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Sécurité et liberté chez Thomas Hobbes


par Jacob Koara
Université Joseph Ki Zerbo  - Master 2022
  

Disponible en mode multipage

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MÉMOIRE DE MASTER

SÉCURITÉ ET LIBERTÉ CHEZ THOMAS HOBBES

Thème :

Présenté et soutenue publiquement par : Jacob KOARA

Le 05 Mars 2022 à 10h devant le jury composé de :

M. Georges Professeur Titulaire Université Joseph Ki-Zerbo Président

ZONGO

M. Mahamadé Professeur Titulaire Université Joseph Ki-Zerbo Directeur

SAVADOGO

M. Rodrigue Maître Assistant Université Norbert Zongo Co-directeur

W.SAWADOGO

M. Gaoussou Maître de Conférence Université Joseph Ki-Zerbo Membre

OUEDRAOGO

UNIVERSITÉ JOSEPH KI-ZERBO

************

UNITÉ DE FORMATION ET DE RECHERCHE

EN SCIENCES HUMAINES

************

DÉPARTEMENT DE PHILOSOPHIE

ET DE PSYCHOLOGIE

*************

Filière : Philosophie

Option : Histoire de la philosophie et

philosophie pratique

MÉMOIRE DE MASTER 

SÉCURITÉ ET LIBERTÉ CHEZ THOMAS HOBBES

Thème :

Présenté et soutenue publiquement par : Jacob KOARA

Le 05 Mars 2022 à 10h devant le jury composé de :

M. Georges Professeur Titulaire Université Joseph Ki-Zerbo Président

ZONGO

M. Mahamadé Professeur Titulaire Université Joseph Ki-Zerbo Directeur

SAVADOGO

M. Rodrigue Maître Assistant Université Norbert Zongo Co-directeur

W.SAWADOGO

M. Gaoussou Maître de Conférence Université Joseph Ki-Zerbo Membre

OUEDRAOGO

Présenté et soutenu par :

Jacob KOARA

Directeur :Codirecteur :

M.Mahamadé SAVADOGO M. Rodrigue W.SAWADOGO

Professeur Titulaire Maître Assistant

Université Joseph Ki-Zerbo Université Norbert Zongo

Année académique : 2019-2020

SÉCURITÉ ET LIBERTÉ CHEZ THOMAS HOBBES

SOMMAIRE

SOMMAIRE I

DÉDICACES IV

REMERCIEMENTS V

RÉSUMÉ : VI

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIÈRE PARTIE : 6

HOBBES : UNE NOUVELLE GRILLE D'INTELLIGIBILITÉ DE LA POLITIQUE 6

CHAPITRE I : UNE APPROCHE SCIENTIFIQUE DU POUVOIR POLITIQUE CHEZ HOBBES 8

CHAPITRE II : DE L'ÉTAT DE NATURE AU CONTRAT POLITIQUE : UNE ANTHROPOLOGIE PESSIMISTE AU FONDEMENT DU CONTRAT POLITIQUE 22

DEUXIÈME PARTIE : 35

UNE DIALECTIQUE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA LIBERTÉ DANS LE HOBBISME POLITIQUE 35

CHAPITRE III : LA SPÉCIFICITÉ DE L'APPROCHE HOBBESIENNE DES CONCEPTS DE SECURITÉ ET DE LIBERTÉ 37

CHAPITRE IV : LE SENS DE LA SECURITÉ ET DE LA LIBERTÉ POUR L'ÉTAT HOBBESIEN 44

TROISIÈME PARTIE : 53

UNE LECTURE CRITIQUE DU HOBBISME POLITIQUE À PARTIR DE SON APPLICATION DANS LA QUÊTE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA LIBERTÉ 53

CHAPITRE V : HOBBES, UN PENSEUR LIBERTICIDE 55

CHAPITRE VI : LE HOBBISME POLITIQUE COMME CONSOLIDATION DES DROITS DE L'HOMME EN MATIÈRE DE POLITIQUE SÉCURITAIRE 62

CONCLUSION GÉNÉRALE 75

Index rerum 78

Index nominum 80

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES : 81

TABLE DES MATIÈRES 87

DÉDICACES

À KOARA Sibrade Jean-Paul, mon père.

À nos Forces de Défense et de Sécurité (FDS).

À toutes les victimes de la violence terroriste au Burkina Faso et à travers le monde.

REMERCIEMENTS

Nous voudrions profiter de cette page de remerciements pour rendre nos hommages à tous ceux qui ont contribué, d'une manière ou d'une autre, à la réalisation de ce Mémoire.

En premier lieu, noustenons à manifester nos vifs et déférents remerciements au Professeur Mahamadé SAVADOGO et au Docteur Rodrigue W. SAWADOGO. Nous leur sommes reconnaissants, d'une part, pour la confiance et la considération qu'ils ont bien voulu nous accorder en acceptant de codiriger ce Mémoire ; et d'autre part, pour leurs constantes disponibilités et leurs encouragements sans lesquels ce travail n'aurait pas abouti.

Nous remercions également le Professeur Jacques NANEMA, surtout pour sa disponibilité, ses précieux conseils et pour son grand humanisme. Notre gratitude lui est acquise pour nous avoir grandement ouvert sa bibliothèque personnelle.

Nous voudrions adresser un remerciement particulier au Docteur Séa Frédéric PLÉHIA, Enseignant-Chercheur à l'Université Alassane OUATTARA de Bouaké qui nous aura inoculé, depuis le lycée, le virus des belles lettres et nous aura donné en legs sa passion pour la recherche.

Nous exprimons notre profonde gratitude et nos sincères remerciements à nos collègues, à nos amis, et à tous nos condisciples du Département de philosophie qui ont lu notre texte aux différents stades de son élaboration, parfois à plusieurs reprises, et nous ont gratifié en retour de critiques et de conseils fort utiles. Infiniment merci pour leurs disponibilités, pour les échanges fructueux, et leurs encouragements.

Nos remerciements vont également à Monsieur Adama BAYALA pour les conseils éclairés et les encouragements qu'il n'a cessé de nous prodiguer tout au long de ce travail.

Enfin, nous exprimons toute notre gratitude à nos parents pour leurs soutiens financiers, matériels et psychologiques.

RÉSUMÉ :

Comment assurer la sécurité collective sans empiéter sur les libertés individuelles et collectives ? Tel est le problème qui nous auraconduit à la formulation et à l'analyse du sujet intitulé : Sécurité et liberté chez Thomas Hobbes. L'hypothèse qui aura sous-tendu l'analyse est que le hobbisme politique est une propédeutique à une philosophie soucieuse des droits humains notamment en matière de politique sécuritaire. Cependant, quêter la solution du problème susmentionné à partir du hobbisme politique peut sembler paradoxal voire scandaleux quand on sait que le nom de ce penseur a fait son intrusion dans l'histoire de la philosophie politique comme un penseur liberticide. Aussi, les motifs qui nous ont orienté vers Thomas Hobbes ont été exposés dans l'introduction. Après cela, pour résoudre le problème, le travail s'est organisé autour de trois méthodes : historique, comparative et herméneutique. Cela a conduit, d'abord, à montrer la révolution opérée par Thomas Hobbes en philosophie politique ; de là nous sommes passé à l'analyse de la relation dialectique qui existe entre sécurité et liberté dans le hobbisme politique ; et nous avons terminé par la critique de la pensée hobbesienne. Ce procédé a permis de vérifier et de nous conforter dans notre hypothèse de départ qui était que le hobbisme politique est une philosophie qui opère un aménagement harmonieux entre sécurité et liberté. Il est peut-être temps de voir en cette philosophie une source à laquelle pourrait s'abreuver les États soucieux des droits civiques dans leur quête sécuritaire.

MOTS CLÉS : Absolutisme - Conservation de soi - Droits de l'Homme - Hobbisme politique - Léviathan - Liberté - Sécurité.

ABSTRACT:

How to ensure collective security without encroaching on individual and collective freedoms?This is the problem that will have led us to the formulation and analysis of the subject entitled: Security and freedom in Thomas Hobbes. The hypothesis underlying the analysis is that political hobbism is a foundation for a philosophy that cares about human rights, particularly in matters of security policy. However, to find the solution of the aforementioned problem on the basis of political hobbism may seem paradoxical or even scandalous when we consider that the name of this thinker has made its intrusion into the history of political philosophy as a liberticidal thinker. Also, the motives which directed us to Thomas Hobbes were set out in the introduction. After that, to solve the problem, the work was organized around three methods: historical, comparative and hermeneutical. This led, first, to showing the revolution operated by Thomas Hobbes in political philosophy; from there we moved on to the analysis of the dialectical relationship that exists between security and freedom in politicalhobbism; and we ended with the critique of Hobbesian thought. This process allowed us to verify and confirm our initial hypothesis, which was that political hobbism is a philosophy which operates a harmonious arrangement between security and freedom. Perhaps it is time to see this philosophy as a source for civil rights-conscious states in their quest for security.

KEY WORDS: Absolutism - Self-preservation - Human Rights - Political hobbism - Leviathan - Freedom - Security.

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Notre monde est en crise. La violence se perçoit, au quotidien, dans les rapports intersubjectifs. L'homme vit dans une inquiétude permanente : il ne se passe plus un seul jour sans que les informations lui parvenant des médias ne fassent cas d'actes de violence. Ici et là, aux quatre points du globe terrestre, des viols, des cambriolages, des braquages, des histoires de meurtres, des tueries sauvages, des attentats à la bombe font le quotidien de l'humanité. Ainsi, le XXIe siècle semble avoir noué des liens inextricables avec la violence. Il fait le lit de la violence désordonnée qui se déploie inexorablement. Ces actes violents sont tels que l'on courrait pour ainsi dire le risque de retourner à l'état du chaos originel, tel que décrit par le philosophe anglais Thomas Hobbes1(*)dans ses ouvrages majeurs que sont Léviathan etDe Cive. Le citoyen côtoie le spectre de la mort au quotidien. Il sait qu'il n'est guère à l'abri de cette violence. Elle plane sur sa tête comme l'épée de Damoclès. À défaut d'en être l'acteur principal, l'individu en devient par la force des choses une victime potentielle. Vu cette situation délétère que cette violence multiforme instaure partout, l'État parait avoir échoué dans son rôle de maintien de la sécurité publique, nationale. Et quoi de plus normal que le citoyen soit animé par un réel sentiment d'insécurité.

