Les relations entre les règles des accords multilatéraux sur l'environnement et celles de l'OMC( Télécharger le fichier original )par Sandrine DAVANTURE Université Paris 2 Panthéon Assas - DEA 2003 |
B. L'utilisation jurisprudentielle de ce principe.Le principe de précaution a été évoqué devant les organes de règlement des différends de l'OMC dans quatre litiges importants. Même si ces litiges visent avant tout la sécurité alimentaire ou la santé humaine et non la protection de l'environnement stricto sensu, ils sont souvent évoqués lorsque sont examinées les relations entre l'OMC et l'environnement. Même si les deux sujets sont distincts, il existent toutefois des interactions sur le fond et notamment le problème de l'application du principe de précaution , qui nous conduise à étudier ces différents dans le cadre de notre sujet. 1. L'affaire Viandes et produits carnés (hormones), 16 janvier 199835(*).
Cette affaire est la première dans laquelle le principe de précaution est invoqué par le défendeur pour justifier certaines mesures. Le litige opposait les Communautés européennes aux Etats-Unis et au Canada, ces derniers se plaignant des mesures prises par les premières interdisant les importations de viande et produits carnés provenant d'animaux auxquels des hormones naturelles ou de synthèse avaient été administrées à des fins anabolisantes. Les autorités communautaires estimaient que la simple éventualité d'un risque suffisait, comme par exemple celui de la progression des cancers. L'article 5 § 1 et 2 de l'Accord SPS36(*) prévoit que ces mesures adoptées par les Etats soient établies sur la base d'une évaluation des risques, évaluation pour laquelle les Etats tiennent compte des preuves scientifiques disponibles37(*). Les groupes spéciaux avaient considéré qu'il n'y avait pas de preuves scientifiques indiquant que l'utilisation des hormones en cause entraînait un risque identifiable. L'Organe d'appel estime que les Communautés n'ont pas réussi à apporter la preuve d'un réel danger pour la santé de l'Homme et l'évaluation des risques ne sera pas jugée suffisamment pertinente. L'Organe d'appel d'appel refuse des mesures sanitaires et phytosanitaires qui ont des effets négatifs trop importants sur le commerce38(*), et se montre très sévère à l'égard de l'attitude prudentielle des membres en exigeant que la mesure de précaution soit effectivement justifiée par une étude stricte de l'impact néfaste de la consommation de certaines viandes aux hormones sur la santé de l'Homme. Mme Martin-Bidou se demande d'ailleurs, à ce propos, « si une telle exigence n'est pas tout le contraire de la précaution. »39(*). La précaution ne pouvant, en fait, conduire les membres à violer gravement une obligation résultant de leur participation à l'OMC. Puis l'Organe d'appel a été amené à prendre parti sur la valeur normative du principe de précaution et a considéré que « le principe, du moins en dehors du droit international de l'environnement, n'a pas encore fait l'objet d'une formulation faisant autorité ». On peut donc, considérer, a contrario, que ce principe de précaution a, en droit international de l'environnement, fait l'objet d'une formulation faisant autorité. Cependant, ni la Cour internationale de Justice ni toute autre juridiction internationale ne s'étant clairement prononcée sur la portée juridique de ce principe en droit international de l'environnement, cette interprétation a contrario ne semble pas permise d'autant que les débats doctrinaux ne cessent quant à la détermination de la valeur de ce principe, et qu'un consensus semble exister quant à l'absence de valeur coutumière de ce même principe. * 35CE - Mesures concernant les viandes et les produits carnés (Hormones), Rapport de l'Organe d'Appel (WT/DS26, 48/ABR), 13 février 1998 * 36 Précit. * 37 On sait que l'article 5§7 autorise une approche de précaution. Lorsque les preuves scientifiques sont insuffisantes, le membre peut prendre des mesures provisoires ; l'approche revêt donc un caractère temporaire. Or, dans l'affaire de la viande aux hormones, les Communautés estimaient que le principe devait s'appliquer aux autres dispositions de l'article 5. * 38 Article 5 § 4 de l'Accord SPS. * 39MARTIN-BIDOU (P.) « Le principe de précaution en droit international de l'environnement », op. cit. p. 649. |
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