UNIVERSITE DE GENEVE
FACULTE DE DROIT
Département de Droit International
Public
et d'Organisations Internationales
LE RÔLE ET LA PLACE DES ETATS DANS LE
FONCTIONNEMENT DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE
MEMOIRE
Présenté et soutenu publiquement pour
l'obtention du
Diplôme d'Etudes Approfondies
(D.E.A.)
En Droit International Public
Par M. Désiré Yirsob
DABIRE
(Burkina Faso)
Sous la direction du Professeur
Marco SASSÒLI
Mars 2006
INTRODUCTION
La promptitude avec laquelle le Statut de la Cour
Pénale Internationale (CPI)1(*) est entré en vigueur, a agréablement
surpris plus d'un. Quatre années seulement ont suffit pour atteindre les
soixante instruments de ratification nécessaires2(*). Encore mieux, des
enquêtes sont déjà en cours, menées par le bureau du
procureur3(*), suite aux
affaires à lui portées par trois Etats d'Afrique4(*). Le « pas de
géant »5(*) a été accompli.
Mais déjà se dressent les obstacles. Le
scepticisme observé quant à l'entrée en vigueur de la
Cour6(*) fait aujourd'hui
place aux inquiétudes au sujet de son fonctionnement. Un des plus
importants obstacles (mais qui pourrait être un atout majeur), sinon le
principal, est bien la conduite des Etats envers la Cour. En témoigne le
fait que l'un des pays ayant saisi la Cour, envisagerait de retirer sa plainte
pour dit-il, favoriser les négociations de paix7(*). Ce pouvoir lui est-il
reconnu ? Qu'adviendrait-il si tel était le cas ?
Le constat d'une certaine réticence des Etats à
coopérer avec les juridictions internationales pénales est
décevant8(*). L'on
espère cependant que la situation change positivement avec la CPI, pour
la création de laquelle le rôle des Etats a été plus
déterminant.
La Cour est née en effet d'un traité
interétatique9(*).
L'application de tout traité international dépendant des parties,
le bon fonctionnement de la CPI sera tributaire du comportement des Etats
membres.
Le Statut requiert des Etats qu'ils
« Coopèrent pleinement avec la Cour
10(*)». C'est l'obligation
mise à leur charge pour la bonne marche de l'activité de la Cour.
La question de la coopération et/ou de l'assistance judiciaire, avec les
juridictions internationales, a toujours été au centre des
préoccupations en droit international pénal. Prévue dans
de nombreux textes, aussi bien bilatéraux que multilatéraux, la
coopération - particulièrement avec les juridictions
internationales - est la pierre angulaire du système de la justice
pénale internationale.
Le compromis11(*) obtenu à Rome sur les dispositions du Statut
plus particulièrement celles relatives aux critères de
compétence de la Cour12(*), n'a pas annihilé tous les obstacles
existants. Beaucoup de résistances demeurent en effet, et des Etats ne
sont pas encore acquis à la cause de la nouvelle juridiction ou s'y
opposent ouvertement 13(*). Or, il va sans dire qu'au delà de la
création de la Cour, le déroulement effectif de ses
activités est nécessaire. L'éternelle et épineuse
question de la souveraineté des Etats et ses multiples implications
jettent encore une ombre sur les activités de cette instance
internationale14(*). Ces
dernières ne peuvent pourtant pas se dérouler efficacement sans
le concours des Etats concernés dans les affaires dont elle est saisi;
que ce concours soit obligatoire comme c'est le cas pour les Etats ayant
ratifié le Statut, ou non pour les Etats non parties. Tant les Etats
parties que ceux non parties pourront être sollicités par la Cour
dans différentes affaires. En effet, des Etats non parties pourront
être impliqués dans des affaires qui relèvent de la
Cour, parce que les faits incriminés, commis par des nationaux
d'Etats parties ont eu lieu sur leur territoire, ou parce que au contraire, ce
sont leurs nationaux qui les ont commis sur le territoire d'un Etat parties. Ce
peut encore être en raison de la saisine de la Cour par le Conseil de
sécurité des Nations Unies ou de leur acceptation de la
compétence de la Cour pour une affaire précise survenue sur leur
territoire et n'impliquant que leurs nationaux15(*). C'est le cas pour cette dernière
hypothèse par exemple de la Côte d'Ivoire - Etat signataire mais
non encore partie au Statut - qui a accepté la compétence de la
Cour pour les crimes commis sur son sol depuis les évènements du
19 septembre 200216(*).
Aux diverses étapes de son activité, la Cour
devra inéluctablement agir sur le territoire d'Etats (souverains) qui
sont d'une manière ou d'une autre impliqués dans une affaire
donnée. Les Etats ont en effet doté la Cour de certains pouvoirs,
qui ne peuvent cependant s'exercer sur leurs territoires respectifs sans leur
volonté et leur approbation. Cela est surtout vrai pour les Etats non
parties qui n'ont aucune obligation envers la Cour. Quant aux Etats parties,
cette qualité de partie implique l'approbation qui devra surtout se
ressentir dans la pratique. Ainsi, « la route ne s'arrête
pas à Rome »17(*), le concours des Etats est loin d'être
terminé avec la signature ou la ratification du traité. Bien au
contraire.
Certes, il existe pour les Etats parties l'obligation
conventionnelle de coopérer avec la Cour, mais dans la pratique, de
nombreuses raisons peuvent justifier le refus d'un Etat de
coopérer18(*).
Ce raisonnement nous amène à examiner le
rôle et la place des Etats dans le fonctionnement de la Cour
pénale internationale. Cet examen sera mené suivant une
démarche en trois étapes, axées sur la question centrale
de la coopération des Etats avec la Cour
Le Statut de Rome, fort de ses 128 articles, mentionne
notamment au chapitre IX, les éléments de l'obligation pour les
Etats de coopérer et d'assister la Cour. A plusieurs phases de son
activité la Cour va requérir l'intervention des Etats. Le terme
de coopération, bien que très fréquent dans les rapports
Etats/CPI, n'apparaît pas suffisamment explicite au regard du Statut,
quant à ce qui est attendu des Etats. Ceux-ci sont ils tout puissants
devant la Cour du fait de leur souveraineté, ou les impératifs de
justice pour l'humanité toute entière leur imposent-ils des
limites, au-delà même du Statut ?
Le rôle des Etats sera donc examiné aussi bien
par rapport aux dispositions du Statut qu'aux règles du droit
international général. Il fera essentiellement l'objet du
chapitre 2. Le chapitre 1 pour sa part sera consacré à une
présentation générale de la Cour, de sa place au sein du
système international, et aussi des principes de base de ses rapports
avec les Etats.
La Cour est une juridiction pénale, avec une
compétence limitée aux individus19(*). Les Etats sont donc hors de son champ d'action. Le
Statut ne prévoit donc aucune sanction pour les Etats qui viendraient
à manquer à leur « obligation
générale de coopérer »20(*). Cela bien qu'il soit fait
allusion à l'éventualité d'un manque de coopération
par les Etats dans ses dispositions 21(*). Pourtant, certains Etats sont encore
hésitants quant à une pleine coopération avec la cour.
Plusieurs raisons sont avancées pour justifier une telle attitude. En
effet, pour des motifs aussi bien politiques que juridiques, nombre d'Etats ne
veulent pas coopérer avec la CPI. Il est donc opportun de se pencher sur
la question. Des sanctions existent-elles en cas de non coopération ou
de tout autre manquement par un Etat à ses devoirs et obligations ?
Comment sont-elles, le cas échéant, mises en oeuvre? En tout
état de cause, l'importance reconnue aux Etats engendre pour eux une
responsabilité lorsqu'ils n'assumeront pas leurs tâches, et alors
peut être même des sanctions.
Il conviendra d'évoquer aussi dans ce contexte de
responsabilité des Etats, le rôle que peut jouer l'ONU pour
appuyer la Cour dans son action de répression des crimes internationaux,
lorsqu'une réticence des Etats à coopérer est
constatée (Chapitre 3).
CHAPITRE 1 :
LA COUR PENALE
INTERNATIONALE (CPI),
PREMIERE JURIDICTION
INTERNATIONALE PENALE PERMANENTE.
La CPI est unique en son genre. Aucune des
juridictions pénales supranationales qui ont existé ou qui
existent encore ne cumulent ses deux caractéristiques. Elle est à
la fois internationale et permanente.
Des tribunaux pénaux multilatéraux22(*) ad hoc, aux tribunaux
pénaux internationaux ad hoc23(*), on aboutit avec la CPI, à une instance
pénale internationale permanente. Il va sans dire qu'une nette
évolution s'est opérée (section 1), avec une implication
toujours plus importante de la communauté des Etats. La CPI est
aujourd'hui pleinement fonctionnelle et il est important qu'elle puisse exercer
et assumer le rôle qui lui est dévolu au sein du système
international (section 2).
Section 1 : Les origines de la Cour
La Cour Pénale Internationale est l'aboutissement d'une
évolution dont les origines se retrouvent bien avant les tribunaux
militaires de la fin de la seconde guerre mondiale (paragraphe 1). Partie d'une
initiative individuelle au départ, l'idée de créer une
juridiction pénale permanente va se transposer progressivement au niveau
étatique (paragraphe 2).
Paragraphe 1 :
L'évolution vers la CPI
Le chemin vers la Cour issue du Statut de Rome pourrait
être présenté en deux étapes, marquées par
des interruptions multiples. D'abord par un aperçu qualifié
d'historique (A), ensuite par une vue sur une période plus
récente qui est la mieux connue (B).
A - Aspects
historiques24(*).
L'un des précurseurs de l'idée de
création d'une Cour criminelle internationale fut Gustave
Moynier25(*). Ce dernier
émit en 1872 l'idée de mettre en place un tribunal de cinq
membres (dont un représentant par belligérant et trois
désignés par les Etats neutres), afin de punir les
atrocités commises lors du conflit franco prussien26(*). L'initiative échoua et
ne connut pas plus de succès lorsqu'elle fut renouvelée deux
décennies plus tard, en 1895, lors d'une session de l'Institut de Droit
International en Angleterre.
Cette première série d'échecs ne freina
pas pour autant l'action qui avait été lancée. Ainsi,
l'initiative fut de nouveau remise en marche, pour aboutir à la
convention de La Haye de 190727(*). Avec pourtant une compétence limitée
à la capture internationale de navire (piraterie), le tribunal
international prévu dans cette convention ne vit jamais le jour
malgré la bonne volonté de quelques puissances. La fin de la
1ère guerre mondiale vit renaître le projet de
créer une Cour pénale internationale. La conférence de
paix de 1919 instaura une commission qui décida de la création
d'une juridiction pénale internationale. Mais les ambitions de cette
commission furent revues à la baisse à cause d'objections
manifestées par certains Etats, avec en tête les Etats Unis. En
définitive, seul un tribunal interallié fut créé
par le traité de Versailles qui mit fin à la guerre de 1914 -
1918, avec pour seule mission de juger Guillaume II l'empereur
allemand27(*). Mais, une
fois de plus, cette instance n'aura jamais l'occasion d'entrer en
activité puisque le principal et seul accusé, entre temps
réfugié aux Pays-Bas, ne sera jamais extradé par ce
pays27(*).
Plus tard, avec l'avènement de la Société
Des Nations, il fut décidé de la création de la Cour
Permanente de Justice Internationale (CPJI). Le baron Deschamps, alors
président de la commission chargée de réfléchir sur
les statuts de cette Cour, émit une idée assez originale :
celle d'annexer à la CPJI une haute cour de justice internationale qui
statuerait sur les crimes contre le droit des gens. Cependant, bien que
soutenue par l'ensemble de la Commission, cette idée fut jugée
prématurée par l'assemblée des Etats qui ne donna pas de
suite à l'initiative.
Malgré ces infortunes, ce projet a continué
d'être entretenu. C'est ainsi qu'avec la fin de la 2ème
guerre mondiale et les horreurs qui l'ont minées, la perspective de mise
sur les rails d'une instance répressive internationale va ressurgir et
même connaître un certain aboutissement. En effet, les puissances
alliées vainqueurs de la guerre, instaurèrent par l'Accord de
Londres du 8 août 1945, le tribunal militaire international de Nuremberg,
et celui de Tokyo en 1946 par la Déclaration du commandant des forces
alliées. Ces tribunaux avaient pour mission de juger les criminels de
guerre nazis de l'Allemagne d'Hitler27(*), et Japonais. Malgré les nombreuses critiques
dont ils furent l'objet28(*), ces tribunaux ont été la
première manifestation concrète de la justice pénale
internationale moderne.
Quelques années après ces procès
historiques, la communauté internationale, plus homogène avec la
naissance de l'ONU, signa à New York en décembre 1948 la
convention sur la répression du crime de génocide. La
particularité de ce texte est qu'il prévoit en son article 6, une
cour criminelle internationale 29(*), compétente pour connaître des crimes
commis en violation de ses dispositions. Cette cour ne fut pas mise en place
une fois de plus, mais cette convention donna une grande impulsion pour des
réflexions sérieuses sur les textes d'une future cour criminelle
internationale.
B - Evolution
contemporaine 30(*)
En prenant pour repère les travaux dans le cadre de
l'ONU, il a fallu cinquante années pour aboutir à l'adoption du
Statut de la cour pénale internationale, dont l'article 6 de la
Convention de 1948 envisageait la création. A la demande de
l'Assemblée Générale, la Commission du Droit International
avait, dès le début des années cinquante, entrepris une
étude sur la question. Ses travaux connurent cependant une
léthargie, due au contexte de la guerre froide et aux divergences
d'idéologies qui empêchaient tout débat constructif. Le
silence dura jusqu'à la session annuelle de l'Assemblée
Générale des Nations Unies en 1989. C'est en effet au cours de
cette session, que Trinidad et Tobago proposa de reprendre les
réflexions sur une cour pénale permanente31(*). Le véritable tournant
interviendra cependant quelques années plus tard, avec la
création par le Conseil de sécurité de l'ONU, et ce
successivement, des tribunaux pénaux internationaux pour l'ex
Yougoslavie en 199332(*)
et pour le Rwanda en 199433(*), en vertu des pouvoirs du chapitre VII de la Charte.
Ainsi et à l'instar des sursauts
précédents, ce sont des conflits de grandes ampleurs qui ont
justifié la résurgence de l'idée de mettre en place un
tribunal pénal international. Pour la première fois depuis
Nuremberg et Tokyo, la répression pénale internationale des
crimes considérés comme des offenses à l'humanité
toute entière devenait réalité.
Les évènements atroces de l'ex-Yougoslavie et du
Rwanda, ajoutés à la controverse suscitée par la
création des deux tribunaux pénaux internationaux ont
réussi à convaincre nombre d'Etats que la création d'une
cour permanente internationale, au moyen d'une convention multilatérale
était la solution la meilleure. En effet, ces tribunaux ont
été qualifiés d'illégaux et d'illégitime au
regard du mode et du fondement juridique de leur création par le Conseil
de sécurité des Nations Unies 34(*).
La Commission du Droit International fut en mesure de
présenter un projet de statut à l'Assemblée
Générale dès 1994. Ce projet fut examiné par un
comité ad hoc établi en 1995, et dont le rapport fut
encore soumis à un comité préparatoire. C'est le projet
consolidé par ce comité préparatoire qui a
constitué le document de base des négociations de la
conférence diplomatique de Rome. Cette conférence qui s'est tenue
du 15 juin au 17 juillet 1998, avait pour but de mettre au point la version
définitive du Statut de la Cour Pénale Internationale et surtout
d'obtenir son adoption par les Etats.
Paragraphe 2 : La CPI,
produit d'un compromis international entre
les Etats 35(*)
Comme il a été souligné dans les
développements précédents, la reprise des travaux de la
CDI intervenue à l'initiative de Trinidad et Tobago en 1989, et
l'impulsion des tribunaux ad hoc de 1993 et 1994 36(*), sont les derniers
évènements qui ont permis l'aboutissement de l'idée de la
création de la Cour, lors de la conférence diplomatique des
plénipotentiaires qui s'est tenue à Rome du 15 Juin au 17 Juillet
199837(*).
Un peu plus d'un mois a donc été
nécessaire à la Conférence pour examiner le texte du
Statut soumis aux Etats, et surtout pour surmonter les divergences de points de
vue afin de parvenir à un accord sur le texte fondamental de la future
juridiction internationale.
Le projet initial du Statut comportait une multitude de
clauses sur lesquelles les avis divergeaient sensiblement. En effet,
l'assentiment de tous les participants était loin d'être
trouvé sur des sujets particulièrement sensibles, et qui ont
depuis le début fait l'objet d'importantes réflexions. Ces sujets
étaient pour l'essentiel relatifs à la définition des
crimes relevant de la compétence de la Cour, les qualités pour
déclencher l'exercice des poursuites, les relations avec le Conseil de
sécurité de l'ONU, les règles de base de procédure
et enfin le mode de financement de la Cour38(*). Ces sujets constituaient les plus importants, et il
était indispensable pour les Etats de trouver un terrain d'entente pour
que la CPI puisse voir le jour. Il était nécessaire de
réussir là où d'autres tentatives avaient
échoué par le passé.
Le mois de négociation prévu pour la
conférence s'est avéré presqu'insuffisant pour aplanir les
divergences entre Etats, tant les kyrielles de propositions achoppaient les
unes sur les autres. Il a fallu en dernier ressort, une proposition du
président de la conférence, qui a su habilement concilier
l'essentiel des suggestions et offrir aux participants ce qui a
été appelé le « Package deal
»39(*) .
Cette technique a été salutaire puisqu'elle a permis à la
conférence de s'achever sur la note la plus positive qui pouvait
être espérée : l'adoption du texte définitif du
Statut.
Sur 160 Etats présents, 120 ont voté pour, 7
contre40(*) et 21 se sont
abstenus41(*). Quatre ans
plus tard, le Statut entrait en vigueur le 1er juillet 2002,
après que 10 nouveaux Etats aient déposé en même
temps leurs instruments de ratification, permettant ainsi d'atteindre les
soixante ratifications nécessaires en vertu de l'article 126 du
Statut.
La volonté des Etats est d'autant plus sensible,
lorsqu'on sait que nombre d'entre eux ont dû modifier sensiblement leur
législation nationale, pour être en conformité avec les
dispositions du texte du Statut et permettre ainsi sa ratification. Le
compromis international s'observe en outre dans la composition de la Cour. Les
juges qui la composent sont issus en effet des divers horizons et de divers
systèmes juridiques de la communauté des Etats42(*).
La Cour Pénale Internationale est donc une
réalité aujourd'hui. Il s'agit maintenant de lui assurer une
bonne insertion dans le système international, et surtout un bon
fonctionnement.
Section 2 : Le
rôle de la Cour dans le système international
Voilà aujourd'hui plus de trois ans que la Cour est
entrée en activité. Mieux, cinq situations sérieuses lui
ont été soumises, dont deux font l'objet d'une enquête par
le procureur.43(*) Il
faudra désormais compter avec elle dans la répression des crimes
les plus graves contre la dignité, l'intégrité physique ou
la vie humaine (paragraphe 1) qui entrent dans son domaine de compétence
(paragraphe 2).
La Cour devra cependant « affronter » la
souveraineté des Etats, principal obstacle à son affirmation et
à son efficacité (paragraphe 3).
Paragraphe 1 : La CPI, un
instrument juridique indispensable pour
achever l'oeuvre de justice mondiale
La Cour Pénale Internationale est née
après que la communauté internationale ait pris conscience de
l'utilité des tribunaux pénaux internationaux mais aussi de leurs
insuffisances, au regard de l'expérience de ceux qui existaient
déjà, notamment les tribunaux ad hoc. L'une des missions
de la CPI sera donc sans doute de combler les insuffisances constatées.
Les TPI créés par le Conseil de sécurité l'ont
été pour des cas spécifiques, donc limités dans le
temps et dans l'espace. Ainsi par exemple, les crimes qui ont été
perpétrés au Rwanda après les 31 Décembre 1994 (et
il y en a eu) ne pourront être couverts par le TPIR44(*). En outre, si la poursuite des
crimes devient de plus en plus tentaculaire, la prolifération des
tribunaux ad hoc pourrait entraîner des résultats
différents de ceux recherchés. Ainsi, apparaît le
caractère circonstanciel de ces instances, et la relative
fragilité qu'il entraîne, pour des crises majeures où la
communauté internationale décide de s'impliquer totalement.
Combien de situations où se commettent d'autres atrocités et qui
demeurent à l'écart des préoccupations de l'heure :
la Somalie, le Congo (Brazzaville)..., n'ont pas été à
l'origine de juridictions internationales ad hoc, bien qu'à
l'évidence il y eût, dans chaque cas, matière à
enquêtes, à poursuites et à sanctions sur la base
d'incriminations comparables ? La CPI se trouve être une
réponse à cette insuffisance.
Ensuite, il apparaît que les crimes
réprimés par le droit international requièrent, de par
leur envergure, la participation médiate ou immédiate d'individus
proches, sinon au sein, des plus hautes autorités gouvernementales ou
militaires des Etats. Normalement de tels criminels devraient être
traduits devant les juridictions nationales. Mais même en temps de paix,
a fortiori en période de conflit, les instances nationales sont
incapables de telles « prouesses », par manque de
partialité et d'opportunité ou tout simplement parce que
désorganisées par le conflit.
Dès lors, une suppléance doit être
assurée et la Cour, de par son caractère international, est
à même de jouer ce rôle de complémentaire aux
juridictions nationales défaillantes.
Enfin, il est malheureusement vrai que plusieurs situations
de crimes contre l'humanité ont pu être observées à
travers le monde45(*),
sans que les responsables ne soient inquiétés pour la plupart, ni
au plan international ni, encore moins, sur le plan national. Pour cette
raison, un des rôles importants que peut jouer la Cour est celui de la
dissuasion. En effet, l'existence de la CPI devrait avoir pour résultat
de faire prendre conscience aux éventuels criminels que l'époque
de l'impunité est révolue. La Cour Pénale Internationale,
par son caractère permanent (et, on l'espère, le plus universel
possible à la longue), sera une réponse à ces
considérations. Ses caractéristiques lui permettront de
préexister à l'éventuelle commission future de crimes
relevant de sa compétence et, partant, lui conféreront un
caractère dissuasif, déconnecté de toute logique purement
politique. La CPI devrait pouvoir, dans le long terme, inciter les juridictions
nationales à réprimer plus efficacement les crimes les plus
graves46(*) de par le
contrôle qu'elle est appelée à exercer sur celles-ci. La
Cour devra apprécier l'action des juridictions nationales lors de
l'examen de la recevabilité devant elle d'une affaire qui a
déjà fait l'objet d'enquête ou de jugement par ces
dernières, et qui lui est portée47(*).
« La CPI doit donc remplir les buts d'un
symbole de justice aussi bien qu'une réalité judiciaire efficace
qui puisse honnêtement pratiquer une justice rétributive et
réparatrice ».48(*)
D'ailleurs, le domaine de compétence de la Cour et les
définitions assez détaillées des crimes, prouvent qu'elle
veut pouvoir intervenir dans des situations variées.
Paragraphe 2 : Le domaine de
compétence de la Cour
Comme toutes les juridictions, la Cour a compétence sur
un territoire et dans une période donnés (A), et elle exerce
cette compétence à l'égard de certains crimes et de leurs
auteurs dans des conditions bien déterminées (B).
A- La compétence
rationae temporis et rationae loci
La Cour n'est compétente que pour les crimes
qui ont été ou qui seront commis après son entrée
en vigueur49(*). Ainsi,
les violations de son Statut, survenues après le 1er juillet
2002 tombent sous sa juridiction. De plus, pour ceux des Etats signataires qui
ont adhéré au Statut après la date de son entrée en
vigueur, la compétence de la Cour ne commence à courir
qu'à partir de la date d'entrée en vigueur du Statut à
leur égard.50(*)
Encore que chaque Etat peut, lors de son adhésion, suspendre la
compétence de la Cour à l'égard des crimes de guerre
commis pas ses ressortissants pour une période de sept ans. C'est ce qui
a été appelé l' «opting
out »51(*).
Telle est donc succinctement présentée, la
compétence de la Cour dans le temps.
Pour ce qui est de sa compétence territoriale, la Cour
a une compétence universelle, du moins lorsqu'elle est saisie par le
Conseil de sécurité de l'ONU en vertu du chapitre VII de la
Charte. Hormis cette hypothèse toute particulière52(*), la juridiction de la Cour
s'exerce sur le territoire des Etats membres où un crime a
été commis, ou non membres lorsque l'auteur du crime est
ressortissant d'un Etat membre. Enfin la Cour est également
compétente à l'égard d'un Etat non membre qui n'est pas
dans la situation précédente, mais qui a ponctuellement
accepté sa compétence pour un crime qui y est commis ou qui
implique ses nationaux sur un autre territoire non membre.53(*)
Le pouvoir accordé à la Cour en cas de saisine
par le Conseil de sécurité apparaît comme une limite
à la souveraineté des Etats (non parties, notamment), qui se
verraient appliquer la compétence d'une cour au Statut de laquelle ils
n'ont pas adhéré.
Du fait de son mode de création54(*), les critères de
compétence de la Cour imposent des restrictions à son champ
d'application et permettent malheureusement que certaines situations
d'échappent à sa juridiction et restent impunies. Il est donc
important de travailler à agrandir au plus vite le cercle des Etats
parties au Statut.
B- La compétence
rationae personae et rationae
materiae
Un des principes qui gouverne l'action de la Cour, est
qu'elle n'est compétente qu'à l'égard des personnes
physiques55(*). La Cour
fonctionne en effet sur la base de la responsabilité pénale
individuelle. Ce critère de compétence a pu permettre à la
Cour d'élargir un temps soit peu son champ territorial aux Etats non
parties. Ainsi, un crime prévu par le Statut et commis à
l'intérieur des frontières d'un Etat non partie à la
convention de Rome, entrerait néanmoins dans la compétence de la
CPI, si son ou ses auteurs présumés étaient les nationaux
d'un Etat partie au Statut56(*).
En outre, en vertu de l'article 26, l'accusé devra
être âgé de dix-huit (18) ans au moins pour pouvoir
être poursuivi devant la Cour.
Quant à la compétence matérielle, elle
est prévue par l'article 5 du Statut qui dispose dès le premier
alinéa que « la compétence de la Cour est
limitée aux crimes les plus graves qui touchent la communauté
internationale. ». Il est important de mentionner que le
degré de gravité suffisamment élevé des crimes
énumérés, est aussi une condition de recevabilité
devant la Cour57(*).
Ainsi, quatre crimes sont rangés dans cette catégorie : le
crime de génocide, le crime contre l'humanité, le crime de
guerre58(*) et le crime
d'agression59(*). Ce
dernier, bien que cité à l'article 5, ne fait pas encore
complètement partie des crimes relevant de la compétence de la
Cour, du moins jusqu'à ce qu'il ait été clairement
défini par l'Assemblée des Etats parties. C'est ce qui ressort de
la lecture du dernier alinéa de l'article précité60(*). La conférence de
révision du Statut qui se tiendra en principe en 200961(*), devrait permettre de faire un
état des lieux sur cette épineuse question.
Paragraphe 3 : La Cour
face à la souveraineté des Etats
Le principe de souveraineté est un concept très
présent en droit international. Il convient donc d'en exposer
brièvement les contours (A) avant d'évoquer les implications de
ce concept dans le Statut de la CPI (B).
A- La notion de souveraineté
Définie comme le caractère suprême du
pouvoir étatique62(*), la notion de souveraineté est aussi vieille
que l'Etat lui-même63(*). La souveraineté s'entend du pouvoir de l'Etat
de définir et d'exécuter sa politique intérieure et
extérieure, sans en référer à aucune autre
entité supérieure. C'est la qualité d'un État, qui
n'est soumis à aucune puissance extérieure ou intérieure.
Elle est la source de pouvoirs absolus, mais non pas illimités, de
l'Etat. En somme, la souveraineté est l'attribut fondamental de l'Etat,
sans laquelle il n'en est pas un. C'est l'expression de son indépendance
vis-à-vis des autres Etats64(*).
La notion de souveraineté a certes connu des
restrictions avec le développement du droit international et des
organisations internationales, mais elle jouit malgré tout
« d'une très bonne santé »65(*) et les Etats y sont encore
particulièrement attachés. Par conséquent, le processus de
formation des règles internationales ne peut ignorer cet état de
fait. Il est donc tout à fait compréhensible que les
prérogatives des Etats du fait de leur souveraineté aient, tout
au long des négociations de Rome, gouverné les propositions et
les décisions prises. Elles ont également constitué le
premier obstacle dans les négociations menées bien avant et
durant les débats66(*) et même du rejet de certaines propositions,
notamment sur la compétence de la Cour67(*). Cette situation trouve en outre son explication dans
le fait que la souveraineté est une notion très fortement
ancrée en droit pénal, aussi bien interne qu'international,
où elle gouverne toute la matière de la compétence des
tribunaux.68(*)
En conséquence de cette souveraineté des Etats,
le Statut contient quelques spécificités.
B- Les implications du
principe de souveraineté dans le Statut de Rome
De la situation exposée ci-dessus, naissent deux
constats qui méritent d'être discutés. Le premier est
l'adoption dans le Statut du principe de la complémentarité de la
Cour par rapport aux juridictions nationales des Etats (1). Le second est
constitué par les entorses à la souveraineté qui sont
contenues dans les dispositions du Statut (2).
1- Le principe de la
complémentarité de la Cour par rapport aux juridictions
nationales 69(*)
L'adoption du principe de la complémentarité est
une innovation dans le domaine des juridictions pénales
internationales70(*). Ce
principe est né de la volonté des Etats de garder un large
pouvoir dans la poursuite des crimes dans lesquels ils sont impliqués
directement ou non. Affirmé dès les premières lignes du
Statut71(*), le principe
permet aux Etats de rester les premiers gardiens des règles nationales
et internationales. En effet, ceux-ci conservent leurs prérogatives
normales en matière pénale interne, en vertu du principe de
territorialité par lequel chaque Etat est compétent pour les
crimes commis à l'intérieur de ses frontières. Mais, ils
peuvent aussi connaître de crimes internationaux perpétrés
en dehors de leurs frontières72(*). En vertu des principes de compétence
extraterritoriale, tels que la personnalité active ou passive et la
compétence universelle, les Etats peuvent être compétents
respectivement pour les crimes commis à l'étranger dont leurs
ressortissants sont auteurs ou victimes ou dont l'auteur ne présente
aucun de tels liens avec eux73(*).
Ainsi, en vertu du principe de la
complémentarité, les affaires qui ont été
déjà jugées, qui ont fait ou qui font l'objet d'une
procédure devant une instance judiciaire nationale, ne pourront plus
être déférées devant la Cour. Si cela arrive,
celle-ci doit les déclarer irrecevables. C'est en substance ce qui est
affirmé à l'article 17 (1) du Statut. L'existence d'un
système judiciaire solide et compétent, constitue le garant de
l'absence d'impunité pour les auteurs de crimes décrits dans le
Statut de Rome au niveau national. Le Statut respecte cet état de fait.
Malheureusement, les Etats ont du mal à remplir leurs
obligations en matière de répression des crimes internationaux,
et l'adage aut dedere, aut judicare74(*) n'est pas toujours efficacement mis en oeuvre. Si une
telle situation était observée, la Cour n'aurait plus
beaucoup de raison d'exister, mais ce n'est malheureusement pas encore le
cas 75(*). Par
conséquent, la Cour intervient dans les cas où pour une raison
particulière - manque de volonté ou incapacité de l'Etat
d'enquêter ou de poursuivre76(*) ou encore dans le cas où un jugement est
intervenu, que celui-ci soit intervenu dans les conditions mentionnées
à l'article 20 (3.a et b) - les Etats ne seraient pas en mesure de
mettre en oeuvre la primauté de juridiction qui leur est reconnue. Un
pouvoir de contrôle est, à cet effet, reconnu à la Cour
pour apprécier les conditions et la régularité des actions
judiciaires menées par les Etats parties, afin d'éviter toute
tentative de faire échapper un suspect à la justice77(*). La Cour est donc seule juge
de sa compétence. Ce pouvoir de la Cour vient mettre un bémol
à la marge de manoeuvre des Etats, et entame un temps soit peu leur
souveraineté.
