2. Concurrence déloyale dans le domaine des soutiens
offerts à l 'agriculture dans les pays développés.
L'agriculture est un secteur qui bénéficie
d'importants concours financiers de la part des Etats. Ces subventions
permettent aux Etats les plus puissants économiquement d'apporter des
soutiens à l'exportation de leurs produits de telle sorte qu'ils soient
vendus à un prix largement en deçà des coûts de
production (dumping). Ces pratiques ont des effets de distorsion sur les prix
internationaux qu'ils contribuent à tirer à la baisse au
détriment des producteurs des pays les moins avancés. Cette
situation est plus déplorable dans la mesure où certains pays ont
vu leur production interne décimée du fait de l'invasion des
produits étrangers à faibles coûts. Au Cameroun on cite
souvent le cas du poulet congelé dont les importations entre 1997 et
2003 ont accru de 300%. La production nationale a risqué la faillite.
Elle a décru de 50% passant de 21000 tonnes à 13000 tonnes de
2000 à 2003. Les pressions des producteurs locaux sur les pouvoirs
publics ont permis de lever l'exonération bénéficiant aux
poulets importés et d'imposer une TVA de 17%. Les mesures prises dans le
cadre de l'Accord sur l'agriculture pour corriger de telles situations se sont
avérées complètement inefficaces. En fait cet accord
prévoyait une réduction progressive des subventions à
l'exportation pour les pays qui en faisaient usage. Dans la pratique on est
plutôt parvenu à l'instauration d'un régime
discriminatoire. Sur 137 pays membres de l'OMC, 25 bénéficient en
réalité d'un quasi droit à subventionner alors que
d'autres sont exclus de la capacité à soutenir leur agriculture.
Les pays développés sont priés de réduire leurs
subventions de 36% en valeur et de 21% en quantité. Les pays
émergents doivent en ce qui les concernent réduire respectivement
de 21% et de 24%. Pour tous les autres pays les plus pauvres, il leur est
interdit de recourir à ce type de soutien. Actuellement les
négociations commerciales à l'OMC en ce qui concerne
l'agriculture portent sur les réductions des subventions des pays
développés. Cet objectif de réduction ne devrait pas
changer pas grand-chose puisque en définitive on aura touj ours une
agriculture injuste et inefficace pour les producteurs des pays en
développement. Ceci est d'autant plus certain lorsqu'on considère
que dans la déclaration de Doha reconnaissant la nécessité
de parvenir au retrait progressif des subventions, les pays membres ont
refusé de fixer une échéance à cet objectif. L'UE
et les EU sont les premiers bénéficiaires de ce régime
discriminatoire. D'après les données du secrétariat de
l'OMC les subventions de ces pays en ce qui concernent certains produits ont
même
1 L'accord antidumping permet à un pays d'appliquer des
mesures de protections à l'égard d'un produit spécifique
lorsqu'il est importé dans des quantités telles qu'il cause ou
menace de causer un dommage à la production nationale (voir cas textile
chinois)
augmenté entre 1995 et 19981. Les produits
principalement affectés par ces mesures de Dumping sont les produits
laitiers les céréales et la viande de boeuf. Toutefois de
nombreuses cultures pérennes impliquant directement le Cameroun sont
aussi concernés. Il s'agit par exemple de la culture du coton. Le
café et le cacao sont concernés par des mesures indirectes qui
sont la conséquence de l'évolution de l'environnement mondial.
Selon les analyses du secrétaire exécutif camerounais du CICC, le
mouvement mondial va vers la concentration des grands opérateurs dans le
domaine. Cette concentration est le fait que la production agricole est
désormais dominée par quelques multinationales et des
sociétés de production alors que dans le même temps la
libéralisation agricole au Cameroun a conduit un éclatement de
l'offre nationale. La conséquence est double pour les agriculteurs : la
fragilisation dans les procédures de négociation et la baisse
continuelle du prix versé au producteur. Le prix versé à
l'agriculteur ne constitue plus qu'une part infime du prix final : il est de
l'ordre de 7 à 8 % pour le coton brut.
Pour ce qui est des soutiens internes c'est à dire
toutes les interventions qui créent des distorsions dans le commerce
international, l'objectif est de parvenir à une réduction pour
permettre aux forces du marché de déterminer la production
agricole mondiale. Les pays développés ont consentis à
diminuer leurs soutiens internes de 20% en six ans et les pays en
développement de 13,3% en dix ans. Les mesures découplées
qui ne sont pas directement liées au volume de la production sont
toutefois autorisées. C'est le cas de toutes les mesures qui concernent
la protection de l'environnement (boîte verte)2. Les PMA comme
le Cameroun, n'ayant notifié aucune aide se sont engagés à
ne pas introduire de tels soutiens dans le future. Toute chose qui est de
nature à consacrer en pratique un régime juridique
discriminatoire. Le rapport d'information de l'assemblée nationale
française reconnaît cette difficulté pour les PVD. Pour ses
rédacteurs, le fait d'avoir notifié des soutiens nuls à
l'OMC les empêche, en raison des périodes de
référence utilisées par les règles
multilatérales, de mettre en oeuvre, aujourd'hui, des soutiens
classés dans la boîte orange, qui regroupe les soutiens aux prix
et les mécanismes de régulation des cours. Or, pour ces pays, ce
sont les soutiens les moins coûteux, car ils pèsent moins sur un
budget de l'Etat limité que les aides directes au revenu. La seule
possibilité de soutien disponible actuellement pour un pays en
développement est d'utiliser les aides classées en boîte
verte, c'est-à-dire entièrement découplées de la
production. Etant directement financées par le budget de l'Etat, le
faible niveau de ce dernier, conjugué au poids de la dette, les rend
de
1 OMC, document G/AG/NG/S/5, 11 mai 2000
2 Dans les négociations à l'OMC, les subventions
sont classées en catégories désignées par une
couleur à l'image des feux de circulation. On observe une Boîte
verte boîte (Aides autorisés concernant la protection de
l'environnent, une Bleue (Aides tolérées accordées au
cheptel ou à l'hectare payée sur un rendement fixe et non
liées au prix), et une Boîte Orange (Aides proscrites directement
liées à la production ou aux prix)
fait pratiquement inaccessibles à la plupart des pays
en développement1. Par ailleurs comme pour ce qui est des
mesures liées aux subventions, les EU et l'UE ont détourné
ces objectifs de réduction pour échapper à leurs
obligations. Ils ont par exemple négocier pour fixer la période
cible pour le calcul des réductions à la période
correspondant au pic de leurs soutiens internes c'est à dire entre
1986-1988. De plus, ces pays ont restructurés leurs programmes nationaux
de soutiens agricole par rapport à ces nouveaux canevas. On observe un
transfert des aides de la boîte bleu vers la boîte verte ; le
secrétariat de l'OMC constate que parmi les prestations inscrite dans la
boîte verte la part des paiements directes a augmenté de 23% en
1995 à 43% en 1998.
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