoir
que l'assistance technique proposée par l'UNESCO dans ses rapports
institués avec « l'État au Cameroun », puisse
véritablement contribuer au développement de la
société camerounaise?
2. HYPOTHESES.
Deux propositions de réponse à la question centrale
posée, participent de l'hypothèse matricielle, compte tenu de
leur nature complémentaire.
C'est que les organisations internationales à
caractère technique, dont l'UNESCO, demeurent des cadres propices
à la satisfaction des besoins des populations. En cela, les
thèses de Mitrany restent indispensables au regard des
réalités propres aux sociétés africaines.
Cependant une observation attentive de la traduction
concrète des programmes de développement au sein de l'État
camerounais permet de déceler des difficultés d'atteinte des
objectifs fixés dans le cadre du financement des projets de
développement par les différents acteurs14.
II. CONSTRUCTION DE LA DÉMARCHE
A. APPROCHES THÉORIQUES
Les Relations internationales, dans la perspective de Dario
Battistella, sont considérées comme étant une discipline
pluraliste, au sein de laquelle coexistent une multitude de théories
(Battistella, 2006 : 111). Mais seules celles ayant un lien direct avec notre
objet d'étude, nous intéresseront ici. En cela, l'on notera avec
Houchang que la permanence des théories classiques et leurs
dérivés est un signe des temps. Et nonobstant l'affirmation de
Dougherty et Pfalzgraff selon laquelle les théories des relations
internationales sont en mutation constante,
14 Qui peuvent être de nationalité
camerounaise ou non, fonctionnaires internationaux pour l'essentiel, mais aussi
nationaux en ce sens que les logiques opérationnelle et transactionnelle
des relations Cameroun-UNESCO autorisent que la résolution des
problèmes concrets s'effectue dans la satisfaction des
intérêts conjugués du Cameroun et de la communauté
internationale.
poursuit-il, l'on « assiste à une remarquable
continuité dans la référence aux paradigmes classiques
comme cadre d'analyse dans la littérature sur les relations
internationales »15
1. LA COOPÉRATION INTERNATIONALE SOUS LE PRISME DU
RÉALISME.
Considéré par d'aucun comme le paradigme
dominant des Relations internationales depuis la fin de la deuxième
guerre mondiale, le réalisme s'inscrit dans une tradition philosophique
qui remonte à l'antiquité, et dont les principaux chefs de file
sont Thucydide, Bodin, Machiavel, Hobbes, Weber, Morgenthau, Aron et Kenneth
Waltz, pour ne citer que ceux-là. Pour ces auteurs, la quasi inexistence
au sein des Relations internationales d'une puissance capable d'empêcher
les conflits, explique l'état d'anarchie dans lequel se trouve la
société internationale, synonyme d'état de guerre entre
les principaux acteurs ou groupes de conflit que sont les États-nations
incarnés dans le détenteur du pouvoir exécutif, qui
cherche à maximiser l'intérêt national défini en
terme de puissance. Au sein de cette école également, les
différents auteurs semblent s'accorder sur la nécessité
d'équilibrer les puissances, même s'il existe des divergences sur
sa forme qui peut être bipolaire, unipolaire ou multipolaire.
Mais ce qui relève de la constance, c'est le fait que
les adeptes de la théorie réaliste conçoivent les
relations internationales sous le prisme de la puissance et de
l'intérêt. Et pour ces derniers, l'État reste l'acteur
principal des relations internationales où toute action entreprise
au-delà des frontières nationales ne concourt qu'à
affirmer sa politique de puissance, ainsi que la préservation de
l'intérêt national (Morgenthau, Aron).
Il devient de ce fait plus aisé de comprendre que la
lecture réaliste de la coopération institutionnelle au sein des
organisations internationales « désigne la coopération entre
États qui se développe par l'entremise d'institutions
internationales spécialement créées à cet effet,
à vocation permanente, ayant pour objet de les aider à
entreprendre certains activités définies ». (Sur, 2000 :
277). L'approche réaliste de la coopération internationale minore
considérablement l'autonomie des organisations internationales qui
« ne peuvent faire que ce que les États leur permettent et que ceux
à quoi ils concourent », car toute proportion gardée, «
il s'agit beaucoup plus d'institutions interétatiques et même
intergouvernementales que de la mise en oeuvre d'une dynamique autonome »
(idem : 279). Qui plus est, la limitation de leur moyen d'action est le reflet
de leur déficit d'autonomie, car les institutions internationales «
tirent leurs compétences des États membres, qui sont les
destinataires ordinaires des mesures qu'elles adoptent » (idem, 286).
15 In Revue Études internationales, Vol XXXIV,
n°2, juin 2003
La vision réaliste, pour être pertinente n'en
regorge pas moins des insuffisances dans la mesure où l'anarchie
internationale en dépit d'absence de puissance régulatrice, ne
signifie pas désordre et immaturité de la société
internationale. En outre, le retrait au sein de l'UNESCO, des nations telles
que les Etats-Unis, la Grande Bretagne et même l'Afrique du Sud, pour des
raisons d'incompatibilités idéologiques et/ou politiques,
participe, sinon la consolidation de l'autonomie de l'Organisation, du moins de
sa recherche constante. Enfin, c'est pour aller à l'encontre du courant
réaliste que les libéraux analysent la coopération
internationale dans une toute autre perspective.
2. QUID DE LA THÉORIE LIBERALE
La théorie libérale, à l'opposée
du réalisme, reflète de manière significative les
idéaux de l'UNESCO qui se propose d'atteindre progressivement les buts
de « paix perpétuelle » (Kant), par le biais de la
coopération intellectuelle entre les pays membres. L'on pourrait
même affirmer que l'héritage philosophique (Erasme, Grotius, Kant,
etc..) duquel est issue la théorie libérale est à
l'origine de l'émergence des Institutions internationales. En effet, la
croyance en la possibilité de moraliser les relations entre
États, renforcée par la pensée philosophique empreint de
pacifisme, la croyance en l'analogie entre l'ordre interne et l'ordre
international, et la transitivité entre comportement interne et
comportement international, constituent leur leitmotiv.
Aussi des trois principaux courants libéraux, à
savoir les libéralismes républicain, commercial et
institutionnel, seul ce dernier s'inscrit véritablement dans le cadre de
notre travail dans la mesure où le « pouvoir stabilisateur »
des Institutions internationales renforce « en l'institutionnalisant, la
coopération entre les Etats » (Amélie Blom et
Frédéric Charillon, 2001 : 32). Et contrairement à la
perception réaliste qui renie toute autonomie aux organisations
interétatiques et aux entités non étatiques, sous le
prétexte qu'ils n'agissent au mieux que par l'entremise des
États, les libéraux affirment plutôt que la
coopération institutionnelle à l'échelon international
« permet à la fois de remettre en cause la centralité de
l'Etat, tout en offrant une représentation du monde où la force
n'est plus omniprésente » (Roche, 2001 : 87).
Toutefois, cette théorie, parce qu'elle demeure «
stato-centrée » pour l'essentiel, minore relativement l'incursion
des autres acteurs non étatiques dans le système international ;
en même temps qu'elle surestime le poids des Organisations
internationales
dans un contexte où l'intérêt national reste
prédominant. C'est pourquoi elle sera quelque peu dépassée
par des théories dites postmodernistes, à l'instar du
transnationalisme.
3. L'APPROCHE TRANSNATIONALISTE.
D'inspiration sociologique, la vision transnationaliste en
dépit des affinités qu'elle entretien avec le courant
libéral est considérée par plusieurs théoriciens
comme un courant à part entière des Relations internationales. En
effet, l'appréhension du contexte social transnational comme une
variable indépendante des relations internationales, et la conception
des individus comme acteurs autonomes, constituent le leitmotiv de ce courant
de pensée. Aussi, ses principaux adeptes que sont Kaiser,
Kéohane, Nye, Smouts et Badie, vont mettre un accent particulier sur le
concept d'interdépendance complexe qui le plus caractérise la
nouvelle conjoncture internationale, et où l'approche
stato-centrée doit céder la place au « paradigme de la
politique mondiale » en changement, qui aux côtés de
l'État reconnaît également le rôle non moins
important des acteurs non étatiques et infra-étatiques. Qui plus
est ledit paradigme « se propose comme objet d'étude à la
fois les relations interétatiques, les relations transgouvernementales,
et les relations transnationales »
Plus fondamentalement, et tout en restant dans la perspective
de Battistella, la mondialisation ou globalisation constitue le contexte qui
verra éclore la variante la plus récente du courant
transnationaliste ; à savoir l'analyse proposée par Badie et
celle de Rosenau connue sous le nom de « modèle de la turbulence
» ou paradigme de la « politique post-internationale
»16. Pour ces deux auteurs, il ne fait aucun doute que le
déclin continu de la capacité de l'Etat à satisfaire les
attentes des citoyens est tel que l'on ne peut plus appréhender la
politique internationale à travers les lunettes kissingériennes.
Car « de nos jours, l'impact de l'opinion des individus et l'intrusion des
mouvements de masses sont trop importants pour être ignorés
».
L'intérêt de cette approche dans le cadre de
cette étude est déterminant en ce sens que les relations
Cameroun-UNESCO, pour une meilleure efficacité, devraient inclure ces
nouveaux acteurs dans une perspective de développement participatif. On
pourrait néanmoins lui dresser, entre autres, un petit reproche : c'est
qu'elle ne démontre pas vraiment comment ces incursions des «
nouveaux acteurs » sont jusque-là freinées et même
combattues par l'État
16 Toutes ces citations se retrouvent dans «
Théories des relations internationales de Battistella, pp1 96, 201, 204
et 210
au sud du Sahara. Sauf que la théorie fonctionnaliste
reste l'approche de base adaptée à cette étude.
4. LE FONCTIONNALISME TECHNICISTE DE DAVID MITRANY COMME
APPROCHE DE BASE
Dans la perspective de Pascal Vennesson, le fonctionnalisme
dans les relations internationales est un effort pour mettre au jour la
contribution singulière des organisations internationales à la
paix. Tout en reconnaissant à la SDN le mérite d'avoir au moins
permis l'instauration d'une coopération fonctionnelle dans certains
domaines d'activités précis, ses promoteurs vont
considérer les facteurs économiques, sociaux et culturels comme
véritables ressorts de l'institutionnalisation des relations pacifiques.
(Smouts et al, 2006 : 235) Théorie des besoins et des attentes
fonctionnelles, le fonctionnalisme international rentre également dans
le cadre des théories de la coopération et de
l'intégration (Roche, 2001 :93). Ses théoriciens s'inspirent de
la tradition contractualiste qui remonte à Grotius, pour qui la raison
d'être de l'État est le fait d'un contrat originel mettant fin
à l'état de nature qui jusqu'alors caractérisait la
condition humaine. Aussi dans la perspective de Grotius, un droit volontaire et
conventionnel va se développer à côté du droit
naturel, et va s'imposer aux États qui reconnaîtront les «
bienfaits » de ses normes dans leurs rapports quotidiens : les fondements
de la coopération internationale étaient alors jetés.
Ernst Haas et David Mitrany vont être les figures de prou de la
théorie fonctionnaliste
Le fonctionnalisme en soi est une approche théorique
qui prône la coopération technique, sectorielle entre les
États pour la réalisation des objectifs qui leur sont communs.
Partant de l'échec de la SDN dans sa tentative d'organisation d'un
mécanisme international de sécurité collective portant
atteinte à la souveraineté des États, un amer constat sera
fait sur la non atteinte des objectifs fondamentaux fixés dans le cadre
dudit mécanisme politique. La raison d'un tel échec étant
due à la posture des États jaloux de leur souveraineté,
d'où la défection de plusieurs nations qui s'en sont
désolidarisées. Le fonctionnalisme va de ce fait tirer des
leçons de cet échec et va penser une démarche ambitieuse
et originale : plutôt que de commencer par la sphère politique, si
sensible, il faudrait d'abord s'intéresser au domaine technique. Ainsi,
la création de l'UNESCO obéit quelque peu à ce principe de
promotion des secteurs de bien-être. Plutôt que les hommes
politiques, ce sont des intellectuels et techniciens qui ici sont mis au
premier plan, à savoir des hommes qui sont sensés se comprendre
mutuellement, parce que parlant plus ou moins le même langage quelque
soit leurs origines, la
réalité étudiée étant
objective, ce qui explique les solutions techniques basées sur la
science, et non politiques. Tout de même, la visée en dernier
ressort ici est de réaliser la paix et la sécurité, ainsi
que le montre le titre de l'ouvrage phare de David Mitrany.
Le schéma initial ici participe du truisme. Il s'agit
de la réalisation de la paix et de la satisfaction au travers de la
coopération technique. Et parce qu'il faut selon Mitrany passer «
des enjeux politiques qui divisent aux enjeux sociaux qui rassemblent »,
le point de départ de l'action, comme de la réflexion doit
être les « besoins », plutôt que la puissance.
D'où il devient préférable « d'identifier des besoins
fonctionnels fondamentaux et de créer des cadres de coopération
répondant à ces besoins et adaptés à leurs
transformations ». La quête sincère de tels besoins ne
pouvant qu'amener les hommes à se tourner vers la tâche
réelle de leur société qui, à en croire Mitrany,
est de venir à bout de la pauvreté, de la maladie et de
l'ignorance. De ce plan va naître une hypothèse de départ
qui confine à un pari. D'abord il est plus facile de coopérer
dans le domaine technique. Les États ne pouvant seuls faire face
à ces problèmes, cette coopération s'avère
être plus facile à réaliser, parce que plus consensuelle.
Ensuite, dans chaque Convention technique, l'État va céder une
parcelle de sa souveraineté qui à son tour favorisera une cession
du politique, fut-t-elle infime. D'où la probable réalisation de
la paix, état de maturité de l'organisation politique ainsi
créée, l'État n'étant plus très jaloux de sa
sécurité. Au total, l'idée selon laquelle certains
mécanismes favorisent l'apprentissage qui fait émerger un
consensus et permet la création d'institutions dans le processus de
coopération fonctionnelle, le rôle d'unités fonctionnelles
dans les relations internationales, et les connections entre ces unités
qui donnent progressivement naissance à un système de
gouvernement, constituent les trois facteurs essentiels qui requièrent
l'attention du fonctionnalisme.
Le schéma de départ sus-évoqué a
eu une certaine pertinence au niveau de l'Europe qui à en croire
certains est entrain de réaliser l'union politique, après avoir
parfait son intégration économique17. En plus pour les
fonctionnalistes, la paix viendrait également du fait de
l'intensification et de la densification des relations entre les États,
en plus des organisations internationales techniques. Aujourd'hui,
l'interdépendance a atteint une vitesse de croisière
considérable, les relations étant si imbriquées,
enchevêtrées et enchâssées, que la guerre devient
impensable au sein de l'Union européenne. Par ailleurs, le droit
d'ingérence intégré au sein des Nations unies participe
également de cette maturation. La maturité de ce courant de
pensée, ainsi que le démontre l'expérience
européenne, sera l'oeuvre du néo-fonctionnalisme
17 Il reste cependant indiqué de noter que tout
le monde ne partage pas cet avis. Notamment Henry Kissinger qui trouve «
ridicule » que l'on puisse penser que l'Europe parvienne à
l'intégration politique. (Lire à cet effet, La nouvelle
puissance américaine, 2003)
qui, parce que plus préoccupé de l'imbrication
entre le supranational et le niveau national, sera moins
systématiquement opposé aux États. Tout comme son «
confrère », le néofonctionnalisme considère
l'intérêt partagé comme le ciment par excellence de la
coopération internationale, l'intégration devant être
menée fonction après fonction, au prorata des réalisations
faites sur le terrain, le souhait étant que le processus soit par la
suite élargi à d'autres domaines par le « spill-over
effect» ou effet d'engrenage.
Or la grille d'analyse proposée par Mitrany, pour
pertinente qu'elle soit, est quelque peu mise à mal face aux
réalités profondes des sociétés africaines.
L'endossement de cette étude avec la littérature sur les
organisations internationales relève du fait que le propre de celles-ci
est d'être en rapport avec les États. Mais parce que ceux-ci
diffèrent dans leur nature et dans leur fonctionnement, il importe de
recourir à une véritable sociologie de l'État au sud du
Sahara pour comprendre les limites des approches fonctionnalistes. Si le
succès de ce courant semble incontestable au regard de la construction
européenne, s'il ne fait aucun doute que la multiplication des accords
régionaux observée en Amérique Latine et en Afrique
relève de l'inspiration suscitée par les approches de Mitrany et
Haas, il n'est pas sûr que le schéma établi par ces
pionniers reflète vraiment les réalités internes des
sociétés africaines. La première limite s'observe au
niveau des abandons de souveraineté consentis par les États au
profit d'instances supranationales, et qui était considéré
comme un processus linéaire et quasi irrésistible. En outre,
l'ouverture à la société civile et autres acteurs
privés se fait en `dents de scies», résultat d'une
politisation et d'une « mystification » renforcée de la
coopération internationale, toujours considérée ici comme
un « domaine réservé ». D'où l'on observe
également une autre tendance lourde : celle de la politisation des
enjeux sociaux. En raison de cet inconfort, il convient de réhabiliter
la place de « l'acteur » dans l'opérationnalisation des
programmes de projets de développement.
Notre ambition serait alors d'appliquer les acquis de la
sociologie des organisations au fonctionnement des organisations
internationales, afin de mieux comprendre les contraintes pesant sur la
décision collective et la nature de cette décision et, par
là, de mieux savoir ce que l'on peut attendre en Afrique comme partout
ailleurs, d'une organisation internationale et ce qu'il est vain
d'espérer. Cette voie encore peu explorée (du point de vue de
Smouts), est celle que nous tenterons de mettre en relief tout au long de ce
procès d'investigation sur la nature des rapports existant entre le
Cameroun et l'UNESCO.
C'est dire enfin que l'appréhension de la
coopération Cameroun-UNESCO, en plus de son enchâssement sur la
théorie fonctionnaliste, se fera dans la recherche d'un
équilibre, fut-il
instable, entre les approches transnationaliste, libérale
et réaliste. Car, note Battistella, « les paradigmes ne
s'entre-tuent pas ; ils s'enrichissent ».
B. MÉTHODE ET TECHNIQUES DE RECHERCHE
1. MÉTHODOLOGIE
« Le propre de la méthode, dit A. Kaplan (1964),
est d'aider à comprendre au sens le plus large, non les résultats
de la recherche scientifique, mais le processus de recherche lui- même.
» Considérée au sens philosophique comme une somme
d'activités spirituelles permettant à un domaine particulier de
la connaissance d'atteindre, de vérifier et de démontrer les
vérités qu'elle recherche, la méthode surtout «
dicte(...) des façons concrètes d'envisager ou d'organiser la
recherche » ( Madeleine Grawitz, 2001, 351). Fort de cela, la
vérification des hypothèses apportées au questionnement de
notre travail nous conduira vers deux approches : l'analyse stratégique
et la méthode historique. Parce que liée, selon Grawitz, à
une tentative d'explication, le choix de l'approche historique se justifie
également par le fait qu'elle est empirique et implique de ce fait des
observations concrètes. A côté de celle-ci, sera
associée l'analyse du système d'action et de relation
chère au fonctionnalisme stratégique de Crozier. Cette
dernière nous permettra, tout en restant dans la perspective historique,
d'examiner la place de l'acteur/agent dans le système des relations
établis entre les deux parties.
Dans la perspective stratégique en effet, les relations
Cameroun-UNESCO sont productrices d'un ensemble de pratiques mobilisées
par des acteurs aux rationalités différentes. Celles-ci sont
productrices de méthodes et d'institutions irréductibles à
la somme de ces actions, ainsi qu'aux aspirations des individualités.
Exprimé autrement, la coopération Cameroun-UNESCO est
fédératrice d'un « système », qui lui-même
rentre en rapport avec les acteurs dont l'existence ne peut se concevoir en
dehors de ce système qui en retour, définit la liberté et
la rationalité mobilisées par ceux-ci dans leur action. Mais
également, le système de relations établies entre les deux
parties n'existe que grâce à ces acteurs qui seuls peuvent le
façonner en même temps qu'ils lui procurent un sens. C'est fort de
cela que Crozier et Friedberg notent que « c'est de la juxtaposition de
ces deux logiques que naissent ces contraintes de l'action organisée
». (Crozier et Friedberg, 1977 : 9) Il s'agit en effet d'une construction
sociale de la réalité au sein de laquelle les acteurs
relativement autonomes sont engagés dans une « configuration »
en vue de résoudre le plus fondamental des problèmes posés
dans leur mode d'action collective : celui « de leur coopération en
vue de
l'accomplissement d'objectifs communs, malgré leurs
orientations différentes » (Crozier et Friedberg, 1977 :13) Dans
notre cas d'espèce, il est question de la coopération en vue de
la promotion des idéaux de paix par le biais d'un certain nombre de
programmes de développement.
C'est dire aussi que l'examen des relations Cameroun-UNESCO en
tant que lien permet ainsi d'observer le « pouvoir » comme fondement
de l'action organisée. Car du point de vue de l'acteur, le pouvoir, en
tant qu'action de groupes ou d'individus sur d'autres groupes ou individus,
s'entend en termes de relation, qui peut être instrumentale (quand les
acteurs sont motivés par un but), non transitive (car une
hiérarchie reste indispensable pour obtenir des actions), et enfin
réciproque (mais déséquilibrée afin d'obtenir des
forces de pouvoir). Cette approche par le système d'action et des
relations permet également d'appréhender le « jeu »
comme instrument de l'action organisée ». (ibidem, 79)
L'analyse stratégique adoptée par nos auteurs
conçoit l'organisation comme un ensemble de « jeux
structurés » les uns aux autres, c'est-à-dire, ensemble de
stratégies possibles. Ici, le jeu (ou stratégies) est ce «
mécanisme concret grâce auquel les hommes structurent leurs
relations de pouvoir et les régularisent tout en leur laissant en se
laissant- leur liberté », de façon à profiter des
écarts pour créer de nouvelles opportunités et
réaliser des transformations de l'ensemble du jeu. C'est pourquoi nos
auteurs considèrent le jeu comme un instrument de l'action
organisée. Cette approche qui restitue la place de l'acteur au sein de
toute organisation ne minore pas pour autant le rôle du groupe dans la
mesure où cette entreprise organisée s'inscrit prioritairement
dans l' « action collective ». En cela, elle se complète avec
l'approche historique qui elle, est réellement holistique.
La méthode historique ici sera
appréhendée dans la perspective synchronique et diachronique.
Diachronique dans la mesure où elle nous permet d'appréhender la
coopération Cameroun-UNESCO depuis ses origines (1961), afin d'en
remonter les faits marquants qui aujourd'hui, permettent
l'intelligibilité. Aussi peut-on difficilement concevoir une explication
qui ne soit à la fois génétique et historique. (Grawitz,
op. cit, 422)
Bien entendu, il nous sied de mettre à la marge de
notre démarche, « l'idole chronologique » qui conçoit
l'histoire comme un rouleau ininterrompu. Aussi cette dernière qui
généralement amène à considérer toutes les
époques comme également importantes, et de ce fait
considère tous les faits et tous les moments comme indifféremment
dignes d'études, comme susceptible d'une même étude, ne
s'aperçoit pas que certaines périodes sont plus
caractéristiques et importantes que d'autres. C'est pourquoi nous
convenons avec Lacombe que la constitution de « l'histoire science »
est un ouvrage qui s'impose à notre temps. Ainsi,
plutôt que de dérouler mécaniquement et
indéfiniment le tissu de la chronologie pure et simple des relations
Cameroun-UNESCO, il nous faudrait plutôt rechercher des périodes
et groupements explicatifs, d'une cohérence objective, afin de
déterminer les vrais rapports.
Ce qui est possible avec la perspective synchronique, qui
à travers la sélection et l'observation de l'ensemble de
pratiques résultants de certains faits probants tels que les OMD, l'EPT,
le programme de financement des radios communautaires et autres projets,
constitue une option essentielle de notre travail. Et parce que le
matérialisme historique applique les principes du matérialisme
dialectique aux phénomènes de la vie sociale, à
l'étude la société, et à l'étude de
l'histoire de la société, cette méthode veut que les
phénomènes soient considérés non seulement du point
de vue de leur relation et de leur conditionnement réciproque, mais
aussi du point de vue de leur mouvement, changement, développement,
apparition et disparition. (Marx et Engel) En cela, nous comprendrions
peut-être mieux pourquoi certains projets réussissent tandis que
d'autres n'ont qu'une courte durée d'existence. Il s'agit en effet d'une
méthode considérablement ancrée sur les faits et la
réalité, fut-elle en mouvement, le fait social étant
à la fois unique et historique. (ibidem : 393)
En effet, parce que notre étude porte sur l'impact de
ladite coopération au sein de la société camerounaise pour
l'essentiel, il importe de garder à l'esprit que « l'existence de
l'homme en tant qu'être individuelle est indissociable de son existence
en tant qu'être social » (Elias, 1987 :241). Mais si la
méthode constitue « une conception intellectuelle coordonnant un
ensemble d'opérations », très souvent est-elle
associée à des procédés opératoires assez
rigoureux et biens définis, et qui de surcroît, permettent
d'appréhender les problèmes lorsque ceux-ci sont
clarifiés. Il s'agit en un mot des techniques.
2. TECHNIQUES DE RECHERCHE
Les techniques documentaires telles l'étude des
journaux et revues de l'UNESCO, et les techniques vivantes telles que les
sondages et les questionnaires sur le terrain, nous servirons de techniques de
collecte des données. Aussi, les entretiens auprès des
différents acteurs (promoteurs et bénéficiaires) devraient
nous amener à déterminer les enjeux réels de cette
coopération. C'est dire en fait que ces enquêtes seront
menées pour l'essentiel auprès des responsables nationaux et
internationaux, concernés par les relations entre le Cameroun et
l'UNESCO, ainsi qu'auprès des populations riveraines concernées
par certains programmes de financement.
C. ANNONCE DU PLAN
Au total, l'appréhension sociohistorique des relations
Cameroun-UNESCO nous conduira à la mise en exergue de la relative
utilité de cette coopération, due aux difficultés
fonctionnelles observées dans la mise en oeuvre des programmes de
développement (Partie II). Ceci en dépit d'une
crédibilité proclamée au sein des différents cadres
symboliques en charge d'assurer l'exposition de la coopération (Partie
I). De manière précise il s'agira d'abord de présenter le
cadre juridique et politique sous-tendant cette coopération, ceci
à travers une logique institutionnelle et organisationnelle bien
déterminée (Chapitre I). Un tel cadre participe également
de la crédibilité de cette coopération, ainsi qu'on le
verra à travers la dynamique transactionnelle mise en exergue par le jeu
des différents acteurs (Chapitre II). Il s'agira ensuite de
démontrer, à travers le processus d'EPT au Cameroun (Chapitre
III), ainsi que par le financement de certains projets de développement
(Chapitre IV), que l'utilité des relations Cameroun-UNESCO reste quelque
peu sapée par des dysfonctionnements opérationnelles et
fonctionnelles considérables.
PARTIE I : LES RELATIONS CAMEROUN-UNESCO : UNE
CRÉDIBILITÉ PROCLAMEÉ
CHAPITRE I :
LA LOGIQUE INSTITUTIONNELLE ET ORGANISATIONNELLE
DES RELATIONS CAMEROUN-UNESCO :
LE CADRE JURIDIQUE ET POLITIQUE
L'élévation des défenses de paix
participe de la mission suprême de l'UNESCO au sein des États
membres. Un tel projet présuppose que la mise en oeuvre des programmes
et/ou projets de développement, fasse l'objet d'une préparation
et d'une programmation concertée mobilisant les différents
membres. Cela suppose également au départ qu'une étude de
leur faisabilité fasse l'objet d'une concertation entre les principaux
acteurs. Laquelle concertation ne serait possible qu'au sein des cadres
organisationnels et institutionnels qui confèrent à ces projets,
une dose significative de légitimité et de
légalité, si ce n'est de crédibilité. Aussi, si
l'élaboration d'un cadre juridique est un préalable essentiel
à toute entreprise humaine, c'est parce qu'elle crée un
environnement favorable à un minimum de structuration des rapports entre
divers acteurs (étatiques, organisationnels, individuels). Et si les
relations Cameroun- UNESCO sont structurées par des principes directeurs
qui s'appuient sur des cadres organisationnels et institutionnels
précis, c'est parce que de tels cadres sont eux-mêmes rendus
légitimes par le fait des conventions liant l'État camerounais
à l'institution spécialisée des Nations unies.
SECTION PREMIERE : LE CADRE JURIDICO-INSTITUTIONNEL
L'institutionnalisation des relations Cameroun-UNESCO est le
fait des organes et organisations qui, à divers échelons,
assurent au quotidien, l'effectivité et la visibilité des
programmes et activités relatives aux idéaux de promotion d'une
paix durable. Ce faisant, la maîtrise du cadre institutionnelle de
coopération de l'UNESCO s'avère nécessaire dans un
contexte où la coopération dans les PED, très souvent
prend le virage d'une assistance technique apportée à ces
derniers. Mieux, la connaissance des différentes conventions de l'UNESCO
ratifiées par l'État camerounais, ainsi que l'Acte constitutif,
est essentielle à l'imprégnation de l'environnement juridique de
cette coopération.
PARAGRAPHE I : LE CADRE JURIDIQUE.
Parler du cadre juridique de la coopération
Cameroun-UNESCO, c'est certes faire une énonciation des Conventions
importantes reliant le Cameroun à l'institution
spécialisée des Nations unies ; mais aussi et surtout c'est
s'intéresser à l'Acte constitutif dont la ratification fait de
l'État signataire un membre à part entière de l'UNESCO.
A. L'ACTE CONSTITUTIF DE L'UNESCO.
Adopté à Londres le 16 novembre 1946 et
modifié par seize sessions de la Conférence
générale au minimum, l'Acte constitutif de l'Organisation des
Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture est une
convention de quinze articles qui contient les engagements de la
communauté internationale à atteindre les objectifs
précis. Dans son esprit, les gouvernements des États se proposent
au nom de leurs peuples d'élever les défenses de paix qui doivent
être établies sur le fondement de la coopération
intellectuelle et morale de l'humanité, conformément à la
charte des Nations unies. Partant de ces buts, l'Organisation a pour fonction
principale de « favoriser la connaissance et la compréhension
mutuelle des nations en prêtant son concours aux organes d'information
des masses », et ceci dans le respect des souverainetés internes de
ses différents États membres.
Conformément à l'article II, les États
membres de l'ONU font partir ipso facto de l'UNESCO, tandis que les
États non membres de l'ONU peuvent être admis au sein de
l'institution spécialisée par la Conférence
générale votant à la majorité des deux tiers. Y
sont également admis, mais sous la responsabilité d'une
autorité régulant leurs relations extérieures, les Membres
associés qui sont des territoires ou groupes de territoires ne pouvant
pas assumer certaines responsabilités diplomatiques. Naturellement, la
suspension ou l'exclusion au sein des Nations unies, affecte la qualité
de membre de l'UNESCO, et le retrait y est également prévu par
l'alinéa 6 dudit article.
Les articles III à VI traitent des différents
organes que sont le Secrétariat, le Conseil exécutif, et la
Conférence générale. Organe plénier de
l'Organisation, cette dernière est composée des États
membres dont les gouvernements respectifs nomment cinq représentants au
maximum. Elle a pour principale fonction de déterminer «
l'orientation et la ligne de conduite générale de l'Organisation
», en même temps qu'elle se « prononce sur les programmes
soumis par le Conseil exécutif. » (Alinéa 2 amendé
à la septième session de la Conférence
générale de 1952) Et suivant une procédure propre aux deux
organisations, elle conseille l'ONU sur les aspects relevant de ses domaines de
compétences. Les décisions sont prises à la
majorité simple, chaque État disposant d'une voix à la
Conférence générale qui, généralement se
réunit tous les deux ans en session ordinaire.
Organe restreint, le Conseil exécutif est
composé de cinquante et un États membres dont chacun
désigne un représentant et, très souvent des
suppléants. Élus par la Conférence générale
qui tient compte de la diversité des cultures et d'une
répartition géographique équitable, les membres du Conseil
exécutif ont pour principales fonctions de préparer l'ordre
du jour des sessions de la Conférence
générale dont l'action reste sous l'autorité et la
responsabilité pour ce qui est de l'exécution du programme. Et
sous réserve des décisions de celle-ci, l'alinéa 8 de la
présente Convention permet au Conseil exécutif d'établir
son Règlement intérieur et d'élire son bureau parmi ses
membres. Plus fondamentalement, le Conseil exécutif « étudie
le programme de travail de l'Organisation ainsi que les prévisions
budgétaires correspondantes que lui soumet le Directeur
générale. »
Nommé par la Conférence générale
pour une période de six ans renouvelable une fois, le Directeur
général qui est le plus haut fonctionnaire de l'Organisation,
compose le Secrétariat avec un personnel recruté sur une base
géographique aussi large que possible, et dont le caractère
international ne devrait souffrir d'aucune contestation.
L'article VII relève la nécessité des
commissions nationales ou organismes nationaux de coopération qui jouent
le rôle d'organe de liaison pour toutes les questions intéressant
l'Organisation. Conformément à l'article IX, « la
Conférence générale approuve définitivement le
budget et fixe la participation financière de chacun des États
membres... », tandis que les relations avec l'ONU et d'autres
organisations et institutions spécialisées sont également
prévues par les articles X et XI. « Les dispositions des articles
104 et 105 de la Charte de l'Organisation des Nations Unies relatives au statut
juridique de cette Organisation, à ses privilèges et
immunités s'appliquent également à la présente
Organisation » (article VII) et « le texte des projets d'amendements
sera communiqué aux États membres par le Directeur
général six mois au moins avant d'être soumis à
l'examen de la Conférence générale » qui, selon
l'alinéa 1 de l'article XIII, devra se prononcer à la
majorité des deux tiers. Enfin, l'article XIV relatif à
l'interprétation stipule en son alinéa 1 que « les textes
anglais et français de la présente Convention font
également foi » ; et l'article XV de préciser que « la
présente Convention entrera en vigueur lorsqu'elle aura
été acceptée par vingt de ses signataires. Les
acceptations ultérieures prendront effet immédiatement. »
(Alinéa 3)
Conformément à l'article précité,
la Grèce constituera le vingtième État alors que le
Cameroun n'en deviendra membre que seize années plus tard. Mais plus
encore, il faudra attendre jusqu'en 1985 pour voir la signature de l'Aide
mémoire qui constitue le document de base de la coopération
Cameroun-UNESCO, même si par la suite, plusieurs autres Conventions liant
les deux institutions vont connaître le jour.
B. LE CAMEROUN ET LES CONVENTIONS DE
L'UNESCO.
A côté de l'Acte constitutif qui interpelle la
totalité des États membres de l'UNESCO, l'organisation dispose
également d'une panoplie de Conventions dont l'adhésion ou la
ratification relève de la souveraineté de chaque
pays. Dans cette veine, le Cameroun est lié par un certain nombre de
conventions de l'UNESCO, soit par simple adhésion, ou encore par
ratification, entendue comme un acte délibéré traduisant
son consentement à être lié.
C'est ainsi que le Cameroun va ratifier le 24 mai 1972, la
convention signée à Paris le 14 novembre 1970, concernant les
mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation,
l'exportation et le transfert de propriétés illicites des biens
culturels. Il en est de même de la convention concernant la protection du
patrimoine mondial, culturel et naturel, signée à Paris le 16
novembre 1972, et dont la ratification par les autorités camerounaises
se fera le 7 décembre 1982.
Plus nombreuses sont conventions de l'UNESCO auxquelles le
Cameroun a simplement adhéré. Les toutes premières sont
les deux conventions de la Haye du 14 mai 1954, ratifiées le 12 octobre
1961 : il s'agit de la convention pour la protection des biens culturels en cas
de conflit armé, avec règlement d'exécution, ainsi que du
protocole à la convention pour la protection des biens culturels en cas
de conflit armé et résolutions de la Conférence. Trois ans
plus tard, c'est-à-dire le 15 mai 1964, le Cameroun adhérait
à l'Accord signé en Florence le 17 juin 1950, pour l'importation
d'objet de caractère éducatif, scientifique ou culturel, avec
annexes A, B, C, D et E, et protocole annexé.
Le 1er février 1973, le Cameroun
adhère également à deux conventions universelles : celle
de Genève sur le droit d'auteur avec Déclaration annexe relative
à l'article XVII et Résolution concernant l'article XI, du 6
septembre 1952 ; et celle de Paris du 24 juillet 1971, relative au droit
d'auteur. Plus récemment en 2006, le Cameroun va adhérer le 2
février, à la convention de Ramsar (Iran) relative aux zones
humides d'importance internationale, particulièrement comme habitats de
la sauvagine. Enfin le 22 novembre de la même année, ce sera au
tour de la convention signée à Paris le 20 octobre 2005, sur la
protection de la diversité des expressions culturelles, de
connaître l'adhésion des autorités camerounaises.
De ce qui précède, il est autorisé de
mentionner que le Cameroun n'est pas insensible à l'action normative de
l'UNESCO, ce d'autant plus qu'il a toujours adhéré aux
idéaux de l'organisation qui, et c'est un rappel, reflète
parfaitement les aspiration profonde du peuple camerounais. Mais parce que la
ratification suppose une implication étroite, sinon plus poussée,
nos autorités semblent prendre assez de temps pour mieux étudier
les conventions dont la ratification pourrait leur procurer un avantage
certain. C'est dans ce sillage que nous pouvons considérer l'inscription
de la réserve forestière et de la faune du Dja comme patrimoine
mondiale de l'humanité, ainsi que les subventions accordées
à l'école de la faune
de Garoua, comme avantages découlant de la ratification de
la convention sur la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel.
Il reste tout de même que le Cameroun gagnerait à
ratifier un peu plus de conventions, à l'instar de celles relatives au
conflits, ou encore à la promotion de la diversité culturelle,
qui, bien que ne nécessitant pas une urgence apparente, pourraient
s'avérer utiles à long terme, tant il est vrai que `nul ne sait
ce qu'un jour peut enfanter'. Mais ceci présuppose une concertation
permanente au sein d'un cadre institutionnel on ne peut plus
approprié.
PARAGRAPHE II : LE CADRE INSTITUTIONNEL.
Il s'agit ici des grands principes de coopération,
aussi bien du Cameroun que de l'UNESCO, ainsi que des organes chargés de
la mise en oeuvre des relations Cameroun- UNESCO.
A. LES ORGANES CHARGÉS DE LA COOPÉRATION
CAMEROUN-UNESCO
1. LES ORGANES CAMEROUNAIS DE COOPERATION.
1-1. LA COMMISSION NATIONALE POUR L'UNESCO.
1-1-1. COMPOSITION ET FONCTIONNEMENT.
Créée par le Décret N° 91/098 du
31 janvier 1991, portant réorganisation de la Commission Nationale,
la Commission Nationale camerounaise pour l'UNESCO est une institution de
consultation, de liaison, d'exécution et d'information, qui travaille en
interaction aussi bien avec le Gouvernement camerounais qu'avec l'UNESCO, les
spécialistes et même le public. En effet, il est constitué
de trois organes que sont le Secrétariat Général, le
Comité Exécutif et l'Assemblée Générale.
Organe suprême de la Commission, l'Assemblée
générale comprend les membres exofficio dont le
président est l'actuel Ministre chargé de l'Éducation de
base, Mme Haman ADAMA. Cet organe compte également neuf
Vice-président que sont le Ministre chargé des Relations
Extérieures, M. Henri EYEBE AYISSI ; le Ministre de la Communication, M.
Jean Pierre BIYITI BI ESSAM ; le Ministre de la Culture, Mme AMA TUTU MUNA ; le
Ministre des Enseignements secondaires, M. Louis BAPES BAPES ; le Ministre de
l'Enseignement
supérieur, M. Jacques FAME NDONGO ; le Ministre de la
Recherche scientifique et Innovation, Mme Madeleine TCHUENTE ; le Ministre de
la jeunesse, M. ADOUM GAROUA ; le Ministre des Affaires sociales, Mme Catherine
BAKAN MBOK ; et enfin, le Ministre de la Promotion de la Femme et de la
Famille, Mme Suzanne BOMBACK. Comme simple membres, nous pouvons citer entre
autres les Ministres chargés : de la Planification, de la Programmation
du développement et de l'Aménagement du territoire ; du Tourisme
; des Finances. A leurs côtés, nous pouvons ajouter le
Délégué permanent du Cameroun auprès de l'UNESCO et
les Représentants de : la Présidence de la République ;
l'Assemblée nationale et du Conseil économique et social. Enfin
au titre d'experts de la Commission Nationale pour l'UNESCO, le Décret
mentionne une deuxième catégorie de membre que sont les Experts
constitués de dix personnalités du Monde de l'éducation,
de la science, de la culture et de la communication, choisies en raison de leur
compétence ; et de dix personnalités choisies parmi les membres
des organisations publiques, confessionnelles privées et des
associations professionnelles et culturelles les plus représentatives, y
compris les anciens membres camerounais du Conseil exécutif de l'UNESCO.
Les experts sont nommés à titre personnel, pour une
période de quatre années renouvelable par arrêté
présidentiel, sur proposition du président de l'Assemblée
générale.
Cette dernière, qui en principe se réunit en
session ordinaire avant l'Assemblée générale de l'UNESCO,
c'est-à-dire deux fois par an, se doit de proposer « à
l'approbation du Gouvernement la politique de coopération entre la
République du Cameroun et l'UNESCO et la mise en oeuvre de ce programme
dans le pays et par l'adoption des requêtes nationales à proposer
à l'assistance de l'UNESCO. » (Article 6 du décret) Aussi,
se doit-elle d'être répartie en quatre Sous-Commissions
spécialisées que sont les Sous-Commissions de l'Education
formelle, non formelle, informelle et spéciale ; des Sciences Exactes et
Naturelles ; des Sciences Humaines et Sociales ; enfin de la Culture et de la
Communication. Pour être large et représentative des
différents secteurs de coopération de l'UNESCO,
l'Assemblée générale n'en n'est pas pour autant
opérationnelle, d'où la nécessité d'un organe
restreint.
Plus restreint, le Comité exécutif comporte dix
membres dont les Ministres chargés de l'Éducation de base et des
Relations Extérieures assurent respectivement la présidence et la
vice-présidence. De manière plus précise, ce comité
suit les activités de la Commission Nationale pour l'UNESCO entre deux
sessions de l'Assemblée générale. De ce fait, il
délibère et décide des problèmes concernant : la
préparation de l'ordre du jour provisoire de l'Assemblée
générale ; le suivi de l'exécution des résolutions
adoptées par cette dernière,
ainsi que des problèmes qu'elle lui assigne
spécifiquement. C'est pourquoi sept autres membres élus par
l'Assemblée complètent sa composition, tandis que son Rapporteur
n'est autre que le Secrétaire générale de la Commission
Nationale pour l'UNESCO.
Le Secrétariat général est l'organe
exécutif et permanent de la Commission Nationale pour l'UNESCO, dont les
personnels sont choisis en raison de leurs aptitudes, et placés sous
l'autorité d'un Secrétaire général ayant rang et
prérogatives de Directeur de l'Administration Centrale, et qui est
chargé de la coordination des activités, et est assisté
d'un Secrétaire général adjoint ayant rang et
prérogatives de Directeur-Adjoint de l'administration centrale. Le
Secrétariat général comprend quatre secteurs
conformément aux domaines de compétence de l'UNESCO, et de deux
Bureaux. Et l'article 14 du décret de préciser que chaque «
secteur est placé sous l'autorité d'un Chargé
d'étude ayant rang et prérogatives de Sous-directeur de
l'Administration Centrale, éventuellement assisté de deux
Chargés d'Études-Assistants, ayant rang et prérogatives de
Chef de Service de l'Administration Centrale. » Et le « Bureau est
placé sous l'autorité d'un Chef de Bureau ayant rang et
prérogatives de Chef de Bureau de l'Administration Centrale. »
Enfin, les ressources financières de la Commission
Nationale pour l'UNESCO Nationale proviennent du budget de l'État par
l'entremise du président de la Commission qui en est l'ordonnateur
principal, même s'il peut déléguer ses pouvoirs au
Secrétaire général. En réalité, et
conformément à l'article 18 du décret de 1991, les
fonctions de Membres de la Commission Nationale Camerounaise pour l'UNESCO
relèvent du bénévolat, même s'il est vrai qu'ils
peuvent prétendre, « sur présentation des pièces
justificatives, au remboursement des frais de transport ainsi qu'à une
indemnité de session dont le montant sera fixé par
l'Assemblée Générale sur proposition du Comité
Exécutif ».
1-1-2. RAISON D'ETRE DES COMMISSIONS
NATIONALES18.
Selon les termes de l'article VII de l'Acte constitutif,
« chaque État membre prendra les dispositions appropriées
à sa situation particulière pour associer aux travaux de
l'Organisation les principaux groupes nationaux qui s'intéressent aux
problèmes d'éducation, de recherche scientifique et de culture,
de préférence en constituant une commission nationale où
seront représentés le gouvernement et ses différents
groupes ». La commission nationale ainsi définie est un organe en
quelque sorte mixte qui, en effet, n'est pas une simple agence
18 Notes tirées pour l'essentiel du Manuel des
commissions nationales, 2007. Il importe de considérer ce qui suit comme
relevant de l'idéal, la réalité étant tout à
fait différente.
d'ordre technique ; elle a une mission beaucoup plus large et
vise sur le plan mondial, à « stimuler la coopération
intellectuelle internationale ». Pour avoir résulté
d'un compromis assez profond, et à la base de la création de
l'UNESCO, les commissions nationales ne constituent pas uniquement des
organisations intergouvernementales, dans la mesure où elles
nécessitent également l'adhésion des communautés
éducatives, culturelles et scientifiques de chaque État.
De fait, l'UNESCO est bel et bien une organisation
intergouvernementale. L'existence des commissions nationales permet
néanmoins d'associer aux différents processus de décision
des personnalités et des groupes représentatifs de la
communauté intellectuelle de chaque pays, et de les faire participer
activement à ses programmes.
Et parce qu'il n'existe pas de modèle unique de
commission nationale, il est indiqué de préciser que la
commission nationale camerounaise rentre dans la liste majoritaire des
commissions de caractère gouvernemental. Son Secrétariat, comme
nous l'avons constaté, fonctionne comme un service à
l'intérieur du ministère de l'éducation de base, et son
président, nommé ex-officio, en est le ministre en exercice dudit
ministère.
Mais ce qui relève de la constance, c'est la
réalité selon laquelle toutes les commissions nationales sont
« solidement enracinées dans leur culture nationale et dans ses
valeurs et peuvent donc apporter à l'Organisation les compétences
et l'expertise locale dont celle-ci a absolument besoin ». Inversement,
elles tirent leur raison d'être et leur légitimité de
l'UNESCO et elles ont le « devoir d'en promouvoir les activités,
les programmes et les valeurs au bénéfice de leur pays ».
C'est dire qu'à partir de ce double mouvement, elles sont un organe
indispensable de liaison entre leur pays et l'UNESCO. Ce qui nous amène
à scruter de plus près leur rôle.
1-1-3. ROLE ET UTILITÉ.
De ce qui précède, nous observons que les
commissions nationales concourent à assurer une participation active de
la communauté intellectuelle de chaque pays à la vie de
l'Organisation. Ce faisant, leur utilité se trouve à travers le
rôle qu'elles sont censées jouer, aussi bien au sein du
système des Nations unies que dans leur propre pays.
Moyen d'influence au service des États membres au sein
desquels elles assurent la présence de l'UNESCO, les commissions
nationales jouent un rôle de consultation, de liaison, d'information du
public et d'exécution des activités de l'Organisation. Agent par
excellence de visibilité des activités et des domaines de
compétence de l'Organisation, elles cherchent à
toucher les différents publics concernés par
l'action de l'UNESCO à travers des actions de sensibilisation. Aussi,
des partenariats sont-ils forgés auprès des différents
acteurs du secteur associatifs et privé à l'instar des ONG
nationales, ainsi qu'avec de nombreuses collectivités locales. En
réalité, la participation à la mise en oeuvre du programme
de l'UNESCO constitue la tâche primordiale des commissions, dont la
capacité opérationnelle est renforcée par l'apport des
différents ministères spécialisés. La coordination
interministérielle est essentielle dans la mesure où les actions
des commissions nationales sont multiformes et correspondent à la
diversité des domaines d'activités de l'UNESCO.
Réseau dynamique au service de la coopération
internationale, les commissions nationales constituent également un
vaste réseau, à tous égards unique dans le système
des Nations unies. De façon assez régulière,
conduisent-elles souvent des activités aux échelons
sous-régionaux (Conférence des Ministres de l'éducation de
la CEMAC), régional et international. D'autre part, le réseau des
commissions nationales se nourrit d'échanges réguliers. Qui plus
est dans le cadre de la nouvelle politique de décentralisation de
l'UNESCO, elles constituent à l'échelon national, un
interlocuteur privilégié pour les bureaux multi pays, et partant
à l'atteinte des objectifs fixés dans le cadre des OMD.
Car l'ONU qui aujourd'hui compte 192 États membres, a
six organes principaux. Cependant le système onusien beaucoup plus large
comprend de nombreux programmes, fonds et agences, et quinze institutions parmi
lesquelles se trouve l'UNESCO. Aussi les commissions nationales dans le sillage
des objectifs du Millénaire doivent être bien informées du
suivi de ces objectifs par l'UNESCO et par d'autres organisations dans leurs
domaines de compétence respectifs, afin de contribuer à la
réalisation de ces objectifs au niveau local selon les besoins de chaque
pays dans les domaines de l'éducation, de la science, de la culture et
de la communication, ainsi que des droits de l'homme et même
l'environnement.
1-2. LA DÉLÉGATION PERMANENTE DU CAMEROUN
AUPRES DE L'UNESCO (DPCU).
L'institution des délégations permanentes est
une initiative du Conseil exécutif de l'UNESCO qui dès 1947 va
reconnaître leur utilité, compte tenu des
spécificités propres à l'Organisation. La DPCU fait partie
intégrante de la mission diplomatique camerounaise de Paris d'où
l'Ambassadeur du Cameroun en France est également le
Délégué permanent du
Cameroun auprès de l'UNESCO19. Les fonctions
de la Délégation relèvent de la diplomatie
multilatérale et ne sont pas nécessairement identique
vis-à-vis du gouvernement camerounais, de l'UNESCO et des autres
délégations.