Eu égard à cette occurrence complexuelle, le besoin de sécurité se fait sentir, aujourd'hui, avec acuité. Aussi s'observe-t-il partout un culte de la sécurité2(*), une véritable idolâtrie de la sécurité qui ne dit pas son nom. Si la sécurité, pour les hommes, est synonyme de stabilité, d'ordre et de paix, alors ce désir de sécurité dénote d'un souci de conservation de soi. En clair, les hommes ne peuvent se réaliser que, quand règnent l'ordre, la sécurité, la paix. Le souci de sécurité prend largement le pas sur la liberté, ainsi que sur toutes les autres valeurs. Au nom de l'impératif sécuritaire, l'État, instance suprême de régulation de la vie des citoyens, peut se permettre certaines dérives. Pour preuve, des actes, tels le terrorisme, d'une horreur inouïe, qui suscite la psychose font que certains États n'hésitent plus à recourir à certaines mesures coercitives et/ou liberticides3(*), avec l'aval tacite des citoyens pour garantir leur sécurité. Kumar Bose Pradip, écrit à ce propos que : « Tous les moyens sont bons pour la préservation de soi, « le peuple » c'est « le soi » qui doit être préservé, et l'État est « l'agence » du peuple qui doit être renforcée pour le protéger »4(*).

Face aux dérives de l'État dans l'implémentation des politiques de sécurité nationale, des ONG de défense des Droits de l'Homme montent au créneau pour dénoncer ces exactions. Pour les défenseurs des Droits de l'Homme, s'il est vrai que la sécurité tient une place de choix pour la survie de l'État lui-même, qu'elle demeure la condition sine qua non pour pouvoir asseoir tout programme politique viable de développement, la sécurité en elle-même ne saurait être une fin en soi. Celle-ci ne devrait qu'être un préalable pour pouvoir accéder à un bien supérieur : la liberté. Par conséquent, la sécurité devrait pouvoir s'exercer comme un moyen, par lequel un État fort et soucieux des droits des citoyens peut émerger. La sécurité devrait en tout état de cause se saisir comme l'ordre qui permette la consolidation d'un État fort qu'on pourrait qualifier de libéral, et à même de garantir les droits des citoyens et les libertés publiques.

L'État doit toute sa légitimité à sa capacité à garantir la sécurité des citoyens. Et l'État ainsi que la liberté ne peuvent véritablement prospérer que dans la sécurité. En retour, le citoyen attend de l'État qu'il lui garantisse sa sécurité et sa liberté. Aussi des recommandations et des assignations sont-elles faites aux États pour assurer la sécurité publique dans le strict respect des libertés individuelles. Jouir de la sécurité tout en conservant la liberté ou savourer à sa juste valeur la liberté dans un État stable, tel se décline manifestement ce que veut le citoyen. Comme tel pour le citoyen, il n'y a guère de choix clair à opérer entre la sécurité et la liberté. La sécurité ne peut être sacrifiée sur l'autel de la liberté et vice-versa. Mais à appréhender objectivement la réalité politique ambiante, un tel voeu paraît utopique. Les citoyens ne sauraient « avoir le beurre et l'argent du beurre, la sécurité et la liberté »5(*). Souvent, les impératifs sécuritaires entrent ouvertement en contradiction avec les libertés et les droits du citoyen. La sécurité a un coût, en cela qu'elle implique par moment la mise entre parenthèses ou le renoncement à certaines libertés individuelles pour la sécurité collective. Comment permettre alors au citoyen de jouir à la fois de la sécurité et de la liberté ? Sont-elles incompatibles ? Le désir de sécurité et le désir de liberté peuvent-ils être conciliés ?

Thomas Hobbes, précurseur en la matière dans l'histoire de la philosophie, semble avoir entrevu le problème et tenté de le résoudre. Il avait compris que la sécurité est un bien essentiel. Le philosophe anglais est celui qui accorde le plus d'importance à la sécurité dans son approche du pouvoir politique. Mieux, tout le système politique hobbesien est entièrement fondé sur le besoin de la sécurité et de la paix6(*). « D'après Hobbes, la sécurité permet aux gens de vivre ensemble et former une société. Hobbes considérait la sécurité comme l'opposé de la peur, et la voyait efficace dans la promotion de la cohésion de la société »7(*). À cet effet, la philosophie hobbesienne répond à cette préoccupation qui est contemporaine, l'incessant besoin de sécurité, la mise en oeuvre d'un ordre politique durable et fiable à tous égards. La philosophie politique du penseur anglais ouvre pour ainsi dire une voie d'analyse qui continue d'alimenter des controverses parce que le problème de la sécurité reste, de nos jours, quelque chose d'important. Nous sommes dans un contexte qui rappelle Thomas Hobbes notamment pour ce qui concerne le sens de la sécurité pour l'État. La sécurité est le support de l'ordre libéral. Elle est garante de la stabilité. Sans elle, naissent la violence, le désordre, la chienlit, l'anarchie, le chaos. Sans la sécurité, c'est l'échec programmé pour l'État. Ce dernier courrait inéluctablement à sa perte. Il faut qu'il maintienne l'ordre politique, vaille que vaille, sinon comment pourrait-il assurer la liberté des citoyens, ainsi que ses autres missions régaliennes quand il y a absence criante de sécurité ?

Une lecture herméneutique du hobbisme politique permet d'affirmer que Thomas Hobbes réinvente, à son époque, une nouvelle intelligence de la philosophie politique en réconciliant dans un mouvement dynamique la liberté et la sécurité ; et cela pour enraciner la liberté dans un contexte de paix et de droit, et par la même occasion éviter de construire un édifice concentrationnaire de sécurité, un État`'sécurocrate''. Mais l'auteur anglais reste malheureusement une grande victime des lectures subjectives, des mésinterprétations8(*) qui se sont faites à sa charge. Elles empêchent de voir quelle est l'actualité du hobbisme politique. Pour répondre à cette question d'intérêt crucial, on est bien obligé de se poser la question des différentes réceptions et lectures dont cette oeuvre a fait les frais dans la mesure où ces lectures ont contribué fortement à faire ombrage à la pensée politique de l'auteur du Léviathan, voire de les déconstruire9(*). C'est ici que se justifie notamment l'intérêt de relire à nouveau frais la philosophie politique de Thomas Hobbes pour y puiser les nouveaux types de rapports qui existent entre la sécurité et la liberté dans sa pensée, quand on sait que ce sont les deux objectifs poursuivis par l'État, le but étant de réaliser la sécurité pour que la liberté puisse prospérer.

La revue littéraire et scientifique permet, par ailleurs, de soutenir que les commentateurs les plus illustres du philosophe anglais, notamment Léo Strauss, Simone Goyard-Fabre, Yves Charles Zarka ont passé sous silence cette dimension du hobbisme politique. L'idée selon laquelle Thomas Hobbesest plus préoccupé de la sécurité des hommes que de leur liberté est certes évoquée par ces analystes, mais c'est à peine si cette analyse fait l'objet d'un développement systématique. Ainsi, n'ont-ils pas jugé nécessaire d'accorder plus d'attention à l'analyse du concept de sécurité, surtout en son rapport à la liberté. Pour toutes ces raisons et celles qui n'ont pu être alléguées ici, notre thème de recherche s'intitule comme suit : « Sécurité et liberté chez Thomas Hobbes ».

Tel que formulé supra, ce thème de recherche induit, in fine, une problématique d'ensemble qui, tout en posant la nécessité de la sécurité pour les citoyens, suggère également la question tout aussi essentielle de leur liberté. L'insinuant à mots couverts avec Thomas Hobbes, quelle serait alors la meilleure articulation entre sécurité et liberté ? Autrement dit, le philosophe anglais voit-il la sécurité comme le fondement idoine de la liberté et des droits du citoyen, ou fait-il le culte excessif de la sécurité pour la consolidation du pouvoir du souverain ? Mieux, l'auteur du Léviathan se saisit-il comme le théoricien d'un étatismepolitique outrancier, comme certains ont tenté de le faire croire, ou est-il plutôt le penseur froid de la liberté citoyenne ? Y-a-t-il véritablement un étatisme politique exacerbé chez le philosophe de Malmesbury qui contredirait les droits humains ? La concentration du pouvoir entre les mains du souverain était-elle une fin en soi pour Thomas Hobbes au point d'en faire le mécène attitré de l'État liberticide ? En recherchant ainsi la sécurité, n'est-ce pas pour lui une stratégie inespérée pour poursuivre d'autres objectifs, notamment la liberté ? En outre, dans la lutte contre l'insécurité actuelle, et face au désir manifeste de sécurité et de liberté du citoyen, comment la philosophie hobbesienne pourrait-elle aider à concilier les impératifs sécuritaires avec les exigences de l'État de droit ?

Bref, dans les pages qui vont suivre, nous ambitionnons de procéder à une relecture de la philosophie politique de Thomas Hobbes pour démontrer, d'une part, son actualité et qu'elle pourrait avoir de la valeur pour la crise sécuritaire actuelle à laquelle se trouvent confronté les États ; et qu'elle n'est peut-être pas si liberticide comme on tend souvent à le faire croire, d'autre part. Pour une bonne intellection de notre démarche, notre analyse s'énoncera en trois (03) grandes articulations qui s'imbriquent harmonieusement. Concrètement, chaque grande partie se déclinera en des sous-parties, en l'occurrence en deux (02) chapitres, chacune.

La première grande partie sera consacrée à l'apport de Thomas Hobbes à la philosophie politique, avec en soutien deux chapitres : l'un mettant en relief les critiques qu'il formule contre les classiques, ainsi que sa démarche novatrice dans le champ épistémologique de la philosophie politique, et l'autre montrant comment, chez l'auteur du Léviathan, les hommes par le contrat social passent d'un état de nature où règne le danger à un état civil, censé leur garantir la sécurité et la paix, de même ce que signifie la politique à ses yeux. Dans la deuxième partie, il s'agira de faire ressortir le lien qui existe concrètement entre la sécurité et la liberté dans le hobbisme politique : au chapitre III, nous analyserons les concepts de sécurité et de liberté à la lumière de la philosophie hobbesienne; puis, dans le chapitre IV, nous analyserons la thèse selon laquelle la sécurité, chez le penseur anglais, n'est pas une fin en soi, mais juste une étape dans le processus d'émergence, de consolidation de l' État de droit, susceptible de garantir les libertés individuelles et collectives. En clair, Thomas Hobbes reste en son for intérieur soucieux du bien-être des citoyens, en cela qu'il formule pour eux des droits inaliénables. Dans la troisième et dernière grande partie, nous allons analyser quelques lectures qui furent faites du hobbisme politique ainsi que les possibles conséquences qui pourraient résulter d'une application du hobbisme politique dans la quête de sécurité et de liberté. À cet effet, au chapitre V, nous allons interroger l'aspect liberticide du hobbisme politique. Relativement au chapitre VI, nous aborderons les éléments qui font du hobbisme politique une propédeutique à une philosophie des Droits de l'Homme en matière de politique sécuritaire.