Cependant, un des grands avantages du principe de
complémentarité est que, à long terme, il devrait
permettre de renforcer le principe de la compétence universelle, qui
impose aux Etats, de poursuivre les auteurs des crimes internationaux, quels
que soient leur nationalité, celle des victimes ou le lieu où ces
crimes ont été commis. Du fait que le Statut reconnaît aux
Etats la primauté de juridiction sur les crimes internationaux, ceux-ci
ont le devoir de prévoir ou de renforcer leur législation interne
en vue de se doter de la compétence universelle. Ils seraient en mesure
de poursuivre de façon plus élargie et plus efficace des crimes
qui ont eu lieu en dehors de leurs frontières78(*).
La CPI apparaît comme un recours contre l'Etat qui
faillirait en s'abstenant d'agir pénalement à l'encontre des
auteurs de crimes d'une particulière gravité. Il est donc
souhaitable pour les Etats de remplir leur obligation de poursuivre ces
crimes.
2 - Les limites
à la souveraineté des Etats
Le Statut recèle des limitations ponctuelles à
la souveraineté étatique. On peut en distinguer deux
d'inégale ampleur.
Une première limitation découle des
règles de compétence de la Cour. Celle-ci peut en effet s'estimer
compétente, si un crime international a été commis sur le
territoire d'un Etat partie. Il se peut donc que, le ressortissant d'un Etat
non partie au Statut qui a commis un crime de guerre sur le
territoire d'un Etat partie soit attrait devant la Cour Pénale
Internationale. De sorte qu'un Etat peut - à travers les poursuites
contre son ressortissant devant la Cour Pénale Internationale -
être quand même lié par un texte sans qu'il n'ait, à
aucun moment, accepté d'être lié par le Statut. Cette forme
d'atteinte à la souveraineté peut être constatée
également lorsque la Cour est saisie par le Conseil de
sécurité de l'ONU, comme c'est le cas avec la situation au
Darfour79(*). Dans ce cas
en effet, la compétence de la Cour s'étend à tous les
Etats parties ou non au Statut.
Une seconde limitation concerne l'exercice de
l'activité judiciaire interne. En dépit de la priorité
reconnue aux juridictions nationales, un Etat a-t-il toute latitude pour
exonérer éventuellement les coupables de crimes
internationaux ? Vraisemblablement non. Le Statut permet à la Cour
d'empêcher que pareille situation se produise par le contrôle
qu'elle peut exercer sur l'activité interne des tribunaux nationaux, et
même le cas échéant des organes législatifs. Il peut
donc en résulter une forme d'atteinte
à certains principes de souveraineté nationale. Ce peut
être par exemple le cas avec les lois d'amnisties nationales80(*). Ces lois qui sont des actes
de souveraineté des Etats, ont pour effet d'effacer toute
procédure judiciaire, passée ou en cours, concernant les crimes
auxquels elles s'appliquent. Dans certaines circonstances, elles posent un
problème pour la recevabilité d'une affaire devant la Cour,
lorsqu'elles concernent des faits qui relèvent de sa compétence.
Sont-elles opposables à la Cour ?
La limitation à la souveraineté des Etats est
matérialisée dans ce cas, par le fait que la Cour va devoir
apprécier une loi d'amnistie, acte souverain d'un Etat, dans l'examen de
la recevabilité d'une affaire qui en a fait l'objet. Cet examen se fait
en application du principe de la complémentarité et de la
règle non bis in idem81(*) (art. 20), qui posent les principes
applicables en cas de concurrence entre la Cour et les systèmes
nationaux, et en vertu de l'article 17 du Statut.
Deux situations se présentent. La loi d'amnistie peut
intervenir pendant le déroulement d'une procédure judiciaire sur
l'affaire en cause, et donc avant qu'une décision définitive ne
soit prise, ou après. Dans le premier cas, la procédure est
interrompue, alors que dans le second, c'est la condamnation qui est
annulée. Lorsque la Cour doit apprécier la recevabilité
d'une affaire, elle s'assure bien que les procédures dont cette affaire
a déjà fait l'objet n'ont pas été menées
« dans le dessein de soustraire la personne concernée
à sa responsabilité pénale »82(*). Une loi d'amnistie peut
malheureusement être adoptée dans un tel but. Et la Cour a le
devoir d'en examiner le contexte et les conséquences, afin
d'éviter qu'elle ne favorise l'impunité des auteurs des crimes
qui sont couverts.
Bien que le Statut ne parle que de procédures, et ne
fasse aucunement mention de lois d'amnistie, celles-ci doivent être
prises en compte, eu égard à l'incidence majeure qu'elles ont sur
lesdites procédures. La loi d'amnistie nationale est donc soumise au
contrôle de la Cour. Celle-ci peut considérer que, une amnistie
est de nature à rendre frauduleuse toute la procédure nationale
qui l'a précédée et justifier dès lors que la
juridiction internationale intervienne pour mettre fin à
l'impunité ainsi organisée par un Etat.
Ces différentes limites à la souveraineté
des Etats n'entament en rien le rôle important de ces derniers. Ceux-ci
interviennent à de multiples occasions dans le travail de la Cour, et
constituent pour elle un interlocuteur de premier choix.
CHAPITRE 2 :
L'INTERVENTION DES ETATS DANS LE
FONCTIONNEMENT DE LA
COUR
Les Etats restent des acteurs incontournables dans
l'activité de la Cour Pénale Internationale. Leur concours est
indispensable. Dans chaque phase de son activité, la Cour Pénale
Internationale, aura besoin de la collaboration des Etats83(*) (section 1).
Pour ce faire, il faut d'abord que la compétence de la
Cour soit acceptée, soit par l'Etat national de l'auteur ou de la
victime du crime, soit par l'Etat sur le territoire duquel celui-ci a
été commis. C'est la condition sine qua non.84(*) Cette acceptation est soit
générale et permanente, c'est le cas pour les Etats parties au
Statut. Elle peut être aussi ad hoc : c'est
l'hypothèse où le ou les Etats impliqués, non parties au
Statut de Rome, n'acceptent la compétence de la Cour que pour la seule
affaire en cause. A défaut de telles reconnaissances, la Cour est
impuissante, sauf si elle est saisie de cette affaire par le Conseil de
sécurité de l'ONU en vertu du chapitre VII de la Charte.
Une fois sa compétence fondée, la Cour peut
ensuite déclencher son action répressive. Là encore il est
important pour la Cour d'obtenir la collaboration des Etats. Celle-ci peut
intervenir sur la base de différents fondements et se manifester de
plusieurs manières (section 2).
Section 1 : La Cour et
les Etats : une coopération nécessaire
La mission assignée à la Cour ainsi que sa
vocation à devenir universelle donnent une grande importance aux
relations qu'elle entretient avec les Etats, relations qui se résument
sous le terme de « coopération ». La nature
conventionnelle du Statut de Rome rend obligatoire cette coopération
pour les Etats parties.85(*) Cependant, la participation des Etats non parties au
Statut peut s'avérer cruciale dans certains cas, et la Cour peut donc
être amenée à entretenir avec ces derniers des rapports non
moins importants.
Deux situations peuvent ainsi être observées pour
les Etats devant la Cour. Soit ils sont parties au Statut et, dans ce cas,
soumis aux obligations définies aux articles 86 et suivants (paragraphe
1); soit ils ne le sont pas, auquel cas, leurs obligations sont, non pas
sensiblement différentes en théorie, mais ont un autre fondement
que le Statut (paragraphe 2).
Paragraphe 1 :
L' « obligation générale de
coopérer » 86(*)
Le fonctionnement efficace de la Cour dépendra pour
beaucoup de la coopération que vont lui apporter les Etats parties et
particulièrement ceux qui seront impliqués dans ses
enquêtes. Ceux-ci sont les premiers destinataires de cette obligation,
d'où l'importance des dispositions du Statut qui régissent cet
aspect.
Que comporte cette notion (A) et qu'elle est sa portée
pour les Etats parties au Statut de Rome (B) ?
A- La notion de
coopération
Un juge sans le concours d'une force de police est un homme
démuni. Autant le juge pénal étatique a besoin des
services de police dans son action, autant le juge international doit avoir
recours à une force policière pour l'appuyer dans sa tâche.
La différence fondamentale qui existe entre ces deux juges est que, le
premier a à sa disposition une telle force mais pas le second. En effet,
il n'existe pas encore (hélas !) de police internationale autonome
sur laquelle pourrait s'appuyer le juge pénal international et sur
laquelle il pourrait exercer une autorité. Seules existent les
unités de police nationales des Etats. En outre, la Cour dispose de
pouvoirs propres limités pour mener des enquêtes et est donc
tributaire de l'assistance et de la coopération des Etats. De par son
mode de création conventionnel, elle ne bénéficie
qu'extraordinairement du soutien d'une résolution du Conseil de
sécurité liant tous les Etats, et leur assistance est bien
sûr fonction leur volonté de coopérer avec la Cour. En
effet, malgré l'obligation qu'ont les Etats membres d'assister la Cour
en cas de besoin, ceux-ci ont en pratique une relative87(*) marge de manoeuvre dans la
fourniture effective d'une assistance sérieuse et ont même le
pouvoir reconnu de ne pas apporter cet appui. Il est par conséquent
important de savoir ce que contient la notion de coopération, qui est
définie comme la participation à une oeuvre commune, la
collaboration dans sa réalisation.88(*) Cette collaboration peut être nécessaire
à plusieurs stades de l'activité de la Cour.
Lors des négociations de Rome, la question se posait de
savoir si les devoirs et obligations des Etats devaient être
fixées dans les moindres détails par le Statut ou s'ils seraient
« an uncertain variable, subject to the will of circumstance of a
particular state »89(*), c'est-à-dire si le soin serait laissé
à chaque Etat de définir les modalités de sa
coopération avec la Cour en fonction de ses réalités
juridico institutionnelles. C'est la solution intermédiaire qui a
été finalement retenue. En effet, le Statut se contente de fixer
les grandes lignes de cette obligation de coopérer, tout en laissant le
choix à chaque Etat de préciser, dans ses textes nationaux
d'application, les aspects pratiques de cette assistance à la Cour. Les
Etats parties sont en effet libres dans le choix des moyens à mettre en
oeuvre pour donner effet aux demandes de coopération de la Cour. La
souveraineté des Etats est de ce fait préservée et leur
consentement plus facile à obtenir.
B- La nature et
l'étendue de l'obligation de coopérer pour les Etats
parties
La coopération se présente t-elle comme un
ensemble d'obligations contenues dans le Statut, ou s'apprécie t-elle
aussi au-delà de celui-ci ?
L'obligation de coopération pour les Etats membres est
avant tout de nature conventionnelle. Elle obéit donc aux règles
applicables aux traités90(*), et s'interprète en fonction des buts et
objectifs fixés par le traité qu'est le Statut de Rome, et
auxquels les Etats membres doivent se conformer. Par conséquent,
l'obligation de coopérer s'apprécie certes sur la base des
articles 86 et suivants du Statut, mais aussi par rapport à toutes les
dispositions de celui-ci91(*), que les parties ont l'obligation d'exécuter
de bonne foi92(*). En
outre, l'exécution de bonne foi, qui s'interprète assez
largement, permet d'affirmer que l'obligation de coopération contient,
en plus des dispositions du Statut, des devoirs contenus dans le droit
international général. Seul le bon fonctionnement de la Cour doit
être pris en compte et par delà, la réalisation des
objectifs qu'elle vise, la répression des crimes internationaux, pour
laquelle les Etats sont d'ailleurs les premiers responsables93(*). Cette obligation peut aussi
résulter d'une résolution du Conseil de sécurité de
l'Organisation des Nations Unies, lorsque celui-ci saisit la Cour en vertu du
chapitre VII de la Charte. En effet, lorsque le Conseil de
sécurité use de ce pouvoir de saisine de la Cour, pouvoir reconnu
à l'article 13(b) du Statut, tous les Etats membres de l'ONU - parties
ou non - ont l'obligation de coopérer avec la Cour parce qu'ils sont
liés par les décisions prises en vertu du chapitre VII de la
Charte des Nations Unies94(*).
L'obligation de coopération est ensuite
générale et s'applique à tous les organes de l'Etat. Le
droit national fixe les détails formels et la Cour ne s'y
intéresse que très ponctuellement. Toujours est-il que le droit
national des Etats parties doit être en harmonie - et non forcement
uniforme - avec les dispositions du Statut, notamment dans les mesures de mise
en oeuvre.
Paragraphe 2 : Les
relations entre la Cour et les Etats non parties
au
Statut de Rome
La Cour peut avoir des rapports avec des Etats qui ne sont
pas parties à son Statut. Bien qu'ayant cette qualité, ces Etats
peuvent avoir des obligations envers la Cour (A). En outre, les Etats non
parties peuvent, dans certaines circonstances être en relations avec des
Etats parties au Statut (B).
A- Les sources de
l'obligation de coopérer avec la Cour pour les Etats non
parties.
L'obligation de coopération, pour les Etats qui
n'ont pas ratifié le Statut, peut trouver son fondement dans le Statut
lui-même (2). Cependant une certaine opinion voudrait qu'elle puisse
aussi résulter du droit international humanitaire coutumier (1).
1- Le droit
international humanitaire coutumier comme source d'obligation de
coopérer pour les Etats non parties au Statut?
Tels que définis dans le Statut, les crimes qui
relèvent de la compétence de la Cour, sont pour l'essentiel
prévus par le droit humanitaire. Des crimes comme le génocide
(art. 6) ou les crimes de guerre notamment les infractions graves (art. 7),
sont définis aussi par des conventions, telles que la convention du 10
décembre 1948 pour la répression et la prévention du crime
de génocide, ou encore les conventions de Genève du 12 août
1949, dont le caractère coutumier est aujourd'hui reconnu95(*). Par ailleurs, en tant que
droit coutumier, ces normes valent indépendamment de leur fondement
conventionnel, et sont opposables aux Etats qu'ils soient parties ou non
à ces conventions96(*). Ceux-ci ont donc l'obligation de les respecter et de
les faire respecter en toutes circonstances97(*). Il s'agit ici de la
sauvegarde d'un intérêt collectif qui incombe à chaque Etat
à l'égard de tous les autres98(*).
Ce respect du droit
coutumier se manifeste non seulement par l'application effective des normes par
les Etats, mais aussi par la mise en oeuvre et le concours à la mise en
oeuvre de sanctions, en cas de violations constatées. Or, la mission de
la Cour est justement d'assurer cette répression lorsque les Etats ne
sont pas en mesure de le faire.
Ce raisonnement permet de
conclure que, le droit international coutumier requiert des Etats qu'ils
assistent les juridictions pénales internationales, en l'occurrence la
Cour pénale internationale.
Ainsi,
« L'obligation qu'ont les Etats - parties ou non au Statut de la
Cour - de coopérer avec elle et d'arrêter les personnes faisant
l'objet d'un mandat d'arrêt demeure, puisque les Etats sont toujours
liés par les exigences du droit international général et
du droit international humanitaire »99(*). Ce point de vue, plus
avéré pour les Etats qui ont ratifié lesdites conventions
que pour les autres, se justifie à certains égards dans la mesure
où la convention de 1948 par exemple, bien que n'instituant pas de
tribunal international oblige les premiers à extrader les personnes
recherchées pour génocide vers un autre Etat 100(*), mais aussi
vraissemblablement, vers tout autre instance habilitée à engager
des poursuites, en l'occurrence un tribunal pénal
international.101(*)
L'existence d'une
obligation de coopérer avec la CPI, incombant aux Etats non parties au
Statut sur la base du droit coutumier, n'est cependant pas unanimement admise.
Certains auteurs expriment en effet des doutes, en s'appuyant sur le droit
international, notamment sur la Convention de Vienne sur le droit des
traités en ses articles 34 et 35. Ces dispositions affirment le principe
de l'effet relatif des conventions internationales, et donc le fait que le
consentement d'un Etat est nécessaire pour qu'une obligation puisse
être mise à sa charge. Un autre argument est le fait qu'un Etat ne
peut recevoir d'« ordres » d'un autre Etat ou d'un
organisme international comme l'a reconnu le TPIY102(*).
Ces arguments paraissent
peu appropriés, dans la mesure où s'agissant de la Cour, les
demandes adressées aux Etats le sont dans le respect de leur
souveraineté. Cette souveraineté est d'ailleurs
préservée tout au long des dispositions du Statut.
Il résulte de ce
raisonnement que l'obligation de coopérer en vertu du droit
international humanitaire coutumier pour les Etats non parties, est une
approche qui correspond logiquement aux exigences et aux objectifs de ce corps
de règles internationales.
Les Etats tiers au Statut peuvent
néanmoins avoir des obligations sur le fondement du Statut
lui-même.
2- L'obligation de
coopérer pour les Etats non parties sur la base du
Statut
Lorsqu'un crime est commis sur le territoire d'un Etat non
partie, et que l'auteur présumé est aussi le national d'un Etat
non partie au Statut, la compétence de la Cour peut être
fondée sur une acceptation expresse de l'un ou l'autre de ces Etats
(à moins que la Cour ne soit saisie par le Conseil de
sécurité de l'ONU). Cette éventualité est
prévue à l'article 12(3) du Statut, qui ajoute aussi que l'Etat
(non partie) qui donne son consentement coopère « sans
retard et sans exception » avec la Cour.
Ainsi, l'obligation de coopérer pour les Etats tiers,
résulte directement de leur consentement exprès et ad
hoc à la compétence de la Cour pour un crime dans lequel ils
sont impliqués. En conséquence, cet Etat n'est plus
considéré (dans les faits) comme tiers et se trouve dans le cas
d'espèce dans une position quasi identique à celle d'un
Etat partie103(*). Les
détails pratiques de cette coopération Etat non partie/CPI, dont
il est également fait mention à l'article 87 du Statut, sont en
principe fixés dans l'accord de circonstance et par le droit national de
l'Etat concerné, mais cet Etat reste soumis aux mêmes obligations
générales de coopération que les Etats parties104(*). Ceci dans le respect du
Statut de la Cour, du droit national de l'Etat concerné et du droit
international général. Cet accord devrait en
général se référer aux dispositions pertinentes du
Statut. Néanmoins, il convient de signaler que la source des obligations
de l'Etat non partie est bien l'accord ainsi conclu et non le Statut de la Cour
qui ne lui est pas opposable, même si le contenu de cet accord peut
procéder des mêmes principes que ceux qui sont prévus par
le Statut.
Lorsqu'on sait que bien souvent, l'Etat sur le territoire
duquel le crime a été commis est aussi celui de son
auteur105(*), il
s'avère important pour la Cour de bénéficier aussi du
concours de ces Etats non parties pour pouvoir accomplir efficacement sa
tâche.
Il existe également l'hypothèse où la
Cour est saisie par le Conseil de sécurité et qui entraîne
pour les Etats non parties au Statut une obligation de coopérer. Dans
cette hypothèse en effet, il n'est nul besoin du consentement de l'Etat
non partie, en raison du fait que le Conseil de sécurité agit en
vertu du chapitre VII de la Charte et que tous les Etats membres des Nations
Unies ont l'obligation d'appliquer les décisions contraignantes prises
en vertu de ce chapitre106(*).
B- Les Etats parties
et les Etats non parties
Les Etats parties au Statut de Rome pris individuellement, et
ceux qui ne sont pas parties ne sont en principe liés par aucune
obligation entre eux en rapport avec la Cour. Seuls sont en vigueur dans leurs
rapports, les engagements en vertu des accords bilatéraux qui pourraient
exister.
Dans certaines hypothèses cependant, en rapport avec
l'activité de la Cour, ces Etats peuvent se retrouver en relation, de
différentes manières. La situation la plus importante est celle
des demandes concurrentes107(*). C'est l'hypothèse dans laquelle, un Etat
partie est requis d'une demande de coopération (par exemple de remise)
par la Cour et en même temps d'une demande d'extradition par un Etat
tiers au Statut ; et que les deux sollicitations ont pour objet la
même personne. En effet, un individu qui se trouve sur le territoire d'un
Etat partie, peut être réclamé dans le même temps par
la CPI et par un Etat non partie à son Statut, parce que les deux
entités ont simultanément engagé des procédures
contre lui. Ici, l'attitude de l'Etat partie requis est fonction de l'existence
ou non d'un accord entre lui et l'Etat tiers, mais également de la
nature de l'infraction reprochée à la personne qu'il
détient ou abrite. Deux cas se présentent. L'un où
l'infraction justifiant les deux demandes est la même, et l'autre
où il y a différentes infractions reprochées par les
entités requérantes.
Dans le premier cas et lorsqu'un accord, par exemple
d'extradition, n'existe pas entre les deux Etats, l'Etat doublement requis
privilégie la demande de la Cour et lui accorde la remise de l'individu
en cause, si la Cour a jugé l'affaire recevable108(*). Il est tout a fait
compréhensible que l'Etat partie accorde cette priorité à
la Cour, envers laquelle il a l'obligation de coopérer pleinement.
D'autant plus que cette attitude ne contrevient à aucune autre de ses
obligations internationales envers l'Etat tiers.
La situation est tout autre lorsqu'un accord existe
déjà entre l'Etat requis partie au Statut et l'Etat
requérant non partie. Dans cette hypothèse en effet, la
décision du premier sera prise en fonction de plusieurs critères
d'appréciation des deux demandes. Il tiendra compte de l'ordre des
demandes, de l'intérêt de l'Etat tiers et aussi de
« la possibilité que la Cour et l'Etat requérant
parviennent ultérieurement à un accord concernant la remise de
cette personne»109(*).
Dans le deuxième cas, lorsque les deux Etats ne sont
liés par aucun accord, on observe la même situation que celle du
premier cas110(*).
Lorsqu'un accord lie les deux Etats la décision de l'Etat requis est
prise en considération de la nature et de la gravité de
l'infraction111(*), en
plus de l'ordre des demandes et de l'intérêt de l'Etat tiers. La
Cour, ayant pour mission de juger les crimes les plus graves, se verra accorder
la priorité ou non en fonction du degré de gravité des
crimes en cause.
Dans ces différentes hypothèses,
l'intérêt de la Cour est primordial pour l'Etat partie, et
celui-ci en tient compte dans ces relations avec les autres Etats qui ne sont
pas parties au traité de Rome. Il doit donc le concilier avec ses autres
obligations internationales.
Section 2 : Une
participation multiforme pour les Etats dans le fonctionnement de la Cour
L'intervention des Etats dans
l'activité de la Cour revêt des formes différentes. Le
Statut prévoit à cet effet dans son chapitre IX qui traite de la
« coopération internationale et assistance
judiciaire », différentes formes de concours des Etats.
Certaines sont spécifiques aux Etats parties (paragraphe 1), tandis que
d'autres peuvent, selon les circonstances, incomber aussi aux Etats non parties
au Statut qui seraient liés à l'affaire en cours (paragraphe
2).
L'on s'interroge alors sur l'étendue des obligations
des Etats ou encore sur le degré de contrainte112(*) qui peut être à
la charge des Etats. Est-il possible pour ceux-ci d'influencer ou d'orienter,
voire même d'arrêter le cours de la procédure lorsqu'ils
sont à l'origine de son déclenchement ?
Paragraphe 1 : Les
obligations particulières aux Etats parties
Pour l'essentiel on retrouve parmi ces obligations, celles de
participer aux dépenses de la Cour (A) et d'adapter la
législation nationale aux dispositions du Statut (B).
A- La participation
financière des Etats parties
Selon l'article 114 du Statut de Rome, les dépenses de
la Cour sont assurées par les prélèvements sur les
ressources financières propres. Ces ressources financières sont
fournies par « les contributions des Etats
parties » et les apports de l'ONU.113(*) Les Etats parties sont donc
tenus de contribuer financièrement aux dépenses de la Cour. Cette
exigence du Statut est tout à fait logique, dans la mesure où la
Cour est une création des Etats. Et à l'instar de toutes les
organisations internationales intergouvernementales, le budget de la Cour doit
être alimenté par les cotisations de ses membres, que sont les
Etats parties à son Statut. Ainsi, selon l'article 117, la contribution
des Etats parties est calculée selon un système de quotes-parts
convenu et adopté sur le modèle utilisé au sein des
Nations Unies pour le budget ordinaire. Certes, les Etats parties ne sont pas
les seuls pourvoyeurs de fonds de la Cour, l'article 116 prévoit
d'autres modes de financement comme les contributions volontaires provenant
d'autres entités. Mais leur participation reste capitale, car la Cour
doit être dotée du minimum de moyen pour son fonctionnement. Il va
sans dire que la question financière est primordiale pour qu'elle puisse
accomplir efficacement et impartialement sa tâche. Et l'on sait que les
dépenses de la Cour sont et seront encore plus importantes à
l'instar des deux tribunaux ad hoc qui fonctionnent
actuellement114(*). Le
programme de protection et d'aide aux témoins, la traduction de
documents et l'interprétation des débats, l'organisation de
missions d'enquête visant à recueillir des éléments
de preuve et des déclarations de témoins, la sauvegarde des
éléments de preuve, ainsi que la sécurité des
bâtiments, des lieux de détention et du personnel...etc, sont
autant de domaines qui nécessitent des moyens considérables.
L'importance de cette charge financière peut aussi se
déduire des sanctions prévues à l'encontre des Etats qui
viendraient à manquer à cette obligation. Ainsi en cas de non
paiement de sa contribution ou même de retard de paiement, un Etat peut
se voir priver de son droit de vote au sein de l'Assemblée des Etats
parties et même du bureau de ladite assemblée. Cette sanction
s'applique, à moins que l'Etat en cause ne justifie de raisons
indépendantes de sa volonté.115(*)
A coté de cette participation financière, les
Etats ont aussi le devoir d'intégrer les dispositions du Statut dans
leurs droits nationaux respectifs.
B - L'adaptation par
les Etats de leurs législations nationales
« Le droit international pénal
présuppose à maints égards, l'existence de droits
pénaux nationaux »116(*). A l'instar de tout le droit international, le droit
international pénal a besoin d'être traduit, intégré
en droit interne pour son application effective et pour la bonne coordination
de la lutte internationale. Cette adaptation législative est obligatoire
pour les Etats parties au Statut. Cependant, compte tenu du fait que les Etats
non parties ne sont pas totalement exclus du champ de la Cour, ces derniers
pourraient avoir un intérêt à accomplir aussi cette
formalité117(*).
L'obligation d'adapter la législation nationale est
primordiale pour les Etats parties. En vertu de l'article 88, ils ont la charge
de mettre leurs lois nationales en conformité avec les dispositions du
Statut, « en vue de permettre la réalisation de toutes les
formes de coopération »118(*). Cette opération a pour but de permettre
d'abord à leurs organes judiciaires de pouvoir connaître des
crimes prévus par le Statut, et ensuite de faciliter à la Cour
une intervention lorsqu'une situation ou une affaire l'exigera.
Cette obligation concerne essentiellement les lois
pénales relatives aux définitions des crimes et les
modalités pratiques de la coopération avec la Cour. Ces
dernières impliquent notamment les règles de procédure, la
détermination de l'organe national compétent pour recevoir les
demandes de la Cour119(*), ou encore les conditions du transfert du suspect
à la Cour120(*).
Le Statut reconnaît aux Etats la primauté de
juridiction dans la répression des crimes qu'il prévoit. Les
Etats ont ainsi le devoir de réprimer les infractions commises sur leur
territoire, ou qui impliquent leurs nationaux. Un Etat partie qui envisage de
telles poursuites, devrait avoir dans son droit pénal, des
incriminations identiques sinon en conformité avec celles prévues
par le Statut121(*).
Cette idée trouve sa justification dans le fait que, en vertu du
principe de complémentarité, la Cour pourrait déclarer
recevable une affaire dans laquelle les éléments des crimes sont
par exemple plus étroits dans le droit national que dans le Statut. Dans
un tel cas en effet, la loi nationale ne permet pas à l'Etat de
connaître du crime parce qu'elle est trop restrictive et donc ne couvre
pas le crime en question qui entre dans la sphère de
définition, plus extensive, du Statut. Respecter cette obligation est
donc, pour les Etats, un moyen de pouvoir user pleinement de la primauté
de juridiction qui leur est reconnue.
Ainsi, de nombreux Etats ont déjà
procédé à cette formalité. En effet, en plus des
Etats parties, il y a également les Etats qui envisagent
d'adhérer au Statut122(*). Ce dernier n'exige aucune forme particulière
de mise en oeuvre et les Etats « décident de la
procédure à suivre pour rendre leurs dispositions juridiques
internes compatibles (...) la forme de la législation retenue
dépendra de la constitution, des exigences du traité et de toutes
les législations pertinentes déjà en
vigueur »123(*) pour l'Etat concerné. Le but ultime
étant « de permettre la réalisation de toutes les
formes de coopération » prévues par le Statut.
Comme le montre une enquête publiée dans la Revue
de droit militaire et de droit de la guerre124(*), les procédures de mise en oeuvre et les
formes utilisées par les Etats désireux de le faire sont
multiples. Pour les Etats ayants un système dualiste, celles-ci vont de
modifications de la constitution, à l'adoption de lois uniques ou
séparées qui intègrent les aspects pratiques de la
coopération. Pour les pays monistes125(*) l'intégration des normes du Statut est
nettement moins difficile, dans la mesure où le Statut est directement
intégré au droit interne dès sa ratification. Certaines
dispositions, telles que celles sur les modalités de la
coopération, auront cependant besoin d'être accompagnées
par des textes d'application.
Dans ce même ordre d'idée, les Etats ont aussi
la possibilité d'apporter des modifications au Statut lui-même. En
effet, le Statut prévoit une conférence de révision de ses
dispositions, qui doit se tenir dans un premier temps, sept années
après son entrée en vigueur (donc en 2009), et ensuite à
tout moment où une révision s'avèrerait nécessaire,
sur convocation du Secrétaire Général des Nations
Unies126(*). Ainsi, sur
proposition d'un Etat membre, un amendement peut être apporté au
Statut par le biais de l'Assemblée des Etats Parties qui regroupe les
Etats ayant ratifié le Statut. Un des sujets qui devra être
abordé lors de cette révision est celui de la définition
du crime d'agression comme le souligne l'article 5 du Statut.
Tous ces textes devront être appliqués. Cette
application peut se faire lors de l'intervention pratique des Etats dans les
procédures engagées par les organes de la Cour.
Paragraphe 2 : La
participation des Etats à la procédure devant la Cour
Comme il a été relevé dans les
développements précédents, la Cour a besoin des Etats pour
fonctionner. Cette nécessaire intervention des Etats se manifeste
dès les débuts d'une affaire devant la Cour. Les Etats parties
ont en effet la possibilité de déclencher une procédure,
en déférant une situation devant la Cour (A). Ont-ils cependant
le droit ou le pouvoir de l'arrêter (B)?
A- La faculté
de déférer une situation devant la Cour
Les articles 13(a) et 14 du Statut de Rome donnent aux Etats
parties, en même temps qu'au procureur de la Cour et au Conseil de
sécurité de l'ONU, le pouvoir de déférer
« une situation dans laquelle un ou plusieurs des crimes relevant
de la compétence de la Cour paraissent avoir été
commis », selon les termes de l'article 14. Il leur revient en
quelque sorte de porter plainte. C'est ici la plus importante des
prérogatives accordées aux Etats devant la CPI. La saisine de la
Cour par un Etat partie est l'hypothèse la plus favorable, notamment
lorsque la situation déférée se déroule sur son
sol. Dans un tel cas, le principe voudrait que les organes judiciaires de
l'Etat puissent entamer une action et rechercher et juger les responsables, ou
extrader ces derniers vers un Etat qui s'estimerait compétent pour de
telles actions. Ce serait une parfaite application du principe aut dedere
aut judicare en droit international pénal127(*), auquel sont astreints les
Etats. Il peut arriver que pour plusieurs raisons, un Etat ne puisse pas
respecter ce principe. C'est dans de telles conditions qu'intervient la Cour
qui, par le jeu de la complémentarité128(*) qui est au coeur de son
fonctionnement, peut être saisie par un Etat et connaître du crime
en cause129(*).
L'intervention de la Cour est une solution permettant de suppléer la
carence de l'Etat.
Ainsi, le recours à la CPI n'est pas
systématique, même si une affaire entre dans sa compétence.
Celle-ci n'est que complémentaire des juridictions nationales qui ont la
primauté de juridiction sur les crimes qui se commettent à
l'intérieur des frontières de l'Etat (compétence
territoriale) ou en dehors (compétence universelle). Mais lorsque la
Cour doit intervenir, il est souhaitable qu'elle soit saisie à
l'initiative de l'Etat concerné par la situation en cause. De cette
manière en effet, sa collaboration pourra être plus facile
à obtenir, dans la mesure où il aura un intérêt
particulier à ce que l'affaire connaisse un dénouement.