A l'égard du Cameroun, le Délégué
permanent représente son gouvernement d'envoi aux assises et
manifestations initiées ou organisées par l'Organisation. De ce
fait, il veille à ce que les décisions et projets issus des
réunions concourent au mieux des intérêts de son
État, l'objectif étant « de tirer avantage de toutes les
opportunités issues des activités de l'Organisation. »
(MENYE, 2003 : 12) De ce fait, il joue un rôle de liaison entre les deux
institutions, en transmettant des informations utiles dans l'optique de
réaliser une meilleure appropriation camerounaise de l'UNESCO, en
même temps qu'il améliore la visibilité diplomatique du
Cameroun au sein de l'Organisation. C'est dire qu'à l'attention de son
gouvernement d'envoi, la DPCU a un rôle essentiellement diplomatique
à savoir la représentation, la protection des
intérêts de son État, l'information et la transmission, la
suggestion et même la négociation sur les interrogations relatives
aux rapports entre le Cameroun et les autres Délégations ou avec
les autorités de l'UNESCO.
Envers l'UNESCO, le Délégué permanent
peut négocier avec le Directeur Général afin que celui-ci
appui des projets qui relèvent des Commissions Nationales. Aussi, les
délégués permanents ont un rôle plus qu'essentiel
dans la préparation des Conférences générales, en
même temps qu'ils aident les membres du Conseil Exécutif à
préparer les réunions.
A l'égard des autres délégations
permanentes enfin, la DPCU « doit entretenir des rapports avec les autres
délégations des États-membres afin de connaître leur
position et éventuellement d'adopter des attitudes communes en fonction
des affinités idéologiques, politique ou géographiques.
» (Idem : 14)
1-3 LA FÉDÉRATION CAMEROUNAISE DES
ASSOCIATIONS, CENTRE ET CLUBS DE L'UNESCO (FCACU).
La fédération camerounaise des clubs de l'Unesco
est une ONG à caractère national. Apolitique, son
caractère national se vérifie par sa structure, ainsi que par la
présence des clubs dans les dix provinces du Cameroun. Les clubs de
l'UNESCO sont des personnes, volontaires et bénévoles
motivés, sans distinction d'âge, de sexe, de religion de tout
horizon
19lors d'un entretient que nous accordait le Pr
MBOUI, ce dernier regrettait cet état des choses, car pense-t-il, il
s'agit d'un poste assez délicat qui suppose une personnalité plus
libre, l'AMBACAM étant déjà assez pris par sa mission
diplomatique
socioprofessionnel, qui se sont mis ensemble et s'engagent
à agir pour la paix et le développement humain durable en
organisant des activités directement inspirées de celle de
l'Organisation.
1-3-1. GENESE ET EVOLUTION DU MOUVEMENT.
La naissance du mouvement UNESCO au Cameroun a
précédé l'adhésion du Cameroun au sein de ladite
organisation, naissance matérialisée par la création du
tout premier club UNESCO à Oveng-yemevong en 1961, localité
rurale située aux environs de Sangmelima, dans le Sud Cameroun. Ce
mouvement sera suivi en 1969 de la création de la
Fédération Camerounaise des Clubs et Amis de l'UNESCO (FCCAU),
« structure qui viendra donner une impulsion dynamique à ce
mouvement des hommes et des femmes de bonne volonté partageant les
nobles idéaux de l'Organisation », ainsi que l'atteste
l'exposé présenté par son actuel président
Désiré AROGA, lors du Séminaire tenu à
l'hôtel Hilton de Yaoundé du 18 au 21 septembre 2007. C'est ainsi
qu'en 1980, le Cameroun va compter 75 clubs, 200 en 1992, 400 en 1999. Et pour
finir en 2007, on notera la présence de 600 clubs20 sur toute
l'étendue du territoire national, tandis que les « Juniors Unesco
Clubs » vont être en expérimentation dans les écoles
primaires.
1-3-2. OBJECTIFS ET NATURE DES CLUBS UNESCO.
Promouvoir les idéaux de l'UNESCO auprès des
différentes couches des populations reste et demeure l'objectif
prioritaire de la FCCAU. Ce faisant, elle contribue à l'implantation
d'une paix et d'une sécurité durables, par la promotion de la
collaboration entre les nations à travers l'éducation, la science
et la culture. Pour y parvenir, elle coordonne les actions des clubs, centres
et associations Unesco et organise des activités directement
inspirées de celles de l'UNESCO. La FCCAU promeut également une
culture de la paix en se fondant sur le respect de l'autre, de la justice
sociale, la lutte contre toutes les formes d'exploitation et d'exclusion, lutte
sous-tendue par des actions d'information et de communication par tous les
moyens disponibles.
Au Cameroun, on dénombre trois types de clubs parmi
lesquels les clubs scolaires, présentes au sein des lycées et
collèges. Ils sont mis en place par les élèves et sont
supervisés
20 Selon les affirmations même du
président de la fédération. Encore que la simple
adhésion ne pourrait à elle seule justifier les intentions
réelles des adhérents.
par les enseignants et autres encadreurs tous membres du club.
Ces clubs qui peuvent bénéficier des services des
Activités post et péri scolaires, représentent 90% des
clubs. Présentes dans les six universités d'État à
l'exception de celle de Buéa, les clubs universitaires
représentent 7% des clubs et bénéficient de l'encadrement
de la Division des Activités Sportives et Associatives. Enfin, les clubs
civils, présents dans les lieux de travail, dans les quartiers et
villages, représentent environ 3% des clubs et sont constitués
des travailleurs, des habitants des quartiers et des villages. Ils
interviennent dans des domaines spécifiques que sont entre autres,
l'environnement, la science, l'art plastique, l'emploi des jeunes, etc....
Constitués aujourd'hui de plus de 600 clubs, la FCCAU
avec ses 24000 personnes militantes enregistre une moyenne de 40
adhérents par club. Ainsi, 15 membres forment le bureau national, tandis
que 50 sont au niveau des 10 coordinations provinciales. 200 membres des
délégations départementales et 700 encadreurs et
animateurs complètent l'organigramme qui porte le total des responsables
de la FCCAU à 965.
1-3-3. ORGANISATION, FONCTIONNEMENT ET PRINCIPALES
ACTIVITÉS.
ONG et apolitique, la FCCAU est l'une des organisations
nationales les mieux structurées du Cameroun, parce que présente
dans la plupart des établissements scolaires et universitaires, mais
également parce qu'elle évolue aussi bien en milieu scolaire et
universitaire, qu'en milieu civil et professionnel. Ses ressources proviennent
pour l'essentiel des cotisations et de la vente des cartes de membres,
même si elle reçoit des appuis provenant de la Commission
Nationale pour l'UNESCO, du Bureau Sous Régional, de l'UNESCO
siège et des autres partenaires au développement.
Le Secrétariat de la FCCAU quant à lui est
constitué de jeunes bénévoles qui y travaillent à
temps plein et sans salaire en principe. Selon ses statuts, il est
composé de 5 organes que sont le Congrès qui tous les quatre ans
réunit les différents membres et dont l'application des
recommandations est assurée par le Conseil permanent. Fondamentalement
le Bureau Exécutif coordonne les activités du club et
représente la Fédération au quotidien. Elle est
appuyée dans cette tâche par 10 coordinations provinciales qui
représentent le Bureau National dans les provinces et par 45
Délégations Départementales, représentant à
leur tour le Bureau National au sein de la province, en même temps
qu'elles l'aident à la coordination des différentes actions
menées sur le terrain.
Les principales activités de la
Fédération englobent tous les domaines de l'UNESCO. Nous pouvons
mentionner entre autres les droits de l'homme et de l'enfant, la
prévention et
l'abus des drogues, l'humanitaire, l'environnement,
l'éducation préventive au VIH et sida, le dialogue interculturel,
le patrimoine culturel, la gestion des conflits, la culture de la paix et les
TIC. Il faut également noter la célébration chaque
année de la journée des Clubs Unesco, le 19 juillet. Tout en
tenant compte de son environnement et de sa situation, chaque club est libre
d'organiser les activités qu'il juge utiles, pourvu que ces
dernières soient à but non lucratif, et inspirées des
actions et programmes de l'UNESCO.
1-3-4. RELATIONS AVEC LES AUTRES STRUCTURES.
En ce qui concerne la collaboration avec d'autres structures
enfin, il est indiqué de noter que la Commission Nationale pour l'UNESCO
appui la Fédération dans l'organisation de nombreuses
activités et pour la participation de ses délégués
aux rencontres internationales. Avec le gouvernement camerounais, la
Fédération est associée dans les réflexions
concernant les questions de jeunes ou l'un des domaines d'activités qui
la concerne. De même, elle participe aux activités
organisées par les ministères membres de la CNU. La
fédération entretien également de bonnes relations avec
toutes les fédérations africaines et celles des autres
continents, même si elles sont un peu plus poussées dans la sous
région.
Le Bureau Sous Régional de Yaoundé quant
à lui appui matériellement et financièrement la
Fédération dans l'organisation de ses activités, tant elle
est associée aux activités dudit Bureau.
La Fédération est membre de nombreux
réseaux d'ONG ou d'associations au Cameroun, réseaux qui pour la
plupart évoluent dans son champ d'action. Bien plus, elle est membre
créateur de la Confédération Africaine des Associations,
Membres et Clubs Unesco (CACU), ainsi que de la Fédération
Mondiale des Associations, Membres et Clubs Unesco (FMACU). Enfin, il importe
de mentionner que le président de la Fédération, Mr
Désiré AROGA est le président en exercice de la CACU, et
que lors du dernier congrès ordinaire de la FMACU tenu à
Athènes en juillet 2007, il a été élu Vice
président de la FMACU/Région Afrique.
2. LES ORGANES DE COOPERATION DE L'UNESCO.
2-1. LA CONFÉRENCE GÉNÉRALE : ORGANE
PLÉNIER ET SOUVERAIN.
Organe plénier de l'Organisation, la Conférence
générale réunit les représentants des États
membres tous les deux ans. Elle tient normalement ses sessions au Siège
de l'UNESCO, à l'exception des cas rares d'acceptation de l'invitation
d'un État membre à tenir une session sur son sol. C'est ainsi que
Mexico en 1947, Florence en 1950 et Sofia en 1985, comptent parmi les rares
villes à avoir abrité une session hors de Paris. Un « Guide
de la Conférence générale », publié avant
chaque session par l'UNESCO, permet aux différentes
délégations d'être à la pointe des informations
détaillées sur certains éléments clés.
Car la Conférence générale pour
l'essentiel a pour fonctions de déterminer l'orientation
générale de l'Organisation, en même temps qu'elle exerce
une fonction consultative auprès de l'ONU. (Article IV, 5 de l'Acte)
Elle adopte de ce fait le programme et le budget de l'UNESCO pour les deux
années à venir et la stratégie à moyen terme de
l'Organisation (tous les six ans). Elle adopte également des projets de
recommandations aux États membres, et des conventions internationales
à ratifier par ces derniers. La Conférence générale
par ailleurs élit les membres du Conseil exécutif et de certains
comités, commissions et autres groupes intergouvernementaux ; et c'est
elle qui sur présentation du Conseil exécutif, nomme le Directeur
général pour une période de cinq années, ce dernier
étant rééligible une fois.
La structure révèle une Organisation de la
Plénière, des Commissions pour les programmes sectoriels, les
questions administratives et financières, et trois Comités
statutaires à savoir : le Comité des candidatures, le
Comité de vérification des pouvoirs et le Comité
juridique. A noter également le Bureau qui conduit le travail de la
Conférence dont les procédures pour la prise de parole, les
projets de résolution, les votes et les élections, sont
détaillées dans le « Guide ».
Mais d'autres procédures particulières sont
prévues pour les trois premières séances
plénières telles que l'élection du Président, le
rapport du Conseil exécutif, et les trois derniers jours de la session
telles que l'adoption des rapports des Commissions et l'adoption des
résolutions. Les Événements spéciaux quant à
eux peuvent comprendre des tables rondes ministérielles sur des
questions importantes du Programme et des réunions avec des partenaires
spécifiques. Une exposition thématique principale est un
élément traditionnel de chaque Conférence
générale. Des réunions des groupes électoraux, des
réunions d'information organisées par les Secteurs du Programme
et des réunions régionales pour les commissions nationales
facilitées par le Secrétariat ainsi que des visites
guidées de Paris
organisées par la délégation
française, font partir des autres activités qui peuvent
également voir le jour.
Enfin les principaux documents de la Conférence
générale sont le C/1 qui représente l'ordre du jour, le
C/2 ou l'organisation des travaux et le C/3 qui contient le rapport du
Directeur général sur les activités de l'Organisation
pendant l'exercice biennal précédent, avec une introduction sur
l'exercice d'évaluation. Les C/4 et C/5 représentent
respectivement la stratégie à moyen terme et le projet de
programme et de budget. Le C/6 en dernier ressort, les Recommandations du
Conseil exécutif sur le Projet de programme et de budget,
recommandations basées sur les propositions d'un groupe de
rédaction.
2-2. LE CONSEIL EXÉCUTIF : ORGANE DU
CONTRÔLE DE L'EXÉCUTION DU PROGRAMME.
Le Conseil exécutif à ses débuts
comprenait dix-huit membres élus intuitu personae pour leurs
compétences par la Conférence générale sur
présentation des candidatures par les États membres. Depuis le
nombre de ses membres est passé de vingt en 1952 à cinquante et
un en 1980, pour atteindre cinquante-huit en 1995. Aussi pouvons-nous observer
quatre grandes réformes du Conseil au cours de la même
période, dont celle de 1954 lors de la Conférence
générale de Montevideo qui confère à chaque
élu du Conseil la qualité de représentant du gouvernement
de l'État dont il est ressortissant. (cf. résolution 8
C/Rés.,II- 1.1) Il faudra attendre jusqu'en 1968 (15 C/Rés.,1
1.1) pour voir le mandat des membres passer de quatre à six ans, ainsi
que l'introduction d'un nouveau mode d'élection des membres
répartis en cinq groupes, même si quatre ans plus tard, la
durée du mandat sera ramenée à quatre années. Plus
important est la réforme adoptée en 1991 lors de la
26e session de la Conférence générale qui rompt
avec l'élection intuitu personae au profit des États
eux-mêmes qui, à leur tour vont désigner leurs
représentants, ainsi que les suppléants de ces derniers.
La situation actuelle du Conseil exécutif
révèle un organe émanant de la Conférence,
exerçant les pouvoirs qu'elle délègue pendant
l'intersession et traitant des questions spécifiques qu'elle lui confie
à chaque session. L'article V de l'Acte constitutif porte l'essentiel
des fonctions et responsabilités du Conseil. Mais d'autres directives
découlent des règlements, directives et certaines
résolutions établis par la Conférence
générale. D'autres attributions découlent également
d'accords conclus entre l'UNESCO et l'ONU, les institutions
spécialisées des Nations Unies et d'autres organisations
intergouvernementales. C'est dire que le Conseil entre autres prépare
l'ordre du jour des sessions de la Conférence,
étudie les prévisions budgétaires que lui
soumet le Directeur général ainsi que le programme de travail de
l'Organisation. Il fait des recommandations à la Conférence pour
l'admission de nouveaux États non membres de l'ONU, auprès de qui
il peut exercer des fonctions consultatives.
Observateur privilégié de la vie de l'UNESCO
dont il suit de près le fonctionnement, le Conseil exécutif est
amené à prendre des décisions sur des questions dont la
solution ne peut attendre la prochaine session de la Conférence, et
à donner des avis sur un grand nombre de sujets. Il faut noter qu'un
comité spécial chargé d'examiner les méthodes de
travail et les relations entre les trois organes de l'UNESCO veille à
rationaliser régulièrement le fonctionnement du Conseil
exécutif afin de le rendre toujours plus efficient.
Le conseil exécutif élit à l'ouverture de
la session ordinaire et pour un mandat de deux ans, un président qui
peut si nécessaire réunir un Bureau composé des
Vices-Présidents du Conseil et des Présidents des commissions
permanentes, du Comité spécial, du Comité sur les
conventions et recommandations et du Comité sur les Organisations
internationales non gouvernementales. Réuni en session ordinaire au
moins quatre fois au cours de l'exercice biennal, le Conseil étudie le
« livre bleu » qui constitue le projet du programme biennal et tire
au sort le nom de l'État membre dont la délégation
à la Conférence sera placée à gauche dans toutes
les salles de réunion. La session extraordinaire peut également
se réunir à la demande écrite de six membres du Conseil ou
sur convocation du président. Il peut également se réunir
en séance privée pour examiner des questions relatives au
personnel qui travaille généralement en six langues. A savoir
l'anglais, l'arabe, le chinois, l'espagnol, le français et le russe.
Comme organes subsidiaires enfin, le Conseil exécutif
est constitué de deux Commissions (financière et administrative,
programme et relations extérieures) et trois comités
(spécial, conventions et recommandations, OING). Ces organes
nécessaires à l'accomplissement de son mandat ont un
caractère permanent.
2-3. LE SECRÉTARIAT : UNE ADMINISTRATION AU
SERVICE DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE ?
Le Secrétariat est composé des fonctionnaires
internationaux dont l'exercice des fonctions nécessite une certaine dose
de loyauté, de discrétion et de conscience, qualités
essentielles pour la préservation des intérêts de
l'Organisation. Plus haut fonctionnaire de l'UNESCO, le Directeur
général détient le pouvoir de nommer le personnel du
Secrétariat.
Excepté dans les cas de reclassements de postes qui se
font par appel et mise à concurrence de candidatures, pour les besoins
d'efficacité et d'efficience. En effet, chaque État membre a
droit à un « quota » dont la Conférence
générale détermine la proportion21. Et
même si certains postes à l'instar de ceux financés par des
ressources extrabudgétaires et les postes dits « linguistiques
» échappent à la répartition géographique, il
reste que l'UNESCO en vue de l'amélioration de cette dernière, a
mis un programme dit « des jeunes professionnels », destiné
aux pays sous-représentés et qui permet de former de jeunes et
nouveaux fonctionnaires.
Aussi est-il possible d'être employé par l'UNESCO
aux postes des Directeurs, des Professionnels ou cadres organiques, des Service
généraux et des Assistants temporaires. Il est également
possible d'y travailler dans le cadre des programmes des jeunes professionnels
et experts associés. Il est à noter qu'il existe un recrutement
interne et un recrutement externe, tous les postes vacants étant mis en
ligne sur le site de l'UNESCO et faisant l'objet d'une description de poste.
Ainsi en 2007, le personnel cadres ou non cadres du
Secrétariat était estimé à 2068 fonctionnaires
internationaux, les 2/3 travaillant au Siège de l'UNESCO. Toujours au
cours de la même année, il comprenait 55% de femmes et 45%
d'hommes. Et à en croire le dernier Manuel des Commissions nationales
élaborées dans la même période, cette parité
est l'une des plus « équilibrées du système des
Nations Unies. »
C'est dire en fait que la structure (flexible et mouvante) du
Secrétariat au Siège depuis la Réforme de 2000, comprend
trois grandes composantes que sont les secteurs de programmes qui portent sur
les domaines de compétence de l'Organisation et sont chacun
dirigés par un sous-directeur général. Sous
l'autorité d'un sous-directeur général, les secteurs de
soutien sont de deux types à savoir : le Secteur des relations
extérieures et de la coopération (ERC), chargé comme son
nom l'indique des relations avec les États membres et avec les
Commissions nationales, et le Secteur de l'administration (ADM). Les services
centraux enfin chargés pour l'essentiel d'élaborer des politiques
et stratégies, assurent des fonctions de contrôle, de suivi et de
coordination, en même temps qu'ils fournissent des services à la
Direction générale dans l'optique d'un meilleur rendement du
système. Il s'agit entre autre du Bureau de la planification
stratégique (BSP), du Bureau d'information du public (BPI) qui se veut
de susciter une prise de conscience des problèmes dont traite
l'Organisation, et le Département Afrique (AFR) qui assure le suivi et
la coordination des
21 Celle-ci est continuellement et
systématiquement réajustée par le Conseil exécutif
qui indique le nombre de postes accessibles aux nationaux des Etats membres
activités concernant l'Afrique, la mobilisation des
ressources en faveur dudit continent, ainsi que des relations avec ses
États membres.
C'est dire également que cette structure du
Secrétariat est flexible et mouvante, parce que fonction de la
réforme mise en place depuis 2000, réforme conforme aux OMD des
Nations unies, et que l'on observe principalement au travers de la nouvelle
politique de décentralisation, politique se matérialisant par la
mise en place des bureaux hors siège.
2-4. LE BUREAU REGIONAL.
Encore appelé « cluster » ou bureau
multi pays, le bureau régional de l'UNESCO qui est l'organe de
coopération de l'institution spécialisée au sein de la
sous région, est situé au quartier Bastos de la ville de
Yaoundé. En effet, cette « imposante bâtisse »
située proche de la Compagnie de sécurisation des diplomates,
comporte plus d'une trentaine de bureaux. Il couvre en plus du Cameroun, le
Tchad et la République centrafricaine.
De manière générale, les bureaux UNESCO
Hors siège « ont pour mandat de traduire concrètement en
programmes et projets au niveau des Pays, les orientations et choix
stratégiques des instances décisionnelles de l'UNESCO.
»22 Ce bureau qui depuis Paris reçoit des ressources
humaines, financières ou matérielles pour une rentabilité
adéquate, se veut également d'impliquer les États dans la
définition des axes d'action prioritaires de l'Organisation, l'objectif
étant de mieux cibler les projets et de bâtir une vision commune
de l'action de l'UNESCO dans l'Afrique Centrale.
C'est dire que le rôle du cluster de
Yaoundé est analogue aux responsabilités incombant à tout
bureau régional. Il s'agit de : représenter le Directeur
général de l'organisation dans les pays du groupement ;
participer aux réunions et exercices de coopération en tout genre
impliquant le système des Nations Unies et/ou les pays de son ressort ;
coopérer étroitement avec chacun des États membres de son
ressort, notamment avec les commissions nationales, pour leur action dans le
domaine de compétence de l'UNESCO ; animer la coopération
internationale au sein de son ressort ; animer l'action souvent très
dynamique des partenaires divers, qu'ils appartiennent ou non au cercle
rapproché de l'UNESCO (clubs, écoles associées, ONG,
donateurs, etc.). Sauf qu'une bonne compréhension des relations
Cameroun-UNESCO passe également par la maîtrise du cadre
22 Ainsi que le rappelait le Représentant de
l'UNESCO au Cameroun Bernard HADJADJ, dans une allocution prononcée au
cours d'un séminaire organisé en septembre 2007 à
l'hôtel Hilton de Yaoundé
institutionnel de coopération de cette Organisation dont
l'assistance technique auprès des États membres semble
considérable.
B. LE CADRE INSTITUTIONNEL DE COOPERATION DE
L'UNESCO.
En tant qu'institution spécialisée, l'UNESCO est
appelée à réaliser au sein des pays membres, quelques uns
des objectifs prévus au chapitre IX de la charte des Nations unies, au
titre de coopération technique. Ce faisant, l'orientation de la
coopération technique de l'UNESCO s'inscrit dans le cadre
général de la conception onusienne de l'aide au
développement humain et durable, telle que résolue dans le cadre
des Objectifs Millénaires pour le Développement (OMD) en 2000.
D'où le mécanisme de coordination est assuré par le
Conseil Economique et Social (ECOSOC), suivant les accords de
coopération établis entre les Nations unies et les institutions
spécialisées, conformément aux articles 63 et 64 de la
charte.
Dans un cadre plus élargi, l'UNESCO entretient des
rapports avec les autres organismes internationaux à l'instar des
organismes de financement de l'ONU tels que l'Office de Secours et de Travaux
des Nations unies pour les Réfugiés de la Palestine dans le
Proche Orient (UNRWA), le Fonds des Nations unies pour l'Enfance (UNICEF), le
Programme Alimentaire Mondial (PAM), et la Banque Internationale pour le
Reconstruction et le Développement (BIRD). Elle est également en
relation avec les ONG et les autres institutions spécialisées
telles l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l'Organisation
Internationale pour le Travail (OIT) et le Fond des Nations unies pour
l'Agriculture (FAO).
Plus fondamentalement doivent être prises en compte les
relations qu'entretient l'UNESCO avec l'organe de coordination de l'ONU qu'est
le Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD). Car
l'UNESCO n'étant pas un bailleur de fonds, les rapports entretenus avec
le PNUD se situent dans la logique du cycle de coopération des Nations
unies élaboré par le PNUD, consistant à financer les
institutions spécialisées sur la base des priorités
nationales de développement. Aussi, cette dépendance
financière des institutions spécialisées vis-à-vis
du PNUD a fait dire à Michel Virally que « sur le plan de la
coopération technique, le système des Nations unies se conforme
beaucoup plus nettement que sur tout autre plan à l'image du
système solaire, dont le centre est ici occupé par le PNUD
»23
Enfin, les activités entreprises par l'UNESCO se
scindent en deux catégories que sont le budget ordinaire dont les
activités relèvent directement des contributions des
États
23 Cité par Raymon Epote, op.cit : 23
membres de l'Organisation, et les activités entreprises
à titre extrabudgétaire dans le cadre de la mise en oeuvre des
projets de développement, et qui de ce fait interpellent les organes de
financement (PNUD, BIRD...), l'UNESCO ne devenant que simple chef de file ou
agence d'exécution.
Calqué sur le modèle de l'ONU, le budget
ordinaire est alimenté par les États membres dont les
contributions sont fonctions de leurs ressources, superficie et nombre
d'habitant. A titre d'exemple pour l'exercice financier 2006-2007, le montant
du budget du programme ordinaire s'est élevé à 610 000 000
de dollars des US. Fonds couvrant les frais de personnel et de fonctionnement
ainsi que le financement des activités concernant la coopération
intellectuelle internationale. Ils peuvent également être
utilisés pour l'identification et la définition de projets de
coopération pour le développement et l'élaboration de
stratégies. Reste qu'il est à regretter qu'un nombre important
d'États membres ne puisse pas remplir leurs obligations
financières. Non moins importants sont les sommes versées
à l'UNESCO en dehors des contributions obligatoires.
Souvent qualifiés de contributions volontaires, les
fonds extrabudgétaires relèvent de trois modalités
principales dont deux ne nécessitent pas de rapport narratif ou
financier au donateur : il s'agit des montants portés au crédit
du budget ordinaire, destinés à renforcer un article
budgétaire existant, et des comptes spéciaux, créés
pour financer un institut de l'UNESCO ou un programme de grande envergure. La
troisième catégorie des fonds extrabudgétaires concerne
les accords de fonds-en-dépôt, relatifs à un projet ou un
programme spécifique identifié par la source de financement en
coopération avec l'UNESCO. Bien évidemment, des rapports
détaillés, narratifs ou financiers ici sont soumis au
donateur.
Dans la situation actuelle, on remarque que les principales
sources de financement au titre de la coopération pour le
développement proviennent des gouvernements, du système des
Nations Unies (le PNUD étant son plus ancien collaborateur), de la
commission européenne, du secteur privé, et des banques
multilatérales de développement ainsi que des fonds de
développement. Enfin dans le cadre de la Stratégie à moyen
terme (2002-2007), il était prévu que les fonds
extrabudgétaires, constituant une composante essentielle des ressources
de l'UNESCO, soient pleinement intégrés dans la programmation de
l'Organisation. Il est à noter que ces aménagements
institutionnels sont essentiels pour l'appréhension de la politique de
coopération de l'UNESCO avec les États membres.
SECTION II : LE CADRE POLITIQUE DE COOPÉRATION
CAMEROUN-UNESCO
Il s'agit dans un premier temps d'évoquer la politique
de coopération de l'UNESCO qui, recèle des points de convergence
certains avec le système des Nations unies. Ensuite d'énoncer les
principes directeurs du système camerounais de coopération
internationale qui, bien qu'en étant en phase avec les idéaux
universels promus au sein de l'UNESCO, nécessite tout de même
quelques réaménagements en vue d'une meilleure concorde avec l'
« esprit du temps ».
PARAGRAPHE I : LA POLITIQUE DE COOPERATION DE
L'UNESCO.
Bien qu'il n'existe, à proprement parler, pas de
filiation directe entre l'UNESCO et l'ONU (si l'on s'en tient à leurs
origines), il reste cependant difficile d'appréhender la politique de
coopération de celle-ci en marge de celle du système onusien. Ce
qui ne l'empêche guère de préserver certaines
spécificités qui, très souvent, en font un organisme
difficilement saisissable aux yeux de certains experts.
A. L'UNESCO DANS LE SILLAGE DES NATIONS UNIES.
« Comme il est évident que la liberté est
fragile sans garanties sociales et économiques, rappelle Jean-Baptiste
Duroselle, les Nations unies sont résolues `à favoriser le
progrès social et à instaurer de meilleures conditions de vie
dans une liberté plus grande». Pour y parvenir, poursuit notre
historien des relations internationales, le meilleur moyen est la
coopération internationale qui permettra de résoudre les
problèmes internationaux d'ordre économique, social, intellectuel
ou humanitaire » (Duroselle, 1998 : 9). Le parallèle avec l'UNESCO
est effectif dans le sens où l'action de l'UNESCO au sein des
États membres s'effectue par le biais de la coopération
intellectuelle internationale en vue de renforcer les conditions
matérielles et spirituelles d'existence et de coexistence entre les
hommes, et ceci dans le strict respect des droits et libertés des
peuples. De manière plus précise, la politique de
coopération de l'UNESCO, à l'instar de son cadre institutionnel,
s'arrime aux objectifs des Nations unies exprimés dans la charte
(article 1 paragraphe 3 ; article 13 et 17, et Chapitre IX et X), et
récemment, à ceux exprimés dans le cadre des OMD.
Il s'agit d'une politique respectueuse de la
souveraineté interne des États et qui se limite pour l'essentiel
sur l'aspect technique, conformément aux priorités nationales. Et
dans la perspective de la Résolution 200 (III) de l'Assemblée
générale des Nations unies de 1948, l'assistance technique
fournie qui n'est donnée qu'aux gouvernements ou par leur
intermédiaire devra répondre aux
priorités du pays intéressé, et ne constituera pas un
prétexte d'ingérence économique ou politique. C'est dire
que la primauté ici est accordée à l'intérêt
national et à la sauvegarde de la souveraineté de l'État
bénéficiaire de l'assistance technique. Dans la même veine,
la formule utilisée dans le cadre du Programme Elargi d'Assistance
Technique (PEAT) fondée en 1949 « consistera à envoyer des
experts dans les pays afin de conseiller les gouvernement sur leurs programmes
de développement, à former à l'étranger les experts
issus des pays en voie de développement, à former les techniciens
sur place... » (Epote, op.cit : 44) Sauf que le nouveau contexte
international, sans nécessairement remettre en cause ces données
classiques, autorise à reconnaître que les mutations en cours ont
créé un « lien entre un régionalisme, qui ne se
définissait jusqu'alors que par rapport à des enjeux nationaux,
et un régionalisme défini par rapport à un ordre mondial
» (Karoline Postel-Vinay, in Marie-Claude Smoots, 1998 : 117). C'est fort
de cela que l'on assiste à l'avènement des problèmes dits
« globaux » qui interpellent la communauté internationale dans
son ensemble. C'est aussi pourquoi l'on assiste de plus en plus à
l'émergence des fora internationaux regroupant des acteurs
étatiques et privés autour des thèmes tels que l'EPT ou
encore les OMD.
Au sein de l'UNESCO, la mise en application des OMD
obéit à deux types d'actions à caractères
opérationnels et incitatrices. L'action incitatrice se traduit à
travers les conférences organisée aux niveaux sous
régional, régional et international, tandis que l'action
opérationnelle se traduit par le recrutement d'experts et l'envoi des
missions d'évaluation au sein des pays concernés. Ces actions,
ainsi que nous l'avons déjà souligné, sont soutenues par
les ressources de son budget ordinaire et des ressources
extrabudgétaires et reposent pour l'essentiel sur la coopération
technique.
Aussi nous est-il permis de noter que l'orientation
générale de la coopération de l'UNESCO s'appui
prioritairement sur le renforcement du secteur éducatif, ainsi que le
révèle le forum de Dakar sur l'EPT, et ceci avec le concours du
BIRD, du PNUD et de l'UNICEF. Et bien avant ledit forum, le programme
d'assistance de l'UNESCO évoluait progressivement dans la perspective de
renforcement de ce secteur, l'objectif étant de subvenir aux besoins des
pays les moins avancés, pour qui l'éducation apparaissait comme
la priorité des priorités. Est- ce à dire que les autres
secteurs sont pour autant dépourvus d'intérêt ? La
réponse va nécessairement à la négative dans la
mesure où la science, la culture, la communication et même les
droits de l'homme sont pris en compte, en fonction des besoins de chaque pays.
Mais également parce qu'ils constituent un palliatif significatif
à l'éducation qui, il faut le dire, est un secteur transversal. A
côté de ces données de bases qui relèvent de la
constance, il
nous sied de mentionner la priorité accordée au
continent africain et la politique de décentralisation instaurée
dans le sillage des OMD, comme critères essentiels de la « nouvelle
» politique de coopération de l'UNESCO.
B. LA DÉCENTRALISATION ET L'AFRIQUE COMME
PRIORITÉS DE LA NOUVELLE POLITIQUE DE L'UNESCO ?
Les principes d'une décentralisation de l'UNESCO sont
pour la première fois de manière officielle fixés dans la
résolution 30 C/83, de 1999. Réforme qui sera relayée par
un plan d'action approuvé par le Conseil dès sa 159e
session tenue en avril 2000. Il s'agit prioritairement de la création de
bureaux hors siège chargés de desservir un groupe de pays. Au
coeur de cette réforme se trouve l'instauration des bureaux multipays
qui vont porter le nom de cluster office, institués pour
être la nouvelle charpente du programme de décentralisation. Car
au-delà de la pure compression, ces bureaux plutôt que de simples
délégations lointaines du Siège, assurent une
représentation effective constituant le lieu même de la
présence de l'UNESCO, le véritable nouveau centre du dispositif.
Centre pluriel, le cluster « amène également la
notion de réseau et d'interaction au coeur de la conception nouvelle du
fonctionnement de l'UNESCO. »
Il est tout de même indiqué d'observer que
certains bureaux homologues aux cluster ne couvrent qu'un seul pays,
soit que ce dernier soit en situation de post-conflit ou en transition, soit
encore du fait de son immensité comme c'est le cas des E-9 (neuf pays
à fortes population) : il s'agit du Bangladesh, du brésil, de la
Chine, l'Inde, l'Indonésie, le Mexique, le Pakistan et enfin l'Egypte et
le Nigeria pour ce qui est de l'Afrique. En outre, il existe dix bureaux
régionaux analogues aux instituts qui appuient les bureaux multi pays
sur des programmes bien définis. Il s'agit des clusters de
Dakar, Nairobi, Beyrouth, Bangkok et La Havane, pour ne citer que ces exemples.
Enfin, deux bureaux de liaison auprès des Nations unies situés
à New York et à Genève complètent notre
réseau décentralisé.
Au total, l'on peut dire que partant d'un déploiement
de 74 bureaux hors siège, cette réforme a mise en place un
système plus ramassé organisé autour de 52 bureaux. A
savoir 27 bureaux multipays, 21 bureaux nationaux, 2 bureaux de liaison avec
l'ONU, et enfin les bureaux régionaux de Venise et de Santiago du Chili,
non dénombrés parmi les multipays.
Il va sans dire que l'utilité de cette politique de
décentralisation serait davantage significative en ceci que la mise en
place de ce dispositif pallie aux éventuelles possibilités de
fermeture de bureau, tout pays se trouvant inclus dans un cadre favorable
à l'instauration
d'une coopération accrue entre pays du même
groupe. En plus, un effort considérable a permis une nette
amélioration des effectifs des unités hors siège qui sont
passées de 226 professionnels à 271 au cours des trois derniers
biennia.
Qui plus est depuis le Sommet mondial de 2005, l'UNESCO a
avancé l'examen de sa propre Stratégie de décentralisation
initialement prévue pour 2008-2009. Dans la perspective de la
réforme de l'ONU, l'UNESCO en effet adhère à la
nécessité d'une harmonisation plus poussée entre les
Organes des Nations unies, d'un alignement plus étroit sur les processus
de développement conduits dans les pays et d'une transparence et d'une
responsabilisation accrue. Il s'agit pour l'Organisation d'affiner l'actuel
système de décentralisation en s'inspirant du cadre de
décentralisation récemment mis en place pour la réforme du
Secteur de l'éducation, notamment pour renforcer sa capacité
à réaliser tout particulièrement l'EPT et accroître
l'impact de son action. Il s'agit également pour notre institution de
faire le point sur la Stratégie de décentralisation (176 EX/6) et
d'améliorer la communication sur la réforme au sein du
réseau hors siège.
L'analogie existante entre l'UNESCO et l'ONU reste
également perceptible au niveau de l'Afrique en ceci que le
développement et la coopération restent un enjeu permanent de
l'action de ces organisations dans un contexte où la paix et la
sécurité demeurent des défis majeurs. De l'avis de
Jean-Emmanuel PONDI, « si pour certaines populations et certains
dirigeants du monde l'ONU n'est qu'un `'machin», un `'moulin à
parole» et `'une bureaucratie budgétivore et largement
inefficace», telle n'est pas, dans une très large mesure,
l'appréciation que les populations et les dirigeants africains font de
son action sur leur continent où elle est indispensable au quotidien....
» (Pondi, sous la direction de, 2005 : 9)
Aussi suffit-il de considérer les grands programmes de
l'UNESCO pour se rendre compte de la priorité réservée au
continent africain. Qu'il s'agisse de la Scolarisation Primaire Universelle
(SPU), du Plan de mise en oeuvre de Johannesburg adopté au Sommet
mondial pour le développement durable (2002), de la Décennie
internationale d'action, « l'eau, source de vie » (2005-2015), et du
Programme international pour le développement de la communication
(PIDC), il est très aisé de constater que l'Afrique à
priori occupe une place de choix.
Il faut enfin de compte dire au niveau du Cameroun que
l'impact de ces nouvelles orientations a été très
significatif au cours de cette dernière décennie, comparée
aux précédentes où le bureau de l'UNESCO ne fonctionnait
que par intermittence, où « ouvertures » et « fermetures
» se succédaient assez souvent. Toutefois, il reste que des efforts
restent encore à faire par les deux parties afin d'améliorer la
visibilité de cette
coopération qui reste assez mal connue au sein des
populations. Mais ceci passe également par une meilleure connaissance de
cette organisation dont la maîtrise des rouages déterminants de
son action ne relève pas toujours de l'évidence.
C. LA POLITIQUE DE COOPÉRATION DE L'UNESCO EN BUTE
À DES DIFFICULTÉS FONCTIONNELLES
Frédéric Ramel souligne fort bien que l'oeuvre
de Grotius24 consiste à doter la société
internationale d'un « ordre fondé sur des principes juridiques
» (Ramel, 2002 : 99). Il convient tout de même de noter que l'effort
inlassable engagé par l'UNESCO pour « construire la paix dans
l'esprit des hommes » nécessite une implication quotidienne des
principes moraux universels comme complément à cet ordre
juridique. Et si ses promoteurs réfutent toute posture visant à
reconstruire la société mondiale sur des postulats politiques
dotés des bases scientifiques solides à même de
réaliser empiriquement le cadre politique de la société
des individus, c'est parce qu'une telle attitude se fonde sur l' «
inquiétude maladive » hobbesienne à l'égard d'autrui
(ibidem : 118). Tout au plus, s'accordent-ils avec la perception de Pufendorf
pour qui la nature humaine est par essence sociable. Sauf que c'est à ce
niveau que constitue la principale difficulté : traduire cette
sociabilité dans le fonctionnement quotidien de l'organisation.
Déjà Victor Yves Ghebali ressassait trois
grandes préoccupations auprès des pères fondateurs de
l'UNESCO, lesquelles préoccupations sapaient les fondements du projet
qui dans son essence devenait « hybride », et dans sa formulation,
« ambigu ». Il s'agissait de « prévenir le retour d'une
`'grande et terrible» guerre, combattre les germes de fanatisme dans la
mentalité des peuples et enfin, fonder la paix nouvelle sur le respect
des droits de l'homme » (cité par Pondi). De la difficile
conciliation de ces facteurs, poursuit-il, résultera « un projet
nimbé d'une obscure clarté ». Peut-être, ceci pourrait
entre autres expliquer le fait que sa gestion quotidienne soit
confrontée à de sérieuses difficultés de
fonctionnement.
De l'avis d'Emmanuel PONDI, le fonctionnement quotidien de
l'UNESCO est difficilement réalisable du fait d'un Conseil
exécutif quelque peu dominé par la Conférence ;
associé à cela la prolifération des Commission nationales
et ONG qui affublent nos deux principaux organes, ce qui entame la gestion
quotidienne de l'UNESCO. C'est dire que pour ce spécialiste des
relations internationales, il ne fait aucun doute que la nature
intrinsèques des problèmes relatifs aux différents
secteurs d'activités, lesquels impliquent nécessairement des
24 Dont l'influence des idées auprès des
Pères fondateurs de l'UNESCO est conventionnellement reconnue
choix importants de société, «
prédisposait l'UNESCO et son chef à être
entraînés dans des controverses de nature politique » (Pondi,
ibidem : 30). Où l'on voit ainsi se profiler toute la
problématique de « l'acteur et du système ».
Dans la perspective de Crozier et Friedberg, l'acteur est
régulièrement en quête de contrôle
d'éventuelles « zones d'incertitudes » qui lui accorderaient
des coudées franches lui permettant d'échapper en partie à
l'emprise du système, si ce n'est d'améliorer sa marge de
manoeuvre vis-à-vis de celui-ci. Il se tisse alors un ensemble de
relations complexes entre les individus où « jeu » et «
pouvoir » sont mobilisés par l'ensemble des acteurs, créant
ainsi une configuration dont le processus n'obéit guère à
leurs subjectivités respectives. Une telle complexité s'observe
également au sein de notre organisation intergouvernemental qui n'est
rien d'autre qu'une organisation d'États ; d'où « le
principe et la finalité de tout son pouvoir et de son efficacité
résident dans ces États » et dans leur capacité
d'agir de concert avec la société civile, les peuples et partant,
les individus. Pour ne s'en tenir qu'à l'acteur principal qu'est
l'État, on s'en rend bien compte que ses velléités
particularistes et de puissance, très souvent l'opposent aux principes
universels et universalistes nécessaires à la réalisation
de la coopération intellectuelle souhaitée au sein de l'UNESCO.
C'est ainsi qu'au cours de son évolution, l'UNESCO et ses principaux
dirigeants (l'exemple du Sénégalais MATAR M'BOW est
révélateur à ce propos), ont régulièrement
été confrontés à des difficultés minant son
fonctionnement quotidien. De même, les sanctions opérées
à l'encontre du régime de Tel Aviv en 1970, la mise en
quarantaine du régime sud africain d' « apartheid », ou encore
le retrait des USA et de la Grande-Bretagne, sont des exemples patents des
difficultés rencontrées par l'UNESCO dans son effort quotidien
d'élévation des défenses paix dans l'esprit des
hommes25. Il s'avère donc important qu'un État comme
le Cameroun puisse maîtriser ces couacs internes propres à
l'UNESCO, et les nouveaux enjeux liés à la mondialisation, afin
de mieux appréhender sa politique de coopération avec
l'Organisation mondiale au mieux de ses intérêts qui ne sont
nécessairement pas opposés à ceux de la communauté
internationale.
PARAGRAPHE II : LA POLITIQUE CAMEROUNAISE DE
COOPÉRATION INTERNATIONALE
Depuis son accession au statut juridique international, lequel
statut lui confère des privilèges certains à l'instar de
l'adhésion au concert des nations souveraines, le Cameroun
25 Ajouté à cela des déficits
budgétaires, causés tantôt par la « mauvaise foi
» de certains Etats qui n'honore pas toujours convenablement à
leurs contributions, tantôt aux « retraits » de certains pour
des raisons idéologiques ou politiques
s'est doté d'une politique étrangère qui
structure et rend compte de son action internationale. L'on observe en effet
que les principes directeurs régissant la stratégie camerounaise
de coopération internationale restent intangibles, non seulement dans
les domaines bilatérale et multilatérale, mais aussi au sein des
relations sud-sud et sud-nord. Si l'on peut féliciter le fait que la
diplomatie camerounaise soit restée fidèle à ses
principes, il reste que celle-ci devrait, tout en préservant certains
acquis, se réajuster à la nouvelle conjoncture internationale,
afin de gagner en efficacité.
A. ÉNONCIATION ET JUSTIFICATION DES PRINCIPES
DIRECTEURS DE LA COOPÉRATION AU CAMEROUN.
1. INDÉPENDANCE NATIONALE, COOPÉRATION
INTERNATIONALE ET UNITÉ AFRICAINE COMME FACTEURS STRUCTURANT LA
PROJECTION EXTÉRIEURE DU CAMEROUN
Depuis son accession à l'indépendance le
1er janvier 1960, la coopération internationale et
l'indépendance nationale ont longtemps constitué le leitmotiv de
l'action du Cameroun au niveau international. Et comme le rappelait
l'ex-président AHIDJO en 1976, « nos prises de positions dans les
affaires internationales se sont toujours placées dans l'optique de la
plus totale fidélité à ces deux principes
d'indépendance nationale et de coopération internationale »
(Evina, 70, 1982). Dans le même sillage, l'actuel chef de l'État,
M. Paul Biya, alors qu'il s'apprêtait à présider aux
destinées de la nation camerounaise, rappelait le 6 novembre 1982 que
les options sur le plan international sont la coopération, la paix entre
les nations et le non-alignement (MOUELLE KOMBI, 1996 : 46).
Longtemps confondu avec le non-alignement,
l'indépendance nationale permet au Cameroun de préserver sa
souveraineté et sa spécificité à l'échelon
international. Ce dernier pouvait à cet effet définir ses
priorités propres, à l'instar de la lutte contre la
pauvreté. Il allait de soit que le non alignement, comme ce fut des
autres nations représentant le tiers-monde, ne pouvait aboutir
qu'à la coopération internationale, qui est toujours apparue
comme l'une des principales manifestations de la solidarité
internationale. Aussi la coopération multilatérale en exercice au
sein du système des Nations Unies, et dont la recherche de la paix en
constitue le principal objectif, a toujours offert une plus grande
ouverture.
Partant de l'idée selon laquelle « le comportement
d'un acteur étatique sur la scène internationale peut être
déterminé par diverses finalités » Mouelle Kombi dans
son effort de
mise en relief d'une politique étrangère
camerounaise, ajoutera l'unité africaine comme autre principe
fondamental structurant l'action internationale du Cameroun. Pour lui une telle
unité devrait passer par la libération totale du continent, ceci
dans le respect des frontières héritées de la
colonisation. Il relève néanmoins que cette aspiration au
panafricanisme reste encore une nébuleuse.
2. JUSTIFICATION DES CHOIX DE POLITIQUE EXTÉRIEURE
DU CAMEROUN
Pour tout observateur attentif des relations internationales
africaines post- indépendances et post-guerre froide, le discours sur le
développement reste la rhétorique la mieux partagée au
sein des différentes élites. Pour ce qui est du Cameroun (qui ne
fait guère exception ici), cette « recherche du
développement (voir infra sur notre étayage de ce concept) est
l'un des vecteurs majeurs de la cohérence et de la rationalité
» de sa politique étrangère (M. Kombi, 1996, 75). Il s'agit
en fait d'une stratégie réaliste dans la mesure où la
raison d'être de la diplomatie dans les pays en voie de
développement reste la recherche de changement de l'environnement
international au mieux des intérêts desdits États. «
Et très souvent cela se fait à travers la diplomatie
multilatérale au sein des organisations internationales » (Menye,
2003 : 2) De surcroît, le rendement des institutions
spécialisées de l'ONU, à l'instar de l'UNESCO « est
d'une importance et d'une utilité telles que le gouvernement camerounais
l'intègre dans sa stratégie de développement » (M.
Kombi, idem : 180)
Il n'est de ce fait pas très surprenant de constater
à partir de ces principes directeurs que le Cameroun puisse voter
à plus de 90% en faveur des résolutions des Nations Unies et
partant de l'UNESCO, compte tenu de sa sensibilité à
l'éthique pacifiste et à la morale internationale. « Cette
sensibilité à l'éthique et à la morale
internationale, est un indice offert à la compréhension de ce que
le Cameroun attend de l'organisation mondiale et du rôle qu'il aimerait
voir jouer par celle-ci ». Il n'est non plus très surprenant que
Yaoundé soit surreprésenté au sein de l'institution
spécialisée des Nations Unies qu'est l'UNESCO, par rapport au
quota normal de représentation, même si l'on parvient encore
à s'interroger sur l'existence réelle d'une politique
camerounaise de placement des nationaux dans la fonction publique
internationale.
Car si l'apport de l'UNESCO est d'une importance et d'une
utilité telle que les autorités camerounaises l'intègrent
dans la stratégie de développement, il reste que cette
dernière, pour plus d'efficacité, devrait accorder une place
significative à la coopération
internationale. Dans la mesure où le Cameroun par le
biais de celle-ci « peut devenir allocataire des ressources
financières, technologiques, scientifiques, naturelles, et même
humaines dont il ne dispose pas et qui, pourtant, lui sont nécessaires
pour prétendre au progrès... » (Idem : 225) Mieux, si les
instruments multilatéraux permettent au Cameroun d'apporter sa touche
spéciale à la structuration organique et normative du village
planétaire, il est indiqué de rappeler que l'unité
nationale devrait être au centre d'une telle politique
étrangère. Bien plus, si tant est que le peuple doit être
le bénéficiaire des dividendes tirées de l'action
internationale du Cameroun, alors chaque individu doit « se sentir
davantage impliqué dans ce processus, de manière soit
immédiate soit médiate » (idem : 228).
Car, à l'heure où l' « externe » et l'
« interne » sont en interaction permanente, au moment où la
traduction, sinon la mise en oeuvre des objectifs visés nécessite
des programmes d'action qui tiennent également compte de l'environnement
interne, l'on peut s'interroger avec quelque raison sur l'existence d'une
politique cohérente et bien coordonnée de coopération
internationale.
B. LA POLITIQUE CAMEROUNAISE DE COOPÉRATION
FACE AUX NOUVELLES MUTATIONS INTERNATIONALES : NÉCESSITÉ D'UNE
STRATÉGIE COHÉRENTE ET EFFICACE
1. LES NOUVEAUX `MIRAGES' DE LA POLITIQUE
ÉTRANGERE
Les mutations dont connaît la société
internationale ne nécessitent uniquement pas un « effort de
recomposition du savoir », où les nouveaux paradigmes viennent se
confronter aux classiques. Non plus, elles ne feraient seulement appel à
une (ré) appréhension des principes, à l'heure où
la responsabilité est de plus en plus opposée à
l'intérêt et à la sécurité internationale.
