Université Paris 7 Denis Diderot
U.F.R Géographie, Histoire, Science de la
Société
Master de Géographie, spécialité Tourisme,
Espaces et Sociétés
TOURISTICITE ET URBANITE
POUR UNE EVALUATION DE LA QUALITE DES LIEUX
Mathieu SOMBRET
Directeurs Rémy Knafou et Philippe Duhamel
La photographie de couverture est tirée du Blog de Seb (
http://seb.over-blog.com).
Je tiens à le remercier d'avoir accepté que
j'utilise une photo de ses pieds sur Time Square.
Pourquoi une telle photo ? Parce qu'elle est l'image d'un
touriste dans une métropole mondiale (si ce n'est La métropole
mondiale), pieds nus, donnant l'impression d'être à l'aise, comme
à la plage. Ici se mêle tourisme, métropole et bien
être.
Introduction
C'est l'urbanisation elle-même qui constitue une
maladie chronique dont le séjour au grand air serait le remède
chaque année renouvelée. [...] la vie artificielle
des villes, d'où les arbres, les plantes sont de plus en plus
chassés, appelle un retour instinctif vers les cadres qu'offre la
nature.
Georges Chabot, 1957, L'évasion urbaine
A New York, faites comme les New-yorkais.
Hélez un taxi uniquement si la lumière sur
le toit est allumée. Elle comprend trois ampoules ; si celle du
milieu est allumée, il est libre. Les lumières latérales
signifient qu'il n'est pas en service. Si elles sont toutes éteintes,
c'est qu'il transporte déjà un passager. Il n'y a bien que les
touristes pour héler un taxi dont toutes les lumières sont
éteintes !
Lonely Planet, 2007, New York
50 ans séparent ces deux textes, certes
différents par leurs auteurs, mais ils sont le signe d'un changement.
Quand le géographe Georges Chabot écrit son évasion
urbaine, nous sommes en pleine démocratisation du tourisme. Les
départs massifs sont perçus, par l'auteur, comme la
conséquence de la dégradation des conditions de vie dans les
villes. Le seul recours face à cette « maladie
chronique » est le retour
« instinctif » à la nature. Ne laissant pas
de grande liberté au touriste (puisque c'est son instinct qui parle),
celui-ci fuirait la ville pendant ses vacances. D'ailleurs l'auteur ne parle
jamais de la ville comme lieu de vacances puisqu'elle se vide durant les
congés et que « la vie ne tourne plus, dans les villes,
qu'au ralenti (p.8). Pourtant Georges Chabot avait conscience que toutes
les villes ne se vidaient pas au moment des vacances :
« Seuls certains centres de tourisme peuvent compenser les
départs par un nombre équivalent
d'arrivées » (p.8). Ce texte est intéressant car
il reflète une certaine pensée sur le tourisme à une
époque où la ville se faisait
« dépasser » par les vacances au bord de mer ou
à la montagne. Mais a-t-on vraiment fuit la ville ?
50 ans après où en sommes-nous ? La
majorité des touristes sont toujours des urbains et une partie d'entre
eux vont passer leurs vacances en ville, voir dans les très grandes
villes. Les métropoles mondiales comme New York, Londres ou Paris
accueillent chacune autant de touristes que des pays entiers. Les guides
touristiques offrent un large choix pour les villes du Monde et il est parfois
plus facile de trouver un guide pour une ville que pour le pays. Alors pourquoi
cet engouement pour les villes, ou tout du moins pour certaines grandes
villes ? Ne remet-il pas en cause l'idée répandue d'une
fuite de la ville, comme le disait déjà Chabot en 1957 ? Le
guide Lonely Planet nous donne peut-être un élément de
réponse lorsqu'il nous apprend à faire « comme
les New-yorkais ». En effet, des urbains veulent aller vivre,
pendant leurs vacances, dans la ville d'autres urbains et tentent de faire
comme eux. Et même si ce sont des urbains, avec leurs réflexes
d'urbains, une métropole comme New York a ses règles de vie que
l'on doit apprendre. Par conséquent, il n'est plus question de fuir la
ville ou « d'évasion urbaine », mais de
« tourisme urbain ».
Pourrait-on aujourd'hui écrire que les touristes
retournent à la nature par l'appel de leurs instincts ? Non, sauf
si l'on ne prend pas en compte que le tourisme urbain génère des
flux de population jamais atteint et qu'ils ne cessent d'augmenter, que les
retombées économiques pour les villes réceptrices sont
devenues une manne financière sûrement indispensable et que le
tourisme est pour ces villes une porte ouverte sur le Monde. C'est pourquoi ces
deux textes sont le signe d'un changement.
Néanmoins, Georges Chabot n'avait pas totalement faux
lorsqu'il écrivait que « le citadin se répand dans
la campagne mais il y apporte ses habitudes, sa mentalité, il les y
implante en quelque sorte » (p.8). Si le citadin - touriste -
apporte ses habitudes à la campagne, peut-il l'apporter à la
ville qu'il visite pendant ses vacances ? L'hypothèse serait de
dire que le touriste apporte dans ses valises sa vie urbaine, qu'il influence
son lieu de séjour et en retour son lieu de résidence permanent.
Par sa venue, et par son retour (chez lui), le touriste influencerait les lieux
pour deux raisons. D'abord son lieu de séjour par son regard, ses
valeurs, ses pratiques, parce que lui aussi habite (temporairement) le lieu.
Ensuite par son expérience touristique, qui peut-être
considérée comme un projet existentiel1(*). Le touriste va influencer son
propre lieu de vie, avec ce qu'il rapporte de son voyage, aussi bien
matériellement que symboliquement. C'est donc un véritable
« habiter touristique» de la ville qu'il faut
étudier.
C'est là un des enjeux de travailler sur le tourisme
urbain, celui de l'influence du tourisme sur la ville, autrement dit son
impact. Cette transformation influence la ville dans ses
caractéristiques, c'est-à-dire dans sa qualité de lieu.
Quels sont les transformations et les enjeux du tourisme pour la ville ?
Comment le tourisme transforme la qualité des lieux ? Est-ce que la
qualité joue un rôle dans la venue des touristes ? Comment
peut-on évaluer cette qualité ?
L'objectif de ce travail est d'essayer d'apporter une nouvelle
façon d'étudier le tourisme urbain, tout en pensant le tourisme
et la ville comme deux phénomènes liés entre eux. Les
études précédentes ont trop souvent pensé le
tourisme et la ville comme deux phénomènes à part. A nous
de remédier à cette lacune.
Pour cela nous utiliserons une notion, la qualité. Le
but est de montrer qu'en liant tourisme et ville on peut
réfléchir, selon une approche originale, sur la qualité
des lieux.
La première partie de ce travail sera consacrée
à la bibliographie critique sur le tourisme urbain. Elle montre les
nombreuses lacunes sur l'étude du tourisme urbain, le faible
intérêt pour les transformations qu'engendre le tourisme sur la
ville et surtout l'absence de la notion de qualité.
La deuxième partie présente la
problématique et les enjeux du projet : travailler sur la
touristicité et l'urbanité pour évaluer la qualité
des lieux.
Enfin, dans la dernière partie, nous aborderons
l'approche méthodologique pour mettre en place ce travail de
recherche.
Première partie : Bibliographie critique sur
le tourisme urbain
Ce premier travail expose nos lectures, ce qui peut
paraître redondant, mais c'est la base d'un travail de recherche. Cela
permet à la fois de mettre en place les barrières pour notre
problématique et de voir ce qui a déjà été
fait pour connaître les lacunes sur le sujet. L'organisation est faite
par ordre chronologique des textes (ouvrages, revues, articles), pour permettre
de voir une certaine évolution (ou non ?) des écrits sur le
sujet.
Comment les liens entre ville et tourisme sont traités
dans la littérature scientifique ? Comment appréhende-t-on
les transformations que le tourisme engendre sur la ville ?
Mullins P., Tourism urbanization, in International
journal of urban and regional research, Vol. 15, n°3, 1991, pp.326-342
Cet article de Patrick Mullins ne concerne pas directement le
tourisme urbain, mais l'urbanisation due au tourisme. Il est néanmoins
très intéressant et apporte une réflexion passionnante sur
la question du tourisme en tant que producteur d'espace urbain.
Pour Mullins, la ville touristique est une nouvelle forme
d'urbanisation. Ainsi il distingue la ville du XIXe siècle, fille de la
production des biens et du commerce, de celle du XXe siècle, ville de la
consommation. Selon l'auteur, l'urbanisation due au tourisme est la forme la
plus dramatique de la nouvelle urbanisation car elle n'est fait que par et pour
le plaisir (pleasure), c'est-à-dire la consommation et les
loisirs. Mais en quoi est-ce dramatique ? N'est-ce pas plutôt le
point de vue de l'auteur qui condamne le plaisir et la consommation ?
Peut-on considérer les loisirs et le tourisme comme les usines et les
mines du XIXe siècle, c'est-à-dire comme des facteurs
d'urbanisation2(*).
Après avoir définit des concepts tel que
« consumption », « postmodern
city », « mass consumption »,
l'auteur met en place un outil d'analyse pour étudier le
développement de la Gold et Sunshine Coast en Australie. Ces villes sont
différentes des autres villes autraliennes, parce qu'elles sont le fruit
de la consommation et des loisirs (« consumption of
pleasure »). Elles se caractérisent par une rapide
croissance de la population et des emplois, par la création d'une classe
moyenne et d'une organisation résidentielle des villes.
Ce texte est avant tout un travail conceptuel sur la notion de
« tourism urbanization » qui ouvre la
réflexion sur notre société de consommation et de
loisir.
Law C. M., 1993, Urban tourism. Attracting vistors to
large cities, Mansell, Coll. Tourism, leisure and recreation, Londres, 189p.
Dans le premier ouvrage de synthèse sur le sujet en
Anglais, Law tente d'évaluer le secteur du tourisme dans les grandes
villes, principalement d'Amérique du Nord et d'Europe occidentale. Il
part du constat d'un rapide développement du tourisme urbain depuis les
années 1980, suite au déclin des activités
économiques existantes. Le tourisme est encouragé, car il est
perçu comme une dynamique pour revitaliser en partie la ville et
régénérer des secteurs. Ce changement d'attitude du
tourisme vis-à-vis de la ville pousse les villes non touristiques, comme
les villes industrielles, à développer du tourisme. Cette
reconversion des villes industrielles en crise par le tourisme est un
thème que l'auteur va développer tout au long de son ouvrage.
Le tourisme urbain est définit comme un ensemble
d'activités reliées entre elles qui permettent aux villes
d'attirer des visiteurs, ce qui couvre aussi bien le « tourisme de
loisirs » (leisure tourism) que le « tourisme
d'affaire » (business travel).
Law propose un travail sur le tourisme d'un point de vue
surtout économique, principalement sur les équipements. L'urbain
est vu comme une ressource qu'il faut valoriser pour attirer les
visiteurs : « Some cities are at the top of a hierarchy in
terms of their ability to attract tourists because they are well endowed with
the tourist ressources mentioned above. Other cities are lower in the hierarchy
because they have fewer resources, but they may wish to develop the tourist
industry.» (p.14). Tout d'abord il n'existe de ressource
« que si elle est connue, révélée, et si
l'on est en mesure de l'exploiter ; sinon ce n'est pas encore une
ressource » (Brunet, 1993, p.433). Ensuite il n'est pas
pertinent de parler de « ressource » pour les villes en bas
de la hiérarchie touristique, ni même pour celles d'en haut. Qui
aurait pu croire au succès du musée Georges Pompidou à
Beaubourg, tant son architecture a été
décrié ? Car il est plus facile de parler de
« ressource » ou de « potentiel »
touristique quand il y a du tourisme3(*).