PREMIÈRE PARTIE :

HOBBES : UNE NOUVELLE GRILLE D'INTELLIGIBILITÉ DE LA POLITIQUE

S'il reste établi qu'il se rencontre une pluralité de domaines philosophiques, c'est parce qu'il y a une diversité d'objets abordés par la réflexion philosophique. Cependant, au-delà de la multiplicité des champs épistémologiques10(*) et de l'importance que chacun peut revêtir, nous avons décidé d'opter clairement pour la philosophie politique. Nous entrons volontiers dans ce vaste champ dédié à la philosophie politique par le biais de Thomas Hobbes, philosophe anglais du XVIIe siècle.

Précisons d'entrée, ce à toutes fins utiles, pour proscrire toute équivoque que ce champ philosophique ne débute guère avec ce dernier, entendu que la philosophie politique trouve son origine depuis l'Antiquité grecque. Elle se donne pour objet d'étude la politique. Pour être beaucoup plus précis, elle est une méditation sur le bien commun et la question du pouvoir. Elle a été fondée par Socrate11(*). Par conséquent, le philosophe anglais ne construit pas sa théorie politique ex-nihilo. Il a des devanciers, et souvent des plus illustres en la matière. Cependant, il serait judicieux de préciser dans l'incipit de notre travail qu'il développe une vision de la politique et de la science politique tout à fait différente de celle de ses prédécesseurs.Son intime conviction, c'est qu'il estime que celle des Anciens12(*) présente beaucoup de lacunes. Socrate n'a, selon lui, aperçu « que quelques rayons, comme à travers des nuages »13(*).Dès lors, il s'agira pour lui de débarrasser la philosophie politique de tout ce qui contribue à la rendre confuse ou ambiguë. « Il veut mener à bien l'oeuvre manquée par la tradition socratique et réussir là où elle avait échoué »14(*). Le philosophe anglais pour ce faire va détruire l'édifice et entreprendre de la rebâtir sur des fondations beaucoup plus solides.

Nous ambitionnons, hic et nunc, de chercher à savoir concrètement en quoi consiste cette déconstruction et ainsi que ce renouvellement de la philosophie politique opérés par Thomas Hobbes, un renouveau qu'il se plait lui-même à rappeler15(*) à l'envie.

CHAPITRE I : UNE APPROCHE SCIENTIFIQUE DU POUVOIR POLITIQUE CHEZ HOBBES

Pour certains analystes politiques, si l'auteur du Léviathan ne fonde pas la philosophie politique, il accomplit, au XVIIe siècle, dans ce domaine, ce que Bacon, Descartes et Galilée, à la même période que lui, ont accompli dans le domaine scientifique. Il ne serait guère excessif d'alléguer que le philosophe anglais, accomplit une révolution dans le champ épistémologique, consacré à la philosophie politique. Thomas Hobbes est le premier, dans l'histoire de la philosophie politique, pour parvenir à ses fins, à utiliser le modèle scientifique, plus précisément le matérialisme mécanique, pour concevoir le pouvoir politique qu'il échafaude, selon des principes scientifiques. Ce faisant, il introduira une nouvelle grille d'intelligibilité de la question politique, non sans avoir auparavant exposé ses griefs contre ses devanciers. En clair, le philosophe de Malmesbury, dans sa conception du pouvoir politique prend manifestement le contre-pied de la philosophie politique classique.

Aussi, dans ce chapitre composé de deux sections, nous allons expliquer, d'une part, les reproches que formule Thomas Hobbes à l'encontre des classiques (Section 1) ; et d'autre part, analyser l'approche scientifique qu'il fait du pouvoir politique (Section 2).

1. La critique de la philosophie politique traditionnelle à l'initiative de Hobbes

La philosophie politique traditionnelle se caractérise par sa vocation prescriptive : les classiques manifestaient explicitement la volonté de prescrire des règles de bonne gouvernance au politique. Leur philosophie politique se présente comme une philosophie essentiellement normative. Platon, par exemple, entendait « faire reposer l'ordre politique sur la morale, c'est-à-dire sur un ensemble de valeurs propices à la réalisation du bien et du juste »16(*).En conséquence, la tâche du politique est, selon Platon, de transmettre la passion de la vertu à ses concitoyens17(*). Et pour y arriver, il faut que le politique soit un homme qui sache ce qu'est la Vertu, le Bien, la Justice. Au-delà du simple savoir, il doit lui-même les posséder ou même, être un homme savant et vertueux. Il en découle que la question du pouvoir politique, selon les classiques relèverait du domaine réservé de quelques initiés, de quelques privilégiés, en un mot, de personnes jouissant d'une compétence avérée en science politique. Le savoir légitime, selon ces Anciens, le pouvoir politique qui in fine permet la rédemption des citoyens.

Comme Thomas Hobbes ne partage guère cet optimisme béat, il se montre très critique vis-à-vis de la philosophie politique classique. Il refuse, à l'instar de Platon, de fonder le pouvoir politique sur le savoir et/ou les devoirs ou la vertu. Contrairement à l'aristocrate platonicien, le souverain hobbesien n'a pas besoin d'être philosophe. Pour lui, il n'est nullement besoin d'être savant, d'avoir des connaissances scientifiques, surtout mathématiques à l'instar du philosophe-roi platonicien18(*), pour comprendre le meilleur fonctionnement de la politique. Les citoyens peuvent, sans intermédiaire19(*), saisir la pensée politique, pourvu qu'ils sachent lire de façon sensée. En sus, la tâche du politique n'est nullement de rendre ses concitoyens vertueux. Cet impératif platonicien ne relève nullement des prérogatives du souverain hobbesien. Auquel cas, ce serait confier une mission impossible, irréaliste au politique, car, de l'avis du penseur anglais, « qui s'efforcera d'obéir aux lois, s'il attend que l'obéissance lui soit infusée ou insufflée ? »20(*) 

En outre, en fondant la légitimité politique sur le savoir, Platon et à sa suite Aristote en viennent à poser explicitement que les hommes sont par nature inégaux. Pour preuve, dans la perspective platonicienne, la Cité parfaite est une société bien stratifiée. C'est pourquoi, il milite explicitement pour la subdivision de la société en trois classes. Ce sont d'abord, la classe des producteurs, composés de tisserands, de paysans, de marins, de commerçants, ensuite, la classe des gardiens ou soldats et enfin, celle des dirigeants ou des philosophes-rois. Cette division platonicienne obéit aux fonctions essentielles de la Cité, à savoir la production, la défense et l'administration. Son analyse, c'est que la justice et l'ordre règnent quand chaque catégorie occupe la fonction qui est la sienne. Ainsi, la première classe, celle des producteurs est-elle chargée, par son activité, de la production des biens de consommation. L'agriculture, le tissage, l'élevage, la pêche, le négoce sont de leur ressort. Ils remplissent dans la Cité une fonction d'ordre économique. Quant aux gardiens, le deuxième groupe, il leur revient la tâche d'assurer l'ordre et la sécurité intérieure et extérieure de la Cité. Enfin, la classe des dirigeants ou des philosophes-rois. À ces derniers, Platon confie les rênes de la Cité.

Dans les sillages de son maitre, Aristote affirmera que la nature a fait les hommes, de telle sorte que les uns soient naturellement prédisposés à être esclaves et les autres à être des meneurs d'hommes. Les uns sont faits pour commander, tandis que les autres sont faits pour obéir. Pour Thomas Hobbes, la raison et l'expérience démontrent absolument le contraire21(*). Toute soumission à un tiers est le fait d'une mutuelle entente. Aussi contre ces derniers, le philosophe anglais formule-t-il, dans le Léviathan, comme neuvième loi de la nature « que chacun reconnaisse autrui comme étant son égal par nature »22(*). Quelques années avant, dans De Cive, il soutenait que « l'inégalité qui règne maintenant a été introduite par la loi civile »23(*).Pour le philosophe anglais, les hommes sont par nature égaux. L'inégalité relève de la société. Plus précisément, ce sont des lois qu'elles émanent. C'est, par exemple, elles qui en distribuant les fonctions, les prérogatives ainsi que les honneurs créent la discrimination. Personne, en réalité, n'est par nature appelée à gouverner son prochain. C'est la raison pour laquelle on peut soutenir que « la philosophie politique de Hobbes signe ainsi le passage de (...) la philosophie politique fondée sur l'inégalité naturelle des êtres humains à la philosophie politique fondée sur l'égalité naturelle des êtres humains »24(*).

L'autre crime à l'actif de la philosophie politique traditionnelle, c'est aux yeux de l'auteur du Léviathan, de faire croire que le politique doit garantir le bonheur des citoyens. La critique est adressée, cette fois, directement à Aristote. En effet Aristote, en tant qu'eudémoniste, soutient que le bonheur est la finalité de la vie humaine. Aussi, la cité aristotélicienne a-t-elle pour finalité le bonheur de ses membres25(*). Pour le Stagirite, la cité a contrario des autres regroupements associatifs, tels le couple, la famille, les villages, qui ne se préoccupent que d'intérêts particuliers, est la seule qui ait en ligne de mire l'intérêt général. C'est par conséquent dans et grâce à la cité que l'homme peut atteindre le bonheur, but ultime de la vie. La politique, en tant que mise en place de stratégies de gouvernance, n'aura d'autre finalité que de permettre sa réalisation26(*). Thomas Hobbesrécuse pour ainsi dire une telle conception étant donné que le péripatéticien a tort sur toute la ligne. Le faire-politique n'a aucunement pour finalité d'assurer un quelconque bien suprême, le bonheur. L'État a pour tâche de travailler à la préservation du genre humain. Il faut d'abord vivre27(*) pour ensuite espérer atteindre d'autres fins, notamment la félicité. À cet égard, Norbert Campagna fait remarquer que « la fonction de l'État [Léviathan] n'est (...) pas de conduire les hommes vers le bien suprême, mais de leur éviter la misère suprême, c'est-à-dire, (...), la mort violente omniprésente dans les guerres civiles »28(*).