Les transformations et détériorations de l'environnement
international font également appel à un effort de recomposition
des pratiques, notamment depuis l'avènement des nouvelles formes
d'intégration qui transcendent les actions diplomatiques
traditionnelles. (Badie et Smouts, 1999 :19) En effet, si tout le monde
s'accorde avec James Rosenau que l'État sur la scène
internationale poursuit essentiellement trois objectifs que sont la recherche
d'opportunités, la préservation situations qui lui sont
favorables et, la modification de celles qui lui sont défavorables ; il
reste que la politique étrangère qui jusqu'aujourd'hui demeure la
matière par excellence des relations internationales, n'est plus
seulement une affaire des relations entre gouvernements. (Battistella, 2006
:323 ; Charillon, 2002 : 13)
C'est que dans la perspective du retournement du monde,
« les interactions incessantes entre les dynamiques issues du monde des
États et celles provenant du monde `'multicentré» tendent
à recomposer profondément le jeu international et, en même
temps, à complexifier et à fragiliser l'action diplomatique
traditionnelle » (Badie et Smouts, op.cit : 71) C'est par ailleurs que la
politique étrangère qui désormais se fait au quotidien,
n'est plus un « domaine réservé » des seuls diplomates,
n'obéit plus véritablement à un centre unique d'impulsion,
et ne se déroule plus dans un contexte d'obscurité, de
mystification et de la rétention de l'information, compte tenu de la
révolution du communicationnel. Elle se fait désormais au
quotidien et implique également les individus. Cette
prolifération d'interlocuteurs est liée à la
multiplication des paramètres à gérer. C'est
également qu'avec l'apparition des thèmes nouveaux,
renforcés par le processus en cours de compression de temps et de
l'espace du fait des technologies de l'information et de la communication, de
renforcement et d'intensification de l'interdépendance entre les
sociétés, il arrive que des acteurs privés soient plus
compétents et mieux aguerris que les administrations d'États.
(Charillon, op.cit :18)
C'est qu'en fin de compte la politique étrangère
se « technicise pour devenir de plus en plus une politique
étrangère de `proximité», jugée sur ses
capacités à régler sur le terrain des problèmes
concrets, et tirant donc sa légitimité de cette efficacité
éventuelle » (idem : 23) Tout en restant dans la même
perspective, mais dans le contexte spécifiquement africain, il est
autorisé à penser que la pertinence de la politique de
coopération internationale ici sera fonction de l'impact des
réalisations opérées sur le terrain. Ceci se justifie
d'autant plus que nombre de politiques étrangères de ce continent
rendent absurde le postulat classique d'une différenciation entre
l'externe et l'interne. (Dietrich Jung, in Charillon : 102) L'enjeu ici est
d'autant plus considérable que ces États qui tiennent beaucoup
aux Organisations internationales et aux garanties que celles-ci leurs
apportent (Ben Tonra : 341 ; Pondi), mais dont « la pratique de la
politique étrangère est indissociablement liée, (...)
à un processus de formation de l'État en cours, n'ont toujours
pas réussi à lever le soupçon qui leur présente sur
la scène internationale comme des régimes autoritaires persistant
du fait d'une inimitié congénitale et persistante existant entre
l'État et la société. (Mécanismes des rentes
politique et économique y obligent) (Jung : 104 ; Owona Nguini, 1999)
Peut-être est-ce la raison pour laquelle l'effectivité de la
politique camerounaise de coopération internationale connaît des
dysfonctionnements inquiétants.
2. POUR UNE NOUVELLE POLITIQUE CAMEROUNAISE DE
COOPÉRATION
Le Cameroun, s'il est doté de personnalités dont
la compétence et la mobilisation au sein des structures internationales
et à l'international, lesquelles performances renforcent quotidiennement
son rayonnement diplomatique, connaît néanmoins des
dysfonctionnements internes importantes qui, à long terme pourraient
saper sa crédibilité internationale. De tels couacs internes qui
s'observent régulièrement au sein des principales institutions
ont également des répercussions au niveau du déploiement
sur le terrain.
Cela fait un peu plus d'une décennie en effet, Kombi
Mouelle notait une « carence fonctionnelle regrettable » au sein de
la coordination interministérielle de l'action internationale
camerounaise. (op.cit : 39) Or, le Comité interministériel de
coordination des Relations internationales créé en octobre 1973,
et régi par le décret n° 78/026 du 16 janvier 1978,
était chargé dans le cadre des orientations définies par
le chef de l'État de « déterminer les objectifs de la
République du Cameroun dans le domaine international, de coordonner les
actions des divers département ministériels en vue d'atteindre
ces objectifs et de procéder périodiquement à
l'évaluation des relations extérieures ». Et l'actuel
Directeur de l'IRIC de regretter le fait que ledit Comité n'ait eu
qu'une existence « fantomatique », en dépit de son
institutionnalisation formelle (idem : 40) Force est de noter que cette carence
fonctionnelle interministérielle persiste encore aujourd'hui. En effet,
alors que nos investigations sur l'action normative de la coopération
Cameroun-UNESCO nous conduisaient légitimement auprès du
Ministère de la Planification, de la Programmation du
Développement et de l'Aménagement du Territoire (MINPAT), le Chef
de la cellule des conventions, nous renvoyait en toute `politesse'
auprès du MINEDUB, parce que ne disposant, à ce moment d'aucune
Convention signé entre le Cameroun et l'UNESCO. Les responsables de ce
département ministériel à leur tour nous renvoyaient
auprès de la Commission nationale, qui également nous priait de
nous adresser auprès du Bureau régional. Après cette
série de va-et- vient somme toute improductive, nous nous
présentions pour la seconde fois devant le responsable du MINPAT qui se
résolu à nous présenter la situation avec un minimum de
clarté : « le Ministère du Plan est sensé être
impliqué dans l'application des différentes Conventions. Or c'est
à peine s'il reçoit les Copie Certifiées Conformes desdits
textes. C'est dire que le MINEDUB à l'instar des autres
ministères, ne l'associe véritablement, ni dans
l'élaboration, ni dans la conclusion de ces questions qui dans la
pratique deviennent leur domaine réservé. Pis encore, je dois
courir auprès des ministères concernés pour
requérir quelques conventions... »
Le fait est que la carence interministérielle
susmentionnée cache un autre phénomène on ne peut plus
déplorable au Sud du Sahara : celui de la difficile traduction des
projets de
financement au sein des localités, sapant ainsi toute
perspective de développement endogène. Mieux, cette
léthargie interne annule toute cohérence et partant, toute
efficacité lors des négociations et de
l'opérationnalisation des projets. La difficile conciliation des «
intérêts » entre les pouvoirs publics et la
société civile compliquerait davantage cette situation.
Très souvent, c'est l'intérêt national qui est
sacrifié sur l'autel des gains particularistes des différents
acteurs. Qui plus est, la difficile traduction d'une « plate-forme de
philosophie globale » sous-tendant la politique camerounaise de
coopération, creuse un hiatus entre les projets de développement
et « l'aspiration profonde des populations » (Epote) Cette
réalité est à regretter au moment où la politique
étrangère « se technicise pour devenir de plus en plus une
`politique étrangère de proximité», jugée sur
ses capacités à régler sur le terrain des problèmes
concrets, et tirant donc sa légitimité de cette efficacité
éventuelle » (Charillon, 23) Elle l'est d'autant plus qu'il est
communément admis qu' « une société frappée
d'anomie à l'intérieur, c'est-à-dire incapable d'assurer
les rapports de coopération entre les différents rôles
sociaux, est une société frappée de marginalisation
à l'extérieur » (Badie et Smoots, 116)
Plusieurs auteurs s'accordent aujourd'hui sur le fait que la
politique étrangère au plan international, à plusieurs
égards constitue le prolongement de la politique intérieure des
États. De l'avis de l'internationaliste Moudourou, il sera fort peu
évident aux promoteurs de la politique internationale camerounaise de
`saisir» les enjeux et de s'adapter au système international
actuel, sans une définition claire et une coordination harmonieuse de
tous « les maillons de la chaîne diplomatique camerounaise ».
Pour cet internationaliste, le Cameroun, pour une amélioration de sa
position sur l'échiquier internationale, est tenu de transcender les
difficultés internes et externes « qui risquent de le faire
percevoir comme une vitrine de l'Afrique des divisions ». D'où
« l'urgence de l'élaboration d'une doctrine camerounaise de
politique étrangère pertinente cohérente et audacieuse
». Une telle doctrine, dans le cadre de la coopération
internationale passerait également par la formation systématique
des fonctionnaires internationaux à même de servir la cause
universelle bien sur, mais aussi celle de l'Afrique au sein des structures
internationales. C'est dire à la suite de Emmanuel Pondi de toute «
l'urgence de former des diplomates africains pour assurer une relève
empreinte de sensibilité africaine » (op.cit : 37 et 38)
La politique étrangère du Cameroun, en
dépit de la pertinence et de la légitimité de ses
principes directeurs qui en font un modèle pacifiste aux yeux de la
communauté internationale, a besoin, pour une meilleure
efficacité, de se réinventer, et de réinventer avec
elle les relations entre l'État et son environnement
sociopolitique, voire académique26. Car liée aux
circonstances, la politique étrangère est, suivant l'expression
consacrée de Bismark, « l'art du possible », « la science
du relatif ». C'est pourquoi cet ancien diplomate et universitaire
chevronné, (Kissinger dont l'admiration porté sur l'ancien «
sage » empereur allemand ne fait aucun doute) pense qu'elle doit se
nourrir du passé pour rechercher le plus grand progrès possible,
plutôt que d'en être prisonnière. Enfin, de l'avis de
Mathias Éric Owona Nguini, les sociétés et États du
Sud du Sahara, parce que confrontés à la domination
stratégique et systémique du `temps mondial», sont plus que
jamais « tenus de produire une intelligence organisationnelle et
institutionnelle capable de s'y adapter ». Et la coopération
internationale, si elle est appréhendée au mieux de
l'intérêt de la nation, peut jouer à ce niveau un
rôle plus que déterminant. La pertinence d'un tel
intérêt serait alors fonction de la place accordée à
chaque individu, quand bien même cette coopération
paraîtrait crédible aux yeux de ses principaux promoteurs.
26 Il s'agit en effet d'un plaidoyer pour une
sociologie de la politique étrangère camerounaise,
elle-même en interaction avec la sociologie de la scène mondiale
et la sociologie de l'État, afin que la recomposition des savoirs puisse
suivre celle des pratiques. (Charillon : 26)
CHAPITRE II:
LA COMPOSANTE TRANSACTIONNELLE DES
RELATIONS CAMEROUN-UNESCO : UNE DYNAMIQUE DES
ÉCHANGES CRÉDIBILISÉE PAR LE HAUT
Le système de rapports établis entre le Cameroun
et l'UNESCO fait montre d'un flux de relations dont la dynamique des
échanges ressortit de sa composante transactionnelle. En effet, cette
coopération participe également des relations
d'intérêts et des attentes mutuelles entre les deux parties. Cette
coopération est aussi une mise en exergue des relations de pouvoir, de
jeux et différentes actions menées par les acteurs en vue d'une
meilleure appréhension de la coopération aux mieux de leurs
intérêts respectifs, et qui ne constituent forcément pas un
obstacle à la promotion des idéaux universellement et
conventionnellement
admis. Dans ce chapitre, il s'agit de voir comment le concept
de « crédibilisation » est mobilisé et
appréhendé par les deux parties afin de justifier leurs actions
réciproques à l'endroit de cette coopération qui à
leurs yeux reste « fructueuse ». En un mot, il s'agit de percevoir
comment la coopération Cameroun-UNESCO est crédibilisée
par ses principaux promoteurs.
SECTION PREMIERE : L'ACTION DU CAMEROUN A L'UNESCO COMME
SIGNE DE CREDIBILITÉ DIPLOMATIQUE
La crédibilisation de la coopération par les
autorités camerounaises est d'abord le fait des autorités
politiques, conscientes de l'impact des activités de l'UNESCO qui
mobilisent la quasi-totalité des départements ministériels
du Cameroun. Cette démarche semble parfaitement relayée par les
fonctionnaires internationaux camerounais en service aux différentes
instances de l'UNESCO, et dont l'action quotidienne contribue significativement
au renforcement de la coopération. Plus fondamentalement, l'action du
Cameroun comme signe de crédibilité diplomatique se
matérialise aussi bien au sein des instances de l'UNESCO que dans le
territoire camerounais.
PARAGRAPHE I: LE TERRITOIRE CAMEROUNAIS COMME TERRE
D'ACCUEIL DES GRANDES RENCONTRES AVEC L'UNESCO
Le territoire camerounais se présente de plus en plus
comme un lieu de grands rendez- vous avec l'UNESCO. Pour s'en tenir à la
période marquant le début de ce millénaire, période
marquée également par le début des réformes et des
grands programmes au sein de l'UNESCO, l'on remarque que le Directeur
Général de l'UNESCO a foulé à deux reprises les
pieds sur le sol camerounais. Lequel sol a également été
témoin des rencontres déterminantes en vue d'une meilleure
opérationnalisation des objectifs de l'UNESCO dans la région
Afrique A. LA RÉCEPTION DE LA CONFÉRENCE AFRICAINE DES
COMMISSIONS NATIONALES POUR L'UNESCO
A l'invitation de la Commission Nationale de la
République du Cameroun, la dixième Conférence quadriennale
et statutaire des Commissions Nationales d'Afrique s'est tenue entre le 2 et le
6 juin 2003 à Yaoundé. A cet effet, quarante-deux des 53
Commissions Nationales de l'UNESCO pour la région Afrique seront
présentes à cette Conférence qui connaîtra un
peu plus d'une cinquantaine de participants. De nombreuses
personnalités vont feront part à cette rencontre. Il s'agit entre
autres, du Président du Comité sur les organisations non
gouvernementales du Conseil exécutif, M. Michael Abiola Omolewa, du
Secrétaire général de la Commission française, M.
Jean-Pierre Boyen, ainsi que les représentants de plusieurs ONG. Douze
membres du Secrétariat de l'UNESCO, conduits par MM. Ahmed Sayyad,
Sous-Directeur général aux relations extérieures et
à la coopération et Représentant du Directeur
Général de l'UNESCO, et M. Noureini Tidjani-Serpos,
Sous-Directeur général pour l'Afrique, seront également
présents. Ils étaient notamment accompagnés par le
Secrétaire de la Conférence générale, les
Directrices de la Division de la Coopération avec les Commissions
Nationales et les nouveaux partenariats, ainsi que par les chefs et directeurs
de treize bureaux de l'UNESCO en Afrique.
En effet, ce type de rencontres, en plus de constituer des
opportunités certaines d'échanges de points de vue sur les
principales difficultés relatives au fonctionnement de l'UNESCO, sont
sensées faciliter la traduction des priorités de l'UNESCO sous
forme de plans d'action régionaux. Ils permettent également la
formulation des stratégies de suivi pour les grandes conférences
internationales, ainsi que la promotion de la coopération
régionale et sous-régionale. Le Cameroun, en accueillant cette
conférence se pose et s'impose comme un acteur essentiel de la promotion
des idéaux de l'UNESCO, en même temps qu'il renforce sa
crédibilité dans ses rapports avec l'Organisation. De telles
initiatives requièrent aussi une portée diplomatique
considérable ; car en cette occasion, le Cameroun se crée une
opportunité d'amélioration de sa visibilité
internationale, et espère en retour être un pôle
d'excellence de projection de l'institution spécialisée des
Nations unies dans la région. De telles opportunités permettent
aussi aux autorités camerounaises de présenter leurs souhaits,
surtouts les plus pressants aux dirigeants de l'UNESCO.
A cet effet, dans son allocution lors de l'ouverture de cette
dixième conférence quadriennale, le Premier Ministre camerounais,
M. Peter Mafany Musongue va, non sans avoir laissé percevoir la
fierté de cette coopération, saisir l'occasion pour
présenter le souhait de son Gouvernement de voir « rapidement
comblé » la vacance créée à la tête du
Bureau UNESCO de Yaoundé, par la nomination de Cheick Tidiane Sy au
Bureau UNESCO de Dar- Es-Salaam. La nomination de M. Bernard Hadjaad à
la tête du cluster de Yaoundé, quelques mois
après, peut ainsi être interprétée comme un symbole
de crédibilité, de confiance et d'estime réciproques
existant au sein des responsables des deux parties. Laquelle estime se
renforcera davantage avec la multiplication des évènements
similaires en territoire camerounais.
B. LA RÉCEPTION PAR LE CAMEROUN DE LA
CONFÉRENCE DES MINISTRES DE L'ÉDUCATION DES ÉTATS MEMBRES
DE LA CEMAC
Du 16 au 17 janvier 2004 à Yaoundé, va se tenir
une Conférence regroupant les Ministres de la CEMAC en charge de
l'éducation. Des personnalités importantes vont répondre
présents à cette rencontre. Nous pouvons à cet effet noter
la présence, entre autres, des membres du gouvernement camerounais, des
membres du corps diplomatique et représentants des Organisations
Internationales, ainsi que la présence du Pr. Mboui, membre du Conseil
Exécutif de l'UNESCO. Bien entendu, le fait marquant de cette rencontre
sera la présence de Koïchiro Matsuura, Directeur
Général de l'UNESCO, qui est à ranger dans le cadre de
l'efficacité et de la crédibilité de l'action diplomatique
des autorités politiques du Cameroun. La Conférence qui sera
dirigée par le Ministre camerounais en charge de l'éducation,
Joseph Owona, aura pour objectif principal de stimuler et d'encourager les
responsables de la formation de la jeunesse dans la sous-région,
à s'impliquer davantage dans la voie de l'intégration par les
programmes scolaires.
C'est qu'en effet, et comme le précisera le Pr. Joseph
Owona dans son allocution d'ouverture de la conférence, l'initiative
majeure de l'UNESCO à la fin du 20ème siècle
qu'est le forum de Dakar s'est engagé de parvenir à
l'échéance 2015, à l'universalisation de
l'éducation. Au lendemain de ce forum, les Ministres de
l'Éducation des États Membres d'Afrique (MINEDDAF VIII),
bénéficiant du soutien prioritaire de l'UNESCO, vont se
réunir en décembre 2002 à Dar-es-Salaam ; réunions
au sein de laquelle les participants souligneront la nécessité
`de disposer de ressources... en qualité et en quantité' en vue
d'une décisive contribution au développement de l'Afrique du
siècle débutant. C'est ainsi que suite à deux rencontres
préliminaires ayant réunies les Ministre de l'éducation de
la zone CEMAC à Dar- es-Salaam d'abord, ensuite au cours de la
32ème Session de la Conférence Générale
de l'UNESCO tenue à Paris, le Gouvernement camerounais par l'entremise
de son Ministre de l'éducation, va se proposer d'abriter cette rencontre
dans l'optique de « passer des engagements à l'action ».
Les travaux de cette rencontre déroulée en
séances plénières et en panels regroupant tous les
participants, ont été précédés d'une
préparation des dossiers de programmes d'appui à ceux des
nationaux, par des Experts. Cette réunion préliminaire portait
pour l'essentiel sur la formation des enseignants, la lutte contre le VIH/SIDA,
l'éducation à la citoyenneté, le
développement intégré de la petite enfance
et, l'intégration des technologies de l'information et de la
communication dans l'enseignement secondaire et supérieur.
Bien plus, pour les pays hôtes, comme le Cameroun ici,
ces types de rencontres constituent des moments uniques de renforcement de la
crédibilité des relations établies avec l'Organisation
internationale, de s'affirmer comme le pôle d'attraction diplomatique
dans la sous-région. Cette conférence se présente
également comme une opportunité de présentation des
attentes de l'État camerounais dans des secteurs qui nécessitent
encore une attention particulière de l'UNESCO : « Nous osons
espérer, pour un avenir proche, la mise en oeuvre d'une semblable action
pour le magnifique joyau qu'est le Palais de Rey Bouba, survivance grandiose de
l'Histoire de la savane et des peuples du septentrion de notre pays »,
glissera subtilement Joseph Owona, non sans avoir notifier les faits majeures
de cette coopération « fructueuse ». La signature, à la
veille de cette conférence, d'une convention avec l'UNESCO ouvrant
davantage le centre d'excellence des micro-sciences de Yaoundé à
toute l'Afrique Centrale, participe également des avantages tirés
de ce type d'initiatives.
Pas significatif dans l'appropriation des mécanismes de
coopération sous-régionale nécessaire dans la mise en
oeuvre du processus d'Éducation Pour Tous, la conférence des
Ministres de la CEMAC participe également de la réflexion
collective aux modalités d'échange et d'appui mutuels à
même de servir la cause de l'EPT. L'échelle sous-régionale,
parce que constituée d'entités socioculturelles
cohérentes, faciliterait la réflexion sur les problèmes
locaux tout en permettant la mise en commun des ressources intellectuelles,
financières et humaines des différents États membres. Pour
le Directeur Général de l'UNESCO en effet, il devient de «
de plus en plus clair qu'une meilleure synergie doit être trouvée
entre, d'une part, le niveau de mobilisation et de coordination global en
faveur de l'Éducation Pour Tous, et, d'autre part, les institutions et
processus au niveau régional et sous- régional ». Pour M.
Matsuura également, cette conférence constitue une courroie de
transmission essentielle entre le global et le local, et mérite de ce
fait d'être renforcée et encouragée ; d'où sa
présence en territoire camerounaise. Sauf que le mérite de cette
visite du Directeur général revient au doigté de la
diplomatie multilatérale des autorités camerounaises.
Selon toute vraisemblance, l'un des faits les plus marquants
dès l'arrivée du Directeur Général aura
été la signature d'une convention au Centre d'excellence sur la
micro-science par l'UNESCO et le Cameroun. A travers celle-ci, l'UNESCO
s'engage à apporter une contribution financière de 226. 000
dollars des Etats-Unis sur fonds en dépôt du Japon, en vue du
développement du projet dont le but est d'introduire et vulgariser
l'expérimentation dans les filières scientifiques par la
formation des enseignants, d'améliorer la qualité de
l'enseignement scientifique dans les établissements
publics, enfin, de susciter des vocations chez les élèves pour
les vocations scientifiques. La contre partie du Gouvernement camerounais
évaluée à 240. 718 dollars des Etats-Unis, sera
essentielle à l'entretien des locaux ainsi qu'aux frais de
fonctionnement du Centre, à la prise en charge des salaires du personnel
et, au renforcement du personnel d'appui par le recrutement de plantons et
gardiens. Par ailleurs, le décernement à l'Université de
Yaoundé II, du titre de Doctor Honoris causa en Science
Politique, Option relations internationales, à M. Koïchiro Matsuura
aura été l'autre évènement majeur de cette
journée. Ce geste symbolique et honorifique trouve son importance dans
l'attachement particulier de l'UNESCO et de son Directeur, au sein des
relations internationales, aux valeurs du dialogue entre les civilisations. Ce
dialogue qui, de l'avis du premier fonctionnaire de l'UNESCO, «
apparaît aujourd'hui plus nécessaire que jamais, à l'heure
où certains sont tentés d'interpréter diverses tensions
internationales à l'aune de tensions de civilisations ou de cultures
antagonistes ». Aussi, va-t-il poursuivre lors de la
cérémonie de remise par l'Institut des relations internationales
du Cameroun : « Je suis convaincu qu'il n'en n'est rien, et que le
dialogue véritable, celui qui permet de comprendre et de respecter
l'Autre, permettrait bien souvent de lever des malentendus, des
ambiguïtés, et de résoudre avant même qu'ils
n'éclatent nombres de conflits potentiels ». Toutefois, l'action du
Cameroun est également « rayonnante » au sein des instances de
l'UNESCO.
PARAGRAPHE II : LES INSTANCES DE L'UNESCO COMME LIEUX DE
DÉPLOIEMENT DIPLOMATIQUE DU CAMEROUN
A. L'ACTION DU CAMEROUN DANS LA CONFÉRENCE
GÉNÉRALE DE L'UNESCO : LE CAS DE LA 32ème
SESSION
Nous avons eu à noter, dans le chapitre
précédent, que la Conférence Générale,
organe plénier et souverain de l'UNESCO, a pour principale fonction de
déterminer l'orientation générale de l'Organisation. Et
qu'à l'exception de quelques cas rares, elle tient habituellement ses
sessions au siège de l'UNESCO, à Paris. En effet, les travaux de
la Conférence sont généralement consacrés au
débat de politique générale, ainsi qu'aux travaux en
Commissions. Très souvent, il s'agit des Commissions portant sur les
questions générales et le soutien du programme, sur les sciences
exactes, naturelles et les sciences sociales ; d'autres débattant de
l'éducation, chargées de la culture ou de la communication, ou
encore sur des questions administratives et financières. Les
Comités des candidatures, juridique et de vérification des
pouvoirs viennent enfin compléter la liste des
Commissions dont le nombre porte généralement à neuf. Pour
le Cameroun donc, cette conférence représente une
opportunité déterminante de renforcement de sa visibilité
diplomatique au sein des États-membres.
C'est ainsi que lors de la 32ème Session de
la Conférence Générale de l'UNESCO tenue à Paris,
le 29 septembre 2003, le Cameroun s'est constitué d'une importante
Délégation d'un peu plus d'une dizaine de personne, et
entourée autour de son chef qui n'était autre que le Pr. Joseph
Owona, alors Ministre camerounais en charge de l'éducation et
Président de la Commission nationale camerounaise pour l'UNESCO. Ainsi,
l'on peut citer comme faisant partis de la délégation les membres
tels que M. Barthélémy Mvondo Nyina, Secrétaire de la
Commission nationale, les Honorables Joseph Mboui et Boulou, ainsi que des
représentants des Ministères spécialisés en
coopération avec l'UNESCO. Réunis avant la Session par son Chef
au sein des Bureaux de la Délégation Permanente du Cameroun
auprès de l'UNESCO, les Membres de la Délégation
camerounaise seront assignés des tâches précises pour
permettre une présence du Cameroun dans toutes les Commissions. C'est
que le Chef de Délégation, sur instruction du chef de
l'État camerounais, va inviter ses membres à participer
activement à la promotion de la candidature du Pr. Mboui au Conseil
Exécutif. Aussi, va-t-il « recommander un maximum de sérieux
et de ponctualité à ses concitoyens, pour une meilleure image
possible du Cameroun ».
Ainsi, dans son intervention, le 1er octobre 2003
au débat de politique générale, le chef de la
Délégation camerounaise, après avoir exprimé son
soutien aux préoccupations majeures de l'Organisation, va
suggérer que certains thèmes transversaux tels que «
l'élimination de l'extrême pauvreté » et « la
contribution des technologies de l'information et de la communication au
développement de l'éducation, de la science de la culture et
à la construction d'une société de savoir », rentrent
pleinement dans tous les programmes de l'UNESCO. Tout en exprimant sa
reconnaissance au sujet des excellentes relations que le Cameroun entretient
avec l'Organisation, il souhaitera néanmoins qu'une action soit
renforcée en direction de l'Afrique à travers le NEPAD.
Mais compte tenu de la durée limitée des
interventions accordées aux chefs de Délégations au
débat portant sur la politique Générale27,
l'audience avec le Directeur général de l'UNESCO constitue
souvent un moment unique où sont évoquées les questions
étroites concernant l'Organisation et les États-membres. A cet
effet, l'audience accordée à la Délégation
camerounaise aura permis que soient abordées des questions relatives
aux
27 Interventions dont la durée, en principe, ne
devrait pas excédée huit minutes
réformes en cours de l'UNESCO28, la visite
«prochaine» du Directeur général de l'Organisation au
Cameroun, et la situation des ressortissants camerounais à l'UNESCO. Par
ailleurs, la Délégation du Cameroun va participer à
d'autres activités telles que la table-ronde ministérielle sur la
qualité de l'éducation tenue les 3 et 4 octobre, ainsi
qu'à la réunion des Ministre de l'éducation des
États membres de la CEMAC. Le chef de la Délégation
camerounaise sera même reçu au Ministère français de
la coopération et au Club 89 où il présentera les
réalisations et les attentes du système éducatif
camerounais. Quant aux autres membres de la délégation, ils
participeront à une kyrielle d'activités en marge de la
Conférence, et qui relevaient de leurs domaines respectifs. Il s'agit
des représentants des Ministères de la culture, de la
communication, et du représentant de l'Assemblée nationale
camerounaise, l'Honorable Boulou.
Plus déterminante encore, sera le crédit
engrangé par le Cameroun à l'issue des élections aux
Conseils et Comités. En effet, à chaque Session de la
Conférence, la désignation des États membres
appelés à siéger au sein des différents conseils et
comités, à même de jouer un rôle déterminant
et diversifié dans la vie de l'UNESCO, se fait toujours par le biais des
élections. Celles-ci sont une opportunité unique d'affirmation
des États, en même temps qu'elles constituent une occasion de
jugement de leur image. C'est pourquoi une campagne intéressante sera
menée sous forme de contacts personnels et de réceptions
offertes, mobilisant tous les membres de la Délégation
camerounaise. Le Cameroun va ainsi se retrouver élu dans les Conseils et
Comités suivantes :
Le Conseil intergouvernemental du programme international pour
le développement de la communication (PIDC) ; le Conseil
Intergouvernemental du Programme Information Pour Tous (IPT) ; Conseil
Intergouvernemental du Programme «Gestion des Transformations
Sociales» (MOST). Toutefois, l'événement majeur aura
été l'élection au Conseil Exécutif du Pr. Mboui,
choisi « personnellement » par le Président Paul Biya pour
représenter le Cameroun. Mieux, les performances du Cameroun au sein de
l'UNESCO semblent relever de la constance.
B. LA TRACE DES RESSORTISSANTS CAMEROUNAIS AU SEIN DES
INSTANCES DE L'UNESCO
28 Lesquelles réformes, bien qu'ayant
provoqué la fermeture de certains bureaux hors-siège en vue d'une
meilleure efficacité, ont maintenu le maintien du Bureau de
Yaoundé.
Une observation attentive de l'historique des relations
Cameroun-UNESCO nous amène à relever que le Cameroun n'a pas
attendu les réformes de 1999 pour marquer son empreinte au sein de
l'Institution spécialisée des Nations unies. En effet Cameroun a
contribué de façon efficace au fonctionnement des
différents organes de l'UNESCO. Il a ainsi présidé en
1968, à travers M. William ETEKI MBOUMOUA, la Conférence
Générale de l'UNESCO et a été sept fois membre de
son bureau. En outre, plusieurs personnalités camerounaises ont
été membres du Conseil Exécutif. Il s'agit de M. William
ETEKI MBOUMOUA (1962-1968) ; M. Félix LOUNG (1980-1985) ; Dr Adamou NDAM
NJOYA (1985-1989) ; Pr Ebénézer NJOH MOUELLE (1995-1999) ; Pr
Joseph MBOUI, Vice-Présent pour l'Afrique (2001-2007).
Le Cameroun a également été membre de
nombreux organes subsidiaires de l'UNESCO tels que le Bureau International de
l'Education (2001-2005), le Comité Juridique (2001-2005), le Conseil
Intergouvernemental pour l'Education Physique et le Sport (depuis 2005), et le
Conseil Intergouvernemental du Développement de la Communication (PIDC).
Le Cameroun apporte enfin tout son soutien à la politique de
décentralisation, de restructuration du Secrétariat et des
méthodes de gestion de l'Organisation menée par l'actuel
Directeur Général, KOÎCHIRRO MATSUURA.
Dans le cadre du placement de ses compatriotes au sein de
l'Organisation, l'effectif des Camerounais à l'UNESCO s'élevait
à 20 personnes réparties ainsi qu'il suit : deux de rang de
Directeur (Grade D1), trois de rang de Cadre Supérieur (Grade P4-P5),
quatre de rang de Cadre moyen (Grade P2, P3), onze de rang de Secrétaire
ou d'agent. Les Camerounais les plus gradés à savoir Mme
Elisabeth MOUNDO, Directeur du Bureau et Représentante de l'UNESCO
à Accra (Ghana), M. Peter NGU, Directeur de l'Institut de l'UNESCO
à Addis Abéba (Ethiopie) et M. Emmanuel NAAH, Spécialiste
Supérieur de programmes à Nairobi (Kenya) occupent des postes
hors siège.
Il ressort de ce qui précède que le Cameroun est
surreprésenté par rapport aux quotas de répartition
géographique du personnel au sein de l'Organisation, même s'il
s'avère indispensable pour son rayonnement international, que notre pays
place de hauts cadres au sein des instances de l'UNESCO.
En définitive, ces différents succès
diplomatiques, en plus de participer au renforcement de sa visibilité
internationale, ont pour principale conséquence de placer le Cameroun au
centre des grands programmes de l'UNESCO.
SECTION II : LE CAMEROUN ET LES PROGRAMMES
D'ACTIVITÉS DE L'UNESCO AU SEIN DES ÉTATS-MEMBRES : UNE
CRÉDIBILITÉ HISTORIQUE ?
L'UNESCO, à n'en point douter est une organisation
crédible au sein de la société internationale. En effet,
la situation conflictuelle de l'histoire de l'humanité a hissé
des institutions de promotion de la coopération telles que l'UNESCO
à un piédestal aussi élevé que cette organisation
est aujourd'hui communément admis comme étant la «
conscience du monde ». Cette crédibilité est
renforcée par l'agenda de l'UNESCO où l'on retrouve une panoplie
de programmes couvrant la quasi-totalité des grandes
problématiques universelles de l'heure. En cela, le Cameroun, de par sa
« diplomatie de proximité » se présente comme un
bénéficiaire essentiel des programmes d'activités de
l'UNESCO au sein des États-membres.
PARAGRAPHE I : UNE ORGANISATION CRÉDIBLE AU SEIN
DE LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE
A. L'UNESCO ET LA COOPÉRATION INSTITUTIONNELLE
INTERNATIONALE
1. CONTEXTE ET ÉVOLUTION HISTORIQUES
La société internationale que nous connaissons
aujourd'hui remonte au seuil du Moyen Age en 476, « lorsque l'Empire
romain d'occident s'effondre sous la pression des barbares » (Simone
Dreyfus, 1981 : 4). Ainsi, le monde civilisé du Moyen Age va se diviser
entre la chrétienté et l'islam, et se caractérisera par le
régime féodal où le pouvoir est parsemé entre les
autorités politiques subordonnées les unes aux autres par des
liens personnels. L'État moderne va de ce fait émerger à
travers une conquête de l'unité du pouvoir et de la
souveraineté (Bodin, Hobbes), même si par la suite, « les
liens personnels des sujets envers le roi vont se transformer en liens
abstraits des citoyens envers l'État ». Et comme le note
Charpentier (2002), « ce sont les révolutions américaine et
française qui dissocieront les intérêts de l'États
de ceux du prince et rendront la nation titulaire de la souveraineté
».
La conquête de l'Etat va se réaliser à la
faveur de deux événements : à savoir la fin du pouvoir
politique du pape qui s'amenuise devant la puissance croissante des princes.
Cette suprématie temporelle va d'autant plus s'anéantir par la
Réforme qui va consacrer la rupture de l'unité de la
chrétienté, d'où les frontières religieuses vont
coïncider avec les frontières
étatiques avec la Paix d'Augsbourg de 1555. Le second
moment qui consacrera l'indépendance de l'État coïncide avec
la fin de la tutelle de l'empereur, consacrée par les traités de
Westphalie de 1648, d'où le Saint-Empire romain germanique va
s'éclater en quelques 350 États ou principautés
indépendants. (Charpentier, 2002 : 6).
Dès lors, le développement des relations
internationales va se structurer à travers les relations politiques et
les techniques juridiques. D'abord les relations politiques entre princes
chrétiens par le biais des principes d'équilibre de puissance et
de la liberté de la mer ; l'alliance et la guerre constituant de
véritables moyens d'action. Ensuite entre princes chrétiens et
païens, à travers les traités de capitulation qui permettent
aux étrangers d'être soumis à leur propre droit. Le
développement des relations internationales va également se
structurer autour des relations politiques des princes chrétiens avec
les « peuples non civilisés », relations qui vont se
matérialiser par la colonisation, dans un but de commerce et d' «
évangélisation ». Aussi, « la théorie de
l'occupation des territoires sans maîtres et le problème de
l'esclavage en découlent ».
Le développement des relations internationales enfin se
structure dans les cadres de techniques juridiques que sont les Ambassades et
consulats, les traités considérés comme source principale
des obligations internationales, et enfin des groupements d'États.
Les doctrines quant à elles seront sous la double
influence chrétienne et romaine, d'où les auteurs vont longtemps
confondre le droit international public au droit naturel, c'est-à-dire
« un droit idéal dicté par la raison et de portée
universelle », même si l'étude du droit positif va
émerger progressivement (idem : 7). Vitoria, Suarez, Grotius et Vattel
sont, à en croire Charpentier, les doctrinaires les plus importants.
C'est dire que l'émergence du droit international se
développera à la lisière des relations internationales, et
va s'étendre de la Révolution française à la
Première Guerre Mondiale, en passant par l'institution de la
Sainte-Alliance et du concert européen. C'est dire également sur
le plan juridique que « l'un des acquis importants du 1
9ème siècle est la mise au point progressive de cet
instrument nouveau des relations internationales que sont les
Conférences diplomatiques, devancières des Organisations
internationales que nous connaissons aujourd'hui ». (Idem : 30) C'est dire
enfin que l'interdépendance accrue des États, associée au
progrès technique va rendre nécessaire la coopération
internationale multilatérale. Cette coopération qui se
développe dans les domaines techniques est à l'origine du
succès des organisations techniques, à l'instar de l'Union
Télégraphique Internationale créée en 1865 et
l'Union Postale Universelle (1874). Organisations techniques qui sont des
ancêtres des institutions spécialisées, et donc de l'UNESCO
dont les origines remontent au 24
septembre 1924, au moment où le « gouvernement
français proposait en effet, l'établissement à Paris d'un
institut international de coopération intellectuelle » (Toumba
Kotto, 1999 : 4).
Ainsi, les Institutions spécialisées qui vont
succéder aux anciennes unions administratives internationales exercent
leurs activités dans des domaines très variés. Elles sont
dotées d'une personnalité distincte de celle de l'ONU, même
si elles sont reliées à l'organisation de New York. C'est ainsi
que l'UNESCO s'inscrit dans le cadre des institutions
spécialisées exerçant une activité culturelle et
scientifique. D'où le système des relations UNESCO-Cameroun
s'inscrit dans le cadre global du champ d'observation de la coopération
institutionnelle internationale. Mais ceci nécessite d'autres
précisions.
2. L'UNESCO COMME PROMOTRICE DE LA COOPÉRATION
INSTITUTIONNELLE INTERNATIONALE
Précisons qu'il existe une différence entre les
institutions internationales et les organisations internationales. Car dans la
perspective de Jean Charpentier, ces dernières sont d'abord des «
centres de coopération permanentes entre États » et à
ce titre « acquièrent une personnalité propre qui fait
d'elles des sujets dérivés du droit international ». Il
s'agit en effet d'une « association d'États souverains poursuivant
un but d'intérêt commun au moyen d'organes qui lui sont propres
» (Charpentier, 2002 : 56). Les institutions internationales, dans un
cadre plus large sont constituées d'États et organisations
internationales qui composent la société internationale, ainsi
que des règles de droit qui régissent leurs rapports. Elles ont
donc pour rôle de stabiliser les rapports de force en consolidant les
équilibres entre intérêts divergents à travers les
traités, en même temps qu'elles constituent « le cadre dans
lequel se développent les relations internationales », par la
fixation des principes et la détermination des mécanismes (idem :
2). C'est dire que les institutions internationales relèvent des
relations internationales comme les institutions internes ressortissent des
sociétés nationales, mais avec moins d'efficacité dans la
mesure où Charpentier oppose la perfection des institutions internes
à l'imperfection des institutions internationales, au sein desquelles
l'application des règles uniformes n'est pas aisée, tant il est
vrai que chaque État peut résister aux sanctions.
La coopération institutionnelle internationale, telle
qu'instituée au sein de l'UNESCO, constitue un enjeu majeur des
relations internationales. Ses promoteurs s'inscrivent en faux contre les
analystes et praticiens d'inspiration réalistes pour qui « les
perspectives de coopération sont peu nombreuses et fragiles et que le
droit et les institutions internationales ne peuvent guère favoriser
», l'anarchie internationale et le « dilemme de la
sécurité » rendant
souvent difficile la coopération au sein de la
société internationale. (Smouts et al, 2006 : 79) Pourtant, les
pères fondateurs de l'UNESCO étaient convaincus que la
convergence des intérêts communs, le nombre d'acteurs et leur
influence sur le jeu, et les « mécanismes institutionnelles »,
peuvent influencer la propension des uns et des autres à
coopérer. Et même si la convergence des intérêts
particuliers vers un intérêt commun propice à la
coopération ne relève guère de l'évidence, il reste
que, dans une perspective constructiviste, « un sentiment d'appartenance
commune, un respect mutuel, une identité similaire contribuent à
la coopération et à son institutionnalisation »
(idem, 84). Il s'agit en effet d'une oeuvre commune en vue du
rapprochement et de la compréhension mutuelle des différentes
cultures, si essentiel au développement et à la pacification de
la société internationale des individus.
Ainsi l'UNESCO, au travers de la coopération
institutionnelle internationale, strict sensu, vise la stabilisation
des enjeux et la favorisation de la transparence par le biais des institutions
qui, de ce fait, rendent le futur plus prévisible. Aussi en facilitant
un système communicationnel permanent et clarifiant les
différentes intentions grâce à des procédures de
consultation, l'UNESCO, à travers la coopération institutionnelle
internationale permet aux différents acteurs (États, ONG,
société civile, individus etc....) de participer à une
oeuvre commune dans un cadre où « les incertitudes dans
l'évaluation des préférences et des choix politiques des
partenaires potentiels » sont véritablement diminuées. C'est
du reste ce que laisse percevoir les adeptes de l'institutionnalisme
néo-libéral.
B. UN CADRE PROPICE DE CONCEPTION DES GRANDS PROGRAMMES :
QUELLE PLACE POUR L'AFRIQUE ?
1. LES DIFFÉRENTS DOMAINES DE COMPÉTENCE
DANS LA STRATÉGIE DE L'UNESCO
Au regard de la stratégie à moyen terme
(2002-2007) de l'UNESCO pour l'Afrique, laquelle stratégie « vise
à contribuer à la paix et au développement humain à
l'ère de la mondialisation par l'éducation, les sciences, la
culture et la communication », la nouvelle politique de
décentralisation mise en oeuvre par l'UNESCO constitue un axe
programmatique essentiel. Concrètement, l'objectif essentiel ici est
d'adapter les stratégies globales de l'UNESCO aux
caractéristiques, conditions et initiatives locales, de soutenir et
renforcer la nouvelle politique de décentralisation, qui a pour but de
rapprocher les différents pays de l'UNESCO, en même temps que la
stratégie constitue un instrument d'information et de
coopération, aussi bien chez les États membres que pour
l'ensemble des partenaires. En effet,
les défis de la paix et du développement
à l'heure de la mondialisation participent des questions
délicates pour l'Afrique subsaharienne ; surtout en cette période
contemporaine qui forge, à grande vitesse, un système global
mondial qui « exploite et marginalise les plus faibles ».
Pour répondre aux besoins de l'Afrique, l'UNESCO entend
promouvoir le développement et le renforcement des capacités
humaines dans les États membres de la région. Au niveau
sous-régional, l'Organisation se propose de favoriser les initiatives
à même de faciliter la coordination des programmes dans le domaine
de l'éducation de base pour tous. Il s'agira par la suite à
l'échelon national, d'aider les différents pays à
élaborer des plans d'action nationaux d'éducation, et à
mettre en place une stratégie de prévention de lutte contre
certaines épidémies, notamment le SIDA. Il s'agira
également de mobiliser, sinon de catalyser la coopération
internationale à travers la promotion de la participation active de
« tous »29 les acteurs à la conception et à
la mise en oeuvre des programmes de développement, ainsi que leur
implication dans la prise de décision aux plans national et local. Il
faut enfin noter qu'une attention particulière devra être
accordée aux pays les moins avancés, notamment auprès des
groupes les plus défavorisés, à la promotion de
l'égalité entre les sexes, à l'utilisation de la science
et de la technique pour l'amélioration des conditions matérielles
d'existence et, à la responsabilisation des jeunes afin qu'ils
participent activement en tant que partenaires de plein droit à «
l'élaboration de la société de savoir ».
Plus fondamentalement, l'on note qu'à chaque domaine de
compétence de l'UNESCO correspondent des objectifs stratégiques
précis et ciblés.
C'est ainsi qu'en ce qui concerne l'éducation, la
contribution de l'UNESCO s'inscrit d'abord dans le cadre d'un appui aux
objectifs du NEPAD dans ledit secteur. En effet, l'éducation, qui est un
préalable, à la croissance économique et à
l'élimination de la pauvreté, reste un puissant instrument pour
la promotion du bien-être, du progrès civique et social, de la
démocratie et du respect des droits de l'homme. Élément
indispensable à l'édification de la paix, l'éducation est
aussi un facteur prédisposant à un environnement propice à
la prospérité du pluralisme et de la diversité
culturelle.
A cet effet, le premier objectif stratégique sera de
promouvoir l'éducation en tant que droit fondamental conformément
à la Déclaration universelle des droits de l'homme. Plus
spécifiquement, il s'agira d'assurer la coordination du suivi de l'EPT
au niveau régional, sous-régional et national, ceci en
étroite coopération avec l'ensemble des partenaires et des
29 Etats membres, OUA, Organisations
sous-régionales africaines, le système des Nations unies, la
BIRD, la BAD, populations et représentants de la société
civile
mécanismes de suivi existant au niveau global. Dans le
même sillage, les deuxième et troisième objectifs se
proposent d'améliorer la qualité de l'éducation par la
diversification des contenus et des méthodes et la promotion des valeurs
universellement partagées ; ainsi que de promouvoir
l'expérimentation, l'innovation, la diffusion et le partage de
l'information et des meilleures pratiques, ainsi que le dialogue sur les
principes d'action dans le domaine de l'éducation. Bien entendu,
l'UNESCO entend développer et élargir le dialogue dans la mise en
oeuvre des différentes politiques éducatives.
Les objectifs stratégiques n°4, 5 et 6, relatifs
au domaine scientifique visent respectivement à : promouvoir des
principes et des normes éthiques pour guider le progrès de la
science, le développement technologique et les transformations sociales
; améliorer la sécurité humaine par une meilleure gestion
de l'environnement et du changement social ; et renforcer les capacités
scientifiques, techniques et humaines de participation aux nouvelles
sociétés du savoir. Convaincus que « la science crée
les technologies, qui à leur tour peuvent générer les
richesses », les principaux promoteurs voudraient ainsi parvenir à
l'allègement de la pauvreté, à l'amélioration de la
gestion des ressources et à la lutte contre la dégradation de
l'environnement. Pour ce qui est des sciences sociales et humaines, deux
défis majeurs restent à relever ici : à savoir
l'instauration de la paix et de la démocratie qui implique la fin des
guerres et des conflits, et la consolidation des sociétés sur la
base de principes de justice sociale et d'attitudes de tolérance.
L'autre grand défi est celui de l'éradication de la
pauvreté y compris par la lutte contre le VIH/Sida et ses
conséquences, et en terme de ressources, par l'allègement de la
dette.
Si promouvoir l'élaboration et l'application
d'instruments normatifs dans le domaine culturel constituent un défi
stratégique spécifique, c'est parce qu'il est essentiel à
cet autre objectif qui vise à protéger la diversité
culturelle et à encourager le dialogue entre les cultures et les
civilisations. C'est également pour mieux s'endosser au neuvième
objectif qui promeut le renforcement des liens entre la culture et le
développement à travers la consolidation des capacités et
le partage des connaissances.
Enfin, la communication et l'information sont
nécessaires à une participation effective des communautés
et des citoyens à la vie démocratique des sociétés.
Or dans le continent africain, les infrastructures en matière de
télécommunication et de diffusion de masse restent peu ou pas
développées, la formation à l'utilisation des TIC
étant inadéquate lorsqu'elle n'est pas simplement absente dans un
environnement où l'analphabétisme persiste, et où «
les coûts d'accès à Internet... sont 5 à 10 fois
plus élevés que dans les pays du Nord »30. C'est
en tenant
30 Tirée de la revue publiée par la
Commission nationale camerounaise pour l'UNESCO : 2005 :103
compte de ces réalités que l'objectif
stratégique n°10 se propose d'encourager la libre circulation des
idées et l'accès universel à l'information. Il s'agira
ensuite de promouvoir l'expression du pluralisme et de la diversité
culturelle dans les médias et les réseaux d'information mondiaux
(n°11), et ceci en tenant compte des besoins propres aux différents
publics cibles, notamment les femmes et les enfants ; l'objectif final
étant d'assurer l'accès pour tous aux technologies de
l'information et de la communication. En cela, l'on espère atteindre des
zones rurales et régions défavorisées, afin
d'accroître la participation sociale des populations concernées.
Mais parce que le système des Nations unies s'est imposé des
défis majeurs pour le nouveau millénaire, il convient de s'y
attarder quelque peu, afin de pouvoir relever la responsabilité de
l'UNESCO.
2. LE ROLE MAJEUR DE L'UNESCO A L'ÉGARD DES
RÉCENTS ENGAGEMENTS DES NATIONS UNIES
L'UNESCO a certainement un grand rôle à jouer
dans le cadre des objectifs majeurs des Nations unies en ce début de
millénaire, au sein de la société internationale. Aussi,
convient-il d'abord de préciser lesdits objectifs, avant d'explorer le
rôle attendu à l'égard de l'UNESCO, principalement à
travers l'EPT.
2-1. LES OBJECTIFS MILLENAIRES POUR LE
DÉVELOPPEMENT (OMD)
Devenue l'expression du système des Nations Unies la
mieux partagée, le concept des `'Objectifs Millénaires pour le
Développement» (OMD) remonte au Sommet Millénaire
réunissant en septembre 2000 les dirigeants politiques du monde entier.
