III.2.2. Le dynamisme des sites : une construction
« in situ »
Face aux modèles universels qui d'emblée
ignorent la grande variété des sociétés humaines,
qui considèrent qu'un modèle de changement social et
organisationnel peut être interchangeable d'un espace humain à un
autre, il serait préférable de les revisiter afin de les adapter
à l'extrême variété des sites. Car, le monde se
caractérise par une extrême diversité de situations et
populations.
On parachute souvent des modèles, sans prendre en
considération le milieu, la diversité des populations, des
cultures. Ces modèles sont ainsi totalement déconnectés
avec le territoire local. Or, chaque site est singulier, chaque site a son
propre système de croyances. Et ces transplants aveugles, peuvent
provoquer des désastres tels que nous les avons évoqués
dans ce qui précède.
Il faut en fait se garder de toute simplification hâtive
des mécanismes relatifs à l'homo oeconomicus, selon
lesquels, l'acteur est supposé se comporter de la même
manière en tout lieu et en tout temps. Ce postulat masque et qui
détruit la diversité des sites et situations.
Ainsi, les désastres causés par le
développement du tourisme de masse sont principalement dus au fait que
le site n'a pas été au préalable clairement
identifié et étudié. Car, on est souvent tenté de
céder à la facilité : transposer les visions et les
concepts de notre monde. On nie la diversité, le poids des cultures et
des histoires.
De ce fait, il faut mettre en place des projets qui soient
adaptés aux contingences locales et non plaquer sur des sites des
modèles pré-établis. Ceci présuppose donc que l'on
sorte du réductionnisme qui prolonge une seule et unique façon de
concevoir l'économique, qui transpose un modèle unique sur tous
les sites. Les projets touristiques doivent donc être propre au site et
être adaptés à la diversité des situations, donc
harmonieux.
Pour ce faire, il faut décrypter les valeurs, les
pratiques du site, décryptage qui fera par un travail d'observation et
d'écoute du site, et notamment par un voyage dans la proximité et
l'intimité du site.
Il faut donc s'en imprégner pour mieux le
connaître. Il faut d'abord collecter les informations sur le site, par
une recherche interdisciplinaire, c'est-à-dire qu'il faut
considérer le milieu avec toutes ses caractéristiques :
économiques, sociales, culturelles, physiques,... avant de pratiquer une
politique de développement touristique. Seul ce type de politique
d'ensemble, multisectorielle, peut orienter le tourisme vers un
développement durable. En outre, les populations devront participer et
devenir de véritables acteurs d'u développement local durable.
Actuellement, beaucoup font le projet et ensuite interrogent la population.
Mais, il faut que l'homo situs participe, dès le départ,
à l'élaboration des projets. Et, lorsque le projet sera
élaboré, les gestionnaires devront être constamment
à l'écoute du site pour effectuer si nécessaire des
adaptations.
Ainsi, avant de mettre en place un projet, il faut au
préalable connaître la « boîte noire »
du site, c'est-à-dire les croyances, les valeurs, l'éthique, les
réseaux d'appartenance, sa culture ambiante... et ensuite, il sera
possible de mettre en place la « boîte conceptuelle »
suivi de la «boîte à outils », soit les modes
d'action. Il faut d'abord écouter avant de conceptualiser.
Sans cette attention et cette écoute du site, il n'est
pas possible d'obtenir une croissance harmonieuse du projet. Les
désastres causés par le tourisme de masse qui ont ignoré
le site, le territoire au départ, au profit d'une uniformisation du
« produit » touristique, en sont l'exemple type.
La pertinence d'un modèle de développement
touristique se mesure ainsi au degré d'enracinement dans les cultures et
les pratiques locales, dans l'intimité du site. Il n'est pas possible de
mettre en place une forme de tourisme qui nierait le territoire.
La mondialisation, perçue comme l'extension
planétaire du modèle unique, ne produit pas donc des effets
identiques en tout lieu et en tout temps.
Ainsi, un tourisme durable serait un tourisme construit
à partir du territoire, en osmose avec le site, et
développé en partenariat avec la population locale. Ce qui induit
écoute, déchiffrage et rééquilibrage des
comportements.
En résume, le tourisme situé vise
à sauvegarder le site et sa capacité à gérer
durablement son patrimoine culturel. De ce point de vue, on peut dire que le
tourisme situé articule les cultures locales avec la
préservation de l'environnement. Cette sauvegarde qui est la base de la
durabilité et de la qualité du site (l'identité du site,
la qualité de l'écosystème, éducation
interculturelle de touristes...).
Conclusion du chapitre :
Le Maroc jouit d'une diversité de
paysages qui font de lui une destination à la carte, ne proposant pas un
seul menu comme c'est le cas pour certaines destinations touristiques qui n'ont
à offrir par exemple que le Balnéaire (soleil et mer). En effet,
de Tanger à Dakhla, d'Essaouira à Ourzazate, de Marrakech
à Saidia, c'est une variété de paysages que l'on rencontre
et une multiplicité de climats qui se juxtaposent (climat
méditerranéen, océanique, continental, montagnard,
saharien, etc. ).
Le Maroc jouit aussi d'une grande diversité de
cultures, de coutumes, de traditions artistiques, artisanales, vestimentaires,
culinaires qui font la richesse de son patrimoine.
Ayant une histoire millénaire et occupant une position
de carrefour entre plusieurs civilisations, le Maroc occupe une place
privilégiée dans le domaine des échanges humains.
Situé à proximité immédiate ( 14 KM ) d'un grand
marché pourvoyeur de touristes, ce qui est un atout de taille pour le
Maroc.
Malgré tout ces atouts géographiques climatiques
et culturels, le Maroc ne bénéficie que d'une faible part du
tourisme mondial aussi bien en termes d'arrivées de touristes qu'en
termes de recettes touristiques qui sont respectivement de 0,61% et de 0,43% en
2000 et ce, alors même que ses potentialités touristiques
pourraient largement lui permettre d'être classé parmi les
premières destinations touristiques dans le monde. Cette situation est
due essentiellement à certains problèmes et handicaps qui
continuent à entraver le développement de secteur et d'une
mauvaise planification.
Pour faire face à cette situation, il
va falloir absolument tracer une politique rationnelle, cohérente,
raisonnable, et viable écologiquement. Le tourisme est comparable
à une chaîne où la moindre erreur porterait
préjudice à l'ensemble et par la même à
l'image de marque du Maroc.
Aussi, pour remédier à ces effets
néfastes tant au niveau environnemental qu'au niveau social. Il nous
semble judicieux de concilier les intérêts économiques,
sociaux, culturels, et environnementaux, afin de construire des
cohérences et des harmonies en matière de
développement.
C'est pourquoi selon différents auteurs : ZAOUAL,
LATOUCHE ou TOURAINE, le tourisme doit s'inscrire dans la prise en compte du
local et comme la préconise H. ZAOUAL dans la logique de la
théorie des sites symboliques d'appartenance.
En effet, pour représenter un moyen efficace de
favoriser le développement local, les politiques touristiques doivent
s'adapter au cadre de vie ainsi qu'aux richesses patrimoniales du milieu local
afin de promouvoir un tourisme responsable et durable.
Bref, considéré le milieu avec toutes ses
caractéristiques : économiques, sociales, culturelles,
physiques... avant de pratiquer une politique de développement
touristique.
Seule une politique d'ensemble, multisectorielle, peut
orienter le tourisme vers un développement durable.
|