Basant son travail sur cette idée de
« ressource » à développer, l'auteur va
écrire quatre chapitres sur les équipements produits,
revalorisés ou utilisés par et pour les touristes. Ces
équipements sont perçus comme le moyen d'améliorer
l'attractivité touristique des villes, aussi bien pour les touristes que
pour les hommes d'affaires et autres congressistes.
Le chapitre X, au titre intéressant
« Assessing the impact of tourism in cities »,
n'est en vérité qu'un chapitre de méthodologie. Il revient
sur la difficulté d'évaluer l'impact du tourisme, puisque
celui-ci se situe dans différents secteurs (hôtels, restaurants,
transports, magasins, etc.). Pour essayer d'en évaluer l'impact,
l'auteur propose une méthodologie en trois étapes :
évaluer le nombre de visiteurs, la consommation de ces visiteurs
(directe, indirecte et induite) et le nombre d'emplois créés.
Cette méthodologie correspond bien au positionnement scientifique de
l'auteur et elle semble pertinente. Pourtant elle ne suffit pas pour
évaluer correctement l'impact du tourisme. Quels sont les impacts sur
l'espace de la ville ? L'urbanisme est-il modifié par le
tourisme ? Comment la politique locale réagit-elle ? L'ouvrage
n'y répond pas, même si à la fin du chapitre nous trouvons
quelques lignes sur les changements d'image que le tourisme peut apporter, mais
sans exemples. De même pour les effets négatifs que peut engendrer
le tourisme : saturation des routes et de l'espace public, pollution de
l'air, augmentation des déchets dans les rues, attirance des criminels,
etc. Tout cela en quelques lignes, sans exemples, ni argumentation. C'est bien
trop court pour une évaluation des impacts du tourisme.
Cahiers Espaces, Tourisme Urbain, Décembre 1994,
n°39
La revue Cahiers Espaces réalise avec le concours de
l'AFIT leur premier numéro sur le tourisme urbain en 1994,
répondant à une lacune dans la littérature
française sur ce sujet. Ce numéro propose 25 articles
(universitaires et professionnels), réparties en quatre grandes parties.
Nous n'étudierons pas tous les articles, sauf quelques uns qui nous
intéressent pour notre sujet.
Commençons par l'introduction écrite par
Claudine Barçon (AFIT) pour son « Plaidoyer pour une ville
réunifiée ». Selon l'auteur, le tourisme urbain
est sans doute l'une des formes les plus anciennes de l'activité
touristique. Mais le développement des vacances et des congés
payés ont engendré un tourisme fondé sur le refus de la
ville. On partait chercher l'air pur et le calme, loin des villes
polluées et saturées. Cette idée, selon laquelle le
touriste fuirait la ville, était déjà
énoncée par Georges Chabot dans L'évasion
urbaine, en 1957 (cf. précédent). Cependant, depuis une
vingtaine d'années, les réhabilitations faites sur l'habitat, les
bâtiments remarquables, les aménagements dégageant les
centres-villes du trafic, accompagné de l'augmentation des courts
séjours, du fractionnement des vacances, du regain
d'intérêt pour le patrimoine et l'engouement pour les
manifestations événementiels, ont engendré un retournement
bénéfique pour la ville, qui est de nouveau attractive.
Dans un paragraphe intitulé « Des
touristes qui sont d'abord des citadins », l'auteur
écrit : « Le lieu commun de notre
société de loisirs est une réalité qui rend la
séparation entre vie quotidienne de travail et « vie de
touriste » moins étanche. Le « passe
muraille » touristique peut être quotidien, par exemple, pour
un voyageur d'affaires, pour peu que la ville lui soit offerte »
(p.17). Cette affirmation n'est pas si exacte, surtout en prenant l'exemple
d'un homme d'affaire qui doit sûrement faire la différence entre
un voyage imposé pour son emploi et un voyage choisit en famille. De
plus la recherche actuelle nous montre bien que les critères de
différence entre le tourisme et les autres formes de mobilité
sont le choix et le hors quotidien, comme le montre le tableau suivant.
Document 1
|
Lieu du quotidien
|
Lieu du "hors quotidien"
|
Pratiques du quotidien
|
Mobilités liées au travail
|
Voyages d'affaires
|
Pratiques du "hors quotidien"
|
Mobilités liées aux loisirs
|
Tourisme
|
|
Source: M. Stock (coord.),
2003, p.23
|
L'auteur considère la déambulation comme une
activité propre au tourisme et que celle-ci induit une consommation et
du temps de présence dans la ville. Même si elle n'emploi pas le
terme, le touriste habite la ville qu'il visite par sa
« consommation » et sa
« présence dans la ville »4(*). C'est un point
intéressant car cela considère le touriste comme un acteur,
capable d'influencer son espace (impact).
Dans une troisième partie, l'auteur nous explique que
la mise en tourisme minimale de la ville passe par deux critères.
D'abord la lisibilité, car un touriste a un temps limité pour
« comprendre la ville », aussi bien pour la langue
que pour le repère dans l'espace (facilité de se repérer,
de se déplacer). Ensuite l'accessibilité, car c'est le seul moyen
« de permettre l'utilisation maximum de la ville en tout lieu et
à toute heure » (p.19) et par conséquent de
maximiser son séjour dans la ville. Cette maximisation du séjour
veut aussi dire rentabilité pour la ville, par les retombées
économiques directes (emplois et ressources) et indirectes
(capacité, par l'image, à attirer des nouvelles entreprises) du
tourisme.
L'auteur en vient aux limites du tourisme urbain et surtout de
la mise en tourisme de la ville. Ainsi une mise en tourisme totale
entraînerait la mort du tourisme urbain, car la ville deviendrait son
propre musée. Par conséquent, « la
spécificité du tourisme urbain étant de ne jamais
être la mono activité de la ville où il
s'inscrit » (p.20). Cette phrase soulève plusieurs
questions : à quel niveau une activité est
considérée comme une mono activité ? Peut-on
considérer le tourisme comme une mono activité puisqu'il fait
appel à différents services (restauration, services aux
personnes, transports, hôtels, etc.) ? Existe-t-il une ville mise en
tourisme totalement ? Cela a-t-il entraîné une mort de son
tourisme?
Source : Direction du tourisme / Sofrès (SDT
2000), in Les clientèles du tourisme urbain, Direction du
tourisme, septembre 2002.
Sur la question du centre ville, l'auteur remarque qu'il est
proposé « aux habitants comme aux touristes, de retrouver
une identité par un ancrage dans le centre-ville. Les espaces publics
sont restaurés afin de composer une scène urbaine plus
attrayante » (p.48). Nous observons alors le lien
hypothétique entre l'urbanité et la touristicité d'un
espace. Une ville ayant une faible urbanité reçoit-elle des
touristes ? Est-ce que le tourisme apporte un surplus
d'urbanité ? Ce qui pose aussi la question de la centralité,
puisque le tourisme urbain est souvent conçu autour du centre des
villes. Le tourisme produit-il un regain ou un « transfert de
centralité » (Florence Deprest, 1997) pour le centre des
villes ?
Pour finir, nous remarquons bien que le tourisme et la ville
sont toujours liés entre eux lorsque l'auteur parle du besoin de
rencontre (« n'est-ce pas, en définitive, une
expérience collective que recherchent les touristes »
p.49), ou de la déambulation dans la ville (« le
déplacement en ville, qui se partage avec d'autres activités
[...] est un mode d'urbanité important, comme l'a bien
montré l'Ecole de Chicago » p.50).
On retrouve cette idée de lien entre urbanité et
touristicité dans l'article du professionnel Amaury de Varax
(pp.129-133), lorsqu'il énumère les conditions de réussite
du tourisme urbain : « Le tourisme dans les villes
dépend à la fois du niveau de leur dynamique économique,
de la richesse de leur patrimoine, de la qualité de leur environnement,
de la densité de leur vie culturelle, de leur capacité à
créer l'événement et de la qualité de leurs
infrastructures et structures d'accueil. (p.150) Mais l'auteur ne va pas
plus loin et ne donne aucun exemple. C'est bien dommage, car nous avons ici un
travail intéressant qui n'est à chaque fois que vaguement
évoqué. A nous maintenant de remédier à cette
lacune.
Cazes G. et Potier FR., 1996, Le tourisme urbain, PUF,
Coll. Que sais-je ? n°3191, Paris, 127p.
Voici le premier ouvrage de synthèse sur le tourisme
urbain en France, où les auteurs analysent la renaissance du tourisme
urbain en cette fin de XXe siècle. Le tourisme est devenu un
véritable enjeu économique et symbolique pour les villes.
La première partie signée Françoise
Potier5(*) est une
synthèse des différentes enquêtes sur le tourisme à
l'échelle européenne et nationale. Le but de cette
première partie est d'analyser les flux du tourisme urbain, leur
composition, les motivations et les pratiques des touristes en ville.
Après avoir définit les concepts
« imprécis » que sont le tourisme6(*) et l'urbain, l'auteur expose les
évolutions du tourisme, qui auraient contribué à
l'affirmation du tourisme urbain : on « part plus souvent,
moins longtemps et plus loin », la baisse des coûts de
transport et une nouvelle attraction urbaine (politiques volontaristes pour
rendre plus attrayant les centres-villes et renouveler leur image).
On retiendra surtout de cette première partie le
dernier chapitre où l'auteur propose une typologie des motivations et
des pratiques des touristes en ville. On notera une certaine confusion dans les
motivations et pratiques touristiques, puisqu'on y met tout ce qui bouge (dont
les « activités professionnelles »).
Néanmoins, cette tentative de typologie a le mérite d'exister et
permet une réflexion sur les pratiques touristiques.
Dans la deuxième partie intitulée
« Les enjeux économiques », Georges Cazes
expose les différents équipements réaliser dans le but
d'attirer les touristes vers la ville et les apports économiques de
l'activité touristique. Le tourisme est ainsi vu comme une alternative
économique pour les villes. Il permet une reconversion économique
par rapport aux industries traditionnelles (c'est une « industrie
sans cheminées »), il renouvelle l'image et
l'attractivité des villes
(« ville-vitrine ») et utilisé comme un
prétexte, le tourisme est un catalyseur pour les rénovations
urbaines. En utilisant de nombreux exemples, l'auteur tente de faire une
synthèse sur les équipements réaliser pour attirer les
touristes : hébergement, palais des congrès, centres
commerciaux, musées, parc d'attraction, etc. Le tourisme est à la
fois le prétexte de ces réalisations et permet une
diversification de clientèle pour rentabiliser ces équipements
aux coûts très élevés. Ce que l'on remarque dans ces
équipements, c'est la diversité des pratiquants : un palais
des congrès a une polyfonctionnalité importante, et c'est ici
l'une des difficultés pour analyser l'impact du tourisme. Le touriste
utilise des espaces utilisés par d'autres personnes.
C'est pour cela que l'auteur écrit, en parlant des
impacts économiques : « Apprécier
réellement l'efficacité de cet investissement, en prenant en
considération la totalité et la diversité de ses
retombées directes et de ses effets dérivés, demeure
extrêmement difficile, sans doute même actuellement
impossible » (p.81). Pourtant l'auteur n'hésite pas
à faire des estimations sur les retombées économiques du
tourisme urbain. Les chiffres fournis donnent presque le vertige, tant les
sommes sont énormes (en milliards de Fr pour les dépenses
touristiques). De plus, dans un contexte de chômage urbain, le tourisme
est aperçu comme un potentiel créateur d'emplois.
L'intérêt pour notre travail dans cette
deuxième partie est que le tourisme est à la fois un enjeu
spatiale (un palais des congrès, un centre commercial ou un parc
d'attraction marque fortement l'espace) et économique pour les villes
(en terme de retombées et pour rentabiliser les lourds investissements).