De ce Sommet naîtra un ensemble d'objectifs mesurables qui vont
être placés au centre du programme d'action mondial, et assortis
d'un délai (2015) pour lutter contre la pauvreté, la faim, la
maladie, l'analphabétisme, la dégradation de l'environnement et
la discrimination à l'égard des femmes. A côté de
ces objectifs majeurs, la Déclaration du Millénaire
prévoit également une vaste gamme d'engagements dans les domaines
comme les droits de l'homme, la bonne gouvernance et la démocratie.
Il faut dire après huit ans que le monde évolue
dans le sillage des OMD, même si les progrès
réalisés sont inégaux lorsqu'ils ne sont pas trop lents.
C'est que les OMD restent un cadre dans lequel le système des Nations
unies tout entier collabore de façon étroite pour réaliser
ces objectifs communs. Et c'est pourquoi le Groupe des Nations Unies pour le
développement (GNUD) s'emploi à ce que lesdits
objectifs soient au coeur des efforts. Qui plus est, l'ex Secrétaire
général de l'ONU, Kofi Annan, au lendemain du Sommet, avait
confié la coordination de la campagne et des activités de suivi
menées au niveau des pays en vue d'atteindre les OMD, au
président du GNUD, Mark Malloch Brown. Cette tâche pour
l'essentiel portait sur l'assistance concrète à l'appui des
priorités nationales ; le suivi au niveau des pays à travers des
rapports produit de la collaboration entre le gouvernement d'un pays, le
secteur privé et la société civile ; la direction de la
recherche par le conseiller spécial de Koffi Annan pour les OMD, le
professeur Jeffrey Sachs ; le suivi au niveau mondial ; et enfin les
activités de sensibilisation, fondées sur les
stratégies et les besoins nationaux.
De manière plus détaillée, huit objectifs
sont à atteindre à 2015 :
- Réduire de moitié l'extrême pauvreté
et la faim, 1, 2 milliard de personnes vivant encore avec moins d'un dollar par
jour.
- Réduire de trois quarte la mortalité maternelle,
le risque de mourir en couche étant de 1 sur 8 dans les pays en
développement.
- Assurer l'éducation primaire pour
tous31, car treize millions d'enfants ne vont pas à
l'école. Combattre les maladies, en particulier le VIH/sida et le
paludisme, maladies meurtrières ayant eu à annuler les
progrès de développement.
- Promouvoir l'égalité des sexes et
l'autonomisation des femmes, deux tiers des analphabètes dans le monde
étant des femmes, et 80% des réfugiés étant des
femmes et des enfants.
Assurer un environnement durable, à travers un
accès à l'eau potable qui fait encore défaut à plus
d'un milliard de personnes.
- Réduire de deux tiers la mortalité des enfants de
moins de 5 ans, car onze millions de jeunes enfants meurent chaque
année.
- Mettre en place un partenariat mondial pour le
développement, en fixant des objectifs relatifs à l'aide, aux
échanges commerciaux et à l'atténuation de la dette. Car
trop de pays en développement dépensent davantage pour les
services sociaux.
Enfin à travers ses activités, l'UNESCO oeuvre
principalement en faveur de quatre OMD des Nations Unies : A savoir ceux qui
visent à réduire de moitié la proportion de la population
vivant dans l'extrême pauvreté ; à aider les pays à
inverser la tendance à la déperdition des ressources
environnementales ; à éliminer les disparités entre les
sexes dans l'éducation primaire et secondaire ; enfin à assurer
l'éducation primaire universelle dans tous les pays. Aussi, convient-il
de repréciser ce concept d'éducation pour tous.
31 C'est nous qui soulignons
2-2. ÉDUCATION POUR TOUS (EPT)
L'idée d' « Éducation pour tous »
remonte au premier forum mondial sur l'éducation tenu en mars 1990
à Jomtien en Thaïlande. Lors de cette Conférence en effet,
toute la communauté internationale s'était engagée
à offrir à toute personne « enfant, adolescent ou adulte
», une formation conçue pour répondre à ses besoins
éducatifs fondamentaux, et ceci à l'échéance 2000.
Dix ans après, l'évaluation de la mise en oeuvre de cet
engagement, en dépit de quelques progrès en registrés dans
certains pays, montrera que 121 millions d'enfants dont 65 millions de filles
dans le monde ne vont pas encore à l'école. Le concept va de ce
fait être redéfini lors du deuxième forum mondial sur
l'éducation tenu à Dakar du 26 au 28 avril 2000. Il traduira
désormais l'engagement collectif de la communauté internationale
à assurer à l'horizon 2015, les objectifs suivants :
- Développer et améliorer sous tous leurs aspects
la protection et l'éducation de la petite enfance, et notamment des
enfants les plus vulnérables et défavorisés ;
- Faire en sorte que d'ici à 2015 tous les enfants,
notamment les filles, les enfants en difficulté et ceux appartenant
à des minorités ethniques, aient la possibilité
d'accéder à un enseignement primaire obligatoire et gratuit de
qualité et de le suivre jusqu'à son terme ;
- Répondre aux besoins éducatifs de tous les
jeunes et de tous les adultes et de tous les adultes en assurant un
accès équitable à des programmes adéquats ayant
pour objet l'acquisition de connaissances ainsi que de compétences
nécessaires dans la vie courante ;
- Améliorer de 50% les niveaux d'alphabétisation
des adultes, et notamment des femmes, d'ici à 2005 et instaurer
l'égalité dans ce domaine en 2015 en veillant notamment à
assurer aux filles un accès équitable et sans restriction
à une éducation de base de qualité avec les mêmes
chances de réussite ;
- Améliorer sous tous ses aspects la qualité de
l'éducation dans un souci d'excellence de façon à obtenir
pour tous des résultats d'apprentissage reconnus et quantifiables -
notamment en ce qui concerne la lecture, l'écriture et le calcul et les
compétences indispensables dans la vie courante32.
En tant que chef de file de ce vaste programme, l'UNESCO qui
orchestre les efforts consentis par la communauté internationale dans
l'optique d'atteindre ces objectifs, s'attache à mobiliser les
volontés politiques et à coordonner les efforts de toutes les
parties prenantes
32 Source : Cadre d'action de Dakar, l'Education pour
tous : tenir nos engagements collectifs, adopté par le forum mondial sur
l'éducation (Dakar, Sénégal, 26-28 avril 2000), Paris,
UNESCO, 2000, par.7.)
parmi lesquelles les partenaires de développement,
gouvernements, ONG et la société civile. Exprimé
autrement, l'éducation pour tous est au coeur des grandes actions de
l'UNESCO pour :
- assister les pays dans la formulation de leurs politiques
éducatives ;
- développer et diffuser des matériels - bonnes
pratiques, manuels scolaires, kits de formation des enseignants - conçus
pour couvrir un large éventail de questions, du développement
durable à l'éducation pour la paix ;
- établir de nouvelles normes et standards, par exemple
pour l'enseignement professionnel et technique et en matière de
reconnaissance des diplômes de l'enseignement supérieur ;
- identifier les tendances actuelles et les stratégies
appropriées pour répondre aux nouveaux problèmes affectant
l'éducation, comme le sida ;
- porter une attention particulière à
l'Afrique, aux pays les moins avancés et aux neuf pays les plus
peuplés qui abritent plus de 70% des analphabètes adultes du
monde et près de la moitié des enfants non scolarisés ;
- développer de nouvelles méthodes pour fournir
un enseignement aux personnes aux personnes ayant des besoins spéciaux,
vivant dans la rue, dans des zones de conflits ou d'urgence ;
- faciliter des partenariats entre les acteurs publics,
privés et non gouvernementaux pour assurer une meilleure coordination
des efforts et entretenir l'engagement politique33.
Toujours dans le cadre de l'EPT, l'objectif de
l'égalité entre les sexes, présent à travers toutes
ces actions, est aussi l'objet d'une série de projets sur le terrain,
qui vont des programmes d'éducation à distance et des
systèmes de micro crédit dans les zones rurales à des
services de conseil aux femmes et aux filles en Afrique. En outre de nouvelles
approches éducatives pour les droits de l'homme et le
développement durable, ainsi que la réforme des programmes et la
révision des manuels scolaires pour refléter les besoins
socioculturels et promouvoir une culture de paix, vont rentrer dans les plans
de l'UNESCO pour permettre une vie harmonieuse au sein des
sociétés.
Il faut dire pour ce qui est des mécanismes de
coordination de l'EPT, que l'élément principal de la
stratégie pour atteindre les six objectifs de Dakar consiste à
« susciter au niveau national et international, un puissant engagement
politique en faveur de l'éducation pour tous, définir des plans
d'action nationaux et augmenter sensiblement l'investissement dans
l'éducation de base ». Et parce qu'une telle tâche exige le
développement de mécanismes appropriés de dialogue, de
participation et de mobilisation, le cadre d'action de Dakar va
33Confère site
www.unesco.org/education/efa
suggérer la mise en place de forum (nationaux,
sous-régionaux et internationaux) ayant pour but d'organiser un Cadre
d'Action fondé sur un partenariat efficace entre les Partenaires
Techniques Financiers (PTF), la société civile et les
gouvernements.
C'est dire que les objectifs de l'EPT contribuent aussi
à la réalisation mondiale des huit OMD, précisément
l'objectif N°2 relatif à l'enseignement primaire universel et
l'objectif N°3 qui concerne l'égalité des sexes à
l'horizon 2015. Agence spécialisée des Nations Unies, le
rôle de coordination de l'EPT revient de « jure » et de «
facto » à l'UNESCO dans la mesure où les questions
internationales relatives à l'éducation relèvent
prioritairement de sa compétence. Suivons à cet effet
l'allocution du représentant de l'UNESCO à l'occasion de la
cérémonie de lancement officiel de la Semaine Mondiale de l'EPT
au Cameroun, le 23 avril 2008 : « En tant qu'institution chef de file pour
l'éducation, l'UNESCO a reçu pour mandat de coordonner les
efforts internationaux visant à la réalisation des objectifs de
l'Education pour tous. A cet égard, sa mission est de promouvoir
l'éducation en tant que droit fondamental, d'améliorer la
qualité de l'éducation et de stimuler l'expérimentation,
l'innovation et le dialogue sur les politiques.
Dans son rôle de coordination de l'EPT, l'UNESCO aide,
de concert avec les coparrains de ce mouvement que sont le PNUD, l'UNFPA,
l'UNICEF et la Banque mondiale, à établir et à maintenir
des partenariats aux niveaux national et international, plus
précisément, faciliter le dialogue entre les partenaires de
l'EPT, assurer des liens effectifs entre différents forums d' EPT et de
suivi des OMD, et recenser les contributions actuelles et futures de chaque
partenaire à la réalisation des objectifs de l'EPT.
En tant qu'agence spécialisée des Nations Unies,
entre autres, dans le domaine de l'éducation, l'UNESCO contribue au
quotidien au renforcement des capacités nationales, crucial pour
atteindre les objectifs de l'EPT, par la mise à disposition de
l'expertise adéquate auprès des pays qui en expriment la demande
comme c'est le cas du secteur de l'éducation camerounais. »
De ce qui précède, il appert que la contribution
de l'UNESCO est essentielle pour le progrès de l'éducation au
sein des États membres. Sauf que la réussite du projet est aussi
fonction de choix politiques qui, il faut le noter, ne sont pas aisés
à déterminer du fait de la non convergence des
intérêts ou priorités des parties prenantes à
l'éducation. D'où la nécessité des dialogues et
concertations en nombre important afin d'harmoniser les points de vue.
D'où également la mise en place des mécanismes de
coordination et d'appui à l'EPT. Mais aussi et surtout, les
progrès de l'éducation dépendent de la prise en compte des
aspirations profondes des populations cibles, aspirations dont la traduction au
sein des grandes
rencontres internationales et nationales relève
prioritairement du devoir de l'État, garant ultime de
l'intérêt national.
Au total, trois valeurs fondamentales forgent la philosophie
et la spécificité du programme EPT réaffirmé
à Dakar. Il s'agit d'abord d'une vision globale fondée sur des
objectifs larges, transversaux et complémentaires : l'éducation
pour tous tout au long de la vie est un droit des peuples, non pas une
variables économique destinée à être ajustée
selon les besoins du marché ou les ressources disponibles. Ensuite,
s'agit-il d'une stratégie axée sur un partenariat actif et
équilibré regroupant l'ensemble des acteurs autour d'un plan
national crédible conduit sous l'autorité du gouvernement. Enfin,
la participation active de la société civile à tous les
stades d'élaboration, de mise en oeuvre et de suivi des programmes EPT,
au travers de mécanismes institutionnalisant la participation de ses
structures représentatives. Au total, force est de relever que le
Cameroun occupe une place essentielle dans la mise en oeuvre de ce vaste et
alléchant programme, signe de la crédibilité des rapports
que ce pays entretient avec l'agence spécialisée des Nations
unies.
PARAGRAPHE II : LE CAMEROUN COMME PARTENAIRE DE CHOIX DES
ACTIVITÉS DE L'UNESCO EN AFRIQUE
Les activités de l'UNESCO au Cameroun couvrent tous les
domaines de compétence de l'organisation que sont l'éducation, la
science, la culture et la communication. L'action de l'UNESCO couvre en outre
des domaines nouveaux que sont les droits de l'Homme et l'environnement, qui
généralement sont intégrés au sein des domaines
classiques. Mais encore, des domaines « transdisciplinaires »
à l'instar de celui relatif à la lutte contre le Sida y sont
également intégrés.
A. LA CONTRIBUTION DE L'UNESCO A LA MISE EN PLACE DU
CENTRE INTERNATIONAL DE REFERENCE CHANTAL BIYA (CIRCB)
Le Centre International de Référence «
Chantal Biya » pour la recherche sur la prévention et la prise en
charge du VIH/SIDA (CIRCB) est situé à Yaoundé dans
l'enceinte du Centre Hospitalier Universitaire (CHU). Pour une meilleure
appréciation de la contribution de l'UNESCO à son fonctionnement,
il convient de mener une investigation du projet depuis ses origines
1. ORIGINES DU PROJET
Le professeur Montagnier, codécouvreur du virus VIH,
préside la Fédération Mondiale Recherche et
Prévention SIDA, dont la mise au point d'un vaccin pédiatrique
éliminant la transmission du VIH de la mère à l'enfant,
constitue l'objectif à terme. Ce faisant, ledit objectif rentre dans le
cadre du projet Family First Africa lancé par l'UNESCO en 2002. Projet
d'envergure international, il va connaître un engagement des
différents acteurs internationaux tels les États, les
institutions internationales, les ONG, pour ne citer que ceux- là. A
titre illustratif, l'Italie a contribué pour 2 millions de dollars
américain au lancement du projet, auquel l'Institut de Virologie humaine
à Baltimore de l'Université de Maryland, se sont associées
dans la mise en oeuvre.
En effet, il existe déjà des mesures
thérapeutiques pour réduire la transmission mère- enfant,
mais « un traitement qui supprime totalement la transmission n'existe pas
toujours ». Qui plus est, les spécialistes se sont aperçus
il y a quelque temps que l'allaitement réinfectait le nourrisson et que
le taux d'infection au bout d'un an est le même que si l'enfant
était resté sans aucun traitement. Fort de ce constat, le projet
du vaccin pédiatrique se focalise sur les enfants infectés par
l'allaitement. Le vaccin devant protéger l'enfant tout au long de
l'allaitement, soit une période de deux années.
Il est indiqué de noter que les chercheurs venant de
tous horizons travaillent en symbiose en vue de l'obtention des
résultats efficients. Ce qui est primordial pour l'identification des
variations des gènes de réponse au virus, qui sont fonction des
populations respectives. Au niveau de l'Afrique également l'on dispose
des Centres de recherche qui dispensent des thérapies aux patients et,
en parallèle, participent activement à la recherche clinique dont
celle d'un vaccin pédiatrique. Nous pouvons citer le Burkina Faso, la
Côte d'Ivoire et le Cameroun parmi les pays disposant d'un Centre en
Afrique.
C'est dire en effet que sous un même toit, se trouvent
regroupés la prévention, le traitement et la recherche. Ceci,
selon le Professeur Montagnier, s'explique par la volonté des
concepteurs du projet d' « associer les sciences aux activités
éducatives pour que les populations et les formateurs soient bien
informés ». « Ainsi, va-t-il poursuivre, est prévu dans
chaque Centre une salle multimédia consacrée à la
formation ». Toutefois, au moins pour ce qui est de l'Afrique, ces Centres
sont butés à un certain nombre de difficultés
inhérentes aussi bien à leur existence, qu'à
l'environnement.
L'on comprend alors par là que la réussite d'un
tel projet nécessite la mobilisation de « toute » la
communauté internationale qui doit travailler ensemble en vue de
réduire, sinon d'éradiquer cette pandémie du XXe
siècle que l'on pourrait bien assimiler à une arme de
destruction massive. Une telle mobilisation suppose à
son tour la participation de « tous » les acteurs du système
international, qu'ils soient étatiques ou non, individuels ou
collectifs, ou encore qu'ils relèvent des Organisations supra
étatiques. Les professeurs Montagnier, Gallo et Vittorio,
représentent parfaitement ces individus-acteurs-internationaux, issus
des nationalités différentes, mais unis pour une oeuvre commune.
Non moins importante constitue la participation de l'UNESCO à travers le
projet Family First Africa (voir supra). Peut-être, le CIRCB
rentre également dans la volonté d'un pays qui veut
désormais inscrire son nom dans la construction processuelle de la
« paix perpétuelle » internationale, paix qui passe
également par la lutte contre les grandes pandémies, causes par
excellence du sous-développement durable. Volonté elle-même
s'inscrivant dans la perspective d'un continent qui, plus que jamais, se refuse
d'être l'éternel objet des relations internationales.
2. NAISSANCE DU CIRCB : UNE INITIATIVE DU GOUVERNEMENT
CAMEROUNAIS CERTES...
2-1. RAISON D'ETRE
Le Centre International de Référence Chantal
Biya (CIRCB) pourrait à bien des égards être
considéré comme étant le produit de la Fondation Mondiale
de Recherche et Prévention du VIH/SIDA (FMRP), et du projet Family
First Africa (FFA). Créé par Arrêté du
Ministère de la Santé Publique en date du 17 Février 2006,
le Centre est considéré par ses promoteurs comme l'aboutissement
des efforts de la Première Dame du Cameroun, dont il porte d'ailleurs le
nom. Inauguré le 23 février de la même année, il
constitue également le résultat d'un énorme plaidoyer
initié par les Premières Dames d'Afrique à travers un
certain nombre de partenaires, ceci par le biais de l'ONG Synergies Africaines.
De manière plus claire, le CIRCB a été créé
par le Gouvernement camerounais avec la coopération de l'UNESCO, de la
FMRP et du Gouvernement italien.
Stricto sensu, le Centre entend participer à
l'élan global de la communauté internationale pour
accélérer les connaissances et la qualité des soins et
services destinés aux personnes infectées et affectées par
la pandémie. Organisation à vocation régionale, le CIRCB
aspire à devenir un membre actif du réseau africain de Centre
et d'Institution de recherche scientifique africaine en vue
d'intégrer et de développer la recherche clinique vaccinale et
thérapeutique dans le domaine des grandes endémies en Afrique,
dont les plus importantes sont notamment le VIH/SIDA, la tuberculose et le
paludisme.
Pour ce faire, le Centre s'est entouré des partenaires
crédibles aux niveaux international et national. Comme partenaires
nationaux du Centre, nous avons en premier ressort le Ministère de la
Santé Publique, responsable institutionnel qui représente
également l'État camerounais. Le Ministère de la Recherche
Scientifique et de l'Innovation, le Centre Hospitalier Universitaire de
Yaoundé, et la Faculté de Médecine de Yaoundé,
complètent la liste des partenaires nationaux. Plus important est le
nombre constituant la liste des partenaires internationaux. Aussi pourrions
nous mentionner la FMRP du professeur Montagnier à Paris en France ;
l'UNESCO ; l'Institut Supérieur de Santé et Université Tor
Vergata de Rome en Italie ; l'Institut de Virologie Humaine de Baltimore aux
USA ; le Centre Intégré de Recherche Bioclinique à Abidjan
en Côte d'Ivoire ; le Centre de Recherche Sainte Camille à
Ouagadougou au Burkina Faso ; les Synergies Africaines contre le SIDA et les
souffrances à Yaoundé au Cameroun ; la Fondation CLINTON à
New York, et la Fondation Bill et Melinda GATES aux USA.
2-2. ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT
L'Administration du CIRCB est constituée de quatre (4)
responsables chargés de veiller à sa gestion quotidienne. Les
Docteurs Pierre Joseph FOUDA et Odile OUWE MISSI OUKEM occupent respectivement
les charges d'Administrateur et d'Administrateur Adjoint. Font également
partis de l'administration, le Chef Section des Affaires
Générales, le Dr Faustin MVOGO, et le Chef Section Technique, Dr
Giula CAPPELLI.
Le Comité de Gestion est l'organe chargé
d'examiner toutes les questions relatives à l'organisation et au
fonctionnement du Centre. Monsieur Jean Stéphane BIATCHA assure sa
présidence, tandis que la Vice-présidence n'est assurée
par tout autre que : le Pr. Luc MONTAGNIER. Y font également partis, des
Membres dits statutaires que sont : les Services du Premier ministre ; les
Ministères de la Santé Publique ; de la Recherche Scientifique et
de l'Innovation ; de l'Économie, de la Planification et de
l'Aménagement du Territoire ; et de l'Éducation de base.
L'UNESCO, les Synergies Africaines contre le SIDA et les Souffrances, le
Directeur Général du CHU, et l'Ambassadeur d'Italie au Cameroun,
enfin viennent compléter la liste des Membres statutaires du
Comité de gestion du CIRCB.
La Section Technique, quant à elle, est composée
de deux unités et de quatre secteurs. Le Secteur d'immunologie
où l'on retrouve le dépistage et confirmation des infections,
numération lymphocytaire, activation et production des cytokines,
identification des épitropes immunogènes et typage HLA etc. ; le
Secteur de Biochimie et Hématologie : bilan biologique
pour le suivi des Personnes Vivant avec le VIH/SIDA (PVVS) et
pour la recherche clinique et vaccinale ; le Secteur
d'épidémiologie et bio-informatique: analyse des
données de séquences et sous-types viraux, du polymorphisme
immunitaire, de la progression technique de la maladie et des
déterminants sociaux plus relevant ; le Secteur de virologie :
détermination de la charge virale, étude des résistances
génétiques aux antirétroviraux, séquençage
des souches virales. A côté de ces différents Secteurs se
trouvent les Unités de recherche clinique pour les essais
vaccinaux ; et de maintenance pour les appareils biomédicaux :
« le Centre entend devenir une institution de référence pour
la formation dans une bonne utilisation et la maintenance des appareils de
cytométrie en flux ».
A noter aussi l'Agence de prévention qui est une
activité en développement, dirigée vers les
communautés telles que les établissements scolaires et
universitaires, les entreprises et les communautés rurales. Une Section
médicale s'occupe également des patients qui sollicitent les
services du Centre, notamment pour les différents examens biologiques
des PVVD. Un Centre de Documentation et d'Information sur le VIH/SIDA (CDI),
doté d'un espace numérique avec connexion Internet, est ouvert
gratuitement à tout public. Centre référentiel en la
matière, il compte proposer à l'avenir, des formations en
présentiel et à distance.
Le Conseil Scientifique est l'organe consultatif chargé
d'approuver les programmes de recherche du Centre, de valider les protocoles de
recherche sur le plan méthodologique, et d'évaluer ses
activités de recherche. Les professeurs Luc MONTAGNIER et Peter NDUMBE
assurent respectivement la présidence et la vice-présidence.
Parmi les membres se trouvent les professeurs Emmanuel EBEN MOUSSI, Rose LEKE,
Victor ANOMAH NGU, Vittorio COLIZZI, David PAUZA, Jacques THEZE, et le Docteur
Saladin OSMANOV.
Non moins important est l'autre organe consultatif qu'est le
Comité d'Éthique dont l'une des missions est de vérifier
que les droits fondamentaux de la personne humaine sont pris en compte dans les
travaux de recherche. Il est composé des professeurs Rose LEKE,
WALAINJOM MUNA, Godfrey TANGWA ; des dames Thérèse MALONGUE
épse ATANGANA, Lucie ZAMBOU ; des sieurs Isaac TITA, LIMAN MALOUM ; et
des autorités religieuses, le Pasteur Emile BAKONG MBOMA, et
l'Abbé Jacques Philippe TSALA TSALA.
De ce qui précède, nous remarquons que la
vocation internationale du CIRCB est plus qu'illustrative en ce sens que toutes
les catégories d'acteurs y sont représentées, venant de
tous les coins du globe. Une telle initiative qui suppose la mobilisation d'une
pluralité d'acteurs participatifs porterait en en point douter
les germes d'une coopération dite
« fructueuse »34. Dans la moindre des
hypothèses, elles entretiennent des « affinités
électives », au sens où l'entendait Max Weber. Ce que nous
voulons démontrer ici, c'est non pas que la mobilisation des acteurs
venant d'horizons différents est en soi une garantie de la
réussite d'un projet, dans le sens de rendement efficient. Il s'agit
encore moins de prétendre qu'une coopération fructueuse est celle
qui mobilise une panoplie d'acteur. Ce que nous voulons affirmer, c'est qu'un
projet fondé au départ sur la participation effective de
« tous » les acteurs concernés et qui peuvent y apporter un
plus pour sa réalisation, constitue à n'en point douter un
facteur prédisposant à l'atteinte des objectifs escomptés
(surtout si son utilité n'est guère remise en cause). Facteur
prédisposant, avions-nous dit, qui n'est pas à confondre avec le
facteur mécanique dans la mesure où nous tenons compte de la
complexité du fait social, avec ses aléas et imprévus,
mais aussi avec ses « effets pervers ». Exprimé autrement, il
s'agit de l'humus ou de l'engrais qui permet au grain semé de trouve un
terrain favorable à sa croissance, parce que fertile. Sauf que la
garantie d'une bonne récolte suppose également que l'on puisse
contourner les caprices du temps ou de la saison, ainsi que la
sécurisation du fruit contre les bêtes sauvages et/ou
domestiques.
Quoi qu'il en soit, l'on observera que les autorités
camerounaises se sont entourées des meilleurs partenaires
indiqués pour ce type de projet. Conscient que la réussite d'une
telle initiative est fonction de sa propre détermination, et que la
meilleure posture d'attente de la mobilisation internationale est de pouvoir
présenter au préalable sa propre contribution, l'État
camerounais n'a ménagé aucun effort pour la mise en place du
centre. Ainsi, l'Arrêté de création est d'abord un
Arrêté camerounais, la construction du bâtiment relevant
aussi de son oeuvre. Et il n'est pas exagéré de dire que la
visibilité de cet édifice a permis l'accélération
du projet, ainsi que son installation. A noter enfin les subventions
accordées chaque année par l'État camerounais, à
travers le MINSUP. Un tel engagement permet de mieux appréhender la
contribution des autres partenaires internationaux, à l'instar de
l'UNESCO.
3. ...LA « TOUCHE » DE L'UNESCO RESTE CEPENDANT
DÉTERMINANTE
La contribution de l'UNESCO au fonctionnement du CIRCB est
matériellement appréciable. Mais en amont, elle reste très
considérable à travers le projet Family First Africa
(FFA).
34 Mais à condition que les différents
acteurs parlent véritablement le même langage, participent
à l'amélioration de « l'humaine condition »
3-1. LE PROJET « FAMILY FIRST AFRICA » COMME
PRÉALABLE AU CIRCB
Dans le Programme et Budget UNESCO pour le biennal 2002-2003,
l'UNESCO s'engage à aider « les pays les plus touchés par la
pandémie à avoir un meilleur accès au savoir scientifique
sur le VIH/SIDA, afin d'étayer les efforts nationaux visant à
donner à tous la possibilité d'accéder aux traitements et
d'encourager la mise au point de vaccins par la recherche scientifique ».
Chemin faisant, la période 2003 -2006 va être le témoin du
lancement d'un projet novateur intitulé « FFA », visant
à briser le cercle vicieux de la relation établie entre
l'infection par le VIH et la désintégration des cellules
familiales africaines.
Projet UNESCO, FFA a été rendu possible
grâce au financement du Gouvernement italien. Il est mené de
concert avec la FMRP, l'Institut de Virologie humaine et l'Université
« Tor Vergata », pour soutenir les programmes de lutte contre le
VIH/SIDA en Côte d'Ivoire, Burkina Faso et au Cameroun. Trois objectifs
essentiels sous-tendent le projet :
- Militer en faveur des programmes de lutte contre le sida
axés sur la famille, notamment ceux qui visent les nouvelles
initiatives destinées à la limitation de la transmission du virus
de la mère à l'enfant.
- Mettre en place une communauté internationale
associant l'Afrique et les pays avancés, dans le but de limiter la
propagation du VIH au moyen de l'éducation préventive et la mise
en place de plates-formes novatrices pour la protection des nouveaux-nés
; et
- Enseigner les compétences scientifiques et
médicales de base nécessaires à une stratégie
de prévention locale et de programme de recherche chez des partenaires
de pays africains, au travers de la formation, d'échanges internationaux
d'étudiants et de coopération à long terme.
Ce que l'on espère ici, c'est d'améliorer la
technologie sanitaire dans les pays partenaires, qui contribueront à
lutter contre d'autres maladies émergentes et
réémergentes, et de tisser un lien visant à
améliorer la santé publique et l'enseignement scientifique. Et
ceci grâce au renforcement des capacités locales d'animation et
des initiatives libres pour lutter contre le SIDA. Pour y parvenir, le projet
« FFA » se propose de :
Nouer des partenariats dans le domaine scientifique et de
l'éducation entre les PED et pays avancés ; garantir une
formation et l'accès à des programmes d'enseignements
supérieurs destinés aux médias africains ; mettre au point
des compétences innovantes adaptées, axées sur la
recherche scientifique en vue de l'éducation préventive,
notamment en ce qui concerne la transmission mère-enfant ; mettre en
place une plate-forme novatrice « tuberculose et vaccination
néonatale contre le SIDA » par le développement de la
recherche
en Afrique ; créer et promouvoir des centres
spécifiques en Afrique associant recherche, formation et
éducation préventive.
3-2. LA CONTRIBUTION DIRECTE DE L'UNESCO AU SEIN DU
CIRCB
L'État camerounais a rédigé un grand
projet que l'UNESCO s'est chargé de ventiler auprès des bailleurs
de fonds. D'où le projet « FFA » a permis l'équipement
du centre de documentation. Plus précisément, la contribution
matérielle de l'UNESCO pourrait s'énoncée ainsi qu'il suit
:
- un équipement en réactif du laboratoire, à
hauteur de 40 millions ;
- une cinquantaine de livre pour la bibliothèque ;
- un centre multimédia, doté d'une dizaine
d'ordinateurs écrans plats, avec accès gratuit sur internet, pour
tout le monde, usagers comme étudiants et chercheurs, pour le moment
!
Il faut dire que l'UNESCO s'est certes engagée à
atténuer l'impact de la pandémie, à travers une
contribution interdisciplinaire. Et parce que les initiatives visant à
lutter contre le SIDA proviennent de la découverte du virus et de la
recherche et des connaissances scientifiques de ceci, l'Organisation a donc un
rôle capital à jouer dans la promotion et le soutien de la
diffusion de l'information scientifique sur :
- la biologie des organismes infectés en
général, et plus particulièrement par le VIH ; - la
prévention de l'infection ;
-le traitement et le soin des personnes contaminées, y
compris l'information scientifique sur les médicaments disponibles pour
la thérapie ;
- la recherche fondamentale dans le domaine du VIH et du SIDA et
son rôle dans la lutte contre la pandémie.
La contribution de l'UNESCO n'est pas uniquement
matérielle. Bien plus important reste le travail effectué en
amont. Suivons à cet effet les propos recueillis auprès du Chef
Section des Affaires Générales, le Dr Faustin MVOGO : «
l'UNESCO nous a beaucoup aidé lorsqu'il a fallu plaidoyer pour la
création du Centre. L'appui de l'UNESCO est indispensable pour la mise
sur pied d'une maison internationale. Le plaidoyer international a
été fait par la Fondation de Montagnier, des Synergies
Africaines, du MINSANTE et de l'UNESCO », tous ensemble ! Faut-il enfin
ajouter que dans le fonctionnement quotidien du CIRCB, l'UNESCO apporte sa
contribution comme membre du Comité de gestion, et participe à la
prise des décisions. Enfin, la contribution de l'UNESCO à la mise
en place du CIRCB semble à plusieurs égards, refléter son
action dans le cadre de ses différents domaines de compétence.
B. LES ACTIVITÉS DE L'UNESCO AU
CAMEROUN
1. UNE ACTION QUI COUVRE TOUS LES DOMAINES DE
COMPÉTENCE DE L'UNESCO...
Les activités de l'UNESCO au sein du territoire
camerounais sont aussi vieilles que l'existence même du Cameroun en tant
que nation souveraine. Elles couvrent pratiquement tous les domaines de
compétence de cette institution. Aussi, il sied de relever succinctement
les actions majeures de l'UNESCO au Cameroun.
Dans le domaine de la culture, par exemple, l'UNESCO apporte
son soutien au recensement du patrimoine immatériel camerounais,
à la restauration des sites historiques, à la valorisation des
traditions orales et du patrimoine culturel. La promotion du livre et des
festivals culturels, ainsi que des droits d'auteurs, ont également
bénéficié du soutien de ladite institution. Ce secteur se
présente avec la science comme `les parents pauvres' de la
coopération de l'UNESCO au sud du Sahara, comparativement aux autres.
Pour ce qui est de la coopération scientifique en effet, l'UNESCO appuie
la recherche scientifique ainsi que la protection et la valorisation du
patrimoine forestier, faunique et environnemental camerounais. On peut à
ce titre citer l'appui de l'UNESCO en faveur du suivi au Cameroun du programme
sur l'Homme et la Biosphère (MAB), l'appui à la réserve
forestière et de la faune du Dja35, les subventions
accordées à l'école de Faune de Garoua et à
l'évaluation du potentiel scientifique national. On peut dans la
même logique citer le financement de séminaires organisés
au Cameroun sur l'environnement, les réserves de biosphère et les
énergies renouvelables.
L'action de l'UNESCO au Cameroun, en plus de la science et de
la culture, est beaucoup plus considérable dans le domaine de
l'éducation et de la communication. En cela, l'institution
spécialisée apporte son appui à l'Ecole Supérieure
des Sciences et Techniques de l'Information et de la Communication basée
à Yaoundé (ESSTIC), au perfectionnement des spécialistes
de la communication et à l'implantation de plus de quinze radios rurales
et des centres multimédia destinés aux populations rurales.
D'ailleurs, l'étude du fonctionnement des radios rurales de Mbalmayo et
de Sa'a, villes se trouvant à la périphérie de
Yaoundé, ne
35 Située en plein coeur de la forêt
équatoriale, dans la région sud-est du pays,
précisément dans le département du Dja et Lobo
sera pas oubliée dans ce travail de recherche, compte tenu
de leur impact auprès des zones périphériques, mais aussi
de leur contribution à la vulgarisation de l'éducation des
masses.
Dans le domaine de l'éducation, l'action de l'UNESCO au
Cameroun s'inscrit prioritairement dans la promotion de l' «
éducation pour tous ». Ce programme, qui constitue un socle
tangible de notre objet d'étude, est issu du Forum mondial sur
l'éducation tenu à Dakar en 2000, Forum au sein duquel la
communauté internationale s'est engagée à
améliorer, entre autres, l'accès à l'école et
atteindre la scolarité gratuite et de qualité pour tous les
enfants en âge d'être scolarisés dans le primaire. Aussi,
l'enseignement primaire et secondaire au Cameroun bénéficient des
financements de l'UNESCO dans le cadre de la formation des formateurs, de
l'acquisition du matériel didactique, de la réflexion
thématique des séminaires sur le système éducatif
et de l'amélioration de l'encadrement pédagogique. Le
système universitaire camerounais quant à lui
bénéficie du soutien de l'octroi des bourses, du soutien à
la participation au programme de l'institution et de la création des
chaires UNESCO dans les universités de Dschang, Buéa et à
l'Université Catholique d'Afrique Centrale (UCAC). L'éducation
qui est un préalable au développement durable porte ici
l'empreinte de l'UNESCO. Et à en croire l'actuel chef de l'Etat Paul
BIYA, l'une des actions de l'UNESCO au Cameroun « qui a fait date reste
l'appui qu'elle a apporté à la création de l'Ecole Normale
Supérieure de Yaoundé en 1961 ». Ce discours tenu à
la Conférence générale de l'UNESCO tenue à Paris le
23 octobre 2007 est également une reconnaissance de 27ans de
coopération « intensifiée ». L'éducation,
justement, parce qu'il relève du domaine « phare » des
activités de l'UNESCO, mérite qu'on y jette un regard plus ou
moins détaillé.
2...EN DÉPIT DE LA PRIORITÉ ACCORDÉE
A L'ÉDUCATION
Les fruits de la coopération entre l'UNESCO et
l'État au Cameroun, entre 1960 et 200036, concernent la
participation du Cameroun aux activités de l'UNESCO, ainsi que l'action
de l'institution spécialisée des Nations Unies au Cameroun. Ainsi
parler des réalisations de l'UNESCO au Cameroun, c'est
s'intéresser aux projets ayant été mis en oeuvre
entièrement par l'UNESCO, soit avec sa contribution dans divers
domaines. Dans le cadre de l'éducation, les réalisations de
l'UNESCO couvrent une pluralité de domaines :
2-1. DANS LE DOMAINE DE L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE ET
SECONDAIRE.
Dans le cadre de la création des écoles et
instituts :
36 C'est à dessein que nous n'allons pas
au-delà de l'année 2000, un chapitre entier étant
réservé à l'EPT
- La création des Instituts de Pédagogie
Appliquée à vocation Rurale (IPAR) de Yaoundé en 1967, et
de celui de Buéa en 1973.
- La création de l'École Normale des Instituteurs
de Yaoundé.
- La mise sur pied de l'Institut Nationale d'Éducation
(INE) en 1973, devenu le Centre National de l'Éducation en 1976.
- La création en 1975 des Écoles Normales des
Instituteurs de l'Enseignement Technique.
- La création d'un centre d'alphabétisation
fonctionnelle et d'éducation continue en milieu rural.
Dans le cadre de formation et de l'information, plusieurs
séminaires de formation et d'information ont été
organisés avec le concours de l'UNESCO. Entre autres, nous pouvons citer
:
- Un séminaire sur la réforme de l'enseignement
primaire au Cameroun organisé à Yaoundé du 26 au 29 mars
1973, séminaire visant l'évaluation pédagogique, la
stratégie opérationnelle et la planification de
l'éducation.
- Un séminaire audio-visuel de sensibilisation en
techniques modernes de gestion ayant recours à l'information a
été organisé à l'intention des gestionnaires du
Ministère de l'Éducation Nationale.
En outre, plusieurs tables rondes ont été
organisées en janvier 1991 et 1995 sur l'Éducation pour tous
(EPT). Le Cameroun ayant même bénéficié à la
table ronde de 1991 d'un concours prioritaire, le principe de faire de lui un
des pays tests pour la réalisation des exhortations de la
Conférence de Jomtien pour l'EPT, ayant été retenu. Et
c'est dans le même esprit que l'on assistera en mai 1995 à
l'organisation des États Généraux de l'Éducation
camerounaise.
Enfin, plusieurs experts et consultants ont été
mis à la disposition du Cameroun par l'institution
spécialisée des Nations Unies, dans le cadre de la réforme
de l'enseignement primaire. Et en novembre 1999, l'UNESCO appuyait un
séminaire de formation des enseignantes d'écoles maternelles.
2-2. DANS LE DOMAINE DE L'ENSEIGNEMENT
SUPÉRIEUR.
L'un des fruits les plus anciens, et qui pourtant fait encore
date, de la coopération entre le Cameroun et l'UNESCO reste la
création de l'École Normale Supérieure de Yaoundé
en 1961, bien sûr en association avec le PNUD et d'autres partenaires
bilatéraux. A noter également la contribution de l'UNESCO
à la création de l'École Normale Supérieure de
l'Enseignement Technique. Aussi après la création
de l'ENSET, l'UNESCO lui offrait un « lot important de matériel en
vue de permette un bon démarrage ». Il s'agit de :
- 04 cartons de stencils,
- 01 machine à photocopie,
- 04 meubles à classeur,
- 20 machine à écrire,
- 01 machine à relier,
- 01 perforatrice,
- 01 machine offset,
- 20 tables à dessin,
- 02 table-bureaux,
- 01 stock à papier duplicateur (4000 rames)
- 01 lot de livres d'un montant de 600.000 F CFA
Ce n'est pas tout. L'École Nationale Polytechnique
camerounaise a bénéficié de la mise en place d'un
laboratoire de micro informatique, « et de bien d'autres aides » !
L'ES STIC a vu son Centre de Documentation informatisé par « les
bons soins de l'UNESCO » ! Enfin l'UNESCO alloue des bourses
d'études aux jeunes camerounais, dans le cadre des formations en tout
genre de domaines de son ressort. « Entre 1960 et 1985, la moyenne
annuelle était de 07 bourses ».
De ce qui précède, nous pouvons dire que
l'action de l'UNESCO dans le système éducatif camerounais couvre
une panoplie de programmes allant des matériels et ressources à
l'offre de services et de bourses, en passant par les séminaires de
formation et d'information, sans oublier la création des écoles
et instituts.
* *
*
Faire une énonciation plus ou moins exhaustive des
projets qui ont été mis en oeuvre au Cameroun soit
entièrement, soit avec la contribution de l'UNESCO est une chose ; mais
qualifier une coopération de fructueuse en est une autre. Cela requiert
une certaine « rupture épistémologique » qui permet
d'appréhender les faits de manière objective, avec la prise en
compte sinon de tous les paramètres (contexte, enjeux, acteurs,
motivations, rapports de force, etc.), du moins des éléments
déterminants. Pour paraphraser DURKHEIM, il s'agit de considérer
les activités de l'UNESCO au Cameroun comme des choses, dans une
perspective socio-historique.
En effet, les activités de l'UNESCO au sein des
États membres se scindent en deux catégories, elles-mêmes
relevant de ses deux principales sources de financement. S'agissant pour le
Cameroun, il nous sied de noter que le programme de participation
découlant du budget ordinaire de l'UNESCO porte essentiellement sur
l'octroi de subventions pour l'organisation des séminaires et colloques,
conférences, études de recherches et tables rondes ; mais
également le financement des activités de la Commission nationale
et des clubs des amis de l'UNESCO, ainsi que l'octroi de bourses
d'études et de stages.
Les activités découlant des ressources
extrabudgétaires participent du titre de la coopération technique
de l'UNESCO au Cameroun, et s'inscrivent dans le cadre global du programme de
coopération technique du PNUD, avec la contribution des autres
partenaires financiers. Il s'agit pour l'essentiel de la mise en oeuvre de
projets de développement, dont l'UNESCO reste le chef de file.
Aussi, s'il n'est pas aisé d'évaluer les
activités relevant du budget ordinaire, tant il est que l'impact des
colloques et conférences n'est pas facilement mesurable, l'on parvient
tout de même à s'interroger sur l'utilité de la publication
des revues. En effet, qu'il s'agisse de la Commission Nationale ou du Bureau
Régional, il n'existe aucune politique de distribution des revues et
bulletins d'information au sein des populations cibles. Les populations de ce
fait ne sont pas assez imprégnées des idéaux de l'UNESCO
qui, à notre sens participent également de la consolidation de
l'État de droit au Cameroun. L'octroi des bourses d'études et de
stages quant à lui a connu une certaine régularité, avant
de connaître une baisse considérable dans la décennie
précédente le forum de Dakar. Depuis lors, la distribution
desdites bourses se fait dans une discrétion alarmante qui renfloue la
méritocratie aux calendes grecques, le clientélisme ayant repris
le témoin ! Enfin le soutien accordé à la FECACU a
toujours eu un impact sur la population au point où ladite
fédération reste parmi les mieux structurée au sein du
territoire national.
L'évaluation des activités
extrabudgétaires présente un tableau assez sombre. Car si l'on
peut dans une certaine limite reconnaitre que la contribution à la mise
en place de l'ENSET et de l'ENS ait été déterminante, il
en va autrement pour ce qui des autres projets. C'est le cas de trois projets
spécifiques : IPAR de Yaoundé ; IPAR de Buéa ; INE.
L'INE était chargé entre autres de
l'étude des interactions entre le milieu social et les divers milieux
d'éducation scolaires et extrascolaires en vue de leur
rénovation, en rapport avec le développement économique,
culturel et social du pays, tandis que les deux IPAR avaient pour mission de
faire de l'école primaire camerounaise, un instrument efficace du
développement social et économique du pays.
En effet, ces trois projets participaient d'un même
ensemble, à savoir le système éducatif camerounais, et
l'oeuvre de coopération devait consister à les «
insérer dans cet ensemble, et à faire en sorte que le processus
enclenché puisse normalement suivre son cours sans que le gouvernement
camerounais ait plus tard à faire appel à quelque aide
internationale que ce soit » (EPOTE, op.cit : 104). Aussi, le Cameroun,
l'UNESCO et le PNUD étaient les principaux acteurs chargés de la
mise en exécution de ces projets. Après une étude
attentive de la mise en oeuvre de ces trois projets, Raymond EPOTE observait en
1976 que :
- Au niveau du projet IPAR-Yaoundé, les travaux avaient
débuté depuis 1969. En principe, la réforme devait
être généralisée en juillet 1975 dans toutes les
classes de première année du cycle primaire. Il n'en fut rien. En
février 1976, on en était encore à la réorientation
des objectifs assignés à l'Institut.
-Pour l'IPAR-Buéa, des bases structurelles et
méthodologiques adéquates ont été certes
fixées. Cependant les travaux de réforme hésitent à
s'amorcer du fait de l'absence d'une plate- forme philosophique globale.
- Quant au projet INE il demeure miné par le
problème institutionnel et par la carence d'une main d'oeuvre hautement
qualifié.
Or ces trois projets constituant une trilogie dans le
processus de réforme de l'éducation camerounaise à cette
période, la coopération technique aura été, du
moins dans le cadre du chiffre indicatif de Planification (CIP) 1972-1976, un
échec manifeste. Et de l'avis de notre auteur, cet échec est
imputable aux trois parties qui formaient le triangle de coopération :
« Du côté de l'assistance PNUD/UNESCO nous soulignerons tout
d'abord les lenteurs administratives qui très souvent ont
occasionné des retards s'étendant sur plusieurs années
». A cela s'ajoutait la fragilité de la coordination au niveau de
l'évaluation des projets. Les fautes imputables au gouvernement
camerounais relevaient des domaines financier (engagements non honorés),
de l'administration de l'assistance technique (manque de formule
adéquate pour l'insertion de la composante bilatérale au sein des
travaux), mais aussi et surtout l'absence de définition et de traduction
même de la philosophie qui sous-tend les objectifs assignés aux
trois institutions.
C'est dire enfin selon notre auteur que si la
coopération de l'UNESCO dans le cadre de la réforme du
système éducatif camerounais présente plutôt un
bilan négatif, « c'est parce que justement il existait comme un
hiatus entre les aspirations profondes du peuple camerounais et les
modèles que lui proposait la coopération internationale »
(idem : 187).
Mais peut-on dire que les acteurs nationaux et internationaux
aient tirés les leçons de ces échecs passés ? Nous
ne pourrions vraiment répondre à cette question qu'au terme
d'une
évaluation des engagements pris par ceux-ci lors du
forum de Dakar en 2000, sur la scolarisation primaire universelle. Ce qui reste
certain, c'est que suite au bilan mitigé de la Conférence de
Jomtien, le forum de Dakar, renforcé par l'accord sur les OMD, a
réellement renforcé la cause de l'éducation au Cameroun
tout comme en Afrique. En même temps que les autres domaines ont eu un
regain considérable à travers le financement de nombreux projets.
Il en a résulté des changements institutionnels et
opérationnels appréciables.
Sauf que c'est notamment dans la mise en oeuvre de ces «
grands programmes » que la coopération Cameroun-UNESCO
présente de nombreuses failles ; aussi bien au niveau du financement des
projets de développement, que dans l'opérationnalisation de
l'EPT.
PARTIE II:
L'UTILITÉ DES RELATIONS CAMEROUN-UNESCO :
UNE FONCTIONNALITÉ DISCUTABLE
CHAPITRE III :
LA DYNAMIQUE OPÉRATIONNELLE DE
L'ÉDUCATION POUR TOUS (EPT) AU CAMEROUN : UNE ÉVALUATION DU
PROCESSUS DE SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE (SPU)
Le forum de Dakar sur l'Éducation pour tous (EPT)
constitue, en n'en point douter, une opportunité essentielle pour les
pays en développement, de remodeler leurs systèmes
éducatifs, afin de les remettre sur les standards internationaux, sur
les rouages du temps mondial, pour une meilleure insertion de ceux-ci dans la
donne internationale dont le tableau ne cesse de présenter une Afrique
continuellement à la marge dudit processus. C'est que dans un contexte
international et/ou transnational de valorisation stratégique des
nouvelles technologies de l'information et de la communication, les formations
sociales étatiques au sud du Sahara sont également tenues de
régenter leurs capitaux humains dans des stratégies de
développement inclusif, endogène et participatif, le tout greffer
« aux politiques de renforcement de leurs dotations dans la
géopolitique globale de la formation » (Owona Nguini) En effet,
l'éducation reste la clé de développement de toute nation
et constitue de ce fait un enjeu important en ceci que l'ouverture et la
formation des esprits s'effectue par elle.
Si la dynamique opérationnelle du processus d'EPT au
Cameroun facilite un regard prospectif pour l'horizon 2015, ceci à
travers une meilleure appréciation des contours et
réalités actuelles, il n'en demeure pas moins qu'une autre
logique toute aussi essentielle nous permet d'appréhender
l'environnement éducationnel du Cameroun dans une perspective
historique. Plus précisément, il nous sied de présenter la
dynamique historique et processuelle de l'environnement éducatif
camerounais dans son ensemble. Il conviendra par la suite de considérer
le processus de Scolarisation Primaire Universelle comme analyseur principal de
l'opérationnalisation de l'EPT au Cameroun.
SECTION PREMIERE : LA LOGIQUE SITUATIONNELLE DES
RELATIONS CAMEROUN-UNESCO : VERS L'ÉDUCATION POUR TOUS
«DAKAR» représente sûrement un tournant
décisif de renforcement et d'intensification des rapports entre le
Cameroun et l'institution spécialisée des Nations unies,
chargée principalement de la promotion de l'éducation. Il reste
tout de même que ce secteur essentiel de la coopération est une
priorité constante des relations Cameroun-UNESCO qui préexiste au
forum. Mieux l'éducation est une donnée constante des
sociétés africaines qui fait sens bien avant leur rentrée
dans le concert des souverainetés internationales.