La saisine par le procureur agissant proprio mutu ou
encore par le Conseil de sécurité, sont des hypothèses
dans lesquelles le ou les Etats concernés pourraient se sentir
frustrés, vu le caractère supplétif de l'une et / ou
contraignant de l'autre ; cela pourraient entamer la volonté de
l'Etat directement impliqué de coopérer pleinement avec la
Cour130(*). En effet,
aucun Etat souverain n'apprécie d'agir par contrainte ou sous une
pression, venant d'un autre Etat ou de tout autre organisme.
Ce pouvoir ainsi reconnu aux Etats pourrait être la
clé du succès futur de la Cour, s'il est employé à
bon escient. Il est avantageux pour l'instance internationale que les trois
premières affaires dont elle a été saisie, aient
été déférées par des Etats parties agissant
sur une initiative volontaire. En effet, aussi bien l'Ouganda, la RDC que la
République Centrafricaine ont saisi la Cour de leur plein gré,
concernant des faits s'étant déroulés sur leur sol,
après avoir constaté la fragilité de leur système
judiciaire et le contexte particulier de leurs Etats. Ces initiatives sont
à saluer. Par contre, on constate déjà l'hostilité
du Soudan quant à coopérer avec la Cour, vu que la situation dans
ce pays a été déférée par le Conseil de
sécurité. Il est donc avantageux pour le fonctionnement efficient
de la Cour, que celle-ci soit saisie par des initiatives volontaires d'Etats
parties. Cela favorise une pleine coopération de leur part131(*). Ce mode de saisine offre en
effet plus de garanties pour la coopération efficace des Etats,
notamment ceux qui en ont pris l'initiative. Cette intervention des Etats dans
l'activité de la Cour est de loin la plus directe et la plus
bénéfique pour elle.
Peut-on alors considérer le refus d'un Etat de saisir
la Cour d'une affaire, comme un manque de coopération ? En principe
non, puisque les Etats sont les premiers responsables de la répression
des crimes internationaux et que la Cour n'est que complémentaire. Le
problème pour un Etat dans une telle hypothèse, pourrait
être constitué par le fait qu'il n'engage pas non plus de
poursuites au niveau interne. Mais dans ce cas la Cour, et
particulièrement le procureur, pourrait utiliser son pouvoir propre et
se saisir de l'affaire.
Des interrogations s'imposent cependant, en particulier celle
de savoir si le pouvoir d'agir des Etats pour déclencher l'action de la
Cour implique la possibilité pour ces derniers de suspendre ou
d'interrompre une action en cours?
B- La
possibilité pour un Etat de suspendre ou d'interrompre l'action de
la
Cour ?
Il a été constaté que pour des raisons
multiples, essentiellement de négociations de paix et ou de
réconciliation nationale, nombre d'Etats en conflit ou en fin de
période de crise interne ont choisi d'autres voies que la voie
judiciaire132(*), pour
arriver à obtenir une paix durable et un accord entre acteurs et
protagonistes des crises133(*). Il est possible d'envisager que certains Etats ne
soient pas très disposés à aller devant la Cour ou pensent
même à un éventuel retrait du renvoi de l'affaire qu'ils
ont eu l'initiative de déposer devant elle. C'est l'hypothèse
où, un Etat qui a déféré devant la Cour une
situation qui s'est déroulée (ou non) sur son territoire,
voudrait que l'enquête et les poursuites soient interrompues afin de
relâcher la pression sur tels ou tels protagonistes et favoriser ainsi
des pourparlers plus sereins. Cette hypothèse encore virtuelle
certes134(*), non
envisagée par le Statut (1), soulève bien quelques interrogations
(2).
1- Une faculté
non reconnue par le Statut
Tout d'abord, la possibilité pour un Etat de retirer
son renvoi, ou pour un quelconque Etat de suspendre l'action de la Cour n'est
pas prévue dans les dispositions du Statut. L'hypothèse
prévue à l'article 53(3) peut seulement permettre à l'Etat
de contester et de faire réexaminer une décision de la Cour
de ne pas poursuivre dans une affaire qu'il aurait
déférée. Aucune possibilité n'est donc
prévue pour l'Etat de se rétracter et de contraindre la Cour
à arrêter son action. Même le retrait éventuel de
celui-ci du Statut ne le permettrait pas, dans la mesure où ce retrait
n'est pas rétroactif et laisse subsister toute action déjà
entamée par le procureur ainsi que les obligations qui en
découlent135(*).
La seule éventualité de suspension d'une
procédure de la Cour par une intervention extérieure reconnue par
le Statut, est le pouvoir accordé au Conseil de sécurité
par l'article 16. On peut en déduire que, si le Statut est muet sur une
telle faculté pour les Etats, qui est pourtant une question d'une grande
importance, c'est bien parce qu'il entend l'exclure purement et simplement.
Est-il par ailleurs possible de reconnaître un tel
pouvoir aux Etats par l'interprétation des dispositions du Statut ?
Traditionnellement dans certains systèmes internes de droit
pénal, la partie civile a le pouvoir de retirer sa plainte, ou de
désister lorsqu'elle estime que ses intérêts ne sont plus
en cause, après par exemple une transaction avec l'accusé. Ce
pouvoir est reconnu bien qu'il ne suspend ni n'interrompt l'action publique
exercée par le procureur au nom de la société136(*). La situation peut
être assimilée à quelques exceptions près en droit
international pénal137(*). En effet, lorsqu'un Etat défère une
situation devant le procureur, ce dernier décide de mener une
enquête au nom de la communauté internationale toute
entière138(*) ou,
tout au moins, de la communauté des Etats parties au Statut. Ainsi, une
fois une situation déférée au procureur, l'Etat
déférant ne devrait plus pouvoir suspendre ou interrompre de sa
propre initiative l'action du procureur. En effet, une fois que l'affaire se
retrouve devant le bureau du procureur, elle échappe totalement à
l'Etat qui l'a déférée. Ce dernier ne peut exercer sur le
procureur aucune influence, aucune action de manière à orienter
la procédure dans un sens ou dans un autre. Cela est d'autant plus vrai
que « (S) es membres [le bureau du procureur] ne sollicitent ni
n'acceptent d'instructions d'aucune source
extérieure »139(*).
Reconnaître un tel pouvoir aux Etats, pourrait remettre
fortement en cause l'indépendance de la Cour, et notamment du procureur,
gage de la crédibilité et de l'efficacité de cette
juridiction. La CPI a pour mission de sanctionner les auteurs des crimes les
plus graves, et de permettre ainsi de prévenir la commission de crimes
similaires. En déférant une situation présentant ces
crimes, l'Etat se déclare implicitement incapable de les poursuivre
lui-même. Il va sans dire que si cet Etat a le pouvoir de dessaisir la
Cour, il est probable que les inculpés ne soient pas traités de
façon impartiale ou, à l'opposé, demeurent dans une totale
impunité, toute situation qui contraste fortement avec les buts de la
CPI. De plus, on peut craindre qu'une telle possibilité de suspendre ou
d'interrompre une procédure devant la Cour, si elle était
reconnue, favorise bien des dérives de la part des Etats, qui pourraient
l'utiliser comme un moyen de pression sur leur potentiels adversaires et se
servir de la Cour à des fins politiques, ce qui est à
l'opposé de la mission assignée à cette instance.
Par ailleurs, il est indéniable que dans
l'accomplissement de sa tâche, le procureur doit prendre en
considération l'intérêt de la justice et plus
généralement celui du pays impliqué. Mais il reste et doit
rester seul et impartial dans l'appréciation de ce facteur.
Le Statut accorde ce pouvoir de suspendre l'action de la Cour
au Conseil de sécurité des Nations Unies. Il apparaît
logique que ce soit un organe supra national, agissant au nom de tous les
Etats, qui soit doté du pouvoir de suspendre une action menée
pour le compte de ceux-ci pris collectivement, et non un Etat agissant
individuellement.
2- Les moyens
possibles pour un Etat de faire suspendre ou interrompre l'enquête du
procureur
Les Etats n'ont pas la possibilité de suspendre encore
moins d'interrompre unilatéralement une enquête ou des poursuites
devant la Cour. Cependant, à la lecture du Statut, il semble que
certaines dispositions puissent leur permettre d'arriver à cette fin, en
faisant appel aux organes qui sont dotés de ce pouvoir, en l'occurrence
le procureur et le Conseil de sécurité. Ainsi, deux voies
pourraient être utilisées par un Etat qui envisage de faire
interrompre une procédure engagée à propos d'une situation
déférée par lui.
La première pourrait découler de l'article 16 du
Statut. Cet article autorise le Conseil de sécurité, agissant sur
la base du chapitre VII, à suspendre une enquête de la Cour pour
une période renouvelable de douze mois. En effet si une demande est
faite en ce sens par une résolution positive du Conseil de
sécurité 140(*), le procureur peut et même doit suspendre son
enquête pour une période de douze mois. En conséquence, il
pourrait être possible pour l'Etat en cause de saisir le Conseil afin que
celui-ci puisse agir en sa faveur auprès de la Cour. Il faudrait d'abord
que sa situation puisse satisfaire aux conditions du chapitre VII, et ensuite
une cohérente argumentation pouvant justifier une action du Conseil sur
la base de ce chapitre et la nécessité que cette action du
Conseil aille dans le sens souhaité par cet Etat.
Quant à la seconde, elle découle d'une
interprétation de l'article 53. D'abord, le paragraphe 2 reconnaît
au procureur le pouvoir de ne pas poursuivre s'il n'a pas de
« motifs suffisants (...) parce que poursuivre ne servirait pas
les intérêts de la justice, compte tenu de toutes les
circonstances (...) », ensuite, le paragraphe 4 lui permet de
reconsidérer sa décision de poursuivre ou non si des faits ou
circonstances nouveaux sont avérés. Il serait ainsi envisageable
pour l'Etat de plaider auprès du procureur, afin que celui-ci
décide de ne pas poursuivre au vu des circonstances particulières
qui pourraient prévaloir en l'espèce. Ces dispositions,
même si elles doivent s'interpréter de façon très
restrictive, peuvent recouvrir plusieurs situations. Il revient donc à
l'Etat qui les invoque, de défendre au mieux ses arguments sur
l'intérêt de la suspension de la procédure pour son pays et
pour le retour à une meilleure situation sur son territoire. Cette
argumentation devrait être fondée sur de solides
éléments de preuve, dans la mesure où la décision
du procureur de ne pas poursuivre est soumise au contrôle de la chambre
préliminaire, qui doit la confirmer pour la rendre effective141(*).
Cette hypothèse fait surgir la délicate question
de la conciliation entre la nécessité d'une réconciliation
durable et celle de la justice et de la lutte contre l'impunité, qui
visent cependant toutes le même objectif, la paix et la stabilité
pour les Etats142(*).
Paragraphe 3 :
L'assistance judiciaire et policière et l'exécution des
sentences143(*)
C'est ici le lieu privilégié de la
nécessité d'une étroite collaboration entre le ou les
Etats et la Cour (A). L'intervention des Etats est indispensable, intervention
sans laquelle l'activité de la Cour, est vouée à un
échec quasi certain. Comme l'a affirmé un auteur
à propos des tribunaux ad hoc, « ces tribunaux
n'ont pas le pouvoir de commander (...) Ces tribunaux sont donc
dépourvus du pouvoir de contrainte ; ce pouvoir demeure entre les
mains d'Etats souverains.. »144(*). Cette affirmation est aussi bien valable pour la
CPI dont les décisions n'ont pas la même force obligatoire que
celles des tribunaux ad hoc. Elle n'a pas été
créée par une résolution du Conseil de
sécurité, obligatoire pour tous les Etats.
La Cour ne dispose pas non plus d'établissements
pénitentiaires pour l'exécution des sentences, et appel est fait
aux Etats en vue de combler ce manque (B).
A- Les organes
judiciaires et policiers nationaux au service de la Cour
Lorsque, après examen des éléments d'une
affaire, le procureur décide d'ouvrir une enquête et obtient en ce
sens l'autorisation de la chambre préliminaire, il commence son
enquête par la recherche d'indices et de preuves. C'est là une
tache complexe pour le procureur, qui peut se rendre lui-même sur les
lieux ou faire exécuter les actes nécessaires sur place par les
organes compétents de l'Etat.
L'assistance des Etats est requise d'une part pour la
recherche des preuves et indices et également pour l'identification des
suspects (1). D'autre part, elle est également nécessaire pour
l'arrestation, la détention et enfin la remise à la Cour du
suspect (2).
1- L'étape du
recueil des preuves et indices par le procureur de la Cour
Le bureau du procureur a la charge de la conduite des
enquêtes, et a donc besoin de mener des investigations sur les lieux de
l'affaire. Il jouit pour cela des privilèges et immunités
reconnus aux agents de la Cour dans l'exercice de leur tâche145(*). A la différence des
procureurs des TPI - qui bénéficient d'une totale latitude pour
prendre et adresser directement à un Etat toutes les mesures
d'enquête qu'il estime nécessaires à ses
investigations146(*)- le
procureur de la CPI doit constamment rechercher la coopération des Etats
sur le territoire desquels il envisage d'investiguer. Ceci est
révélateur de la place de choix qui est accordée aux Etats
par le Statut.
Le rôle des Etats (particulièrement ceux qui sont
parties au Statut) est d'abord de se doter des mécanismes juridiques
nécessaires147(*)
afin de mieux répondre aux sollicitations de la Cour; et ensuite surtout
de mettre à la disposition de la Cour leurs services compétents,
afin d'accomplir les actes d'enquête, qui sont aussi nombreux que
variés148(*).
C'est pour eux une obligation primordiale149(*), qui doit être accomplie en temps utile avant
que les souvenirs des témoins ne s'estompent ou que des preuves
essentielles ne disparaissent. En effet, en plus des indices qu'il pourra
obtenir de lui-même sur les lieux lors des interrogatoires de
témoins par exemple, il peut être utile pour le procureur de la
Cour de prendre connaissance de certaines informations en relation avec le cas
qui l'intéresse, et qui sont en possession des services judiciaires ou
policiers d'un Etat. De surcroît, en ce qui concerne les mesures de
contrainte telles les arrestations de suspects et les saisies de pièces
à conviction, le procureur ne peut agir directement sur le territoire
des Etats. Seul l'Etat est détenteur du pouvoir de contrainte à
l'intérieur de ses frontières, et le procureur est dans
l'obligation d'obtenir que cet Etat mette ses forces à sa disposition
et l'appuie.
Un Etat peut cependant, pour des raisons de
sécurité nationale, rejeter une demande d'assistance de la Cour.
En effet, en vertu de l'article 72, l'Etat requis peut estimer que la
divulgation d'informations relatives à l'enquête, pourrait porter
atteinte à sa sécurité nationale, et refuser son
assistance à la Cour en ne fournissant pas ces documents. La Cour peut,
dans de telles circonstances, modifier sa demande en vue de permettre à
l'Etat de l'exécuter sous une autre forme. Mais, toujours est-il que la
demande, même modifiée, pourrait ne pas aboutir. En effet, l'Etat
aura toujours le dernier mot, même s'il a l'obligation de consulter la
Cour150(*) avant sa
décision et de justifier son refus151(*). « [L]e principe de la
souveraineté des Etats l'a encore emporté152(*) ».
Cette possibilité leur est-elle reconnue lorsque la
Cour est saisie par le Conseil de sécurité de l'ONU ? En
principe, les Etats ne devraient pas pouvoir refuser d'apporter leur assistance
dans cette hypothèse. Dans ce cas, la contrainte à l'encontre des
Etats est plus grande parce que découlant de l'article 25 de la Charte.
L'obligation de coopérer est ici doublement marquée pour les
Etats parties. Mais ici encore, la souveraineté des Etats est mise en
avant. Et, il n'est pas insensé d'affirmer que la menace d'une sanction
du Conseil de sécurité n'est pas toujours suffisante pour obliger
un Etat à s'exécuter, même si juridiquement il est
indéniable que cet Etat a une telle obligation.
Ainsi, seule la volonté des Etats fera la
différence, et cela dès l'ouverture de l'enquête
jusqu'à l'exécution des peines prononcées.
2- L'arrestation, la
détention et la remise de suspect à la Cour
Lorsque les éléments recueillis par le procureur
et ses agents au cours de l'enquête font peser des soupçons
sérieux sur une ou plusieurs personnes identifiées, le procureur
peut demander l'arrestation et la remise de ces personnes à la Cour.
Ainsi, suite à la requête du procureur et
après avoir effectué un contrôle des éléments
à charge, la chambre préliminaire de la Cour peut délivrer
un mandat d'arrêt contre les suspects selon les conditions de l'article
58 (1) du Statut153(*).
Le mandat est adressé à l'Etat sur le territoire duquel se trouve
la personne concernée. Ici encore, l'Etat a un rôle
avéré. Les instances pénales internationales
dépendent entièrement des Etats pour l'exécution des
mandats d'arrêt, la CPI encore plus que les TPI. L'arrestation ne peut se
faire en effet que par les services de police habilités de l'Etat, et
celui-ci doit mettre en oeuvre tous les moyens en vue de la localisation et de
l'arrestation du suspect, conformément au mandat délivré
par la Cour. C'est là une étape cruciale devant la Cour, dans la
mesure où la présence de la personne suspecte est
nécessaire à toute poursuite. La procédure devant la Cour
est de type contradictoire et ne peut se dérouler qu'en la
présence physique de l'accusé aussi bien devant la chambre
préliminaire pour la confirmation des charges154(*), que devant la chambre de
première instance lors du procès155(*), sauf dans des circonstances
particulières. Le Statut ne prévoit pas de procès par
contumace.
Des personnes mises en cause et recherchées par les
TPI, sont encore en liberté bien que identifiées et pratiquement
localisées. La CPI n'est pas prémunie contre ces obstacles et il
est nécessaire que soient précisées les conditions de la
coopération entre elle et les Etats afin de permettre
l'efficacité dans l'exécution de ses mandats. Le Statut
prévoit en effet, que l'Etat qui reçoit un mandat d'arrêt
émanant de la chambre préliminaire prend immédiatement les
mesures appropriées pour son exécution. De plus, l'Etat doit
faire exécuter ce mandat sans chercher à vérifier sa
conformité à l'article 58 du Statut156(*). Il a seulement le devoir de
s'assurer - après coup - de l'identité de la personne
arrêtée, de la régularité de la procédure et
du respect de ses droits, en vertu de son droit interne et du Statut.
Une fois que la personne suspectée est
arrêtée, l'Etat qui la détient organise dans un
délai raisonnable sa remise à la Cour.
Il convient de souligner l'importante distinction entre la
remise à la Cour, instance internationale et l'extradition vers un autre
Etat157(*). Ces deux
procédures répondent en effet à des logiques
différentes. Ainsi, un Etat ne peut prétexter de la non
extradition de ces nationaux prévue dans sa constitution pour refuser la
remise à la Cour d'une personne qu'il détient. La Cour,
contrairement aux tribunaux nationaux est une juridiction internationale, qui
offre toute les garanties d'impartialité et du respect des droits de
l'accusé158(*).
De fait, les Etats devraient assouplir leur législation sur la remise de
personne à la Cour - par rapport aux dispositions sur l'extradition -
afin de faciliter cette forme de coopération.
Le problème du choix entre l'extradition et la remise
à la Cour peut également se poser lors de demandes concurrentes.
Dans une telle hypothèse, la décision de l'Etat doublement requis
est prise en fonction de plusieurs circonstances notamment sa qualité
d'Etat partie ou non au Statut159(*). En outre, une des difficultés qui peut
également se poser concernant l'arrestation et la remise d'une personne
à la Cour, est la position importante de cette personne dans la
sphère des organes de l'Etat, qui va parfois jusqu'à lui
conférer une immunité (de fait si ce n'est de droit) et qui rend
quelque peut complexe sa capture.160(*)
Une fois la personne arrêtée et remise à
la Cour, la coopération des Etats ne s'arrête pas pour autant. En
effet, même si ceux-ci ne sont pas très actifs au cours du
procès proprement dit (bien qu'ils puissent ponctuellement
intervenir161(*)), leur
apport dans l'exécution des sentences prononcées est
essentiel.
B- L'exécution
des sentences
Aux termes de l'article 77 du Statut, la Cour peut prononcer
trois types de sanctions : un emprisonnement à temps avec une
limite maximum de trente (30) ans, un emprisonnement à
perpétuité et enfin des amendes et des confiscations. La Cour, il
faut le rappeler, ne dispose pas d'établissements pénitentiaires,
et c'est à nouveau aux Etats qu'elle confiera l'exécution des
peines qu'elle va prononcer à l'encontre des personnes reconnues
coupables.
L'Etat chargé de faire exécuter une peine
d'emprisonnement sera désigné pour chaque affaire par la Cour,
sur la base d'une liste préétablie d'Etats ayant manifesté
leur désir d'accueillir les condamnés de la Cour. L'Etat retenu
devra après sa désignation donner son accord exprès
à la Cour, pour chaque cas dans lequel il sera choisi : c'est le
principe du double consentement. Quelques conditions peuvent être
cependant fixées par l'Etat lors de la notification à la Cour de
sa volonté d'accueillir les condamnés. Aucun pouvoir ne lui est
par contre reconnu pour modifier, pour une raison ou pour une autre, la
durée ou la nature de la peine162(*). Ceci relève de la seule compétence de
la Cour. Si l'Etat d'exécution ressent néanmoins le besoin
d'apporter des modifications à la manière d'exécuter la
peine prononcée par la Cour, il en avise celle-ci qui doit se prononcer
pour ou contre ce changement. Dans le cas d'un refus par la Cour, le
condamné est transféré dans un autre Etat pour y purger le
reste de sa peine163(*).
Par ailleurs, les Etats ont également la
responsabilité de l'exécution des peines d'amende et de
confiscation qui pourront être prononcées. L'article 109 attribue
à nouveau aux Etats parties, la charge de faire exécuter ces
condamnations, lorsque des biens ou valeurs appartenant à la personne
condamnée se trouvent sur leur territoire. L'exécution des ces
types de condamnation se fait en vertu du droit interne des Etats, et les
produits obtenus doivent être reversés à la Cour qui se
charge de leur redistribution aux victimes164(*).
En définitive, il apparaît que les Etats ont un
grand rôle à jouer dans les activités de la Cour
pénale internationale. Leur concours s'avère indispensable, si
cette juridiction veut remplir les objectifs qui lui ont été
fixés. Les Etats sont cependant les collaborateurs de la Cour, et non
les administrateurs de celle-ci. Ils n'interviennent que lorsque celle-ci
requiert leur collaboration et a besoin de leur appui. Ils sont les moyens
d'action de la Cour et non sa tête pensante.
Malgré le caractère obligatoire pour les Etats
parties, de leur coopération, ceux-ci restent en pratique encore et
toujours seuls juges de l'opportunité d'apporter leur assistance
à la Cour et celle-ci est quasi impuissante devant eux, parce
que dépourvue de pouvoir de sanction en cas de manquements.
Qu'advient-il alors dans le cas où un Etat manque
délibérément à ses obligations internationales
devant la Cour ? En droit international, il existe des sanctions lorsqu'un
Etat met en cause sa responsabilité internationale en contrevenant
à ce qui est requis de lui. Qu'en est-il par exemple pour le cas
spécifique de l'obligation de coopérer avec la Cour Pénale
Internationale? Le chapitre trois sera le lieu d'évoquer les
conséquences pour les Etats de la non coopération avec la Cour,
qui constitue une des violations que peuvent commettre les Etats.
CHAPITRE 3 :
LES CONSEQUENCES DE LA NON
COOPERATION
« L'Union Européenne refuse
l'entrée de la Croatie pour non coopération avec le
TPIY »165(*). Cette décision qui intervient à la
suite de plusieurs injonctions faites à la Croatie aussi bien par l'UE
que par le Conseil de sécurité - incitant ce pays à
prendre des mesures en vue de l'arrestation et du transfert de l'un de ses
généraux qui fait l'objet de poursuites devant le TPIY166(*) - est une forme de sanction.
Il peut être étonnant qu'une mesure de telle nature soit prise par
l'Union Européenne (UE), contre la Croatie qui ne coopère pas ou
pas assez avec le tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
(TPIY). Ce tribunal est en effet un organe établi par le Conseil de
sécurité de l'ONU, et à défaut du tribunal
lui-même, on pourrait s'attendre à ce que ce soit le Conseil qui
réagisse ainsi contre la Croatie. D'un autre coté, cette
situation est compréhensible. Le tribunal est en effet dépourvu
d'un réel pouvoir de sanction contre les Etats en de telles
circonstances. De plus, le Conseil de sécurité, organe politique,
a du mal à réagir également.
Lorsque pareille situation survient devant le TPIY, organe
subsidiaire du Conseil de sécurité des Nation Unies, l'on peut
s'interroger sur ce qui adviendra devant la Cour pénale internationale,
juridiction qui est également tributaire de la coopération des
Etats. Certes, dans le cas de cette Cour, la même obligation de
coopérer est affirmée pour les Etats mais elle procède
d'une source différente qui est le traité de Rome. Cette
différence d'établissement est fondamentale.
Des situations de non coopération avec la CPI ne sont
pourtant pas à exclure, et ce pour plusieurs raisons. Qu'adviendra-t-il
alors en pareille circonstance ? Une telle éventualité
entraînerait sans aucun doute des conséquences, tant au regard du
droit international général (section 1) que du Statut de la Cour
lui-même (section 2).
Section 1 : Les
conséquences au regard du droit international
général : la
responsabilité internationale de l'Etat
En droit international, en particulier en droit de la
responsabilité, le non respect d'une obligation (conventionnelle ou non)
entraîne la mise en jeu de la responsabilité de l'Etat en cause.
Ce système de responsabilité internationale obéit à
des règles précises qu'il convient de rappeler et d'appliquer au
cadre de notre sujet, avant de présenter comment ces règles
pourraient trouver application dans le cas du traité de Rome instituant
la CPI (paragraphe 1).
Il conviendrait d'analyser par ailleurs, les raisons que
pourraient invoquer certains Etats qui ne remplissent pas leur obligation de
coopérer, en nous fondant sur l'expérience des juridictions
pénales internationales préexistantes, avant d'aborder les
implications de ce manque de coopération (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La
responsabilité internationale de l'Etat167(*) pour non coopération avec la Cour au regard des
règles de droit international général sur la
responsabilité
En
vertu des principes établis du droit international, la mise en oeuvre de
la responsabilité d'un Etat obéit à des conditions
précises (A) et entraîne des conséquences à
l'égard de celui-ci (B).
A- Les conditions de
mise en oeuvre
L'article premier du projet d'articles de la Commission du
droit international de l'ONU (CDI) sur la responsabilité internationale
des Etats pour fait internationalement illicite dispose que
« Tout fait internationalement illicite de l'Etat engage sa
responsabilité internationale »168(*).
L'Etat doit se rendre coupable d'un acte internationalement
illicite pour que puisse être engagée sa responsabilité
internationale. Par fait internationalement illicite, il faut entendre l'acte
qui constitue une violation d'une obligation internationale et qui est
attribuable à un Etat169(*). Un tel acte doit remplir à la fois des
conditions subjectives et objectives.
1- La condition
subjective : l'imputabilité de l'acte à
l'Etat
Pour que la violation d'une obligation internationale soit
établie, il faut que l'acte en cause soit attribuable ou encore
imputable à un Etat, c'est à dire « qu'un
rattachement puisse être opéré entre
l'évènement ou le comportement incriminé et l'Etat dont on
recherche la responsabilité »170(*). Il faut que l'acte ou le
fait ait été l'oeuvre d'un organe de l'Etat ou d'une
entité pouvant être considérée comme tel au moment
de la commission de l'acte illicite. En effet, « est
considéré comme fait de l'Etat d'après le droit
international, le comportement de tout organe de l'Etat ayant ce statut
d'après le droit interne de l'Etat »171(*). Il convient alors de
s'interroger sur l'organe qui peut être qualifié d'organe de
l'Etat, agissant donc en son nom et pouvant engager sa
responsabilité.
Selon l'article 4(2) du projet d'articles de la CDI, la
qualification d'organe de l'Etat relève uniquement du droit interne de
cet Etat. C'est donc la législation nationale de l'Etat qui
détermine quel organe peut être considéré comme
agissant en son nom et pour son compte. L'Etat, souverain dans son organisation
interne, peut lui seul attribuer à un organe la qualité d'organe
étatique. Le droit international intervient cependant pour
reconnaître la qualité d'organe de l'Etat à certaines
entités qui, même si elles ne sont pas reconnues comme telle par
le droit interne, sont assimilées à des organes de l'Etat. En
effet, du fait que ces entités agissent sous le contrôle de l'Etat
ou remplissent des taches qui lui sont en principe dévolues, le droit
international leur reconnaît cette qualité d'organes d'Etat, tout
au moins pour la circonstance de l'évènement en cause ; ceci
en vue de permettre que soit engagée la responsabilité de l'Etat
et ainsi permettre la réparation du dommage survenu. Ainsi, le projet de
code de la Commission du droit international énumère en ces
articles 5 et suivants, des organes dont le comportement illicite est
attribuable à l'Etat du fait de leur position ou des activités
qu'ils mènent et qui constituent un fait illicite ou ont
été à l'origine de ce fait. C'est ainsi que :
- le comportement d'un organe mis à la disposition d'un
autre Etat est attribuable au second ;
- le comportement d'une personne ou entité qui
excède les pouvoirs et instructions qui lui ont été
octroyés par l'Etat engage néanmoins ce dernier,
- les actes d'une personne ou groupe de personnes accomplis
sous la direction ou le contrôle de l'Etat, ou encore adoptés par
cet Etat après leur commission engagent celui-ci ;
- et enfin des actes accomplis par une personne ou un groupe
de personnes, exerçant des prérogatives de la puissance publique,
en cas de carence ou en l'absence de l'Etat l'engage néanmoins.
Dans le cas de la Cour par exemple, il est indéniable
que l'inexécution d'une demande de coopération serait attribuable
à l'Etat requis. C'est en effet à ce dernier qu'est
adressée la demande et c'est à lui de prendre les mesures et de
donner les instructions nécessaires à ses organes
compétents pour satisfaire à la demande de coopération.
A coté de cette condition subjective, il y a aussi une
condition dite objective que doit remplir l'acte dénoncé.
2- La violation
d'une obligation internationale : la condition objective
a- Les
caractères de la violation
Il faut d'abord que soit observée dans le comportement
de l'Etat, une action ou une omission constituant la violation d'une obligation
qui lui incombe au regard du droit international. Ensuite, l'origine
conventionnelle ou coutumière de l'obligation n'a aucune pertinence dans
l'appréciation de l'illicite. Quelle que soit la source de la
règle qui prescrit l'obligation, sa violation est constituée
dès lors qu'un manquement est constaté172(*). La violation peut en outre
être constituée par un acte positif (action) ou négatif
(omission). Enfin, il faut que la règle ou l'obligation violée
soit en vigueur à l'égard de l'Etat en cause au moment où
la violation se produit173(*).
Par exemple, dans l'affaire du détroit de Corfou devant
la Cour internationale de justice, l'Albanie et la Grande Bretagne avaient vu
leurs responsabilités engagées, respectivement pour ne pas avoir
pris les mesures nécessaires à la sécurité dans ses
eaux territoriales (omission), et pour avoir procédé au
déminage dans lesdites eaux en violant le territoire et la
souveraineté de l'Albanie (action)174(*).
L'exemple de l'inexécution d'une demande de
coopération de la Cour peut être maintenu pour illustrer une
violation de l'obligation de coopérer avec la Cour. Une telle
inexécution, lorsqu'elle ne peut pas être justifiée par
l'Etat requis dans les conditions prévues par le Statut175(*), constitue une violation par
cet Etat de son obligation internationale envers la Cour. Il convient cependant
de distinguer entre l'inexécution d'une demande émanant de la
Cour qui serait due à un manque de volonté de l'Etat requis, et
une impossibilité d'exécuter qui pourrait résulter de
facteurs indépendants de cet Etat176(*). Cette distinction est importante car seule la
première situation peut fonder la responsabilité de l'Etat
requis.
Par ailleurs, la possibilité d'une justification
suggère la question plus générale des circonstances
excluant l'illicéité dans le droit de la
responsabilité.
b - L'absence de
circonstances excluant l'illicéité 177(*)
Pour
que l'acte en cause puisse définitivement constituer une violation du
droit international, il ne doit pas être couvert par une circonstance
excluant l'illicéité. Les circonstances excluant
l'illicéité sont des exceptions qui permettent de par leur
survenance, en rapport avec le fait en cause, d'annuler la violation de
l'obligation internationale. Comme l'indique leur appellation, ces
circonstances écartent en amont l'illicéité du fait, qui
sans elles, constituerait une violation d'une obligation
internationale178(*). En
conséquence, la question de la responsabilité de l'Etat auteur du
fait ne se pose plus, puisque le fait générateur de celle-ci
n'existe pas179(*).