Néanmoins l'auteur appel à travailler sur « la
rentabilité de l'activité touristique, surtout par rapport aux
autres opportunités économiques des villes. Limité
à ce seul critère, le tourisme apparaîtrait sans doute
comme un choix onéreux » (p.86), cela reste
à prouver. Mais le tourisme urbain n'est pas qu'un apport
économique, il met aussi en jeu l'image de marque, le décor
urbain, la restauration du patrimoine et les équilibres spatiaux, ce que
l'auteur analyse dans la troisième partie.
Cette dernière partie nous semble la plus
intéressante pour notre travail, à la fois parce qu'elle discute
des conséquences spatiales du tourisme sur l'espace urbain, mais aussi
par son caractère polémique. Il souligne dès
l'introduction que « les transformations profondes et
spectaculaires qui affectent le décor et l'espace urbain, le contenu et
le contenant de la ville, mais aussi son attractivité et sa
signification, le tourisme joue un rôle croissant qu'il devient
injustifiable de négliger » (p.87). Il revient aussi sur
les difficultés d'identifier et d'estimer les retombées
spatiales, car les actions s'adressent à la fois aux touristes
potentiels qu'aux habitants permanents (une rénovation est-elle faite
pour les visiteurs extérieurs ou pour la satisfaction des
résidents ?). Cette dernière remarque est pertinente car
elle montre combien le tourisme peut être un enjeu pour les acteurs
locaux et soulèvent deux questions : est-ce la qualité
urbaine d'une ville qui engendre du tourisme (on satisfait la demande des
résidents et le tourisme suit) ou est-ce le tourisme qui engendre une
certaine qualité urbaine ? Se pose aussi la question de l'acceptation du
tourisme par les acteurs locaux, est-ce que le tourisme est une volonté
politique ouvertement affichée ou cachée ?
L'auteur ne répond pas à ces questions
(puisqu'il ne les pose pas) et c'est ici une carence sur cette question des
conséquences spatiales du tourisme.
Cazes va d'abord analyser le lien entre la valorisation du
patrimoine urbain et le tourisme. Il nous montre, grâce à de
nombreux exemples, comment ce processus de patrimonialisation et de mise en
tourisme des villes fonctionne (chap. I). Le tourisme récupère
des éléments du patrimoine, qui risquaient de disparaître
ou non, pour leur donner de nouveaux usages. Mais le tourisme n'est pas qu'un
révélateur du patrimoine, il produit aussi de nouveaux espaces
(chap. II). Par exemple la piétonisation des voies (devenue classique
dans les rues des centres-villes), qui par une touristification
« jugée abusive de ces voies - avec les risques de
saturation et d'insécurité bien connus - [...] a conduit
les riverains et les commerçants à recommander la
« réinjection » automobile » (p.96),
avec pour exemple la rue Saint-André des Arts à Paris. Certes
c'est une remarque pertinente, mais il existe sûrement davantage de rue
qui se piétonnise que de rue qui se
« dépiétonnise ». D'autres exemples sont
cités, comme les festival market place, les rénovations
et opérations urbaines effectuées par Barcelone pour les JO de
1992, les développements urbains périphériques autour des
grands parcs d'attraction à thème, etc.
C'est surtout le troisième chapitre qui est le plus
polémique de cette partie et c'est réellement dans celle-ci que
l'auteur analyse, à sa manière, les impacts du tourisme sur la
ville. Intitulé « Le tourisme dans la ville : un
territoire à partager, des flux à gérer »,
le titre pose d'embler un constat : touristes et résidents
partagent un territoire commun, « limité et
densément occupé » qu'est la ville. Selon
l'auteur, les flux importants de touristes peuvent entraîner dans le
tissu urbain des problèmes sérieux. Dans ce chapitre nous ne
verrons que les impacts jugés comme négatifs du tourisme sur la
ville. En effet, dans sa typologie des « effets
classiques », l'auteur nous parle de
muséification, d'artificialisation, de
répétition mimétique, de
déterritorialisation, du « trouble ressenti par
les visiteurs face à ces clone cities » (p.109), en
quelques mots, de la banalisation des villes par le tourisme. Mais alors
pourquoi choisir ? Pourquoi choisir entre Venise, New-York, Paris, Prague
si le tourisme « banalise les villes » ?
« Corollaire de la banalisation et de la
muséification, le deuxième risque découle de la tendance
à la monofonctionnalisation dans les secteurs urbains les plus fortement
touristifiés. » (p.109). La monoculture touristique est
souvent évoqué, mais il faut remarquer que cela ne concerne bien
souvent qu'une portion de l'espace urbain. Néanmoins, cela ne semble
convenir à l'auteur : « De façon
générale, les coeurs de villes historiques avec leurs rues
étroites et tortueuses, leurs plateaux piétonniers, leurs
commerces de luxe, leurs hôtels et restaurants de caractère, leur
patrimoine monumental mis en scène et en lumière, leurs parcours
de visite-découverte avec haltes photographiques recommandées
entrent dans cette logique de spécialisation fonctionnelle et de
ségrégation spatiale » (p.110). On ne remettra pas
pour l'instant en cause ce processus de monofonctionnalisation que le tourisme
peut entraîner dans certains cas, ce qui peut être une prochaine
recherche. Mais il faut le remettre dans son contexte et l'on sait que le
tourisme évite parfois à des centres-villes de mourir dans leur
léthargie (cf. Equipe MIT, Tourismes 2 pour Bruges). Ce n'est pas non
plus la seule activité « monofonctionnalisante »,
puisque c'est un problème que l'on constate dans des quartiers sans
grande fréquentation touristique7(*). Va plus loin en écrivant que
« la consommation touristique, dans les villes comme dans les
autres lieux où elle s'affiche, entraîne inévitablement
dans son sillage des phénomènes de parasitisme, de prostitution,
de délinquance de toute sorte » (p.111). On regrettera le
manque d'exemple après cette accusation qui me semble un peu
hâtive, ainsi que l'utilisation de l'adverbe
« inévitablement ». Ne mettons pas si vite
tous les maux de la ville sur le dos du tourisme.
Enfin de compte, ces quelques remarques sur les
« effets classiques » semblent tenir davantage
d'un avis personnel de l'auteur, même si celui-ci c'est
déchargé de la responsabilité de ces termes au
début de sa typologie : « Quelques termes sont
classiquement employés par les observateurs pour désigner les
processus » (p.108).
Nous serons encore plus sceptique pour la partie sur la
« capacité de charge », où il est question de
pression, de surcharge et de seuil-limite. Nous nous
baserons sur les travaux de Florence Deprest, où elle démontre
que la notion de « capacité de charge » est un
transfert des concepts pertinents des sciences exactes aux sciences sociales.
Mais cette notion reste floue dans son utilisation : « Il
s'agit de définir, à partir de ce que les utilisateurs ou les
gestionnaires considèrent comme acceptabe, un niveau maximum
d'utilisation du lieu. [...] L'acceptable est une notion très
relative. Elle est relative historiquement : ce qui était
acceptable pour le commun des mortels au Moyen Age est sans relation avec ce
qui est acceptable pour un être humain de cette fin du XXe
siècle » (1997, p.51).
Cazes G. & Potier Fr. (dir.), 1998, Le tourisme et
la ville : expériences européennes, L'Harmattan, Coll.
Tourisme et sociétés, Paris, 198p.
Cet ouvrage est tiré d'un colloque, « Ville
et Tourisme », organisé en Novembre 1996 par l'INREST et
l'ancienne équipe de recherche
« Tourisme-Développement ». Le but de cet ouvrage
est de dresser un état de l'art sur la question des rapports entre ville
et tourisme. Il fait appel à des auteurs venus d'horizons professionnels
et géographiques différents : professeur
d'université, consultant, professionnel du tourisme, Néerlandais,
Espagnol, Anglo-Saxon, etc.
L'ouvragere est composé de trois parties. La
première intitulée « La ville dans les
mobilités touristiques », tente de définir,
d'évaluer et de qualifier le tourisme urbain. Georges Cazes ouvre cette
partie en posant les « problématiques de
recherche » sur le tourisme urbain et montre qu'à travers
« la question apparemment triviale du tourisme urbain vient
[se] croiser des thèmes fondamentaux de la réflexion actuelle
sur la mobilité, l'urbanité, la culture, le patrimoine, la
capacité d'accueil des lieux et la gestion territoriale, la
recomposition des espaces et des réseaux urbains, etc., en contribuant
à éclairer certaines de ces
problématiques » (p.13-14). Ce premier chapitre peut
être vu comme une synthèse de la pensée de l'auteur (et du
Que Sais-je) sur le tourisme urbain. Il revient sur les
« nouveaux tropismes » vers la ville, les
stratégies urbaines pour le développement du tourisme ainsi que
les surcharges touristiques en milieu urbain. Il en est de même pour la
partie écrite par Françoise Potier, sur
« L'affirmation du tourisme urbain » (p.33-47) qui
tente, à partir d'une enquête nationale, d'évaluer
l'importance des flux touristiques des Français vers la ville et de
dresser un panorama des caractéristiques de ce marché.
Dans la deuxième partie, « Le patrimoine
urbain à l'épreuve du tourisme », ce dernier est
étudié comme une contrainte pour le patrimoine urbain. Il n'est
nullement question de dire que le patrimoine peut exister grâce au
tourisme ou parce qu'il y a du tourisme. Ici, le tourisme est une menace pour
le patrimoine. L'intervention de Nancy Bouché est sûrement la plus
marquante. Dans son texte intitulé « Tourisme et
patrimoine urbain : les grandes interrogations »
(pp.73-80), l'auteur se place du point de vue de la ville historique et du
patrimoine. Selon elle et selon ce point de vue, le tourisme urbain
« n'est qu'une activité par définition parasite,
car seconde, qui ne pourrait exister sans ce patrimoine »
(p.73). A cela on pourrait répondre que le patrimoine ne pourrait
exister sans le tourisme, car il est une source de revenu considérable
et sûrement indispensable pour la conservation et l'entretien de
celui-ci8(*). La suite est
une attaque constante du tourisme face au patrimoine urbain
considéré comme « un espace
fragile », comme certains auteurs considèrent le littoral
ou la montagne comme des espaces fragiles. Mais le sont-ils vraiment ?
Comment le patrimoine urbain peut il être fragile ? Pour Nancy
Bouché, ce n'est pas « seulement » la
pierre qui est menacée, mais « la survie des
habitants » de ces villes. Elle appelle à s'interroger
sur les incidences du tourisme urbain. A la fois sur les apports financiers et
économiques du tourisme pour une ville et sur l'impact du tourisme sur
le patrimoine urbain.
Le texte de l'universitaire Myriam Jansen-Verbeke est moins
virulent, mais pose « le problème de la capacité de
charge » en prenant pour exemple Bruges (Cf. précédent
pour la capacité de charge). Elle aussi utilise la population locale
comme argument pour l'utilisation de la capacité de charge :
« embouteillages, insuffisance des places de parking, zones
piétonnières encombrées [...], par-dessus tout
une impression générale de surpeuplement, conduisant
inévitablement à une certaine hostilité de la
communauté locale à l'égard du tourisme »
(p.91). Premièrement, pour un travail qui se voudrait sérieux, il
est déconseillé d'utiliser une notion aussi relative que
l'« impression » (chaque individu a son impression
du surpeuplement). Ensuite, cette « impression
générale de surpeuplement » ne conduit
peut-être pas « inévitablement »
à une hostilité de la part de la communauté locale. Car
qu'elle est cette communauté ? Est-ce les commerçants qui
vivent du tourisme ? La ville qui touche les taxes de séjours et
voit des emplois créés ? Peut-être les habitants, ou
tout du moins ceux gênés par les touristes et qu'y ne vivent pas
de leurs venues. De plus, l'Equipe MIT a démontré qu'il n'y avait
pas de tourisme « sans accord des sociétés
locales » (2002, pp.191-195).