PARAGRAPHE I : HISTORIQUE DE L'ÉDUCATION AU
CAMEROUN37 : QUEL BILAN AVANT LES PROGRAMMES D'EPT ?
Le renseignement sur l'environnement éducationnel
ambiant au sein de la société camerounaise avant le forum de
Dakar commande une approche diachronique distinguée en deux
temporalités, qui elles-mêmes sont synchronisées par une
date charnière : 1960
A. L'ÉDUCATION CAMEROUNAISE AVANT LA FORMATION DE
L'ÉTAT
Depuis son accession à l'indépendance le premier
janvier 1960 jusqu'à nos jours en passant par le Renouveau38,
l'éducation a toujours été une préoccupation
gouvernementale significative au Cameroun. Si l'éducation reste une
activité essentiellement perfectible, l'on
37 Plusieurs notes rédigées dans ce
titre sont tirées du Rapport portant sur les états
généraux de l'éducation camerounaise en 1995.
38 Période datant de 1982 jusqu'à nos
jours, et qui désigne le (s) mandat (s) de Paul Biya à la
magistrature suprême de l'État camerounais.
remarque que les différentes réformes
amorcées au sein des pouvoirs publics (IPAR, création
d'établissements, bilinguisme, office du Bac etc.), bien que louables
sont tout de même demeurées d'une adaptation parcellaire pour
l'essentiel. C'est dire qu'une dynamique s'est toujours avérer
indispensable, « compte tenu du déphasage de plus en plus
décrié du système éducatif par rapport à la
société », ainsi que le remarque les rédacteurs des
états généraux de l'éducation camerounaise, en
1995.
1. L'ÉDUCATION TRADITIONNELLE DE L'ÉPOQUE
PRÉCOLONIALE.
De manière générale, l'éducation
traditionnelle africaine à l'époque précoloniale
était essentiellement pragmatique et utilitaire. Définie par la
littérature sur l'histoire de l'éducation en Afrique comme le
processus de transmission des connaissances, aptitudes et valeurs culturelles
de la société traditionnelle, d'une génération plus
âgée à une autre plus jeune, l'éducation en effet
assure une préparation à la vie adulte de l'enfant, par le biais
d'une insertion sociale progressive.
Cellule de base et lieu par excellence de socialisation, la
famille est toujours restée le point de départ de
l'éducation traditionnelle, même si par la suite elle devait se
poursuivre par des classes d'âge, avant de se terminer par des rites
spécifiques en fonctions des groupes ethniques.
Ce système éducationnel qui va être
perturbé par l'imposition d'un système scolaire autrement
structuré du fait de la colonisation, subsistera tout de même
à l'organisation scolaire hérité des différentes
occupations étrangères vécues par le Cameroun. Ainsi en
est-il de la culture de l'oralité qui continue à influencer
l'environnement éducationnel camerounais à travers une
utilisation enrichissante de la mémoire.
Et aujourd'hui encore, compte tenu des difficultés que
rencontre le système scolaire camerounais, certaines voix militent en
faveur d'une refonte de l'école primaire avec l'introduction de
certaines langues locales en qualités de « langues de
démarrage »39
Malheureusement pour un certain nombre d'auteurs,
l'éducation séculaire africaine comporte des aspects
négatifs qui en freinent l'efficacité, car disent-ils, du type de
société rurale, hiérarchisée et immuable, subsiste
profondément dans la culture scolaire cette
39 Tout un dossier est réservé à
l'éducation en Afrique Centrale dans la Revue `Enjeux' publiée
par la Fondation Ango Ela
philosophie de l'imitation, de la reproduction, de la
conservation, qui inhibe l'initiative, la mobilité,
l'invention40.
Pour pertinente que puisse être une telle assertion, une
évaluation sincère du bilan de l'éducation coloniale
laisse percevoir un tableau sombre des systèmes ayant connu «
l'assimilation », comparativement à ceux qui pratiquaient
l'indirect rule. Ce constat est d'autant plus vrai dans le cas du
Cameroun où le système éducatif anglophone, en
dépit de certains dysfonctionnements, se porte relativement mieux que
celui de la partie du territoire ayant subi la colonisation française.
Qui plus est, l'on note également qu'à l'époque
précoloniale, l'Éducation Pour Tous était bel et bien une
réalité en Afrique, compte tenu de la grande emprise de la
société sur les individus. Cette donne va changer avec la
pénétration coloniale.
2. L'ÉDUCATION CAMEROUNAISE DE L'ÉPOQUE
COLONIALE.
En dépit des techniques propres liées aux
pesanteurs socioculturelles de chaque nation, les importations des
systèmes étrangers41 vont de manière identique
imposer deux types d'éducation au Cameroun : l'éducation des
administrateurs métropolitains et celle des missionnaires
chrétiens.
Bien que l'objectif d'évangélisation ait
été prioritaire, le bilan des écoles chrétiennes au
Cameroun nous révèle qu'une bonne partie des élèves
formés en leur enceinte se retrouve dans les différents secteurs
de l'activité nationale, du bas en haut de l'échelle sociale,
dans le secteur privé comme dans le secteur public. Aussi dans le
système scolaire en particulier, on note au milieu des années
1990 que 40% des élèves camerounais fréquentaient les
établissements confessionnels.
Les administrateurs métropolitains ont quant à
eux apporté des différences énormes avec ce qui existait
chez eux depuis le dernier quart du XIXème siècle. En
effet, il n'y avait pas une politique visant à universaliser
l'enseignement primaire au Cameroun avant 1960. Bien plus, l'enseignement
secondaire qui depuis fort longtemps en occident débouche sur des
secteurs privés autant que publics de l'économie, si ce n'est sur
l'université nationale, n'était destiné en Afrique
qu'à une faible élite de la population. De fait, il était
orienté sur des
40 L'allocution du Président de la
République française, Nicolas Sarkozy, prononcée devant
l'estrade de l'Université Cheik Anta Diop au Sénégal en
2007, est révélatrice de l'opinion publique occidentale à
cet égard. Ce discours où l'auteur affirme que `l'Afrique n'est
pas encore rentré dans l'Histoire' a d'ailleurs été
violemment critiqué par certains chefs d'Etats africains, à
l'instar de Thabo Mbeki.
41 Colonisation allemande, `Tutelle' et `Mandat' des
systèmes française et britannique, et l'éducation
confessionnelle
créneaux précis et étroits du
marché du travail, celui des postes subalternes de l'administration.
D'où le fait que, pendant la colonisation, l'université ne
pouvait être accessible qu'à des individus plus ou moins
assimilés, et en métropole uniquement.
S'il ne fait aucun doute que les colonisations
française et britannique s'étaient attelées à
effacer toute trace allemande, il reste tout de même évident que
les deux systèmes éducatifs visaient prioritairement la
satisfaction des intérêts de la colonisation en fournissant des
auxiliaires de l'administration et des agents d'exploitation économique
à la métropole. Ce qui précède est « normal
» lorsque l'on sait depuis Georges Washington qu « aucune nation ne
doit être crue au-delà de ses intérêts ». «
Normal » également que l'enseignement dispensé à
cette époque, pragmatique en zone britannique et surtout
théorique en zone française, ne prenne nullement en compte les
problèmes et les besoins nationaux, et favorise davantage le
mimétisme poussé face aux valeurs occidentales, le
déracinement total et l'assimilation. « Normal » enfin que
l'enseignement technique ait été négligé par les
deux systèmes. Ces différentes conséquences vont, en
dépit de l'indépendance, peser lourdement sur le système
éducatif du nouvel État.
B. L'ÉDUCATION CAMEROUNAISE ENTRE
L'INDÉPENDANCE ET LE FORUM DE DAKAR
1. L'ÉDUCATION CAMEROUNAISE AU LENDEMAIN DE
L'INDÉPENDANCE.
Jean-François Bayart pour qui il ne fait l'ombre
d'aucun doute que l'État fait sens au Cameroun, avance
l'hypothèse selon laquelle « la pénétration du mode
de production capitaliste, la construction nationale acquièrent leur
signification première par rapport au devenir des systèmes
d'inégalité et de domination autochtones, et leurs enjeux sont
avant tout africains » (Bayart, 1985 :14). C'est dire pour l'auteur
de L'État au Cameroun que la colonisation n'a pas réussi
à effacer les systèmes d'inégalité et de domination
qui lui étaient antérieurs (idem). L'impact d'un tel
constat, dans la mesure où il est validé, au niveau de
l'éducation camerounaise à la période post-coloniale n'est
pas aisé à déterminer.
Ce qui reste certain après 1960, c'est le fait que
malgré une nette démultiplication des chiffres de
fréquentation du fait de l'éveil aux « bienfaits » de
l'école moderne des indigènes persuadés qu'ils allaient
enfin remplacer leurs anciens maîtres, la tendance élitiste du
système éducatif camerounais ne s'est pour autant pas
stoppée. Nous voulons prendre pour exemple le fait que l'entrée
au lycée, en plus d'être l'unique voie de sortie du primaire, soit
restée conditionnée par un concours dont la
sélectivité éliminait d'office bon nombre de candidats.
Une telle procédure, qui ne tenait compte ni de tout
enfant tel qu'il se présente, ni de son milieu et encore moins sur
l'orientation de chaque individu, mais qui beaucoup plus était
centrée sur ses aptitudes à continuer, était la cause du
très faible rendement interne, ainsi que de nombreuses
déperditions : pour 1000 enfants/élèves, 522 atteignent le
Cours Moyen deuxième année (CM2), 190 entre dans le secondaire,
52 la fin du cycle, 23 obtiennent le Baccalauréat et 11 seulement
entrent à l'université, dans l'enseignement francophone !
Il s'établissait alors une relation clientéliste
entre le système dans son ensemble et le lycée qui devenait son
principal pourvoyeur en emploi. Clientélisme incarné au sein de
l'appareil administratif du fait de l'émergence de la fonction publique
comme force sociale. Dans un tel environnement où le «
néo-patrimonialisme » se chargeait « de personnaliser les
relations politiques et de transformer les ressources politiques en ressources
économiques », la bureaucratie s'érigeait en
véritable « classe dominante » dans la mesure où elle
exploite pour son compte propre, et du fait de la tutelle exercée sur la
société (Médard, in Bayart, 1985 : 304). Dans un pareil
contexte également, le système éducatif ne pouvait qu'en
être touché, d'autant plus que les contenus des programmes sont
demeurés à faible teneur pratique et fort peu orientés
vers le secteur de production de l'économie : « il aura fallu
attendre l'avènement de la crise économique pour que le secteur
public, grand pourvoyeur d'emplois d'hier, cède progressivement la place
à l'entreprise privée de circonstance » (Etats
généraux de l'éducation, 1995 : 10).
Pourtant, l'EPT taraudait déjà l'esprit des
dirigeants africains de la « post-colonie » dans la mesure où
la tenue de la Conférence des Ministres de l'Éducation d'Afrique
à Addis- Abeba en 1961 institutionnalisait la scolarisation primaire
universelle (SPU). Cette conférence qui s'était achevée
sur la Déclaration de la politique de démocratisation de
l'enseignement primaire, devait dans les faits se traduire par la
multiplication des écoles et le recrutement massif d'enseignants.
Malheureusement, un certain nombre de facteurs internes (démographie
galopante, patrimonialisme, ingérence et manque de volonté
politique réelle) et externes (crise économique,
dévaluation, mondialisation) vont progressivement provoquer les
déficits énormes en ce qui concerne les ressources
éducationnelles : effectifs pléthorique, pratique des classes
à mi-temps, insuffisance du personnel enseignant etc.) En dépit
de quelques velléités de réformes somme toute
infructueuses, cette situation va s'aggraver du fait des programmes et
méthodes qui n'ont toujours pas suffisamment tenu compte des
réalités de la société camerounaise. D'où
l'environnement éducationnel camerounais présentera un tableau
assez sombre à la veille du forum de Dakar.
2) L'ÉTAT DE L'ÉDUCATION CAMEROUNAISE A LA
VEILLE DE « DAKAR ».
2-1. DE L'ACTIVITÉ PÉDAGODIQUE
L'enseignement secondaire régi par la loi
fédérale n° 63/13 du 19 juin 1963 portant organisation
de l'enseignement public secondaire et technique prévoyait un cycle
d'observation et un cycle moyen d'une durée globale de cinq ans et
sanctionné par un diplôme et un cycle terminal d'une durée
de deux ans également sanctionné par un diplôme de fin
d'études secondaires donnant accès à des études
supérieures. Or il y a lieu de noter la non application des dispositions
de cette loi dans la partie francophone qui a maintenu le système
hérité de la colonisation française42.
Théoriquement fixée à neuf mois, la
durée de l'année scolaire, dont le découpage des
périodes d'interruption de classes est hérité de la
colonisation, est de manière concrète limitée entre 24 et
27 semaines d'activités pédagogiques effectives.
De façon générale, surtout dans
l'enseignement secondaire, l'on note un assez important nombre de redoublement,
les renvois ou exclusions ne respectant pas toujours les dispositions
réglementaires en vigueur, d'où les déperditions
importantes observées. Situation aggravée par l'absence d'autres
perspectives offertes aux élèves exclus. Et même si les
conditions d'âge et de promotion, de redoublement et de renvoi, dans la
pratique, étaient plus souples dans les zones rurales et
sous-scolarisées, il reste qu'au cours des années 1990, « il
n'existe pas encore d'études claires ni d'amorce de solution »
véritables pour ces différents déficits.
En dépit de quelques tentatives de reformulation tout
au long de la période suivant son indépendance, les
autorités constatent dans la fin des années 1990 que les
programmes d'enseignement primaire et normal restent «
dépassés », que les programmes d'enseignement secondaire
général sont denses par rapport à l'année scolaire
en certains disciplines, la plupart n'étant pas définis en terme
de « volume horaire », enfin que « la philosophie
générale qui sous-tend les programmes n'est ni apparente ni
sensible ». Or un peu plus de deux décennies auparavant, un ancien
étudiant de l'IRIC parvenait déjà à la même
conclusion43. C'est croire que sa voix avait eu moins d'échos
que celle du fameux prophète criant dans le désert.
42 Remarque faite par les rédacteurs des
états généraux de l'éducation camerounaise en
1995
43 Raymond Epote, op.cit
S'agissant des méthodes d'enseignement, l'on note la
difficile péréquation entre les normes prescrites et
l'application concrète, compte tenu des mauvaises conditions de travail
associées aux effectifs pléthoriques. Y a-t-il enfin lieu de
déplorer l'absence d'évaluation des programmes, des
méthodes et des activités de l'éducation en
général, tandis que le matériel didactique continue
à présenter un tableau assez sombre44.
L'insuffisance des moyens matériels et logistiques dans
l'enseignement secondaire et technique constituait une entrave sérieuse
à l'action pédagogique, les conditions de travail ne permettant
très souvent pas une évaluation efficace des
élèves. Le fait est que le nombre de ces derniers croit
disproportionnellement à celui des enseignants qui, de façon
progressive ont vu leur situation se dégrader :
Dès 1988, l'enseignement primaire et maternel verra la
suspension du recrutement des auxiliaires et contractuels. L'effet direct de
cet arrêt des recrutements, conjugué à la suspension de la
formation des personnels depuis 1991, et le départ en retraite de 3680
enseignants pour la seule année de 1994, sont autant de causes ayant
provoqué la baisse des effectifs des personnels éducatifs du
niveau primaire. Et lorsqu'on ajoute à cela de nombreuses
disparités entre les villes et les zones rurales, le déficit dans
le système primaire des années 1990 tournait autours de 10 000
maîtres. Or techniquement, le ratio élèves/maîtres
est de 27 à la maternelle, 52 dans le primaire.
Le même ratio dans le secondaire général
est de 30, et il est de 16 dans le secondaire technique. Pourtant la
réalité sur le terrain présente un tableau plutôt
sombre, quand bien même les formations à l'École Normale
Supérieure (ENS) et à l'École Supérieure de
l'Enseignement Technique (ENSET) suivent leur cours. A titre d'exemple, les
besoins de l'enseignement technique pour 1994-1995 se chiffraient à
près de 600 professeurs. Ce déficit, il faut le
reconnaître, était également dû à la
suspension de la formation dans les ENIAETENIET.45
Enfin, du point de vue de la qualité, la formation
civique et morale, la formation à la démocratie, aux
idéaux de paix, de la tolérance et la formation artistique sont
autant de domaines importants de formation négligés. Bien plus,
les écoles de formation pour la maternelle sont quasi inexistantes, et
les recrutements dans l'enseignement secondaire général et
technique ne tiennent pas toujours compte des besoins du Ministère
utilisateur, surtout dans les filières scientifiques.
44 Le fait est que seul 28,6% de manuels
d'élèves francophones du cycle primaire sont publiés par
les camerounais. Le système anglophone présentera
néanmoins un tableau plutôt satisfaisant, soit 71% de manuels ici
sont le produit d'auteurs camerounais
45 Désignent les écoles de formation des
instituteurs.
Pour 3901 élèves au cours de l'année
scolaire 1993-1994, il existait un conseiller. Nous avons de bonnes raisons de
croire que cette situation n'a pas beaucoup évolué en l'an 2000.
Car en effet, l'on note toujours l'absence d'un statut et d'un plan de
carrière pour les cadres de planification et d'orientation. Aussi, la
persistance des structures d'orientations qualitativement et quantitativement
insuffisantes, l'absence de centres d'application et la mise à
l'écart des professionnels sont autant de faits qui font montre d'une
formation plus théorique que pratique. Qui plus est les principales
structures de recherches existantes, (IPAR de Yaoundé et de Buéa,
INE et les IGP), présentent un diagnostique très limité au
niveau de la diffusion et de la publication des résultats.
Il va sans dire qu'un tel état de choses influe
inexorablement sur le rendement externe et interne du système
éducatif camerounais. Ainsi l'on enregistre de nombreuses
déperditions, matérialisées par la démultiplication
de redoublements et d'abandons. Comme causes principales, nous pouvons
mentionner les obstacles linguistiques, l'inadaptation des méthodes et
programmes, l'inadéquation des infrastructures et équipements, et
les effectifs pléthoriques. Le rendement externe quant à lui est
obstrué du fait de l'inexistence d'aucune donnée permettant
d'appréhender l'accès des diplômes dans le circuit de
production économique.
2-2. BILAN DE LA GESTION DES RESSOURCES ADMINISTRATIVES
ET HUMAINES.
Le bilan du système éducatif camerounais des
années 1990 présente un excès de centralisation dans la
quasi-totalité des domaines, en particulier ceux relatifs à la
création et à l'extension des établissements, la gestion
du personnel et la gestion du temps scolaire. Dans les faits, cela se traduit
par une absence relative de délégation des pouvoirs et
attributions, l'amorce timide d'une décentralisation effective en ce qui
concerne certains examens à l'instar du CEPE, et une
velléité de déconcentration administrative non
accompagnée d'une déconcentration conséquente des pouvoirs
de décision, notamment au niveau des Délégations et
Inspections.
En ce qui concerne l'administration des services d'aides aux
élèves, l'on note l'inadéquation des services de
santé scolaires et une nette rareté du service des bourses. Dans
le même sillage, le service des activités post et
périscolaires est insuffisamment étoffé sur le plan
structurel et en personnel. Ce qui est assez curieux lorsque l'on sait qu'il
couvre une pluralité de domaines allant de l'assurance, la
co-opérative scolaire, le travail manuel et sport, aux Associations des
Parents d'Élèves (APE), colonies et camps de vacances, en passant
par la cantine et l'animation culturelle, pour ne citer que ceux-là.
C'est qu'en réalité, il existe une
forte immixtion des autorités administratives dans la
gestion de ces activités. C'est le cas des APE qui souffrent
jusqu'aujourd'hui d'un dysfonctionnement dû au non respect de la
réglementation en vigueur en matière d'association. Le travail
manuel quant à lui n'est ni suffisamment diversifié, ni
valorisé, ni orienté vers les activités de production.
L'administration des ressources scolaires fait état
d'une absence de code de déontologie des personnes éducatives
considérée aussi comme outil de l'administration. De fait, il
s'agit de : l'absence d'un statut suffisamment attrayant et départ
précoce en retraite ; l'absence de suivi médical des personnels
éducatifs atteints de maladies professionnelles graves ; mauvaise
politique de recrutement qui ne tient pas toujours compte des besoins du
Ministère de l'éducation ; absence de véritable liste
d'aptitude à certaines fonctions et de préparation des
responsables d'établissements ; excès de centralisation en
matière de gestion d'affectation, de mutation et de nomination.
La gestion des infrastructures et des équipements
scolaires par ailleurs fait montre d'un gisement de conflits de
compétence entre les services de construction relevant du
Ministère de l'éducation et implantés dans les
délégations provinciales et ceux relevant du MINUH, du
Ministère des Travaux Publics et de la Délégation
Générale des Grands Travaux. Autant de conflits qui
génèrent une panoplie de dysfonctionnements dont l'impact
négatif va bien au-delà de l'imagination profane. Aussi
pourrions-nous citer entre autres : les chevauchements et doubles emplois ; les
retards dans le montage des dossiers financiers ; l'abandon des chantiers et le
non respect des normes de construction des infrastructures et des
équipements du fait de l'absence et/ou l'insuffisance de contrôle
par les autorités compétentes pendant les constructions ; manque
d'aire de jeux dans beaucoup d'établissements et absence d'études
sur l'environnement préalable à l'implantation des
infrastructures ; intervention anarchique des partenaires de l'éducation
dans la réalisation des infrastructures et l'acquisition des
équipements.
La planification de l'éducation est l'application d'une
analyse systématique et rationnelle au processus de développement
de l'éducation. Son but est de mettre l'éducation à la
disposition des élèves et de la société. Or
jusqu'en 2000, les structures de planification au Cameroun sont restées
peu opérationnelles et ne participaient pas à l'aide à la
prise de décision dans les domaines de l'élaboration de la carte
scolaire, des coûts, financements et élaboration des projets
éducatifs, ainsi qu'au niveau des rendements internes et externes du
système. Ce faisant, les données statistiques sont restées
non actualisées à cause des difficultés d'ordre
logistique, humaines, matériel (traitement manuel des données
statistiques) et financier. L'on note également à cette
période les absences : d'une structure de formation
pour les cadres de la planification, de la carte scolaire, et des
études pilotes sur le coût et le financement de
l'éducation.
L'évaluation qui est la vérification du
degré de réalisation d'objectifs précis sur la base de
critères bien définis et connus, reste le « parent pauvre
» des politiques publiques camerounaises. Or en tant que phase finale du
contrôle d'apprentissage, l'évaluation reste l'indicateur de
l'état de santé du système éducatif. Dans la
même optique mais dans un tout autre plan, l'on pourrait aller
jusqu'à affirmer que son rôle est salutaire dans la gestion des
coûts et financements de l'éducation au Cameroun.
2-3. COÛTS ET FINANCEMENT DE L'ÉDUCATION AU
CAMEROUN.
Le secteur éducatif ayant progressivement perdu le
caractère prioritaire à lui jadis accordé. Et «
lorsqu'à cette baisse s'ajoute l'exécution partielle dudit budget
à cause des tensions de trésorerie, cette situation paralyse
pratiquement le fonctionnement du système éducatif »
camerounais. C'est ainsi que lors de l'année budgétaire
1992/1993, le taux d'exécution du budget de l'éducation
était de 60%. Alors que l'on pensait que les autorités
compétentes devaient tirer des leçons de cet état de
choses et prendre des mesures appropriées, il n'en fût rien. Car
l'année suivante, le budget voté à 83,70 Milliards de
francs CFA n'avait connu un taux de réalisation à l'ordre de 37%,
soit 83,70 milliard de francs CFA, seulement ! C'est croire que
l'intérêt de la société est sacrifié ici sur
l'autel des calculs individuels et individualistes. C'est croire
également que dans une atmosphère marquée par la
dévaluation de la monnaie et les Plan d'Ajustement Structurel ou PAS
(avec tout ce que cela comportait comme impact sur la société),
la situation des « cadets sociaux » est restée le « cadet
des soucis » d'un bon nombre d'élites camerounaises. Et l'on
s'interroge enfin sur la définition et la place réservée
à l'intérêt national ici.
Cette situation, c'est une lapalissade, oblige les familles
à contribuer de manière significative au fonctionnement de
l'enseignement public.
En outre, suivant certaines études menées sur
« la Déclaration de politique nationale du secteur de
l'éducation et de la formation au Cameroun », le budget de
l'État alloué à l'éducation formelle en 1991/1992
était de l'ordre de 106 milliards : l'enseignement maternel et primaire
qui compte 80% des effectifs du secteur public va recevoir 45% des ressources ;
l'enseignement post-primaire, secondaire général et technique
(18% des effectifs) recevra 25%, et l'enseignement supérieur avec ses 1%
des effectifs va s'en sortir avec 30% du budget de l'éducation (bourses
y compris). Cette mauvaise répartition du budget par niveau
d'enseignement constitue en soit un obstacle
considérable à l'atteinte de l'objectif de la scolarisation
primaire universelle, tel que projeté un an plus tôt à
Jomtien. Car comme on peut le remarquer, les dépenses de
l'éducation ici sont plus orientées vers l'enseignement
secondaire et supérieur. Pourtant, l'éducation de base devrait
préserver sa place de choix.
Tout en restant dans le financement mais dans un tout autre
angle, il est indiqué de noter la conception irréaliste du
budget, matérialisée par l'absence d'une politique de maintenance
des équipements et des infrastructures : il s'agit d'un
déséquilibre dans la structuration du budget de
l'éducation. Car en gardant les chiffres susmentionnés, l'on
relève également que 94% dudit budget était alloué
aux dépenses de personnel, tandis que 3% restait prévu pour la
maintenance, le remplacement du mobilier scolaire, l'achat du matériel
didactique, des livres et la formation du personnel enseignant. Tout ceci fait
montre de l'absence d'une politique confirmée de production de
matériels didactiques locaux. Le matériel importé quant
à lui étant généralement très
élevé en coût.
Un mot sur l'enseignement privé. Il est financé
en grande partie par les frais d'écolage payés par les parents
d'élèves et les subventions de l'État qui, en fixe les
taux sur proposition des fondateurs.46 Au cours des années
1990, l'on observe des accumulations d'impayées de la part de
l'État. Ce dernier en 1994 devait encore la totalité (4
milliards) de la subvention accordée pour l'année 1994, tandis
qu'il n'avait payé que 33% de celle de 1992/1993. De manière
globale, l'environnement du système éducationnel camerounais,
comme partout ailleurs au sud du Sahara, présente des dysfonctionnements
considérables à la veille du forum de Dakar ; d'où ce
dernier va susciter des réactions conséquentes.
PARAGRAPHE II : LA RÉACTION DES DIFFÉRENTS
ACTEURS AU LENDEMAIN DU FORUM : DES MESURES INSTITUTIONNELLES
CERTAINES.
Après le bilan mitigé de la Conférence de
Jomtien en 1990, le forum de Dakar renforcé par l'accord sur les OMD, a
fortement relancé la cause de la scolarisation dans le monde et
initié de réels changements au plan institutionnel. Ces
changements au niveau du Cameroun se situent tout d'abord dans la mise en place
d'un ensemble de mécanismes de promotion et de suivi des objectifs de
l'Éducation pour tous. Ils se trouvent ensuite dans l'insertion des
objectifs EPT dans un cadre de développement global du secteur
éducatif,
46 Confère loi N° 87/022 du 17/12/1 987,
fixant les règles relatives aux activités scolaires et de
formation privée au Cameroun
lequel est lui-même une composante d'une stratégie
nationale de croissance et de lutte contre la pauvreté.
A. UN ENGAGEMENT SIGNIFICATIF DES PROMOTEUR DE L'EPT...
1. A L'ÉCHELON INTERNATIONAL
Tirant les leçons de l' « échec de Jomtien
», le forum de Dakar a suscité une mobilisation internationale
considérable, ainsi qu'un engagement politique certain en faveur de la
scolarisation. Le cadre d'action de Dakar a ainsi instauré à
l'échelon international, des mécanismes de suivi de l'EPT aux
échelons politique avec le Groupe de haut niveau, technique avec le
Groupe de travail sur l'EPT, analytique avec le Rapport mondial de suivi dudit
processus, enfin avec la société civile dont le rôle de
plaidoyer, de vigilance et de sensibilisation, est sans
précédent. Si la Conférence de Jomtien n'a, à
proprement parler, pas permis une mobilisation des partenaires financiers
internationaux en faveur de l'éducation, il en va autrement du forum de
Dakar. L'engagement financier a pris ici des proportions considérables,
l'aide en faveur de l'éducation passant de 1,6 milliard de dollars en
2000, à 6,4 milliards de dollars en 2005. Qui plus est, la forte
mobilisation financière des acteurs internationaux semble mettre
l'Afrique au centre de ses priorités.
En effet, l'année 2000 est une césure quant
à l'engagement financier de la communauté international
vis-à-vis du tiers monde. « Après la morosité des
années 1990, l'aide publique au développement (APD) a connu une
forte expansion (+69% en 5 ans) passant de 63,3 à 107,3 milliards de
dollars entre 2000 et 2005. » (Dakar +7, 2008 :7)
Bénéficiaire principal de ces flux d'aide, l'Afrique
subsaharienne va en capter le tiers jusqu'en 2005. Ainsi de 3% en 2000, la part
du secteur de l'éducation bénéficiant de l'aide
internationale va passer à 8% en 2005.
Au niveau national, des mécanismes spécifiques
appelés `Forum nationaux» sont définis par le Cadre d'action
de Dakar, l'objectif étant de concevoir des plans nationaux EPT.
2. ENGAGEMENT RELAYÉ AU SEIN DES ÉTATS :
LE PLAN D'ACTION DU CAMEROUN POUR L'EPT.
Le Cadre d'action de Dakar a défini des mécanismes
spécifiques que sont les Forum nationaux, afin que chaque pays puisse
concevoir son plan national d'action d'éducation pour
tous. Le Cameroun sera l'un des premiers pays africains
à concevoir le Plan. En effet, dans son discours à l'occasion de
la célébration de la Semaine mondiale sur l'EPT au palais des
Congrès de Yaoundé le 21 avril 2008, Madame le Ministre de
l'éducation de base rappelait la série de mesures
institutionnelles et réglementaires prises par le Cameroun au lendemain
du forum de Dakar. Entre autres, il s'agit de :
- la gratuité de l'enseignement primaire public ;
- l'érection des zones sous scolarisées en zones
d'éducations prioritaires ;
- la distribution des kits scolaires aux jeunes
élèves fille ;
- la mise en place de cantines scolaires dans les zones
d'éducation prioritaires ;
- l'octroi des bourses de formation professionnelle et
d'apprentissage ;
- le recrutement massif d'enseignements au profit des
écoles primaires et maternelles ;
- l'ouverture de plus de 2000 centres d'alphabétisation
sur l'ensemble du territoire national et - l'alphabétisation de plus de
120 000 apprenants dans lesdits centres.
Toujours dans l'optique des OMD et du forum de Dakar, le
Cameroun à la suite du Décret N°2004/320 du 8
décembre 2004 portant organisation du gouvernement, va assigner des
tâches plus précises aux Départements ministériels
en charge des problèmes de l'éducation, l'objectif à
terme, ainsi que le rappelle HAMAN ADAMA « étant de d'assurer une
meilleure prise en compte des besoins spécifiques de chaque
catégorie d'apprenants ».
C'est ainsi que le volet formel va relever de la
responsabilité des Ministères de l'enseignement supérieur,
des enseignements secondaires et de l'éducation de base. Quant à
l'éducation non formelle et informelle, son avenir sera remis entre les
mains des Ministères de la jeunesse pour ce qui est du programme
national d'alphabétisation ; des Affaires Sociales pour une
intégration socio-économique des handicapés et enfants en
difficulté ; enfin de la Promotion de la Femme et de la Famille,
à travers l'encadrement de la famille et des centres de promotion de la
femme.
En effet, toutes les actions menées par ces
différents ministères coopèrent à la
réalisation, par le gouvernement de la république, des objectifs
de l'éducation pour tous. Aussi seront-elles repréciser dans le
cadre de la stratégie sectorielle de l'éducation au Cameroun.
3. LA STRATEGIE SECTORIELLE DE L'EDUCATION AU
CAMEROUN.
Il est intéressant de noter que le Cameroun figure parmi
les premiers pays africains à s'être doté d'un plan
d'action nationale éducation pour tous, et par la suite d'une
stratégie
sectorielle en éducation, ayant permis son
éligibilité à l'Initiative pour la mise en oeuvre
accélérée de l'EPT (FTI). Le gouvernement camerounais
à travers la stratégie globale du secteur définit ses
priorités dans le combat contre la sous-scolarisation,
l'analphabétisme et la pauvreté. Ainsi, élargir
l'accès et la rétention à l'éducation tout en
corrigeant les disparités, améliorer l'efficacité et la
qualité du service éducatif, développer un partenariat
efficace avec les différents membres du corps social, et
améliorer la gestion et la gouvernance du Système
Éducatif, en constituent les grands objectifs.
Dans cette perspective, l'Éducation en
général et l'Éducation de base en particulier est
considérée dans le DSRP comme un axe essentiel de
réduction de la pauvreté. Il n'est de ce fait pas très
surprenant qu'elle retienne l'attention du Gouvernement dans le Document de
Stratégie sectorielle de l'Éducation. De manière plus
concrète en juin 2006, les Partenaires Techniques et Financiers
validaient la stratégie sectorielle de l'éducation
proposée par l'État camerounais, stratégie née dans
un contexte national caractérisé par l'atteinte du point
d'achèvement de l'initiative PPTE. Parmi ses grandes options, figuraient
entre autres :
L'atteinte de l'universalisation du cycle primaire pour
réaliser en 2015 l'achèvement universel de six années de
scolarisation, une amélioration de la qualité des services
éducatifs offerts de manière à ne limiter l'accès
à l'enseignement privé qu'à ceux des parents qui le
souhaitent et en ont les possibilités financières. Et pour
réaliser ces objectifs, il est envisagé quatre objectifs majeurs
qui vont de la réduction significative de la fréquence des
redoublements (le taux moyen de redoublement passerait alors des 30% actuels
à 10% à l'horizon 2015), à l'augmentation significative
des ressources pour les intrants pédagogiques et l'amélioration
des différents aspects de la gestion et de la gouvernance du
système. Font également partis de ces objectifs, le recrutement
exclusif des enseignants qualifiés, sur la base d'une catégorie
statutaire (Instituteurs contractuels) et rémunérés de
façon raisonnable et pérenne par l'État ; et
l'amélioration du rapport élèves/enseignants pour le
porter graduellement de 59 pour 1 actuellement à 40 pour 1 en 2015.
La deuxième option est relative à l'extension de
la couverture du préscolaire (enseignement maternel), notamment par le
développement de l'expérience communautaire au
bénéfice des populations rurales, en particulier les plus
défavorisées.
Des formations qui, en qualité comme en qualité
dans l'enseignement supérieur et l'enseignement secondaire technique, en
référence aux réalités et besoins de la
scolarité camerounaise, constituent également une autre
option.
Ces efforts considérables du gouvernement camerounais,
ainsi que le rappelle le représentant de l'UNESCO, marquent son
adhésion à un certain nombre d'initiatives en
matière d'éducation, sont une expression
concrète du respect de ses engagements au niveau international, à
réaliser les objectifs de l'éducation pour tous au plus tard en
2015. Il reste tout de même que ce respect des engagements se
vérifie également à travers des données
observées sur le terrain. Et bien que nous ne soyons encore qu'à
mi-chemin de l'échéance « Dakar », il n'est pour autant
pas exclu que l'on dresse un bilan provisoire, afin de pouvoir anticiper sur
2015.
B. ... EN DÉPIT DES DIFFICULTÉS
FONCTIONNELLES NOTABLES
1. LES INSUFFISANCES FONCTIONNELLES
Le plan d'action du Cameroun en vue de mener à terme
les objectifs de Dakar, porte en soi des mesures intéressantes et
encourageantes. Il n'en demeure pas moins qu'il recèle quelques
imperfections pour l'essentiel fonctionnelles. C'est que « la
fonctionnarisation extrême des processus publiques, enferme la logique de
la décision commune dans ses considérations souvent
étriquées, puisque non enrichies par l'humus intellectuel, par la
sensibilité du corps social » (Mbassi, in Pondi, idem : 157)
Certes, le Décret portant création du MINBASE traduit, à
n'en point douter, une volonté réelle et sincère des
autorités publiques camerounaises, de renforcer leur efficacité
en vue de parvenir dans les délais prescrits, à la SPU. Or
très souvent, la création des nouveaux départements ne
fait qu'accentuer le phénomène de fonctionnarisation, sans
véritablement résoudre les problèmes de fond. Mieux,
« la création d'un ministère ne garantit nullement
l'effectivité d'une politique. La multiplication des postes
ministériels peut très bien servir à fixer une
clientèle politique » (Abéga, op.cit :53) La
fonctionnarisation au demeurant peut, à certain égards,
constituer un frein à l'ouverture aux autres acteurs et partenaires de
développement, à l'instar de la société civile et
autres acteurs privés. Or ces derniers pourraient en plus de l'aide
apportée, sensibiliser sur les dysfonctionnements observés sur le
terrain.
Ces imperfections, bien qu'observables au niveau des grands
centres urbains, sont encore plus criardes au sein des zones
périphériques. Sans prétendre à toute
exhaustivité, il convient d'en noter quelques unes :
La gratuité de l'enseignement primaire publique reste
un mythe dans plusieurs établissements scolaires, si ce n'est la
très grande majorité. En effet, la marge de manoeuvre des chefs
d'établissements est si élevée qu'il existe toujours des
voies de contournements. C'est que le Décret portant suppression des
frais d'écolage est vecteur d' « effets pervers » à
l'instar du renchérissement des places au sein des
établissements, qui désormais font l'objet de toute une cotation
« à la bourse ». Alors que la Loi préconise le slogan
selon lequel «entre à l'école publique qui veut », la
réalité en a substitué un autre : « n'y rentre que
celui qui peut ». Qui plus est, une fois la place acquise, les parents ne
sont guère à l'abris des « arnaques quotidiennes » et
même instituées comme le paiement des taux forfaitaires chaque
années dans des zones reculées. Ces dernières restent
toujours les parents pauvres du mouvement en faveur de l'EPT. Plusieurs
dirigeants des zones reculées ne sont pas au courant des
résolutions prises au niveau de Yaoundé, et très souvent
ignorent l'existence d'une mobilisation internationale en faveur de la SPU. Pis
encore, ces zones ne sont guère concernées par des
réformes administratives relatives à leur secteur
d'activité47. Toutes ces observations sont porteuses d'effets
d'entraînements.
En plus de la non effectivité de la gratuité de
l'enseignement primaire publique, nous remarquons également la faible
mobilisation des actions en faveur de la mise en place de cantines scolaires
dans les zones prioritaires, idem pour les kits scolaires chez les
jeunes filles. Par ailleurs, le recrutement massif d'enseignants s'effectue
sans véritables mesures d'accompagnement, surtout sans
considération réelle des difficultés quotidiennes dont ils
sont confrontés, aussi bien dans leur statut que dans le cadre de leur
fonction. A noter également la prépondérance de ceux-ci
dans des agglomérations pendant que dans les zones rurales, il existe
une moyenne de trois enseignants par établissement. Last but not
least, il est regrettable que les inspecteurs dans leurs différents
déplacements, « évitent » des endroits enclavés
pour ne s'arrêter qu'au niveau des zones urbaines et bitumées.
De ce qui précède, l'on remarque que le plan
d'action proposé par les autorités camerounaises, pour pertinent
qu'il soit, est confronté à deux principales difficultés
liées à l'excès de fonctionnarisation et à la
méconnaissance de la société profonde. D'où il
préfigure en cela des difficultés d'opérationnalisation.
Ces difficultés qui constituent un obstacle à l'atteinte des six
objectifs de Dakar, sont analogues aux imperfections décelées
dans la stratégie sectorielle.
2. LES LIMITES PROPRES À LA STRATEGIE
SECTORIELLE
47 Nous prendrions pour exemple le fait qu'il
existe encore des plaques où l'on voit inscrit MINEDUC, plutôt que
MINBASE, dans ces zones, quand elles ne sont pas quasiment absentes. Ce qui est
assez fréquent au sein des zones rurales enclavées comme ces deux
écoles publiques d' `Élone' et de `Kouma', deux villages
situés au Sud du pays, et que nous avons observé au cours d'un
déplacement.
La principale limite que l'on pourrait décelée
dans la stratégie sectorielle dans sa définition des
priorités dans le combat contre la sous-scolarisation,
l'analphabétisme et la pauvreté, est qu'elle reste muette sur la
manière dont ces actions seront concrètement traduites sur le
terrain. Car le territoire camerounais est si diversifiés que chaque
région a ses spécificités, ses difficultés propres,
et requiert de ce fait une approche originale et conséquente. Pis
encore, elle n'informe pas sur la manière dont les actions atteindront
les zones les plus reculées. Or ceci entraîne une autre
difficulté : celle du développement d'un partenariat efficace
avec les autres membres efficace du corps social. Ceci importe dans la mesure
où ces indications permettraient à la société
civile et autres partenaires privés de mieux apporter leur contribution.
C'est toute la problématique de la difficile péréquation
entre l'action de l'État et celle de la société civile qui
est posées ici. Enfin l'injonction faite aux chefs des
établissements en vue de réduire la fréquence des
redoublements pourrait entraîner des « effets pervers » qui
renforceraient l'écart entre le niveau réel des
élèves et les résultats proposés par les rapports
officiels.
L'approche sectorielle, parce qu'enracinée dans la
logique de la planification du développement, tend
généralement à rendre les institutions de la
coopération insensibles à un enrichissement de leur connaissance.
A cet égard, il est à craindre que la création d'un
nouveau département ministériel en vue de la promotion de la SPU,
puisse reproduire les mêmes lacunes que celles observées chez son
prédécesseur, lacunes qui au demeurant restent transposables et
observables au sein des institutions de même type. L'on observe
généralement que ces institutions en charge de promouvoir la
coopération et partant, le développement, en plus de l'absence
d'un cadre de concertation permanent et cohérent entre elles,
développent une carence commune qui se renforce au fil du temps : une
faible inclination, si ce n'est un refus délibéré,
à écouter les bénéficiaires du développement
; d'où cette insensibilité criarde à se confronter sans
idées préconçues avec les réalités à
transformer ; d'où également la persistance du hiatus existant
entre les programmes et les aspirations profondes des populations. Et si l'on
ajoute à cela, le fait que la plupart de ces institutions responsable de
la coopération au développement du tiers monde se sont toujours
montrées peu enclines à réajuster le tire après les
échecs du passé (Tommasoli, op.cit : 212), il est à
craindre que Jomtien et Dakar en fin de compte, ne deviennent comme
tweedeldum and tweedeldee48.
En effet, pour cet avisé des programmes de
développement en Afrique, la conception bureaucratisée de
l'activité de la programmation renforce les effets négatifs de
trois
48 C'est-à-dire comme bonnet blanc/blanc
bonnet
principaux défauts que sont une mauvaise analyse, une
gestion inefficace et l'absence de possibilité de dialogue. C'est
pourquoi la « classification des projets/programmes, qui, au premier
abord, peut sembler évidente, est toujours arbitraire, car elle
néglige la nature non sectorielle de la réalité au sein de
laquelle elle se propose d'intervenir. Et pourtant, la constitution des
cloisons étanches entre les différents secteurs est
désormais une tradition consolidée aussi bien au sein de la
coopération internationale que dans les administrations des pays en
développement ». (Idem : 213) Aussi, notre auteur de par
l'expérience acquise ajoutera que « si les structures
organisationnelles privilégient l'approche sectorielle de l'analyse des
problèmes, on risque plus facilement de proposer des solutions
pré-constituées que d'étudier, avant d'identifier les
solutions possibles d'intervention, la nature des problèmes et des
processus de changement en cours. (ibidem)
Toutefois, ces barrières pourraient être
dépassées si l'on concevait l'action de développement
comme un mécanisme d'apprentissage enchâssé dans un
ensemble de processus décisionnels effectués par les
différents acteurs sociaux engagés dans le déploiement
d'un dispositif de développement. Dans cette perspective, il est
essentiel de mettre en oeuvre, dans le cycle de projet, des processus de
rétroaction qui permettent de rendre opérationnelle
l'expérience acquise (op.cit : 214). Décider, ce n'est pas
seulement choisir une possibilité mais cela inclut aussi la recherche
d'informations et la capacité de corriger, sur la base de ces
informations, les choix adoptés (idem : 217-218)
En tout état de cause, l'éducation camerounaise,
sur divers échelons, a indéniablement connu un `nouveau
souffle» avec le forum de Dakar. Au plan institutionnel d'abord, puisque
la mobilisation de l'État et des bailleurs de fonds a apporté des
changements manifestes dans la prise en charge commun de l'agenda relatif
à l'éducation. Au plan des réalisations ensuite, dans la
mesure où, comme nous allons le voir, de réels progrès
relatifs à la réalisation des objectifs fixés ont
été enregistrés. Il convient cependant de relever que le
développement du système éducatif le confronte à de
nouveaux défis plus complexes et spécifiques.
SECTION II : ÉVALUATION DU PROCESSUS D'EPT AU
CAMEROUN : UNE DIFFICILE OPÉRATIONNALISATION
Considérée en général comme
l'état quantitatif des populations humaines ou animales et de leurs
variations, la démographie de manière plus stricte désigne
l'étude statistique des collectivités humaines. Aussi s'agit-il
pour nous ici de comparer la population en âge scolaire, avec celle
effectivement satisfaite par le système scolaire au niveau du
préscolaire et du
primaire, à la lumière des statistiques
démographiques et scolaires disponibles. A l'instar des rapporteurs
d'analyse des données de la carte scolaire camerounaise portant pour
l'année 2006/2007, la principale source de données
démographiques utilisées dans ce rapport sera constituée
des estimations de la Banque mondiale/Nations Unies (UNFPA) effectuées
dans le cadre de l'analyse-pays RESEN (2002) et celle fournie par le Bureau
Central des Recherches et Études sur la Population (BUCREP) du Cameroun.
Ceci dit, il est tout de même à regretter que le dernier
recensement publié en 2005 n'ait pas encore publié ses
résultats !
PARAGRAPHE I : CONTOURS ET REALITES DE L'OFFRE ET DE LA
DEMANDE SCOLAIRE DANS L'EDUCATION DE BASE : BILAN DE LA
SPU49
Dans la perspective des promoteurs du système
éducatif camerounais, l'enseignement primaire sans aucun doute fait
l'objet des attentions particulières des pouvoirs publics. Car en effet,
il correspond à l'éducation de base formelle, c'est-à-dire
au minimum de formation dont le citoyen a besoin au sens de la
Déclaration Mondiale sur l'Éducation Pour Tous de Jomtien pour
répondre à ses besoins essentiels.
A. DE LA DEMANDE EN ÉDUCATION DANS LE PRIMAIRE
1. ÉVOLUTION DES EFFECTIFS
SCOLARISÉS
Tableau 1 : Évolution de la population
âgée de 6-11 ans et des effectifs scolarisés par sexe et
par arrondissement dans le primaire de 2005/2006 à
2006/2007.
Provinces
|
Population des enfants âgées de 4/5ans
|
Effectifs scolarisés (*)
|
2005
|
2006
|
2005/2006
|
2006/2007
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Adamaoua
|
69881
|
70695
|
140576
|
76535
|
70903
|
147438
|
80369
|
59220
|
139589
|
85035
|
62974
|
148009
|
Centre
|
237468
|
231395
|
468863
|
280967
|
256722
|
537689
|
263845
|
254259
|
518104
|
279190
|
267251
|
546441
|
Est
|
74863
|
71961
|
146824
|
79859
|
73733
|
153592
|
78914
|
67956
|
146870
|
86849
|
74069
|
160918
|
ExtremeNord
|
264689
|
262113
|
526802
|
270251
|
254796
|
525047
|
288584
|
184296
|
472880
|
302990
|
198366
|
501356
|
Littoral
|
191817
|
192231
|
384048
|
234670
|
210999
|
445669
|
153071
|
148451
|
301522
|
160871
|
155429
|
316300
|
Nord
|
121164
|
115074
|
236238
|
147056
|
138502
|
285558
|
155644
|
96403
|
252047
|
172083
|
109776
|
281859
|
Nord-Ouest
|
177003
|
174261
|
351264
|
149213
|
148884
|
298097
|
185170
|
171290
|
356460
|
189164
|
174766
|
363930
|
Ouest
|
188640
|
191705
|
380345
|
157643
|
166696
|
324339
|
232199
|
217412
|
449611
|
236972
|
221111
|
458083
|
Sud
|
54665
|
51450
|
106115
|
56427
|
51120
|
107547
|
54840
|
50455
|
105295
|
59225
|
54705
|
113930
|
Sud-Ouest
|
117243
|
120663
|
237906
|
126511
|
113252
|
239763
|
109949
|
106808
|
216757
|
116354
|
113177
|
229531
|
49 Ce travail s'effectuera à partir des
données de la carte scolaire de 2007.
Total 1497433 1481548 2978981 1579132 1485607 3064739 1602585
1356550 2959135 1688733 1431624 3120357
Source: Cellule de la
planification-DPPC-MINEDUB/Recensement scolaire 2006-200(*) Données
issues du recensement scolaire 2006
Le tableau ci-dessus présente l'évolution sur
les deux dernières années tant des effectifs scolarisés
que de la population scolarisable. Il révèle à cet effet
un accroissement de près de 4% de la demande potentielle
d'éducation au niveau du primaire en 2006/2007 par rapport à
2005/2006, soit environ 3 064 739 enfants contre 2 948 982. La population des
filles qui représentant 4 8,5% de cette demande potentielle
connaît une quasi-stagnation par rapport à l'année
2005/2006, où elle représentait 45,84%.