Les
circonstances excluant l'illicéité, de même que les
conditions de leur application sont énoncées et définies
au chapitre V du projet d'articles de la CDI. Ce sont respectivement, le
consentement de l'Etat à l'accomplissement du fait à son
égard (art. 20 du projet), la légitime défense (art. 21 du
projet), la situation de contre-mesure du fait en cause (art. 22 du projet), la
force majeure ayant entraînée l'accomplissement du fait (art. 23
du projet), la détresse (art. 24 du projet), et enfin l'état de
nécessité (art. 25 du projet)180(*).
Par
exemple la situation exposée à l'article 72 du Statut, peut
constituer une circonstance excluant l'illicéité dans le cas d'un
Etat requis d'une demande de coopération par la Cour, et donc rendre
licite un refus de coopérer de celui-ci. En vertu de cette disposition,
un Etat peut refuser sa coopération à la Cour pour des raisons de
sécurité nationale. En effet, une telle situation peut entrer
dans la définition d'un état de nécessité, si par
exemple, dans une hypothèse de crise, un gouvernement se doit de garder
secrètes des informations d'ordre stratégique qui, si elles
étaient divulguées, pourraient sérieusement nuire à
ses forces.
Ces circonstances n'ont cependant
aucun effet lorsque le fait en cause est commis en violation de normes
impératives du droit international général pour lesquelles
il n'est permis aucune dérogation. C'est ce qui ressort de l'article 40
du projet de la CDI.
Lorsque ces conditions objectives et subjectives sont remplies
et lorsque aucune circonstance n'exclut l'illicéité du
comportement en cause, alors peut être engagée la
responsabilité internationale de l'Etat fautif par le ou les Etats qui
ont subit un préjudice.
3- L'existence d'un
dommage ?
La responsabilité internationale de l'Etat
résulte donc du fait internationalement illicite. La définition
de ce dernier élaborée par la CDI à l'article 1 du projet
de 2001, ne mentionne pas le dommage comme un élément constitutif
du fait illicite. On s'interroge alors sur la nécessité de
l'existence d'un dommage pour que soit engagée la responsabilité
internationale de l'Etat.
En doctrine deux thèses existent à ce
sujet181(*). La
première est celle dite du « dommage
inhérent » à l'illicite. Selon cette acception, le
préjudice pour un Etat existe dans le fait même qu'une violation
ait été commise, c'est le préjudice juridique182(*). Ainsi, pour les tenants de
cette position, le dommage est indissociable de la violation puisque la seconde
implique automatiquement le premier. Cette solution est en accord avec
l'article 1er du texte de la CDI dans la mesure où la
question du dommage ne se pose plus pour qu'il y ait responsabilité,
dès lors qu'il y a constat de la violation d'une obligation
internationale.
Quant à la seconde, elle développe l'idée
du dommage consécutif. Selon cette thèse, le dommage est un
résultat de la violation, il n'est pas implicite à celle-ci mais
en est une conséquence. La responsabilité, notamment
l'étendue de la réparation due par l'Etat fautif, sera donc
proportionnelle au dommage produit. Ici la nécessité de
déterminer un dommage répond donc au besoin d'évaluation
de la réparation.
En résumé, les deux thèses
évoquent un préjudice, tout au moins juridique, pour fonder la
responsabilité internationale de l'Etat, bien qu'elles lui
confèrent des fonctions différentes. Pour sa part, la CDI affirme
que la question du dommage n'est généralement pas
nécessaire. Elle est cependant fonction des situations individuellement
prises, aucun principe général n'en détermine alors le
régime juridique. C'est en effet le contenu de la règle primaire
en cause qui est déterminant183(*).
Ce dommage peut alors se présenter sous deux
formes : il peut être direct ou indirect. Le dommage direct ou
encore dommage immédiat, est celui qui atteint directement un
sujet de droit international (l'Etat en l'occurrence) dans ses droits184(*). Le dommage indirect ou
médiat survient par l'intermédiaire d'une personne privée,
physique ou morale, ayant la nationalité d'un Etat et pour laquelle ce
dernier peut prendre « fait et cause »185(*).
Qu'est ce qui pourrait constituer un dommage résultant
d'un manque de coopération envers la Cour ? Vraisemblablement le
retard dans l'enquête de la Cour et peut être même la
suspension pure et simple de cette enquête, s'il s'agit d'une
opération capitale pour la poursuite de l'enquête comme par
exemple l'arrestation du principal accusé. On pourrait même
soutenir l'idée que la violation d'une obligation de coopérer est
en elle-même constitutive de dommage, si l'on considère le
rôle primordial que joue la coopération des Etats dans la bonne
marche de la Cour. Une absence de coopération là où
celle-ci est indispensable, et c'est le cas dans la majorité des
situations, est forcément dommageable pour la Cour186(*).
En somme et d'une part, le préjudice subit par la Cour
est l'inaction de celle-ci, l'impossibilité pour elle de remplir sa
mission dans une affaire où elle devrait normalement exercer sa
compétence, du fait de la non coopération des Etats requis.
D'autre part, les Etats aussi ressentent un dommage juridique dans la mesure
où l'inaction de la Cour engendre, si elle se prolonge, une situation
d'impunité. Si les auteurs de crimes qui touchent l'ensemble des Etats
restent sans sanction, c'est en effet toute la justice pénale
internationale qui est mise à mal, à cause du non respect de ces
normes.
Le fait illicite étant accompli et le préjudice
constaté, il s'en suit, en droit international, des conséquences
qui peuvent être de plusieurs ordres.
B- Les
conséquences de la mise en jeu de la responsabilité
internationale de l'Etat
A l'instar du droit interne où un fait produisant un
dommage oblige son auteur ou le répondant de celui-ci à
réparation187(*),
le droit international attache comme conséquence de la
responsabilité d'un sujet de droit international la
« réparation intégrale du préjudice
causé »188(*). L'effet principal de la responsabilité
internationale pour fait internationalement illicite est donc la
réparation du préjudice (1). Cependant cette
responsabilité peut générer d'autres implications (2).
1- La
réparation du préjudice par l'Etat fautif
Un Etat, lorsqu'il est reconnu responsable de la violation
d'un engagement internationale, a l'obligation principale de réparer le
préjudice causé par cette violation, nonobstant bien sûr
celles de faire cesser l'acte illicite et de garantir la non
répétition de cet acte189(*). Ce principe est reconnu en droit
international190(*) et a
été rappelé à plusieurs reprises par la Cour
Permanente de Justice Internationale (CPJI). Ainsi dans l'affaire de l'usine de
Chorzow, la Cour affirmait que « c'est un principe du droit
international, voire une conception générale du droit, que toute
violation d'un engagement comporte l'obligation de
réparer »191(*).
Selon la CDI, la réparation à laquelle la
responsabilité donne lieu peut s'opérer de plusieurs
manières. Cette pluralité de modes de réparation est la
conséquence de ce que le préjudice causé peut lui aussi se
présenter sous des formes diverses aussi bien matérielles que
morales192(*). La
réparation peut donc consister en une satisfaction, une indemnisation ou
encore en une restitution, accomplies « séparément
ou conjointement par l'Etat responsable »193(*).
Tout d'abord, le mode de réparation qu'est la
restitution ou encore restauration, consiste (lorsque son exécution est
possible) dans la remise en l'état de la situation dans son état
d'avant la survenance du dommage. Son but est d' « effacer
toutes les conséquences de l'acte illicite et de rétablir
l'état qui aurait vraissemblablement existé si l'acte fautif
n'avait pas été commis », comme l'a reconnu la
CPJI dans l'arrêt rendu dans l'affaire de l'usine de Chorzow. Cette forme
de réparation qui est de loin la meilleure lorsqu'elle est bien
appliquée, est aussi assez difficile à mettre en oeuvre. En
effet, il est souvent impossible de remettre la situation dans son état
d'origine, de revenir en arrière lorsqu'un dommage est
déjà survenu.
En l'espèce, pour un Etat coupable de ne pas avoir
coopérer avec la CPI, la meilleure réparation est
l'accomplissement des mesures requises par la Cour dans sa demande de
coopération. Cette action permettrait de relancer le cours de
l'enquête, effaçant de ce fait les conséquences de sa
violation, malgré le fait que le retard accusé dans
l'enquête ne puisse être rattrapé.
Il y a ensuite l'indemnisation qui est prévue à
l'article 35 du projet d'articles de la CDI. Il a pour but de compenser le
dommage lorsque la restitution s'avère impossible. Il consiste en une
somme d'argent versée à l'Etat lésé, dont le
montant est proportionnel à l'importance du dommage subi ou du gain
manqué résultant de l'acte illicite. Ces deux premières
formes de réparation interviennent généralement lorsque le
dommage est matériellement estimable.
En pratique, dans le cadre de la CPI, il est difficile de
quantifier un dommage résultant d'une non coopération, de sorte
qu'il peut être malaisé de déterminer le montant de
l'indemnisation due. Concrètement, on pourrait concevoir par exemple le
versement d'un montant à la Cour pour les frais supplémentaires
engagés pour le maintien en détention du ou des accusés,
ou pour la protection des victimes, en raison du retard accusé dans la
procédure.
Lorsqu'il survient un dommage moral, il est plus souvent
réparé par la satisfaction. Celle-ci peut se présenter
sous la forme d'excuses officielles ou de sanctions contre l'organe responsable
de la violation dommageable. La réparation peut même dans ce cas
être constituée par la simple constatation de la violation d'une
obligation194(*).
Toutes ces formes de réparation en conséquence
d'un fait illicite sont mises en oeuvre par l'Etat responsable. Il existe aussi
des conséquences de la responsabilité qui elles sont
déclenchées par les autres Etats intéressés.
2- Les
réactions possibles des autres Etats à un fait internationalement
illicite
Quel(s) Etat(s) peut(vent) être
considéré(s) comme ayant subi une atteinte dans ses(leurs) droits
par un manquement à l'obligation de coopérer envers la CPI, et
comment peut(vent)-il(s) demander le respect de cette obligation ?
a- La
détermination des Etats pouvant invoquer la responsabilité
internationale
Il convient d'emblée de déterminer
l' «Etat lésé», et ceci pour deux raisons
principales. C'est à celui-ci qu'est reconnu en premier le droit
d'invoquer la responsabilité de l'Etat fautif, et c'est encore lui qui a
le pouvoir de recourir à des contre-mesures195(*). Le projet d'articles
élaboré par la CDI, considère comme Etat
lésé, ayant qualité pour invoquer la responsabilité
de l'Etat fautif, un Etat qui, pris individuellement, est dans les conditions
énumérées à l'article 42. Selon cette disposition,
l'Etat lésé est celui à qui l'obligation est due. Lorsque
l'obligation est due à un groupe d'Etats, l'Etat lésé est
celui qui est spécialement atteint par la violation commise.
Dans le cadre de la coopération avec la CPI par
exemple, il est possible de considérer comme spécialement
atteint par la violation, au sens de l'article 42(b.i), l'Etat qui a
été le théâtre du crime sujet de l'enquête et
qui souhaite voir la Cour terminer son enquête, afin de parvenir à
instaurer la paix, lorsque la poursuite de criminels est une étape dans
la résolution d'une crise interne.
Ensuite, il est reconnu aussi le droit d'invoquer la
responsabilité internationale, à d'autres Etats. Il s'agit de
«tout Etat autre qu'un Etat lésé» tel que
défini à l'article 48 du projet d'articles. Aux termes de cet
article, peuvent être considérés comme tels, les autres
Etats qui ont un intérêt collectif dans le respect de l'obligation
violée, dans la mesure où ils font partie d'un groupe d'Etats
auxquels cette obligation est due. De plus, lorsque l'obligation violée
est due à la communauté internationale dans son ensemble, tout
autre Etat peut être rangé dans cette catégorie. Dans ce
dernier cas, l'on peut se trouver aussi dans la situation d'une violation grave
au sens de l'article 40 du projet. Dans cette hypothèse en effet, tous
les Etats ont un droit d'invoquer la responsabilité internationale et
même un devoir de coopérer à toute action en vue de mettre
fin à la violation196(*).
Il convient cependant de souligner que les Etats autres que
l'Etat lésé sont limités dans leurs actions en
réponse à la violation. Ces derniers ne peuvent demander la
cessation de l'illicite et la réparation du dommage engendré que
par des mesures licites197(*) tandis que l'Etat lésé a en plus le
droit de recourir à des contre-mesures.
Dans le cadre de la CPI, la lecture de ces différentes
dispositions, conduit au résultat suivant : lorsqu'il se produit
une violation de l'obligation de coopérer, les Etats parties dans leur
ensemble peuvent (en tant que lésé ou autres) invoquer
la responsabilité de l'Etat en cause. L'obligation de coopérer
due à la Cour, est requise des Etats parties pour le bon
déroulement des activités de celle-ci, la répression
efficace des crimes internationaux. Cet objectif représente
l'intérêt collectif des Etats parties. Et ceux-ci peuvent exiger
la mise en oeuvre de la responsabilité internationale dans
l'intérêt de l'Etat lésé tel qu'il a
été perçu ci dessus, mais aussi dans leur
intérêt propre.
Ainsi, tous les Etats parties sont concernés en cas de
manquement à l'obligation de coopérer envers la Cour, obligation
qui a même été qualifiée à juste titre de
«erga omne partes » c'est à dire obligation
impérative de droit internationale en vigueur cependant seulement entre
les Etats parties au Statut198(*). De ce fait, ces derniers peuvent réagir
contre l'Etat fautif, individuellement ou collectivement selon les
mécanismes prévus par le droit international. Chaque Etat partie
à la CPI a un intérêt, au moins juridique, à ce que
la coopération soit mise en oeuvre par tous les autres, et peut donc
demander la réparation d'un manquement à l'obligation de
coopérer.199(*)
b- Les actions
possibles de l'Etat lésé et des Etats autres que l'Etat
lésé contre l'Etat responsable
D'abord, il y a la mise en jeu de la responsabilité
internationale et la demande de réparation, qui peuvent être
accomplis par exemple par le biais d'une action devant la Cour Internationale
de Justice. L'Etat lésé peut ensuite entreprendre d'autres
actions, notamment lorsque l'Etat fautif ne réagit pas. Ces
réactions, plus connues sous le nom de contre-mesures, sont
essentiellement ce qu'on appelait des mesures de représailles200(*). Ce sont donc des
réactions qui interviennent lorsque l'acte internationalement illicite
perdure ou lorsque l'Etat responsable n'a pas exécuté son
obligation de réparation. Ces mesures, qui sont « des
inexécutions temporaires d'obligations internationales »
sont mises en oeuvre par l'Etat lésé par le fait illicite, dans
le souci d'amener l'autre Etat à s'acquitter de ses obligations et de
sauvegarder ses intérêts. La faculté de recourir à
des contre-mesures n'est reconnue qu'à l'Etat lésé en
vertu de l'article 49 du projet de la CDI 201(*).
Dans le cas de la CPI, les contre-mesures de l'Etat
lésé devraient en conséquence uniquement avoir pour but de
contraindre l'Etat fautif à exécuter son obligation. Ces mesures
pourraient se traduire par des sanctions ou restrictions économiques. Il
ne devrait donc pas être permis par exemple des contre-mesures qui
consistent en des actes identiques à ceux qui ont
déclenchés la responsabilité. Ceci se justifie dans la
mesure où, d'une part, l'obligation de coopérer est due à
la Cour et non à l'Etat fautif (qui sont deux entités
distinctes). D'autre part, une contre-mesure est sensée être
dirigée contre ce dernier202(*) dans l'objectif de l'amener à exécuter
son obligation. La mesure envisagée devrait donc n'atteindre
directement que l'Etat fautif. Un Etat qui adopte le refus de
coopérer comme contre-mesure à un refus de coopérer
pourrait donc voir sa propre responsabilité engagée envers la
Cour.
Ces contre-mesures sont cependant reconnues par le droit
international qui les organise et ne sont donc plus illicites lorsqu'elles sont
prises dans les normes203(*). En effet, le chapitre II du projet de la CDI est
consacré aux dispositions sur les conditions d'exercice de ces
contre-mesures. Ainsi, celles-ci ne peuvent être que temporaires et
n'avoir pour seul objectif que d' « amener cet Etat
[responsable] à s'acquitter des obligations qui lui
incombent ».
En outre, certaines obligations ne peuvent faire l'objet de
contre-mesures du fait de leur caractère fondamental pour la
société internationale dans son ensemble, ce sont essentiellement
celles relatives aux normes de jus cogens et aux droits
humains204(*).
Ensuite, à coté des contre-mesures de l'Etat
lésé, on peut aussi observer les réactions des autres
Etats. C'est le cas par exemple lorsque la violation intervient dans le cadre
d'une organisation internationale. Les organes de décision de certaines
organisations ont le pouvoir de prendre des sanctions collectives au nom de
tous les membres ou d'autoriser leurs membres à prendre des mesures
individuelles. Ces réactions qui ne sont pas des contre-mesures ont le
même objectif que celles-ci, obliger l'Etat responsable à honorer
ses engagements. C'est le cas de l'ONU, organisation internationale par
excellence, au sein de laquelle est organisé un système de
sanction collective par le biais du Conseil de sécurité.
En matière de sanction, ledit Conseil peut
également intervenir dans le cadre de la CPI, lorsque c'est lui qui l'a
saisi par une décision sur la base du Chapitre VII de la
Charte205(*).
Ces sanctions collectives dans le cadre d'une organisation
internationale peuvent également s'apprécier dans le cadre de la
CPI qui est également une organisation internationale mise en place par
le traité de Rome. En outre, elle met à la charge de ses membres
- et même en certaines circonstances, des non membres - des obligations
qui malheureusement peuvent être violées par ces derniers.
Quid alors de la mise en oeuvre de la responsabilité
internationale dans le cadre de cette instance internationale ?
Paragraphe 2 : La mise en
oeuvre de la responsabilité internationale dans le
cadre
de la Cour Pénale Internationale
Comme il a été souligné dans les
précédents développements, les Etats ont un rôle de
premier ordre à jouer au sein de la CPI. Il est également
ressorti que ceux-ci pouvaient se rendre coupable de manquement dans
l'exécution de leurs obligations envers la Cour, particulièrement
l'obligation de coopérer. Ils peuvent donc encourir dans ce cas, la mise
en jeu de leur responsabilité internationale. Comment s'apprécie
donc cette responsabilité, au regard des Etats (membres ou non) en
cause. Quelles raisons peuvent vraissemblablement conduire ceux-ci à
contrevenir à leurs obligations? Examinons successivement ces deux
interrogations.
A- Les arguments de la
non coopération
Depuis le 1er juillet 2002, date de l'entrée
en vigueur du Statut de Rome et du début de la compétence de la
CPI, celle-ci a connu plusieurs situations relativement à sa saisine. En
effet, la Cour a été saisie aussi bien par des Etats, que par le
Conseil de sécurité des Nations Unies. Ceci est bien la preuve
que cette cour a son importance.
Il est aussi vrai que des obstacles existent qui tiennent
essentiellement à la volonté des Etats à assister la Cour
dans sa mission sur le terrain. Malheureusement on remarque encore des
réserves de la part des Etats et certains affichent leur
hostilité à coopérer. Plusieurs raisons son mises en avant
pour justifier une telle attitude. Ces arguments sont de nature juridique mais
aussi et surtout politique.
1- Les obstacles
juridiques à la coopération des Etats avec les juridictions
pénales internationales
Ces obstacles juridiques sont essentiellement
constitués par les immunités reconnues à certains
individus du fait de leur position ou de leurs fonctions dans l'appareil
étatique et certaines autres incompatibilités avec des
engagements internationaux.
a- Les
immunités internationales
La question des immunités a toujours été,
avec celle de la souveraineté, un obstacle majeur à l'exercice de
la juridiction internationale des tribunaux tant internes qu'internationaux. Le
régime des immunités est régi par la Convention de Vienne
sur les relations diplomatiques de 1961206(*), mais aussi par la coutume internationale.
Les immunités sont des facilités et autres
avantages reconnus aux personnels des missions et représentations
diplomatiques des Etats à l'étranger mais aussi et surtout aux
organes principaux des Etats, notamment le chef de l'Etat, du gouvernement, et
le ministre des affaires étrangères. Ces immunités qui
peuvent être personnelles ou fonctionnelles207(*), ont essentiellement pour
objectif de faciliter la tâche des agents de l'Etat agissant à
l'étranger, de préserver la liberté d'action de l'Etat en
la personne de son organe208(*).
Notre intérêt portera particulièrement
sur les immunités de juridiction et d'exécution pénale
reconnues aux hautes personnalités des Etats. Pour ce qui concerne les
immunités de juridiction, celles-ci se présentent comme des
empêchements à la coopération des Etats, dans la mesure
où elles sont des obstacles de procédure qui interdisent au juge
de connaître d'une affaire pour laquelle il a normalement
compétence. L'immunité d'exécution quant à elle,
confère à son bénéficiaire une inviolabilité
totale qui se traduit par le fait qu'aucune décision
étrangère visant son arrestation ou sa détention hors du
territoire de son Etat ne peut être exécutée.
Ces exceptions s'adressent pour l'essentiel aux juridictions
internes des Etats, et l'on se demande alors quelle est la position des
instances pénales internationales face à cette question des
immunités, précisément ces immunités pénales
reconnues aux officiels des Etats. Quelle doit être l'attitude d'un Etat
à qui il est demandé de transférer une personne qui
bénéfice d'une immunité pénale internationale
devant une instance pénale internationale telle que la CPI ?
En principe, l'immunité internationale ne peut plus
être opposée aux instances pénales internationales pour
soustraire un individu de sa responsabilité lorsqu'il est
impliqué dans un crime international. En effet, depuis le statut et les
jugements du tribunal de Nuremberg en 1945, la qualité officielle
n'exonère pas un individu de sa responsabilité internationale.
Enoncé à l'article 7 du statut du tribunal de Nuremberg puis
affirmé par l'Assemblée Générale des Nations
Unies209(*) et ensuite
par la Commission du droit internationale de l'ONU210(*) en 1950 comme principe du
droit international pénal, le principe de l'inopposabilité de
l'immunité devant les juridictions internationales couvre les plus
hautes autorités de l'Etat211(*).
Le Statut de la CPI consacre pour sa part deux articles
à la question de l'immunité, des articles pour le moins
contradictoires. En effet, l'article 27 exclut expressément le
bénéfice d'une quelconque immunité à toute personne
qui serait impliquée dans une procédure devant la Cour notamment
en son alinéa 2 qui dispose : « Les immunités
ou règles de procédures spéciales qui peuvent s'attacher
à la qualité officielle d'une personne en vertu du droit interne
ou du droit international, n'empêchent pas la Cour d'exercer sa
compétence à l'égard de cette personne. ».
A la lecture de cet article, la solution apparaît évidente mais
l'article 98 sème un peu le doute. Celui-ci traduit en effet
l'incapacité de la Cour à engager des mesures contraignantes qui
pourraient amener un Etat requis par elle à agir en contradiction avec
ses obligations internationales « en matière
d'immunité des Etats ou l'immunité diplomatique d'une
personne... »212(*). En conséquence de cet article la Cour serait
obligée d'arrêter une procédure, ou tout au moins de la
suspendre jusqu'à ce que les Etats en cause que sont l'Etat requis et
l'Etat national de la personne recherchée résolvent la question
de l'immunité, ou que « l'Etat d'envoi...consente à
la remise ». En effet le droit diplomatique, il faut le
reconnaître, admet une procédure de levée de
l'immunité de juridiction pénale par l'Etat du
bénéficiaire; mais la très faible fréquence avec
laquelle cette levée d'immunité est opérationnelle et la
longueur et la complexité de cette procédure remettent en cause
cette réglementation du droit diplomatique. Cette situation est d'autant
plus difficile quand on sait que les Etats jouent en la matière un
double jeu, lorsqu'un cas de crime international se présente. Ils
« acceptent volontiers le défaut de pertinence de la
qualité officielle d'un coté, mais ils ne font pas d'exception
aux immunités diplomatiques de l'autre »213(*). On pourrait d'ores et
déjà considérer que les Etats parties ont renoncé
par leur ratification à opposer une quelconque immunité de leur
ressortissant à la Cour en acceptant le Statut, particulièrement
l'article 27214(*). Mais
des différences sensibles existent malheureusement entre les textes en
vigueur et la pratique des Etats215(*).
En tout état de cause, il est clairement admis que les
immunités reconnues aux officiels des Etats sont inopérantes
devant les juridictions pénales internationales et la CPI en
particulier. En effet, la CIJ l'a expressément affirmé dans son
arrêt du 14 février 2002 dans l'affaire dite du « mandat
d'arrêt »216(*). Il faut néanmoins que les prévenus
soient remis à la Cour pour être jugés, et seule la
pratique des Etats dans le domaine sera probante.
b- Les
Incompatibilités avec d'autres obligations
internationales
« Est-il risqué pour les Etats de
coopérer avec les juridictions pénales
internationales ? » telle est la question que posait un
récent écrit, à propos des relations entre la Cour
Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), les tribunaux nationaux
européens et les juridictions pénales internationales (TPIY en
particulier)217(*). Une
telle interrogation pourrait apparaître paradoxale lorsque l'on sait que
obligation est faite aux Etats de coopérer avec ces instances
pénales internationales, notamment les tribunaux ad hoc.
La difficulté évoquée ici a
été soulevée par les arguments contenus dans la
requête de l'ex-président Milosevic devant la Cour
Européenne des Droits de l'Homme (CEDH).218(*) Dans cette requête,
l'ancien dirigeant de la Yougoslavie accuse les Pays-Bas de violer la
Convention Européenne des Droits de l'Homme. Selon son raisonnement, les
Pays-Bas ont agit en violation de la Convention :
- d'abord, en le gardant en détention (art. 5(1) de la
Convention), malgré sa qualité d'ex-chef d'Etat ;
- ensuite, en coopérant avec le TPIY malgré la
modification de l'acte d'accusation après son arrestation (art. 5(2) de
la Convention) et le fait que celui-ci soit illégal et impartial (art.
6(1) de la Convention) ;
- enfin, le non respect par le TPIY de la présomption
d'innocence (art. 6(2) de la Convention) et de la faculté de
l'accusé de se défendre lui-même (art. 6(3) de la
Convention), et bien d'autres allégations219(*). Cette situation
soulève bien des interrogations.
Quelle attitude les Etats devraient alors avoir, lorsque
la coopération avec une instance internationale (le TPIY) peut à
certains égards constituer une violation des obligations envers une
autre (la CEDH) et engager la responsabilité ? Les fondements
évoqués de la « responsabilité des Etats du
fait de leur coopération avec les juridictions pénales
internationales »220(*) sont pour l'essentiel des questions
d'incompatibilité entre les textes de base de la Convention
européenne, et la pratique du TPIY et du droit pénal
néerlandais. En effet, la Convention européenne se veut
rigoureuse dans le respect des droits de l'Homme notamment en matière
judiciaire, ce qui ne va pas toujours de paire avec la pratique des autres
instances en cause.
Malheureusement, la validité des arguments n'a pu
être discutée par la Cour européenne, dans la mesure
où celle-ci n'a pas eu besoin de se prononcer sur le fond de
l'affaire 221(*). Les
interrogations demeurent donc. Cela pourrait faire naître quelques
réserves, en tout cas beaucoup de précautions juridiques chez les
Etats avant de répondre aux sollicitations des tribunaux pénaux
internationaux et à présent de la CPI. Dans le cas de cette
dernière juridiction par exemple, le Statut prévoit, en tout cas
au moins indirectement, que les obligations qui en découlent peuvent
prévaloir sur les autres obligations internationales notamment celles
issues d'accords entre Etats222(*). Cependant, en matière d'immunité par
exemple, le respect des règles internationales coutumières ou
conventionnelles a apparemment eu la priorité sur les
nécessités d'assistance judiciaire des Etats. C'est du moins ce
qui ressort du fait que la Cour ne peut formuler de requêtes de
coopération qui entraîneraient la violation des dites
règles. Ces requêtes ne pourront être émises que dans
le cas où la coopération de l'Etat tiers aurait été
préalablement obtenue par la Cour.
Ces obstacles devraient cependant pouvoir être
contournés lors des aménagements législatifs auxquels sont
astreints les Etats dans le cadre de la mise en oeuvre du Statut de Rome.
Ceux-ci ont en effet l'obligation de légiférer afin de permettre
« la réalisation de toutes les formes de
coopération » qui pourraient émaner de la
Cour223(*). Quant aux
textes des instances internationales, leur harmonisation est plus longue
à mettre en place et la solution risque de se faire encore attendre.
2- Les raisons d'ordre
politique
Les questions d'ordre politique sont souvent en amont de
celles qui se posent au niveau du judiciaire. S'il est vrai que la
coopération requise des Etats est essentiellement adressée aux
organes judiciaires et aux forces de police nationale, leurs actions ont besoin
d'un aval de l'exécutif pour être efficacement
exécutées. Pourtant, il n'est pas osé de dire que les
considérations politiques sont d'une grande importance dans les actions
et décisions de l'exécutif. Ici encore, les questions
liées à la souveraineté internationale refont surface.
Deux situations méritent d'être
relevées : le cas du Darfour qui est pendant devant la CPI et de la
Sierra Leone d'une part, et l'hostilité des Etats-Unis à ladite
Cour d'autre part.
a- La situation du Soudan
et de la Sierra Léone
En rappel, selon le principe de complémentarité,
la Cour peut se reconnaître compétente pour une affaire relevant
normalement de la compétence d'un Etat, lorsque ce dernier est incapable
d'exercer efficacement ses attributions judiciaires. En effet, la Cour a le
pouvoir d'accepter de connaître une affaire lorsqu'elle est saisie par
une autre instance ayant ce droit, si elle estime que l'Etat normalement
compétent selon les critères traditionnels de compétence
pénale, n'est pas capable ou n'a pas la volonté de juger ladite
affaire224(*).
Aucune difficulté ne se profile lorsque l'Etat
reconnaît son incapacité à exercer sa juridiction pour
l'affaire en cause225(*). Par contre, lorsque l'Etat n'est pas du même
avis que la Cour quant à sa capacité, il peut y avoir
problème. Ceci dans la mesure où celui-ci pourrait se sentir
frustré dans l'exercice de sa juridiction pénale qui demeure un
atout majeur de la souveraineté nationale. Et l'on sait par ailleurs que
la Cour ne peut oeuvrer efficacement sans la réelle et volontaire
collaboration des Etats impliqués. Il va donc sans dire que cette
collaboration sera d'autant plus difficile à obtenir de la part d'un
Etat qui s'est auparavant vu déclaré contre son gré,
incapable de poursuivre efficacement une affaire ou reprocher de l'avoir
menée dans le but de faire diversion, et qui a vu la Cour lui
« souffler » celle-ci.
Le cas du Darfour (Soudan), qui est actuellement
examiné devant la CPI mérite d'être souligné dans ce
cadre, bien qu'il ne soit pas dans un cas parfait de
complémentarité226(*). En effet, le Conseil de sécurité
déjà saisi de la situation sur ce territoire soudanais, a
décidé de saisir la Cour suite aux recommandations de la
commission d'enquête établie par le SG, permettant ainsi à
la Cour d'être compétente bien que le Soudan ne soit pas partie
à la convention de Rome227(*). Cette commission a constaté « les
carences de la justice pénale soudanaise et la nécessité
qui en découle de recourir à d'autres voies
judiciaires » et a recommandé en conséquence au Conseil
de sécurité de « déférer la situation
au Darfour à la Cour pénale
internationale »228(*).
Le gouvernement de Khartoum n'a pas manqué d'exprimer
son hostilité à de telles mesures et s'est même doté
d'un tribunal national spécial pour connaître des crimes
internationaux commis au Darfour229(*). Ce tribunal est d'ailleurs entré en
activité dès juin 2005, paradoxalement une semaine après
que le procureur de la CPI ait annoncé le 06 juin 2005230(*) sa décision d'ouvrir
une enquête sur le Darfour. Il devrait être un substitut de la CPI
selon les autorités de Khartoum qui se sont en outre
déclarées contre tout transfert d'un citoyen soudanais vers la
CPI231(*).