Quant à Jan Van Der Borg, dans son texte « La
gestion du tourisme dans les villes touristiques »
(pp.81-97), il n'hésite pas sans faire la moindre démonstration,
à dire que pour « Venise, on a calculé, par un
moyen simple mais efficace de projection linéaire [quelles sont les
variables, le calcul ?] que la capacité de charge
journalière était de 11 000 touristes résidents et
14 000 excursionnistes. » (p.102) Comment ces chercheurs
ont trouvé se chiffre ? Est-il pertinent ? Ne correspond-il
pas aux souhaits des chercheurs de voir Venise peu
fréquenté ? Que ferions-nous des visiteurs interdits ?
C'est dans l'intervention du professeur d'université
Miguel Troitino Vinuesa, que l'on trouve une réflexion plus
« équilibrée » sur le tourisme dans une
ville historique comme Tolède: « une vision simpliste
de la question peut attribuer au tourisme l'origine de problème qui ne
lui sont pas liés, comme par exemple l'expulsion de population des
centres historiques ou la crise du commerce traditionnel »
(p.111). Selon lui il ne faut pas considérer le tourisme comme
responsable de tous les maux de Tolède : « Il
faut restituer le problème dans le cadre plus général des
changements qui affectent les centres historiques. Le tourisme complique le
fonctionnement du centre historique car il entraîne un processus de
tertiarisation qui peuvent perturber les conditions de vie »
(p.120). Comme les interventions précédentes, l'auteur tente
d'évaluer les impacts du tourisme « avec une
méthode englobant des critères multiples »
(p.121), sans dire lesquels. Il arrive au résultat que le tourisme
renforce les effets négatifs de la circulation, du stationnement, de la
tertiarisation ou de l'occupation de l'espace public. L'auteur en vient
même à accuser l'intense circulation - c'est-à-dire les
touristes - et les vibrations qu'elle provoque « d'endommager les
fondations de certains monuments, mettant ainsi en danger leur
conservation » (p.123). La terre tremble-t-elle vraiment au
passage des touristes ? L'Equipe MIT a relaté quelques textes
apocalyptiques sur le tourisme pour Prague ou Venise et pense que
« laisser sous-entendre que la « dégradation de
Venise » serait la conséquence de la trop forte
fréquentation touristique [...] est un télescopage
d'informations ne se situant pas sur le même registre, qui aboutit
à une désinformation » (2002, p.55).
L'argument qui consiste à opposer le tourisme et le
patrimoine urbain se retrouve dans les autres interventions et dans bien
d'autres ouvrages et articles sur ce sujet.
Norois, Villes et tourisme : images, espaces
acteurs, n°178, Avril - Juin 1998
Ce numéro de la revue Norois, coordonné par
Maria Gravari-Barbas et Philippe Violier, propose d'approfondir la notion de
« ville-entreprise » appliquée au tourisme. En
reprenant Georges Cazes, les auteurs définissent l'activité
touristique comme un système de trois éléments qui
constituent les points d'entrée de l'ouvrage : les images, les
espaces, les acteurs.
La première partie interroge le concept d'image de la
ville à travers l'angle touristique. Le touriste est par
définition déterritorialisé et n'a que des images, plus ou
moins floues, du lieu qu'il va visiter. Mais ces images proviennent de
plusieurs acteurs qui interviennent dans le processus de la transmission des
ces images. Il y a donc une sélection rigoureuse de ces images, afin de
retenir celles qui seront mises en valeur. Avec les trois études de cas,
nous voyons la création d'une image d'un lieu et celle du changement de
celle-ci qui évolue selon l'air du temps par le marketing.
La deuxième partie, sur le système d'espaces,
pose la question de l'impact de l'activité touristique sur
l'organisation, l'aménagement, l'environnement ou l'esthétique
urbains. La contribution de Maria Gravari-Barbas sur l'esthétique de la
ville touristique, met en évidence l'importance de l'esthétique
urbaine pour le tourisme. Et en même temps l'impact visuel du tourisme
sur la ville. Car la ville touristique doit être « belle,
propre, festive et sécurisante », en d'autre terme la
ville idéale. Mais la ville touristique n'a-t-elle pas l'intention
d'être une ville idéale ? Comme le texte de Claudine
Barçon (Cahiers Espaces, 1994), l'auteur insiste sur la
lisibilité de la ville, qui est primordiale pour le touriste.
« L'esperanto touristique » permet ainsi de faciliter la
lecture de la ville et a tendance à rendre « tout
beau » dans la ville. Ce texte est intéressant car il montre
comment l'esthétisation de la ville fait que l'extérieur prime
sur l'intérieur (d'où l'importance de la flânerie dans la
ville) et permet à l'auteur de finir sur ces mots : « Le
tourisme, à la fois raison d'être et prétexte pour ces
mises en beauté, initie, exacerbe, ou bénéficie de ces
tendances » (p.193). Sans la moindre attaque ni snobisme sur le
tourisme, l'auteur expose clairement l'esthétique des villes
touristiques.
Pour les autres contributions, il est davantage question de
réhabilitation des friches industrielles (portuaire) et d'impact sur le
patrimoine. Ces études de cas ne nous apportent pas un plus pour notre
sujet.
Quand à la troisième partie, elle s'attarde
à mettre en évidence les systèmes d'acteurs du tourisme et
met en place la notion de « système d'acteurs
localisés » (tiré du district industriel). Mais il
n'est pas question d'étudier le premier acteur du tourisme, qui est le
touriste lui-même.
Géocarrefour, Le tourisme et la ville, Vol.76,
n°2, 2001
Cette publication est issue des XXVIIIe Journées de
géographie du tourisme de la Commission de géographie du tourisme
et des loisirs du Comité national français de géographie,
qui se sont tenues en 2001 à Lyon. Ce numéro spécial
propose onze études de cas urbains, aussi bien en France qu'à
l'étranger (Palma de Majorque, Etats-Unis, Japon). Le but étant
de mieux cerner le tourisme et contribuer à une réflexion plus
fondamentale pour la géographie sur le sujet.
Dans l'introduction, Dewailly et Lefort concluent que ces
études de cas permettent de mettre en évidence les relations
dialectiques entre la ville et le tourisme : le tourisme
générant de l'urbanisme et de l'urbanité et la ville
sécrétant, matériellement et symboliquement, les
conditions d'une possible mise en tourisme.
Chaque article nous montre bien l'articulation si complexe
entre le tourisme et la ville. Le tourisme développant la ville et la
ville développant le tourisme. Dont cet article de Christian Jamot sur
Vichy, où l'auteur explique comment le tourisme, après avoir
été le premier facteur de développement de Vichy, c'est
fait dépasser par l'industrie. Mais lorsque l'industrie connaît
des difficultés, le tourisme est la première sortie de secours.
Mais, et c'est ici l'intérêt de l'article, on ne (re)devient pas
touristique avec quelques renouvellements de l'espace urbain.
Chesnel M, 2001, Le tourisme culturel de type
urbain : aménagement et stratégies de mise en valeur,
l'Harmattan, Coll. Villes et entreprises, Paris, 137p.
Marc Chesnel tente dans cet ouvrage de définir la
singularité et la cohérence du « tourisme culturel de
type urbain ». Mais l'auteur trouble le jeu dès
l'introduction, car il ne définit ni le tourisme, ni le tourisme
culturel et n'utilise jamais cette notion de « tourisme culturel de
type urbain » mais parle de « tourisme urbain ».
Ce qui ne semble pas cohérent si l'on veut démontrer la
singularité de ce type de tourisme. Selon l'auteur, le tourisme urbain,
à la différence de celui pratiqué en montagne ou à
la mer, est plus discret dans le paysage et a une relation plus faible avec la
nature (p.7) En ce qui concerne la « discrétion » du
tourisme urbain, c'est une fausse discrétion, car il est bien visible
dans la ville. Mais notre regard occidental apprécie moins la vision des
barres d'immeubles en haute montagne que sur le périphérique
parisien. Ce n'est donc pas un critère de singularité. De
même pour son faible lien avec la nature. Lorsque nous passons des
vacances au bord de mer, passons nous toutes nos journées à la
plage ? Non, nous faisons d'autres pratiques qui n'ont aucun rapport avec
la mer et certaines stations, comme Benidorm, ont une vie touristique qui
s'auto-alimente en dehors de leurs plages. La singularité ne doit pas se
situer sur des questions de nature ou de type d'espace. D'ailleurs existe-t-il
un intérêt à trouver une singularité au tourisme
urbain ? L'auteur ne se pose pas la question. Si l'on doit parler de
singularité, c'est dans la singularité urbaine qui se conjugue
avec la singularité de chaque ville. On rejoint l'auteur lorsqu'il
écrit que chaque ville est singulière, ce qui devrait tordre le
coup à cette idée répandue d'une
homogénéisation des villes.
L'auteur apporte quelques réflexions
intéressantes. Lors du premier chapitre sur la valorisation touristique
du patrimoine urbain, il est assez rare de lire que « le
patrimoine peut être valorisé, doit d'abord être rendu
accessible, présenté, expliqué » (p.11).
Puisque bien souvent les auteurs se placent du point de vue de la sauvegarde
absolue du patrimoine. De même lorsqu'il parle de Venise :
« Venise surgit quasiment intacte de sa grande époque.
Préservée grâce au tourisme ? Pour une large part
certainement, puisque la conservation est la condition du tourisme et qui
celui-ci procure des ressources qui la permette » (p.12).
Dans le chapitre six, « Le contexte
touristique » (ne devrait-il pas être au début ?),
l'auteur avance quelques éléments de réponse sur la
singularité du tourisme urbain. Son originalité tient dans la
diversité de ses propositions : polarisés dans l'espace et
dans le temps pour les congrès ; étalés pour les
festivals ; en permanence pour la vie culturelle. Cela revient à
faire une distinction selon les pratiques touristiques, ce qui semble
être intéressant et cohérent. L'auteur insiste aussi sur la
proximité des activités ludiques dans la ville, ce qui est
important. En effet, la proximité facilite le passage d'une
activité à l'autre, la densification du vécu et permet de
se glisser dans le quotidien des habitants (p.96). Mais il ne précise
pas si c'est une proximité par la distance ou par l'accessibilité
qu'offre la ville par ses moyens de communication. Entre densification du
vécu, vivre le quotidien des habitants, accessibilité,
proximité, etc. nous sommes en présence de la question de la
qualité urbaine du lieu : quelle ville me permet de profiter au
maximum ce qu'elle me propose ?
En conclusion, l'auteur termine sur une phrase qui correspond
à une des hypothèses de recherche (le touriste influence son lieu
de vacances et son lieu de vie quotidien) : « cette forme de
tourisme [le tourisme urbain] peut contribuer à rapprocher,
à faire coller le temps des vacances avec le reste du temps de vie, et
devraient ainsi contribuer à ce que le vacancier, de retour dans son
cadre habituel de vie, cherche à retrouver près de chez lui
expériences et émotions fortes ou discrètes
découvertes dans une autre ville... » (p.135)
Fainstein S. S., Glastone D., « Evaluation du
tourisme urbain », Les annales de la recherche urbaine, n°97,
Déc. 2004, pp.127-135
Dans cet article, les auteurs posent un regard global sur le
tourisme urbain et plus généralement sur le tourisme. Dès
l'introduction, ils exposent leur vision du tourisme : « le
tourisme a un potentiel propre de réalisation de ses promesses : le
voyage peut changer l'existence spirituelle aussi bien que matérielle du
visiteur comme de son hôte » (p.127). On ne peut que
soutenir cette idée, qui situe le tourisme comme une expérience
individuelle ayant un sens, aussi bien pour le touriste que pour son
hôte. Une expérience qui présente des dimensions à
la fois matérielles et non matérielles. L'article tente
d'étudier l'interaction entre les aspects matériels et non
matériels du tourisme, tout en montrant que les affirmations
catégoriques sur le tourisme sont très discutables. Ils essayent
d'adopter une position neutre par rapport au tourisme.