Tableau 2 : Répartition des effectifs
scolarisés par province et par ordre d'enseignement dans le primaire en
2006/2007
Provinces
|
Public
|
Privé
|
Communautaire
|
Garçons
|
Filles
|
Ensemble
|
Garçons
|
Filles
|
Ensemble
|
Garçons
|
Filles
|
Ensemble
|
Adamaoua
|
76181
|
55327
|
131508
|
5813
|
5500
|
11313
|
3041
|
2147
|
5188
|
Centre
|
206120
|
195426
|
401546
|
71818
|
70813
|
142631
|
1252
|
1012
|
2264
|
Est
|
76917
|
65394
|
142311
|
7816
|
7025
|
14841
|
2116
|
1650
|
3766
|
Extreme-Nord
|
275995
|
181025
|
457020
|
14998
|
10810
|
25808
|
11997
|
6531
|
18528
|
Littoral
|
77808
|
74443
|
152251
|
82935
|
80847
|
163782
|
128
|
139
|
267
|
Nord
|
160169
|
101272
|
261441
|
7144
|
5605
|
12749
|
4770
|
2899
|
7669
|
Nord-Ouest
|
129929
|
118257
|
248186
|
57499
|
54939
|
112438
|
1736
|
1570
|
3306
|
Ouest
|
190020
|
178058
|
368078
|
45066
|
41405
|
86471
|
1886
|
1648
|
3534
|
Sud
|
53221
|
49045
|
102266
|
5989
|
5645
|
11634
|
15
|
15
|
30
|
Sud-Ouest
|
84223
|
81190
|
165413
|
31669
|
31570
|
63239
|
462
|
417
|
879
|
Total
|
1330583
|
1099437
|
2430020
|
330747
|
314159
|
644906
|
27403
|
18028
|
45431
|
Source:Cellule de la planification-DPPC-MINEDUB/ Recensement
scolaire 2006-2007
Le public du secteur primaire, en hausse de près de 10%
par rapport à 2004 représente près de 4/5 des effectifs
scolarisés. Or, la part du privé est en retrait de 21% contre 24%
en 2005/2006. Le communautaire qui environne le 1% de la population
scolarisée au niveau du primaire prend également de l'ampleur en
2007 avec un total de 45 431 inscrits. De l'avis des analystes de la carte
scolaire 2006/2007, ces chiffres témoignent de la volonté des
pouvoirs publics d'universaliser l'enseignement primaire, volonté
traduite en des actions concrètes à l'instar de la suppression
des frais d'écolage en 2000 et la distribution gratuite des manuels
essentiels de base dans le public ( ?)
Par ailleurs en ce qui concerne la répartition des
effectifs scolarisés par sous-système d'enseignement en
2006/2007, l'enseignement francophone encadre près de 80% des effectifs
scolarisés du primaire, le sous-système anglophone ayant quant
à lui connu une baisse substantielle passant de 645 015 en 2003/2004,
à 615 924 en 2006/2007, soit une diminution de 4,5%.
2. DE LA COUVERTURE
L'évaluation de la couverture, qui désigne
l'ampleur relative de la scolarisation dans le primaire, fait recourir
généralement au calcul des taux brut de scolarisation (TBS), taux
net de scolarisation (TNS) et taux brut d'admission (TBA).
Tableau 3 : Les principaux indicateurs de
couverture au niveau primaire en 2006/2007
Provinces
|
Taux bruts de scolarisation
|
Taux nets de scolarisation
|
Taux d'admission
|
2003/2004
|
Indice de
parité F/G
|
2006/2007
|
Indice de
parité F/G
|
2006/2007
|
Indice de
parité F/G
|
2006/2007
|
Indice de
parité F/G
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Adamaoua
|
113,83
|
80,87
|
97,35
|
0,71
|
111,11
|
88,82
|
100,39
|
0,8
|
83,46
|
68,93
|
76,47
|
0,83
|
116,92
|
95,86
|
106,67
|
0,82
|
Centre
|
114,48
|
112,24
|
113,36
|
0,98
|
112,59
|
117,88
|
115,12
|
1,05
|
87,33
|
92,15
|
89,63
|
1,06
|
105,02
|
107,87
|
106,4
|
1,03
|
Est
|
109,62
|
97,58
|
103,6
|
0,89
|
108,75
|
100,46
|
104,77
|
0,92
|
81,74
|
77,46
|
79,68
|
0,95
|
109,33
|
105,16
|
107,3
|
0,96
|
ExtremeNord
|
113,06
|
70,75
|
91,905
|
0,63
|
112,11
|
77,85
|
95,49
|
0,69
|
91,36
|
65,11
|
78,62
|
0,71
|
109,05
|
79,87
|
94,72
|
0,73
|
Littoral
|
93,37
|
89,18
|
91,275
|
0,96
|
78,6
|
85,87
|
82,01
|
1,07
|
61,64
|
67,86
|
64,56
|
1,08
|
70,26
|
74,61
|
72,32
|
1,04
|
Nord
|
117,28
|
74,94
|
96,11
|
0,64
|
117,02
|
79,26
|
98,7
|
0,68
|
80,53
|
66,23
|
73,59
|
0,82
|
104,26
|
80,01
|
92,36
|
0,77
|
Nord- Ouest
|
96,27
|
90,54
|
93,405
|
0,94
|
105,55
|
97,9
|
101,63
|
0,93
|
79,61
|
74,64
|
77,13
|
0,94
|
71,84
|
65,88
|
68,84
|
0,91
|
Ouest
|
129,65
|
119,26
|
124,46
|
0,92
|
124,3
|
112,41
|
118,26
|
0,88
|
80,17
|
79,51
|
80,41
|
0,98
|
86,05
|
77,4
|
81,65
|
0,9
|
Sud
|
105,49
|
105,35
|
105,42
|
1
|
104,96
|
107,01
|
105,94
|
1,02
|
80,17
|
83,51
|
81,76
|
1,04
|
96,47
|
98,72
|
97,55
|
1,02
|
Sud-Ouest
|
85,17
|
79,22
|
82,195
|
0,93
|
91,97
|
99,93
|
95,73
|
1,09
|
75,22
|
81,87
|
78,36
|
1,09
|
79,16
|
85,45
|
82,16
|
1,08
|
Total
|
108,14
|
92,05
|
100,1
|
0,85
|
106,94
|
96,37
|
101,81
|
0,9
|
80,76
|
75,44
|
78,18
|
0,93
|
93,25
|
84,09
|
88,76
|
0,9
|
Le TBS supérieur à 100 confirmerait la
volonté de la SPU en 2015 de la part du gouvernement. Mais le
phénomène des redoublements qui tend à grossir
automatiquement les effectifs scolarisés, révèle les
imperfections des études qui s'arrêtent sur ce taux. Fort
heureusement le TNS permet de contourner de telles lacunes dans la mesure
où l'âge effectif des inscrits pour la classe donnée est
pris en compte ici. Aussi pour l'année 2006/2007, le TNS se situe
à 78% signifiant de manière concrète que 21,8% des enfants
scolarisables ne le sont guère. C'est dire que du chemin reste encore
à parcourir pour l'atteinte des objectifs de Dakar relatifs à la
SPU.
Globalement, le phénomène de scolarisation dans
l'enseignement primaire camerounais connaît une disparité
régionale assez criarde, qui elle-même met en exergue celle
existant entre zones urbaines et rurales. En effet, les provinces
septentrionales enregistrent à elles seules 40% environ des effectifs
scolarisés en zone rurale. A noter aussi le cas spécifique du
Littoral qui connaît la baisse la plus substantielle pour se retrouver en
dernière position en termes de scolarisation et d'accès.
B. RENDEMENT DU SYSTEME ÉDUCATIF CAMEROUNAIS.
1. EFFICACITE INTERNE DU SYSTEME
L'efficacité se réfère à
l'accomplissement de la mission de formation pour le système
éducatif. Aussi s'entend t-elle généralement comme la
relation optimale entre les moyens (intrants/input) et les objectifs
fixés (extrants/output). Au Cameroun, le taux de redoublement de
l'enseignement primaire a toujours été très
élevé.
Tableau 4 : Taux moyen de redoublement par
sous-système et par classe dans le primaire en 2006/2007.
|
Sil/class 1
|
CP/class 2
|
CE1/class3
|
CE2/class4
|
CM1/class5
|
CM2/class6
|
Total
|
Sous-système Francophone
|
33,10%
|
22,20%
|
27,60%
|
22,00%
|
24,70%
|
24,30%
|
26,40%
|
sous-système Anglophone
|
21,60%
|
18,00%
|
18,10%
|
20,20%
|
27,20%
|
14,20%
|
19,40%
|
Le constat participe du truisme. Le sous-système
francophone (dont le taux de redoublement s'est stabilisé autour de 25%
depuis deux décennies) connaît des taux de redoublement
très élevés par rapport au sous-système
anglophone.
Dans la même optique, mais dans un tout autre angle,
l'on observe que les élèves-filles en dépit d'une
légère discrimination dans l'accès à la
scolarisation primaire, enregistrent de bien meilleurs résultats que
leurs collègues garçons, ce qui devrait militer pour une plus
grande scolarisation des filles sur l'étendu du territoire national.
Si l'on reste dans le cadre de la comparaison des deux
sous-systèmes, l'on observe qu'il existe une déperdition
importante dans le sous-système francophone. Car sur 100
élèves débutant le cycle ici, seuls 78 demeureront dans le
système jusqu'à la fin du cycle contre près de 87 s'ils
avaient été inscrits dans le sous-système anglophone. Or
l'objectif de SPU nécessite un achèvement du cycle primaire
complet, seule garantie d'une alphabétisation durable. C'est donc dire
que le taux d'achèvement représente l'un des indicateurs cruciaux
pour le suivi de la réalisation de l'EPT au Cameroun. Pourtant, cet
indicateur laisse encore transparaître un profil nettement meilleur pour
le sous-système anglophone :
Tableau 5 : Taux d'achèvement par province
et par sexe en 2006/2007.
Provinces
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Indice de
parité
|
Adamaoua
|
73
|
46,91
|
59,88
|
0,64
|
Centre
|
84,34
|
86,21
|
85,27
|
1,02
|
Est
|
64,25
|
50,2
|
57,36
|
0,78
|
Extreme-Nord
|
58,08
|
26,7
|
42,47
|
0,46
|
Littoral
|
76,48
|
77,44
|
76,96
|
1,01
|
Nord
|
76,32
|
34,71
|
56,05
|
0,45
|
Nord-Ouest
|
114,65
|
114,06
|
114,36
|
0,99
|
Ouest
|
85,6
|
84,29
|
84,94
|
0,98
|
Sud
|
71,88
|
68,99
|
70,48
|
0,96
|
Sud-Ouest
|
97,55
|
90,27
|
93,86
|
0,93
|
Ensemble
|
80,83
|
69,68
|
75,28
|
0,86
|
Source: Cellule de la planification-DPPC-MINEDUB/ Recensement
scolaire 2006-2007
La consommation d'années de scolarisation qui se
révèlent improductives du fait des abandons et des redoublements
constitue une perte de ressources par rapport à une situation
idéale où il n'y aurait ni abandons, ni redoublements. Car la
persistance du gaspillage de ressources dans le système francophone, du
fait des redoublements et abandons, a un coût certain pour le
système éducatif camerounais. Il en va également du taux
de réussite aux différents examens nationaux.
2. LES RESULTATS AUX EXAMENS NATIONAUX.
L'évaluation des résultats au concours
d'entrée en 6ème et Common Entrance, ainsi
qu'au CEP et FSLC selon le sous-système, donne une idée du
rendement interne du système en ce sens qu'on y évalue les
sortants.
Tableau 6 : Evolution des résultats au
CEP/FSLC de 2005 à 2006 par sexe et par province.
Provinces
|
Taux de réussite session de 2005
|
Taux de réussite session de 2006
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Adamaoua
|
80,50%
|
77,80%
|
79,50%
|
76,20%
|
73,00%
|
75,00%
|
Centre
|
84,00%
|
83,70%
|
83,80%
|
76,30%
|
74,40%
|
75,40%
|
Extrème-Nord
|
74,50%
|
72,20%
|
73,50%
|
75,80%
|
72%
|
74,20%
|
Est
|
75,20%
|
65,90%
|
72,60%
|
74,10%
|
66,70%
|
71,90%
|
Littoral
|
85,40%
|
84,60%
|
85%
|
74,10%
|
74%
|
74,10%
|
Nord
|
76,80%
|
71,80%
|
75,30%
|
68,90%
|
62,90%
|
67,10%
|
Nord-Ouest
|
84,20%
|
84,80%
|
84,50%
|
71,80%
|
74,50%
|
73,20%
|
Ouest
|
77,60%
|
76,90%
|
77,30%
|
67,50%
|
67,50%
|
67,50%
|
Sud
|
88%
|
87,60%
|
87,80%
|
78,40%
|
79,20%
|
78,80%
|
Sud-Ouest
|
84,50%
|
86,10%
|
85,30%
|
81%
|
81,40%
|
81,20%
|
Ensemble
|
81,40%
|
81,10%
|
81,30%
|
73,60%
|
72,90%
|
73,30%
|
Source: Cellule de la planification-DPPC-MINEDUB/
Recensement scolaire 2006-2007
Le taux de réussite au CEP/FSLC à la session de
Juin 2006 se situe au niveau national à 73,3% contre 8 1,3% en 2005,
soit une baisse de 8 points. Ce qui n'est pas un bon signe dans un
environnement marqué par la course à la SPU. D'autant plus que
les résultats pareils sont également observés au niveau
des concours dans la même période.
Tableau 7 : Evolution des résultats au
Concours d'entrée en 6ème/Common entrance de 2005
à 2006 par sexe et par province
Provinces
|
Taux de réussite session de 2005
|
Taux de réussite session de 2006
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Adamaoua
|
62,80%
|
58,20%
|
61,10%
|
61,10%
|
55,40%
|
59,00%
|
Centre
|
68,30%
|
66,40%
|
67,40%
|
66,00%
|
62,30%
|
64,20%
|
Extreme-Nord
|
56,80%
|
53,90%
|
55,50%
|
62,50%
|
58%
|
60,50%
|
Est
|
52,90%
|
44,30%
|
50,70%
|
50,20%
|
42,20%
|
48,30%
|
Littoral
|
56,00%
|
53,70%
|
55%
|
56,60%
|
56%
|
56,40%
|
Nord
|
47,00%
|
42,20%
|
45,60%
|
48,80%
|
41,40%
|
46,80%
|
Nord-Ouest
|
79,90%
|
80,30%
|
80,10%
|
65,80%
|
66,30%
|
66,00%
|
Ouest
|
58,30%
|
56,70%
|
57,50%
|
57,80%
|
55,20%
|
56,50%
|
Sud
|
76%
|
77,70%
|
76,90%
|
72,30%
|
68,70%
|
70,60%
|
Sud-Ouest
|
78,60%
|
77,00%
|
77,80%
|
77%
|
73,20%
|
75,00%
|
Ensemble
|
62,10%
|
61,80%
|
61,90%
|
59,80%
|
58,80%
|
59,40%
|
Source: Cellule de la planification-DPPC-MINEDUB/
Recensement scolaire 2006-2007
C. EXAMEN DE L'OFFRE D'EDUCATION DANS LE PRIMAIRE.
1. LES ENSEIGNANTS
78 827 instituteurs ont la charge d'encadrer 3 120 375
élèves inscrits sur l'ensemble du territoire national en
2006/2007. Parmi ceux, 42,2% sont des femmes, 69,6% relèvent du public,
28,9% du privé et 1,5% sont de l'ordre d'enseignement communautaire.
Tableau 8 : Répartition des enseignants
dans des écoles primaires par sexe et par province en
2006/2007.
Provinces
|
2006/2007
|
Hommes
|
Femmes
|
Total
|
Adamaoua
|
1758
|
677
|
2435
|
Centre
|
7534
|
9095
|
16629
|
Est
|
2144
|
1211
|
3355
|
Extreme-Nord
|
6469
|
670
|
7139
|
Littoral
|
4717
|
4697
|
9414
|
Nord
|
3709
|
638
|
4347
|
Nord-Ouest
|
4962
|
4402
|
9364
|
Ouest
|
5604
|
4442
|
10046
|
Sud
|
2469
|
1763
|
4232
|
Sud-Ouest
|
2709
|
3157
|
5866
|
Total
|
42075
|
30752
|
72827
|
Source: Cellule de la planification-DPPC-MINEDUB/
Recensement scolaire 2006-2007
Les provinces les plus dotées sont le Centre avec
22,83% du total des enseignants, l'Ouest (13,8%), le Littoral et le Nord-Ouest
qui enregistrent respectivement 12,93% et 12,86%. C'est dire par rapport
à 2003/2004 que les provinces du Nord-Ouest (+1,61), du Nord (+1,2) et
du Centre (1,1), ont vu leur proportion d'enseignants augmenter. A contrario,
les provinces du Littoral et de l'Ouest voient leur part baisser
substantiellement de (-2,1 points) et (-1,03 point) respectivement (71).
Tableau 9 : Ratio élève/enseignant
au primaire par province en 2005/2006.
Provinces
|
Ratio
élèves/maître des
écoles publiques
|
Ratio élèves/
maîtres des
écoles privées
|
Ratio élèves/
maître
|
Adamaoua
|
67
|
35
|
61
|
Centre
|
37
|
26
|
33
|
Extreme-Nord
|
49
|
43
|
48
|
Est
|
74
|
45
|
70
|
Littoral
|
39
|
30
|
34
|
Nord
|
68
|
41
|
65
|
Nord-Ouest
|
45
|
30
|
39
|
Ouest
|
48
|
39
|
46
|
Sud
|
27
|
32
|
27
|
Sud-Ouest
|
44
|
31
|
39
|
Total
|
48
|
31
|
43
|
Source : Cellule de la planification-DPPC-MINEDUB/
Recensement scolaire 2006-2007
Le ratio moyen général qui est de 43
élèves pour un enseignant au niveau de l'encadrement, s'est
nettement améliorer par rapport à 2003/2004 où il
était de 52,6 élèves pour un enseignant. Nonobstant ces
chiffres qui méritent des encouragements, il est tout de même
indiqué de noter que ce ratio qui dans le public est de 48/1, demeure
encore loin de l'objectif proposé par le cadre indicatif Fast Track
(40/1) nécessaire à une meilleure transmission des
connaissances.
Autre contraste : alors que le Sud du pays enregistre des taux
d'encadrement en deçà de la moyenne nationale dans le public, les
provinces septentrionales ont des ratios élèves/maître
proche de 70 ; d'où une qualité médiocre des
apprentissages.
Par ailleurs les cas des structures scolaires privées
et communautaires qui comptent respectivement 2/5 et 1/10 enseignants disposant
d'une véritable qualification pour enseigner, peuvent avoir des effets
néfastes sur la qualité de l'enseignement. Fort heureusement dans
le
public, la majorité des enseignants ont reçu une
formation initiale, soit 87,5% (77% en 2003/2004).
2. Infrastructures d'accueil.
La cellule de planification du MINEDUB dénombre en
2006/2007 un total de 12 505 établissements scolaires contre 10 913 en
2003/2004, soit une hausse de 14,6%. Le public vient en tête avec 9000
établissement, suivi du privé (3026) et enfin le communautaire
(479). Les provinces les plus dotées sont le Centre (2297),
l'Extrême-Nord (1675), l'Ouest (1636) et le Nord-Ouest avec ses 1620
établissements scolaires. La particularité du Littoral est qu'il
comporte plus d'établissements privés (644) que publics (632).
Le régime de mi-temps qui vient pallier à
l'insuffisance d'infrastructures scolaires, fonctionne dans près de 7%
des écoles publiques camerounaises. Ce faisant, les provinces du
Littoral (15,5%), de l'Adamaoua (12,9%), du Nord (11,6%) et du Centre (10,9%)
enregistrent les taux de pourcentage les plus élevés de
régime de mi-temps. La palme d'or revient au Sud- Ouest dont le
régime de fonctionnement est essentiellement de plein-temps (95%).
La cellule sus-mentionnée identifie également
64.500 salles de classes dans les 12.505 établissements scolaires
primaires recensés au niveau national. La majorité des salles se
trouvant dans le Centre (19,6%), l'Ouest (15%) et le Littoral (13,5%). Les
provinces de l'Adamaoua (3,5%), de l'Est (4,6%), du Sud (5,1%), du Nord (5,5%)
comptent très peu de salles de classe. Cette situation qui n'a
guère changé depuis fort longtemps demeure également
analogue à d'autres types de locaux tels que les bureaux, les salles de
réunion et le logement de fonction et magasin.
De manière plus détaillée, les 12 505
établissements scolaires recensés fournissent 2 337 920 places
assises pour 3 120 357 élèves. Le déficit ici (783 037)
reste quand même en nette réduction par rapport à celui de
2003/2004 où il était de 1 099 026 places assises. A noter que le
public offre 64,3% de ces places assises ; et que les meilleurs ratios
élèves/place sont globalement enregistrés dans le Sud,
tandis que le déficit reste énorme dans l'ExtrêmeNord dont
le ratio moyen est proche de 3 élèves pour une place assise dans
les écoles publiques.
Pour ce qui est de la qualité de l'environnement
scolaire, près de 66,2% de salles de classe dénombrées
sont en dur (dont 36% sont en bon état) ; 20,3% sont en sémi-dur
et le reste en matériaux provisoire (allant parfois au-delà de 10
ans !). Le constat sur les commodités provisoire offre un tableau
très peu reluisant.
Tableau 10 : Taux de disponibilité en
commodités essentielles de l'environnement scolaire dans le primaire par
province en 2006/2007.
Provinces
|
Electricité
|
Eau Potable
|
Latrines
|
Latrines Séparées Pour
Filles
|
Clôture
|
Bibliothèque
|
Infirmeri e
|
Boite à pharmacie
|
Cantine
|
Adamaoua
|
7/93
|
1/7
|
3/8
|
1/5
|
2/31
|
4/51
|
1/41
|
1/5
|
1/6
|
Centre
|
7/24
|
3/8
|
2/3
|
3/8
|
19/64
|
25/98
|
4/67
|
3/7
|
1/9
|
Est
|
5/87
|
1/6
|
1/2
|
1/4
|
7/69
|
9/98
|
1/33
|
1/4
|
1/52
|
Extreme- Nord
|
1/33
|
1/5
|
2/7
|
1/7
|
2/73
|
8/87
|
1/38
|
1/4
|
5/51
|
Littoral
|
31/77
|
1/2
|
7/9
|
3/7
|
41/92
|
17/72
|
3/44
|
2/3
|
1/8
|
Nord
|
3/74
|
1/6
|
2/5
|
1/6
|
2/35
|
6/37
|
1/40
|
3/8
|
1/7
|
Nord- Ouest
|
5/71
|
2/5
|
4/5
|
3/8
|
3/32
|
4/21
|
1/16
|
1 / 2
|
4/81
|
Ouest
|
7/72
|
1/4
|
2/3
|
1/4
|
7/60
|
7/44
|
1/40
|
1/3
|
2/71
|
Sud
|
1/7
|
1/5
|
1/2
|
2/9
|
9/94
|
7/39
|
1/32
|
1/3
|
1/38
|
Sud-Ouest
|
3/20
|
3/8
|
2/3
|
3/7
|
11/93
|
4/19
|
4/83
|
3/5
|
1/8
|
Ensemble
|
5/33
|
1/3
|
3/5
|
1/3
|
4/25
|
14/79
|
1/23
|
2/5
|
7/80
|
A la lumière de ce tableau l'on retient qu'au niveau
national, seulement 15% écoles primaires disposent d'un branchement
électrique, pour un tiers qui possèdent une alimentation en eau
potable. 17,8% d'écoles disposent d'une bibliothèque mais
très peu possèdent une cantine scolaire et 1/3 seulement ont des
latrines fonctionnelles.
3. L'ENVIRONNEMENT PEDAGOGIQUE.
Tableau 11 : Taux de disponibilité en
manuels essentiels à l'usage des élèves dans le primaire
par province et par ordre d'enseignement en 2006/2007.
PROVINCE
|
Lecture
|
Mathématiques
|
Sciences
|
Anglais
|
Pu
|
Pr
|
Total
|
Pu
|
Pr
|
Total
|
Pu
|
Pr
|
Total
|
Pu
|
Pr
|
Total
|
Adamaoua
|
2/7
|
2/9
|
2/7
|
1/5
|
6/91
|
1/5
|
1/54
|
1/68
|
1/57
|
1/4
|
3/65
|
1/4
|
Centre
|
1/9
|
1/9
|
1/9
|
3/31
|
7/79
|
8/85
|
1/61
|
1/17
|
2/73
|
1/9
|
5/69
|
4/41
|
Est/East
|
2/7
|
1/5
|
1/4
|
1/6
|
2/11
|
1/6
|
1/83
|
1/17
|
1/62
|
2/9
|
2/23
|
1/5
|
Extrême
|
1/5
|
1/3
|
1/5
|
1/7
|
11/82
|
1/8
|
0,52%
|
2/41
|
0,73%
|
3/82
|
3/62
|
1/28
|
Littoral
|
1/7
|
3/88
|
5/59
|
1/8
|
1/38
|
4/57
|
1/98
|
1/70
|
1/81
|
1/7
|
1/46
|
7/45
|
Nord
|
1/5
|
10/99
|
1/5
|
1/5
|
7/89
|
1/5
|
1/96
|
1/38
|
1/92
|
1/6
|
1/51
|
1/7
|
Nord Ouest/
|
1/6
|
5/98
|
11/83
|
1/6
|
1/43
|
1/8
|
0,28%
|
0,75%
|
0,42%
|
1/7
|
1/59
|
1/9
|
Ouest/
|
1/9
|
1/25
|
1/31
|
5/69
|
2/69
|
3/47
|
0,26%
|
1/88
|
0,42%
|
1/15
|
1/73
|
4/71
|
Sud/South
|
1/6
|
1/12
|
11/64
|
7/72
|
3/44
|
8/85
|
0,90%
|
1/51
|
1/99
|
1/6
|
1/15
|
1/7
|
Sud-Ouest/
|
1/8
|
1/24
|
3/31
|
1/9
|
1/28
|
7/81
|
0,35%
|
1/87
|
0,57%
|
1/9
|
1/28
|
7/79
|
Ensemble
|
1/6
|
1/13
|
10/67
|
1/8
|
2/39
|
1/9
|
0,85%
|
1/40
|
1/85
|
1/9
|
3/83
|
7/71
|
Source : Cellule de la
Planification-DDDPPC-MINDUB/Recensement scolaire 2006-2007
La disponibilité en manuels scolaires chez les
élèves du primaire est globalement faible, avec 1 manuel de
lecture pour 7 élèves, 1/9 pour ce qui est des manuels de
mathématique et de science. La possession du manuel d'anglais
étant quasiment nulle ! Si l'on part du fait que le livre est le support
essentiel du processus d'apprentissage, alors convient-il de dire que cette
situation préoccupante devrait mobiliser les autorités en charge
du secteur de l'éducation, à prendre des mesures plus hardies et
efficaces.
Car contrairement à la situation prévalent chez
les élèves, les enseignants disposent en général
des manuels au programme pour apprêter leurs leçons, ce qui
constitue un minimum dans l'acte pédagogique, même comme la
situation reste précaire pour ce qui est de la possession du guide du
manuel d'enseignant.
4. QUID DE LA FORMATION DES FORMATEURS.
La scolarisation primaire universelle, telle que
définie dans le cadre de Dakar est fonction de la volonté des
pouvoirs publics à atteindre ces objectifs. Un analyseur de cette
volonté constitue la nature et le degré de responsabilité
et de pouvoir accordés par les gouvernements aux ministères en
charge de l'éducation. Il nous est permis de penser que la
création du Ministère de l'Éducation de
Base (MINEDUB) au Cameroun traduit cet engagement des autorités
publiques à réaliser les objectifs de Dakar. Il nous l'est
également permis dans la mesure où ce Ministère, en plus
de la mise en oeuvre de la politique gouvernementale en matière de
scolarisation de base, se charge aussi du suivi et de l'encadrement de la
formation des formateurs à travers la gestion des ENIEG. Il reste tout
de même à interroger la nature de ce pouvoir
délégué. N'empêche, la volonté du Cameroun de
parvenir aux objectifs de 2015 se matérialise enfin à travers
l'évolution des effectifs inscrits dans ces écoles.
Tableau 12 : Evolution des effectifs des
élèves-enseignants de 2003/2004 à 2006/2007.
Provinces
|
2003/2004
|
2005/2006
|
2006/2007
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
Adamaoua
|
136
|
108
|
244
|
99
|
89
|
188
|
168
|
297
|
465
|
Centre
|
301
|
769
|
1070
|
255
|
676
|
931
|
414
|
1044
|
1458
|
Est
|
247
|
346
|
593
|
175
|
274
|
449
|
198
|
486
|
684
|
ExtremeNord
|
532
|
154
|
686
|
842
|
201
|
1043
|
1713
|
429
|
2142
|
Littoral
|
60
|
329
|
389
|
43
|
153
|
196
|
69
|
231
|
300
|
Nord
|
302
|
145
|
447
|
260
|
106
|
366
|
513
|
270
|
783
|
Nord-Ouest
|
100
|
237
|
337
|
177
|
356
|
533
|
78
|
318
|
396
|
Ouest
|
112
|
591
|
703
|
73
|
356
|
429
|
129
|
665
|
794
|
Sud
|
101
|
234
|
335
|
88
|
177
|
265
|
48
|
81
|
129
|
Sud-Ouest
|
54
|
210
|
264
|
80
|
267
|
347
|
99
|
234
|
333
|
Total
|
1945
|
3123
|
5068
|
2092
|
2655
|
4747
|
3429
|
4056
|
7485
|
Source : Cellule de la
Planification-DPPC-MINEDUB/Recensement scolaire 20006-2007
Comme l'indique le Tableau 9, nous pouvons constater avec les
concepteurs de la carte scolaire camerounaise que les effectifs des
élèves-enseignants ont progressé de + 36 points en 2006
avec une majorité de femmes (54%). Ces chiffres cachent toutefois
d'énormes disparités dans la mesure où si les femmes dans
la province de l'Ouest sont 5 fois plus représentées que les
hommes, « ce n'est hélas pas le cas des provinces septentrionales
où la féminisation de la carrière enseignante aurait
pourtant servi de modèle dans cette région où se pose
encore le problème de la scolarisation des jeunes filles. » (Cf.
carte scolaire 2007, p33)
PARAGRAPHE II : INTERPRÉTATION DES
DONNÉES ET PROSPECTIVE
A. LES DISPARITÉS COMME PREMIER OBSTACLE AU
DÉVELEPPEMENT DU SYSTEME EDUCATIF CAMEROUNAIS
1. DISPARITÉS DANS LA REPARTITION DU PERSONNEL
ENSEIGNANT DANS LES ECOLES PRIMAIRES ET PUBLIQUES.
« Dans l'analyse d'un système éducatif,
les considérations d'équité sont importantes en tant
qu'aspects descriptifs, mais aussi et surtout parce qu'on assigne à
l'éducation des objectifs en matière d'égalité des
chances. Il importe donc que soient offertes à tous les enfants des
conditions de scolarisation aussi équitables que possibles, quel que
soit le milieu géographique, le sexe de l'enfant et le niveau de revenu
de ses parents ». Aussi dans la mesure où l'on vise à ce que
les conditions d'enseignement soient homogènes sur le territoire d'un
lieu à l'autre, poursuivent les rédacteurs de la carte scolaire,
on devrait s'attendre à ce qu'il y ait une relation assez stricte entre
les effectifs scolarisés dans une école et le volume de
ressources (donc du personnel enseignant puisqu'il constitue la composante
majeure du budget éducatif) dont l'école dispose (idem :
89-90)
Or dans une analyse porté sur 8710 écoles
primaires publiques disposant des données complètes sur les
effectifs d'élèves et du personnel enseignant au cours de
l'année 2006/2007, la relation entre le nombre d'élèves et
le nombre de maîtres indique un retrait de 3 points sur 4 ans du
degré d'aléa par rapport à la valeur estimée
(estimation du RESEN, Novembre 2003) en 2002/2003 (45%). Ceci montre que la
politique menée pour résorber le problème de l'aléa
ne donne pas encore toute la mesure de son potentiel.
De l'avis des spécialistes, la politique de
contractualisation en cours doit être sous- tendue par les contraintes
d'une planification locale, afin de réduire le taux d'aléa de
manière significative. Plus concrètement, ces derniers pensent
que l'affectation/répartition du personnel enseignant doit respecter les
attributs des différents paliers décisionnels de la
décentralisation/déconcentration, à savoir :
- les Services Centraux (DHR) dans la répartition
équitable entres les provinces du pays ; les Délégations
Provinciales dans le cas des départements ;
- les Délégations Départementales pour une
répartition équitable au niveau des arrondissements et entre les
écoles de la région.
2. DISPARITÉS DANS LA REPARTITION DES ENSEIGNANTS
ENTRE LES PROVINCES DU PAYS.
Tableau 13 : Taille moyenne des écoles et
nombre moyen par école par province.
Provinces
|
Effectif moyen des écoles
|
nombre moyen
d'enseignants
|
Adamaoua
|
246,4
|
3,66
|
Centre
|
257,31
|
6,87
|
Est
|
233,71
|
4,75
|
Extrême -Nord
|
333,03
|
4,44
|
Littoral
|
243,7
|
6,26
|
Nord
|
362,75
|
5,25
|
Nord-Ouest
|
270,33
|
5,87
|
Ouest
|
318,96
|
6,64
|
Sud
|
148,42
|
5,14
|
Sud-Ouest
|
227,18
|
5,08
|
NATION
|
273,68
|
5,38
|
Source : Cellule de la planification- DPPC-MINEDUB/
Données issues du recensement 2006- 2007
La province est représentée par la taille
moyenne de ses écoles et par le nombre moyen d'enseignants par
école. Or le tableau ci-dessus illustre le fait que certaines provinces
bien qu'ayant une taille moyenne d'école plus élevée, ne
sont pas celles les mieux dotées en personnel enseignant. Ceci traduit
les disparités suivant le milieu géographique de scolarisation
dans l'allocation des ressources en personnel50. « Ces
disparités sont le fait d'une allocation d'emploi d'enseignants par le
Ministère directement aux écoles nécessiteuses sans prise
en compte des contraintes de la planification au niveau local. Cette
intervention directe au niveau des écoles contribue à accentuer
les disparités entre les provinces, voire entre les départements
d'une même province et finalement entre les écoles du pays »
(93).
En effet, le Rapport d'État du système
Éducatif (RESEN de novembre 2003) indiquait déjà le Sud
comme la province la mieux dotée en personnel enseignant tandis que les
provinces de l'Adamaoua et du Nord l'étaient moins. En 2006/2007, le
même constat demeure.
Au total, toutes ces données indiquent bel et bien que
l'on est encore loin des objectifs fixés à Dakar. La grande
question est celle de savoir s'il est scientifiquement possible d'anticiper sur
2015 ? Raymond Quivy nous apporte quelques éclaircissements à ce
sujet :
« Un astronome peut prévoir longtemps à
l'avance le passage d'une comète à proximité du
système solaire parce que sa trajectoire répond à des
lois stables auxquelles elle n'a pas la capacité de se soustraire par
elle-même. Il
50 Il s'agit ici du point de vue des analystes de la
carte scolaire
n'en va pas de même en ce qui concerne les
activités humaines dont les orientations ne peuvent jamais être
prévues de manière certaine(...) Cela signifie-t-il que la
recherche en sciences sociales n'ait rien à dire qui intéresse
l'avenir ? Certainement pas, mais ce qu'elle a à dire relève d'un
autre registre que celui de la prévision. En effet, une recherche bien
menée permet de saisir les contraintes et les logiques qui
déterminent une situation ou un problème, elle permet de
discerner la marge de manoeuvre des `acteurs sociaux» et elle met au jour
les enjeux de leurs décisions et leurs rapports sociaux. En cela, elle
interpelle directement l'avenir et acquiert une
dimension prospective, mais il ne s'agit pas de prévision
au sens stricte du terme. » (Quivy, op.cit : 32)
B. PROSPECTIVE POUR 2015.
Le premier constat à faire est le fait que le forum de
Dakar est venu changer de manière considérable le système
éducatif camerounais, au point où d'aucuns parlent « d'effet
Dakar ». Ces changements relèvent des mesures institutionnelles
certaines prises au lendemain dudit forum, ainsi que des actions
concrètes menées sur le terrain. C'est ainsi que les chiffres
nous révèlent une avancée significative de l'environnement
éducationnel camerounais depuis 2000, par rapport à ce qu'il
était dans les années 1990. Toutefois, les mêmes
données nous interpellent sur l'étendu du chemin à
parcourir pour atteindre les objectifs de l'EPT à l'horizon 2015, en
particulier ceux relatifs à la Scolarisation Primaire Universelle.
Aussi plusieurs raisons nous amènent à avancer
de manière prospective, l'hypothèse selon laquelle le Cameroun ne
parviendra pas aux objectifs fixés pour l'horizon 2015.
1. DIFFICULTÉS LIÉES A L'ENVIRONNEMENT
INTERNE.
Le système politique camerounais semble incapable de
juguler certaines pesanteurs qui bloquent le processus de SPU. Sans
prétention à l'exhaustivité, nous pouvons noter entre
autres :
- Disparités et croissance
démographique : l'urbanisation galopante de la
société entraîne à son tour un accroissement sans
précédent du nombre et de la diversité des
élèves qui revendiquent presque à l'unanimité une
éducation de qualité. Or, comme nous avons pu le voir, l'offre en
éducation au Cameroun est continuellement inférieure à la
demande sans cesse croissante. De son côté, le
phénomène des disparités est une constance dans
l'environnement éducationnel camerounais. Il semblerait que les
autorités publiques ainsi que les partenaires internationaux ne le
considèrent à sa juste mesure. En effet, une observation
attentive de la
démarche des promoteurs de l'EPT ne présente pas
clairement l'action adéquate pouvant permettre de remédier
à ce phénomène. De manière spécifique, ni le
Plan national d'EPT, ni la Stratégie sectorielle ne présentent
véritablement une démarche cohérente et concrète
à même de mobiliser l'ensemble des acteurs, surtout sur la
manière dont ils devront se déployer sur le terrain. Cela
explique pourquoi l'EPT, après huit années de promotion reste un
mythe dans plusieurs de ces zones périphériques. Or, comme on le
sait déjà, l'épreuve de vérité reste ce que
perçoivent les acteurs sur le terrain. Et pour l'instant les espoirs
restent encore en deçà des attentes.
- Amorce lente du processus de
décentralisation : Mode d'aménagement du pouvoir au sein
de l'État, la décentralisation qui désigne le mouvement
inverse à la centralisation (Baguenard, 1996 : 6), informe
également l'environnement éducatif camerounais. En effet,
plusieurs raisons nous amènent à penser que l'avenir de la SPU au
Cameroun est lié au développement du processus de
décentralisation consacré par la Constitution du 18 janvier 1996.
Or en dépit de la promulgation des Lois portant sur la
Décentralisation et l'institution des Régions, force est de noter
que le processus peine à se matérialiser convenablement sur le
terrain. Le fait est que la centralisation pratiquée à
l'excès s'accompagne d'une forte tutelle de l'État qui absorbe
les autres forces vives à même de revitaliser tout en
décongestionnant le processus de développement. La
décentralisation qui favorise le développement local avec la
libération des nouvelles énergies et des nouveaux acteurs aux
stratégies diverses peut créer un cadre favorable pour l'EPT. En
effet, la décentralisation du système politique et administratif
entraînerait la décentralisation de la gestion du système
éducatif qui à son tour pourrait apporter des solutions plus
proches des besoins réels des populations riveraines. Ainsi, chaque
région pourrait avoir une stratégie propre qui resterait toujours
rattachée à la grande stratégie nationale.
C'est que la décentralisation, tout en respectant les
principes de l'unité et de l'indivisibilité nationale
constitutionnellement proclamée, devrait encourager en même temps,
la diversité locale législativement organisée. (Idem) La
décentralisation du système éducatif camerounais qui est
fonction du processus de décentralisation du système politique ne
serait effective que dans la mesure où les autorités locales
auront le pouvoir d'élaborer des politiques locales d'éducation
plus sensibles aux sensibilités des riverains, avec la liberté
que leur attribue la législation, sans être soumises aux
contraintes hégémonistes des autorités administratives
d'État. La grande diversité du pays sur le plan physique et
humain exige plusieurs approches dont l'opérationnalisation ne pourrait
mieux s'effectuée que dans le cadre d'une décentralisation
poussée. Ainsi, les trois provinces septentrionales connaissent des
difficultés au niveau de la scolarisation des filles ;
l'Extrême-nord restant toujours la plus sous scolarisée des
provinces du Cameroun. De même, la scolarisation est également
fort modeste à l'Est, avec des difficultés d'accès des
jeunes filles dans le secondaire. Les priorités étant changeantes
en fonction des régions, toute politique devrait donc tenir compte de
ces particularités, et « être précédée
d'études permettant de préciser la manière d'aborder les
problèmes et les populations » (Abéga, op.cit : 29) Alors
que s'est produite une dangereuse et profonde césure entre la
société civile et le personnel politique (idem : 123), la
réussite de la décentralisation de l'éducation qui suppose
une proximité certaine, pourrait en outre faciliter une
nécessaire réconciliation, à même de réaliser
un cadre prédisposant à la démocratie locale et partant,
au bon déroulement des programmes d'action en faveur de
l'opérationnalisation de l'EPT.
- Absence d'un cadre favorable au développement
participatif : le développement participatif suppose que tous
les acteurs, y compris les riverains puissent apporter leur contribution
à la mise en oeuvre des projets pour le bien de tous. Pourtant, en
dépit des grandes campagnes de sensibilisation notifiant l'importance de
la contribution de « tous », l'on observe toujours une tendance
à la marginalisation, logique de rente y oblige, des acteurs capable d'y
apporter une contribution significative. Or « quel que soit le chemin le
plus adapté pour y parvenir, l'objectif final demeure un
mécanisme englobant rassemblant, sous l'autorité du gouvernement,
l'ensemble des acteurs qu'ils viennent du gouvernement, de la
société civile, des bailleurs, des agences bi et
multilatérales, ou du secteur privé. » (Dakar +7, 2007 :
72)
Le cas de la CEDEAO présente une volonté
politique manifeste, mais avec des réalisations concrètes qui se
font attendre. Cette situation, en dépit de la concrétisation par
la SADC du protocole sur l'éducation et la formation par les programmes
communs, n'est que le reflet au sein de l'UA d'une nouvelle décennie de
l'éducation handicapée d'un mécanisme de suivi sans moyen.
En réalité, il manque un système fiable et permanent
d'information et de transmission des rapports entre les Bureaux UNESCO en
Afrique. D'où les perspectives sous- régionales et
régionales présenteraient un bilan global plutôt
décevant. D'où également la nécessité d'un
véritable agenda régional d'action. Enfin, parce qu'une
considération essentielle pour l'ensemble des mécanismes aux
niveaux régional, sous-régional et national, réside dans
leur étroite liaison et leur complémentarité, une
rénovation des mécanismes nationaux de coordination de l'EPT
s'impose, avec l'aide d'un agenda régional de suivi.
- Faible mobilisation de la société
civile : la société civile, dans la perspective de
Fatton, désigne « la sphère privée constituée
d'activités économiques, culturelles et politiques
résistant aux incursions de l'État ». Elle
doit faire face au sud du Sahara à la puissance coercitive de
l'État dont la structuration prédominante correspond à un
« gouvernement prédateur » (Owona Nguini) Partenaire pourtant
indispensable de développement, son impact sur
l'opérationnalisation de l'EPT reste faible, du fait de l'opportunisme
de certains d'une part, d'autre part de la difficile convivialité
`historique' persistant entre elle et la société politique
camerounaise. La société civile en effet, reste un potentiel
assez inexploré. Nonobstant le fait qu'elle soit
généralement invitée lors des différents fora et
assises, la mise en oeuvre des projets révèle que très peu
de mécanismes formels de participation de la société
civile sont effectivement mis en place. Considérée comme un
facteur déterminant quant à la sélectivité des
projets et programmes EPT, les stratégies éducatives
développées par la société civile, parce que
mettant l'accent sur la réduction des inégalités,
permettent d'intégrer les populations et zones les plus
défavorisées, « qui seraient autrement
écartées des systèmes éducatifs classiques ou des
programmes d'aide sectoriels » (Dakar +7, op.cit : 63) Qui plus est, la
capacité d'information et de mobilisation des populations constituent
l'autre contribution majeure des ONG et associations de la
société civile. Pourtant, les évaluateurs des
mécanismes de coordination de l'EPT en Afrique Subsaharienne ont reconnu
un grand potentiel de la société civile africaine, notamment dans
sa riche tradition communautaires et de politiques éducatives
originales.
De l'avis de la présidente de la société
civile « Cameroon Education for All Network » (CEFAN), le droit
à l'éducation, en dépit des « nobles »
engagements en faveur de l'EPT, reste encore pour beaucoup un rêve en
ceci qu'il tarde toujours à se traduire dans la réalité.
Dans son allocution prononcée à Yaoundé, lors de la
Cérémonie de lancement officiel de la Semaine de l'EPT en 2008,
elle décrit les multiples résistances à la
décentralisation de l'éducation, la faible implication de la
société civile et des parents d'élèves, comme
obstacles essentiels à l'atteinte de la SPU de qualité à
l'horizon 2015. Celle-ci dépend désormais de la capacité
de l'État à négocier, communiquer et coordonner. Si elle
reste convaincu que celui-ci ne peut plus se contenter d' « organiser et
de contrôler » seul la mission d'éducation, si son appel
consiste à la rupture avec la vision classique « qui voudrait que
l'État soit en amont et en aval de toutes les actions éducatives
», ce n'est pas seulement parce que l'école n'est plus seulement
l'affaire des autorités scolaires et des enseignants, mais de toute la
communauté. C'est aussi parce que l'éducation constitue un enjeu
capital pour l'ensemble des acteurs du champ social. Il s'agit donc d'un appel
à la culture et à l'extension des « complicités
» et des « solidarités », afin d'accroître les
capacités de négociation sociale et de communication à
même de réaliser les consensus et les compromis dynamiques qui
fondent l'esprit partenarial.
- Absence d'une stratégie cohérente de
coopération avec l'UNESCO (Voir également limites de la
stratégie sectorielle et du plan d'action national) : De l'avis des
évaluateurs du processus de Dakar51, le devenir des instances
de l'EPT est intimement lié aux orientations sociétales
visées par l'action internationale et aux choix stratégiques
adoptés pour les atteindre. La situation actuelle est d'autant plus
préoccupante que c'est à l'échelon national que les
mécanismes spécifiques apparaissent les plus précaires.
Depuis Dakar et sur l'ensemble des pays africains, les Forums,
Secrétariats et Coordinations Nationales souffrent de dysfonctionnements
plus ou moins prononcés, qui poussent certains à remettre en
cause les fondements même de leur légitimité et
utilité. Toute réflexion prospective sur les mécanismes
d'évaluation, de coordination et de suivi de l'EPT doit
inévitablement s'insérer dans le contexte d'une harmonisation sur
le plan national de l'action de l'ensemble des partenaires du
développement. Parallèlement à l'action
déterminante des gouvernements, les agences des Nations Unies et PTF
doivent impérativement investir les espaces de dialogue, là
où ils existent et sont opérationnels, pour en faire les
véritables catalyseurs du partenariat tripartite que Dakar appelait de
ses voeux.
2. INSUFFISANCES LIEES A L'ENVIRONNEMENT
INTERNATIONAL
- Relâchement des partenaires techniques et
financiers : Après une forte mobilisation financière
international qui, en plus plaçait l'Afrique au centre de ses
priorités, la part de ce continent dans l'APD connaît une nette
régression depuis 2003. Alors que l'aide au développement
représentait 44% au début des années 1990, 38% en 2003,
37% l'année suivante, en 2005, l'APD ne représentait plus que
33%. Cette tendance qui ne s'est guère améliorée
aujourd'hui soulève des inquiétudes en ceci qu'elle
suggère une stagnation de l'effet mobilisateur du Forum de Dakar. Ces
inquiétudes hantent également l'esprit des rédacteurs des
rapporteurs du suivi de Dakar, pour qui le financement de l'EPT jusqu'en 2015
ne semble pas à l'heure actuelle assurée : « alors que les
réallocations de l'aide en faveur de l'Afrique et de l'éducation
n'ont pas été à la hauteur des engagements pris,
l'estimation du besoin de financement extérieur de l'EPT à
l'horizon 2015 a été revus à la hausse » (Dakar +7
:9) De l'avis de nos spécialistes, les versements d'aide
extérieure jusque là ont été largement en dessous
des besoins estimés pour l'atteinte de la SPU en 2015, d'où le
rattrapage de ce retard accumulé nécessiterait le double des
montants de l'aide observés en 2005.
51 Notamment dans le document paru en 2007 et
intitulé Dakar +7
Dans un nombre significatif de pays dépendants de
l'aide internationale, des difficultés relatives à la
coordination des PTF intervenant sur l'EPT sont légions. C'est le cas du
Gouvernement nigérian dont la conduite semble être dictée
par les bailleurs intervenant avec la prétention de
bénéficier « d'une meilleure compréhension de la
façon dont le système éducatif devrait fonctionner en vue
d'une efficacité maximale. » (Idem : 60) Il convient de noter
également que ces difficultés de coordinations minant les
rapports entre États et PTF ne constituent (entre autres) que le reflet
d'une certaine hiérarchisation des positons au sein de la
communauté internationale et nationale des PTF, où le potentiel
de financement prédomine sur les capacités d'expertise et de
répartition des rôles décidée à
l'échelon international. Remarquons à cet effet que l'acronyme
PTF, si réducteur soit-il, désigne des organismes
complémentaires certes, mais différents aussi. Il s'agit des
partenaires techniques d'un côté, d'autre part des partenaires
financiers. D'où il en résulte au niveau national des
difficultés de coordination et d'orientation générale des
projets éducatifs. L'évaluation des experts penchés sur le
cas du Cameroun est révélatrice à ce propos : « au
total, la coordination au sein des partenaires techniques et financiers semble
plus relever d'une déclaration d'intention que de la
réalité. L'harmonisation des interventions des partenaires au
développement en vue d'une meilleure complémentarité de
leurs actions n'est pas effective au Cameroun. On peut même dire que les
intérêts politiques divergents et les rapports de forces
déséquilibrés au sein de ces acteurs ne permettent pas
qu'on puisse véritablement parler de coordination. Les partenaires
disposant de plus de moyens financiers pour le secteur de l'éducation au
Cameroun (Banque Mondiale, France, Japon) sont les plus enclins à des
démarches solitaires ou, au mieux, à l'alignement des autres
partenaires sur leurs priorités. » (Idem : 61)
- les couacs internes propres à l'UNESCO
: Institution spécialisée DE L'ONU, l'UNESCO, en plus de
faire face à des difficultés internes et fonctionnelles, ne
permet pas une bonne lisibilité de ses programmes. En effet, la mission
de l'UNESCO qui est d'accompagner le processus d'EPT au sein des États
est d'une importance sans précédent. Il n'est pas sûr
qu'elle en dispose pour autant des moyens nécessaires et adéquats
à même de lui permettre de mener à terme cette tâche
`difficile'. A l'évidence, si la quasi-totalité des pays au sud
du Sahara saluent l'action des bureaux régionaux dans la mise en place
des cadres facilitant la coordination des ressources en faveur de l'EPT (aide
logistique et soutien financier), il semble que l'UNESCO sur le terrain
présente des signes majeurs d'essoufflements. En effet, sa place
centrale de chef de file pour la coordination des mécanismes EPT est
quelque fois contestée par nombre de pays (Cameroun, Gabon Nigeria,
Congo, Namibie) qui critiquent le manque d'implication de l'UNESCO sur le
terrain du soutien à l'EPT.