Le philosophe de Malmesbury soutient, toujours contre le péripatéticien, la nature hautement conventionnelle de la société. La philosophie classique ne se posait pas la question de l'origine de la société. Sa présence semble aller de soi. Aristote avait en effet soutenu que la société est une donnée naturelle29(*). Elle ne serait qu'une partie du tout qu'est la nature : la nature est un tout organisé à l'intérieur duquel l'homme se meut. L'homme est un microcosme dans un macrocosme. Cette nature est régie par des lois. Aussi l'être humain vit-il selon les lois de celle-ci. Toutes ses activités s'inscrivent dans le grand ordre naturel30(*). La politique, activité humaine par excellence, n'échappe pas à cette donne. Mieux, la politique n'est pas qu'une banale activité exercée par l'homme, qui relèverait du contingent, mais elle est constitutive de l'essence humaine. Aristote en vient à faire de l'homme un zoônpolitikon, c'est-à-dire un animal politique31(*). C'est dans la société que l'homme se réalise, et réalise son essence d'être rationnel. Par conséquent, Aristote soutient la naturalité de la société. À l'inverse, Thomas Hobbes prend le contre-pied de cette thèse. L'homme ne serait pas prédestiné naturellement à la vie en société. La société est, plutôt, l'émanation d'un contrat, d'une convention passée entre les hommes au cours de l'histoire de l'humanité : c'est la théorie du contrat social32(*). La société est une construction artificielle et rationnelle des hommes. Par ce fait, la socialité naturelle de l'homme postulée par Aristote se trouve battue en brèche. Donc, les classiques s'inscrivent dans le faux.

La philosophie classique, en plus de prêcher le faux, par son obscurantisme « jette dans le brasier de la guerre civile »33(*) la république civile. Les Anciens sont, par leurs enseignements, à l'origine des troubles qui secouent les républiques. Ces enseignements contiennent des germes de sédition. Après les avoir lus, les hommes en manque de jugements voudraient les imiter ; ce qui peut conduire à toute sorte de désordres, et pire à un régicide34(*). L'auteur du Léviathanvit en effet dans une époque de crises : la guerre civile sévit en Angleterre. Le roi Charles Ier est en opposition avec le Parlement. La crise se dénouera, en 1648, avec la victoire des troupes du Parlement sur celles du roi. Charles Ier est arrêté, puis exécuté en 1649. Pour Hobbes, si ces troubles sont imputables à la philosophie des Anciens, c'est parce que leurs enseignements reposent sur l'éloge d'une passion : l'amour de la liberté. Un mot au contour difficilement cernable35(*). Les hommes ont un amour prononcé pour la liberté, mais il leur serait difficile de dire ce qu'elle est concrètement. Dans les livres des Anciens, on fait croire aux lecteurs que seuls les sujets des républiques populaires sont libres, ceux des monarchies ne seraient rien d'autre que des esclaves36(*). Le manque de discernement fait, selon les termes même de Thomas Hobbes, qu'en

lisant ces auteurs grecs et latins depuis l'enfance, on a pris l'habitude (ayant une vue faussée de ce qu'est la liberté) de favoriser les révoltes et les critiques licencieuses des actions des souverains, et à nouveau de critiquer ces critiques, provoquant ainsi une telle effusion de sang37(*).

À la vérité, selon le philosophe de Malmesbury, les hommes ont pendant longtemps été trompés. On ne leur a pas enseigné « les vrais principes de la philosophie politique »38(*). Les esprits de ces derniers ont « été barbouillés de doctrines contraires »39(*). Aussi faut-il désaliéner les consciences. Le faire revient à déconstruire la philosophie politique classique, car elle reposerait sur des chimères, en un mot, sur un fondement trompeur40(*). Un tel édifice est condamné à s'écrouler, à disparaître.

Au service de cette mission de salut public, la plume du philosophe anglais n'épargne personne ; même pas les « théologiens ignorants »41(*) de la scolastique, dont certains parmi eux se glorifiaient de titres pompeux, « ministres de Dieu »42(*), « ambassadeurs de Dieu »43(*). Ces derniers avaient soutenu une origine divine du pouvoir politique. L'essence du pouvoir serait divine. Le souverain tirerait sa légitimité de Dieu, mais le souverain lui-même doit en dernière instance faire allégeance au Pape, qui « était le vicaire du Christ [sur terre], et qui devait, par le droit du Christ, gouverner tous les chrétiens »44(*). Autrement exprimé, les monarques pour asseoir leur autorité doivent recevoir la bénédiction du pape. Le pouvoir ecclésiastique et le pouvoir civil en viennent par la force des choses à se confondre. Il y a dès lors une double soumission des citoyens. D'une part, les citoyens doivent obéissance au souverain, car son autorité vient de Dieu ; et d'autre part, à Dieu lui-même. Dieu n'étant pas présent sur terre ; cette allégeance va de facto à son représentant sur terre : le pape. Les mêmes sujets sont ainsi assujettis à deux maîtres puisque le pape s'arroge un droit imprescriptible de regard sur la gestion du pouvoir du souverain. On pourrait dès lors affirmer, sans risque de se tromper, que son autorité surpasse de loin celle du roi. La preuve, c'est qu'il peut quand il l'estime nécessaire excommunier et appeler à la destitution du souverain. Tel fut le cas de Chilpéric, roi de France qui fut déposé par le Pape Zacharie Ier45(*).

Cette façon de procéder constitue à coup sûr un scandale aux yeux de Thomas Hobbesentendu qu'on ne peut raisonnablement avoir deux royaumes en une seule et même nation gouvernée par deux maîtres46(*) aux pouvoirs fort distincts. Il est manifestement difficile, voire impossible de faire allégeance à deux maitres47(*) à la fois. Il arrivera que les sujets décident d'obéir aux décrets du pape, au détriment de ceux du roi. Il vaut mieux, en effet, lui obéir, car il « peut jeter votre corps et votre âme en enfer, plutôt que d'obéir au Roi qui ne peut que tuer le corps »48(*). À bon droit, Hobbesopère alors une rupture du lien qui existait entre le pouvoir temporel, celui de l'État, et le pouvoir ecclésiastique, celui de l'Église. Il substitue l'approche théologico-juridique de l'État par une approche anthropologico-politique. Si par essence le pouvoir « politique (...) n'est pas l'affaire de Dieu, mais des hommes »49(*), alors ilne faut plus chercher la source de la légitimité du pouvoir politique au niveau de la divinité, mais plutôt prospecter du côté des hommes. La solution qu'il esquisse à l'occasion, c'est que le monarque ne tire plus sa légitimité de Dieu mais des hommes. On passe du théocentrisme politique traditionnel à un anthropocentrisme politique moderne. Ce qui apparaît tout à fait novateur. Le philosophe anglais sonne ainsi le glas de la tradition théocratique de la scolastique.

Thomas Hobbes, en plus de prendre ses distances idéologiques et épistémologiques d'avec les Anciens et la Scolastique, se démarque aussi de Nicolas Machiavel, cet autre grand penseur de la chose politique. De prime abord, le philosophe de Malmesbury et le philosophe de Florence ont des points communs. Le problème politique qu'ils tentent, tous deux, de résoudre n'est pas celui de la philosophie classique : leur souci n'est pas la quête du meilleur régime. Tous deux dans leur approche de la politique considèrent les hommes, tels qu'ils sont réellement par nature, c'est-à-dire « ingrats, inconstants, dissimulés, tremblants devant les dangers et avides de gain »50(*). Le fait est que la conception du pouvoir politique, chez le florentin et Thomas Hobbes, se veut réaliste et efficiente. Si on reproche à la philosophie d'être une pure abstraction, une spéculation inutile, oiseuse ou superflue, celle qu'ils développent part des faits et se veut utilitaire51(*). Le philosophe florentin et le penseur malmesburien ne veulent pas se contenter d'un vain bavardage, mais comptent proposer quelque chose de fonctionnel, et dont la mise en oeuvre permettra de changer les choses.

Toutefois, le philosophe malmesburien va plus loin que le philosophe florentin dans son analyse de la politique. Si Nicolas Machiavel semble ne pas s'intéresser à la question de l'organisation sociale52(*), c'est là une question qui préoccupe au premier chef Thomas Hobbes. En outre, le penseur malmesburien rompt d'avec le secrétaire florentin, dans la mesure où toute la philosophie politique de ce dernier est orientée vers la question de la conquête du pouvoir et de sa conservation. Son ouvrage référentiel, Le Prince, cherche à savoir les mécanismes à déployer, et les moyens à utiliser pour conquérir le pouvoir politique, pour finalement bien le conserver53(*). Ceci n'est pas véritablement un souci pour Thomas Hobbes qui cherche plutôt d'où le pouvoir politique tire sa légitimité, ainsi que les mécanismes par lesquels la paix sociale peut être assurée. Nous déduisons de ces points de ressemblance et de dissemblance, et du fait que le florentin soit antérieur à l'anglais, que la philosophie politique de Machiavel a posé les jalons de l'hobbisme politique. Et c'est bien Léo Strauss qui en donne le véritable révélateur quand il écrit ceci : « Ce fut Machiavel, plus grand que Christophe Colomb, qui découvrit le continent sur lequel Hobbes put édifier sa doctrine »54(*).

Au vu de ce qui précède, nous pouvons dire que la philosophie politique traditionnelle s'apparente, pour Thomas Hobbes, plus à « un rêve plutôt qu' [à] une science, et énoncé dans un langage absurde, dénué de toute signification »55(*). Avec la période moderne que ces deux auteurs impulsent, la perspective change radicalement. Au demeurant, il s'observe une rupture méthodologique, notamment au niveau du regard porté sur la science politique. S'il y avait un certain idéalisme et une tendance moralisante qui caractérisaient la conception de la philosophie politique classique, Thomas Hobbes et Nicolas Machiavel veulent substituer le réalisme et le pragmatisme à cet idéalisme et ce moralisme. Ce n'est plus l'homme tel qu'il devrait être, tel qu'on voudrait qu'il soit, qu'il se conduise, comme le note si bien Nicolas Machiavel56(*), mais c'est l'homme appréhendé dans sa nature réelle, tel qu'il est, qui fera l'objet de leurs réflexions. Il s'expose chez eux un souci d'efficacité car ils voudraient que la connaissance produite sur l'homme dans son rapport avec les autres servent à mettre en oeuvre les mécanismes politiques de rédemption de l'humain. Mais si Nicolas Machiavel a rompu les amarres avec la tradition, faute de posséder comme Thomas Hobbes, « une théorie de la connaissance aussi rigoureuse que celle de Descartes, ni d'une méthode de recherche aussi féconde que celle de Galilée »57(*), il ne conduit pas cette rupture à son terme. C'est Thomas Hobbes qui achèvera ce que le florentin n'a fait qu'amorcer en fondant la science politique sur des solides bâtisses.