Dans une première partie sur la
régénération urbaine, les auteurs montrent que le tourisme
peut devenir une véritable volonté politique pour palier la crise
économique, sociale et spatiale des villes. Il est utilisé comme
un moyen de rénovation et parfois
« d'assainissement » de certains quartiers du centre des
villes. Et le tourisme trouve toujours un moyen pour se réapproprier un
espace, dont cet exemple dans les années 1960 aux Etats-Unis, où
des groupes bloquaient des bulldozers contre la rénovation massive de
quartier entier. Ces quartiers protégés deviendront des zones
touristiques, qui seront désapprouvées par les mêmes forces
qui s'étaient attachées à bloquer la rénovation.
Cet exemple signifie qu'il n'y a pas de potentiel ou de ressource touristique
de l'espace urbain. Un lieu devient touristique lorsqu'il correspond aux
attentes, aux regards et aux pratique d'une époque, bref selon l'air du
temps (« l'air du temps plus que l'air du lieu » pour
reprendre une phrase de l'Equipe MIT).
On accuse souvent le tourisme comme étant du gaspillage
pour les villes, que celui-ci augmente les inégalités sociales,
favorise les bas salaires et les emplois non qualifiés. Les auteurs, en
adoptant toujours cette position moins tranchante, jugent qu'au lieu
« de rejeter le tourisme en raison de ses effets négatifs,
ceux qui le critiquent feraient mieux d'insister pour que les subventions
aidant à sa promotion soient compensées par des dispositions qui
assurent un salaire minimum plus élevé, la participation locale
pour les services, des emplois et des programmes de formation »
(p.130).
Quels sont les effets du tourisme sur l'espace urbain ?
En prenant les aspects matériels et non matériels, les auteurs en
distinguent deux : la ville fortifiée et la marchandisation. La
ville fortifiée militarise et privatise l'espace urbain pour les
quartiers touristiques. Mais cette ville fortifiée n'est pas uniquement
due au tourisme, c'est aussi un problème récurrent des
sociétés américaines, brésiliennes, etc. Quand
à la marchandisation, elle est le signe d'une perte
d'authenticité que le tourisme engendre («le tourisme est la
chance d'aller voir ce qui est banal » p.131). Face à ces
accusations de « fausse authenticité » et de
banalisation, les auteurs évaluent cette marchandisation et ils sont
très clairs : « sous cette critique du tourisme, se
cachent une certaine utopie de l'expérience directe
contrôlée par le visiteur et le visité et un mépris
correspondant de ceux qui prennent plaisir aux voyages à Disney World ou
aux visites dans les nombreux Hard Rock Cafés » (p.132).
Etant donné que ces évaluations ne satisfont pas
les auteurs (les attaques sont davantage des opinions que des recherches sur le
tourisme), ils proposent d'autres « critères justes pour
évaluer le tourisme » de façon objective. Le nombre
d'emplois directs ou indirects générés, le nombre global
d'emplois dans la population locale, la proportion d'emplois qui conduisent
à un avancement, les niveaux de salaires, etc., sont des exemples
d'indicateurs que préconisent les auteurs. Mais ce sont surtout des
indicateurs socio-économiques, concentrés sur la question de
l'emploi. N'existe-t-il pas d'autre critère pour évaluer l'impact
du tourisme ? Enfin de compte, cet article fait un travail de
déconstruction sur les évaluations précédentes du
tourisme urbain, pour essayer de donner une base plus objective pour les
évaluations futures. Mais les auteurs auraient pu aller plus loin dans
leurs indicateurs.
Conclusion de nos lectures
Après nos lectures sur le tourisme urbain, nous
remarquons que les études adoptent trois approches. La première
est une approche surtout économique du phénomène
touristique en ville. On y étudie le tourisme comme une activité
parmi d'autres de la ville, avec des études sur les effets directs et
indirects du tourisme (consommation par touriste, création d'emploi,
coûts des équipements, etc.). C'est une approche
intéressante, car elle permet de voir les impacts économiques qui
sont indispensables pour la vie de l'activité touristique (comme toute
activité économique). Mais ce n'est pas suffisant pour comprendre
le tourisme urbain, l'économie n'est qu'une entrée parmi d'autre
dans la compréhension d'un phénomène de
société.
Une autre approche va s'intéresser à la
rénovation urbaine par le tourisme. Nous avons une grande
quantité de travaux sur d'anciens quartiers industriels ou portuaires,
rénovés avec une nouvelle fonctionnalité qui se tourne
vers les loisirs, la culture et si possible le tourisme. Ces travaux sont
intéressants car ils montrent comment le tourisme et les loisirs sont
des producteurs d'espaces. Ou plutôt, comment le tourisme peut-être
un prétexte pour des rénovations urbaines.
Enfin, une troisième approche se situe du
côté du patrimoine. Celle où le tourisme est vu comme un
« parasite » destructeur d'un patrimoine qui pourrait vivre
sans celui-ci (et vierge de toute agression de la part des touristes). Cette
approche est aussi intéressante, car elle se place du côté
des impacts et des transformations que le tourisme peut engendrer. Mais souvent
ces études ne sont qu'un moyen pour les auteurs de donner leurs avis sur
le tourisme (cf. Nancy Bouché).
Parfois des auteurs s'interrogent sur les pratiques
touristiques en ville (que font-ils ?), des impacts spatiaux et sociaux du
tourisme sur l'espace. Mais ils ne le font que trop brièvement, lors
d'une conclusion, sans prendre le temps (ont-ils fait la recherche ?)
d'écrire une argumentation autre que « le tourisme
engendre des impacts sur la ville », mais sans dire lesquels.
Surtout, aucun texte n'utilise la notion de qualité pour étudier
l'impact du tourisme sur la ville.
Ces lacunes sont-elles normales ? Est-il utile de se
poser ce genre de question ? Quel est l'intérêt de
connaître l'impact du tourisme sur l'espace urbain ?
Deuxième partie : La qualité des
lieux. Mise en place d'un travail de recherche
Après avoir étudié les travaux existant
sur le thème du tourisme et de la ville, et désigner leurs
lacunes, à nous de proposer un plan de travail de recherche. Sur les
différents travaux étudiés, très peu
s'intéressent à l'impact et surtout aux transformations
qu'entraîne le tourisme sur et dans la ville. Outre les effets, le
tourisme engendre t-il des nouvelles caractéristiques de la ville,
c'est-à-dire une nouvelle qualité ? Car étudier les
transformations, c'est aussi analyser la qualité même du lieu. Si
le tourisme modifie la ville, il modifie sa qualité, ses
caractéristiques. Quelle est cette qualité ?
Utiliser cette approche permet d'éviter des positions
trop tranchantes sur le sujet (comme le préconisent Fainstein et
Glastone, 2004). Nous n'avons pas trouvé un article ou un chapitre qui
met en place une méthodologie pour évaluer ces transformations.
Bien souvent nous restons à des jugements de valeurs, qui
dénigrent à la fois le tourisme et l'espace urbain
transformé par celui-ci. Etant donné que ces travaux n'ont pas de
méthodologie (résultent-ils d'une recherche ?), nous les
mettrons dans le monde des opinions, que l'on peut opposer à la science.
Pourtant ces opinions sont aussi une forme de savoir qu'il
faut questionner, pour voir leur pertinence. Ce travail sur la pertinence se
fera par une méthodologie avec des outils et concepts adaptés
à cette évaluation. Bien sûr il faudra dépasser
cette évaluation pour arriver à des questions plus
générales sur le tourisme et la ville.
Comment évaluer le tourisme ? Comment
éviter d'avoir des positions « tranchantes » sur
cette question ? Pour cela il faut reprendre les mots, être au point
avec eux pour éviter d'être flou dans nos concepts. C'est ce que
nous verrons dans une première partie. Puis, nous mettrons en place le
lien entre urbanité et touristicité pour définir la notion
de qualité. Dans une dernière partie, nous essayerons de montrer
l'intérêt d'une mise en relation entre tourisme et ville.
I. Des mots pour une recherche
Définir clairement les concepts sur lesquels notre
travail de recherche s'appuie est indispensable. Nous définirons aussi
bien le tourisme que l'urbain, ainsi que les deux notions qui en
découlent, la touristicité et l'urbanité.
A. Tourisme et touristicité
1. Tourisme et touriste
Définir le tourisme est un travail que de nombreux
chercheurs et professionnels ont déjà fait. On peut distinguer
deux types de définition : les « officielles »
et celle des chercheurs. Les définitions
« officielles » sont celle de l'OMT ou de l'INSEE. Nous ne
reviendrons pas dessus, Isabelle Sacareau et Mathis Stock ont fait un travail
convainquant de déconstruction de ces définitions9(*). Certains chercheurs
préfèrent utiliser les définitions officielles du
tourisme, en invoquant la difficulté de ce dernier à être
définit. D'autres, dont l'Equipe MIT, fournissent une définition
basée sur une recherche de plusieurs années sur le sujet. Le
terme de tourisme renverra directement aux travaux de l'Equipe MIT, dont la
définition est : « Système d'acteurs, de lieux
et de pratiques permettant aux individus la recréation par le
déplacement et l'habiter temporaire de lieux
autres »10(*).
On aura compris que le tourisme est un déplacement
physique, un « changement de place », comme dirait l'Equipe
MIT. Il n'y a donc pas (eu ?) de tourisme virtuel, comme le
prédisait Jean-Michel Dewailly en 199711(*), puisque le tourisme s'inscrit dans un lieu et une
pratique du hors-quotidien.
Par conséquent, un touriste sera définit
comme « un être humain qui se trouve dans une
situation particulière, à savoir dans un lieu autre pour une
pratique de recréation »12(*). Ainsi, un touriste va dans d'autres lieux qui lui
permettent d'assouvir ses pratiques.
Ce pose la question des voyages d'affaires, qui semblent
être exclus de notre définition. En effet, le tourisme est le
résultat d'un choix personnel, non subi, au contraire des voyages
d'affaires. Pourtant, et c'est ici une difficulté de choix et de
définition pour certains auteurs, les touristes et les hommes d'affaires
utilisent les mêmes lieux (hôtels, restaurants, aéroports).
Doit-on pour autant les inclure dans une même définition ?
Non, car une personne dans un lieu ne fait pas d'elle ce qu'elle est. C'est la
qualité de la personne qui donne la qualité du lieu selon cette
même personne. Ainsi, cela n'aura pas la même signification pour un
parisien de prendre le métro, que pour un touriste qui le prend pour la
première fois de sa vie. Par conséquent il faudra s'attacher
à bien identifier, lors de notre travail de recherche, ce qui
relève des pratiques touristiques13(*) ou non. Le tourisme étant une diversité
de plus dans la ville.
2. Touristicité
Dans une approche spatiale du phénomène
touristique en ville, il nous faut une notion qui s'y rapporte. Celle de
touristicité convient bien à notre travail. Cette notion est peu
employée dans les études sur le tourisme et la ville.
Néanmoins, nous pouvons citer deux auteurs.
D'abord celle que donne Gabriel Wackermann dans un
dictionnaire de Géographie sous sa direction. Il considère la
touristicité comme « le caractère touristique
fonctionnel du territoire et non potentiel »14(*). Cela signifie l'utilisation
touristique d'un espace, c'est-à-dire que sans touriste il n'y a pas de
touristicité.
Quand à l'Equipe MIT, elle propose une
définition plus développée dans leur premier ouvrage
collectif, Tourismes 1, Lieux communs : « La
touristicité d'un lieu exprime son degré de mise en tourisme. Le
taux de fonction touristique (rapport du nombre de touristes pouvant être
accueillis au nombre des habitants permanents) en constitue une approche
statistique. Toutefois, l'existence des lits ne renseigne pas sur la
qualité (touriste ou non) de l'utilisation » (2002,
p.301).