Une autre affaire d'actualité est celle relative
à l'ex-président du Libéria. Bien que celle-ci ne soit pas
en examen devant la CPI, elle mérite d'être soulignée dans
la mesure où la situation est comparable dans le sens d'un obstacle
politique à l'exercice de la justice internationale. Le tribunal
spécial pour la Sierra Léone232(*) (TSSL), instauré grâce à la
collaboration entre l'ONU et le gouvernement sierra- léonais, a au
nombre de ces accusés les plus sérieux, l'ex-président
Charles Taylor233(*). Ce
dernier a obtenu l'asile politique au Nigeria, à la faveur des
négociations pour la fin des hostilités dans son pays. Cependant,
depuis sa mise en accusation par le (TSSL), M. Taylor n'a toujours pas
été transféré par le Nigeria, où il vit en
exil depuis 2003. Ce pays n'entend d'ailleurs pas le faire, bien qu'aucune
immunité ne puisse lui être reconnue234(*), et qu'aucune
procédure ne soit en cours contre lui devant les tribunaux internes du
Nigeria. Cette situation est possible du fait que le Nigeria, en toute
souveraineté, ne peut se voir obliger de transférer M. Charles
Taylor autrement que par des décisions et autres pressions politiques.
Pour preuve, l'inapplication du mandat d'arrêt du TSSL est jusqu'ici
restée sans effet notable235(*).
L'on peut enfin rappeler succinctement sur cette question le
fait que traduire des responsables de crimes internationaux pourrait rendre ces
derniers hostiles à tout arrêt des hostilités, chose
primordiale pour les négociations pour une fin de crise, et peut
même mettre en péril certains accords déjà en cours
de mise en oeuvre. C'est la situation par exemple en Ouganda, où il a
même été envisagé de faire interrompre les
enquêtes de la Cour qu'il a pourtant saisie de sa propre
initiative.236(*)
En outre en RDC, l'un des chefs rebelles qui ferait figure
de suspect dans les enquêtes de la Cour sur la situation en
Ituri237(*), est
aujourd'hui à la faveur du processus de paix vice président de ce
pays238(*). Il va donc
sans dire qu'une telle position à la tête de l'Etat rendra
difficiles d'éventuelles poursuites contre lui dans le contexte
actuel.
b- L'attitude des
Etats-Unis face à la Cour 239(*)
La campagne mondiale (conjuguée aux actions internes)
contre la CPI, dans laquelle se sont lancés les Etats-Unis, a pris
jusqu'à présent deux formes. La première a consisté
à obtenir, le 12 juillet 2002, une résolution du Conseil de
sécurité ouvrant la possibilité d'invoquer l'article 16 du
Statut de Rome pour ajourner les enquêtes ou les poursuites
engagées par la CPI contre des ressortissants d'États non
parties, à raison d'actes ou d'omissions liés à des
opérations établies ou autorisées par les Nations
unies240(*). La seconde
consiste à persuader des États de conclure des accords
d'immunité de juridiction, avec pour fondement l'article 98 du
Statut241(*) et visant
à empêcher ces États de remettre à la CPI les
ressortissants américains accusés d'actes de génocide, de
crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité, sans prévoir que
des enquêtes ou des poursuites soient engagées par les
États-Unis ni par un autre État. Cette deuxième mesure
pose le problème de validité de tels accords avec les Etats-Unis
envers la Cour, notamment lorsqu'ils sont aussi signés par des Etats
parties à la CPI242(*). Il est indéniable que ces accords sont en
contradiction avec le Statut de la Cour, et avec l'obligation de
coopérer, dans la mesure où ils exigeraient que les Etats
renvoient aux Etats-Unis un ressortissant américain recherché par
la CPI au lieu de le remettre à celle-ci243(*).
En conséquence, des Etats parties ne devraient pas
signer de tels accords, au risque de violer leurs engagements envers la Cour.
En effet, même si l'on reconnaissait quelque validité à ces
accords, leur application restreint la compétence de la Cour du fait de
la réciprocité de certains d'entre eux244(*). De tels comportements sont
alors susceptibles d'engager la responsabilité des Etats parties.
B- Les implications
de la responsabilité internationale de l'Etat pour le non respect des
engagements envers la CPI
La
violation de leurs engagements internationaux par les Etats, déclenche
à leur égard les mécanismes de la responsabilité
des Etats. C'est le principe général qui s'applique en droit
international.245(*)
Quelle
est alors la situation en cas de violation, dans le cas particulier du
Statut de la CPI?
1- L'absence de
règles spécifiques sur la mise en oeuvre de la
responsabilité des Etats dans les textes régissant la Cour
Les règles contenues dans le Statut ont pour premiers
destinataires les individus à l'égard desquels la Cour exerce sa
compétence, même si les références aux Etats y sont
fréquentes. Il est alors compréhensible que la question de la
responsabilité des Etats n'y soit pas développée. De
surcroît, les autres textes qui régissent la Cour et ses
différents organes, tels que le règlement de procédure ou
encore le règlement intérieur de l'Assemblée des Etats
parties, sont aussi dépourvus de telles dispositions. Il semble donc
qu'en matière de responsabilité des Etats, il n'existe pas de
lex specialis dans le Statut.
Cela pourrait se justifier par le souci de la Cour de
permettre à l'Etat en cause de contourner ces difficultés pour
pouvoir remplir ses obligations. L'objectif dans le Statut n'est donc pas de
sanctionner l'Etat, mais de l'aider dans une première approche à
surmonter les obstacles qu'il rencontre. C'est ainsi que, dans le cas de
l'obligation de coopération par exemple, l'Etat qui rencontre des
difficultés dans l'application des règles du Statut
« consulte la Cour sans tarder en vue de régler la
question »246(*). Il est prévu en effet des consultations
entre la Cour et ledit Etat en vue de trouver les voies et moyens de lui
faciliter les conditions de sa coopération. Ces consultations supposent
bien sûr que cet Etat ait la volonté d'honorer son obligation
envers la Cour mais que des circonstances particulières l'en
empêchent. C'est le cas par exemple de l'article 72 du Statut qui propose
des solutions afin de garder la confidentialité des informations
requises de l'Etat ou d'un témoin, qui peuvent toucher à la
sécurité nationale. En effet, un Etat est en droit de ne pas
communiquer de tels renseignements, mais lorsqu'il est indispensable pour la
Cour d'en prendre connaissance, celle-ci propose d'autres voies de
communication à l'Etat247(*).
Cependant, le problème peut se révéler
plus complexe lorsque la non coopération de l'Etat est due à une
volonté manifeste de ne pas le faire. Dans ces circonstances, les
consultations peuvent s'avérer inutiles ou ne même pas avoir lieu,
compte tenu du fait que c'est à l'Etat de saisir la Cour pour les
entreprendre.
En conséquence de l'échec des consultations,
l'Etat peut voir engager sa responsabilité pour ne pas avoir
coopérer avec la Cour. En effet, « si un Etat partie
à une convention d'assistance judiciaire ne remplit pas ses obligations
conventionnelles (...) sa responsabilité internationale est
évidemment mise en cause »248(*).
Dans ces circonstances, il peut être fait appel aux
règles générales en droit de la responsabilité.
2 - Le recours au
droit international général en matière de
responsabilité
Cette solution peut s'inspirer de l'article 25(4) du Statut
selon lequel « Aucune disposition du présent Statut
relative à la responsabilité pénale des individus
n'affecte la responsabilité des Etats en droit international».
Le Statut semble donc laisser la question au droit international
général, c'est à dire l'essentiel des règles
contenues dans le projet d'articles de la CDI. Ainsi, une violation
d'obligation en vertu du Statut tombe dans le champ des violations telles que
définies par la CDI.
En conséquence, les conditions objectives et
subjectives applicables en matière de détermination du fait
internationalement illicite et les effets qui s'y attachent s'appliquent aussi
dans le cadre de la CPI.
Ainsi, lorsque la Cour aura constaté dans le
comportement d'un Etat partie un manquement à l'obligation de
coopérer par exemple en vertu de l'article 87(7), les autres Etats
parties auront le droit de réagir contre l'Etat en cause, en vu de le
contraindre à coopérer. L'Etat lésé249(*) ainsi que les autres Etats
parties seront habilités à réclamer au besoin par des
contre-mesures pour le premier, et les autres par des moyens licites, le
respect de l'obligation de coopérer250(*).
Il semble cependant, à la lecture de l'article 87(7),
que seule la Cour a le pouvoir de constater le manquement à une
obligation de coopérer. C'est uniquement après un tel constat et
un référé à l'ASP ou au Conseil de
sécurité par la Cour, que les Etats parties seraient en droit de
demander le respect de l'obligation de coopération et la
réparation en ce qui concerne l'Etat lésé.
Cette démarche devrait donc constituer la base
légale qui autorise les Etats intéressés à mettre
en jeu la responsabilité de l'Etat fautif en vertu du droit
international général et à déclencher les actions
appropriées à l'encontre de celui-ci. Dans cet ordre
d'idée, cette procédure constitue une particularité dans
le cadre de la Cour251(*). Cela apparaît logique dans la mesure
où c'est à la Cour que les divers modes de la coopération
des Etats sont destinés, et donc l'idée que seule celle-ci soit
habilitée à reconnaître un manquement se justifie
amplement252(*).
La question se pose cependant de savoir si la Cour a recours
à ce pouvoir dans toutes les situations qui viendront à se
présenter. La formulation de l'article 87(7) semble sans
équivoque. Selon cet article, « Si un État Partie
n'accède pas à une demande de coopération de la Cour
contrairement à ce que prévoit le présent Statut, et
l'empêche ainsi d'exercer les fonctions et les pouvoirs que lui
confère le présent Statut, la Cour peut en prendre acte et en
référer à l'Assemblée des États Parties ou
au Conseil de sécurité lorsque c'est celui-ci qui l'a
saisie ». L'on est alors dans une hypothèse où il
existe des degrés dans les manquements à l'obligation de
coopérer. La Cour ne prendra acte et n'en réfèrera que
dans les cas de violation caractérisée, par exemple grave au sens
de l'article 40 du projet d'articles253(*). En effet, dans la mesure où c'est pour elle
une faculté que d'agir de la sorte, il sera nécessairement fait
une distinction entre les violations : celles qui nécessitent de
telles mesures et celles qui n'en valent pas la peine. Par voie de
conséquence, il s'agira de savoir sur quels critères se fondera
la Cour pour opérer une telle distinction. La première partie de
l'article 87(7) ne fournit pas de réponse à cette
préoccupation, alors il semble que la Cour appréciera
discrétionnairement. L'on peut cependant avancer que le comportement de
l'Etat notamment dans la recherche de solutions et l'importance de sa
coopération pour la suite de la procédure devraient être
pertinents.
En plus des réactions individuelles des Etats, peuvent
également intervenir des sanctions qui émanent cette fois
d'organes étatiques, des sanctions collectives.
Section 2 : Des
sanctions collectives possibles
Les sanctions de la responsabilité
internationale des Etats revêtent généralement deux formes.
Les sanctions unilatérales des Etats qui se traduisent par le recours
à des contre-mesures254(*) et les sanctions collectives qui interviennent dans
le cadre des organisations internationales. Ces dernières peuvent se
présenter sous la forme de mesures édictées par l'organe
compétent de l'organisation255(*) ou d'actions entreprises par les Etats sur la base
d'une habilitation de l'organisation256(*).
Dans le cadre de la responsabilité pour non
coopération avec la CPI, il faut distinguer deux situations. Selon que
la Cour a été saisie par un Etat ou par le Conseil de
sécurité. Dans ces deux hypothèses en effet, la
réaction de la Cour entraîne deux mécanismes
différents de sanction (paragraphe 1), dont l'un fait intervenir le
Conseil de sécurité (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les mesures
prises par la Cour
La Cour dispose-t-elle du pouvoir de sanction contre un Etat
lorsque celui-ci engage sa responsabilité internationale en cas de non
coopération ? Vraisemblablement non, en tout cas selon le Statut
(A). A quel organe aura-t-elle alors recours pour faire sanctionner un Etat en
cas de besoin (B) ?
A- Pas de sanctions
prévues dans le Statut
Tout au long du Statut, il n'est aucunement fait mention de
quelque sanction que ce soit à l'encontre d'un Etat pour manquement
à son obligation de coopérer. La Cour n'a donc nulle part
reçu la compétence de prendre des sanctions dans une telle
situation.
Tout d'abord la responsabilité pénale des Etats
n'est pas admise. En tout cas l'évolution actuelle du droit et de la
pratique internationaux ne permet pas d'affirmer l'existence d'une telle
responsabilité à l'égard des Etats.257(*) Cette situation pourrait
justifier le fait que le manque de coopération des Etats ne met pas
à leur charge une responsabilité de nature pénale, au
point de les mettre en accusation devant la Cour.
D'autres formes de pénalités auraient pu
être définies dans le Statut à l'encontre des Etats, mais
c'est sans compter avec le fait que le Statut a été établi
par ces derniers. Il était donc peu probable, voire même
impossible, que les Etats donnent à une juridiction internationale
pénale, donc à des juges internationaux, des individus
dotés de la plus grande indépendance et impartialité qui
soit, le pouvoir de sanctionner leur violation, ne serait-ce que par des
sanctions disciplinaires.
En outre, le Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie a
reconnu dans l'arrêt Blaskic que :
« Premièrement, le Tribunal international n'est pas investi du
pouvoir de prendre des mesures coercitives contre les États. Si les
rédacteurs du Statut avaient eu l'intention de lui conférer un
tel pouvoir, ils l'auraient expressément prévu. Ce pouvoir ne
peut être considéré comme inhérent aux fonctions
d'une instance judiciaire internationale. Aux termes du droit international
actuellement en vigueur, les États peuvent seulement être l'objet
de contre-mesures prises par d'autres États ou de sanctions
adoptées par la communauté internationale organisée,
à savoir les Nations Unies ou d'autres organisations
intergouvernementales.
Deuxièmement, la Chambre de première
instance et le Procureur ont tous deux souligné que, s'agissant des
États, la "peine" accompagnant une injonction ne serait pas de nature
pénale. Aux termes du droit international en vigueur, il est
évident que les États, par définition, ne peuvent faire
l'objet de sanctions pénales semblables à celles prévues
dans les systèmes pénaux internes »258(*).
Ces arguments du tribunal emmènent à penser que,
en l'absence de dispositions expresses dans le Statut, la CPI qui est aussi une
instance judiciaire internationale ne dispose pas d'un pouvoir de
sanction contre les Etats parties259(*).
Un tel pouvoir de sanction à l'encontre des Etats est
généralement reconnu à des instances composées
d'Etats. C'est dire que seuls les Etats sont habilités à
sanctionner les Etats, car ils sont dotés de pouvoirs concurrents en
vertu de leur égalité souveraine.
Ainsi, en cas de non coopération d'un Etat, la Cour ne
peut que constater cela, c'est à dire « prendre
acte et en référer »260(*) aux organes
compétents, que sont l'Assemblée des Etats parties ou le Conseil
de sécurité selon les cas.
B- Le
référé à l'Assemblée des Etats
Parties
L'Assemblée des Etats Parties (ASP) qui est le
principal administrateur et le corps législatif de la Cour pénale
internationale261(*) est
régie par un règlement intérieur262(*). Cet organe, composé
comme son nom l'indique des Etats ayant ratifié le Statut, a en charge
de mettre à la disposition de la Cour les moyens financiers et
législatifs nécessaires à l'accomplissement de sa mission.
Il a également l'attribution de modifier les dispositions du Statut dans
les conditions prévues à l'article 123263(*).
La Cour se voit obligée de recourir aux Etats parties
en cas d'obstacles dans la mise en oeuvre de la coopération avec les
Etats. L'article 87(7) confère cette possibilité à la
Cour, cependant que l'article 112(2.f) précise que le pouvoir de prendre
des mesures à l'encontre des Etats est du ressort de l'ASP. C'est du
moins elle qui « examine toute question relative à la non
coopération des Etats ».
L'ASP peut être saisie d'une question de non
coopération d'un Etat lorsque c'est un Etat qui a saisi la Cour de
l'affaire en cause. Cette possibilité ne fait aucun doute lorsque c'est
un Etat partie qui est concerné (art. 87(7)), mais il convient de
préciser que les Etats tiers sont également soumis à la
même procédure lorsqu'ils signent avec la Cour un accord de
coopération264(*), et qu'ils se rendent coupables du non respect des
obligations qui en découlent.
La question que suscite ce recours à l'ASP est bien
sûr celle de la nature des mesures que pourrait prendre cet organe et le
cas échéant leur efficacité. Aucune précision n'est
apportée à cette interrogation. Ni le Statut, ni le
règlement de l'ASP, encore moins le règlement de procédure
et de preuves ne prévoient expressément des sanctions. Les seules
sanctions prévues dans le cadre de l'ASP sont la suspension du droit de
vote à l'occasion des différentes sessions, mais cela est
prévu pour les cas de retard dans le paiement des contributions
financières265(*). Quand on sait qu'en matière de sanction la
précision est de rigueur, on peut bien se demander s'il y aura
effectivement des sanctions émanant de l'ASP266(*). En tout état de
cause si ces mesures devaient être appliquées aussi aux cas de non
coopération, ce ne sont certainement pas les plus dissuasives.
De plus, la probabilité qu'une telle décision
soit prise reste assez minime, dans la mesure où chaque membre dispose
d'une voix267(*), en
outre la périodicité des sessions (une fois l'an)268(*) laisse penser que beaucoup
de temps pourrait s'écouler avant une réaction
véritablement énergique de la Cour.
En l'absence de dispositions spécifiques dans les
textes qui régissent la Cour, il peut donc être fait recours aux
normes du droit international général en matière de
sanction en réaction d'un acte internationalement illicite269(*). On pourrait concevoir que
les Etats prennent individuellement des mesures contre l'Etat fautif,
dès lors que la Cour constate l'existence d'une situation de non
coopération.
C'est en conséquence un retour à la situation
où les Etats parties réagissent en qualité d'Etat
lésé ou autres, telle qu'évoquée plus haut. Les
Etats parties pourront alors entreprendre des actions270(*) en vue de contraindre l'Etat
responsable au respect de ses obligations271(*).
Tous ces éléments laissent croire que le risque
pour un Etat d'être sanctionné par l'ASP pour non
coopération avec la Cour est très infime. Par conséquent,
les cas de non respect par les Etats parties de l'obligation de coopérer
peuvent survenir sans trop de crainte d'être véritablement
sanctionnés.
Quid alors de la possibilité pour la Cour de recourir
au Conseil de sécurité ?
Paragraphe 2 :
L'intervention du conseil de Sécurité des Nations Unies
Il convient de savoir à quel titre intervient le
Conseil de sécurité et quels types de mesures il pourrait mettre
en oeuvre en réaction à la violation de l'obligation de
coopérer.
A- La Cour et le
Conseil de sécurité : quel lien ?
Contrairement aux tribunaux pénaux ad hoc
pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, la CPI n'est pas un organe
créé par le Conseil de sécurité. Il n'existe donc
aucun lien quelconque de subordination de la première au second. En
outre, ces deux organes ont des finalités différentes. La CPI,
organe judiciaire a pour ambition de lutter contre l'impunité par la
poursuite des auteurs de crimes internationaux, tandis que le Conseil de
sécurité organe politique se voit confier le maintien de la paix
et de la sécurité internationales.
Cependant, la compétence rationae
materiae272(*) de
la Cour couvre des crimes qui surviennent, dans l'immense majorité des
cas, dans des situations de conflits armés. En outre, ces crimes sont
généralement commis dans des cas de menace ou de rupture de la
paix et de la sécurité internationales, domaine de
prédilection du Conseil de sécurité. La Cour devra donc
s'intéresser à des situations qui relèvent principalement
du Conseil de sécurité. Il va sans dire que, de ce point de vu,
les deux institutions vont oeuvrer sur les mêmes terrains. Les objectifs
de justice de l'une et de paix et sécurité de l'autre seront donc
amenés à se concilier pour un meilleur résultat. N'est-il
pas vrai que la paix passe par la justice ? Il est donc tout à fait
normal que les Etats aient voulu accorder au Conseil de sécurité
un rôle dans l'activité de la Cour, sans pour autant lui
conférer une main mise sur celle-ci.
De plus, il n'est pas inutile de souligner que les Etats dans
leur ensemble sont membres de l'ONU, qui elle-même est liée
à la Cour par un accord de coopération en vue de mieux collaborer
et coordonner leurs actions respectives 273(*). Il apparaît donc que les Etats membres de
l'ONU ont en cette qualité une obligation de coopérer avec la
Cour même s'ils ne sont pas parties à la Convention de Rome de
1998. Cette idée se justifie au regard des dispositions de la Charte des
Nations Unies. En effet, selon la Charte « les membres de
l'Organisation donnent à celle-ci pleine assistance dans toute action
entreprise par elle (...) »274(*). En l'absence de dispositions spécifiques
dans l'accord de coopération, il n'est pas contradictoire de dire que la
collaboration avec la CPI, peut s'inscrire aussi dans les actions de
l'Organisation au titre de ses innombrables missions.
Cette obligation de coopérer avec la Cour pour les
membres de l'ONU ne devrait toutefois être reconnue qu'en cas de
résolution expresse des organes de décision des NU dans ce sens,
précisément du Conseil de sécurité. Ce pourrait
être le cas lorsque la saisine émane de ce dernier agissant sur la
base du chapitre VII de la Charte. Ceci s'explique par le fait que l'accord ne
lie pas les Etats pris individuellement, mais l'ONU avec une
personnalité distincte de celle de ses membres.
B- Une plus grande
probabilité de sanctions effectives
La probabilité pour l'ASP de sanctionner les Etats qui
ne coopèrent pas étant minime, il est
important que le Conseil de sécurité puisse se montrer plus
rigoureux. D'emblée, les Etats membres des Nations Unies ont une
obligation en vertu de l'article 25 de la Charte de l'ONU d' «
accepter et d'appliquer les décisions du Conseil de
sécurité (...) ».
De plus, la décision par le Conseil de saisir la Cour
est prise en vertu du chapitre VII, ce qui lui donne encore plus
d'autorité à l'égard des Etats275(*).
De surcroît, les cas de recours au Conseil de
sécurité sont limités aux situations qui ont
été déférées par lui.276(*) Le Statut veille en effet
à limiter les interventions du Conseil aux cas qui entre dans sa
compétence en matière de sanction.277(*) Il n'intervient donc pour
une éventuelle sanction que lorsqu'il est à l'origine de la
saisine de la Cour.
Faire intervenir le Conseil de sécurité peut
être une hypothèse qui présente plus de contraintes pour
les Etats. Depuis la fin de la guerre froide, cet organe est devenu plus
efficace dans son action et a acquis plus de dynamisme dans ses actions de
maintien de la paix. En témoignent les nombreuses décisions et
interventions dans les multiples conflits qui sont nés ou perdurent
encore.278(*)
Il apparaît en effet que les décisions du Conseil
de sécurité, notamment les sanctions à l'encontre d'Etats
violant les règles internationales ont été dans leurs
majorités effectives, et ont été entourées d'une
autorité indéniable, même si leur efficacité n'a pas
toujours été avérée. De la première crise du
Golf aux conflits en Afrique, en passant par la création des tribunaux
ad hoc, les Etats ont reconnu dans les décisions du conseil de
sécurité des obligations dont il fallait veiller au
respect279(*).
Certes, le caractère éminemment politique et le
mode de fonctionnement interne de cet organe jettent un léger
discrédit sur ces actions280(*). Cette réalité n'enlève rien au
fait que le Conseil reste encore le seul organe disposant de moyens de sanction
effectifs contre les pays de la communauté internationale.
Au regard de la situation actuelle des enquêtes de la
Cour où seulement une affaire sur les cinq est à l'initiative du
Conseil, les cas où il pourra intervenir sont très peu nombreux.
En conséquence, les situations de non coopération d'Etats qui
viendront à être éventuellement sanctionnées
risquent fort d'être limitées.
C- La nature des
mesures du Conseil de sécurité 281(*)
En tant qu'organe indépendant, le Conseil a une
discrétion totale dans le choix des mesures à prendre lorsqu'il
est interpellé par la Cour. En outre, il n'apparaît nulle part que
la Cour peut suggérer au Conseil les mesures à
envisager282(*). Le
Conseil devrait avoir recours aux moyens traditionnels dont il dispose dans sa
mission de maintien de la paix et de la sécurité internationale
en vertu du chapitre VII de la Charte283(*). Le but étant bien sûr d'amener l'Etat
en cause à obtempérer et à permettre par sa collaboration
le bon déroulement du travail de la Cour là où son
concours est nécessaire.
Le chapitre VII de la Charte confère au Conseil de
sécurité un pouvoir de décision très étendu
quant aux mesures qui peuvent être prises284(*). En effet, il peut sur cette
base juridique prendre aussi bien des mesures « n'impliquant pas
l'emploi de la force armée»285(*) que celles qui peuvent faire intervenir l'usage
de la force286(*). C'est
ainsi que dans le cadre des premières, le Conseil a mis en place les
tribunaux ad hoc pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda287(*), institué un embargo
contre l'Irak ou encore la mise en place du programme pétrole contre
nourriture toujours à l'encontre du même pays288(*). Concernant les secondes
mesures, l'on peut citer l'envoi de contingents de casques bleus comme force
d'interposition sur les territoires en conflit ou encore l'autorisation
donnée aux Etats par le Conseil d' « user de tous les
moyens nécessaires pour faire respecter et appliquer la
résolution (...) »289(*). Dans cette dernière, il apparaît que
le Conseil peut lui-même prendre des mesures ou laisser le soin aux Etats
de les engager sous son contrôle.
Une approche comparative montre cependant, avec
l'expérience des tribunaux ad hoc, que dans la pratique le
Conseil de sécurité est très réticent lorsqu'il est
question de prendre des sanctions pour contraindre les Etats qui ne le font pas
à coopérer. En effet, le Conseil s'est maintes fois abstenu de
prendre des sanctions quand il en avait l'occasion et quand il était en
droit de le faire. Ainsi, par exemple dans une résolution 1019 (1995) il
s'est contenté de condamner verbalement les autorités
serbo-bosniaques qui avaient été mises en cause par le
TPIY pour leur manque de coopération290(*). En outre, lorsque le gouvernement Yougoslave a en
1998 expressément interdit l'entrée du procureur du TPIY sur son
territoire, commettant ainsi une violation de son obligation de coopérer
avec le tribunal, le Conseil qui a été interpellé n'a pris
aucune sanction digne de ce nom comme il fallait s'y attendre. Dans la
résolution prise à cette occasion 291(*), le Conseil de
sécurité n'a fait que réaffirmer l'obligation de
coopération à la charge de tous les Etats et de la Yougoslavie en
particulier tout en condamnant cette dernière. Mais une fois de plus,
aucune sanction ne s'en est suivie.
Ceci traduit malheureusement les limites de ce pouvoir de
sanction du Conseil de sécurité. Pour des raisons
d'opportunité, le Conseil peut souvent donc préférer ne
pas prendre de mesures contraignantes, spécialement pour réprimer
le manque de coopération. Il apparaît en certaines circonstances
que le maintien de la paix et la justice pénale ne puisse être mis
en oeuvre, en tous cas au même moment, et que le premier vienne à
prendre le pas sur la seconde, quelques fois pour mieux permettre cette
dernière. Sanctionner un Etat avec lequel sont engagées des
négociations de paix lorsqu'il est impliqué dans un conflit n'est
vraissemblablement pas une mesure opportune pour le Conseil de
sécurité.
Il n'en demeure pas moins que le Conseil reste le plus apte
à édicter des sanctions susceptibles d'effectivité et
aussi d'efficacité pour obliger les Etats à coopérer.
CONCLUSION GENERALE :
La nécessité d'une plus grande implication et d'une plus grande
disponibilité des Etats
A la fin de cette étude
consacrée au rôle et à la place des Etats dans le
fonctionnement de la Cour Pénale Internationale, il apparaît
qu'au-delà du droit pénal international stricto sensu,
ce sujet touche et pose des problèmes qui intéressent aussi le
droit international général.
Les Etats, acteurs principaux du développement du droit
international - pénal - se sont bien gardés de s'exposer lors de
la rédaction du Statut de la CPI, en veillant à ce qu'elle ne
soit pas dotée de pouvoirs trop autonomes. Des gardes fous ont en effet
été prévus afin de rappeler aux organes de la Cour
notamment au procureur qu'ils (les Etats) sont encore les souverains,
« les faiseurs » du droit international.
Trois remarques peuvent être faites au terme de cette
analyse. Tout d'abord, on peut constater que le droit international
pénal est en constante évolution et les progrès qu'il a
enregistrés sont très sensibles292(*). Il ne faut pas manquer de saluer le remarquable
effort des Etats dans cette avancée. Bien que cette situation semble
assez paradoxale293(*),
ces derniers ont le grand rôle dans cette aventure. C'est encore à
eux de poursuivre la quête de la justice294(*) et de prémunir
l'humanité de fléaux criminels qui n'ont que trop perduré.
Les Etats ont un rôle déterminant et une place
primordiale dans le fonctionnement de la Cour. En créant la CPI et en
lui permettant d'entrer en vigueur, ils ont montré leur volonté
dans cette dynamique. Ils devraient maintenant être à ses
cotés dans la mise en oeuvre de ses dispositions, la conduite des
enquêtes, bref dans la répression internationale des violations
graves des droits de l'Homme et du droit humanitaire. Il leur faut encore
prouver leur attachement à la voir aller jusqu'au bout des objectifs qui
lui ont été reconnus. En effet, comme il a été
souligné tout au long de cette étude, la volonté des Etats
et leur capacité à ouvrir « le voile
corporatif 295(*)», seront déterminantes dans le
fonctionnement efficace de la Cour. Cela est d'autant plus vrai que la Cour est
très dépendante de leur appui, comme cela a pu être
démontré.
Ce soutien des Etats, conjugué à
l'indépendance institutionnelle de la Cour, devrait pouvoir renforcer
celle-ci dans sa mission.
Ensuite, il semble que la Cour devra briller aussi par le
travail qu'elle va accomplir296(*), notamment par sa qualité et a rigueur.
L'impartialité dont elle est sensée jouir doit lui permettre de
gagner la confiance de ceux des Etats qui lui sont encore hostiles297(*). Le procureur, pierre
angulaire du mécanisme298(*), doit faire preuve de fermeté dans ses
actions. On est cependant en droit de se demander jusqu'où pourra aller
ce dernier dans sa traque des criminels, surtout ceux qui se cachent encore
derrière l'appareil de l'Etat et ses multiples garanties
d'impunité. Il doit en tout cas avancer le plus loin possible, dans le
camp de ces individus qui, il faut l'admettre sont de moins en moins à
l'abri.
Cette volonté de mettre et de maintenir une pression
sensible sur les coupables, quelles que soient leurs fonctions officielles,
devrait constituer un support substantiel pour diminuer les obstacles qui
protègent encore les officiels dans l'Etat.
Dans cette alternative, il est impératif que soient
conjugués les efforts en vue de la réalisation des objectifs
dévolus à la CPI. Ces efforts passent par la disponibilité
et la volonté des Etats et aussi des organisations internationales -
notamment l'ONU dont le rôle peut être aussi déterminant par
le truchement du Conseil de sécurité - à coopérer
avec la Cour, par la capacité des membres de cette organisation à
accomplir leur tâche. Un accent devrait aussi être mis sur
l'harmonisation des normes internationales. Celles-ci peuvent constituer
à certains égards des obstacles de taille à la mise en
oeuvre du droit pénal international.
Enfin, il faut déplorer la faiblesse qui
caractérise encore les mécanismes de sanctions des violations par
les Etats du droit international, et particulièrement celles de
l'obligation de coopérer avec la Cour qui pourraient survenir. Il est
donc souhaitable que, dans ce domaine, le rôle du Conseil de
sécurité soit élargi et renforcé. Un rôle
significatif devrait être accordé aussi aux Etats eux même.
Les pressions diverses entre Etats pourront être parfois
décisives.299(*)
Cette voie semble actuellement plus indiquée pour rendre effective des
sanctions en réponse aux manquements des Etats.
Cependant, ce faible mécanisme de sanction souligne
dans une certaine approche, l'idée que le respect des engagements des
Etats envers la Cour doit être plus le résultat d'une
spontanéité que de la crainte de conséquences.
Les Etats parties aussi bien que les Etats non encore parties
auront un grand intérêt dans la collaboration avec la Cour, en
tout cas jusqu'à ce que l'évolution du droit permette d'arriver
à un meilleur engagement des tribunaux nationaux. Souhaitons que
l'évolution positive du droit pénal international qui est en
cours, permette réellement une pratique où les juges nationaux
connaîtront eux-mêmes des situations de crimes internationaux
constatées sur leur territoire et poursuivront efficacement et
sérieusement les coupables quels qu'ils soient.