Pour arriver à réaliser cet ambitieux challenge, il lui aura fallu faire table rase du passé ou du moins corriger ce qui n'avait été entrevu que faiblement. Ce faisant, il va par conséquent détruire cet édifice dont les fondations ne tiennent plus pour mieux le rebâtir et cette fois-ci sur des règles infaillibles de la raisonque la passion ne puisse ébranler58(*). Ce processus de déconstruction et de reconstruction passe par une rationalisation du pouvoir politique. Comment s'y prend-il concrètement ?

Avant d'aborder la question qui fait débat, nous voudrions d'entrée signaler que les critiques que l'auteur du Léviathan adresse à ses devanciers ou encore les éléments qui montrent sa dissidence à l'égard de Nicolas Machiavel ne s'épuisent pas dans celles que nous avons évoquées dans cette partie de notre travail. Il en existe bien d'autres. Dans le cadre de cette analyse, nous avons voulu être sélectif en choisissant celles qui nous paraissaient le plus à même de démontrer l'écart qui existe entre la philosophie politique de Thomas Hobbes et celle de ses devanciers. Cette précision étant faite voyons à présent comment le philosophe anglais entend rendre plus rationnelle la science politique.

2. Le projet hobbesien d'une rationalisation du pouvoir politique

Si le dessein que Thomas Hobbes s'assigne, c'est l'éducation politique de l'homme59(*), cela revient pour lui à lui enseigner quels sont ses devoirs, en tant que citoyen et en tant que chrétien60(*). Pour y parvenir, il faut épurer la science politique de toutes ses fables, dont l'avaient enveloppées les classiques61(*), et l'exposer dans un langage clair et intelligible62(*). En effet Platon, dans l'ensemble de son oeuvre politique, n'a cessé de faire recours aux mythes pour expliquer la société politique. En sus, l'usage des mots simples, dans la science politique des Anciens, a été remplacé par des « mots ambigus ou qui ne veulent rien dire »63(*).  Une telle manière de faire dénote d'une insouciance pour la rationalité scientifique du discours au profit de la beauté du style. C'est somme toute se montrer plus rhéteur qu'analyste politique. « La lumière de l'esprit humain est la clarté des mots, mais grâce à des définitions exactes préalablement débarrassées et lavées de toute ambiguïté »64(*). Thomas Hobbes, pour sa part, ne se « soucie pas tant d'écrire en beaux termes, que de bien supputer, (...) et de bien déduire tous (...)[ses] raisonnements »65(*). Aussi prend-il toujours le soin dans son instruction relative à la politique de clarifier chaque nouveau terme qu'il introduit, et qu'il juge être susceptible de confusions dans l'usage. Il spécifie ce qu'il entend dire. Cela est nécessaire, car on ne saurait accorder crédit aux sens des mots, aux choses en vertu de l'autorité de ceux qu'on considère comme de grands savants qui en dehors du fait d'être simplement humains ne sont pas plus que quiconque compétents pour légiférer comme de vrais nomothètes sur la signification des choses66(*).

Si les hommes ont souvent du mal à se comprendre dans les débats, cela serait pour beaucoup dû à l'emploi qu'ils font des mots. Il leur arrive d'emprunter les mêmes mots, mais en leur conférant des sens différents. De là naissent les quiproquos, les amalgames, les brouilles. Sinon, quiconque se lance dans une investigation de quelque nature que ce soit, et qui a le souci de se faire comprendre, doit observer des précautions d'ordre liminaire. Ces précautions consistent simplement, avant d'exposer ses vues, d'élucider le sens des concepts qu'il va utiliser67(*). C'est le procédé propre à ceux qui n'ont l'« envie de ne laisser de lieu à la dispute »68(*) superfétatoire, nous dit le philosophe de Malmesbury.

À ce stade de notre propos, rappelons à toutes fins utiles que Thomas Hobbes est un penseur matérialiste et mécaniste. Comme tel, il va appliquer le matérialisme mécanique à la science politique. Sémantiquement, le matérialisme est une doctrine philosophique qui postule qu'il n'existe d'autre substance que la matière69(*) ; laquelle matière obéit à des lois que la science et la philosophie pourraient découvrir. Quant à « la théorie mécaniste [elle] ramène la vie à un ensemble d'organes fonctionnant comme les rouages d'une machine »70(*). Dans la même veine, Thomas Hobbes estime également que la philosophie politique est une science qui a pour objet d'étude le corps politique. Et le corps politique est à l'image du corps humain qui lui-même est assimilable à une machine71(*). Il fonctionne selon les lois qui régissent la matière. Autrement dit, le corps politique, à l'instar du corps humain, obéit au mécanisme des corps en mouvement. La science politique aura pour but de définir les mécanismes qui font fonctionner le corps politique. Saisir ces mécanismes ne saurait s'opérer sans une méthode adaptée.

Àl'instar de René Descartes qui estimait que la recherche de la vérité ne pouvait se faire sans méthode convenable72(*), Thomas Hobbes, aussi, postule l'idée que la philosophie politique, si elle aussi veut atteindre son but, ne peut se passer d'une méthode adéquate73(*). D'ailleurs, si la philosophie politique des classiques excelle dans le faux, et qu'on rencontre en son sein des absurdités, cela serait vraisemblablement dû à un défaut de méthode74(*). Pour pallier ce déficit d'ordre méthodologique, il invente une nouvelle méthode : la construction théorique de l'état de nature75(*). Pour ce qui le concerne, « on ne saurait mieux connaître une chose, qu'en bien considérant celles qui la composent »76(*). Il en découle que, quand on veut comprendre une machine, on la dépièce, la démonte pour saisir son mécanisme de fonctionnement. Hobbes en fera de même pour le corps politique. À dessein, il se fait l'anatomiste de la société puisqu'il déconstruit théoriquement la communauté politique pour la reconstruire méthodiquement. De façon plus claire, il

commence par réduire la réalité par voie d'analyse en éléments simples ; puis la reconstruit, par synthèse. (...) Il conçoit un « état de nature » fait d'une poussière d'hommes isolés, et la société, les institutions seront reconstruites à partir des hommes77(*).

C'est la méthode résolutive-compositive qui se présente structurellement sur le modèle de l'analyse-synthèse. Sous ce rapport, l'analyse se saisit comme la déconstruction et la synthèse, comme la reconstruction. Cette méthode permet de saisir par quels mécanismes la société s'instaure et s'institue78(*). Autrement dit, grâce au concept d'état de nature qu'il forge, on est en mesure de s'imprégner des normes qui fondent et justifient la communauté politique.

La préoccupation hobbesienne pour la recherche d'une méthode opératoire, efficiente pour discourir sur la politique s'enracine dans sa fascination pour le modèle mathématique qui ne souffre d'aucune contestation, comparativement aux autres sciences79(*). Les mathématiques sont une science qui procède de manière hypothético-déductive. Elles ont une procédure féconde qui permet d'expliquer l'univers. C'est eu égard à la fécondité qu'elles impulsent que Thomas Hobbes transpose alors la démarche mathématique dans sa volonté d'intellection du pouvoir politique, et partant de la science politique. D'abord, il formule une proposition. Ensuite, dans un souci de démonstration, il prend le soin d'en définir les termes, d'expliciter la proposition et finit par en tirer la conséquence logique. Ces énoncés clairs et évidents s'emboitent alors harmonieusement les uns aux autres : la mimique mathématique va jusqu'à la structure logique des paragraphes, des chapitres80(*). Louis Roux nous apprend, dans la préface à Le Corps politique, que dans cet ouvrage, « au paragraphe 13 du chapitre 2 de la première Partie, on compte au total neuf fois «si», quatre fois «car», et une fois «bien que», «pourtant», «à cause que» »81(*). Cette approche ressemble à la démarche discursive mathématique qui progresse de manière minutieuse et méthodique. Dans son argumentation, si le besoin se fait pressant, Thomas Hobbes n'hésite pas à opérer à un rappel de ce qui a déjà été expliqué ou encore à référencer. On peut affirmer avec Louis Roux que la démarche hobbesienne « se caractérise par l'énumération, l'explication, la dépendance, la répétition »82(*). Bref, Hobbes, au risque de le répéter indéfiniment, « a recherché la cohérence et la rigueur du discours plutôt que les artifices de la persuasion »83(*).

La publication même de ses ouvrages devait obéir à cette même démarche rigoureuse et pointue. De Corpore, De Homine, De Cive : Tel devrait se présenter l'ordre trilogique de publication de ces ouvrages. Comprendre d'abord le corps en général ; ensuite, cerner la nature humaine ; enfin ce dernier dans son rapport avec les autres. Le cours des événements notamment l'imminence de la guerre civile en Angleterre bouleversera cet ordre originel d'édition prévu par Thomas Hobbes. Mais comme l'a si bien remarqué Simone Goyard-Fabre :

Que la chronologie des publications ait bouleversé l'ordre logique de la philosophie hobbesienne est, au fond, sans grande importance. Celle-ci demeure pénétrée d'un voeu de scientificité dont l'essentiel est contenu dans la « méthode de recherches » qu'elle met en oeuvre84(*).

De cette déclaration, il ressort que même si l'ordre d'édition a été modifié, l'hobbisme ne souffre d'aucune contradiction. L'ensemble des théories scientifiques, philosophiques et politiques du philosophe de Malmesbury est un tout qui se veut structuré, logique, méthodique et cohérent.

