Etude de la communication-marketing des produits agricoles. Cas du trafic de cacao en territoire de Benipar Delphin MBUSA MUPANDA Université officielle de Semuliki (UOS) - Licence 2021 |
INTRODUCTION GENERALE0.1. ETAT DE LA QUESTIONL'étude sur les produits agricoles a intéressé bon nombre de chercheurs scientifiques. L'agriculture est essentiellement vivrière, mais il existe aussi une agriculture d'exportation comprenant le café, cacao, chouchou, le bois, huile de palme1(*),... NZIAVAKE MWENGE Jeanny, dans son travail intitulé « Analyse de l'évolution de l'exportation de cacao. Cas de la société Esco-Kivu », a voulu connaitre s'il existe une relation entre la quantité produite du cacao et la quantité exportée ou si la production et l'exportation du cacao en territoire et ville de Beni connaissent une pente positive ou une croissance en fonction du temps. Après analyse, il a conclu qu'il y a une relation positive entre la quantité produite du cacao et celle exportée et que la production de cacao en territoire et ville de Beni connait une croissance de 1,79 Kg de quantité produite qui s'ajoute sur l'exportation annuellement2(*). KANYAMANDA MULWANA Joël, lui, a dans son sujet intitulé « Choix de la production agroindustrielle entre le café et le cacao enregistrés à l'ONAPAC (ONC a l'époque) de 2008 à 2011 », savoir si la variation productive de ces deux produits éclaire le choix du producteur d'un produit au détriment d'un autre. Après analyse, il a conclu que la variation productive reflète le choix plus penché sur le cacao que sur le café pour des raisons de rentabilité et des maladies attaquant le second3(*). Quant à MUHINDO BARAKA, dans le travail intitulé « La contribution de la culture du cacao au développement socio-économique de la population du secteur de Beni-Mbau », a voulu savoir si la production agricole issue de la culture de cacao permet-elle l'augmentation de revenu de la population et comment cette dernière apprécie cette culture. Il a conclu que la culture de cacao contribue au développement socio-économique de la population en une moyenne de 300 dollars américains et que ce produit est apprécié par 68% de la population du secteur Beni-Mbau. Contrairement à ces travaux des prédécesseurs, dans notre sujet intitulé « Etude de la communication-marketing des produits agricoles, cas du trafic de cacao en territoire de Beni », nous voulons étudier les facteurs marketing qui influencent la décision du vendeur ou de l'acheteur devant un produit ou un service dans le domaine de la commercialisation des fèves de cacao. Dans le cas échéant, nous étudions le prix comme facteur de la communication-marketing, qui a toujours présider dans la décision des vendeurs du cacao, se trouvant le long de la frontière entre la RDC et l'Ouganda en chefferie de Watalinga. Car il se peut que l'instabilité et la non-conformité du prix du cacao, l'absence de l'esprit coopératif et le facteur temporel dans le processus de vente influencent les vendeurs congolais, essentiellement des cultivateurs et des petits vendeurs vers le marché florissant du cacao de l'Ouganda. Depuis plusieurs dizaines d'années, le commerce de cacao connaît un Boom économique4(*)significatif, et est devenue une véritable source de développement économique de plusieurs pays à travers le monde. Cette culture occupe des superficies importantes en Afrique centrale et en Afrique de l'Ouest. Elle occupe environs 10% des terres agricoles. L'ensemble des superficies cacaoyères à l'intérieur de quatre principaux pays producteurs mondiaux qui se trouvent dans la région a cumulativement évolué5(*). Le cacao est l'un des produits agricoles les plus cultivés en RDC et dans la partie Grand nord de la province du Nord-Kivu ; il implique ainsi des anciens cultivateurs du café qui ont vu leurs champs consumés par la trachéomycose. Très vite, le cacao a intéressé aussi des nouveaux agriculteurs qui y ont investi des millions des francs congolais dans sa culture ainsi que dans son commerce. Etant d'accord avec la citation « planter du cacao, c'est semer de la poussière d'or pour récolter des lingots6(*) », de l'écrivain Jorge Amado, obtenir un champ de cacao dans les zones précitées, signifie avoir une activité agricole stable et prospère. Car, de nombreuses familles dépendent largement de ce produit d'agroforesterie qui semble gagner du terrain. La présence du cacao dans les villages d'Ituri et du Nord-Kivu est perçue comme un facteur