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International, Paris, CNRS Editions, 2001, pp. 3-44.
- SUR S., « Vers une Cour pénale
internationale : La convention de Rome entre les ONG et le Conseil de
Sécurité », in Revue générale de
droit international public, Paris, Pedone, 1999, pp. 29-45.
- SWART B. et SLUITER G., « The International
Criminal Court and international criminal cooperation », in VON HEBEL H.,
LAMMERS J. et SCHUKKING J., Reflections on the International Criminal
Court, The Hague, TMC Asser Press, 1999, pp. 91-127.
- TAVERNIER P., « L'expérience des Tribunaux
pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le
Rwanda », in Revue internationale de la
Croix-Rouge, n° 828, Genève, CICR, 1997, pp. 647-663.
- TRIFFTERER O., « Implications of ratification and
implementation processes », in KREB C. et LATTANZI F., The Rome
Statute and Domestic Legal Orders, Baden Baden, Nomos Verlagsgesellschaft,
2000, pp. 1-28.
- UBEDA M., « Obligation de
coopérer », in ASCENCIO H., DECAUX E. et PELLET A. (dir.),
Droit international pénal, Paris, Pedone, 2000, pp. 951-967.
- WIEVIORKA A., « Les procès de Nuremberg et
d'Eichmann, en perspective », in DESTEXHE A. et FORET M., De
Nuremberg à la Haye et Arusha, Bruxelles, Bruylant, 1997, pp.
23-37.
III- Textes internationaux.
- Charte des Nations Unies de 1945, (
http://www.un.org/french/aboutun/charte/index.html).
- Convention de Rome, portant Statut de la Cour pénale
internationale. (Doc. NU. A/CONF/183/9),
(
http://www.icc-cpi.int/library/about/officialjournal/Statut_du_rome_120704-FR.pdf
).
- Convention pour la répression du crime de
génocide du 9 décembre 1948 (Résolution 260 A (III). (
http://daccessdds.un.org/doc/RESOLUTION/GEN/NR0/044/31/IMG/NR004431.pdf?OpenElement
)
- Règlement de procédure et de preuve devant la
CPI (ICC-ASP/1/3). (
www.icc-cpi.int).
- Règlement intérieur de l'Assemblée des
Etats Parties à la CPI, (
http://www.icc-cpi.int/library/asp/ICC-ASP-Rules_of_Procedure_French.pdf)
- Résolution 808 du conseil de sécurité
du 25 mai 1993 portant statut du tribunal international pénal pour l'ex
Yougoslavie, S/RES/827 (1993).
- Résolution 955 du conseil de sécurité
du 08 novembre 1994 portant statut du tribunal international pénal pour
le Rwanda S/RES/955 (1994).
- Projet d'articles de la Commission de Droit International sur
la responsabilité internationale des Etats, 2001 (
A/RES/56/83),
(
http://www.un.org/Depts/dhl/dhlf/resdeclf/res56f.htm).
IV- Principales décisions de jurisprudence
internationale.
- Affaire du détroit de Corfou, Albanie vs Gde
Bretagne, CIJ, Rec. 1949, p.4.
- Affaire Nicaragua, USA vs Nicaragua, CIJ, Rec.
1986, pp. 14-150 ;
- Affaire du personnel diplomatique des Etats-Unis à
Téhéran, CIJ Rec. 1980, pp. 4-46.
- Affaire Mavrommatis, Grèce c. Gde Bretagne,
arrêt du 30 Août 1924. CPJI, Série A,
n°2, pp. 6-37.
- Affaires Tadic, Jugement de la Chambre d'appel du TPIY du 2
Octobre 1995, (
www.un.org/icty).
- Affaire Kanyabashi, arrêt du TPIR du 18 juin 1997.
- Affaire Blaskic, (
www.un.org/icty).
- Affaire du mandat d'arrêt, arrêt de la CIJ du 14
février 2002, (
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgment/ccobe_cjudgment_20020214.PDF
).
Table des
matières
INTRODUCTION
1
CHAPITRE 1 :
LA COUR PENALE INTERNATIONALE (CPI),
PREMIERE JURIDICTION INTERNATIONALE PENALE
PERMANENTE.
6
SECTION 1 : LES ORIGINES DE LA
COUR
6
Paragraphe 1 :
L'évolution vers la CPI
6
A - Aspects
historiques.
7
B - Evolution
contemporaine.
9
Paragraphe 2 : La CPI,
produit d'un compromis international entre
les Etats. 10
SECTION 2 : LE RÔLE DE LA COUR
DANS LE SYSTÈME INTERNATIONAL
12
Paragraphe 1 : La CPI,
un instrument juridique indispensable pour
12
achever l'oeuvre de justice mondiale
12
Paragraphe 2 : Le domaine
de compétence de la Cour
14
A - La compétence
rationae temporis et rationae loci.
14
B - La
compétence rationae personae et rationae materiae
15
Paragraphe 3 : La Cour
face à la souveraineté des Etats
16
A- La notion de
souveraineté
16
B- Les implications
du principe de souveraineté dans le Statut de Rome
17
1- Le principe de la
complémentarité de la Cour par rapport aux juridictions
nationales.
18
2 - Les limites à
la souveraineté des Etats.
20
CHAPITRE 2 :
L'INTERVENTION DES ETATS DANS
LE
FONCTIONNEMENT DE LA COUR
23
SECTION 1 : LA COUR ET LES
ETATS : UNE COOPÉRATION NÉCESSAIRE
23
Paragraphe 1 :
L' « obligation générale de
coopérer ».
24
A- La notion de
coopération
24
B- La nature et
l'étendue de l'obligation de coopérer pour les Etats parties
25
Paragraphe 2 : Les
relations entre la Cour et les Etats non parties
26
au Statut de Rome
26
A- Les sources de
l'obligation de coopérer avec la Cour pour les Etats non
parties.......................................................................................
26
1- Le droit
international humanitaire coutumier comme source d'obligation de
coopérer pour les Etats non parties au Statut?
27
2- L'obligation de
coopérer pour les Etats non parties sur la base du Statut
29
B- Les Etats parties et
les Etats non parties
30
SECTION 2 : UNE PARTICIPATION
MULTIFORME POUR LES ETATS DANS LE FONCTIONNEMENT DE LA
COUR.
31
Paragraphe 1 : Les
obligations particulières aux Etats parties.
32
A- La participation
financière des Etats parties.
32
B- L'adaptation par les
Etats de leurs législations nationales
33
Paragraphe 2 : La
participation des Etats à la procédure devant la Cour
36
A- La faculté de
déférer une situation devant la Cour
36
B- La
possibilité pour un Etat de suspendre ou d'interrompre l'action de
la
Cour ?.....................................................................................................................
38
1- Une
faculté non reconnue par le Statut
38
2-
Les moyens possibles pour un Etat de faire suspendre ou interrompre
l'enquête du procureur.
40
Paragraphe 3 :
L'assistance judiciaire et policière et l'exécution des
sentences.........................................................................
42
A- Les organes
judiciaires et policiers nationaux au service de la Cour
42
1- L'étape du
recueil des preuves et indices par le procureur de la Cour
42
2- L'arrestation, la
détention et la remise de suspect à la Cour
44
B- L'exécution
des sentences
46
CHAPITRE 3 :
LES CONSEQUENCES DE LA NON COOPERATION
48
SECTION 1 : LES CONSÉQUENCES AU
REGARD DU DROIT INTERNATIONAL GÉNÉRAL :
LA
RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE DE L'ETAT
49
Paragraphe 1 : La
responsabilité internationale de l'Etat pour non coopération
avec la Cour au regard des règles de droit international
général sur la responsabilité.
49
A- Les conditions de
mise en oeuvre
49
1- La condition
subjective : l'imputabilité de l'acte à l'Etat.
50
2- La violation d'une
obligation internationale : la condition objective.
51
a- Les caractères
de la violation
51
b- L'absence de
circonstances excluant l'illicéité
52
3- L'existence d'un
dommage ?
54
B- Les
conséquences de la mise en jeu de la responsabilité
internationale de
l'Etat..........................................................................................
55
1- La
réparation du préjudice par l'Etat fautif
56
2- Les
réactions possibles des autres Etats à un fait internationalement
illicite
58
a- La
détermination des Etats pouvant invoquer la responsabilité
internationale
58
b- Les actions
possibles de l'Etat lésé et des Etats autres que l'Etat
lésé contre l'Etat responsable
59
Paragraphe 2 : La mise
en oeuvre de la responsabilité internationale dans le
61
cadre de la Cour Pénale Internationale
61
A- Les arguments de
la non coopération
62
1- Les obstacles
juridiques à la coopération des Etats avec les juridictions
pénales internationales
62
a- Les immunités
internationales
62
b- Les
Incompatibilités avec d'autres obligations internationales
65
2- Les raisons
d'ordre politique
67
a- La situation du
Soudan et de la Sierra Léone
67
b- L'attitude des
Etats-Unis face à la Cour.
70
B- Les implications
de la responsabilité internationale de l'Etat pour le non respect des
engagements envers la CPI
71
1- L'absence de
règles spécifiques sur la mise en oeuvre de la
responsabilité des Etats dans les textes régissant la
Cour
71
2 - Le recours au droit
international général en matière de
responsabilité
72
SECTION 2 : DES SANCTIONS COLLECTIVES
POSSIBLES
74
Paragraphe 1 : Les
mesures prises par la Cour
75
A- Pas de sanctions
prévues dans le Statut
75
B- Le
référé à l'Assemblée des Etats Parties
77
Paragraphe 2 :
L'intervention du conseil de Sécurité des Nations Unies
78
A- La Cour et le
Conseil de sécurité : quel lien ?
79
B- Une plus grande
probabilité de sanctions effectives
80
C- La nature des mesures du
Conseil de sécurité.
81
CONCLUSION GENERALE :
la necessite d'une plus grande implication et d'une plus grande
disponibilite des etats.
84
BIBLIOGRAPHIE
87
TABLE DES MATIÈRES
96
* 1 Le Statut de Rome
instituant la Cour Pénale Internationale (Doc. NU.A/CONF.183/9) a
été adopté le 17 Juillet 1998 à Rome et est
entré en vigueur le 1er juillet 2002.
* 2 Cela en vertu de
l'article 126 du Statut, après le dépôt de leurs
instruments de ratification par un groupe de dix Etats.
Au 14 novembre 2005, le nombre de pays qui ont ratifié le
Statut de Rome était de 100. Parmi eux, 27 sont des
États d'Afrique,
25 sont des
États d'Europe
occidentale et autres États, 15 sont des
États d'Europe
orientale, 21 sont des
États
d'Amérique latine et des Caraïbes et 12 sont des
États d'Asie.
La Suisse (Europe) et le Burkina Faso (Afrique de l'ouest) sont membres de la
CPI respectivement depuis le 12 octobre 2001 et le 16 avril 2004. cf.
www.icc-cpi.int, (visité le
20 février 2006).
* 3 Le 21 avril 2003 l'avocat
argentin Luis Moreno-Ocampo a été élu procureur de la Cour
à l'unanimité par l'Assemblée des Etats parties.
* 4 L'Ouganda a saisi la Cour
en 2003, la RDC en 2004, et plus récemment en Janvier 2005, la
République centrafricaine. De plus la Côte d'Ivoire a
accepté la compétence de la Cour pour les crimes commis sur son
territoire depuis les troubles du 19 septembre 2002. Cf. le site de la
CPI :
www.icc-cpi.int (Visité le
30 décembre 2005). Enfin il faut aussi mentionner la situation au
Darfour(Soudan) qui est a été portée devant la Cour par le
Conseil de sécurité.
* 5 Cf. CONDORELLI L.,
« La Cour pénale internationale : un pas de géant
(pourvu qu'il soit accompli) », in Revue Générale
de Droit International Public, Paris, Pedone, 1999, vol.108, p. 7.
* 6 Il ya eu en effet un
certain scepticisme voire même pessimisme avant l'entrée en
vigueur du Statut. M. Condorelli affirmait : « Il n'est pas
insensé de se demander si l'on arrivera vraiment à réunir
les 60 instruments de ratification...voire combien de lustres faudra t-il
attendre. ». Cf. CONDORELLI L., « La Cour pénale
internationale : un pas de géant (pourvu qu'il soit
accompli) », précité note 5, p. 8.
Quelque optimisme s'est aussi manifesté. Ainsi BOURDON
W., alors secrétaire général de la FIDH,
affirmait déjà en 1998 : « La
convention...n'entrera en vigueur qu'après le dépôt du
60ème instrument de ratification, vraisemblablement dans
trois ou quatre ans. », in La Cour pénale
internationale : La route ne s'arrête pas à Rome,
rapport de position n°3 : analyse du statut de la CPI, Hors
série de la lettre bimensuelle de la FIDH, Novembre 1998, n°266. Il
semble donc que les faits ont donné raison au second auteur.
* 7 Amnesty International
dénonçait déjà les velléités
d'abandon de procédure devant la CPI dans les propos du chef de l'Etat
ougandais. V. le communiqué de presse du 16 novembre 2004,
« OUGANDA Le gouvernement ne peut empêcher la Cour
pénale internationale d'enquêter » AFR/59/008/2004, sur
le site
http://web.amnesty.org/library/fra-uga/index
(Visité le 30 décembre 2005).
* 8 Nombre d'inculpés
devant des tribunaux pénaux internationaux ou mixtes tels que, Radovan
Karadzic et Charles Taylor, pour ne citer que ceux là, sont encore
libres et vraisemblablement protégés par des Etats.
En juillet 2004 la procureur du TPIY, Carla Del Ponte
exprimait ses inquiétudes et ses regrets, dans un entretien
accordé au Centre de nouvelles ONU en affirmant : « Le
TPIY déplore l'absence de coopération de la
Serbie et Monténégro dans l'arrestation de Goran
Hadzic ». V. sur le site :
http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=8482&Cr=TPIY&Cr1
(Visité le 30 décembre 2005).
* 9 Contrairement aux autres
juridictions (TPIY, TPIR) et tribunaux spéciaux (TSSL), qui ont
été créées par des résolutions du conseil de
sécurité ou des accords entre l'Onu et les pays
concernés.
* 10 Article 86 du
Statut.
* 11 Selon HENZELIN M., les
dispositions sur la compétence de la Cour sont le fruit d'
« un compromis politique plutôt qu'un aboutissement
juridique ». Cf. HENZELIN M., « La Cour pénale
internationale : organe supranational ou otage des
Etats ? », in Revue Pénale suisse, T. 119, 2001
Bern, Stämpfli Verlag, 2001, p. 222 ; v. aussi les travaux du
colloque de l'Association Droit et Démocratie du 20 octobre 1998, La
Cour Pénale Internationale, Paris, La documentation
française, 1999, p. 15.
* 12 Cette question a
été déterminante pour rendre possible l'adoption du Statut
et a fait l'objet d'importantes négociations lors de la
conférence de Rome. Cf. BOURDON W., La Cour Pénale
Internationale: le Statut de Rome, Paris, Seuil, 2000, pp. 77-81; V. aussi
WILMSHURST E., « Jurisdiction of the Court », in LEE S. R.,
The ICC, the making of the Rome Statute. Issues, negociations,
results, Kluwer Law International, The Hague, London, Boston, 1999,
Chapter three, p. 133.
* 13 Des Etats comme les
Etats-Unis ou la Chine, membres permanents du Conseil de sécurité
de l'ONU, n'ont pas encore ratifié le traité de Rome, et pire
encore envisagent des mesures pour ne pas lui apporter leur soutien. Les
Etats-Unis ont par exemple déjà signé avec plusieurs pays
dont certains Etats parties au Statut de Rome, des accords en vue
d'empêcher tout transfert de citoyens américain vers la Cour. V.
LESNES C., « Les Etats-Unis durcissent leur campagne contre la Cour
Pénale Internationale », in Le Monde, 2 juillet 2003.
V. aussi une étude de l'ONG Human Right Watch sur la campagne
américaine contre la Cour, sur le site
http://www.hrw.org/campaigns/icc/docs/bilateralagreements-fr.pdf
(Visité le 30 décembre 2005).
* 14 Robert Badinter
affirmait déjà en 2000, qu' «à
étudier la pratique des Etats, il apparaît que l'un des principaux
obstacles pour que justice soit rendue contre les responsables des crimes
contre l'humanité [et autres] est le principe de la
souveraineté nationale ». V. la préface de BOURDON
W., La Cour Pénale Internationale : le Statut de Rome,
précité note 12, p. 7.
* 15 Cf. l'article 12 du
Statut et les commentaires sur cette question, notamment, FRULLI M.,
« Jurisdiction rationae personae », in CASSESE A., GAETA P.
et JONES J., International Criminal Law, A Commentary of the Rome Statute
for an International Criminal Court (vol. I), Oxford, Oxford University
Press, 2001, p. 535; BOURGON S., «Jurisdiction rationae
temporis », ibid., p. 552 ; «Jurisdiction rationae
loci », ibid., p. 562.
* 16 Cette acceptation a
été faite par la Côte d'Ivoire en vertu de l'article 12-3
du Statut. Cf. pour la déclaration de la Cote d'Ivoire,
www.icc-cpi.int.
* 17 Cf. BOURDON W., La
Cour pénale internationale : La route ne s'arrête pas
à Rome, précité note 6.
* 18 V. les
développements ultérieurs sur les conséquences de la non
coopération des Etats (cf. chapitre 3).
* 19 La Cour n'est en effet
compétente que pour juger les personnes physiques. Cf. les articles 1 et
25 du Statut de Rome.
* 20 Intitulé de
l'article 86 du Statut.
* 21 Cf. l'article 112 du
Statut relatif à l'Assemblée des Etats Parties qui prévoit
parmi les compétences de celles-ci l'examen des situations de «non
coopération des Etats».
* 22 Ce furent les
tribunaux, de Nuremberg issu de l'accord de Londres du 8 août 1945 et de
Tokyo créé par la Déclaration de 1946 du commandant Mac
Arthur installés par les forces Alliées vainqueurs de la
2è guerre, pour juger les responsables allemands et japonais, des crimes
commis pendant la 2è guerre mondiale.
* 23 Il s'agit des tribunaux
pénaux internationaux créés par deux résolutions du
Conseil de sécurité de l'Onu, pour l'ex-Yougoslavie de 1993
(Résolution 808 du 22 février) et pour le Rwanda de 1994
(résolution 955 du 8 novembre).
* 24 Cf. l'introduction de
BOURDON W., La Cour Pénale Internationale : le Statut de Rome,
précité note 12, pp. 13-24.
* 25 Gustave Moynier
(1826-1910) est un juriste et humaniste suisse, il fut un membre fondateur du
Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en 1863.
* 26 Ce conflit opposa la
France aux Lands d'Allemagne. Débuté en juillet 1870, il a pris
fin avec le traité de Frankfort du 10 mai 1871, sur une défaite
de la France.
27 Il s'agit de la Convention (XII) relative
à l'établissement d'une Cour internationale de prises
signée à La Haye, 18 octobre 1907.
28 Guillaume II fut condamné pour
« offense suprême contre la morale internationale et
l'autorité sacrée des traités », selon les
termes de l'article 227 du traité de Versailles.
29 Les Pays-Bas ont estimé à
l'époque que le crime dont était accusé le Kaiser allemand
était de nature politique et ne pouvait donc pas donner lieu à
l'extradition de ce dernier. V. BASSIOUNI Ch., « Projet de code
pénal international », in Revue internationale de droit
pénal, Toulouse, Erès, 1er et
2è trimestre, 1981, p. 55.
* 27 Après avoir
jugé 22 accusés, le tribunal de Nuremberg prononça 12
condamnations à mort (par pendaison) 3 emprisonnements à vie, 4
peines entre 10 et 20 ans et 3 acquittements.
* 28 Le tribunal de
Nuremberg a été traité de tribunal rendant la justice des
vainqueurs, ne respectant pas de surcroît le principe de
légalité dans la mesure où son statut, contenant les
définitions des crimes qu'il devait juger, est intervenu après la
commission desdits crimes. V. sur la question TAVERNIER P.,
« L'expérience des Tribunaux pénaux internationaux pour
l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda », in Revue internationale de
la Croix-Rouge, n° 828, Genève, CICR, 1997, pp.
647-663 ; PAECH N., « Les apports du procès de Nuremberg
au droit pénal international de l'époque », in Le
procès de Nuremberg, conséquences et actualisation, actes du
colloque international, Université Libre de Bruxelles, 27 mars 1987,
Bruxelles, Bruylant, Université de Bruxelles, 1988, pp. 23-30 ;
WIEVIORKA A., « Les procès de Nuremberg et d'Eichmann, en
perspective », in DESTEXHE A. et FORET M., De Nuremberg à
la Haye et Arusha, Bruxelles, Bruylant, 1997, pp.
23-37.
* 29 Cet article dispose en
effet que : « Les personnes accusées (...) seront
traduites devant les tribunaux compétents de l'Etat sur le territoire
duquel l'acte a été commis, ou devant la cour criminelle
internationale qui sera compétente à l'égard de celles des
parties contractantes qui en auront reconnu la juridiction. »
Cf. la résolution 260 A (III) de l'AGNU, en ligne
http://daccessdds.un.org/doc/RESOLUTION/GEN/NR0/044/31/IMG/NR004431.pdf?OpenElement.
(visité le 30 janvier 2006).
* 30 V. Les travaux du
colloque de l'Association Droit et Démocratie du 20 octobre 1998, La
Cour Pénale Internationale, précité note 11, pp.
6-7 ; V. aussi, BOURDON W., La Cour Pénale Internationale : le
Statut de Rome, précité note 12, pp.14-24 ;
également BASSIOUNI Ch., « Etude historique :
1919-1998 », in Nouvelles études pénales, 13
quater, Toulouse, Erès, 1999, pp. 1-44 ; BROOMHALL B « La
CPI, présentation générale et coopération des
Etats », ibid., pp. 50-54.
* 31 Cf. SOLERA O.,
« Complementary jurisdiction and international criminal
justice », in Revue Internationale de la Croix Rouge,
n° 845, Genève, CICR, 2002, p. 145. Ainsi, dans une
résolution (Res. 44/39) du 4 décembre 1989, l'Assemblée
Générale des Nations Unies demanda à la Commission du
Droit International de bien vouloir « étudier la question
de la création d'une cour de justice pénale internationale
(...) ».
* 32 Par la
résolution (CS) 808 du 22 février 1993.
* 33 Par la
résolution (CS) 955 du 08 novembre 1994.
* 34 Des avis
controversés ont été émis dès la
création du tribunal pour l'ex Yougoslavie, sur la question de la
légalité et même de la légitimité de ces
tribunaux au vu de leur mode de création. Ces tribunaux ont
été considérés comme illégaux, parce qu'ils
ne respecteraient pas le principe selon lequel un tribunal doit être
établi par une loi. En outre, le Conseil de sécurité
aurait outrepassé ses pouvoirs au regard du Chapitre VII (article 41) de
la Charte en créant un organe judiciaire. Ainsi PELLET A. (Cf.
« Le tribunal criminel international pour l'ex Yougoslavie :
Poudre aux yeux ou avancée décisive », in Revue
Générale de Droit international Public, Paris, Pedone, 1994,
pp.16 et ss.) et DAVID E. («Le TPIY » in Revue Belge de
Droit International, 1992-2, Bruxelles, Bruylant, 1992, pp. 567-569),
défendaient l'idée de la légitimité et de la
légalité du TPIY, tandis qu'il y avait une certaine opposition
(ANDRIES A., « Les aléas juridiques de la création du
tribunal international pour les crimes de guerre commis depuis 1991 sur le
territoire de l'ex-Yougoslavie », in Journal des
procès (Bruxelles), n°239, 14 mai 1993, pp. 17 et ss.).
La tenue des deux procès Tadic et Akayesu
respectivement devant le TPIY et le TPIR, de même que les critiques qui
ont été formulées par les avocats de la défense des
accusés et les arrêts qui ont été rendus ont permis
à la jurisprudence de se prononcer dans le sens de la
régularité des deux tribunaux. V. à ce sujet les affaires
Tadic (Jugement de la Chambre d'appel du 2 Octobre 1995-
www.un.org/icty) devant le TPIY et l'affaire Kanyabashi (TPIR-96-15-T,
18 Juin 1997) devant le TPIR ; également l'affaire Milosevic devant
la Cour européenne de droits de l'homme, ECHR, Slobodan Milosevic c/
the Netherlands, décision du 19 mars 2002, req. n° 77631/1l (La
requête de Slobodan Miloeviæ a été
déclarée irrecevable pour non épuisement des voies de
recours internes des Pays-Bas, conformément à l'article 35
para. 1 et 4 de la Convention.)
Ces décisions n'ont cependant pas stoppé les
débats contradictoires sur le sujet. V. STERN B.,
« Légalité et compétence du Tribunal
pénal international pour le Rwanda : l'affaire Kanyabashi »,
sur le site Actualité et Droit International, février 1999 (
http://www.ridi.org/adi
visité le 30 décembre 2005) et les avis opposés,
« Le TPIY, un tribunal hors la loi », in VERGES J.,
Justice pour le peuple serbe, Lausanne, L'âge d'homme, 2003, pp.
87-105 ; et l'avis collectif constatant l'illégalité du
tribunal, de DRAGO R., ZORGBIBE Ch., DECOCQ A. et DANA A-Ch, ibid.,
pp. 107-157.
Aujourd'hui le TPIY est en phase d'arriver au délai
limite de 2008, qui lui a été fixé par le Conseil de
sécurité pour terminer sa mission.
* 35 Cf. note 11.
* 36 Le TPIY et le TPIR ont en
effet été considérés comme ayant
« servi de laboratoire au Statut de la CPI adopté en
1998 ». Cf. DAVID E., Principes de droit des conflits
armés, Bruxelles, Bruylant, 2002, p. 775.
* 37 Il faut
également mentionner la fin de la guerre froide et des tensions Est/
Ouest, qui a permis à l'ONU de travailler plus efficacement. De plus, il
convient de ne pas négliger l'action des ONG telles que la Commission
Internationale de Juristes ou l'Association Internationale de Droit
Pénal, dont les travaux ont été très
bénéfiques aux différents travaux préparatoires. V.
sur cette question l'historique des travaux de l'AIDP pour l'élaboration
d'un projet de code pénal international, BASSIOUNI Ch., Projet de
code pénal international, précité note 29,
(introduction de BOUGAT P.), p.7 ; LEONETTI C., « La
contribution des Organisations non gouvernementales dans la création du
Statut de Rome », in CHIAVARIO M. (dir.), La justice
pénale internationale entre passé et avenir, Paris, Dalloz,
2003, pp. 141- 152. Certains auteurs s'inquiètent par contre de la
place reconnue aux ONG qui serait trop importante parce que celles-ci sont
presqu'au même rang que les Etats devant la Cour. V. les interrogations
de SUR S., « Vers une Cour pénale internationale : La
convention de Rome entre les ONG et le Conseil de
Sécurité », in Revue Générale de
Droit International Public, vol. 103, Paris, Pedone, 1999, pp. 29-45.
* 38 BAZELAIRE J-P. et
CRETIN T., La justice pénale internationale, Paris, P.U.F.,
2000, p. 62.
* 39 Voir également
les développements détaillés sur les négociations
internes de la conférence. BASSIOUNI Ch., « Etudes
historiques : 1919-1998 », in Nouvelles Etudes
Pénales, précité note 33, pp. 32-42.
* 40 Dont deux membres du
Conseil de sécurité : les Etats-Unis et la Chine.
* 41 Ce sont majoritairement
des Etats arabes.
* 42 Les juges ont en effet
été élus au sein de différents groupes d'Etats
formant une région spécifique. Ainsi il ya des juges
représentant les États d'Europe occidentale et autres
États (WEOG), les États d'Amérique latine et des
Caraïbes (GRULAC), les États asiatiques, les États
d'Afrique, les pays d'Europe de l'Est. Cf.
www.icc-cpi.int .
* 43 Il s'agit des affaires
portées par l'Ouganda et la République démocratique du
Congo en 2004. Les dernières qui datent de 2005 sont celles concernant
la Côte d'Ivoire, celles portées par la République
Centrafricaine et par le Conseil de Sécurité concernant le
Darfour qui sont encore au stade de l'examen par le procureur.
* 44 Le mandat du TPIR est
en effet limité seulement aux évènements de l'année
1994. Cf. article 1er du statut du TPIR.
* 45 Il ya eu en effet de
multiples conflits au cours desquels ont pu se commettre certains crimes
internationaux, tels en Algérie, Angola, Cambodge, Libéria,
Soudan...
* 46 Le but de la Cour est
de permettre aux Etats de lui déférer les cas les plus graves des
crimes commis sur leurs territoires, et également de veiller à ce
que ceux qui restent de la compétence de ces Etats soient correctement
réprimés.
* 47 Ce pouvoir
découle de l'article 17 du Statut et est une conséquence du
principe de la complémentarité de la Cour par rapport aux
juridictions nationales. A propos de ce principe v. le paragraphe 3 de la
présente section.
* 48 BASSIOUNI Ch.,
« Etude historique : 1919-1998 »,
précité note 33, p. 3.
* 49 Cf. l'article 11 du
Statut.
* 50 Le Statut n'a en effet
pas d'effet rétroactif.
* 51 En vertu de l'article
124, cf. LAUCCI C., « Compétence et
complémentarité dans le Statut de la future Cour Pénale
Internationale », in L'Observateur des Nations Unies,
n° 7, 1999, p. 137. Cet article a été inséré
sur proposition de la France, qui l'a d'ailleurs mis en jeu lors de sa
ratification. Les auteurs admettent dans leur majorité que cette
disposition, bien qu'ayant permis la signature de la France, est regrettable et
limite énormément la compétence de la Cour.
* 52 On aura compris qu'en
l'état actuel des choses, le principe est que la CPI n'a pas de
compétence universelle.
* 53 Cf. l'article 12 du
Statut.
* 54 La Cour est issue d'une
convention multilatérale, donc soumise au principe de l'effet relatif
des conventions prévu à l'article 34 de la Convention de Vienne
de 1969. Ce principe est néanmoins un peu remis en cause, dans la mesure
où un Etat non partie peut voir son national juger par la Cour, si ce
dernier se rend coupable d'un des crimes de l'article 5 du Statut sur le
territoire d'un Etat partie.
* 55 Cf. les articles 1 et
25 du Statut.
* 56 Ce critère de
compétence a été l'une des principales raisons du refus du
Statut par les Etats-Unis qui le considèrent comme une atteinte majeure
à la souveraineté des Etats et au principe de l'effet relatif des
conventions internationales.
* 57 Cf. l'article 17(1.d)
du Statut.
* 58 Ces crimes sont
définis avec force détails dans un document établi par
l'Assemblée des Etats Parties à la Cour. Cf.
« Eléments des crimes », ICC-ASP/1/3 sur le site
www.icc-cpi.int.
* 59 Cf. l'article 5 (2) du
Statut de Rome.
* 60 Les autres crimes sont
exhaustivement définis aux articles 6 (crime de génocide), 7
(crime contre l'humanité) et 8 (crime de guerre) suivants.
* 61 En vertu de l'article
123 du Statut.
* 62 GUILLIEN R. et VINCENT
J., Termes juridiques, 10è éd., Paris, Dalloz, 1997, p.
518.
* 63 N'GUYEN Q. D., DAILLIER
P. et PELLET A., Droit international public, 7è
éd., Paris, LGDJ, 2002, p. 423.
* 64 Cf. la sentence
arbitrale du 04 avril 1928 dans affaire de l'île de Palmas, USA vs
Espagne. RSA, 1928, Vol. II, pp. 829 et ss.
* 65 LATTANZI F.,
« La compétence de la Cour pénale internationale et le
consentement des Etats », in Revue Générale de
Droit International Public, Paris, Pedone, 1999, n°2, p. 425.
* 66 Cf. Les observations de
BENNOUNA M., « La création d'une juridiction pénale
internationale et la souveraineté des États », in
Annuaire français de droit international, Paris, CNRS
éditions, 1990, pp. 299-306 ; également HENZELIN M.
« La Cour pénale internationale : organe supranational ou
otage des Etats ? », précité note 11, p.
222.
* 67 V. à ce sujet,
KIRSCH Ph., « La Cour pénale internationale face à la
souveraineté des Etats », in DELMAS-MARTY M. et CASSESE A.
(dir.), Juridictions internationales et crimes internationaux, Paris,
PUF, 2002, p. 31 ; Des mêmes auteurs à propos de la
position de la Chine (non signataire) face au Statut de la Cour,
Juridictions nationales et crimes internationaux, Paris, PUF, 2002, p.