Le taux de fonction touristique n'est effectivement qu'un
indicateur de la touristicité du lieu. Il faut donc
réfléchir à un ensemble d'indicateur pour la
touristicité. L'Equipe MIT propose quelques indicateurs de la mise en
tourisme des lieux dans un article15(*). Le but de cet article est de
« déterminer les conditions susceptibles de
déboucher sur la réussite de la mise en tourisme d'un espace
jusque-là non touristique » (p.2). Dix critères
sont retenus, divisés en trois classes. Premièrement sur la
fréquentation touristique générale : le taux de
fonction touristique, la fréquentation touristique (en nombre de
visiteurs) et la présence de résidences secondaires. Dans une
deuxième classe, la situation de l'espace en tant que lieu de vie :
la dynamique économique et l'évolution de la population active
tertiaire. Enfin, le changement d'usage du lieu : l'évolution du
solde migratoire, le rôle des élus, l'attitude de la population
locale, la situation géographique et l'ouverture paysagère du
lieu.
Ces critères sont utilisés pour essayer
d'analyser les conditions de réussite de la mise en tourisme des lieux.
Les lieux étudiés dans l'article (l'Isle-Crémieu,
Pierrefonds, la vallée du Loing, etc.) sont des lieux qui
« attendent » leur mise en tourisme. Pour un travail de
recherche sur les métropoles, est-il pertinent d'utiliser ces
indicateurs ? C'est à nous dans l'avenir d'analyser cela pour
essayer d'apporter des indicateurs fiables et pertinents pour la notion de
touristicité.
Après avoir définit le tourisme et la
touristicité, étudions l'urbain. Pourquoi ? Parce que comme
le tourisme, l'urbain est la base de notre travail et nous devons de le
définir, tout comme la ville. De plus, en parlant de l'urbain, nous
arrivons à la notion d'urbanité qui sera utile pour la notion de
qualité.
B. Urbain et urbanité
1. L'urbain
Ecrire sur l'urbain n'est pas une tâche facile, le
définir non plus ! Nous avons derrière nous une masse
colossale de travaux et de théories sur le sujet. Il faut avouer
qu'à l'heure actuelle, il est assez difficile de me faire une place et
de maîtriser toutes ces connaissances. J'espère que le lecteur me
pardonnera de ne pas avoir, pour le moment, toute la culture et la
maturité pour interpréter toute la subtilité et la
densité des textes comme La question urbaine de Manuel Castells
ou L'espace légitime de Jacques Lévy. Ce travail
conceptuel, qui est encore en pleine construction, devra être poursuivit
lors de la thèse.
Actuellement, et à la lecture des différentes
définitions16(*),
une seule nous semble être la plus cohérente sur la question
urbaine. C'est celle que propose Michel Lussault dans le dictionnaire de
Géographie sous sa direction avec Jacques Lévy (2003). L'urbain
est définit comme le « système sociétal
regroupant l'ensemble des géotypes caractérisé par le
couplage spécifique de la densité et de la
diversité » (p.949). Il n'est plus question ici de
définir l'urbain par opposition avec le rural, mais de partir du
postulat que l'urbain est toujours plus dense et divers que le non-urbain.
Même si aujourd'hui nous pouvons relativiser l'existence du non-urbain,
par exemple en Europe, puisque la transition urbaine est achevée. Nous
devons davantage parler d'urbain à des degrés d'intensité
divers selon le couplage densité/diversité. Pour cela, la notion
d'urbanité est à utiliser.
2. L'urbanité
L'urbanité comme qualité
Le sens commun d'urbanité est la politesse, la
civilité, la courtoisie. Ne dit-on pas, en langage soutenu,
« vous êtes bien urbain » pour une personne
courtoise. On remarque que tous ces substantifs renvoient à la
ville : civilité du latin civis (le citoyen) et
civitas (la cité) ; politesse de polis, la ville
ainsi que urbain de urbs (ville). La ville est vue comme le lieu de la
qualité de vie, de la courtoisie, des valeurs. L'urbanité c'est
la qualité des hommes à vivre tous ensemble en ville. René
Schoonbrodt17(*)
définit l'urbanité comme « l'éthique de la
coexistence grâce à laquelle il est possible de vivre les rapports
sociaux en ville de manière positive » (p.37). Cette
définition plutôt utopique de l'urbanité, en tant que
qualité de vie en ville, est davantage répandue en
littérature et chez les spécialistes de la ville qui ne sont pas
géographes. Il manque souvent une approche spatiale dans ces
définitions. L'architecte Nicolas Soulier entame une vision plus
spatiale de l'urbanité : « le terme
d'urbanité désigne communément cette qualité d'un
espace habité et partagé, qui permet d'être dans des
relations de voisinage, de côtoiement, et de rencontres courtoises et
civiles les uns avec les autres. »18(*). Il reste toujours
l'idée de qualité de vie, mais les notions d'espace et de
distance entre les hommes sont ici rajoutées. Car derrière cette
idée d'utopie de la ville (l'urbanité), se cache la vision d'une
ville compacte, dense, avec une vie de quartier.
L'urbanité comme définition
Le géographe Jacques Lévy définit plus
simplement l'urbanité, c'est « ce qui fait d'une ville une
ville »19(*). Nous ne sommes pas en présence d'une
redondance, mais devant l'essence même de la ville, c'est-à-dire
l'urbanité. Pour comprendre cette définition la plus simpliste,
il faut savoir ce qu'est une ville. Lévy la définit comme
« une situation spatiale caractérisée par la
concentration d'une société en un lieu (d = 0) en sorte d'y
maximiser la densité et la diversité des interactions sociales
»20(*). La ville
c'est l'objet spatial qui concentre au mieux le couple
densité/diversité. Cela suppose qu'il n'existe pas une
urbanité, mais un degré d'urbanité. En effet, selon
l'intensité de la densité et/ou de la diversité,
l'urbanité du lieu est plus ou moins forte. Le maximum d'urbanité
se concentre dans la ville, c'est la centralité
(« phénomène cumulatif - dont la situation n'est
pas à penser comme nécessairement géographiquement
centrale - résultant de la maximisation de
l'urbanité »)21(*) et le minimum se trouve dans l'infra-urbain, qui
cumule les deux déficits de densité/diversité. Ainsi
lorsque Lévy écrit que l'urbanité c'est la ville, on
devrait davantage dire que l'urbanité c'est l'urbain. Cela
correspondrait à la définition proposé par Michel
Lussault pour l'urbanité, comme étant le «
caractère proprement urbain d'un espace » (2003,
p.966).
II. Touristicité et urbanité pour la
qualité des lieux : objet de recherche identifié
On se rend bien compte après avoir définit la
touristicité (caractère touristique d'un espace) et
l'urbanité (caractère urbain d'un espace) que ces deux notions
varient selon l'intensité de leurs indicateurs. Ce ne sont pas des
notions absolues, fixes dans le temps et dans l'espace. L'intérêt
de ces deux notions réside dans la possibilité de les croiser.
Pour quelle raison ? Pour proposer une approche différente et
originale sur la notion de qualité des lieux et ainsi tenter d'apporter
une nouvelle analyse des impacts du tourisme sur la ville.
Est-ce que le tourisme contribue à la qualité
des lieux ? Plus précisément à la qualité
urbaine de la ville? Comment le tourisme contribue à la qualité
des villes ? En quoi le tourisme apporte de l'urbanité en
ville ? L'urbanité joue t-elle un rôle dans la mise en
tourisme ? On remarque que les centres des villes sont souvent les
quartiers touristiques, pourquoi ? La centralité a-t-elle un
rôle dans la touristicité de la ville ?
A. La notion de qualité
La notion de qualité est rarement employée,
encore moins dans la géographie. Ou tout du moins elle est
employée pour des études sur la « qualité de
vie » des villes, mais elle endosse alors la notion de
« condition » de vie, de « situation »
sociale, etc. Pourtant le mot « qualité » en
lui-même est neutre. Le Robert donne comme première
définition : « manière d'être
caractéristique. En rapport avec le caractère, la
propriété. » La qualité c'est ce qui
caractérise un objet, une personne, un lieu. C'est aussi la
définition qu'en donne Roger Brunet dans son dictionnaire (sous sa
direction) : « Ce qui est propre à un objet, à
un espace, à un être, pris comme genre ou individuellement, et qui
le fait tel, qui contribue à le définir, absolument ou par
rapport à un usage, une stratégie donnés. [...]
Le mot lui-même est neutre, bien qu'il soit souvent
considéré comme positivement connoté »
(1993, p.409).
Cette notion de qualité est à la fois relative
(aux pratiques et aux stratégies des acteurs) et objective (quand Paris
propose plus de 140 000 lits touristiques cela engendre forcément
des conséquences).
B. Qualité urbaine et touristicité
Prendre la dimension touristique pour étudier la ville
permet de lever la question de sa qualité. En effet, le tourisme
n'investit pas n'importe quel lieu au hasard. Les touristes choisissent les
lieux qui correspondent à leurs attentes, leurs pratiques, leurs
regards. Il est intéressant de se demander pourquoi telle ville
accueille autant de touristes ? Est-ce due à sa
qualité ? Les villes touristiques et à fonctions
touristiques ont-elles une qualité différente ? On
apprendrait sûrement beaucoup sur le tourisme, les touristes et les
villes, si l'on s'intéressait à cette question. C'est une
certaine lacune de la part de la géographie de ne pas s'interroger sur
les choix des touristes, alors que l'une de ses questions fondamentales est de
savoir « pourquoi ici et pas ailleurs ? ».
Mathis Stock s'interroge dans un article22(*) sur le lien entre
touristicité et urbanité. C'est pour l'instant le seul texte
faisant explicitement référence à ces deux notions afin de
discuter de la qualité des lieux. Le concept de
« recreational turn » se base sur l'idée
d'une nouvelle qualité des espaces urbains par l'augmentation de la
« recréation », et principalement du tourisme. Selon
l'auteur, la qualité urbaine dépend, pour une grande part, de la
présence des touristes dans ces lieux. Mathis Stock conclut la
présentation de son concept de « recreational
turn » sur ces mots : « A «real« city -
a place defined by a certain quality of urbaness - is essentially defined by
its touristic quality ». Le seul problème est que
l'auteur ne dit ni pourquoi, ni comment. La porte est ouverte pour un travail
de recherche...
C. Appréhender la qualité des
lieux
On se propose ici de donner quelques exemples, qui sont en fin
de compte une ébauche, pour un travail sur la qualité des lieux
à travers la touristicité et l'urbanité. Il ne faut pas
voir dans ces graphiques des affirmations, mais plutôt la construction
d'un travail de recherche.
Document 3 : La qualité des lieux par la
touristicité et l'urbanité ?
Ce premier graphique est une ébauche pour analyser la
qualité des lieux selon deux entrées : la
touristicité et l'urbanité. Ces deux notions étant
variable, nous pouvons les situer sur un axe XY.
Document 4 : La qualité des types de lieux
touristiques23(*)
Le document qui suit se base sur la typologie des lieux
touristiques de l'Equipe MIT. Etant donné que ces quatre types de lieux
sont touristiques, ils ont tous une touristicité
« positive ». Ce qui n'est pas le cas pour
l'urbanité. Un site, qui n'est uniquement fréquenté par du
passage, ne présentera pas des fonctions urbaines diversifiés, ni
une forte urbanité. Cela ne veut pas dire qu'un site n'a pas
d'urbanité, il en a moins qu'une ville touristique.
L'emplacement des types de lieux n'est qu'à titre
indicatif.
Document 5 : Quelques exemples de lieux
Voici une des façons dont peut être
utilisé ce graphique selon différents types de lieux. Si l'on
part du postulat qu'une métropole mondiale a un niveau d'urbanité
maximum avec une touristicité élevée, sa situation (et par
hypothèse sa qualité) sera en haut à droite du graphique.