contribuant à l'économie du pays en général et de la population locale en particulier. Le cacao de la RDC parait particulièrement intéresser les acteurs économiques étrangers, notamment les Ougandais, qui investissent des sommes colossaux dans les congolais et achètent ce produit pour aller les vendre sur des marchés concurrentiels internationaux au nom de leur pays. Par conséquent, cette économie a manifestement du mal à progresser aux bénéfices des Congolais pour des multiples raisons, notamment l'instabilité et la non-conformité du prix de la fève de cacao. Alors que le Kilogramme coute 1.7 dollars américains en RDC, en Ouganda ça se vend officiellement en 2 dollars américains et plus. Mais aussi, le prix du cacao varie selon la qualité du produit, les saisons de récolte, les milieux et les acteurs intervenants dans le circuit de son trafic dont la différence a toujours été de 0,2 et 0.3 dollars de gain. L'absence de l'esprit coopératif dû à l'insuffisance des moyens financiers en RDC donnerait brèche à l'Ouganda par le fait que ceux qui veulent adhérer aux coopératives en RDC sont obligés d'avoir au minimum 100 kilogrammes de fèves de cacao, contrairement en Ouganda où il y a bon nombre de coopératives, qui sont à la fois coopératives des crédits agricoles. Elles octroient des crédits à leurs membres, remboursables par tranche après un long moment d'exploitation. En plus, elles ont fixé les conditions d'adhésion à un minimum de 10 kilogrammes de cacao seulement. Cette stratégie marketing attire des producteurs de cacao vers l'Ouganda, permettant alors à plusieurs opérateurs économiques ougandais de financer la production du cacao sur le sol congolais et dont l'évacuation se fait malheureusement d'une manière frauduleuse. En plus, les trafiquants ougandais achèteraient des produits sans tenir compte des conditions requises de la certification, comme c'est le cas pour certaines entreprises congolaises d'exportation, ce qui est un gain temporel pour les cultivateurs. Mais aussi, les entités situées à la frontière avec l'Ouganda, comme la chefferie des Watalinga utilisent des Schellings ougandais comme monnaie, d'où nombreux habitants ne connaissent même pas la monnaie de leur pays, le franc congolais. Cette politique commerciale a poussé plusieurs congolais à adhérer à des coopératives Ougandaises, tout en exerçant des activités en RD Congo. Et ce cacao provenant du sol congolais, une fois traverser la frontière, est considéré comme une production ougandaise. Certains services basés à différentes pistes à la frontière s'emploient à faciliter cette manoeuvre. Cette absence de traçabilité dans le trafic économique du cacao, promeut considérablement l'économie Ougandaise jusqu'à lui faire octroyer une classification au rang de pays producteur de cacao, au désavantage des congolais qui pourtant en bénéficieraient de droit. En effet, sur la liste de 59 pays producteurs de cacao au monde les 3 dernières décennies, la Côte d'Ivoire est classée à la première position, suivie du Ghana, l'Indonésie, le Nigeria et l'Équateur. La RDC elle, est classée à la 22ème position, neuf fois derrière l'Ouganda. Mais aussi à la 10ème position en Afrique, 4 fois derrière l'Ouganda. En outre, la production de cacao par la RDC a vertigineusement chuté (6 582 tonnes en 2000, 5 431 en 2010 et 12 000 tonnes en 2020) pendant cette période. En la même période, elle a haussé vertigineusement en Ouganda (3 950 en 2000, 15 000 en 2010 et 35 000 en 2020). Miracle ou logique ? En plus, cette réalité corrobore avec la période de l'instabilité de la situation sécuritaire dans la région de Beni et Ituri, aussi les zones à la forte culture de cacao en RDC. Cet écart des chiffres attire l'attention et fait croire que ces statistiques sont parmi les preuves éloquentes de la contrebande et la fraude de cacao d'Ouganda au détriment de la RDC7(*). Ceci suite à plusieurs facteurs qui poussent les producteurs et fournisseurs congolais de cacao de développer des relations intenses avec l'Ouganda. C'est notamment l'instabilité de la situation sécuritaire qui bénéficierait aussi au voisin de la RDC (Ouganda). Ceci serait aussi la conséquence de l'absence ou l'inadaptation de la communication-marketing, établie par l'Etat congolais, susceptibles de retenir les acteurs intervenants dans l'exportation de cacao, de contribuer à l'amélioration du circuit économique dans le domaine de cacao. En conséquence, des subventions de la part du