Du reste, dans son approche du pouvoir politique, Hobbes adopte une attitude empiriste. Précisons dès l'entame de cette exégèse que l'empirisme est un courant de pensée, qui soutient que toutes nos connaissances dérivent de l'expérience sensible. S'il recourt à une démarche empirique fondée sur l'expérience, pour être plus explicite, c'est justement parce que le réel est son point de départ pour construire sa pensée politique. Autant dire que dans son investigation, il se sert des quelques informations de base que nous fournit l'expérience quotidienne sur le comportement des hommes et les extrapole dans l'hypothétique état de nature. Pour le philosophe anglais, l'expérience quotidienne montre des hommes craintifs et méfiants les uns à l'égard des autres85(*). L'homme, au quotidien, par ses actes incrimine l'humanité :

Partant en voyage, il s'arme et cherche à être bien accompagné, qu'allant se coucher, il verrouille ses portes ; que, dans sa maison même, il ferme ses coffres à clef ; et tout cela sachant qu'il existe des lois, et des fonctionnaires publics armés, pour venger tous les torts qui peuvent lui être faits86(*).

Le hobbisme politique se veut ainsi une pensée soucieuse d'exposer les faits tels qu'ils surviennent.

Aussi s'appuyant sur l'expérience sensible, Hobbes expose-t-il un ensemble de preuves qui concourent à donner l'impression que la narration qu'il fait de l'état de nature et qui donne l'impression au final que ce n'est pas « un récit plein de bruit et de fureur raconté par un idiot »87(*). En effet, il existe des lieux où les hommes vivent « de manière quasi-animale »88(*), tel que décrit dans l'état de nature hobbesien notamment chez les indiens d'Amérique89(*). En plus, la situation des hommes en temps de guerre civile est pareille que leur condition naturelle90(*). Enfin, les relations entre États souverains ressemblent aux rapports que les hommes entretiennent quand ils vivent à l'état de nature : la construction des forts, les garnisons et les canons postés aux frontières de leurs pays, et l'entretien d'espions chez leurs voisins dénotent de leurs méfiances réciproques91(*). Au regard de cette situation de méfiance et de suspicion généralisées, nous sommes d'avis avec Norbert Campagna lorsqu'il affirme que « la philosophie politique de Hobbes repose (...) sur une anthropologie élaborée à partir des faits et de l'expérience »92(*). Cependant, il convient de signaler que :

les exemples d'état de nature que l'on vient de considérer ne sont jamais des représentations parfaites de la natural condition93(*), (...) Il s'agit, tour à tour, d'approximations différentes, des plus lointaines, comme dans le cas des relations entre États, aux plus proches, comme pour la guerre civile (...) Approximations dont la fonction n'est pas de décrire le concept mais plutôt de persuader le lecteur de la valeur politique de celui-ci94(*).

En clair, ce recours récursif à la réalité historique, pour illustrer son propos, a pour but de vaincre les résistances que le lecteur pourrait opposer à sa fiction méthodologique95(*).

De ce qui précède, nous pouvons dire que la nouveauté opérée par Thomas Hobbes dans le champ épistémologique de la philosophie politique est l'introduction d'une nouvelle méthode, le souci constant de la clarté, de la rigueur et de la démonstration de ce qui est dit. Tout ceci est révélateur du caractère scientifique du hobbisme politique. Cependant, pour mieux saisir l'hobbisme politique, ainsi que sa portée, il convient de s'intéresser de plus près à ce concept hobbesien d'état de nature que nous venons d'évoquer. L'objet du prochain chapitre est ainsi annoncé.

CHAPITRE II : DE L'ÉTAT DE NATURE AU CONTRAT POLITIQUE : UNE ANTHROPOLOGIE PESSIMISTE AU FONDEMENT DU CONTRAT POLITIQUE

Selon Thomas Hobbes, « pour se faire une idée claire des éléments du droit naturel et de la politique, il est important de connaître la nature de l'homme »96(*).Aussi comprendre l'hobbisme politique revient-il à sonder les tréfonds de la nature humaine dans la mesure où toute sa philosophie politique repose entièrement sur sa conception de l'homme. En d'autres termes, l'anthropologie est l'édifice sur lequel il bâtit sa pensée politique. Et pour expliciter la nature humaine, il hypostasie une existence présociale de ce dernier, un état anté-politique ; l'homme avant qu'il ne fasse société avec son semblable : l'état de nature. Pour sortir de cet état de nature, les hommes vont passer un contrat. Thomas Hobbes est pour ainsi dire un philosophe contractualiste. La paternité de la théorie contractualiste lui est d'ailleurs attribuée. Le philosophe anglais ainsi que tous les philosophes dit contractualistes estiment que la société serait de façon plausible l'émanation d'un contrat entre les hommes.

En outre, les notions d'état de nature et de contrat se révèlent être les clés de voûte à l'usage de tous ceux qui voudraient pénétrer les arcanes de sa pensée politique. La conception hobbesienne de l'état de nature justifie le type de contrat social qu'il préconise qui, en dernière instance, permet de s'imprégner de sa conception du pouvoir politique. Après l'analyse de ces notions (section 1 et 2) nous nous intéresserons à la compréhension hobbesienne de la politique (section 3).

1. L'état de nature comme postulat d'appréhension de la nature humaine

Si le terme n'apparaît pas explicitement, l'idée d'un état de nature des hommes était déjà présente dans l'antiquité grecque. Épicure, par exemple, était méfiant vis-à-vis de tous « ceux qui font de l'homme un animal essentiellement sociable, comme si tout son développement était guidé par cette harmonieuse finalité »97(*). Lucrèce, élève d'Épicure que Joseph Vialatoux considère comme le Thomas Hobbes de l'antiquité98(*), nous apprend, en effet, qu'il exista une période de l'histoire de l'humanité où les « hommes traînaient une vie vagabonde à la manière des bêtes sauvages »99(*). Ils vivaient de manière éparse dans les champs, les bois, les grottes ainsi que les montagnes100(*), trouvant dans la nature leurs moyens de subsistance101(*). Pour ce qui est de l'expression, elle se retrouve sous la plume du philosophe et juriste hollandais Hugo Grotius mais il n'en tire pas une pensée systématique102(*).

Si l'idée n'est pas nouvelle, cependant c'est véritablement avec Thomas Hobbes que l'expression état de nature devient « un chapitre essentiel de la philosophie politique »103(*).C'est ce dernier, en effet, qui va systématiser et rendre l'expression populaire en philosophie politique avec son ouvrage DeCive104(*). Après lui, toute réflexion sur un quelconque ordre politique juste se verra désormais dans l'obligation, ou ressentira le besoin, de réfléchir sur les origines de la société, cet état pré-politique de l'homme.

Au regard de cela, Pasquale Pasquino estime que ce « concept hobbesien d'état de nature produit un véritable bouleversement dans la tradition politique classique de l'Occident celle qui va d'Aristote jusqu'à Machiavel »105(*). Le bouleversement dont il est question ici est lié au fait que ce concept offre un nouveau cadre systémique pour penser et comprendre l'autorité politique, au-delà du fait qu'il permet de rompre avec la conception gréco-latine de l'homme comme animal politique. Par-delà le fait qu'il permette de remonter aux origines de la société, de saisir la légitimité de l'autorité politique, cette notion révèle la conception de la nature humaine que se font ceux qui l'utilisent comme point d'appui dans leur raisonnement sur le pouvoir politique. La manière dont les contractualistes conçoivent l'état de nature détermine in fine l'idée qu'ils se font du contrat social106(*).

Exception faite de John Locke107(*), Thomas Hobbes et les philosophes qui, après lui, feront usage du concept d'état de nature,considèrent cette situation des hommes avant leur rencontre avec la société, comme une fiction. Ils ne prétendent nullement que l'état de nature ait réellement existé. Sur le sujet Yves Charles Zarka écrit que « l'état de nature ne correspond pas à un moment historique de l'humanité, mais consiste en une simulation théorique des comportements humains soit lorsque l'État n'existe pas encore, soit lorsqu'il est détruit »108(*). L'état de nature jouit simplement d'une valeur épistémologique. C'est une hypothèse de travail échafaudée pour cerner la nature humaine.

L'idée que le philosophe anglais développe de l'homme, à l'état de nature, est peu flatteuse. Pour lui, l'homme à l'état pré-politique, est un individu foncièrement méchant : nous avons affaire à un individu narcissique, égoïste, égocentrique et calculateur incapable d'aucun acte altruiste et désintéressé. À l'état de nature hobbesien, l'homme est un être intelligent mû par le souci constant de « la conservation de soi-même »109(*). Son souci premier est de se maintenir en vie et cela par tous les moyens. À cet effet, il cherche à tirer avantage de toutes les situations qui se présentent à lui. L'individu à l'état de nature hobbesien poursuit toujours seulement que ses propres intérêts.

Les hommes, à l'état de nature hobbesien, sont égaux. Cette égalité n'est pas d'ordre mathématique puisque les hommes n'ont pas la même constitution, ils ne possèdent pas non plus, au même degré, les mêmes qualités. Ils existent des différences physiologiques ; et certains sont plus prudents que d'autres110(*). L'égalité naturelle, dont parle Hobbes, réside au niveau des besoins, des désirs et des moyens de satisfaction de ceux-ci. Les hommes ont, à l'état de nature hobbesien, les mêmes besoins ; ils éprouvent les mêmes désirs ; ils manifestent la volonté d'atteindre les mêmes fins. On peut certes rencontrer dans cet état un individu plus fort qu'un autre, mais les possibilités des hommes s'équivalent. Les individus ont, par exemple, la même capacité de nuisance : si par la force physique le plus fort arrive à prendre le dessus sur celui qui est faible, rien ne lui garantit un repos assuré. Ce n'est qu'une victoire éphémère. Le plus faible, grâce à la ruse ou à son association avec d'autres, peut aussi arriver à reprendre le dessus. La force et la ruse sont les deux vertus cardinales à l'état de nature111(*).

Étant naturellement égaux, les hommes sont soumis aussi aux mêmes affects. Ils sont mus par les passions du moment. C'est de l'expression, sans limite de ces passions primitives que découle la guerre. À l'origine de la guerre, Thomas Hobbes en identifie plus précisément trois : la rivalité, la méfiance, la gloire. La première passion fait prendre les armes pour la recherche du profit. L'homme est un être de désirs. Il est animé du désir de tout s'accaparer et n'est jamais satisfait. À l'état de nature, le désir se trouve à son apogée. Il peut, alors, arriver que deux individus portent leur désir sur un même objet indivis dont le partage est impossible. De là, naît le conflit, dont le but est d'entrer en jouissance de l'objet du désir. Après être entré en possession de l'objet du désir, la seconde passion, pousse à sa conservation. Il y a une méfiance réciproque des hommes. D'où naît la nécessité de prendre des précautions pour dissuader quiconque voudrait le détrousser de son bien. Nous assistons « à une guerre offensive de prévention »112(*). La troisième passion fait prendre les armes en vue de la gloire. L'homme, pour Thomas Hobbes, veut être reconnu et admiré des autres. Il éprouve le désir d'être vu, estimé et reconnu comme étant le meilleur. Par conséquent, il a un penchant naturel à se mesurer aux autres, à toujours s'estimer supérieur, donc celui à qui il incombe naturellement le privilège de tout posséder. Ce dit, il est prêt à prendre les armes, « pour des bagatelles »113(*), « en vue de la réputation »114(*) ou souvent même de la gloriole. En considération de tout ceci, on peut dire que l'hobbisme politique est une véritable étiologie de la guerre dans la mesure où cette philosophie révèle et examine les causes qui peuvent pousser les hommes au conflit.