353.
* 68 C'est en substance ce
qui est réaffirmé en ces termes : « ...un des
bastions de la souveraineté étatique : l'exercice de la
compétence pénale. », Cf. ROMANO C. et BOUTRUCHE
Th., « Tribunaux pénaux internationalisés :
état des lieux d'une justice hybride ». in Revue
Générale de Droit International Public, janvier-mars 2003,
n°1, Paris, Pedone, 2003, p. 124.
* 69 V. SOLERA O.,
« Complementary jurisdiction and international criminal
justice », précité note 34, pp. 145-171 ;
également BENBENUTI P., « Complentarity of the International
Criminal Court to national criminal jurisdictions », in LATTANZI F.
et SHABAS W., Essays on the Rome Statute of the international criminal
court, Ripa Fagnano Alto (AQ), il Sirente, 2000, pp. 21-50.
* 70 Aucun des tribunaux
pénaux internationaux précédents n'a en effet connu un tel
système. C'est l'exemple du TPIY et du TPIR, qui ont la primauté
sur les juridictions nationales. Cf. article 9 (2) du statut du TPIY et article
8 (2) du statut du TPIR.
* 71Cf. le préambule,
alinéa 10 et l'article 1 du Statut.
* 72 V. à ce sujet
DELLAMORTE G., « Les frontières de la compétence de la
Cour pénale Internationale : observations critiques », in
Revue Internationale de Droit Pénal, Toulouse, Erès,
vol. 73, 2002, pp. 23 - 57.
* 73 Pour ce qui est de la
compétence universelle, les Etats qui la prévoient dans leur
législation, l'assortissent généralement de la condition
de la présence physique de l'auteur du crime sur leur territoire, avant
de pouvoir s'estimer compétents. V. sur cette question HENZELIN M.,
Le principe de l'universalité en droit pénal
international, Bâle Genève Zurich Helbing et Lichtenhann,
Genève Faculté de Droit, Bruxelles Bruylant, 2000, pp. 29 et
ss ; du même auteur, «La compétence pénale
universelle : une question non résolue par l'arrêt
Yerodia », in Revue générale de droit international
public, Paris, Pedone, 2002, pp. 819-854 ; aussi DE LA PRADELLE G.,
« La compétence universelle », in ASCENCIO H.,
DECAUX E. et PELLET A. (dir.), Droit international pénal,
Paris, Pedone, 2000, pp. 905-917.
Seule la Belgique, dans sa loi du 16 juin 1993, relative
à la répression des infractions graves aux conventions de
Genève de 1949 et aux protocoles additionnels I et II de 1977 (loi
introduisant le crime de guerre dans le droit belge), avait
écarté ce lien de rattachement et rendait ses tribunaux
compétents, quel que soit le lieu de séjour de l'accusé.
En outre, tout bénéfice d'immunité en vertu d'une
quelconque position officielle dans l'appareil étatique a
été également exclu par une loi du 10 février 1999
en son article 5(3) (loi qui a modifié celle de 1993 en y ajoutant le
crime contre l'humanité et le génocide.) Une telle loi
constituait le summum de la compétence universelle. Il n'est pas
surprenant qu'elle ait été à la base de nombreuses
plaintes notamment contre des chefs d'Etat en exercice comme Ariel Sharon, chef
du gouvernement israélien, et Laurent Gbagbo de Côte d'Ivoire.
Malheureusement aucune de ces plaintes n'ont donné lieu à des
procès, même si quelques affaires concernant « de moins
gros gibiers » ont pu aboutir (V. à ce propos, le document sur
le site
http://hrw.org/french/press/2003/justice02.htm,
visité le 30 décembre 2005). Par la suite, le gouvernement belge
a dû faire face à de nombreuses pressions de part et d'autre, qui
l'ont conduit à revoir considérablement les dispositions de cette
loi dite de compétence universelle. Il ne reste aujourd'hui de cette loi
que des dispositions très restrictives de la compétence
universelle des tribunaux belges, contenues dans la loi du 5 août 2003
sur les violations graves du DIH (Cf. pour les dispositions de ces
différentes lois, DAVID E., TULKENS F., VANDERMEERSCH D., Code de
droit international humanitaire, Bruxelles, Bruylant, 2004, pp.796 et
ss.).
* 74 Ce principe recommande
aux Etats de juger (tout au moins d'engager des poursuites sérieuses)
ou, à défaut, d'extrader vers un Etat en mesure de le faire, les
responsables des crimes internationaux se trouvant sur leur territoire. Cf. LA
ROSA A.-M., Dictionnaire de droit pénal international, Termes
choisis, Paris, P.U.F., 1998, pp. 1-5.
* 75 Ce serait une situation
à saluer. A notre avis la meilleure situation est celle où les
juridictions étatiques auront les moyens de prendre elles mêmes en
charge les criminels qui se trouvent sur leur territoire, et de les juger comme
il se doit. L'existence de la Cour est salutaire, mais c'est bien parce que les
Etats sont jusqu'ici incapables d'assurer au plan interne la répression
des crimes internationaux, ce qui est par contre dommage.
* 76 Ces raisons se
retrouvent à l'article 17 du Statut.
* 77 Cf. l'article 17 (2).
* 78 Cet avantage de la
présence de la CPI a été rappelé par la Commission
d'enquête des Nations Unies sur le Darfour. Dans son rapport au SG de
l'ONU transmis au Conseil de sécurité le 31 mars 2005
(S/2005/60), cette commission a ainsi rappelé aux Etats de la
communauté internationale autres que le Soudan leur devoir et la
possibilité qu'ils ont de poursuivre les auteurs des crimes
perpétrés au Soudan.
* 79 Le Conseil de
sécurité a en effet déféré la situation au
Darfour devant la CPI, sur la base du chapitre VII de la Charte, en vertu du
pouvoir qui lui est reconnu par l'article 13(b) du Statut par la
résolution 1593 du 31 mars 2005. Dans cette situation, la position
(partie ou non au Statut de Rome) de l'Etat concerné importe peu
puisque celui-ci est obligé de coopérer avec la Cour.
* 80 L'amnistie est une
«mesure qui ôte rétroactivement à certains faits
commis à une période déterminée leur
caractère délictueux (ces faits étant
réputés avoir été licites, mais non pas ne pas
avoir eu lieu) », Cf. CORNU G., Vocabulaire juridique,
Association Henry CAPITANT, 7è Edition, Paris, PUF, 2005, p.
54.
Les lois d'amnistie ne sont pas du ressort du pouvoir
judiciaire mais plutôt du pouvoir législatif, mais elles ont une
incidence directe sur l'activité et les décisions des tribunaux.
C'est l'exemple de la loi algérienne dite de "concorde civile" (Loi
n° 99-08 du 29 Rabie El Aouel 1420) adoptée par le parlement et
promulguée en 2000, après le référendum de
septembre 1999. Présentée comme une solution unique et
inédite pour une issue de la crise, elle propose d'alléger les
peines pénales, et de surseoir sous certaines conditions aux sanctions
infligées aux personnes reconnues coupables d'exaction sur les
populations civiles durant les années de crise. V. la loi en ligne,
http://www.el-mouradia.dz/francais/algerie/histoire/loi_sur_la_concorde_civile.htm.
* 81 Cf., LA ROSA A.-M.,
Dictionnaire de droit pénal international, Termes choisis,
précité note 77, pp. 65-67.
* 82 Article 17(2.a) du
Statut.
* 83 LATTANZI F.,
« Compétence de la Cour Pénale Internationale et
consentement des Etats », précité note 68, pp. 425-
444.
* 84 Cf. article 12 du
Statut. A moins de la saisine par le conseil de sécurité qui
agirait en vertu du chapitre VII de la charte des nations Unies. Il faudrait
pour ce faire que la situation en cause rentre dans les conditions de l'article
39.
* 85 Les Etats parties ont
ratifié le Statut, donnant ainsi leur accord pour coopérer avec
la Cour, comme l'exigent les dispositions de ce Statut.
* 86 Intitulé de
l'article 86. Les chapitres IX et X contiennent l'essentiel des obligations des
Etats parties envers la Cour.
* 87 Il est en effet des
situations pour lesquelles les Etats peuvent ne pas répondre
favorablement aux demandes de coopération de la Cour. Cf. Chapitre 3.
* 88 REY-DEBOVE J. et REY A.
(dir.), Le petit Robert, Paris, Dictionnaire le Robert, 2002, p. 543.
* 89 MOCHOCHOKO P.,
« International cooperation and judicial assistance », in
LEE S. R., The ICC, the making of the Rome statute. Issues,
negociations, results, Kluwer law international, The Hague, London,
Boston, 1999, p. 306.
* 90 Ces règles sont
essentiellement celles de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des
traités.
* 91 Le Statut n'admet
aucune réserve à ses dispositions (art. 120). La ratification de
la Convention de Rome entraîne donc une acceptation intégrale du
Statut par l'Etat.
* 92 Conformément
à l'article 26 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des
traités.
* 93 Le préambule du
Statut reconnaît les Etats comme responsables de la répression des
crimes internationaux dont ceux qui figurent dans ses dispositions. Cf. le
préambule du Statut alinéa 6.
* 94 Cet avis ne fait pas
l'unanimité, certains estiment en effet que l'obligation de
coopérer n'existe à l'égard des Etats non parties que sur
la base d'un accord séparé entre ces derniers et la Cour. V. par
exemple LAUCCI C., « Compétence et
complémentarité dans le Statut de la future Cour Pénale
Internationale », précité note 54, p. 141.
* 95 Cf. les arrêts du
TPIY, Tadic, arrêt du 07 mai 1997, paragraphe 577; kupreskic et consorts,
arrêt du 14 janvier 2000, paragraphe 520; Delalic et consorts,
arrêt du 16 novembre 1998, paragraphe 306, sur le site
http://www.un.org/icty/
(Visité le 30 décembre 2005); V. encore BOISSON DE
CHAZOURNES L. et CONDORELLI L., << Quelques remarques à
propos de l'obligation des Etats de « respecter et faire
respecter » le droit international humanitaire « en toutes
circonstances >>, in SWINARSKI C., Etudes et essais sur le droit
international humanitaire et sur les principes de la Croix Rouge en
l'honneur de Jean Pictet, CICR, Martinus Nijhoff, Genève,
La Haye, 1984, pp. 17-35.
* 96 V. le Rapport du
Secrétaire général des Nations Unies du 3 mai 1993 sur la
création d'un Tribunal pénal
international pour l'Ex-Yougoslavie (Document ONU S/25704, ch.
45), ainsi que l'Avis consultatif de la CIJ du 8 juillet 1996 sur la
licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires,
Rec., 1996, para. 81-83.
http://www.icj-cij.org/cijwww/ccases/cunan/cunanframe.htm
(Visité le 30 décembre 2005).
* 97 Cf. l'article
1er commun aux conventions de Genève du 12 Août
1949.
* 98 BOISSON DE CHAZOURNES
L. et CONDORELLI L., « Common article 1 of the Geneva Conventions
revisited : Protecting a collective interests », in Revue
Internationale de la Croix Rouge, n°837, Genève, CICR, 2000,
pp. 67-87.
* 99 Cf. LA ROSA A.-M.,
Les juridictions pénales internationales : la procédure
et la preuve, Paris, P.U.F., 2003, p. 84. Cette affirmation devrait tout
de même être nuancée selon la qualité d'Etat partie
ou non au Statut.
* 100 Article 7 de la
Convention de 1948 sur le génocide.
* 101 Ce point de vue est
partagé par PALMISANO G., « The ICC and Third
States », in LATTANZI F. et SHABAS W., Essays on the Rome Statute
of the international criminal court, précité note 72, pp.
419 et ss; ou encore du même auteur «Cooperation by non-States
parties», in LATTANZI F., The International Criminal Court, Comment On
The Draft Statute, Naples, Editoriale Scientifica, 1998, pp.
339-366 ; également TRIFFTERER O., Commentary of the Rome
Statute of the international Criminal Court : Observer's notes article by
article, Baden Baden, Nomos Verlagsgesellschaft, 1999, p. 1061.
* 102 V. CIAMPI A.,
«The obligation to cooperate», in CASSESE A., GAETA P. et JONES R.W.,
International Criminal Law, A Commentary on the Rome Statute for an
International Criminal Court (Vol.II), Oxford, Oxford University Press,
2001, p. 1609. V. infra. P. 77.
* 103MATTONE M. C.,
« Aperçu sur les règles du statut au sujet de la
coopération internationale et de l'assistance judiciaire », in
CHIAVARIO M. (dir.), La justice pénale internationale entre
passé et avenir, précité note 40, pp. 131-140.
* 104 L'article 12(3) du
Statut précise aussi en effet que cet Etat coopère
« conformément au chapitre IX » qui s'applique aussi
bien entendu, aux Etats parties. V. TRIFFTERER O., Commentary of the Rome
Statute, précité note 104, p. 341; V. aussi CIAMPI A.,
«The obligation to cooperate», précité note 105, p.
1616.
La situation diffère sensiblement lorsque l'Etat non
partie coopère avec la Cour sur la base d'une invitation en vertu
l'article 87(5). Dans ce cas, cet Etat a toute la latitude pour restreindre
l'étendue de sa coopération avec la Cour, dans la mesure
où ce dernier n'a pas fait de déclaration d'acceptation de la
Cour comme il l'aurait fait sur la base de l'article 12(3). Cet avis de CIAMPI
A., se justifie sur la base du respect de la souveraineté de l'Etat,
mais dans le cas d'une saisine de la Cour par le Conseil de
sécurité, l'Etat non partie ne devrait pas avoir ce choix et
reste dans la situation de l'article 12(3).
* 105 C'est en effet bien
souvent le cas dans les conflits armés non internationaux où les
insurgés sont des nationaux de l'Etat et commettent des exactions sur
leurs propres populations civiles. C'est l'exemple de la Sierra
Léone.
* 106 Cette obligation
résulte pour les Etats de l'article 25 de la charte onusienne, qui
prescrit le respect des décisions et l'application par les Etats des
mesures prises par le Conseil de sécurité. Cette hypothèse
se vérifie dans le cas de l'affaire sur le Darfour qui a
été portée devant la Cour par une résolution 1593
du Conseil de sécurité du 31 mars 2005.
* 107 Article 90 du
Statut.
* 108 Article 90(4) du
Statut.
* 109 Article 90(6) du
Statut.
* 110 Article 90(7.a) du
Statut.
* 111 Article 90(7.b) du
Statut.
* 112 Ici la distinction
entre les expressions « compliance with the court request (...)
opposed to cooperation » revêt tout son sens. En effet ces
deux termes reflètent divers niveaux de contrainte pour les Etats.
Aussi, le fait que le texte final ait retenu le terme de
« coopération » moins exigeant, laisse
planer quelques inquiétudes quant à la portée des
obligations des acteurs étatiques. V. à ce propos MOCHOCHOKO P.
« International cooperation and judicial assistance », in
LEE S. R., The ICC, the making of the Rome statute. Issues,
negociations, results, précité note 92, p. 306.
* 113 Article 115 du
Statut.
* 114 Le budget
prévisionnel de la Cour pour 2005 s'élève à 70
millions d'euros, contre 56 millions d'euros de budget en 2004.
www.icc-cpi.int .
* 115 Cf. l'article 112 du
Statut.
* 116 Cf. SASSÒLI
M., « Droit pénal international et droit pénal
interne : le cas des territoires se trouvant sous administration
internationale », in ROTH R. et HENZELIN M., Le droit
pénal à l'épreuve de l'internationalisation, Paris
LGDJ, Genève GEORG, Bruxelles Bruylant, 2002, p. 121.
* 117 Aucune obligation de
cette nature ne peut être cependant mise à la charge des Etats non
parties qui ne sont pas liés par les dispositions du Statut.
* 118 Cette obligation
devrait être appliquée en tenant compte non seulement des
« formes de coopération visées dans le
présent chapitre IX», mais de toutes les autres formes
qui pourraient se présenter au regard de tout le Statut.
* 119 En Suisse par
exemple, un service spécial appelé Service Central, a
été crée pour assurer cette fonction (Cf. article 3 de la
loi suisse citée à la note 124), ce qui constitue une
avancée par rapport à la coopération avec les tribunaux
ad hoc, qui conférait cette fonction à l'office
fédéral de la justice (Cf. Arrêté
fédéral relatif à la coopération avec les tribunaux
internationaux chargés de poursuivre les violations graves du droit
international humanitaire du 21 décembre 1995 ( RS 351.20), V. le site
http://www.admin.ch/ch/f/rs/3/351.20.fr.pdf
(visité le 30 décembre 2005).
* 120 Ces conditions
devraient en principe être plus souples que celles de l'extradition, ce
sont en effet deux procédures différentes même si elles
peuvent avoir la même finalité : le jugement effectif de
l'accusé. Cf. infra paragraphe 3.
* 121 Cf. HENZELIN M.,
«La compétence pénale universelle : une question non
résolue par l'arrêt Yerodia », in Revue
générale de droit international public,
précité note 76, 2002, p. 833.
Il est convenable d'insister ici sur la distinction qui
existe entre l'obligation d'adapter la législation nationale et la
souhaitable identité dans la définition des crimes dans la
législation nationale avec celle du Statut. La première est une
exigence du Statut tandis que la seconde n'est une manière de mettre en
oeuvre cette exigence qui est laissée au libre arbitre des Etats
parties.
* 122C'est l'exemple de la
Suisse qui a ratifié le Statut de la Cour le 12 Juillet 2001,
ratification rendue possible par l'adoption d'une loi du 22 juin 2001 dite Loi
fédérale sur la coopération avec la CPI, (LCPI) RS 351.6.
Cf.
http://www.admin.ch/ch/f/rs/rs.html
(visité le 30 décembre 2005).
C'est aussi le cas de l'Allemagne avec sa loi du 21 juin 2002,
ou encore de la Belgique avec les lois du 05 août 2003 et du 25 mars 2004
(DAVID E., TULKENS F., VANDERMEERSCH D., Code de droit international
humanitaire précité note 76), qui a fait figure de leader
dans la répression des crimes internationaux (Cf. note 76).
De nombreux pays traînent encore le pas pour se
conformer, c'est le cas de pays africains, par exemple du Burkina Faso ou
encore du Cameroun. V. à ce sujet la comparaison de différents
ordres nationaux sur la mise en oeuvre interne de la Convention de Rome, KEUBOU
Ph., « Adaptation des législations internes aux exigences de
la convention de Rome », in Revue de Science Criminelle et de
Droit pénal Comparé, janvier/mars 2004, n° 1, pp.
843-864 ; V. encore, « Carnet de route législatif pour
l'adoption d'une loi d'adaptation sénégalaise du Statut de Rome
de la Cour pénale internationale », sur le site
http://www.humanrightsfirst.org/international_justice/icc/implementation/Senegal/CARNET_ROUTE_LEGISLA_SENEGAL.pdf
. (Visité le 30 décembre 2005).
* 123BROOMHALL B.,
« La CPI, présentation générale et
coopération des Etats », in : Nouvelles Etudes
Pénales, CPI ratification et législation nationale
d'application, précité note 33, p. 126.
* 124 Revue de droit
militaire et de droit de la guerre, N° 42, Vol. 1 et 2, 2003,
Bruxelles, p. 45 et ss.
* 125 Ce sont les pays au
sein desquels le droit interne et le droit international forment une source
unique et sont applicables conjointement par les organes nationaux. Les
règles internationales intègrent directement l'ordre juridique
interne, sans une loi nationale d'insertion, dès qu'elles sont
valablement acceptées. Cette thèse s'oppose à celle du
dualisme. Le besoin de hiérarchiser se présente en cas de conflit
entre ces deux droits. Dans ce cas la primauté peut être
accordée au droit interne ou au droit international selon les
systèmes. V. à ce sujet N'GUYEN Q. D., DAILLIER P. et PELLET A.,
Droit international public, précité note 66, p.
93 ; COMBACAU J. et SUR S., Droit international public,
6è éd., Paris, Montchrestien, p. 178.
* 126 Cf. les articles 121
à 123 du Statut.
* 127 Cf. note 77.
* 128 V. les
développements sur la complémentarité, supra.
p.18.
* 129 Encore faut-il que
l'affaire soit déclarée recevable par la Cour en vertu des
conditions de recevabilité prévues à l'article 17 du
Statut.
* 130 C'est l'exemple la
situation au Soudan (Darfour), qui a été
déférée à la Cour par le Conseil de
sécurité. V. infra. (chap.3, sect.1) à propos des
raisons de la non coopération des Etats.
* 131 Cette affirmation ne
signifie en aucun cas que la saisine de la Cour dans les autres
hypothèses est systématiquement vouée à un
échec de la procédure engagée, mais seulement que dans ces
autres hypothèses la coopération des Etats, sera moins facile
à obtenir.
* 132 « (...) La
paix passe par la négociation, et (...) la négociation se marie
mal avec l'accusation », cette affirmation faite à propos de
la médiation du Conseil de sécurité dans la
résolution des conflits est tout aussi vraie pour les cas de dialogue
interne. Cf. LAUCCI C., « Compétence et
complémentarité dans le Statut de la future Cour Pénale
Internationale », précité note 54, p. 146.
* 133 C'est par exemple le
cas avec la commission de réconciliation en Afrique du sud ou plus
récemment en Sierra Léone, ou de l'Instance Equité et
Réconciliation au Maroc, qui sont des instances dotées de
compétences non judiciaires. V. sur ce sujet pour le cas du Maroc le
rapport de la FIDH sur le séminaire tenu dans ce pays en mars 2004
« Les Commissions de vérité et de
réconciliation : l'expérience marocaine »
http://www.fidh.org/article.php3?id_article=1659,
plus généralement voir
http://www.ier.ma (Visité le 30
décembre 2005).
* 134 Il a
été évoqué en effet en introduction, le cas de
l'Ouganda qui a envisagé de faire interrompre l'enquête de la Cour
pour favoriser le processus de paix interne.
* 135 Cf. article 127(2) du
Statut.
* 136V. sur cette question
en droit français, LEVASSEUR G., CHAVANNE A., MONTREUIL J. et
BOULOC B., Droit pénal général et procédure
pénale, Paris, Sirey, 1999, p. 112.
* 137 La comparaison peut
être faite entre l'Etat qui défère une situation devant la
Cour et la partie (civile) qui porte plainte devant le procureur en droit
interne. La victime en droit interne agit en effet sur initiative propre et le
procureur est seul habilité à examiner la plainte
déférée et à décider de poursuivre. En cas
de poursuite pénale, le procureur représente devant le juge
pénal toute la société et non la victime seule, qui elle
n'a d'emprise que sur le volet civil (c'est-à-dire sur la question de la
réparation du dommage qu'elle a subi) ; l'aspect pénal lui
échappe. Devant la Cour, le procureur agit au nom de la
communauté internationale.
* 138 Les crimes poursuivis
sont en effet « les plus graves qui touchent l'ensemble de la
communauté internationale », cf. article 5 du Statut.
* 139 Cf. article 42 du
Statut relatif au bureau du procureur. L'indépendance de la Cour et du
procureur est garantie par le Statut.
* 140 Cette
résolution positive doit être prise par un vote unanime de tous
les membres pour la suspension de l'enquête. Donc sans le veto contraire
d'un membre permanent. V. SHABAS W., An introduction to the International
Criminal Court, 2nd ed., Cambridge University Press, 2004, pp.
82 et ss.
* 141 Cf. article 53(3.b)
du Statut.
* 142 Il s'avère
souvent pénible d'une part, d'obtenir l'arrêt des
hostilités entre les différentes parties au conflit, lorsque
certains responsables sentent peser sur eux le risque de poursuites judiciaires
pour leurs actions durant le conflit. D'autre part, il est difficile pour les
victimes et leurs ayants droit, d'admettre une impunité totale des
responsables même en contre partie de l'arrêt du conflit ou des
tensions. Le cas du Libéria avec le dirigeant Charles Taylor est assez
évocateur de cette question. Son départ en exil a
été décisif dans l'obtention d'un cesser le feu dans ce
pays. Mais, le problème de son transfert devant le tribunal
spécial de Freetown par le Nigeria qui lui a accordé l'exil se
pose aujourd'hui. C'est un dilemme que certains pays ont essayé de
résoudre par des processus autres que strictement judiciaires.
Ce fut le cas en Afrique du Sud, à la chute du régime de
l'apartheid au début des années 90, avec la Commission
vérité-réconciliation, au Rwanda avec les juridictions
« gacaca » (Cf. NZANZUWERA F., « Les
juridictions gacaca, une réponse au génocide rwandais ou le
difficile équilibre entre châtiment et pardon », in
BURGOGUE LARSEN L. (dir.), La répression internationale du
génocide rwandais, Bruxelles, Bruylant, 2003, pp. 109-120.) ;
ou encore au Maroc (Cf. supra, note 103). V. aussi sur cette question HUYSE L.,
« Amnistie, commission de la vérité ou
justice », in DEXTEXTHE A. et FORET M. (dir.), De Nuremberg
à La Haye et Arusha, précité note 31, pp.
81-84 ; et CHRETIEN J.P., « Impunité et
réconciliation au Rwanda et Burundi », ibid., pp.
73-80
* 143 L'assistance existe
aussi de la part de la Cour au bénéfice des Etats. Un Etat peut
en effet solliciter l'assistance de la Cour lors d'une enquête de ses
juridictions internes portant sur un crime relevant de la compétence de
la Cour. L'article 93(10.a) permet à la Cour de prêter son
assistance à l'Etat partie qui en fait la demande.
* 144 CASSESE A.,
« Y a t il un conflit insurmontable entre souveraineté des
Etats et justice pénale internationale ? », in CASSESE A.
et DELMAS-MARTY M., Crimes internationaux et Juridictions
internationales, Paris, P.U.F., 2002, p. 17.
* 145 Cf. l'article 15 de
l'Accord sur les privilèges et immunités de la Cour Pénale
Internationale (ICC-ASP/3/Res.1).
* 146 Cf. le
Règlement de procédure et de preuve des TPIY et TPIR,
règle 40. Ce pouvoir découle du mode de création de ces
tribunaux. Les résolutions du Conseil de sécurité
confèrent en effet une force obligatoire aux actes et décisions
de ces tribunaux envers les Etats.
* 147 V. les
développements précédents sur l'obligation pour les Etats
parties de prendre des mesures législatives d'adaptation (paragraphe 1
de la présente section).
* 148 Ces mesures
correspondent en grande partie aux formes de coopération
énumérées à l'article 93 du Statut.
* 149 V. l'obligation pour
les Etats parties de prendre des mesures législatives d'adaptation,
supra. p. 33.
* 150Cf. article 97 du
Statut.
* 151Cf. article 93(6) du
Statut.
* 152BOURDON W., La
CPI: le statut de Rome, précité note 12, p. 259.
* 153 Les
éléments qui doivent être contenus dans la requête du
procureur et dans le mandat d'arrêt de la chambre préliminaire
sont également fixés à l'article 58 du Statut
respectivement aux paragraphes 2 et 3.
* 154 Cf. l'article 61 du
Statut.
* 155 Cf. l'article 63 du
Statut.
* 156 Cf. l'article 59 du
Statut.
* 157 Le Statut fait
clairement la distinction entre les deux termes. Cf. article 102. V. sur cette
question BROOMHALL B., « La CPI, présentation
générale et coopération des Etats », in
Nouvelles Etudes Pénales, précité note 33, p.
127.
* 158 Le droit
international prime en effet sur les droits internes des Etats, (art. 27 de la
convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités). Bien souvent en
effet, l'argument du non respect des droits de la personne extradée est
mis en avant dans les décisions de refus d'extradition.
* 159 Cf. supra.
les relations entre les Etats parties au Statut et les Etats tiers, p. 30.
* 160V. sur cette question
les développements sur les raisons du manque de coopération des
Etats (infra. chap.3).
* 161 Cf.le
Règlement de procédure et de preuve devant la CPI, règle
n°103.
* 162 Cf. l'article 105 du
Statut.
* 163Cf.les articles 103(2)
et 104(1) du Statut. Pour plus de détails sur cet aspect, V.
LAMBERT-ABDELGAWAD E., « L'emprisonnement des personnes
condamnées par les juridictions pénales internationales, les
conditions relatives à l'aménagement des peines », in
Revue de Science Criminelle et de Droit Pénal Comparé,
(RSC), (Paris), janvier/mars 2003, pp. 162-171.
* 164 Il a en effet
été créé un fond d'indemnisation des victimes des
crimes relevant de la compétence de la CPI, et ce fond est
alimenté en partie par les biens (et les produits de leur vente)
appartenant aux coupables. Cf. le site
http://www.icc-cpi.int/vtf.html
(Visité le 30 décembre 2005).
* 165 Cf. le bulletin
d'information n°7, mai-août 2005, de l'association Track Impunity
ALways (TRIAL). L'Union Européenne reproche en effet à la Croatie
de ne pas avoir encore livré au TPIY, le général Ante
Gotovina se trouvant sur son territoire et qui est l'objet d'un mandat
d'arrêt pour crime de guerre depuis 2001.
* 166 Cf. infra. Chapitre
3, section 2.
* 167Les règles de
la responsabilité internationale de l'Etat sont essentiellement
contenues dans le projet d'articles de la Commission du droit international de
l'ONU (CDI) (Cf. DAVID E., VAN ASSCHE C., Code de droit international
public, Bruxelles, Bruylant, 2è éd., 2004, pp. 431- 443),
réaffirmé par la résolution de l'Assemblée
Générale de l'organisation lors de sa séance
plénière du 12 décembre 2001 (A/RES/56/83). V.
également sur cette question, ALLAND D., Droit international
public, Paris, P.U.F., 2000, pp. 399 et ss ; N'GUYEN Q. D., DAILLIER
P. ET PELLET A., Droit international public, précité
note 66, pp. 760 et ss ; CASSESE A., International Law, Oxford
University Press, 2005, pp. 245 et ss ; EVANS D. M., International
Law, Oxford, Oxford University Press, 2003, pp. 445 et ss. V. encore les
commentaires du projet de la CDI, par la Commission elle-même dans son
rapport de 2001 à L'AGNU, Doc. A/56/10, pp. 29-365 (en ligne
http://www.un.org/law/ilc/reports/2001/2001report.htm);
et aussi CRAWFORD J., Les articles de la C.D.I. sur la
responsabilité de l'Etat, introduction texte et commentaires,
Paris, Pedone, 2003, 462 p.
* 168 Cf. note 170.
* 169 Cf. l'article 2 du
projet d'articles de la CDI.
* 170 V. ALLAND D.,
Droit international public, précité, note 170, p.
405.
* 171 Cf. l'article 4 du
projet d'articles de la CDI.
* 172 CASSESE A.,
International Law, précité note 170, p. 251.
* 173 Ibid.
* 174 Cf. affaire du
détroit de Corfou, Albanie vs Gde Bretagne, CIJ, Rec. 1949, p
.4. V. aussi la jurisprudence de la CIJ sur les questions de
responsabilité des Etats, l'affaire Nicaragua, USA vs Nicaragua, CIJ,
Rec. 1986, pp. 14-150 ; l'affaire du personnel diplomatique des
Etats-Unis à Téhéran, CIJ Rec. 1980, pp. 4-46.
* 175 Par exemple dans les
conditions de l'article 72, si l'inexécution consiste en une
rétention d'informations par l'Etat.
* 176 Ce peut être
par exemple le cas de l'impossibilité d'arrêter une personne
recherchée par la Cour mais protégée par un groupe
armé qui oppose une résistance.
* 177 La question des
circonstances excluant l'illicéité ne fera l'objet que d'un bref
développement étant donné que la préoccupation
centrale est celle des conséquences en cas de responsabilité. V.
sur la question des circonstances excluant l'illicéité, ALLAND
D., Droit international public, précité note 170, pp.
422 et ss ; EVANS D. M., International Law, précité
note 170, pp. 462 et ss ; N'GUYEN Q. D., DAILLIER P. ET PELLET A.,
Droit international public, précité note 66, pp. 782 et
ss ; SALMON J., « Les circonstances excluant
l'illicéité », in La responsabilité
internationale, Institut de Hautes Etudes Internationales de Paris, Paris,
Pedone, 1987, pp. 89-225.
Dans un tout autre contexte, celui de la
responsabilité pénale individuelle, le Statut de la CPI,
évoque des « Motifs d'exonération de la
responsabilité pénale » en son article 31. Ceux-ci
peuvent être considérés comme l'équivalent pour la
responsabilité pénale individuelle des circonstances excluant
l'illicéité pour les Etats.