marché du cacao échappent à la RDC, car n'étant pas reconnu comme son producteur. Des centaines de tonnes de cacao seraient exportées frauduleusement en Ouganda avec la facilitation de certains complices. Ce marché contourne la légalité régissant les membres de la Fédération des Entreprises du Congo (FEC) et de l'Association des exportateurs de café et cacao (ASECAF) congolais8(*). L'on peut se souvenir qu'en juin 2022, le chef de l'Etat congolais Félix Tshisekedi en appelait à l'urgence d'assainir le climat des affaires en le rendant sain, exempt de toute tracasserie administrative et les respects stricts des lois en matière agricole. Ce rappel à l'ordre faisait suite aux informations en sa possession faisant état d'une série de comportement arbitraire de la part de l'Office National des Produits Agricoles du Congo (ONAPAC) dans la perception des taxes sur l'exportation du café et du cacao dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri, en violation des lois et règlementations en matière d'exportation des produits agricoles9(*). En fait, l'Etat congolais a règlementé en libéralisant le secteur de cacao à cause de son influence de plus en plus croissante. Pour être un acheteur du cacao, il y a une série d'exigence qu'on doit remplir. Du champ au marché mondial, le législateur congolais a mis en place une gestion tracée du cacao et a prévu l'encadrement des agriculteurs10(*) mais qui semble être moins suffisante. L'origine du cacao dans l'est de la RDC semble liée aux conflits armés et dont même son essor ou mieux son apogée est malheureusement aussi accompagnée des conflits armés très endémiques dans sa zone d'exploitation11(*). Malgré les conflits, dont celui des forces armées de la RDC et les forces démocratiques alliées (ADF), ainsi que d'autres milices, comme les Mai Mai, les Sangabalende... qui complexifient le trafic de cacao, ce produit continue à être vendu à l'extérieur du pays sans aucune mesure suffisante de traçabilité. Le cacao de Beni tout comme d'autres zones, est vendu sans connaitre son possesseur ou son origine, d'où, ne vend le cacao que celui qui le possède. Pour mieux cerner la problématique de cette étude, nous nous interrogeons sur les aspects suivants : Comment les facteurs de la communication markerting influent-ils sur la production et la commercialisation du cacao du territoire de Beni ? Et quels sont ses éléments susceptibles d'influencer et manipuler ladite communication commerciale du produit sus-évoqué ? Voilà la préoccupation mobilisatrice de la présente investigation. * 1Arrêté ministériel n°085/CAB/MIN/AGRIPEL/ 2016 du 1er avril 2016 fixant les normes de conditionnement des produits agricoles à l'exportation et de leurs dérivés, Consulté le 20 juillet 2022 * 2 NZIAVAKE MWENGE Jeanny, Analyse de l'évolution de l`exportation de cacao, TFC, UOS, F SE, 2008-2009 * 3 KANYAMANDA MULWANA Joël, Choix de la production agro-industrielle entre le café et le cacao enregistré à l'ONC /Beni mémoire inédit, UOS, FSE, 2011-2012 * 4 RUF François, Boom et crise du cacao, les vertiges de l'or brun, CIRAD-SAR, Ministère de la coopération et éditions KARTHALA, 1995, p.14 * 5SONWADenis J. Initiatives endogènes d'intensification et de diversification à l'intérieur des agro forêts-cacao au Sud-Cameroun: leçons pour une foresterie participative dans les systèmes à base de cultures pérennes en Afrique centrale et de l'Ouest, lu sur https://www.fao.org/3/Y4807B/Y4807B42.pdf, consulté le 15 juin 2022 à 14h20 * 6 Citation de Tocacia Grande (Traduction Stok, 1985, p.55). Voir également l'introduction à la bibliographie sur le cacao au Brésil (Rufet al. 1994) * 7ATLASOCIO, "Cocoa (beans)", Food and Agriculture Organization, United Nations, sur https://atlasocio.com/classements/economie/agriculture/classement-etats-par-production-cacao-feves-monde.php, consulté le 23 juillet 2022 * 8 KAYEMBE Agnès, RDC : le Directeur général de l'ONAPAC dénonce l'exportation frauduleuse de plus 600 tonnes de cacao vers l'Ouganda, https://zoom-eco.net/a-la-une/rdc-le-directeur-general-de-lonapac-denonce-lexportation-frauduleuse-de-plus-600-tonnes-de-cacao-vers-louganda , consulté le 20 juillet 2022* 9Journal Top Congo du 18 juin 2022, capté à 20 heures * 10Arrêté ministériel n°085/CAB/MIN/AGRIPEL/ 2016 du 1er avril 2016 fixant les normes de conditionnement des produits agricoles à l'exportation et de leurs dérivés * 11 Entretien avec le chef des villages GAWA, Gawa le 4 novembre 2020 |
|