Ainsi, l'on peut s'interroger avec quelque raison sur la
capacité de l'UNESCO à peser sur les stratégies
éducatives en cours. Il s'agit là d'une problématique
structurelle qui ne semble pas avoir véritablement été
résolue par les réformes des nations unies sur le recouvrement de
la plénitude des institutions spécialisées. C'est que la
position de chef de file des bureaux hors-siège est «
officiellement » entérinée par l'ensemble des «
partenaires », surtout dans les domaines relevant de la finance. C'est le
cas du bureau de Yaoundé où « les principaux `bailleurs de
fonds» du secteur, que sont l'Agence Française de
Développement et la Banque Mondiale, estiment (à demi mot) que,
plus que les partenaires techniques, ce sont les partenaires financiers, qui
apportent effectivement les financements dont le secteur a besoin ». Un
autre constat est celui du relâchement de la stratégie
volontariste de soutien politique, logistique et technique aux dispositifs EPT
existants, les coordonnateurs et animateurs des plans EPT acceptant
difficilement leur marginalisation par l'UNESCO et les autres partenaires.
3. L'ÉDUCATION CAMEROUNAISE SOUS L'ÉTAU DU
SYSTEME POLITIQUE
Dans la perspective de Jean Leca, toute question relative aux
enjeux sociaux est potentiellement politique. Il suffit à cet effet que
les autorités publiques l'intègrent dans leur agenda. Interroger
l'éducation camerounaise, c'est aussi interroger son système
politique. Non seulement parce que l'éducation reste de façon
sibylline considérée comme la clé de développement
de toute nation, encore moins uniquement le fait de la saturation des
diplômés qui désormais fait du chemin éducationnel
une voie de moins en moins fiable vers l'emploi. Les problèmes que
connaît l'éducation camerounaise sont consubstantiellement
liés aux carences du système où la victoire de la «
relationocratie » sur la « méritocratie » constitue une
profonde entorse, non seulement sur l'extension d'une éducation de
qualité, mais aussi à la péréquation
éducation-emploi au Cameroun. (Tchenzette) Un tel tableau qui remet en
cause la question égalitaire au sud du Sahara n'épargne pas
l'environnement éducationnel où « la déception guette
l'observateur averti de la mise en oeuvre du droit à l'éducation
en Afrique centrale » (Mbeyap Kutnjem) Aussi, pense-t-on que la mise
à terme des inégalités et disparités dans
l'accès à l'éducation passe également par la
consolidation de la démocratie et du développement, laquelle ne
serait effective qu'au sein d'un État moins centralisateur ouvert
à la participation de tous. Un cas observé à
l'Extrême-Nord au Cameroun fait montre de la réalité selon
laquelle le devenir de l'éducation est lié au Politique.
Région la plus défavorisée,
l'Extrême-Nord connaît le taux de scolarisation le plus bas du
Cameroun. En 1991, il était de 44,31%, dont 71,9 en zone urbaine, et
37,46% en zone rurale, alors que la moyenne nationale était
supérieure à 76% (Abéga, op.cit :130) Officiellement, les
causes de la sous-scolarisation étaient la résistance des
parents, l'exode au Nigeria, l'utilisation des enfants comme main d'oeuvre
agricole ou pastorale, enfin les mariages et grossesses précoces pour
les filles. Pourtant, les trois années suivantes vont connaître
une croissance progressive du nombre d'école, due aux initiatives des
parents qui ont respectivement créé 36, 13 et 20 écoles
dans les Mayo Tsanaga, Sava et Danay. A cet effet, une appréciation
différente pourrait avec quelque raison, penser que ces
établissements ouverts à l'initiative des comités locaux
de développement, constituent le reflet du dynamisme insufflé
dès 1990 par les lois ouvrant la voie à l'ère du
libéralisme. Aussi, Séverin Cécile Abéga, tout en
s'interrogeant sur la survie de ces initiatives prises dans un contexte de
misère effrénée, a pu conclure que : « le
problème fut aussi politique, celui des droits de l'homme et des
libertés individuelles puisqu'on voit comment une population
habituellement indexée pour sa résistance à la
scolarisation et sa `mentalité» a pu à partir d'un
changement politique, exprimer son dynamisme dans un secteur où elle
était défavorisée » (ibidem : 132) Le fait que la
situation n'est guère changée aujourd'hui52 est la
preuve que l'école n'est pas encore perçue et vécue par la
majorité des populations comme une réalité
intégrée ou naturelle. D'une manière
générale, les manifestations et causes de la crise des
systèmes éducatifs sont à la fois internes à
l'école, en même temps qu'elles s'expliquent par son environnement
défaillant. C'est que « les choix éducatifs ont
fondamentalement une dimension politique qui conduit à des arbitrages
entre les intérêts et des finalités opposées »
(Hugon) Et si l'on peut observer qu'en dépit des efforts croissants
consacrés à la scolarisation, la formation du capital humain n'a
guère conduit à une réelle croissance économique,
c'est peut-être parce que les régimes «
néo-patrimoniaux », obstacle à l'émergence d'un
État de droit véritable, n'ont pas été
véritablement gommés en Afrique.
De l'avis de Joël Bertrand, une meilleure
compréhension de l'éducation en Afrique pourrait passer par la
considération du mode de fonctionnement des sociétés dans
lesquelles s'insèrent ces systèmes éducatifs. A cet effet,
si l'on convient avec Médard que le
néopatrimonialisme53 constitue la caractéristique
essentielle des sociétés sub-Sahariennes, l'on
52 Magloire Kede Onana dans son ouvrage paru en 2007
aux éditions l'Harmattan présente un tableau identique du
septentrion où les jeunes enfants scolarisables passent l'essentiel du
temps derrière le bétail, où les parents continuent
à résister d'envoyer leurs filles à l'école, et
où l'on est parfois obligé en échange de leur distribuer
des produits PAM (Projet Alimentaire Mondial) pour qu'ils acceptent
53 A comprendre l'effacement de la distinction entre
sphères publique et privée, et un de ses corollaires qui est
l'utilisation des positions dans l'appareil d'État comme canaux de
redistribution de la ressource nationale
comprend le rôle majeur de l'État qui s'est
institué comme l'acteur économique exclusif captant et organisant
la distribution de la richesse du pays sur le mode clientéliste au
profit de l'élite installée aux commandes.
Instrumentalisée par la reproduction élargie du système,
l'éducation l'est également du fait qu'elle sera mise au coeur de
ce qui garantirait la paix sociale, à travers la légitimation du
phénomène de différenciation entre élite
privilégié et masse de la population. Un tel
phénomène d'extensibilité continue de l'élite, qui
s'appuyait sur l'absorption constante des nouveaux diplômés peu
nombreux face aux besoins immenses des pays nouvellement indépendants,
valait dans un contexte d'expansion économique continu. Mais lorsque la
crise surgit, que la ressource se fait rare face à une implosion
démographique croissante, les perspectives se renversent ; et ce qui est
généralement considéré comme une crise de la baisse
des ressources, peut aussi se présenter comme celle du
système54. Et parce que la fonction de sélection
sociale de l'éducation subordonne celle de formation des Hommes au plein
sens du terme, « nombre de dysfonctionnement qui peuvent être
observés tiennent moins au système éducatif lui-même
qu'ils ne renvoient au social dans sa globalité. C'est-à-dire au
politique, dans son sens le plus plein » (Bertrand)
4. L'EPT : MYTHE OU RÉALITÉ ?
L'engagement pris par la communauté internationale en
faveur de la perfection de la société des savoirs est une
initiative à saluer, en ce sens qu'elle est une preuve que les acteurs
internationaux ne restent pas insensibles aux grands problèmes
contemporains. Cet engagement traduit également la volonté des
uns et des autres à mener une lutte sans merci aux fléaux dont
fait face l'humanité. Or tout au long de son histoire, cette
dernière nous a toujours démontré que rien ne peut
vraiment stopper la détermination des hommes engagés ensemble
dans la réalisation d'une oeuvre humaine. L'EPT ne restera un mythe que
si les différents acteurs s'abstiennent de revisiter leurs
systèmes de valeurs respectifs pour la réalisation du « bien
commun », s'ils n'acceptent de sacrifier des logiques individualistes sur
l'autel de l'intérêt supérieur de l'humanité. A
l'inverse, elle sera une réalité à partir du moment
où l'on parviendra à mettre la locomotive des projets sur les
rails du développement participatif.
En effet, les difficultés sus-évoquées
pourraient être transcendées dès lors que l'action de
développement est conçue comme « un processus
d'apprentissage inséré dans un ensemble
54 Et notre auteur de prendre l'exemple des familles
rurales pour qui l'éducation des enfants est un investissement social,
l'espoir d'une mobilité sociale par délégation. Or
à partir du moment où cette voie semble bouchée, il
devient difficile pour les parents essoufflés par la crise, de continuer
à y investir
de processus décisionnels effectués par les
différents sociaux engagés dans le déploiement d'un
dispositif de développement » (Tommasoli, op.cit : 214) Ici, la
mise en oeuvre au cours des programmes, des mécanismes de
rétroaction à même de rendre opérationnelle
l'expérience acquise, est indispensable.
Tout le débat lancé autour de la politique
camerounaise de coopération est relancé ici dans la mesure
où c'est au sein de son territoire qu'un certain nombre de projets
relatifs à l'EPT est sensé s'appliquer. D'où tout
l'intérêt de l'approche décisionnelle. Car la
décision ne devrait uniquement pas s'arrêter sur le choix d'une
option parmi les possibilités envisageables. Décider, c'est
inclure également la recherche permanente des informations nouvelles
capable de provoquer une correction progressive des choix adoptés sur la
base de ces informations. La difficulté avec la planification, c'est
qu'elle présuppose un décideur rationnel capable d'opérer
des choix optimum à partir des données mises à sa
disposition. Pourtant, la réalité à modifier est sans
cesse fluctuante, mouvante et complexe qu'elle récuse toute
rationalité linéaire.
Pour parvenir réellement à l'EPT, il n'est pas
nécessaire de changer le cadre existant. Il s'avère juste
essentiel d'y inclure le principe du développement participatif qui
« met particulièrement l'accent sur le caractère
procédural et flexible de la planification, sur la
nécessité de se confronter continuellement avec les acteurs
sociaux engagés, à différents titres, dans une
intervention, et sur l'opportunité de définir des dispositifs de
changements qui constituent, de façon consciente, des terrains de
dialogue et de confrontation entre les différents savoirs » (op.cit
: 223) A cet égard, il s'oppose aux schémas de planifications
rigides observés au sein des institutions en charge de la promotion de
la coopération. (Idem) L'intérêt d'une approche
participative est essentiel dans la promotion de la coopération
intellectuelle envisagée au sein de l'UNESCO en ceci qu'elle joue un
rôle analogue à celui que Blaise Pascal et Maurice Kamto assignent
à la pensée. A savoir être apte à percevoir
derrière l'illusion, ramener constamment à l'essentiel dans
l'ordre des sociétés humaines. La pensée tout comme le
développement participatif fait la grandeur de l'homme. Et si elle nous
semble indispensable pour le bon déroulement du processus d'EPT, c'est
parce qu' « il faut que soit réduite à l'irréductible
la place du hasard dans la gestion du destin des hommes » (Kamto, 1993
:114)
Pour toutes ces raisons nous pensons que le concept d'EPT
n'est pas encore appréhendé à sa juste cause. Car comme le
rappelle Jacques Maritain, « plus une idée est grande au regard de
la faiblesse et des misères de la condition humaine, plus on doit
être
prudent à la manier. (...) Et plus attentif on doit
être à ne pas demander sa réalisation immédiate
» (Ramel, 2OO2 :344)
L'ampleur des changements observés en huit
années d'action en faveur de l'EPT, ainsi que
l'imprévisibilité croissante des trajectoires du changement,
imposent une reconsidération de la notion du temps, « d'un temps
qui non seulement s'accélère, mais s'écarte des balises
à partir desquelles on l'évaluait » (Laïdi, in Smouts,
1998) Dans la perspective que nous envisageons l'opérationnalisation de
l'EPT, 2015 n'occupe plus une place primordiale et cesse d'être le point
phare focalisant l'attention des acteurs55. Ce qui est essentiel
ici, c'est de s'assurer de la mobilisation de tous les acteurs sociaux actifs
quels qu'ils soient, dans la marche concertée et intégrée
vers l'EPT. Il s'agit en d'autres termes d'avancer tout en se laissant guider
par la voix des autres, surtout les plus marginalisés. Pour être
plus clair, notre propos est d'avancer qu'il existe une « affinité
élective » entre l'approche participative et l'atteinte des
objectifs fixés au forum de Dakar.
Ainsi, reconnaître le caractère construit des
modes d'organisation et d'actions collectives, c'est reconnaître le
caractère construit des types de changement devant être
impulsés par le processus d'EPT. (Crozier, 1977 : 29) Celui-ci ne
saurait obéir à une logique d'imposition ou la traduction dans
les faits d'un « modèle a priori conçu au départ par
des sages quelconques et dont la rationalité devra être
défendue contre les résistances irrationnelles des acteurs »
(ibidem) Le changement dans la perspective de Crozier, « n'est ni le
déroulement majestueux de l'histoire dont il suffirait de
reconnaître les lois ni la conception et la mise en oeuvre d'un
modèle plus `rationnel» d'organisation sociale. Il ne peut se
comprendre que comme un processus de création collective à
travers lequel les membres d'une collectivité donnée apprennent
ensemble, c'est-à-dire inventent et fixent de nouvelles façons de
jouer le jeu social de la coopération et du conflit, bref, une nouvelle
praxis sociale, et acquièrent les capacités cognitives,
relationnelles et organisationnelles correspondantes. C'est un processus
d'apprentissage collectif permettant d'instituer de nouveaux construits
d'action collective qui créent et expriment à la fois une
nouvelle structuration du ou des champs ». (Idem : 30) Enfin, « ce
n'est pas tant la rigueur des principes, la rationalité du modèle
proposé ou la pureté des intentions qui commandent les
résultats d'une action et d'une réforme, mais l'impact de
celle-ci sur les mécanismes de jeux, les construits et les pratiques et
comportement réels qu'ils recouvrent afin d'en comprendre le rôle
et la signification dans
55 Rappelons nous que dans le cadre de Jomtien,
l'année 2000 constituait l'échéance. Or plus on s'y
rapprochait, plus les engagements pris étaient renvoyés aux
`calendes grecques'
l'ensemble social et d'en mesurer la force de
résistance et la capacité d'évolution » (Idem :
31)
Au bout du compte, l'Afrique ne pourrait traduire le mouvement
international en faveur de l'EPT au mieux de ses intérêts qu'en
« organisant ses capacités de gouvernement et de
développement avec une forte consistance temporelle ». Ce qui passe
nécessairement par la mise en oeuvre des Plans d'Actions Nationaux (PAN)
récusant « le temps des rentes et les rentes de temps, favorisant
l'émergence d'un temps propulsif et compétitif en phase avec le
temps mondial et sortant de l'historicité autoritaire » (Owona
Nguini) Le temps inerte et coagulé qui semble construire son lit au sein
des mécanismes d'EPT, devrait céder la place au temps
motorisé et autonomiser à même d'insuffler une nouvelle
dynamique, non seulement aux engagements pris à Dakar, mais aussi
à l'ensemble des programmes de développement
opérationnalisés quotidiennement au sein des États
membres. Dans le chapitre suivant, nous allons explorer quelques uns de ces
programmes financés au sein du territoire camerounais.
CHAPITRE IV :
LES DIFFICULTÉS FONCTIONNELLES DES
RELATIONS CAMEROUN-UNESCO : ÉTUDE DE QUELQUES PROGRAMMES DE
FINANCEMENT
Tout problème matériel, affirme Crozier,
comporte toujours une dose significative d'incertitude. (op.cit : 20) Une telle
constatation nous met en éveil sur l'inexistence d'un système
social entièrement réglé ou contrôlé, la
transparence sociale étant quasiment impossible parce qu'il n'existe pas
de champs neutre et non structuré. (Idem : 177 et 25) Le présent
chapitre, qui se propose de poser un regard objectif sur un certains nombre de
projets de financement réalisés par et/ou avec la participation
de l'UNESCO, voudrait revisiter le rôle joué par les acteurs
individuels ou collectifs composant le système social sensé
opérationnaliser lesdits programmes. Aussi convient-il de commencer par
des programmes qui participent du renforcement de l'éducation formelle,
et poursuivre ensuite par ceux relatifs à un domaine particulier de la
communication.
SECTION PREMIERE : LES PROGRAMMES DE FINANCEMENT
COMPLEMENTAIRES A L'ÉDUCATION.
Nous étudierons tour à tour le Centre des
Ressources Éducationnelle de Ngoksa et la vulgarisation des kits micro
sciences au sein des établissements secondaires du Cameroun.
PARAGRAPHE I : UN PROJET RELATIF A L'ÉDUCATION
INFORMELLE : LE RÉSEAU DU CENTRE DES RESSOURCES ÉDUCATIONNELLES
(RECREE) DE NGOKSA
A. DE L'ORIGINE DES CREE EN AFRIQUE...
Avec l'appui des gouvernements de différents pays et la
FMACU, la BREDA suite à la conférence de Jomtien va lancer une
initiative consistant à favoriser l'essor de l'alphabétisation et
de la post-alphabétisation dans les pays africains au sud du Sahara
à travers les Centres de Ressource Educationnelles (CRE). Chemin
faisant, les premiers CREE furent créés au Sénégal
grâce à l'appui financier des partenaires internationaux, à
l'instar du Centre UNESCO Nederland d'Amsterdam, de la Fédération
japonaise des Clubs UNESCO, du Club UNESCO de Neuss en Allemagne et du Zonta
Club de Maasttricht. Nés dans le cadre d'un mouvement intitulé
« la Caravane de l'Alphabétisation », qui consistait à
organiser des foires matérielles didactiques à travers toutes les
régions du Sénégal, le besoin de laisser une « trace
» dans chaque village d'étape où a eu lieu la foire s'est
immédiatement fait ressentir : dix CRE furent ainsi implantés
entre 1990 et 1995 dans les dix régions du Sénégal.
Force et de reconnaître que ce n'est qu'après
1995 que ce mouvement viendra susciter un certain intérêt dans
d'autres pays, notamment le Burkina Faso, la Gambie, la Guinée, le Mali,
la Mauritanie et bien évidemment, le Cameroun.
A l'exception de la Guinée et du Cameroun, tous les CRE
sont construits selon le même modèle architectural, et quel que
soit son lieu de localisation, la philosophie que sous- tend l'action des CREE
est avant tout celle des Clubs UNESCO à savoir : «
promouvoir les droits de l'homme et les idéaux de l'UNESCO par
l'éducation, la science, la culture et la communication ».
En effet, et comme l'indique ses promoteurs nationaux, l'action des CRE
est guidée par la conviction profonde que la promotion des masses
déshéritées et la lutte contre la pauvreté ont un
impératif : l'investissement dans le capital humain par
l'éducation, la promotion de la santé et l'appui à des
activités génératrices des revenus.
Ce faisant, les objectifs et activités du CRE, en plus
de la promotion des idéaux de l'UNESCO, se focalisent pour l'essentiel
sur les activités d'alphabétisation et de post-
alphabétisation au profit des populations
péri-urbaines et villageoises environnantes afin d'améliorer les
conditions de vie de celles-ci. Aussi, une bibliothèque de
référence vient-elle offrir la possibilité à
ces derniers « d'exploiter les notions élémentaires de
lecture acquises, de transformer leur savoir en savoir-faire et en savoir mieux
vivre et, par conséquent, de s'autoformer tout au long de leur vie
»56
Pour ce qui est des principes d'organisation, ces Centres
gérés par les Clubs UNESCO sont censés être
autonomes et organisés en réseau national (si plusieurs CRE
existent dans un pays), même s'ils peuvent être appuyés par
une structure ad hoc tripartite nationale, composée de
représentants du Gouvernement et de l'intergouvernemental. Le
développement des CREE est également soutenu par un partenariat
aux niveaux local, national et même international.
B. ...AU CENTRE DE RESSOURCE EDUCATIONNELLE DU CAMEROUN
Situé en milieu rural à environ 100Km dans
l'arrondissement de Ebebda, département de la
Lékié57, le RECRE du Cameroun est une structure
d'éducation non formelle, d'alphabétisation fonctionnelle et de
post-alphabétisation rattachée à la
Fédération Camerounaise des Clubs UNESCO (FECA-CLUBS).
Inauguré en 1996, le Centre avait, entre autres, la mission d'impulser
et de conduire à l'émergence des CRE au sein des autres
régions nationales et sous régionales.
A l'instar des autres Réseaux, le CRE de Ngoksa s'est
fixé pour principaux objectifs de promouvoir au sein des populations
rurales, la participation aux actions d'alphabétisation et de
développement ; de créer un cadre d'épanouissement pour
ces activités et en rendre le matériel disponible ; de promouvoir
une large participation et une concertation entre divers partenaires de
l'éducation non formelle et de l'alphabétisation fonctionnelle ;
et enfin de contribuer à la vulgarisation des idéaux des Nations
Unies.
Pour y parvenir, il a été mis sur pied une
stratégie développée par le RECRE, et qui reposait sur
trois principes à savoir : la réalisation de CRE à travers
les différentes régions du pays ; l'organisation de foires de
matériels didactiques et de lecture et la célébration des
journées internationales ; enfin, la mise en place d'un central
documentaire en langues nationales et officielles. Une panoplie
d'activités pédagogiques s'est ainsi vue
développées autour des modules allant de
l'alphabétisation, culture et loisir, à la construction et
56 Tirée de la revue de la Commission nationale
camerounaise pour l'UNESCO, 2005 : 129.
57 Dans la province du Centre, à 1h30 min de
route à partir de Yaoundé.
équipement, en passant par la santé,
l'environnement, la famille et développement, travail et gestion, et
même la presse rurale.
C. LE CRE DU CAMEROUN : QUEL BILAN AUJOURD'HUI
?
A notre arrivée sur le site, le Centre était
fermé et semblait en panne d'activités depuis un bon moment. Ce
qui nous a obligeait à changer de méthode d'investigation, en
commençant par cueillir des informations auprès des riverains.
Les informations recueillies sur place (à Ngoksa) auprès des
populations cibles, ainsi que les éclaircissements des principaux
protagonistes, nous ont permis d'évaluer les activités du CRE en
deux périodicités :
La première étape que nous pouvons qualifier d'
« euphorique » couvre la période allant de 1996 jusqu'en 2003.
Elle se caractérise pour l'essentiel par une atteinte partielle, sinon
parcimonieuse des objectifs fixés.
En effet à sa création en 1996, le CRE de Ngoksa
dont la première a été posé par le Pr BIPOUM WOUM
alors Ministre, a suscité beaucoup d'engouement et d'espoir aussi bien
au sein des populations riveraines que dans l'esprit de ses promoteurs.
Prévu comme Centre pilote rurale en Afrique centrale, il était
perçu par les populations de la localité comme une « aubaine
» qui vient « régénérer les emplois au niveau du
village », en plus d'être un instrument de lutte contre
l'analphabétisme dans un pays qui ne compte pas moins de 5 millions
d'analphabètes.
Dès mai 1997, le réseau a organisé un
séminaire sur l'alphabétisation, la santé et la
technologie en milieu rural au CRE de Ngoksa, en même temps qu'il a
édité le bulletin d'information « RECRE NEWS » (qui n'a
pas vraiment vu le jour). A cet effet, le Centre s'est vu disposé des
livres de tout genre, avec une pluralité de dons aussi bien en
espèce qu'en nature, provenant des donateurs extérieurs et
nationaux.
Financé et construit par l'UNESCO avec la participation
des partenaires internationaux, la construction de l'édifice abritant le
CRE du Cameroun a mobilisé les fonds allant aux alentours de 20 millions
et demi, soit 18 pour la maison et 2,5 pour la plaque.
L'année 2002 constitue, à en croire les
populations autochtones, celle du plus grand événement, ayant
attiré la foule la plus importante. Il s'agissait du projet de
sensibilisation de lutte contre le sida, financé par l'UNESCO Dakar au
taux de 1 500 000 Fcfa, en présence de
« l'animateur58 ». Une douzaine de
villages étaient représentés dans cette
cérémonie qui s'était matérialisée par des
« sketchs portant des messages, partage des préservatifs et
brochures », ainsi que nous le relate un autochtone. Mais force est de
constater qu'il en ira autrement après 2003.
Depuis lors, il n'y a plus eu d'événement, le
CRE étant devenu comparable à un musée. Il s'agit en effet
d'une période « morte ». Et pour avoir une idée des
raisons d'un tel délabrement, écoutons plutôt les
explications de l'actuel président qui également est resté
l'unique membre du CRE, du moins ce qu'il en reste :
La dernière journée de manifestation ici est
celle de l'alphabétisation tenue en 2003. Depuis lors, nous n'avons plus
eu aucune trace de l'UNESCO (...) Depuis sa création, le CREE n'a eu
qu'un seul animateur qui relevait du Ministère des Sports. Ce dernier
est reparti sans avoir fait un an.
Le Japon avait donné une somme de 19 millions qui n'a
pas été bien géré, tout ce que nous avons
reçu de ce financement étant un vieux téléviseur,
un vieux magnétoscope et une renéyo neuve. Lorsque le premier
Secrétaire de l'Ambassade du Japon est venu vérifier si l'argent
était utilisé à bon escient, l'ancien président de
la CACU et mon prédécesseur ont tenté sans succès
d'amener la population à donner des fausses informations. D'où
notre diplomate est rentré « déçu ». Pire
encore, d'autres dons offerts par les Pays-bas et la Chine avaient
été détournés. Et pendant la journée
mondiale de l'alphabétisme, les responsables avaient reçu 1000
dollars pour sa célébration au sein du CRE. Mais tout ce que l'on
a bénéficié, ce sont les grands discours, avec un «
représentant » de l'UNESCO et certaines autorités du
village, des travaux de teinture, un match de football et.... Un petit cocktail
pour tout le monde (trois fois depuis 1999)
L'animateur qui était à la base de toutes ces
machinations avec ses « complices de Yaoundé » est allé
à Dakar (à la place du Président qui est sensé
former la population). Du retour, il a bloqué tout à
Yaoundé, à savoir : un peu plus de 1 million, les livres pour le
Centre (entre 80 et 90), et les balafons.
Ce long plaidoyer fait par ce personnage déçu
caractérise bien ce qu'est devenu aujourd'hui ce Centre qui était
censé être la locomotive ou tête de prou des autres Centre
d'Afrique centrale : un édifice abandonné dans un état de
délabrement criarde qui confine à la dérision. Et
même si nous nous refusons de considérer ses propos comme
étant des « paroles d'évangile », il reste tout de
même que pour un bureau qui, au départ, comprenait une dizaine de
personnes, nous n'avons trouvé sur place que ce président qui
fait la propreté tout seul (pour la sécurité du
matériel, nous a-t-il confié), tout en recevant des intrigues
plus ou moins déplacées de ses « frères » dont
certains vont jusqu'à dire qu' « il est seul parce qu'il veut
« manger » seul ». Or, ce que nous avons trouvé sur
place, c'est la déception d'un homme soucieux du développement de
sa localité qui garde espoir même lorsqu'il n'y a plus grand-
chose à espérer. Déception qu'il laisse percevoir
lorsqu'il nous confie qu' « une radio rurale (bien avant celle de
Mbalmayo) était prévue, ainsi qu'une auberge : autant de projets
tombés
58 Agent de l'Etat envoyé par le
Ministère de la Jeunesse pour animer le Centre, mais qui finalement se
fera remarquer par des talents d'usurpateur, du moins de l'avis des populations
locales.
dans l'eau ». Déception qu'il raconte
nostalgiquement à travers ses déboires passés : « au
Séminaire du CRADAT, le représentant togolais percevait une prime
de 250 000, celui du Sénégal n'avait pas moins de 150 000. Ils ne
m'auraient pas cru si je leur avais dis qu'en tant que représentant du
Cameroun, pays hôte, je n'avais rien reçu ». Et notre «
ami » de conclure que l'échec du CRE est imputable « aux gens
de Yaoundé » !
L'espoir, il l'a gardé dans la mesure où il
continue à « faire le ménage » tout en «
s'occupant du matériel ». Aussi, va-t-il profiter de notre
présence pour lancer un « appel de détresse » à
Désiré AROGA : « un problème grave se pose. Les
locaux risquent d'être cédés à la gendarmerie, les
commandants de brigade de Ebebda, Sa'a et Monatelé sont venus prospecter
les lieux et m'ont demandé d'évacuer les livres ». Cet appel
a-t-il vraiment été reçu par les autorités de
Yaoundé ?
***** **
L'euphorie se caractérise généralement
par une impression de bien être collectif qui se confond à un
sentiment de satisfaction et d'optimisme. Mais très souvent, cette
même euphorie qui suscite beaucoup d'espoir se solde
généralement par des déceptions, du fait des acteurs
véreux et opportunistes qui savent se jouer des conjonctures pour
réaliser des gains personnelles, ceci au détriment de
l'intérêt général. En effet, il s'agit des
personnages issus, si ce n'est fabriqués par le « système
» et qui savent se servir des passerelles ouvertes par ce système
qu'ils maîtrisent en même temps qu'il les « maîtrise
». Avertis, ils savent que l'euphorie produit la passion qui à son
tour créé un cadre favorable aux entreprises obscurantistes,
couvertes elles-mêmes par ladite euphorie. Un tel cadre permet donc
à nos « entrepreneurs » opportunistes de siphonner
progressivement le fruit des efforts provenant des oeuvres de bonne
volonté. Avisés également, ils se servent des
imperfections spécifiques à chaque environnement pour
réaliser leurs objectifs qui sont autres que ceux escomptées par
les donateurs. Parmi ces limites nous pouvons citer entre autres : population
désinformée et mal organisée, quasi inexistence de la
société civile, méconnaissance par des acteurs des
réalités locales etc.... En bref, c'est tout aspect
effiloché, caractéristique du tissu social camerounais qui ici
est mis à nu. La trame n'en étant pas « bien serrée
parce que l'État ne s'est pas appliqué à faire
naître la nation » (Abéga, op.cit : 193)
Le fait est que l'absence du citoyen qui caractérise le
Cameroun est d'abord celle de la chose publique. En l'absence d'un
système de contrôle efficace, soit par la base, soit par le
système lui-même, l'individu multiplie des zones d'incertitudes
afin d'engranger des bénéfices personnels au détriment de
l'intérêt collectif. Ces pouvoirs informels ayant pris des
proportions inquiétantes au sein de la machine administrative
camerounaise, l'on « assiste ainsi à un grignotage progressif de
l'État par les appétits individuels » (idem, 59) Si bon
nombre d'auteur sont unanimes sur la faiblesse de l'État, certains
identifient un besoin d'éducation et de formation du citoyen, tandis que
d'autres pensent à l'urgence d'un mécanisme de contrôle
impliquant la société civile, allié objectif de
l'État dans la réalisation de l'intérêt du citoyen.
Exprimé autrement, « l'État, pour sa propre survie, doit
soutenir la société civile » (idem)
Le RECRE de Ngoksa, ainsi que nous le confiait
Désiré AROGA, s'est écroulé avec le départ
de ses promoteurs parce qu'il n'y a pas eu une véritable appropriation
du projet par les populations, et du défaut de management.
Autre raison évoquée par le Président de la FECACU est que
le CRE ayant précédé le club, il s'en est suivi de
sérieux problèmes de financement. Mais d'après toute
vraisemblance, les difficultés de financement ne font que venir se
greffer sur un phénomène plus révélateur
constamment mis en relief par l'anthropologie de développement. C'est
que la mise en place du CRE obéit à ces types de programmes
imposés d'en haut, sans une consultation préalable des
aspirations profondes de la société. Ce type de programme
généralement se fonde sur une série de suppositions
erronées quant aux caractéristiques socioculturelles et
économiques des sociétés riveraines, sans études
anthropologiques préalables. Or « pour être les auteurs de
leur propre destin, les bénéficiaires devraient prendre
conscience de leurs propres conditions de vie, non pas par des
médiations politiques mais par une compréhension de leurs besoins
de développement » (Tommasoli, op.cit : 110) Fort heureusement,
l'environnement des relations Cameroun- UNESCO est également
révélateur de projets suscitant de grandes espérances. Le
financement des kits micro sciences en fait peut-être parti.
PARAGRAPHE II : LE CAS DES KITS MICRO SCIENCES : UN
PROJET PORTEUR ?
Promouvoir une approche matérielle et
pédagogique à faible coût constitue l'élément
stimulateur des initiateurs du programme de vulgarisation des kits micro
sciences au sein des lycées camerounais d'enseignement
général. Par kit micro science, il faut entendre l'ensemble
des éléments constitutifs du matériel des
laboratoires scientifiques et qui montés reflètent l'image
desdits objets, mais en des unités extrêmement petites. Leur
utilité est de permettre aux établissements dépourvus de
véritables laboratoires scientifiques, d'offrir une passerelle de
formation pratique complémentaire à l'enseignement
théorique. Toutefois au Cameroun, ce programme connaît une
évolution particulière.
A. HISTORIQUE.
Démarré de manière informelle en 1998
avec l'aide de l'Afrique du Sud à qui nous devrions en reconnaître
la paternité, le projet des kits micro science sera par la suite
apprécié par l'UNESCO qui décidera d'en assurer la
promotion.
Au départ, il était question d'un centre de
micro science en Chimie, centre dont la mise sur pied a été
possible par décision du Ministère de l'éducation
camerounaise en 2000. C'est ainsi qu'un Séminaire inaugural regroupant
les Ministres de la CEMAC, sous le thème : « être ou ne pas
être » va se tenir au Cameroun, point focal pour la promotion de la
micro science dans la sous région. Chemin faisant, suite à une
recommandation faite à l'UNESCO par la Conférence des Ministres
de l'Éducation des pays de la CEMAC, à l'occasion de la visite
officielle du Directeur général de l'UNESCO, le Bureau
régional, ainsi que le reconnaîtra Bernard HADJAD, depuis lors va
appuyer le projet de formation des enseignants des disciplines scientifiques.
Ce projet qui ne vise autre chose que la vulgarisation de
l'expérimentation scientifique à l'école, à l'aide
des kits de micro science, est développé par le Centre
d'excellence des expériences de micro science sis au lycée
Leclerc de Yaoundé.
A cet effet, plusieurs Séminaires financés avec
les fonds japonais ou de l'UNESCO vont se dérouler au Cameroun, Tchad et
en Centrafrique. Pris en compte dans le budget de l'État, le centre
camerounais assurera également l'expertise de formation des formateurs
de la sous région (Gabon y compris).
B. SITUATION ACTUELLE
Centre de Catégorie II sous l'égide de l'UNESCO,
son statut juridique connaît cependant des retards du fait de
l'éclatement du Ministère de l'éducation nationale. Et
comme nous le confiait le coordonnateur du programme, Mr TETOUOM, en septembre
2008, « l'on attend le décret présidentiel qui devrait
sortir incessamment, afin que le dossier aille à la prochaine
Conférence générale, pour être pris en compte dans
la stratégie de 2009 ». De
manière précise, ce dossier qui doit être
étudié dans le cadre du Conseil exécutif de l'UNESCO,
devrait également mobiliser davantage les principaux acteurs de la
diplomatie camerounaise, compte tenu des avancées, avantages et enjeux
d'un tel programme.
Car en effet, les kits, aux dires du coordonnateur, sont
présents dans près de 70% des lycées et collèges.
La sensibilisation ayant été faite, poursuit-il, il reste que les
chefs des différents établissements puissent se rapprocher du
Centre, en vue d'en commander. Le matériel étant
subventionné au niveau des fournisseurs Sud-africains et Anglais, qui de
ce fait, participent également à l'expansion de la micro science.
Et qui plus est sous le prix catalogue, la remise originelle est de 30%, avec
l'exonération elle va de 40 à 50% au sein de la CEMAC.
Il faut dire que très peu de lycées au Cameroun
disposent de laboratoires scientifiques. Et même pour les
établissements qui en disposent, à l'instar des lycées
Leclerc, d'Obala, Bilingue et de Nkol Éton, l'on rencontre
d'énormes difficultés. Pour ce dernier par exemple, et comme nous
l'explique ce Professeur des sciences physiques, la Volumétrie
nécessite certains dosages au cours desquels on mesure des volumes. Il
s'agit du dosage doxydoréduction et du dosage
acydo-basique. Le matériel existe pour la réalisation
des dosages à grande échelle. Or rien n'existe pour la micro
chimie, les produits étant finis depuis quatre années. A cela il
faut ajouter le fait qu'un seul laboratoire très souvent s'avère
insuffisant dans un contexte où les effectifs sont sans cesse
croissants.
C'est donc dire que les kits micro sciences sont
indispensables aussi bien pour les établissements disposant des
laboratoires que pour ceux qui n'en disposent pas. En général,
lorsque les kits sont épuisés, il incombe aux chefs
d'établissements d'en recommander au niveau du Centre d'excellence
situé dans l'enceinte du lycée Leclerc. Bien entendu, ces
derniers le font à partir des délibérations issues du
Conseil d'enseignement qui permet aux enseignants d'exprimer leurs
doléances.
C. POSITIONS DES PRINCIPAUX
PROTAGONISTES59
Du point de vue du coordonnateur Mr TETOUOM, la volonté
y est, mais les moyens ne suivent pas toujours. Aussi pour ce dernier, «
le décret présidentiel est vivement attendu, afin qu'il y ait un
changement significatif : cadre juridique approprié,
institutionnalisation véritable pour que le Centre reste viable,
même après le départ du coordonnateur ».
59 Nous regrettons le fait que faute de temps
considérable, une étude systématique auprès des
élèves des différents établissements n'ait
été effectuée. En outre, les établissements
privés et les zones rurales restent les parents pauvres du projet. Une
impression générale se dégage tout de même au sein
des élèves ayant eu l'opportunité d'expérimenter
les kits micro sciences : celle d'une meilleure assimilation du cours, mais
ceci à condition que l'enseignant en maîtrise la manipulation.
Professeur des Sciences Physiques en service au lycée
de Nkol Éton depuis 2002, Mr TEDONGMEZA FOMEKON Alphonse pense qu'en
dépit des subventions, les prix restent encore assez
élevés, à l'instar du kit de micro chimie qui coûte
270 000 Fcfa. Et « au lieu que l'État laisse l'acquisition du petit
matériel à la charge des chefs d'établissements, faudrait
qu'il l'acquiert et en distribue dans tous les établissements, tout en
rendant l'utilisation obligatoire (...) A l'examen, la manipulation des Travaux
Pratiques, Sciences Vivantes de la Terre et Chimie doit être obligatoire
»
Parmi les problèmes que pose l'utilisation des kits
micro sciences, le recyclage des enseignants occupe un pôle position. Car
plusieurs parmi ceux-ci, à l'instar des anciens, passent des
années sans utiliser ce matériel. Et même si l'ENS
aujourd'hui fait des efforts d'envoyer les futurs enseignants dans les Centres
d'excellence, il n'en demeure pas moins que plusieurs n'y ont jamais
été formés. Bien plus, après la formation, il
faudrait trouver le matériel dans le lieu affecté, sinon on finit
par oublier au fil du temps.
A côté du recyclage, le problème de la
conservation des kits se pose également. Si le problème du
recyclage est compensé partiellement par l'existence des « bassins
pédagogiques » supervisés par un inspecteur, il en est
autrement pour ce qui est de la conservation. Suivons à ce sujet les
propos de cet enseignant du lycée de Biyem-assi : « les kits sont
ici à leur troisième année d'utilisation. Mais le
problème de conservation se pose gravement, pour faute de salle ».
Aussi sont-ils souvent conservés au sein des armoires. Et lorsque l'on
sait que ce matériel n'est généralement pas en
quantité suffisante, « la conservation est un véritable
problème ! On recommence à zéro chaque année,
d'où le nombre ne parvient pas à croître ».
De manière générale, bon nombre
d'enseignants réclament une prime d'expérimentation, car
disent-ils, la préparation d'une manipulation (expérimentation)
prend un temps considérable, comparée à la manipulation
proprement dite. Aussi doivent-ils être dans l'enceinte des
établissements avant le cours, afin d'y préparer. La
conséquence directe ici est que plusieurs enseignants en sciences
physique ne manipulent pas ! Aussi Mr EDJODJOMO, jeune enseignant
suggère l'imposition des séances de manipulation surtout pour les
encadreurs de classes scientifiques, car selon lui, il ne fait aucun doute que
la manipulation est mieux que le cours théorique. Or plusieurs
enseignants ne la maîtrisent pas véritablement (pratiquement 5 sur
un total de 16), d'où parfois l'élève ne fait qu'imiter
plutôt que de maîtriser.
C'est dire enfin que le succès du programme de
financement des kits micro science dépend des efforts conjugués
des pouvoirs publics et de l'UNESCO à favoriser la
vulgarisation du matériel dans « tous » les
établissements nécessiteux. Il est également fonction de
l'engagement des chefs d'établissements et de la capacité des
enseignants à pouvoir s'en servir. Ainsi seulement, pourrait-on
éviter la détérioration du matériel, comme
ça été le cas il y a trois ans au lycée de
Biyem-assi, pour manque d'enseignants qualifiés. Et l'on y revient
souvent lors des Conseils d'enseignant toutes les quatre semaines. Finalement,
il s'agit tout de même d'une initiative à saluer dans la mesure
où elle participe à l'impulsion du développement de la
sous-région, à l'instar du financement des radios rurales.
SECTION II : LES PROGRAMMES RELATIFS A UN SECTEUR
PARTICULIER DE LA COMMUNICATION : CAS DU FINANCEMENT DES RADIOS
COMMUNAUTAIRES
Au moment où la société internationale
est de plus en plus poussée par une interdépendance complexe,
alors que la révolution dont connaît le système
international est d'abord celle de l'information, l'être humain plus que
jamais a besoin de la communication pour devenir «Homme» au plein
sens du terme. Déjà par nature, observe Norbert Élias,
tout individu naît normalement avec un « appareil phonique »
qu'il contrôle personnellement, lequel instrument lui permet
également de s'exprimer. Par nature également, poursuit l'auteur
de La société des individus, « l'homme a
(...) non seulement la capacité de s'adapter à la communication
avec ses semblables, mais aussi -et toujours par nature- le besoin ».
(Élias, 1987 : 78) L'homme qui va focaliser l'attention des promoteurs
des radios communautaires fait partir des plus marginalisés des
sociétés sub-sahariennes. Ces programmes visent essentiellement
les « cadets sociaux » énoncés par Bayart, surtout les
populations vivant dans les zones reculées, celles là même
chez qui existent un besoin pressant de communication.
Expérimentés en 1999 à Kothmale au Sri
Lanka, les centres communautaires multimédias (CCM) qui combinent une
radio communautaire avec un télécentre et des équipements
en ligne, permettent d'offrir un modèle d'accès communautaire
intégrateur et peu coûteux. Ce concept qui aujourd'hui est reconnu
et adopté par nombre d'autres partenaires du développement,
communautés et institutions, fait l'objet au Cameroun d'une
coopération « particulière » entre ses promoteurs
(UNESCO) et les autorités publiques. Le projet des radios rurales qui a
permis jusque là une mise en place de seize radios communautaires au
Cameroun se justifie par le rôle primordial reconnu au monde rural et
à l'action communautaire dans le développement. Aussi convient-il
ici de s'en tenir à deux cas,
lesquels nous permettrons de jeter un pan sur l'environnement
national et même sous-régional du devenir des médias
communautaires en Afrique centrale.
PARAGRAPHE I : LES RADIOS RURALES DE SA'A ET DE
MBALMAYO
« Conçus pour encourager la participation d'un
large échantillon représentatif de niveau
socio-économique, d'organisation et de groupes minoritaires ou
sous-cultures au sein d'une même communauté », le projet des
médias ruraux et communautaires est le fruit de l'effort conjugué
de l'UNESCO et des partenaires au développement, ainsi que des pouvoirs
publics et de la société civile camerounaise. Facteurs de
changement social à même de stimuler le développement
endogène, les mass médias, comme cela est reconnu en milieu
urbain, permettent le renforcement des capacités de communication et
d'analyse des individus en zone rurale, en même temps qu'elles renforcent
leur participation à la gouvernance démocratique. (BEPI POUT et
BEND, 2005 : 238) Il convient de commencer par la toute première radio
financée sous l'égide de l'UNESCO, avant de poursuivre par l'une
des toutes dernières, qui est également l'un des produits de la
radio mère de Mbalmayo.
A. LA RADIO DES FEMMES DE MBALMAYO
Produit de la coopération UNESCO-Cameroun avec la
participation des partenaires financiers, l'apparition de la radio des femmes
de Mbalmayo60 dans le paysage médiatique camerounais est
également considérée comme une initiative de la
société civile, du fait de l'implication de la Ligue pour
l'Éducation de la Femme et de l'Enfant (LEFE). Il faut dire que cette
radio qui émet depuis septembre 2000 a pour lourde tâche de
constituer la matrice au sein de laquelle devra naître les médias
de même type en Afrique centrale. Si la réussite du projet ne
souffre d'aucune contestation aux yeux de la coordinatrice Sophie BEYALA, force
reste tout de même que la réalité sur le terrain ne
relève pas toujours de l'évidence.
1. UN PARI RÉUSSI AUX YEUX DES
PROMOTEURS
60 Localité située à 50Km au sud
de Yaoundé
Nous sommes le 05 août 2000, Olivia Marsaud, à la
veille du fonctionnement effectif de la première radio communautaire
financée sous l'égide de l'UNESCO, écrivait dans le
journal Afrik-Com : « avec un accent mis sur la santé de la femme
et de la jeune fille (...), une programmation à caractère social
et largement tournée vers l'action citoyenne, (...) La radio sera
dirigée par les femmes de la communauté. Elles ont demandé
à intégrer 15% d'hommes dans leur effectif, et ont baptisé
la radio «Femme-FM Mbalmayo» ». En effet, dès le mois de
septembre 1999, 18 personnes responsables de la gestion de la radio ont
été formées, avant d'être suivies en octobre et
novembre par des animateurs se spécialisant aux techniques d'animation
radiophonique en milieu rural. Pour finir en janvier 2000, dix techniciens
parmi lesquels sept femmes et trois hommes, ont reçu la formation
nécessaire pour entretenir la radio.
L'UNESCO n'étant pas un bailleur de fonds, il faut
noter que ce projet a également vu le jour grâce à la
contribution des partenaires financiers tels que le FNUAP, l'UNICEF et surtout
le PNUD dont la politique pour accroître la contribution des femmes au
développement consiste à aider les gouvernements,
conformément aux priorités nationales et aux
préoccupations mondiales. Une telle politique consiste à
intégrer les femmes et leurs activités de développement et
à promouvoir le rôle qu'elles peuvent jouer à cet
égard.
L'UNESCO également va s'attacher la collaboration de
l'ONG « la ligue pour l'éducation de la femme et de l'enfant
». Aussi prévoyait-elle de cogérer pendant deux
années pendant lesquelles elle devait assurer la formation continue des
membres, afin que ces derniers assurent la relève dans une totale et
parfaite indépendance. « Les petites tracasseries émanant de
certains fonctionnaires du Mincom, et qui ont quelque peu freiné le
projet, n'ont en rien entamé la foi de Mme BEYALA », peut-on lire
dans le journal `'Afrik-com».
Il faut dire que l'UNESCO dans le cadre du PIDC avait
octroyé 40 000 dollars en mai 2000 à la création de cette
radio dirigée par les femmes de la communauté, radio qui en
principe devrait couvrir l'ensemble du département. Bien
qu'émettant entre 15 et 18h à ses débuts, notre radio dont
l'orientation va se pencher pour l'essentiel vers la femme et la santé
de la reproduction, constitue un réel succès aux yeux de sa
promotrice : « les femmes profitent de la radio pour dénoncer les
choses qui leur paraissent injustes et qu'elles voudraient voir changer. Elles
ont compris qu'elles avaient entre les mains un véritable outil de
communication ». Et Sophie BEYALA de poursuivre : « c'est une telle
réussite que nous avons de plus en plus de demandes d'installation de
radio à travers le pays (...) c'est un sujet qui accroche ». Sept
années se sont écoulées et les sentiments de notre
promotrice
(fonctionnaire international en service au bureau
régional de l'UNESCO) sont restés identiques. Bien plus, c'est
avec beaucoup de satisfaction et d'optimisme qu'elle nous présentera le
bilan parcouru jusqu'à ce jour, un bilan sanctionné par 16 radios
dispatchées sur l'ensemble du territoire national (voir tableau en
annexe). Mais peut-on véritablement affirmer que la
réalité sur le terrain soit aussi accrochante ? Seule une
descente sur place nous permettrait d'apporter quelques éléments
de réponse à cette interrogation.
2. LA RADIO DE MBALMAYO VUE PAR LES RIVERAINS
2-1. UNE AVANCEE CERTAINE...
Notre décente sur le terrain nous a permis de
recueillir les avis des différents acteurs sur le fonctionnement de la
radio. La première impression retenue, et qui est d'ailleurs frappante,
est que les responsables et animateurs de la radio, partagent les même
sentiments que les populations, ce qui créé une atmosphère
de solidarité assez solide pour être révélée.
Ainsi, une impression générale que nous prenons le soin de
regrouper en quelques articulations va se dégager:
- Une grande avancée pour les droits de l'homme,
beaucoup de procès ayant eu lieu grâce à l'accès aux
femmes à l'information. Une grande avancée également de la
démocratie, avec les informations et la vulgarisation sur le calendrier
et le processus électoral. Aujourd'hui, le mari ne détient plus
le monopole de la prise des décisions relatives au vote, du moins pas
comme dans le passé.