* 178 Cf. le rapport de AGO R.
sur la responsabilité internationale des Etats, Annuaire de la
Commission du Droit International, 1979, II, para. 55, p. 31.
* 179 Dans son projet
adopté en 2001, la CDI a définitivement tranché la
question de savoir si les circonstances excluant l'illicéité
agissaient seulement sur la responsabilité en laissant subsister la
violation, ou directement sur la violation (CRAWFORD J., Les articles de la
C.D.I. sur la responsabilité de l'Etat, introduction texte et
commentaires, précité note 170, p.190 ; ALLAND D.,
Droit international public, précité note 170, p. 423).
L'appellation retenue par la Commission, de même que par exemple la
formule « l'illicéité du fait d'un Etat non
conforme à l'une de ses obligations internationales à
l'égard d'un autre est exclue si,... », utilisée
au début des articles 21 à 24, montrent clairement que c'est la
violation elle-même qui est effacée en cas de circonstances
excluant l'illicéité.
* 180 Pour des
développements sur les définitions et les conditions des
circonstances excluant l'illicéité, v. CRAWFORD J., Les
articles de la C.D.I. sur la responsabilité de l'Etat,
introduction texte et commentaires, précité note 170,
pp. 190-224.
* 181 V. pour un
exposé des deux thèses en présence, BOLLECKER-STERN B.,
Le préjudice dans la théorie de la responsabilité
internationale, Paris, Pedone, 1973, pp. 36 et ss.
* 182 V. STERN B.,
« Le concept de préjudice juridique », in
Annuaire Français de Droit International, Paris, CNRS Editions,
2001, pp. 3- 44.
* 183 Cf. le paragraphe 9
des commentaires de l'article 2 du projet d'articles de la CDI,
précité note 170.
* 184 Exemple de dommage
immédiat, dans l'affaire du personnel diplomatique entre les Etats-Unis
et l'Iran, où l'ambassade- territoire étatique par
définition- des Etats-Unis a été violé et son
personnel notamment les diplomates, pris en otage. V. sur la question des
dommages EVANS D. M., International Law, précité note
170, pp. 459 et ss ; DUPUY P.- M., Droit international public,
Paris, Dalloz, 2004, pp. 480 et ss.
* 185 Cf. affaire
Mavrommatis, Grèce c. Gde Bretagne, arrêt du 30 Août 1924.
CPJI, Série A, 1924, n°2, pp. 6-37.
* 186 Dans une telle
situation, le dommage se déduit de la règle primaire qui
définit l'obligation de coopérer, ou du moins du non respect de
celle-ci. En conséquence, il n'est pas besoin de rechercher ailleurs que
dans ce non respect, un préjudice en plus des conditions objective et
subjective pour que soit fondée la responsabilité. Cette
idée est conforme à celle développée par la CDI au
paragraphe 6 des commentaires de l'article 30 du projet d'articles.
* 187 Exemple du droit
suisse avec l'article 41 du code des obligations du 30 mars 1911. Cf. SCYBOZ et
GILLIERON, Code civil suisse et code des obligations annotés,
Payot, Lausanne, 1972, Partie II, p.19.
* 188 Cf.l' article 31 du
projet d'articles de la CDI.
* 189 « (L)a
responsabilité internationale est aujourd'hui multiforme et
comporterait, dans le cas général, cinq aspects
différents : maintien de l'obligation de respecter la règle
violée (article 29), cessation de la violation (article 30.1),
assurances et garanties de non-répétition (art. 30(2)),
réparation (art. 31) autorisation donnée à l'Etat
lésé d'adopter des contre-mesures (article 49). »,
cf. STERN B., « Le concept de préjudice juridique »,
précité note 184, p. 9.
* 190 V. COMBACAUD J. et
SUR S., Droit international public, précité note 128, p.
525 ; aussi CARREAU D., Droit international Public, Paris,
Pedone, 2004, pp. 476 et ss.
* 191 Arrêt du 13
Septembre 1928, CPJI, Série A, n°17, pp. 4-65.
* 192 Le droit
international reconnaît en effet le dommage moral depuis une sentence
arbitrale de 1928, rendue dans l'affaire dite des veuves du Lusitania entre
l'Allemagne et les USA, R.S.A. vol. VII, pp. 35-37.
* 193 Cf. article 34 du
projet d'articles de la CDI.
* 194 Cf. article 37 du
projet d'articles de la CDI. Cette constatation peut émaner de l'Etat
responsable lui-même, ou encore d'une instance internationale. C'est le
cas dans cette dernière hypothèse dans l'affaire du Rainbow
Warrior entre la France et la Nlle Zélande, point 8 de la sentence
arbitrale du 30 avril 1990. V. Revue Générale de Droit
International Public, 1990, p. 878 ; ou encore dans l'affaire du
mandat d'arrêt, en ligne
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgment/ccobe_cjudgment_20020214.PDF,
para. 75. (visité le 31 janvier 2006).
* 195 Cf. infra. le
paragraphe b) suivant.
* 196 Cf. l'article 41 du
projet d'articles de la CDI.
* 197 Cf. les articles
48(2) et 54 du projet d'articles de la CDI.
* 198 Cf. CIAMPI A.,
« The obligation to cooperate », précité note
105, p.1636.
* 199 Cf. UBEDA M.,
« Obligation de coopérer », in ASCENCIO H., DECAUX
E. et PELLET A. (dir.), Droit international pénal,
précité note 76, p. 954 ; aussi TRIFFTERER O.,
Commentary of the Rome Statute of the international Criminal Court :
Observer's notes article by article, précité note 104, p.
1068.
* 200 Il existait aussi la
notion de mesures de rétorsion. Elles sont observées par exemple
en cas de manquement à des règles de courtoisie internationale et
non des obligations juridiques. En outre, elles ne sont pas illicites à
la base contrairement aux mesures de représailles, qui sont des actions
illicites prises en réponse à des actes eux-mêmes
illicites. Sur la question des mesures de rétorsion, v. VERHOEVEN J.,
Droit International Public, Bruxelles, Larcier, 2000, p. 658.
* 201 En outre, l'article
48 semble limiter les actions des Etats autres que l'Etat lésé
(Cf. note 197). Cela peut s'expliquer par le fait que les contre-mesures sont
par nature des violations du droit, et il est logique que l'autorisation d'y
recourir soit accordée très restrictivement.
* 202 Cf. l'article 49(2) du
projet d'articles de la CDI.
* 203 Les conditions de
contre-mesures sont énumérées au chapitre 2 de la partie
III du projet d'articles de la CDI sur la responsabilité internationale
des Etats.
* 204 Cf. l'article 50 du
projet d'articles de la CDI.
* 205 Dans le cas
particulier de l'ONU, le recours au Conseil de sécurité par la
Cour en cas de non coopération, intervient lorsque la saisine
émane de ce dernier. C'est donc dans ces cas de saisine que le Conseil
pourra prendre des sanctions éventuelles (toujours sur la base du
chapitre VII de la Charte) contre l'Etat fautif, que celui-ci soit partie ou
non au Statut. Dans ces cas en effet, la distinction Etat partie et Etat non
partie est sans importance. Cependant, il peut tout aussi bien être
envisagé, lorsque la non coopération d'un Etat intervient dans
des situations ou entraîne la survenance de circonstances entrant dans le
champ du chapitre VII de la Charte, que le Conseil de sécurité
puisse intervenir directement sans être saisi par la Cour.
* 206 Entrée en
vigueur en 1964.
* 207V. sur la question des
immunités, VERHOEVEN J., Droit International Public,
précité note 203, pp. 736-746 ; FRULLI M., « Le
droit international et les obstacles à la mise en oeuvre de la
responsabilité pénale pour crimes internationaux », in
CASSESE A. et DELMAS-MARTY M. (dir.), Crimes internationaux et Juridictions
internationales, précité note 147, p. 253.
* 208 Cf. DOMINCE C.,
« Quelques observations sur l'immunité de juridiction
pénale de l'ancien chef d'Etat », in Revue
Générale de Droit International Public, Paris, Pedone, 1999,
p. 301.
* 209 Cf. la
résolution 95 (I) de l'AG de l'ONU du 11 décembre 1946.
* 210 Principe
n°3 : « Le fait que l'auteur d'un acte qui constitue un
crime de droit international a agi en qualité de chef d'Etat ou de
gouvernant ne dégage pas sa responsabilité en droit
international. ». Ibid.
* 211 Egalement
réaffirmé dans les statuts des tribunaux ad hoc pour
l'ex Yougoslavie (art. 7(2)) et pour le Rwanda (art. 6(2)), et dans plusieurs
de leur jurisprudence. Cf. l'arrêt du TPIY du 10 décembre 1998,
le procureur c/ Furundzija para.140 Cf. le site
http://www.un.org/icty/furundzija/trialc2/jugement/fur-tj981210f.pdf.
(Visité le 30 décembre 2005). De plus des tribunaux internes ont
reconnu une exception à l'immunité pénale internationale
des gouvernants lorsqu'il s'agit de crimes internationaux.
* 212 Article 98(1) du
Statut de Rome.
* 213Cf. FRULLI M.,
« Le droit international et les obstacles à la mise en oeuvre
de la responsabilité pénale pour crime
internationaux », précité note 210, pp. 234-235.
* 214 Cette renonciation
devrait être mise en oeuvre dans les lois d'adaptation du Statut au droit
interne que doivent adopter les Etats parties. Cet article 27 va cependant de
paire avec l'article 98 qui en atténue la portée. V. sur cet
aspect, GAETA P., « Official Capacity and Immunity », in
CASSESE A., GAETA P. et JONES J., International Criminal Law, A Commentary
of the Rome Statute for an International Criminal Court, vol. I,
précité note 105, pp. 992-999; aussi FRULLI M.,
« Le droit international et les obstacles à la mise en oeuvre
de la responsabilité pénale pour crime
internationaux », précité note 210, pp. 227-228.
* 215 Par exemple dans
l'affaire du général chilien Pinochet en 1998 le
bénéfice de l'immunité, d'abord reconnu par la haute cour
de justice anglaise lui a finalement été retiré par la
Chambre des Lords, Par contre dans celle du ministre congolais Yérodia
en 2002, le bénéfice de l'immunité a été la
raison invoquée pour décider de ne pas l'extrader devant la
juridiction belge qui le réclamait, position qui a même
été confirmée par la CIJ dans son arrêt du 14
février 2002. Pour des commentaires de ces deux décisions en
rapport avec les immunités, v. respectivement DOMINICE C.,
« Quelques observations sur l'immunité de juridiction
pénale de l'ancien chef d'Etat », précité note
211, pp. 297-308 ; COSNARD M., « Quelques observations sur les
décisions de la Chambre des Lords du 25 novembre 1998 et du 24 mars 1999
dans l'affaire Pinochet », in Revue Générale de
Droit International Public, précité note 211, pp.
309-328 et SASSÒLI M., « L'arrêt Yérodia,
quelques remarques sur une affaire au point de collision entre les deux couches
du droit international », in Revue Générale de
Droit Internationale Public, Paris, Pedone, 2002, pp. 791-818 ;
encore HENZELIN M.,, «La compétence pénale
universelle : une question non résolue par l'arrêt
Yerodia », ibid., pp. 819-854.
* 216 La Cour a en effet
affirmé que : « En quatrième lieu, un ministre
des affaires étrangères ou un ancien ministre des affaires
étrangères peut faire l'objet de poursuites pénales devant
certaines juridictions pénales internationales dès lors que
celles-ci sont compétentes. Le Tribunal pénal international pour
l'ex-Yougoslavie et le Tribunal pénal international pour le Rwanda,
établis par des résolutions du Conseil de sécurité
adoptées en application du chapitre VII de la Charte des Nations Unies,
ainsi que la future Cour pénale internationale instituée par la
convention de Rome de 1998, en sont des exemples. » V. en ligne
http://www.icj-cij.org/cijwww/cdocket/cCOBE/ccobejudgment/ccobe_cjudgment_20020214.PDF
, para. 61 (visité le 31 janvier 2006).
* 217 CAZALA J.,
« Est-il risqué pour les Etats de coopérer avec les
juridictions pénales internationales ? », in Revue de
Science Criminelle et de Droit pénal Comparé, (RSC),
(paris), 2003, pp. 721-732.
* 218 CEDH, Milosevic c/
Pays-Bas, décision du 19 mars 2002, req. n° 77631/1.
* 219 CAZALA J.,
« Est-il risqué pour les Etats de coopérer avec les
juridictions pénales internationales ? »,
précité note 220, p. 726.
* 220 Ibid.
* 221 La requête de
M. Milosevic a en effet été rejetée pour non
épuisement des voies de recours internes, par la Cour européenne.
* 222 Cf. l'article 90 du
Statut
* 223 Article 88 du
Statut.
* 224 Cf. l'article 17 du
Statut.
* 225 Pour un Etat partie
par exemple, la ratification vaut acceptation d'un tel contrôle de ses
tribunaux par la Cour, (Cf. LAUCCI C., « Compétence et
complémentarité dans le Statut de la future Cour Pénale
Internationale », précité note 54, p. 167) mais pas
forcément un accord sur une telle décision de la Cour. Le
problème est alors double pour un Etat non partie comme c'est le cas
pour le Soudan (développé plus loin), qui peut contester le
pouvoir de contrôle de la Cour et la décision qui constate
l'incapacité des tribunaux internes.
* 226 Le principe de
complémentarité est applicable pour les Etats parties au Statut,
ce qui n'est pas le cas du Soudan. De plus, ce n'est pas la Cour qui le
déclare dans l'incapacité d'exercer des poursuites mais une
commission extérieure à la Cour, même si cette
décision a été confirmée par elle (décision
qui lui permit de déclarer l'affaire recevable). Cependant la saisine de
la Cour par le Conseil de sécurité, qui met ce pays dans une
situation semblable à celle d'un Etat partie, et le contenu de la
décision de la commission d'enquête constituent des
éléments qui permettraient à la situation de ce pays
d'illustrer cette hypothèse de non coopération.
* 227 En effet, selon
l'article 13 de son Statut, la Cour peut être compétente
même sur le territoire d'un Etat non partie dès lors qu'elle est
saisie par le Conseil de sécurité des Nations Unies.
* 228 Cf. le Rapport de la
commission des Nations Unies au Darfour du 25 Janvier 2005 (S/2005/60). V.
http://www.un.org/News/dh/sudan/com_inq_darfur.pdf
(Visité le 30 décembre 2005).
* 229 Ce tribunal est par
ailleurs controversé au sein des acteurs de la crise notamment par les
mouvements rebelles. .
* 230 V. le
communiqué de presse du bureau du procureur de la CPI,
http://www.icc-cpi.int/cases.html.
(Visité le 05 octobre 2005).
* 231Cf.
http://www.sudan.gov.sd/akhbar.htm;
http://www.grioo.com/info4883.html
ou encore
http://www.aidh.org/darfur/actu2005.htm.
(Visités le 30 décembre 2005).
* 232 Le
Tribunal Spécial pour la Sierra
Leone (TSSL) a été créé par la
résolution
1315 du Conseil de Sécurité du 14 août 2000. Elle donna
mandat au Secrétaire Général des Nations Unies de
négocier un accord avec le gouvernement de la Sierra Leone pour la
création d'une juridiction mixte devant juger les atrocités
perpétrées dans ce pays. Cet accord intitulé
Accord
entre l'ONU et la Sierra Leone sur la création d'un Tribunal
spécial a été signé à Freetown le 16
janvier 2002. Le Parlement de la Sierra Leone a ratifié cet accord en
mars 2002. Le TSSL est compétent, selon son statut, pour juger ceux qui
portent la responsabilité des plus sérieuses violations du droit
humanitaire et des lois de la Sierra Leone commises sur le territoire du pays
depuis le 30 novembre 1996. Le TSSL est un tribunal pénal de juridiction
et de composition mixte, internationale et nationale. Il est compétent
pour juger les crimes contre l'humanité (art. 2 du statut), les
violations de l'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 et
à celles du Protocole additionnel 2 (art. 3 du statut), les autres
violations sérieuses du droit international humanitaire (art. 4 du
statut) mais aussi certains crimes prévus par le droit de la Sierra
Leone (art. 5 du statut).
* 233 Charles Taylor est en
effet accusé de crime de guerre et de crime contre l'humanité
commis durant le conflit en Sierra Leone. Cf. le site officiel du tribunal
spécial pour la Sierra Léone,
http://www.sc-sl.org/cases-other.html
. (Visité le 30 décembre 2005).
* 234 M. Taylor n'est plus
à la tête du Libéria et les actes qui lui sont
reprochés n'entrent pas en principe dans la catégorie des actes
officiels, donnant droit à l'immunité.
* 235 Le Nigéria
n'est pas directement lié par l'accord de création du TSSL et n'a
donc pas l'obligation de déférer M. Taylor devant ce tribunal.
Cependant, au regard de sa qualité de membre des Nations Unies, et de
ses obligations coutumières en matière de répression des
violations du droit humanitaire coutumier, une obligation d'extrader (ou alors
au moins de juger) M. Taylor pourrait être mise à sa charge.
* 236 Sur les
détails de cette affaire, Cf. supra. chapitre 2, section 2,
paragraphes 2-b.
* 237 Région de
l'est de la RDC qui est le théâtre de violents massacres depuis
1998.
* 238 V. en ligne,
http://www.afrique-asie.com/archives/2005/184jan/184rdc.htm
;
http://www.irmgt.com/pdf/Bemba%20Speech.pdf
(Visités le 29 décembre 2005).
* 239 Pour un aperçu
détaillé de la position américaine, v. SEWAL S. B. et
KAYSEN C., The United States and the International Criminal Court,
Lanham Boulder, New York Oxford, Rowman & Littlefield Publishers, 2000, 206
p.; LESNES C., « Les Etats-Unis durcissent leur campagne contre la
Cour Pénale Internationale », précité note
13.
* 240 Il s'agit de la
résolution 1422 (S/RES/1422/2002) adoptée le 12 juillet 2002 par
le Conseil de sécurité (v. sur le site :
http://www.un.org/french/docs/sc/2002/cs2002.htm
Visité le 29 décembre 2005). Cette résolution a
été renouvelée sous le nom de résolution 1487
(S/RES/2003) le 12 juin 2003 (
http://www.un.org/french/docs/sc/2003/cs2003.htm
(Visité le 29 décembre 2005), mais ne l'a pas été
en 2004.
* 241 En vertu de l'article
98, la Cour se refuse à faire exécuter par un Etat une demande
qui lui ferait violer ses obligations envers un autre Etat en matière
d'immunité. L'accord d'immunité constituerait donc la base de
cette obligation de l'Etat qui ne lui permet pas d'exécuter la demande
de la Cour.
* 242 Pour un aperçu
des Etats signataires d' accord bilatéraux d'immunité avec
les Etats-Unis, V. BOUQUEMONT Cl., La Cour pénale internationale et
les Etats-Unis, Paris, L'Harmattan, 2003, p. 110.
* 243 V. un exemple
d'accord proposé par les Etats-Unis en ligne, exemple de l'accord
signé par le Timor Oriental,
http://www.hrw.org/campaigns/icc/docs/bilateralagreements-fr.pdf
(Visité le 29 décembre 2005).
* 244 Certains de ces
accords proposent en effet que les Etats-Unis s'engagent à leur tour
à ne pas transférer les ressortissants de l'Etat co-signataire.
Si ce dernier est partie au Statut de Rome, ce sera comme s'il retirait la
compétence de la Cour à son égard, chose qui est tout
à fait contradictoire. Cf. le site, ibid.
* 245 Cf. les articles 1 et 2
du projet de la CDI.
* 246 Article 97 du Statut.
* 247 Le paragraphe 5 de
l'article 72 précise en effet dans cette hypothèse, que l'Etat
« prend (...) toutes les mesures raisonnablement possibles en vue de
trouver une solution par la concertation », en outre le même
paragraphe propose de manière non limitative, en ses lettres a), b), c),
et d) des solutions en vue de réaliser le transfert des informations
requises.
* 248 DAVID E.,
« La responsabilité de l'Etat pour absence de
coopération », in ASCENCIO H., DECAUX E. et PELLET A. (dir.),
Droit international pénal, précité note 76, p.
132.
* 249 En l'occurrence,
l'Etat spécialement atteint par les conséquences de la non
coopération. Pourrait-on en certaines situations être en
présence de plusieurs Etats lésés ? C'est une
hypothèse plausible dans la mesure où des affaires pourraient
impliquées plusieurs Etats ayant un réel intérêt au
dénouement d'une enquête, en plus de l'intérêt des
tous les membres de voir la Cour accomplir sa mission de répression des
crimes internationaux.
* 250 Cf. les règles
générales sur la responsabilité des Etats,
développées dans le paragraphe 1 de la présente section.
* 251 Cf. SWART B. et
SLUITER G., « The International Criminal Court and international
criminal cooperation », in VON HEBEL H., LAMMERS J. et SCHUKKING J.,
Reflections on the International Criminal Court, The Hague, TMC Asser
Press, 1999, p.123; CIAMPI A., « The obligation to
cooperate », in CASSESE A., GAETA P. ET JONES J., International
Criminal Law, A Commentary of the Rome Statute for an International Criminal
Court (vol.II), Oxford, Oxford University Press, 2001, p. 1636.
Dans le cadre de la CPI, les Etats sont donc
déchargés de la preuve de la violation, au contraire de ce qui se
passe par exemple devant la CIJ qui apprécie les allégations des
Etats qui invoquent la responsabilité par une procédure
judiciaire. C'est la Cour qui constate directement l'existence d'une violation,
décision qui permet de mettre en oeuvre la responsabilité de
l'Etat visé.
* 252 De plus,
l'impossibilité de satisfaire une demande de coopération de la
Cour n'est pas automatiquement constitutive d'un cas de non coopération,
et en outre des procédures sont prévues (par exemple aux art. 72
et. 97) qui peuvent permettre une solution entre la Cour et l'Etat qui ne peut
(ou ne veut) exécuter une demande de coopération. Toutes ces
circonstances doivent donc entrées en compte dans l'appréciation
d'un manque de coopération. La Cour est en conséquence la mieux
placée pour cette opération.
* 253 « The Court
should use this possibility only in severe cases (...) », cf. TRIFFTERER
O., «Implications of ratification and implementation processes», in
KREB C. et LATTANZI F., The Rome Statute and Domestic Legal Orders,
Baden Baden, Nomos Verlagsgesellschaft, il Sirente, 2000, p. 25.
* 254 V. supra, p. 63.
* 255 C'est l'exemple de
l'Union Européenne, avec la résolution du parlement
européen sur la situation au soudan du 09 mai 2005, qui recommande de
conditionner l'aide européenne au Soudan aux efforts de ce pays dans la
recherche de la paix et la coopération avec la CPI. Cf. en ligne
http://www.vigilsd.org/resolut/parleuro.htm
, para. 12 (Visité le 31 janvier 2006).
* 256 C'est par exemple le
cas des résolutions prises par le Conseil de sécurité lors
de la guerre du Golf. Notamment les résolutions 678 du 29 novembre 1990
et 687 du 03 avril 1991. Cf. le site
http://www.un.org/french/documents/scres.htm
(Visité le 30 décembre 2005).
* 257 V. SPINEDI M.,
Les
crimes internationaux de l'Etat dans les travaux de codification de la
responsabilité des Etats entrepris par les Nations
Unies, San Domenico di Fiesole, Badia Fiesolana, 1984, pp. 45 et ss ;
et plus récemment le premier rapport de la CDI sur la
responsabilité des Etats de 1998, sur le site
http://www.onu.org/temas/derint/comision/acn4490a2r1.pdf
(visité le 30 Décembre 2005). En outre, le fait que le projet
d'articles de la CDI sur la responsabilité internationale des Etats dans
sa version adoptée en 2001, emploie dans ses dispositions l'expression
« fait internationalement illicite » en lieu et place de
«crime» (précité note 170), marque le désir de
la CDI de faire la distinction.
* 258 Cf. arrêt de la
Chambre d'appel du TPIY, du 29 octobre 1997, le procureur c/ Tihomir Blaskic,
sur le site
http://www.un.org/icty/blaskic/appeal/decision-f/71029JT3.html
(visité le 30 décembre 2005). Le soulignement est de nous.
* 259 Ce pouvoir ne peut
être impliqué par les fonctions de la Cour. Pour des
détails sur la théorie des compétences implicites, v. DIEZ
DE VELASCO VALLEJO M., Les Organisations Internationales, Paris,
Economica, 2002, pp. 109-111 ; N'GUYEN Q. D., DAILLIER P. ET PELLET A.,
Droit international public, précité note 66, pp. 601 et
ss.
* 260 Article 87(7) du
Statut.
* 261 Cf.
http://www.icc-cpi.int/asp.html
(Visité le 30 décembre 2005).
* 262 Cf.
http://www.icc-cpi.int/library/asp/ICC-ASP-Rules_of_Procedure_French.pdf
(Visité le 30 décembre 2005).
* 263 Cf. l'article
123(1).
* 264 Cf. l'article
87(5.b).
* 265 Cf. l'article 112(8)
du Statut.
* 266 Certains auteurs sont
assez sceptiques. Pour Cyril Laucci par exemple, « si un pouvoir de
sanction avait été souhaité, il aurait été
prévu ». V. LAUCCI C., « Compétence et
complémentarité dans le Statut de la future Cour Pénale
Internationale », précité note 54, p. 143.
* 267 Les décisions
sont prises à la majorité qualifiée des deux tiers des
membres. Cf. article 112(7) du Statut. V aussi Règle 60 du
Règlement intérieur de l'ASP.
* 268 Article 112(6). Il
est cependant prévu au même article des sessions extraordinaires
en cas de besoin.
* 269 Cela fait dire que
les règles régissant la Cour ne sont pas autonomes du point de
vue des conséquences de leur violation, dans la mesure où il est
nécessaire de faire intervenir des règles du droit international
général pour trouver une solution à la question des
réponses à un manquement aux obligations envers la Cour.
* 270Les Etats parties
agiraient ici en qualité d'Etats autres que lésés tels
qu'évoqués dans la section précédente (p. 61). Il
s'agirait alors de mesures licites, n'utilisant pas le recours à la
force, comme les contraintes économiques, les embargos, ou encore les
contraintes diplomatiques.
* 271 Cf. RINOLDI D. et
PARISI N., « International co-operation and judicial assistance
between the International Criminal Court and States parties », in
LATTANZI F. et SCHABAS W., Essays on the Rome Statute of the International
Criminal Court, Vol. I, Il sirente, 2000, pp. 373-374.
* 272 V. supra, p. 16.
* 273Cf. l'article 3 de
l'accord (ICC-ASP/3/Res.1, cf. le site internet
http://www.icc-cpi.int/library/asp/ICC-ASP3-Res1_French.pdf
, visité le 30 décembre 2005). Cet accord a été
signé entre le SG des Nations Unies et le président de la Cour et
est entré en vigueur le 04 octobre 2004, après avoir
été préalablement adopté par l'AG de l'ONU et
l'ASP.
* 274 Cf. l'article 2-5.
* 275 V. le commentaire de
l'article 25 de la Charte. Cf., COT J.P., PELLET A. et FORTEAU M., La
Charte des Nations Unies, Commentaire article par article, Paris,
Economica, 3è éd., Vol.1, p. 909.
* 276 Dans les autres cas
la Cour en réfère à l'ASP. En vertu de l'article 87-7 du
Statut.
* 277 C'est-à-dire
les cas qui entrent dans le champ du Chapitre VII de la Charte.
* 278 Les années
1990 ont ainsi été qualifiées de
« décennies des sanctions », Cf.
COT J.P., PELLET A. et FORTEAU M., La Charte des Nations Unies,
Commentaire article par article, précité note 278, p.
1195.
* 279 Il convient d'ajouter
aussi que la CPI n'est pas la première juridiction internationale
à faire référence au Conseil de sécurité.
Ainsi, en vertu de la Charte (art. 94), un Etat peut recourir au Conseil pour
obtenir de la partie adverse l'exécution de la décision rendue
par la Cour internationale de justice à son encontre. Les circonstances
sont certes différentes (La CIJ en un organe des NU, et c'est un Etat
qui demande l'intervention du Conseil pour l'exécution d'un
arrêt), mais ces deux situations se recoupent en ce sens que le Conseil
est sollicité pour permettre le fonctionnement efficace d'une
juridiction auquel l'application effective des décisions participe
grandement.
* 280 Les discussions en
cours pour la réforme de l'ONU et surtout du Conseil de
sécurité traduisent les critiques qui se font de plus en plus
entendre sur l'organisation de cette instance.
* 281 Sur la question
générale des sanctions prises par le Conseil de
sécurité, V. notamment RUIZ FABRI H., SICILIANOS L.-A.., SOREL
J.-M., L'effectivité des organisations internationales,
Sakkoulas-Pedone, Athènes Paris, 2000, pp. 9-58. ; Commentaires du
chapitre VII de la Charte, COT J.P., PELLET A. et FORTEAU M., La Charte des
Nations Unies, Commentaire article par article, précité note
278, pp. 1131 et ss.
* 282 Cette question a
été évoquée dans une décision rendue par le
tribunal pour l'ex-Yougoslavie. Ce dernier a affirmé dans l'affaire
Blaskic que « la détermination formelle du tribunal
international ne doit comprendre aucune recommandation ou suggestion relative
aux mesures que pourrait prendre le Conseil de sécurité suite
à cette détermination. » Cf. arrêt de la Chambre
d'appel, le procureur c/ Tihomir Blaskic, Affaire N° IT-95-14-AR, 29 oct.
1997, para. 36, en ligne
http://www.un.org/icty/blaskic/appeal/decision-f/71029JT3.html
(Visité le 30 décembre 2005).
* 283 Dans la mesure
où cette intervention se présente comme une continuité de
sa décision de saisir la Cour, décision qui est intervenue dans
des circonstances qui ont justifié une référence au
chapitre VII.
* 284 Cela a
été reconnu aussi par le tribunal pénal international pour
l'ex-Yougoslavie dans l'affaire Tadic, ce tribunal affirmait en effet que
« Une fois que le Conseil de sécurité décide
qu'une situation particulière constitue une menace contre la paix ou
qu'il y a rupture de la paix ou acte d'agression, il est doté d'un large
pouvoir discrétionnaire pour choisir son type d'action
(...) », Cf. le procureur c/ Dusko Tadic, Chambre d'appel,
arrêt du 2 oct. 1995, § 31.
http://www.un.org/icty/tadic/appeal/decision-f/51002JN3.htm
. (Visité le 30 décembre 2005).
* 285 Article 41 de la
Charte.
* 286 Cf. l'article 42 de
la Charte.
* 287 Par les
résolutions 808 de 1993 et 955 de 1994, prises sur la base du chapitre
VII.
* 288 Le programme
pétrole contre nourriture a été mis en place par la
résolution 986 du 14 avril 1995.
* 289 Cf. la
résolution 678 du 29 novembre 1990, para 2, dans le cadre de la
première crise du Golf. (Cf. le site
http://www.un.org/french/documents/sc/res/1990/cs90.htm
visité le 30 décembre 2005).
* 290Cf. le site
http://www.un.org/french/docs/sc/1995/95s1019.htm
(Visité le 05 octobre 2005). Dans cette résolution le Conseil
s'est contenté de poser des exigences sans adopter de mesures
coercitives pour en assurer l'application.
* 291 Résolution
1207 du 17 novembre 1998. Cf. le site
http://www.un.org/french/docs/sc/1998/98s1207.htm
. (Visité le 30 décembre 2005).
* 292 La naissance de la
Cour en est la preuve irréfutable.
* 293 Il a aussi
été constaté que les Etats constituent en même temps
un des principaux obstacles du fonctionnement des juridictions pénales
internationales qui ont la charge de faire appliquer ce droit.
* 294 Aussi bien et en
premier lieu sur le plan interne.
* 295 Cf. SASSÒLI
M., « L'arrêt Yérodia, quelques remarques sur une
affaire au point de collision entre les deux couches du droit
international », précité note 218, p. 792.
* 296 Il est difficile
à ce stade de faire une appréciation objective de ce que la Cour
a déjà entrepris comme enquête. Le fait de leur
déclenchement est toutefois en lui-même un point positif pour ses
organes.
* 297 En tête
desquels les Etats-Unis, la Chine et Israël.
* 298 Toutes les affaires,
d'où qu'elles viennent passent en effet par son bureau.
* 299 L'envers de cette
solution est que malheureusement les grandes puissances ne risquent pas
d'être beaucoup inquiétées.
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