Quant à la métropole régionale, de rang inférieur,
elle sera en dessous de la métropole mondiale.
Pour la banlieue pavillonnaire, on pense au périurbain
(banlieue diffuse au rurbain selon Jacques Lévy), la perte de
densité entraîne une chute du degré d'urbanité, qui
est peut être couplée avec une touristicité quasi nulle. Au
contraire du site touristique, qui a une forte touristicité, mais garde
une faible urbanité.
III. Le tourisme et la ville, l'intérêt
d'une mise en relation
A. Le tourisme comme angle d'approche pour la
ville
Il existe de nombreux écrits sur la mort de la ville et
le règne de l'urbain, dont Françoise Choay est la première
représentante en France. Choay, qui a lu Melvin Webber, nous explique
qu'il faut dépasser la distinction entre ville et campagne, étant
donné que la ville occidentale n'existe plus car nous sommes
rentrés dans une civilisation de l'urbain. Quelles sont les
raisons ? Le développement des nouvelles technologies de
communication et de transport a créé un
« système opératoire, valable et
développable en tous lieux, constitué de réseaux
matériels et immatériels »24(*).
Ceci amène Thierry Paquot à écrire que
« nos sociétés urbaines vivent une
déspatialisation de la ville et une déterritorialisation
du local » où « l'espace est
nié par l'instantanéité du fax ou
d'Internet »25(*). L'espace a perdu son importance face l'interaction
immatérielle, la distance n'est plus pertinente face à l'hyper
communication.
Pourtant quelques exemples peuvent relativiser cette
idée, surtout en utilisant le tourisme comme angle d'approche. Le
tourisme est une pratique qui « oblige » le
déplacement physique des personnes. Les moyens de communication
permettent la diffusion des informations tout en véhiculant des images.
Les moyens de transport permettent quant à eux de faire circuler les
touristes. Le tourisme ne « déspatialise » pas les
lieux, bien au contraire, il redonne toute l'importance à l'interaction
physique et matérielle d'être dans le lieu. Il n'y a pas de
« tourisme virtuel », les images et Internet ne nous
permettent pas d'assouvir nos envies de voyages. A l'inverse, les images et
Internet sont peut-être un vecteur de l'envie de voyager. Cette
idée de l'importance du contact physique est reprise par Jacques
Lévy : « Dans le même esprit, Gunnar
Törnqvist remarque que «le besoin de contacts personnels [a]
augmenté en même temps que se produisait le développement
du secteur des télécommunications«. Il constate que plus la
communication est complexe, plus elle est porteuse de changement - plus elle
engage donc l'identité des acteurs -, moins elle peut se passer du
contact physique direct. » (1994, p. 318).
Le tourisme redonne de l'importance à la rue, à
la marche à pied, à l'animation des centres des villes
(activités culturelles, festivals, spectacles de rue, ouverture plus
tardive des magasins, etc.). De plus, l'espace touristique est souvent
concentré au centre des villes. Ainsi, même si cela ne reste
qu'une hypothèse, le tourisme remet à sa place le centre pour son
influence et son importance, c'est-à-dire sa centralité. Les
touristes vont-ils dans les banlieues pavillonnaires ? Sûrement pas.
Ils choisissent certains lieux, ayant une certaine qualité qui nous
reste à définir. Par conséquent le tourisme permet de
relativiser la mort de la ville puisqu'il ne ferait qu'alimenter son existence.
B. La ville comme terrain d'étude pour le
tourisme
Allons plus loin. Les villes, nous pouvons même parler
des métropoles26(*), semblent remettre en cause les fondements du
tourisme. Si la raison du tourisme est la recherche d'une certaine
altérité, d'un ailleurs, pour avoir des activités
« dé-routinisantes » selon Norbert Elias, ou quitter
l'ordinaire pour l'extraordinaire selon John Urry27(*), comment expliquer que les
métropoles soient des destinations touristiques alors même que la
majorité des touristes sont des citadins ? Où se situe la
frontière du quotidien et du hors-quotidien lorsqu'un Londonien va
à Barcelone, New York ou Berlin, alors que lui-même vit dans
une métropole ? Où se trouve cette
altérité ? Aura-t-il les mêmes pratiques ? Dans
un Monde où il fait bon d'écrire qu'il se banalise, quelle
altérité les touristes ont à voyager de métropole
en métropole ?
Par conséquent, il semblerait que la ville soit au
contraire un creuset d'altérité pour les touristes. Si l'on prend
la définition de la ville selon Jacques Lévy,
« géotype de substance sociétale
caractérisé par la concentration spatiale maximale
(densité) du maximum d'objets sociaux
(diversité) » (1994, p. 285), la ville devient une source
quasi inépuisable d'altérité puisqu'elle concentre sur un
minimum d'espace, le maximum de diversité, favorisant la rencontre et la
contemplation. « L'espace touristique a, d'emblée,
été conçu pour ménager la
rencontre » écrit l'Equipe MIT (2002, p.175). On pense
bien sûr aux promenades littorales28(*) des stations touristiques ou à la pratique
récurrente des grandes avenues par les touristes (Las Ramblas à
Barcelone, les Champs-Elysées à Paris). De ce fait, la rencontre
« est toujours un moteur puissant du choix du lieu touristique et
du fonctionnement de celui-ci. Ainsi, pourquoi autant de touristes
s'acharnent-ils à fréquenter Benidorm, sur la Costa Blanca
espagnole, alors même que la vision de la photographie du lieu suffit
à faire pousser les hauts cris à tous ceux qui n'y vont pas ou
n'osent pas dire qu'ils y vont ? [...] Tout simplement notre
désir de rencontrer les autres, de se confronter aux autres, voire de
rencontrer cet autre qui peut être aussi notre semblable »
(Equipe MIT, 2002, p.176). Le désir de voir et d'être vu devient
alors une pratique touristique universelle, alimentée par la
densité et la diversité de la ville. Les touristes venant pour
voir les Autres, deviennent à leur tour les Autres.
Prenons pour conclure cette dernière partie l'exemple
d'Amsterdam et ses Coffee Shops. Dans les années 1980 la
municipalité a voulu faire baisser le nombre de Coffee Shop pour essayer
de limiter la venue des jeunes « enfumés »,
consommateurs de drogue, mais pas de produit « culturel »
haut de gamme. Ces Coffee Shops étaient aussi considérés
comme la cause d'insécurité et de trafic de drogue. Après
réflexion, les pouvoirs locaux ont estimé que cela ferait
sûrement disparaître l'ambiance si particulière du centre
ville d'Amsterdam, si les Coffee Shop devaient fermer. Car d'autres touristes
viennent aussi pour cette ambiance très tolérante de la capitale
des Pays-Bas. On constate les liens très étroits qui peut exister
entre le tourisme et la ville : la ville nourrissant le tourisme et le
tourisme nourrissant la ville, créant un véritable cercle
vertueux.
Troisième partie : Approche
méthodologique
La dernière partie de ce travail tente de
définir le protocole méthodologique qui doit permettre de
réaliser le projet de recherche. Ce projet vise dans son ensemble
à établir une méthode pour appréhender la
qualité des lieux selon les notions de touristicité et
d'urbanité. Les pistes que l'on présentera doivent être
considérées comme « exploratoire », puisque
nous utiliserons, en les croisant, différentes méthodes.
I. Le travail historique
Un travail historique semble important pour cette recherche.
En effet, l'histoire du lieu, son développement, ses acteurs
historiques, permet de comprendre une partie du lieu et de sa qualité
actuelle. Cela fait deux siècles que Paris accueille des touristes, dont
une majorité d'Anglais et d'Américains à la fin du XIXe
siècle. Lors d'une intervention de Charles Rearick, historien
américain de la France, j'ai pu apprendre que les salons de thé,
les clubs et les sports sont entrés dans la vie parisienne grâce
aux Anglais29(*). De
même pour les bars, qui sont arrivés dans la capitale avec les
Américains, à la fin du XIXe siècle. Imaginons un instant
Paris sans ses quartiers à bar (comme la rue Mouffetard) ? La venue
d'étrangers, et de touristes, influence la qualité du lieu, aussi
bien dans le passé que dans le présent. Il est par
conséquent intéressant de s'attarder sur cette histoire du lieu
pour le comprendre.
II. Le travail statistique et
cartographique
Ce travail ne consistera pas à compter le nombre
d'entrées dans les musées et monuments. Nous avons
déjà ces informations, parfois à des niveaux très
fins, comme le propose le Louvre : Français (Parisiens, d'Ile de
France, de province), étrangers (par nationalité), âge,
etc. Ce sera davantage un travail qualitatif sur l'espace. Par exemple prendre
par îlot, ou un quartier, le nombre de lits touristiques qu'il propose et
voir l'importance de cet « habiter touristique » dans le
quartier. Un lit touristique c'est aussi une personne qui habite le lieu.
Ainsi, un hôtel peut être considéré comme un immeuble
d'habitation. Lorsque celui-ci propose 100 lits touristiques, avec un taux
d'occupation moyen de 75%, cela fait plus de 27 000 habitants
temporaires par an. Soit 75 personnes en tant qu'habitants permanents. Il
serait intéressant de faire un travail sur les touristes (habitants
temporaires) ramenés en tant qu'habitants permanents pour une ville. Car
une ville ne vit sûrement pas uniquement pour ses habitants permanents.
C'est là une lacune dans les statistiques qui ne comptent que les
résidants permanents. Jacques Lévy écrit que
« la croissance des mobilités de tous ordres rend
l'approximation de la «résidence principale« de moins en moins
satisfaisante pour caractériser l'habitat d'un individu, tandis que,
à l'inverse, les lieux sont habités de multiples manières
par des résidants, mais aussi par des travailleurs, des promeneurs, des
consommateurs ou des touristes »30(*). C'est aussi dans ce sens que le tourisme
engendrerait une certaine qualité pour le lieu, en apportant davantage
d'habitants venus d'ailleurs
Travailler sur les statistiques c'est bien sûr
travailler sur l'espace: le nombre de commerce, le prix du m², la
diversité des services proposés, l'amplitude d'ouverture des
commerces, bref comment l'espace est utilisé par les acteurs.
C'est aussi travailler sur les chiffres
socio-économiques, car le tourisme engendre beaucoup d'argent et
créer de nombreux emplois. Même si nous ne voulons pas tomber dans
une étude socio-économique classique et déjà vue
pour le tourisme. Prenons le 9ème arrondissement de Paris,
qui concentre le plus d'hôtels et de chambres. Avec 12,3% des
hôtels (179) et 11,9% (9047) des chambres
hôtelières31(*), quel rôle joue le tourisme dans la vie de cet
arrondissement qui a perdu la moitié de sa population en cinquante
ans32(*) ? Les
arrondissements du centre de la capitale ont tous perdu au moins la
moitié de leur population en cinquante ans. Le tourisme n'est-il pas un
moyen de continuer à faire vivre l'arrondissement et d'entretenir des
services et un patrimoine devenu cher ? Il faut donc analyser cet aspect
socio-économique du tourisme et de l'espace.
Car le but de ce travail est de fournir des indices pour les
notions de touristicité et d'urbanité. Ainsi il faudra
récolter une série d'indices que l'on pourra ensuite
synthétiser sous la notion de touristicité et d'urbanité.
Nous pourrons aussi utiliser les graphiques, liant touristicité et
urbanité, vus précédemment.
Enfin, un travail cartographique devra être fait pour
visualiser les résultats statistiques. Nous pourrons essayer de faire
une cartographie des espaces à forte touristicité et à
forte urbanité (par îlot ou par iris).