Dans l'état de nature hobbesien, nous avons affaire à des individus belliqueux, toujours prêts à guerroyer. Ils veulent soumettre les autres à leur diktat. Même les timorés qui préfèreraient éviter l'affrontement ne sont point épargnés115(*). S'il en est ainsi, nous pouvons dire que l'homme y constitue une véritable menace, un loup pour son prochain116(*). À en croire Thomas Hobbes, à l'état de nature, les hommes « sont dans cette condition qui se nomme guerre, et cette guerre est guerre de chacun contre chacun »117(*). Dans cet état, règnent « la crainte et le risque continuels d'une mort violente »118(*). Il en découle que l'homme ne peut jamais être appréhendé comme un fervent partisan de l'irénisme. Aussi, ce portrait froid qu'il fait des hommes à l'état de nature est pour beaucoup inadmissible. Elle contraste avec celle des autres contractualistes, notamment celle de Jean-Jacques Rousseau. Le philosophe genevois, dont la pensée politique est l'envers de la philosophie hobbesienne, pour sa part, estime que le philosophe de Malmesbury, en décrivant l'homme à l'état de nature comme un être toujours sur le qui-vive, dominé par des passions à tendance dominatrice, a en réalité tracé, le portrait de l'homme civil, en croyant dépeindre l'homme sauvage119(*), tant pour lui l'homme est par nature magnanime, débonnaire, porté à l'entente et la paix.

Au regard de l'argumentaire ci-dessus, on peut dire que l'état de nature hobbesien n'est pas propice à une vie paisible. L'homme y mène une existence misérable. Il ne peut s'épanouir ni se réaliser dans un tel environnement. Car, 

dans un tel état, il n'y a pas de place pour une activité industrieuse, parce que le fruit n'est pas assuré ; et conséquemment il ne s'y trouve ni agriculture, ni navigation, ni usage des richesses qui peuvent être importés par mer, pas de constructions commodes120(*).

Il y a donc nécessité et urgence de quitter cet état de confrontation permanente et totale.

Si les passions poussent les hommes au conflit comme nous l'avons indiqué plus haut, il convient de noter que c'est de ces mêmes passions et de la raison, cette autre dimension de l'homme, que la voie de son salut se dessinera. Pour Thomas Hobbes, l'homme a une double dimension : c'est un être à la fois de passions et de raison. Les passions, telles que la crainte de la mort, le souci de conservation des vies, le désir de commodités pour rendre les vies plus agréables vont inciter les hommes à fuir cet état où la vieest « solitaire, besogneuse, pénible, quasi-animale, et brève »121(*).  La raison calculatrice, quant à elle, va entrer en activité pour déterminer les voies et moyens qui peuvent « faire échec au déploiement de ces forces anarchiques que sont les passions »122(*) belliqueuses. Ce moyen idoine pour y parvenir, c'est le contratsocial. Grâce audit contrat les hommes vont se regrouper pour constituer la sociétépolitique. À travers ce contrat fondateur de la société politique, ils vont créer l'État censé alors assurer leur salut. Ce sont les modalités de ce contrat qui seront analysées maintenant.

2. Le contrat hobbesien : un contrat léonin

Tout comme l'état de nature, l'idée de contrat n'est pas une nouveauté qui se concevrait ex-nihilo. Elle n'est pas spécifique à Thomas Hobbesétant donné qu'elle était d'ordre religieux. Les Monarchomaques estimaient que Dieu avait signé un pacte avec le peuple. Une fois encore, Thomas Hobbes, le premier de tous les théoriciens de l'absolutisme, récupérera cette idée puis lui donnera une nouvelle orientation123(*). Cette manière de formater ledit concept pour l'adapter à sa pensée politique a pu faire dire à Simone Goyard-Fabre, que Thomas Hobbes « ne répugne pas aux bouleversements sémantiques »124(*). Il reprend des termes qui existent avant lui et leur confère un sens tout à fait nouveau. Le contrat hobbesien, a contrario de celui des Monarchomaques n'est pas un contrat entre les hommes et Dieu. Un tel contrat est pour lui inimaginable125(*). Le contrat ne peut s'établir qu'entre humains, des êtres possédant la raison, capables d'un calcul rationnel et à mesure d'exprimer leurs opinions. En conséquence, un contrat avec les bêtes n'est nullement possible non plus126(*).

Contrairement au contrat social lockéen127(*), le contrat social dont parle le philosophe de Malmesbury, à l'instar de l'état de nature, relève de la pure théorie, c'est-à-dire d'un simple abrégé du mécanisme. À aucun moment de l'histoire de l'humanité, les hommes ne se sont retrouvés pour discuter des modalités d'un tel pacte. L'idée de contrat social est donc une fiction méthodologique. Elle a pour but de rendre compte de la légitimité de l'autorité politique. Il existe plusieurs approches du contrat social en philosophie politique128(*). Cependant, tout comme pour l'idée de l'état de nature, c'est l'auteur du Léviathan qui, le premier, procède à une systématisation de l'idée de contrat social. Il en explicitera les prémisses.

Le contrat social hobbesien est un contrat, qui de par ses caractéristiques, est bien particulier. Pour mettre fin au chaos originel, au désordre qui prévaut à l'état de nature, chacun renonce au droit naturel illimité qu'il possède de faire ce qu'il veut, mais avec la condition que les autres en fassent autant129(*), et cela pour accéder à une vie sociale organisée. Il n'y a pas de contrat si un seul individu refuse de se dessaisir de son droit. L'abandon des droits est mutuel, réciproque et non unilatéral. Si l'individu A transmet son droit, les individus B, C, D doivent en faire autant. Comme telle, « la transmission mutuelle du droit est ce qu'on nomme CONTRAT »130(*). L'abandon réciproque par les particuliers de leurs droits naturels est un préalable à l'établissement du contrat. C'est une condition sine qua non du pacte. Sans cela, point de contrat possible.

Par ailleurs, le contrat social hobbesien a un caractère individualiste. Il est scellé entre particuliers. Ce sont des individus pris individuellement, dans une singularité absolue qui souscrivent au contrat. C'est un contrat « de chacun avec chacun »131(*). Ce n'est pas une somme d'individus, par exemple une multitude ou un peuple, dont les membres passeraient le contrat ou encore un contrat de type roi et gouvernés. Car à l'état de nature, il n'y a pas encore de notion de peuple, ni de multitude. Il faut dire que les individus sont à l'état de nature dans une irréductible solitude. Pour reprendre les mots de Janine Chanteur, « chacun reste une individualité insulaire qui n'entretient avec quelque autre ou quelques autres que des rapports sans garantie »132(*). Aussi la multitude ne peut-elle avoir une synergie d'action, mieux encore nul membre d'un tel regroupement ne peut se prévaloir du droit de parler et d'agir au nom du groupe. « Car une multitude est incohérente, divisée, en état de séparation constant »133(*).C'est le contrat social qui donne naissance et consistance à la notion de multitude au sens de peuple qui peut désormais agir de manière unitaire, rationnelle, cohérente et ordonnée.

En outre, le contrat social hobbesien se fait de manière volontaire, vu que «  sans acceptation mutuelle, il n'est pas de convention »134(*). Ce n'est pas sous le coup de la contrainte d'un tiers que les individus décident de s'associer pour créer le corps politique. Ce sont des sujets conscients, qui après avoir éprouvé les difficultés de la vie à l'état naturel, en toute liberté, et après un calcul utilitaire des avantages qu'ils pourraient engranger d'un tel contrat, décident de le passer. La société n'existe alors que parce que les individus en ressentent la nécessité. Elle serait le résultat des volontés particulières puisque « c'est volontairement que la société est contractée, on y recherche l'objet de la volonté, c'est-à-dire, ce qui semble bon à chacun de ceux qui y entrent »135(*). En conséquence, il apparaît une théorie volontariste de l'État chez Thomas Hobbes.

Enfin, un autre trait d'occurrence de ce contrat, le plus fondamental sans doute, et qui a fait couler beaucoup d'encre, tant cet aspect du contrat hobbesien a été décrié d'autant qu'il se fait au profit d'un tiers : le Léviathan (le souverain). Il s'observe ici notamment un transfert mutuel des droits à un tiers à qui la multitude abandonne de façon tacite tous ses droits. En ce sens, le souverain hobbesien ne fait guère partie intégrante des contractants.136(*) Il n'est pas cosignataire. Le contrat s'établit entre contractants à son avantage. En droit moderne, on parlerait d'une stipulation pour autrui137(*). La stipulation pour autrui s'entend comme

la convention par laquelle il est convenu entre les parties comparant à l'acte que c'est une tierce personne et qui n'en est pas le signataire, qui bénéficiera des avantages du contrat. Dès son acceptation, qui est le plus souvent tacite, le tiers dispose d'une action directe contre le promettant pour le contraindre à exécuter son obligation138(*).

Par exemple, un contrat d'assurance vie est une stipulation pour autrui dans la mesure où le bénéficiaire n'est pas co-contractant mais en tire tous les bénéfices. Le contrat hobbesien sort ainsi de l'ordinaire : il est différent de tous les types de contrat édifié par ces contemporains139(*). En ce sens, « on peut donc dire que Hobbes fait figure de novateur et qu'il est singulièrement en avance sur la science juridique de son temps »140(*).