- Radio apolitique, l'éducation à la citoyenne
requiert une place considérable avec la sensibilisation sur le vote, la
possession des cartes d'identité, ainsi que la nécessité
de déclarer les naissances des enfants.
- Beaucoup de programmes qui relevaient du « domaine
réservé » du gouvernement sont développés ici,
à l'instar du projet PPTE sur l'agriculture, où il existe des
prix pour les jeunes planteurs, ainsi que sur « la plus belle plantation
».
- Non moins important constituent les décentes sur le
terrain en vue de sensibiliser les populations sur la vaccination sur les
épidémies telles que la poliomyélite et le sida. Et
même si l'on décèle encore des cas de réticences, le
changement des comportements étant un phénomène
progressif, il faut noter ici que l'information se véhicule par tranche
d'âge.
- Enfin dans le domaine de l'éducation, il existe une
collaboration « fructueuse » avec le MINEBASE et le MINESEC, surtout
dans le cadre de l'aspect genre. De même une émission est
réservée aux élèves les mercredi, samedi et
dimanche.
Dans l'ensemble, ainsi que nous rappelle cet animateur
originaire du Nord-Cameroun, la radio rurale tire un bilan positif dans la
mesure où elle reste l'unique radio de cette ville « cosmopolite
». Aussi, un effort est-il effectué en vue de refléter
l'ensemble des couches ethniques, ce qui n'est pas rien dans un média
où 70% des informations sont diffusées en langues locales. Les
fulbé, bamiléké, bassa et autres s'y impliquent en vue
d'une meilleure adhésion, ainsi que l'indique le cahier de charge sur la
diffusion de l'information.
Ainsi serait-on tenté d'affirmer que la radio
communautaire de Mbalmayo est une réelle réussite. A condition de
faire abstraction de l'approche anthropologique qui fait du chercheur non un
expert, mais celui qui apprend. L'expert dans ce contexte étant la
population dont on tire les connaissances. Et de même que « les
anthropologues ne peuvent que transmettre ce qu'ils ont appris de leurs
maîtres, à savoir de ceux dont ils étudient la culture et
les institutions. » (Baxter, cité par Massimo Tommasoli, 2001
:143), de même notre présence sur le terrain nous a permis de
déceler quelques « points noirs » dont le
développement, si l'on n'y prête guère attention, pourrait
considérablement entacher et porter atteinte à l'éclat
d'un projet aussi noble que celui de la vulgarisation sur l'étendu du
territoire national, des radios communautaires.
2-2. ...EN DEPIT DE QUELQUES DIFFICULTÉS
FONCTIONNELLES
En dépit de sa « vraie réussite »,
témoin de sa bonne santé apparente, la radio de Mbalmayo
connaîtrait tout de même quelques difficultés relatives
aussi bien à son fonctionnement qu'à son statut juridique.
Le gouvernement camerounais qui signe les conventions de
coopération avec les Organisations Internationales, est tenu de
créer un cadre juridique favorable au bon fonctionnement des projets et
programmes réalisés à l'intérieur de ses
frontières. Il en va également pour les radios communautaires
dont le statut juridique est indispensable pour un fonctionnement légal,
sinon légitime. Or, à en croire le chef de station Irène
MBAZOA, l'Accord Cadre, convention de base de coopération
relative aux radios communautaires est inexistant, aussi bien au MINCOM qu'au
sein du bureau régional de l'UNESCO. Aussi pour cette dame, il est plus
qu'indispensable que le « Gouvernement camerounais définisse
d'abord le véritable statut des radios communautaires », qui
à ses yeux ne sauraient être catégorisées dans le
cadre des médias privés. Aussi va-t-elle ajouter : «
Jusqu'aujourd'hui, nous n'avons
pas de licence, parce que c'est lourd financièrement,
et nous fonctionnons avec des attestations ».
Au niveau du fonctionnement, le besoin d'antennes de relais
semble être l'un des plus prégnants, chaque unité
administrative nécessitant un minimum de deux. En outre, les
responsables décrient l'attitude d'un ministère comme celui de la
Promotion de la Femme et de la Famille qui ne collabore presque pas avec la
radio.
Les conventions de collaboration et de partenariat, de
production et de diffusion, constituent les principales sources de financement,
à l'instar des thématiques à produire et à diffuser
: « faire du social », c'est ainsi que les animateurs
définissent le rôle de la radio qui va jusqu'à lire des
communiqués gratuitement, lorsque la circonstance l'impose.
L'équilibre entre l'offre et la demande est un
indicateur de la bonne santé économique, dans la perspective
libérale. Transposé dans notre cas, un sondage auprès des
populations indique un public insatisfait du temps de diffusion (12h-19h) qu'il
aimerait bien voir prolongé. Malheureusement, les responsables avancent
que les coûts financiers de l'électricité, maintenance du
matériel, salaire du personnel (payée par la radio
elle-même), ne permettent pas un ajout des heures supplémentaires.
« Vu les salaires, nous explique l'animateur Ali Daoudou, on peut conclure
que c'est une oeuvre sociale, du bénévolat !
Au départ, la surface d'émission était
prévue à 75Km2, or nous en sommes encore à 25%
environ, la plus grande surface du département n'étant toujours
pas couvert.
Peut-être pourrait-on croire que ces propos sont
emprunts d'une dose assez importante de subjectivité, mais comprenons
nous bien :
Mbalmayo à été crée comme radio
pilote par l'UNESCO. Encore appelée « radio mère »,
elle est censée être la matrice à partir de laquelle
devraient naître les autres radios, aussi bien au Cameroun qu'en Afrique
centrale. Et comme nous le savons, la naissance d'un enfant bien portant est
fonction de l'état de santé des géniteurs. Or, il
semblerait bien qu'il y ait eu des « mort-nés », faute d'un
empressement sans véritables études de faisabilité. Bien
plus parmi les seize présentées (voir annexe), toutes ne sont pas
en parfaite santé, certaines étant même déjà
dans un état critique. Ce sont les cas de Lolodorph et Ebolowa qui ont
pratiquement fermé, de Esse qui fonctionne « épisodiquement
», pour ne prendre que ces cas. Des craintes similaires sont
également portées sur la radio de la ville de Sa'a.
B. LA RADIO RURALE DE SA'A : UN BILAN MITIGÉ ?
1. GENESE ET PRESENTATION
La radio communautaire de l'arrondissement de Sa'a qui est
situé à une cinquante de kilomètres de Yaoundé, se
présente comme la cadette du projet lancé sous l'égide de
l'UNESCO. Baptisée « Radio M'MALLI », elle émet sur la
fréquence FM 99.00 et couvre exclusivement la localité.
Créée en 2003, la radio ne commencera à émettre
véritablement que le 07 mars 2005, à la veille de la fête
des femmes : la portée symbolique est assez significative ici dans la
mesure où « le but premier d'une radio communautaire est de prendre
en compte les problèmes des femmes et des enfants », ainsi que nous
le précisait son actuel chef de station, Angèle NKOUSSOU. En
d'autres termes, il s'agissait là d'un instrument de
développement essentiellement voué à la cause des «
cadets sociaux » de la société camerounaise. Bien
évidemment entre la date de création et le premier jour
d'émission, l'UNESCO assure la formation du personnel et la mise en
place du matériel, ainsi que des séminaires
complémentaires.
A l'instar des autres radios, la création de celle-ci
est le fait d'une initiative de l'UNESCO qui, par la suite, va confier le
projet à une association féminine ayant comme membre une
personnalité influente de la localité. Dans le cas
d'espèce, la radio a été confiée à la
Women Association of Sa 'a Ebebda, communément connue sous
l'appellation de la « WASSA d'Ebebda », la personnalité
ressource ici n'étant autre que Jeannette OLANGUENA, épouse de
l'ex ministre de la santé61, et qui est également la
Présidente du Comité de gestion. La pratique faisant état
de coutume, L'UNESCO, comme dans les autres cas, va accompagner le
fonctionnement de la radio pendant deux années consécutives,
à travers le paiement des salaires du personnel qu'il a lui-même
pris le soin de former. A noter que toutes les formations ont eu lieu à
Mbalmayo, siège de la « radio mère ». Durant les deux
années, l'UNESCO s'occupe également de l'entretien et de la
maintenance du matériel, ainsi que de l'approvisionnement en
équipement.
2. RÉALITÉS DU FONCTIONNEMENT
QUOTIDIEN
Après le départ de l'UNESCO, l'Association
« promotrice » est sensée prendre la relève. Moins
aguerrie que la « Femme-FM de Mbalmayo », la « WASSA d'Ebebda
» va rentrer dans une phase de maturation difficile, ainsi que le
reconnaîtront ses animateurs. Déjà, les programmes
diffusés au sein de la radio n'intéressent pas directement la
population, parce que plus absorbée dans ses activités et
difficultés quotidiennes. Aussi perçoit-elle
61 Aujourd'hui incarcéré à la
prison centrale de Yaoundé
difficilement le bien fondé de la radio. De même,
l'association en charge de la promotion ne présente pas
véritablement d'engouement vis-à-vis de ce projet qui lui a
été quelque peu « imposé », d'où les
animateurs leur mettent une pression quotidienne afin de « motiver ».
Dans un tel environnement, il n'est guère possible de parler de salaire.
« Bénévolat » semble être le concept le plus
mobilisé au sein des différents personnels « restant »
des radios communautaires. A Sa'a par exemple, il est fréquent que l'on
trouve un seul animateur dans toute la «maison», qui en même
temps joue le rôle de technicien (un certain Massa yo). Quand il le peut,
un animateur vient juste pour présenter son émission, et ce de
manière assez irrégulière. C'est qu'en
réalité, la radio s'est spécialisée dans la
reproduction, le manque de moyen et l'obsolescence progressive de la
motivation ne permettant pas une réelle production qui nécessite
des « cassettes ». Généralement, explique le chef de
station, « quand bien même il y a un revenu, il vient des
communiqués dont les rais de lecture s'élèvent en principe
à 1000 FCFA, et des petits contrats qui généralement sont
assortis des «conditionnalités» telles que la production d'une
émission et le passage à l'antenne ». Dans la
réalité, il est fréquent que les communiqués soient
lus à 200 FCFA.
Et pourtant, ce n'est pas des programmes « captivants
» qui manquent. Et l'on peut citer à titre illustratif «
Hommage » qui comme son nom l'indique est une émission de
témoignage et de respect envers des personnalités jugées
dignes de respect et d'admiration de par leurs oeuvres. « Sur le chemin de
l'école » réalisé avec la participation des
élèves semble avoir bonne presse, tout comme « Dynamique
santé » diffusée tous les lundis entre 18 et 19h, «
Islam » entre 1 5et 16h les vendredis, et « Metum Menam »
(culturama) qui se propose de sauvegarder la tradition à travers des
récits sur l'historique et les habitudes des cultures passées.
Mention spéciale est faite à cette émission sur les droits
de l'homme, partie sur un projet avec les canadiens. Il s'agit de la production
des magazines d'éducation et de sensibilisation sur les droits
élémentaires et fondamentaux de la personne humaine. L'impact
social de ce projet s'est directement manifesté à travers les
interventions dans la radio qui, à en croire l'animatrice, ont
apporté un changement significatif des comportements au sein des
familles qui, sont longtemps restées soumis sous l'autorité
patriarcale. « Vis-à-vis de leurs enfants et femmes, nous explique
Angèle NKOUSSOU, beaucoup de chefs de famille ont changé de
comportement », même s'il existe toujours des sceptiques qui ne
regardent d'ailleurs pas notre animatrice d'un bon oeil. Malheureusement, de
tels programmes relèvent beaucoup plus de l'exception, le quotidien
étant celui des magazines en miniature et des micro programmes sans
grande rentabilité.
Étonnant tout de même lorsque l'on sait qu'une
structure généralement accompagne les radios communautaires. Ici
l'Assemblée générale dont la Présidente est Odette
NDZANA ZOGO, et qui siège à l'ouverture de la radio avec le
Comité de gestion, représente la communauté au quotidien.
Surprenant également lorsque quand on sait que ces radios
bénéficient de l'appui de l'État à travers l'aide
publique à la communication privée. Ahurissant enfin lorsque
notre présence sur place à Sa'a nous a permis de réaliser
qu'il y avait une autre radio privée qui bien que disposant d'un
matériel moins perfectionné, semble pourtant avoir meilleure
presse auprès des populations riveraines. Aussi une petite étude
comparative nous a-t-elle semblé nécessaire.
3. M'MALLI FM EMET DANS UN CONTEXTE DE CONCURRENCE
PARFAITE ?
Radio communautaire thématique à vocation
sociale et culturelle, la « Radio Colombe » se présente comme
une alternative pour les populations locales à notre radio
communautaire. Relais privilégié de communication avec l'ensemble
de la communauté, son principal objectif est d' « impliquer toutes
les composantes sociales dans les stratégies et projets de
développement, de susciter le dialogue et l'échange
d'expériences dans la perspective du partage d'information et du savoir
». En un mot, la radio se présente comme un instrument de
renforcement de la cohésion et de la solidarité sociale. Pour ce
faire, elle se propose d'informer, de former et d'éduquer les
populations sur les questions de développement qui les
préoccupent ; de transmettre aux populations le savoir faire susceptible
d'améliorer leur condition de vie quotidien ; et d'enrichir le temps de
loisir auditeurs au moyen des émissions de divertissement. Bien plus,
« Radio Colombe entend revaloriser les activités des populations
par des projets générateurs de revenus dans la perspective de la
lutte contre la pauvreté ». Avec un réseau de couverture qui
s'étend d'une partie du Département de la Lékié aux
Départements du Mbam et Kim et Mbam Inoubou, la radio diffuse ses
émissions en langues locales (Eton et Manguissa) et en français,
et émet tous les jours entre 5h30mn et 22h, soit un temps de diffusion
de 16heures et demi par jour sans interruption du lundi au dimanche.
La Radio Colombe, bien qu'étant insuffisamment
équipée, et avec un édifice qui, passez nous l'expression,
laisserait quelque peu à désirer, est pourtant la plus
écoutée de la localité. Sur un petit test fait de
manière spontanée dans une zone publique, 7 personnes sur 10
semblent porter leur préférence sur cette dernière. La
raison la plus évoquée étant qu'elle est plus
animée et s'intéresse beaucoup plus aux préoccupations
quotidiennes des riverains.
Financée pour l'essentiel par les membres de son
association promotrice (SODI, solidarité pour le développement
intégré et l'environnement), cette radio dont le personnel
s'élève à douze, avec cinq permanents, travaille
également avec les enseignants et fonctionnaires à titre de
bénévolat. De l'aveu de son chef de station adjoint chargé
de programmes, Lucien Claude ABOUGA, elle a eu par deux reprises (2005 et 2008)
à recevoir de la part de l'État, une aide allouée à
la communication.
Quelques faits, de l'avis des défenseurs de M'malli FM,
expliqueraient la différence existante entre les deux radios : «
Radio Colombe, c'est des touches à tout. Or notre radio plus
circonscrite donne juste l'information concernant son public. Colombe est une
radio privée, qui va au-delà des limites territoriales de la
localité. En plus elle existe au moins dix ans avant M'MALLI FM, ce qui
expliquerait sa relative popularité ». Ne nous y méprenons
pas, la Radio Colombe est également confrontée à des
mêmes difficultés que ses pairs.
De l'avis du chef de station pour qui le projet des radios
communautaires est une initiative à saluer, la renaissance des radios
sera fonction de la révision de la politique de l'UNESCO. Laissons
à cet effet s'exprimer notre promotrice : « l'UNESCO est le
père et la mère des radios. A Sa'a, elle a été
confiée à une association qui n'y voit pas grand
intérêt. L'UNESCO ne devrait pas laisser tomber le projet. Elle ne
devrait pas s'arrêter à ces deux ans, il faut qu'elle continue
à aider ». Aussi va-t-elle par exemple suggérer qu'une
rubrique soit au moins prise régulièrement par l'institution
spécialisée des Nations unies. En plus, une autre proposition de
la part d'un responsable d'une autre radio sera lancée en l'endroit de
l'UNESCO en vue de réviser sa politique de « dissémination
» des radios qui entraînerait également une réduction
de l' « enveloppe », pour se consacrer aux programmes
rentables62. Mais pour bon nombre d'observateur, une bonne part de
responsabilité revient au Gouvernement de camerounais ! C'est pourquoi
il nous a paru nécessaire de remonter au niveau de
Yaoundé63, afin de voir comment sont perçues les
radios communautaires.
PARAGRAPHE II : LES RADIOS COMMUNAUTAIRES DANS LES
STRATÉGIES RESPECTIVES DU CAMEROUN ET DE L'UNESCO : TENTATIVE
D'EXPLICATION
62 Nous nous sommes juste proposés de
reproduire les raisons et attitudes déployées par les
différents acteurs. Cela permettrait, à notre avis, de rapprocher
les analyses de la sociologie des organisations, notamment de Crozier, du
contexte africain.
63 Principal centre d'impulsion de la
coopération, car c'est en son sein que l'on retrouve les principales
institutions en charge de la promotion du projet ; à savoir le MINCOM,
le Bureau régional et la Commission nationale pour l'UNESCO.
A. LES RADIOS COMMUNAUTAIRES VUES DE YAOUNDÉ :
UNE PLACE RÉSIDUELLE DANS LA STRATÉGIE COMMUNICATIONNELLE DU
CAMEROUN
1. LES RADIOS COMMUNAUTAIRES DANS LA NOUVELLE VISION
DU NEW DEAL COMMUNICATIONNEL CAMEROUNAIS : UNE STRATÉGIE QUASI
INEXISTENTE
Deux axes stratégiques majeurs sous-tendent la nouvelle
politique communicationnelle du Cameroun, à savoir : l'accroissement de
l'offre d'information, et le renforcement des moyens de diffusion et de
réception de l'information intra et extra muros. De
ces principaux axes, ressortissent cinq objectifs stratégiques :
renforcer et opérationnaliser les potentialités de la presse
nationale afin que celle-ci informe totalement (n°1) ; renforcer
l'encadrement qualitatif de la production médiatique (n°2) ;
améliorer l'efficacité de l'Administration de la Communication
(n°3) ; assurer la réception du signal Radio et TV de la CRTV
(n°4) ; enfin, mieux encadrer techniquement l'audiovisuel (n°5).
En scrutant de près les actions opératoires
relatives à ces objectifs, l'on se rend immédiatement compte
qu'il n'existe aucune perspective de partenariat avec les secteurs
privée et communautaire. Alors qu'il ne fait aucun doute que la
réalisation de la « société du savoir » passe
par une mobilisation concertée des actions des différents acteurs
concernés, voilà que les autorités du Ministère en
charge de la communication, dans une optique monopolistique, nous
présentent l'avenir du secteur communicationnel dans une perspective
solitaire. Alors qu'ils ont le devoir d'encadrer la presse privée, afin
d'en faire des partenaires acquis pour une même cause qui ne peut
qu'être bénéfique à la société toute
entière, nos pouvoirs publics semblent plutôt leur regarder sous
un oeil si non d'adversité, du moins d'inimitié. Seuls sont pris
en compte ici l' « amélioration quantitative de l'offre
d'informations du service public de la communication », ainsi qu'un
renforcement de la coopération avec des structures étatiques
telles : CAMTEL, MINEFI, ... Or, notre conviction est que tout en respectant
cette stratégie, un renforcement des capacités de la presse
privée améliorerait considérablement l'environnement
communicationnel camerounais. L'heure est peut-être venue où les
autorités devraient arrêter de regarder la presse privée en
chien de faïence ! Il en va du devenir de notre société.
2. UNE IMPORTANCE RELATIVE AUX YEUX DES RESPONSABLES DE
LA CAPITALE POLITIQUE DU CAMEROUN ?
La Commission nationale camerounaise pour l'Unesco en tant
qu'organe de relais joue un rôle essentiel dans le système des
relations établies entre le Cameroun et l'UNESCO. Elle constitue
à cet effet la courroie par excellence de transmission qui relie
l'institution spécialisée aux différents ministères
concernés par l'action de l'UNESCO au Cameroun. En ce qui concerne le
secteur de la communication, le gouvernement camerounais est
représenté par le MINCOM. Qui plus est l'Accord Cadre,
document de base renseignant sur le véritable statut juridique des
radios communautaires, est signé entre l'UNESCO et le MINCOM. Mais
à défaut de l'avoir, un entretien auprès de certains
responsables dudit ministère va nous permettre sinon d'avoir des
éléments d'informations, du moins de comprendre le statut des
radios rurales vues d' « en haut ».
A la question de savoir le rôle joué par le
MINCOM, représentant de l'État camerounais, dans le programme des
radios communautaires, ce responsable de la Direction des technologies et de la
communication nous interpelle d'emblée sur le fait que son
ministère n'est qu'un « facilitateur », le promoteur de la
radio et l'UNESCO s'occupant de l'essentiel. Le statut juridique, poursuit
notre interlocuteur, est celui de la loi de 1990 sur la libéralisation
de la communication, et son Décret d'application celui du 3 avril 2000,
relatif à la création d'entreprise audio visuelle. Peut-on dans
ces conditions considérer qu'il existe un réel statut juridique
relatif aux radios rurales ?
Fort heureusement, cette équivoque va être
levée par un autre responsable de la Direction de la communication
privée qui nous explique que « les radios communautaires n'ont pas
de statut juridique, mais relèvent du Décret de 2000. Ils
appartiennent au secteur privé communautaire, et peuvent ainsi
bénéficier du financement alloué à la presse
privée ».
De manière plus précise, le financement des
radios communautaires rentre dans le cadre des 250 millions de francs CFA,
alloués à la presse écrite dans son ensemble, d'où
une grande sélectivité. Or ceci nécessite le suivi de
toute une procédure, la Direction des technologies et de la
communication ne s'occupant que de la faisabilité technique : un
comité technique interministériel étudie le dossier et
donne son avis, avant qu'il ne soit transmis au Conseil national de la
communication, via le premier ministère. Après l'avis du Conseil,
le ministre de la communication en toute « souveraineté »
décide de donner ou de refuser une licence.
En attendant, la radio de Mbalmayo continue à
fonctionner avec des attestations, la communication privée supposant des
taxes à la CNPS. Sans faire abstraction du fait que l'aide
accordée par le MINCOM est assez minorée ici, il faut ajouter ce
problème : la production des affiliations à la CNPS pour avoir
accès à l'aide accordée à la presse privée
ne relève pas ici de l'évidence. Surprenant tout de même
lorsqu'on sait que l'information diffusée par ces radios est «
utile et facilement utilisable », en même temps qu'elle permet de
toucher les couches sociales les plus vulnérables. Inquiétant
également lorsque l'on observe que Mbalmayo est l'unique radio ayant
été accompagnée (sur les 21) par l'UNESCO pendant deux
ans, dans un environnement où le « Gouvernement camerounais ne fait
rien ». Étonnant enfin quand on apprend qu'en Afrique de l'Ouest,
où l'esprit communautaire est très développé, le
programme des radios rurales est une vraie réussite du fait de leur
nombre sans cesse croissant, et parce qu'elles sont de plus en plus
considérer comme des partenaires à part entière de
développement. Or, au Cameroun où survit de manière
anachronique des relents clientélistes, le programme des radios
communautaires s'apparente plutôt à une « affaire de famille
».
De ce qui précède, tout semble porter à
croire que le Gouvernement camerounais n'accorde pas un intérêt
significatif à la promotion des radios communautaires. Absence
d'intérêt qui est sans rappeler le rapport d'adversité qui
lie la presse privée à la presse écrite, aversion qui
elle-même est sans rappeler la difficile ascension de la
société civile au sein d'un contexte monopolisé par la
société politique. Ce n'est pas le fait d'un hasard que le chef
de station de Mbalmayo porte désormais ses espoirs au processus de
décentralisation qui de son avis amènerait peut-être le
MINATD à obliger les communes à soutenir les radios
communautaires, les deux devant travailler ensemble. Un regard attentif sur
l'opérationnalisation du processus de décentralisation, surtout
dans la place accordée à un véritable «
développement participatif », autorise tout de même à
être prudent. Une réalité reste par ailleurs certaine : le
financement de ce projet n'aurait permis qu'une atteinte partielle des
objectifs fixés ! La responsabilité de l'UNESCO ici est toute
aussi certaine.
B. UN `PROJET PHARE' SANS PLAN D'ACTION COHÉRENT
AUPRES DE L'UNESCO
Considéré comme un projet phare dans le cadre du
33C/5, les médias communautaires sont perçus par l'UNESCO comme
un catalyseur du développement et du changement social. Il s'agit en
effet d'un outil important qui répond aux besoins d'information et de
communication des communautés marginalisées et
pauvres, tant rurales qu'urbaines, auxquelles ils permettent d'accéder
à l'information et aux connaissances, y compris à des contenus
locaux et du domaine public, qui peuvent améliorer leur participation
à la prise des décisions locales.
Partant d'un amer constat selon lequel les infrastructures en
matière de télécommunication et de diffusion de masse sont
peu ou pas développées, l'analphabétisme persistant et la
formation à l'utilisation des TIC inadéquate, quand elle n'est
pas carrément absente, l'UNESCO s'est donnée pour mission «
de promouvoir la libre circulation de l'information, des connaissances et des
données, d'encourager la création de contenus diversifiés,
de favoriser l'accès universel à l'information et aux moyens de
partage des connaissances, tout en veillant au renforcement des
capacités en matière de communication et d'information
nécessaires à une participation effective des communautés
et des citoyens à la vie démocratique des sociétés
» (31 C/4). Aussi conformément aux objectifs définis dans la
résolution du Conseil économique et social des Nations Unies de
juillet 2000 et à ceux de la Déclaration de l'Assemblée du
Millénaire, l'action de l'UNESCO contribuera à la création
d'un partenariat stratégique international pour renforcer les moyens de
communication, combler le fossé numérique et instaurer une
société du savoir ouverte et sans exclusive.
Ce faisant, la Stratégie à moyen terme de
l'UNESCO pour 2002-2007 pour la Région Afrique consistera à
contribuer à la paix et au développement humain à
l'ère de la mondialisation par l'éducation, les sciences, la
culture et la communication. Pour y parvenir, l'Institution
spécialisée des Nations unies va mettre une douzaine d'objectifs
stratégiques en place, parmi lesquels la communication va occuper trois
volets : encourager la libre circulation des idées et l'accès
universel à l'information (objectif stratégique n°10),
promouvoir l'expression du pluralisme et de la diversité culturelle dans
les médias et les réseaux d'information mondiaux (objectif
stratégique n°11), enfin, assurer pour tous l'accès aux
technologies de l'information et de la communication, en particulier dans le
domaine public (objectif stratégique n°12).
Mais force est de remarquer qu'en dépit d'un appel
à une implication véritable de la société civile et
des ONG, les médias communautaires ruraux ne bénéficient
véritablement pas d'un statut particulier permettant un plan d'action
lisible et efficient à leur égard. Certes, une lecture attentive
des objectifs stratégiques sus-mentionnés laisse percevoir de
manière parsemée des indications du genre : « en partenariat
avec les organisations professionnelles, des politiques et des
stratégies seront élaborées pour la production et la
diffusion des programmes audiovisuels adaptés aux besoins des
différents publics cibles (les femmes et les
jeunes notamment) et répondants aux
préoccupations des groupes spécifiques », ou encore «
on s'emploiera en outre à développer la communication et
l'information dans les zones rurales et dans les régions
défavorisées de manière à accroître la
participation sociale des populations concernées, et à promouvoir
la création des médias communautaires(...), notamment dans le
cadre de programmes de développement ou de lutte contre la
pauvreté ». En réalité, ces indications ne rentrent
pas dans une stratégie spécifique précise, le plan de
route n'étant pas précisé. Mieux encore, il demeure
quasiment inexistant dans la nouvelle stratégie camerounaise de
développement de la communication. Tout ceci élude en outre un
autre handicap.
D'après certaines sources, l'UNESCO semble s'appuyer
sur des élites politiques pour réaliser le projet des radios
communautaires. Ce qui en soi poserait aucun problème si le statut
juridique était bien clarifié, lequel statut parce que posant les
bases d'un cadre légale et impersonnel favorable à la
réalisation de l'État de droit, permettrait aux zones les plus
nécessiteux de pouvoir s'en procurer, sans intermédiaire d'un
quelconque « bras long ». Mieux, cet aménagement juridique
favoriserait l'émergence des institutions qui transcenderaient les
individus car, est-il fréquent de voir les faiblesses de ces entreprises
qui s'écroulent avec le départ ou désistement de ces
« personnalités ressources ». « Affaire de famille »
en ce sens que derrière la radio de Mbalmayo, gît l'ombre du
ministre délégué auprès des Assemblées,
ministre dont l'épouse occupe le poste de Présidente de
l'Assemblée générale. Il en va également de Mora
avec TALBA MALA, de Sa'a avec le rôle joué par l'épouse de
l'ancien ministre de la santé OLANGUENA, de Nanga Eboko avec BIDOUNG,
également ancien ministre. Le fait est que l'implication de ces
personnalités sape quelque peu l'esprit de participation pour faire
place à un certain attentisme. Or l'objectif, à notre avis, est
que les riverains prennent conscience de leurs responsabilités
respectives en vue de la production d'une oeuvre commune et utile. La
contribution des élites devrait s'aligner sur cet idéal, et ceci
sans contre partie. Car, à l'analyse, l'on observe que beaucoup de
radios connaissent des difficultés fonctionnelles importantes
après le désistement des grandes élites. Enfin, un exemple
à relever reste celui de la radio de Garoua, dirigée par une
femme, et dont nous saluons l'implication de la communauté dans le
fonctionnement, ainsi que les rôles respectivement joués par le
Lamido et la SODECOTON.
***** **
Du point de vue de Daniel Lerner, les techniques de
communication de masse contribuent à accroître la «
mobilité psychique » ou « l'empathie » qui constituent
des attitudes psychiques essentielles à la modernisation. (Rocher,
op.cit : 207) Seulement, une autre conception considère la
révolution communicationnelle actuelle comme la forme contemporaine de
domination la plus insidieuse et dangereuse pour les sociétés du
tiers- monde. Ce point de vue énoncé par NTUDA EBODE dans un
article intitulé De la décolonisation fictive à
l'hypercolonisation, par du déferlement d'Internet, de la
télévision par satellite et de la radio numérique, pour
indiquer que « la colonisation sous sa forme contemporaine prend davantage
la forme communicationnelle », d'où le concept d'hypercolonisation
désigne « cette nouvelle forme de domination qui tient l'univers en
tenaille ». C'est que de l'avis de notre auteur, ce nouveau visage de
l'impérialisme intensifie insidieusement l'impérialisme culturel
et social, d'où conditionne et perpétuent les formes politiques
et économiques de domination dans nos sociétés.
L'espoir porté sur les radios rurales communautaires se
focalise sur la conviction que situées en zones reculées,
celles-ci parce que moins exposées aux déferlements
communicationnelles sus cités peuvent constituer des facteurs de
régénérescence culturelles et endogènes essentiels
à la consolidation interne, laquelle est un préalable essentiel
à leur insertion dans la mondialisation (NTUDA et NSIZOA) Ce consultant
en Sciences sociales ne dit pas autre chose lorsqu'il affirme que « les
États africains gagneront à se résoudre à cette
vision d'essence et de finalité internes, préalable à
toute forme de crédibilité internationale. » (MBASSI, in
PONDI sous la direction de, 2005 :163) Il s'agit ici de la consécration
de l'approche en termes de two level game en politique
étrangère qui préconise une superposition entre les
intérêts intérieurs et les négociations
internationales. (Kessler, in Charillon sous la direction de, 2002 : 182) Enfin
si l'ère de l'information pour beaucoup constitue le produit de l'une
des plus grandes révolutions intellectuelles de l'histoire, le cours de
l'histoire ou la conduite des relations internationales ne sera plus
défini par le nombre de personnes ayant accès à
l'information, « c'est, et ce point est capital, l'analyse qu'elles en
font » (Kissinger)
Le développement des radios rurales et communautaires
est une initiative d'une importance si considérable qu'elle
nécessite la mobilisation de tous les acteurs dont ceux des zones au
sein desquelles doivent s'appliquer lesdits programmes.64 Qui plus
est le Cameroun de part sa position est tenu de jouer efficacement son
rôle de principal centre d'impulsion et de stimulation de la
coopération au sein de la sous région. Il convient de noter, dans
le domaine qui nous concerne, quelques initiatives à encourager : Dans
le cadre des activités de
64 Voir sur ce point notre analyse sur le
développement participatif
mise en place de la radio communautaire du Pool au
Congo-Brazzaville, un stage d'imprégnation organisé à
Mbalmayo en Mai 2008 a accueilli cinq animateurs initiés à la
gestion, à l'animation et à l'utilisation du matériel
technique d'une radio communautaire. Enfin dans le but de renforcer les
capacités des animateurs de radios communautaires rurales sur le
changement de comportement dans la lutte contre le VIH/sida en langues locales,
le Bureau de l'UNESCO a organisé un séminaire de recyclage
à Mbalmayo, de trente animateurs travaillant dans quinze radios
communautaires du Cameroun. (N°9 la lettre de l'UNESCO : 18) Au demeurant,
cette contribution, en insistant sur les difficultés fonctionnelles du
financement de certains projets de développement, consiste d'abord
à saluer le mérite des promoteurs et acteurs de ces
initiatives.
Au terme de cette recherche sur l'utilité d'une
coopération technique au sud du Sahara, il ressort que les
activités de l'UNESCO au Cameroun suggèrent deux observations :
premièrement en tant que « conscience du monde », la place de
l'UNESCO reste indéniable compte tenu du rôle sensibilisateur
joué par ses différents organes auprès de la
communauté internationale, sur les grandes questions humanitaires
à l'heure de la mondialisation. Que ce soit au sein de la
Conférence générale, du Conseil exécutif ou par
l'entremise des Bureaux régionaux, l'UNESCO joue un rôle
déterminant dans la sensibilisation, l'incitation et l'appui des efforts
des gouvernements nationaux engagés dans la recherche de la paix par le
développement. Aussi, dans un monde où l'ultra
libéralisme, associé à la raréfaction des
richesses, laisse percevoir une scène turbulente à l'interne
comme à l'externe, et où les pratiques monopolistes confinent
à l'hégémon culturel, si ce n'est individualiste, l'UNESCO
reste l'instance par excellence de régulation des
velléités des puissances étatiques à travers
l'affirmation de la diversité culturelle comme modalité de
régulation de la scène
internationale (Sindjoun, 2008) La mystique de
l'égalité souveraine entre les États au sein du
système international y est également entretenue. Les nations du
Sud se sentant même parfois privilégiées par rapport
à leurs homologues du Nord, ainsi que l'atteste la nouvelle politique de
l'UNESCO en marche depuis près d'une décennie, où la
priorité semble être accordée à la
décentralisation et à l'Afrique65.
Au Cameroun, comme partout ailleurs en Afrique, la
sensibilisation opérée autour des problèmes relatifs
à l'éducation, à l'égalité des genres, aux
droits de l'homme, à la recherche scientifique et technologique,
à la sauvegarde du patrimoine culturel et enfin, à la
vulgarisation des moyens de communication auprès des masses, constitue
déjà un aspect significatif de l'importance de l'UNESCO au sud du
Sahara. La mise sur agenda international de ces différentes questions
qui permet également d'engranger des financements auprès des
partenaires financiers, afin d'appuyer les efforts nationaux dans le but de
venir à bout de ces problèmes, se présente aussi comme une
victoire, fut-elle partielle, des thèses de David Mitrany relatives
à la pacification du système international par le biais des
organisations à vocation technique. C'est entre autres, l'une des
raisons majeures qui fait dire aux acteurs nationaux et internationaux en
charge de ces relations que le Cameroun et l'UNESCO entretiennent à n'en
point douter, « une coopération fructueuse ».
Sauf que c'est dans la mise en pratique, c'est-à-dire
au niveau de l'opérationnalisation de ces différents programmes
de développement que le fonctionnalisme techniciste de Mitrany commence
à présenter des signes d'essoufflement. Car si l'histoire «
naturelle » de l'UNESCO nous présente le retrait de certaines
nations à l'instar de l'Afrique du Sud comme le fait de
l'inadéquation du système d'apartheid de l'époque aux
idéaux de l'Organisation, tel n'est pas le cas avec les Etats-Unis et
l'Angleterre, dont les retraits pour être le fait des raisons
idéologiques et politiques, semblaient résulter de la
mésentente sur la mise en oeuvre de certains programmes liés au
domaine de la communication66. Dans le même sillage, mais dans
un tout autre aspect, les difficultés de mise en oeuvre des projets sont
fréquentes en Afrique ; ce qui nous conduit à l'autre observation
essentielle.
La deuxième remarque que l'on fait à propos des
relations Cameroun-UNESCO est que l'utilité de l'institution
spécialisée des Nations unies en Afrique semble quelque peu
sapée au niveau de l'opérationnalisation des programmes de
développement savamment définis au sein des « grandes
instances ». Ceci autorise à relativiser la pertinence du
concept
65 Cela ne va pas de soi en pratique, peut-être.
Il reste quand même que cet argument tient en théorie. Il tenait
même davantage aux lendemains des assises sur l'EPT et les OMD. Voir
également nos développements sur la politique de
coopération de l'UNESCO.
66 Ces deux Etats ont rejoins l'organisation par la
suite
de « coopération fructueuse » très
souvent convoqués par les différents acteurs pour désigner
la nature des liens existants au sein des deux organes. Il est vrai, et l'on ne
le dira jamais assez, que l'UNESCO n'est pas un bailleurs de fonds, et ne
pourrait par conséquent réellement assumer seule cette lourde
tâche qui consiste à miser sur l'esprit des hommes pour construire
la paix au travers des projets de développement relatifs à
l'éducation, la science, la culture, la communication et même les
droits de l'homme. Il est également vrai, et cela va de soi, qu'elle
n'est pas une organisation opérationnelle à l'instar du PNUD qui
dans le système onusien, dispose des coudées franches à
même de réaliser des projets de développement,
comparativement aux autres institutions. Il reste néanmoins, et cela
s'est toujours révélé au cours de son histoire, que
l'UNESCO en tant qu'instance par excellence de coopération
intellectuelle à l'échelon international, et en tant que chef de
file des programmes relatifs à ses domaines d'activités, s'est
toujours montrée compétente dans la mobilisation des financements
provenant des partenaires diversifiés67. Aussi,
l'opérationnalité de l'UNESCO est reconnue par le fait qu'une
panoplie de programmes est réalisée sous son égide.
La difficulté, en réalité réside
dans la qualité des rapports de l'UNESCO avec les autres acteurs,
principalement les États et la société civile. Mais aussi
dans sa nature même en tant qu'institution intergouvernementale qui
n'échappe pas aux couacs internes à ces organes. « Sorte
d'idéologie en action, d'utopie en marche ou d'idéalisme
pragmatique » (Sur, 2000 : 306), l'ambiguïté de l'UNESCO est
fort significative dans sa réalité bureaucratique qui est une
construction d'acteurs confrontés aux logiques de la structure. Une
telle bureaucratie à certains égards peut dégrader
l'efficacité de l'idéologie de « paix » en captivant
l'organisation vers ses « propres problèmes internes, de survie et
de fonctionnement » (idem) ; lesquels problèmes absorbent une part
significative de l'énergie de l'UNESCO au détriment des objectifs
définis et des engagements pris vis-à-vis de la communauté
internationale. Qui plus est l'existence de l'UNESCO, comme tout autre organe
intergouvernemental, témoigne simultanément de l'intensification
des relations internationales et de la difficulté des États,
surtout en Afrique, à surmonter les différents obstacles
liés à leur propre développement. Or, la
caractéristique centrale de l'UNESCO est sa « faiblesse d'ensemble
», dont les compétences, pouvoirs et moyens ne peuvent supplanter
les velléités des États eux-mêmes. Aussi, il arrive
que d'autres acteurs exploitent, détournent et récupèrent
à leur profit, les projets et idéaux de l'UNESCO dont le
rôle souvent surestimé auprès de l'opinion publique.
67 La Banque mondiale, le FMI, l'Unicef, le PNUD et
d'autres institutions des Nations unies ont à un moment où un
autre été des partenaires financiers de l'UNESCO dans la mise en
oeuvre des programmes. Les institutions régionales telles l'Union
européenne ou la Banque Islamique de Développement, pour ne citer
que celles-là le sont également. Les contributions des
États membres, les différents dons des ONG internationales ou
nationales et biens d'autres donateurs privés viennent compléter
cette liste qui n'est pas exhaustive.
Ce qui, très souvent, conduit à de
fréquents désenchantements. C'est que l'utilité de
l'UNESCO est doublement sapée par les facteurs internes propres à
l'organisation, associés en Afrique aux dysfonctions de l'État
qui constitue son principal partenaire.
Acteur essentiel des relations internationales, et même
s'il n'est plus le seul, la responsabilité de l'État est
considérable dans la mise en oeuvre des programmes de
développement. D'ailleurs si le fonctionnalisme techniciste de Mitrany
part de l'incapacité des États pour promouvoir l'utilité
des organisations internationales à caractère technique, force
est de rappeler que le néofonctionnaliste Ernst Haas, tout en s'appuyant
sur les thèses de Mitrany, réhabilite le politique là
où celui-ci le supprime. Or, à l'analyse, l'État n'est pas
seulement le premier partenaire de l'UNESCO dans le cadre de la mise en oeuvre
des activités de développement au sein du territoire camerounais.
Il constitue également, et ceci est d'une importance notoire, le frein
par excellence à l'atteinte des buts visés, en complément
aux obstacles propres à l'institution spécialisée. Mieux,
les sociétés étatiques africaines, dans les domaines qui
nous incombent, résistent encore (mais pour combien de temps ?) à
la conception transnationaliste des «nouvelles relations
internationales» et semblent plutôt s'agripper sur certaines
conceptions réalistes68, elles-mêmes quelque peu
essoufflées. Au Cameroun en effet, la politique étrangère
demeure un « domaine réservé », l'individu (pas
vraiment émancipé) et la société civile (dont
l'émergence semble s'effectuée à la césarienne) ne
s'étant pas encore vraiment hissés au rang de partenaire
indiscutable et indiscuté de l'État sur des questions
sociales69.
Les dysfonctionnements observés dans la mise en oeuvre
de certains programmes au Cameroun ne sont pas seulement le fait des
organisations internationales n'ayant pas encore réussies à
transcender le stade d' « instruments intergouvernementaux sans
véritable autonomie ». Ces difficultés ne sauraient se
limiter uniquement à celles des ONG qui ici ne parviennent pas encore
à peser d'un poids nouveau en matière de développement et
de protection des individus. La relative utilité de l'UNESCO au sein de
la société camerounaise résulte peut-être de la
résistance des agents en charge des pouvoirs publics à
intégrer l'idée que le changement le plus évident «
concourt à faire de la scène mondiale contemporaine un ordre de
la souveraineté continuellement entravée, et concurrencé
par des individus de plus en plus émancipés » (Badie et
Smouts, op.cit: 228) En vérité, l'échec est surtout celui
du
68 Notamment celle qui remonte à Bodin sur
la « souveraineté dans l'État », à ne pas
confondre avec la propension à l'extérieur en vue de la
définition de l'intérêt nationale en terme de puissance,
telle qu'énoncée par Hans Morgenthau, et qui ici sont
minorés pour l'essentiel.
69 Et même si d'aucuns parviennent à
s'y hisser, cela est plus le fait de leurs compétences individuelles,
qui sont d'ailleurs récupéré par l'État dans sa
quête permanente de légitimité et de visibilité
sociale et diplomatique, qu'il n'est le résultat d'un changement
véritable de programme politique et diplomatique.
financement des projets sans prise en compte des
sensibilités et besoins profonds des riverains. L'échec de l'EPT
est d'abord celui de la conception et de la mise en oeuvre des PAN qui ignorent
ou minorent la réalité selon laquelle la majorité (5 6%)
des enfants de moins de 1 5ans est concentrée dans les zones
reculées70. Cet échec, et bien que l'on ne soit pas
encore en 2015, c'est celui de l'incapacité de l'UNESCO et de son
allié prioritaire (à savoir l'État) à produire des
plans d'action pertinents à même de juguler le
phénomène de croissance démographique à outrance,
où la population de moins de cinq ans (qui avoisine les 20%)
présage de l'ampleur de la demande potentielle des services
d'éducation, comme de santé et du travail, immédiate et
à venir (Abéga, op.cit : 17) C'est dire aussi que la «
défaite » de cette coopération peut être
désignée comme celle des programmes de financement qui sacrifient
le développement participatif et inclusif sur l'autel des pratiques
individualistes et hégémonistes des principaux agents qui tirent
et tissent les ficelles du couple UNESCO-Cameroun. Pourtant, la contribution
des autres catégories d'acteurs dont l'importance n'est plus à
démontrer, s'oppose à toute conclusion hâtive
déduisant à une quelconque fatalité.
En effet, les activités de l'UNESCO au sein de la
société camerounaise présentent aussi des signaux d'espoir
qui laisse penser que la réussite des programmes repose en fin de compte
sur la capacité des acteurs à concilier intérêt
général et intérêt individuel, ainsi que sur la
double maîtrise de l'environnement national et des opportunités
concédées par le système international. C'est le cas de la
« réussite du CIRCB » qui constitue le prototype même
d'un projet dont le mérite revient à la conjugaison, ainsi
qu'à la mise en congruence des acteurs dont la détermination et
la « maturité » associées à la « bonne
volonté » des pouvoirs publics ont permis la capture d'une
opportunité (FFA) au mieux de l'intérêt national, et ceci
pour le bien de la communauté entière71. C'est aussi
le cas du programme des radios rurales qui suivent bon an mal an leurs
activités (en dépit de la fermeture de certaines) grâce
à la détermination de certains acteurs qui, en dépit des
difficultés, continuent à lutter pour leur cause72.
C'est donc dire que la crédibilité et la légitimité
des relations Cameroun-UNESCO est aussi fonction de la capacité des
acteurs dominants à admettre que le développement durable passe
par l'inclusion du plus grand nombre et non l'inverse. Lequel
développement durable à en croire Rattana Hetzel, « exige de
croire que si l'on donne aux gens la possibilité d'agir, ils
70 Et l'on pourrait même affirmer sans grand
risque de se tromper que certains dirigeants des zones rurales ne sont
même pas au courant des programmes EPT et des réformes
administratives y attachées. C'est le cas de nombreuses écoles
publiques des villages au Sud Cameroun où l'on parvient encore à
lire `MINEDUC' au lieu de `MINEBASE' sur les plaques d'identification.
71 Encore qu'il est encore un peu tôt pour
conclure sur l'opportunité et l' « intentionnalité »
véritables de cette initiative.
72 Nous pensons notamment à Angèle NKOUS
SOU de la radio de Sa'a et Irène MBAZOA de Mbalmayo dont le combat est
également celui de l'affirmation de la gent féminine au sein de
la société camerounaise.
pourront et sauront trouver des solutions créatives et
viables en faveur du développement de chaque individu et de la
communauté au sens large. » Mais, poursuit notre consultante des
Nations unies, « cela ne se fera que si les gens ont leur vie bien en main
et luttent avec obstination contre une structure du pouvoir qui
bénéficie d'une distribution inéquitable de ce même
pouvoir et des ressources disponibles. »73
Car une coopération fructueuse, en notre sens, n'est
forcement pas celle là où les objectifs escomptés sont
atteints « à tout prix » ; car la réalisation de
ceux-ci peut être fait au détriment de certaines couches sociales,
très souvent les plus démunies. C'est le cas avec la
réalisation du projet pipeline de Doba (Tchad) à Kribi (Cameroun)
qui a eu de sérieux « effets pervers » auprès des
populations riveraines74. Une coopération n'est pas forcement
fructueuse parce que les médias et/ou les autorités publiques la
considèrent comme telle. Le discours politique ne reflète que
très rarement la réalité, tandis que les articles des
médias brillent très souvent d'une absence criarde
d'objectivité, sinon de scientificité. Très souvent ces
productions médiatiques ne sont que le reflet d'une minorité qui
y trouve son « compte ». Aussi, lorsque que l'on s'engage à
une entreprise de « déchiffrage de l'actualité »
à la François THUAL, l'on se rend bien souvent vite compte que l'
« intentionnalité » des entrepreneurs ne reflète pas
toujours les objectifs déclarés.
C'est donc dire qu'une coopération fructueuse, au sens
où nous l'entendons, suppose la prise en compte au préalable des
intérêts de tous les acteurs concernés,
intérêts que l'on ne peut déterminer qu'après une
étude menée auprès de ceux-ci, intérêts dont
la somme constituera ce que Jean-Jacques Rousseau appelle « la
volonté générale ». Une telle coopération
s'inscrit dans la perspective du développement dit « participatif
» qui intègre les populations cibles à la mise en oeuvre des
programmes, afin que celles-ci soient des acteurs de leur propre changement et
non des simple bénéficiaires, tant il est vrai que « vivre
c'est participer ». Dans une telle coopération également,
les notions comme l' « aide » sont dépourvues de sens dans la
mesure où il s'agit d'une collaboration en vue de participer à
une oeuvre commune. Une coopération fructueuse, en un mot, c'est celle
qui aboutit à la réalisation de l'homme intégral.
En tout état de cause, l'État, même s'il y
prétend encore, n'a plus le monopole de la socialisation des relations
internationales qui, résultent progressivement de la conjugaison des
relations individuelles. C'est qu'à l'épaisseur historique, le
mouvement est enclenché. Et la turbulence ambiante au sein des
dynamiques sociales à l'échelon international s'oppose à
tout
73 Citée par Bertrand Badie et Marie-Claude
Smouts, 1999.
74 Yanick Nkuili (2006) a rédigé un
mémoire assez révélateur sur les répercussions
sociales des effets pervers du pipeline au Cameroun
pronostique quant à la cartographie future du
système mondial. Un fait semble pourtant certain. C'est que le devenir
historique des activités de l'UNESCO au Cameroun, comme partout ailleurs
en Afrique, sera fonction de la place accordée à chaque
individu.
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- Unesco, Évaluation des mécanismes de
coordination de l'EPT en Afrique Subsaharienne : Évolution et
perspective, EPT en Afrique 2007, 2007.
- Unesco, Rapport Mondial sur l'Education Pour Tous,
2008.
IV) SITE WEB CONSULTÉS
http://pages.infinit.net/sociojmt
www.unesco.org
http:
www.persee.fr
ANNEXES
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