III. Le travail d'observation directe
L'observation directe (« visuelle »)
permettra de recouper l'information statistique et d'acquérir des
connaissances que les statistiques ne fournissent pas forcément. Si l'on
travaille sur un îlot particulier, il sera évident d'aller
observer les pratiques touristiques, les commerces, etc. Les commerces de
l'îlot sont-ils utilisés par les touristes ? Quels sont les
types de boutiques (souvenir, bijoux, alimentaire) ? De telles
informations ne pourront être collectées uniquement sur le
terrain. Nous pourrons alors l'incorporer aux informations déjà
acquises par les statistiques et fournir une cartographie plus approfondie des
espaces touristiques. Car l'observation directe révèle aussi
l'organisation spatiale.
De plus l'observation permet de voir
l'activité et les pratiques du lieu. Rester dans une salle de
bibliothèque (un d'un laboratoire de recherche !) ne permet pas au
chercheur de comprendre totalement l'espace. Il est important d'aller dans le
lieu, de le vivre, d'y pénétrer. « L'observation a
un statut privilégié en géographie, du fait de la position
volontiers empirique des géographes et de leur attachement traditionnel
au monde matériel et donc à ce qui est perceptible par les
sens »33(*).
IV. Le travail d'entretien
La méthode d'entretien est une méthode
complémentaire aux précédentes. L'entretien se fera sur
les acteurs locaux du tourisme et de l'urbanisme. Pour essayer de voir si le
tourisme est considéré comme un acteur fondamental pour la ville.
Est-il utilisé pour la « rénovation »
urbaine ? Quel est le discours des acteurs locaux sur le tourisme ?
Les spécialistes du tourisme ont-ils conscience que le tourisme n'est
pas qu'une simple activité économique ? Le tourisme est-il
utilisé par les spécialistes de la ville et de l'urbanisme ?
L'entretien permettra ainsi d'acquérir l'information et
le discours des acteurs locaux sur le tourisme.
Conclusion
Une porte se ferme et une autre s'ouvre. C'est ainsi que je
souhaite terminer ce mémoire. Travailler sur le tourisme et la ville est
le fruit d'une longue maturation de ma part. C'est la porte qui se ferme. Mais
travailler sur la notion de la qualité des lieux, en liant
touristicité et urbanité, est une problématique plus
neuve, qui me lance sur la voie de la recherche. C'est la porte qui s'ouvre.
J'ai donc mis en place un projet de recherche pour essayer
d'apporter une nouvelle approche géographique concernant la
qualité des lieux. Cela ouvre pour moi un champ de travail passionnant
sur deux thèmes qui permettent, un peu plus chaque jour, la
compréhension du Monde.
La suite de ce travail devra concerner deux aspects. Le
premier est un point de vue bibliographique. Retravailler les textes
théoriques sur la ville, l'urbain, les métropoles et le tourisme,
afin d'acquérir une meilleur connaissance et autonomie intellectuelle.
Le second est méthodologique, car il faudra approfondir la
réflexion concernant les terrains d'études et les
méthodes.
Ce travail clôture cinq années universitaires
dans le monde de la Géographie. Cela m'a permit de m'éloigner des
images « archaïques » que véhiculent la
Géographie en dehors de l'université. Le tourisme est, selon moi,
un des facteurs de cette nouvelle manière de faire et de penser la
Géographie. Il remet en cause et questionne cette science de
l'habiter.
J'espère que ce travail pourra, par la suite de mes
recherches, montrer combien le tourisme doit être pris au sérieux
et que le lier à la ville peut être une source de connaissance
importante pour ces deux sujets. Il interroge les fondements du tourisme, de la
ville et de la géographie, et ouvre la voie à une recherche
passionnante sur notre Monde...
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Polity and Identities, vol. 7 (1), 2007 pp. 115-134
Stock M. (coordination), 2003, Le tourisme. Acteurs, lieux
et enjeux, Paris, Belin, Coll. BelinSup Géographie, 304p.
Téoros, Les villes capitales, Printemps 2002,
vol.21, n°1
Urry J., 1990, The tourist gaze : leisure and travel
in contemporary societies, London, Sage, 176p.
Wackermann G. (ss. Dir.), 2005, Dictionnaire de
géographie, Paris, Ellipses, 432p.
Sommaire
Intro ...................................................................................................
3
Première partie : Bibliographie critique
sur le tourisme urbain ............. 5
Conclusion de nos
lectures.........................................................................19
Deuxième partie : La qualité des
lieux. Mise en place d'un ................. 20
travail de recherche
I. Des mots pour une recherche
................................................................ 21
A. Tourisme et touristicité
.....................................................................21
1. Tourisme et
touriste......................................................................
21
2. Touristicité
................................................................................
22
B.Urbain et urbanité
...........................................................................
23
1. L'urbain
...................................................................................
23
2. L'urbanité
.................................................................................23
II. Touristicité et urbanité pour la
qualité des lieux : objet de recherche identifié..
24
A. La notion de qualité
......................................................................... 25
B. Qualité urbaine et touristicité
.............................................................. 25
C. Appréhender la qualité des lieux
......................................................... 26
III. Le tourisme et la ville, l'intérêt
d'une mise en relation .............................. 27
A. Le tourisme comme angle d'approche pour la ville
.................................... 27
B. La ville comme terrain d'étude pour le tourisme
....................................... 28
Troisième partie : Approche
méthodologique ..................................... 30
I. Le travail historique
...............................................................................30
II. Le travail statistique et cartographique
........................................................ 30
III. Le travail d'observation directe
............................................................... 31
IV. Le travail d'entretien
...........................................................................
32
Conclusion
........................................................................................
33
Bibliographie générale
.......................................................................
34
* 1 Equipe MIT (2002) p. 102.
* 2 Aujourd'hui, les parcs
à thème deviennent de véritables promoteurs immobiliers.
Ainsi, la compagnie Disney à Marne-la-Vallée termine d'urbaniser
le dernier secteur de cette ville nouvelle, Val d'Europe. Cf.
« J'habite la cité idéale »,
in Le Monde 2, n°152, 13 Janvier 2007. Pour une vision plus
mondiale, et plus critique, voir l'article de Susan G. Davis, Quand les
parcs à thème gangrènent les villes, in Le
Monde diplomatique, Janvier 1998
* 3 La géographie du
tourisme a été friand de « ressource »,
« vocation » et autre « potentiel »
touristique. Notions aux caractères trop relatifs et non pertinents pour
la compréhension du tourisme.
* 4Jacques Lévy et Michel
Lussault écrivent pour la définition d'Habiter :
« on peut concevoir des intensités très diverses
dans l'habiter : le citoyen est l'habitant par excellence, mais le
touriste habite aussi, à sa manière, l'espace qu'il
découvre » (2003, p.442).
* 5 Directrice de recherche
à l'Institut National de Recherche sur les Transports et leur
Sécurité (INREST).
* 6 Difficulté (ou
contradiction) à définir véritablement le tourisme (qui
prendre ?). Il est définit comme « tous les
déplacements comprenant une nuit minimum hors du domicile principal,
effectués pour des motifs autres que le travail
régulier » (p.10), mais sont inclus les voyages
d'affaires.
* 7 Comme exemple nous pensons
au XIe arrondissement de Paris, où des grossistes chinois
rachètent les commerces. La municipalité voudrait y
préserver la diversité commerciale. C'est donc un
problème général des villes et non pas un problème
du au tourisme.
* 8 Prenons l'exemple du
musée du Louvre, qui malgré ses 7,5 millions de visiteurs en
2005, est subventionné à près de 60% par l'Etat. Le
tourisme ne paye pas tout, mais il soulage sûrement les finances.
Source : Rapport d'activité du musée du Louvre, 2005.
* 9 M. Stock (dir), 2003,
pp.7-32
* 10 Equipe MIT, 2005, p.342
* 11 Jean-Michel Dewailly,
« L'espace récréatif : du réel au
virtuel ? », L'Espace Géographique,
1997, n°3
* 12 Equipe MIT, 2005, p.342
* 13 Une doctorante,
Amandine Chapuis, commence un travail très prometteur sur
l'expérience touristique de la ville à travers les pratiques
touristiques. Amandine Chapuis, 2006, L'expérience touristique de la
ville. Une forme originale d'habiter géographique, Mémoire
de Master 2 Université Paris 7, 91p.
* 14 Gabriel Wackermann (dir.),
2005, Dictionnaire de Géographie, p.384
* 15 Equipe MIT, « La
mise en tourisme des lieux : un outil de diagnostic »,
Mappemonde, 2000, vol.57, pp. 2-6
* 16 Nous allons mettre ici une
bibliographie non exhaustive des lectures sur le sujet (se rapporter à
la bibliographie) : G. Chabot, 1948 ; P. George, 1952 ; H.
Lefebvre, 1970 ; M. Castells, 1972. Pour les dictionnaire : R. Brunet
(ss dir.), 1993 ; R.J. Johnston et alii, 2000 ; P. Merlin et Ch.
Choay (ss dir.), 2005 ; G. Wackermann (ss dir.), 2005 ; D. Pumain et
alii, 2006.
* 17 Schoonbrodt R., 1997,
« La ville, rien que la ville », Poïesis,
n°6, p. 33-48
* 18 Cité par Huet
M., 1998, Le droit de l'urbain : de l'urbanisme à
l'urbanité, Paris, Economica,
p.211.
* 19 Lévy J., 1999,
p.199.
* 20 Op. ci. P.199.
* 21 Lussault M. in Paquot T.,
Lussault M., Body-Gendrot S., 2000, p.32.
* 22 Stock M.,
« European cities: Towards a «recreational
turn»? », Hagar. Studies in Culture, Polity and
Identities, vol. 7 (1), 2007 pp. 115-134
* 23 L'Equipe MIT propose une
typologie des lieux touristiques selon trois critères.
« Le premier d'entre eux consiste à différencier
les lieux avec ou sans hébergement. Cela identifie les sites [...].
Ensuite, la présence ou l'absence de population résidente
dans le lieu opère d'autres subdivisions : le comptoir touristique,
lieu sans habitant permanent s'oppose à la station, lieu avec habitants
permanents [...]. Enfin, sur la base des fonctions urbaines et du
niveau de services urbains (quantité et diversité), on distingue
la station touristique de la ville touristique. » Duhamel Ph.,
p. 57, in Stock M., 2003.
* 24 Tiré de la
définition de l'urbain par Françoise Chaoy in
Dictionnaire de l'urbanisme et de l'aménagement, ss dir. Merlin P.
et Choay Fr., 2005, p.909. Du même auteur, « La mort de la
ville et le règne de l'urbain », La ville : art et
architecture en Europe, 1873-1993, Paris, Centre Georges Pompidou, pp.
26-39, 1994
* 25 Tiré de la
définition de l'urbain par Thierry Paquot in Dictionnaire de la
ville et de l'urbain, ss dir. Pumain D., Paquot T. et Kleinschmager R., 2006,
p. 289
* 26 Métropole :
« espace urbain qui, tout en permettant la participation des
acteurs aux processus d'échelle mondiale, reste une
société locale. » Dagorn R.
« Métropole », in Lévy J. et
Lussault M., 2003, p. 609
* 27 « Tourism
results from a basic binary division between the ordinary/everyday and the
extraordinary », in Urry J., 1990, Tourist Gaze, p.
11
* 28 Debié F.,
« Une forme urbaine du premier âge touristique : les
promenades littorales », in Mappemonde, 1993, Vol.1,
pp.32-37
* 29 Le
« `s » du Fouquet's et de Maxim's sont rajoutés
à cette époque pour donner un air plus british, signe de
prestige.
* 30
« Densité », Lévy J. et Lussault M., 2003, p.
238
* 31 Le tourisme à
Paris. Chiffres clés 2006, Office du tourisme et des congrès
de Paris, 2007, 32p.
* 32 De 102 000 habitants
en 1954 à 55 800 en 2005, chiffres de l'INSEE
* 33 Staszak J.-F.,
« Observation », p. 677, in Dictionnaire de la
géographie et de l'espace des sociétés, ss. Dir.
Lévy J. et Lussault M., 2003