Le contrat social hobbesien est une délégation de pouvoir. Précisément, il s'y observe une autorisation d'actions et de représentation des contractants en faveur du souverain. Un mandat lui est conféré pour parler, décider et agir en leur nom. Le souverain se substitue aux contractualistes. Les moyens d'actions sont mis à sa disposition. La force rassemblée des contractants devient sienne et sa volonté la leur. Le contrat est pour ainsi dire l'acte de naissance de la souveraineté141(*). C'est de lui que l'autorité politique tire toute sa légitimité. Le souverain « n'est qu'un tiers à qui est confiée la puissance de commandement. Aussi, une fois le contrat réalisé, il dispose d'un pouvoir indivisible, illimité et irrévocable »142(*). Il n'est nullement possible de contester son autorité, car ce serait une remise en cause du contrat social. On peut arguer que le contrat hobbesien est un contrat de type léonin qui fait seulement la part belle au souverain.

Dans les faits, le contrat hobbesien crée plus d'obligations pour les sujets qu'il n'accorde de prérogatives exorbitantes au souverain. Ce contrat des sujets envers le souverain se fait de manière unilatérale. Dans le partage des obligations, les sujets se retrouvent avec la quasi-totalité des devoirs. Ils sont tenus de se plier à la volonté du souverain. Ils doivent répondre de leurs actions devant lui, alors que ce dernier n'est pas tenu de leur rendre des comptes. Il répond de ses actes devant Dieu seul. S'il en est ainsi, c'est parce qu'il n'est pas un membre contractant. Sans être demandeur, « il reçoit son pouvoir sans condition, sans engagement de sa part »143(*). Dès lors, rien ne l'engage ni l'oblige devant les citoyens. Le souverain tire un plus grand profit du contrat que les contractants. C'est en somme un contrat de domination sans bornes qu'il exerce sur ses sujets.

Les termes d'un tel contrat pourraient offusquer les laudateurs de la démocratie et des Droits de l'Homme144(*), mais il n'en est rien pour les sujets du souverain hobbesien, en cela que « les termes de ce contrat sont dictés par la nécessité de constituer une union durable, capable de substituer les bienfaits de la paix civile aux risques d'une guerre générale »145(*). En d'autres termes, le contrat social à l'initiative de Hobbes se présente comme la construction d'un ordre rationnel pour échapper aux calamités de la guerre de l'état de nature. Aussi les sujets du Léviathan sont-ils prêts à tout consentir. Cet état de fait laisse entrevoir ce que sera la politique pour Hobbes. Si l'état de nature est un état de cruauté et de malheur, et que le contrat social seul permet d'y échapper, alors la politique ne peut que se présenter comme la quête de rapport pacifié au sein de la société. Et nous allons à présent consacrer notre énergie discursive à l'analyse de cette interprétation hobbesienne de la politique.

3. La saisie du pouvoir politique comme quête de rapport pacifié

Les hommes, par l'entremise du contrat social, donnent naissance à la société. Cependant, la vie de cette multitude d'hommes au sein de la société ne saurait se dérouler sans heurts si elle n'est pas organisée. C'est à ce besoin que répond la politique. Pour être plus explicite, la politique va apparaître comme un système d'organisation de la société. C'est l'idée que sous-tend son sens étymologique. Elle s'appréhende comme un art, celui de diriger la cité, notamment un art de l'administration sociétale. Dans la perspective hobbesienne, elle est une technique d'organisation de la société, le lieu du déploiement de l'imagination créatrice de l'homme, une activité qui révèle au grand jour ce dont l'homme est capable. Pour preuve, le Léviathan, cette personne artificielle, chargée d'assurer la survie humaine, est le produit de cette intelligence créatrice. Dans la pratique de la politique, la créativité humaine se trouve au service de la survie de l'espèce.

C'est par l'entremise de la politique que les hommes s'arrachent à la bestialité naturelle pour accéder à la rationalité. Autrement dit, « la nature est le lieu des passions spontanées et immédiates, la politique est le lieu de la médiation de la raison »146(*). Elle est une invention humaine pour faire face à l'hostilité naturelle en s'imprégnant de l'ordre de la logique. Plus précisément, elle consiste en la mise en oeuvre d'un ensemble de stratégies rationnelles par les hommes pour organiser la vie en communauté, afin de faire l'économie de la violence naturelle, en vue de permettre à chacun de jouir des bienfaits de la vie communautaire. S'il en est ainsi, il faut dire que pour Thomas Hobbes et tous les Modernes, l'« intérêt immédiat est l'affirmation de l'existence physique, la conservation la plus élémentaire »147(*).

En outre, si le but de la politique, c'est la conservation de l'être biologique et la pérennisation de l'espèce humaine, chez Hobbes,

le concept de politique peut s'entendre [alors] comme l'organisation de la société, en vue d'exclure l'éventualité de la guerre. (...) Elle est la recherche de moyens appropriés, en vue de juguler au quotidien le désordre qui a son origine dans la nature humaine148(*).

Le faire-politique, dans le système hobbesien, rompt avec la logique des rapports de force. Le rapport à autrui ne se déroule plus sur le mode du recours excessif à la violence comme à l'état de nature, mais se tourne résolument vers le respect du droit149(*). Le droit devient le criterium de l'agir humain.Il est un ensemble de règles positives que crée le politique et qui balisent le champ du permis et de l'interdit. Par leur caractère permissif, prohibitif, et coercitif, elles permettent aux hommes de mieux vivre ensemble. Le droit favorise la régulation du corps politique. Par son truchement, les hommes échappent à l'ordre naturel, où c'est la loi du plus fort qui l'emporte. En outre, le droit naturel, dans la mesure où il autorise tout un chacun à user de tous les moyens pour atteindre son but, est source de conflit. La logique du droit de nature conduit à la guerre, guerre de tous contre tous. Le droit positif, produit de la raison humaine, permet de mettre fin à cette guerre. Les hommes n'ont plus besoin de recourir à la violence pour résoudre leurs litiges, mais s'en remettent au Léviathan, seul habilité à dire le droit, donc à trancher les différends entre contractants. Ils peuvent alors coexister sans s'entre-tuer.

Il en découle que ces règles auxquelles doivent désormais recourir les hommes pour régler leurs contradictions ne se calquent pas sur l'ordre naturel. Les Anciens soutenaient une continuité de l'ordre naturel dans le corps politique. Pour preuve, Aristote voit en l'homme un être social dont les actions s'inscrivent dans l'ordre cosmique. Ceci implique que les lois qui doivent encadrer la vie sociale sont fonction de l'ordre naturel. Autrement exprimé, il existe des normes naturelles, la politique ne devrait être que la reproduction de ces normes au sein du corps politique. L'ordre politique juste est un ordre conforme à l'harmonie naturelle. Par conséquent, dans leur approche de la question politique,

les Anciens partaient de la question fondamentale de savoir comment les hommes peuvent pratiquement vivre en conformité avec un ordre dicté par la nature, les modernes[quant à eux, et Hobbes compris] partent du problème pratique de la domination des forces naturelles qui menacent les hommes150(*).

Pour le philosophe anglais, c'est grâce à l'arbitrage de l'État, ce pur produit du génie humain, que les hommes échappent aux forces naturelles. En son sein, lui seul détermine ce qui a valeur de loi, sans nécessairement faire référence à la loi du cosmos. La loi civile qu'il établit l'emporte en dignité sur les lois naturelles. Bref, l'ordre politique juste, s'il en existe, pour Thomas Hobbes, est le produit d'une volonté arbitrairement humaine.

Enfin de compte, on peut dire que l'hobbisme politique est une philosophie de la paix qui quête l'ordre politique le plus apte à affranchir l'homme du règne de la violence naturelle et à même d'assurer la stabilité politique. La politique, chez Hobbes, vise à faire en sorte que les hommes ne se détruisent pas ou qu'ils ne s'autodétruisent pas dans des rapports de violence intempestive. La violence est le lieu de destruction, de l'autodestruction des hommes, partant de la société. Aux yeux de Thomas Hobbes, « la politique est un pacte de la vie avec elle-même, un compromis ; la méditation sur la politique est [par conséquent] une méditation sur la nature d'un ordre humain tendant à conserver la vie »151(*). Ainsi, on peut arguer que pour remédier au désordre que produit la violence, le philosophe politique hobbesien n'a pas seulement pour mission de montrer « le grand chemin de la paix, mais il fera voir aussi les détours et les routes obscures de la sédition »152(*). Thomas Hobbes est en cela un iréniste dans la mesure où il fait de l'instauration de la paix le but premier de la politique.

Cette quête de la paix passe par la garantie à chaque membre de la communauté politiqued'un égal accès à tout ce qui pourrait favoriser son développement. C'est dans et par la communauté politique que l'homme peut véritablement s'épanouir et exprimer toutes les potentialités qui sommeillent en lui. Mais cela ne saurait être possible, si les commodités qui concourent à rendre l'existence humaine agréable sont inexistantes. La finalité de l'action politique consiste alors à déployer tout un ensemble de dispositifs pour permettre à l'homme de réaliser son essence d'être rationnel. Le principe organisationnel de la société doit être tel que chacun puisse prétendre à un accès équitable au bien commun. Et ce bien commun va au-delà de la simple satisfaction des conditions d'existence matérielle153(*). Ce bien commun englobe aussi toutes ces valeurs immatérielles qui font que la vie est authentiquement humaine : le droit, la justice, la liberté, la sécurité, etc.

Cependant, on pourrait dire que ces buts poursuivis par l'État-Léviathan, s'ils se complètent, en termes d'hiérarchisation, ne se valent pas. Les uns sont un préalable à l'avènement des autres. Par exemple, pour que la justice puisse se réaliser, il faut que le droit préexiste. Le droit est la cause qui a pour effet la justice. Il faut qu'il soit formulé des lois pour qu'on puisse à la lumière de celles-ci juger de l'injustice ou non d'une action. Dans cette logique d'hiérarchisation, nous sommes tenté de nous poser la question de savoir dans les buts poursuivis par l'État-Léviathan, entre la sécurité et la liberté, laquelle chez Thomas Hobbes, devrait être un préalable ? Mieux laquelle l'emporte en dignité ?

La première impression qui se dégage de la lecture de l'oeuvre politique de Thomas Hobbes, c'est qu'il fait passer à dessein la sécurité au-dessus de la liberté. S'il faut choisir d'entre les deux termes, la sécurité serait de loin préférable. Cependant, n'est-ce pas qu'une simple impression ? Faut-il prendre cela pour un état de fait dans l'hobbisme politique ? Une telle lecture de l'hobbisme politique est-elle pertinente ? Y-a-t-il véritablement une immolation de la liberté sur l'autel de la sécurité dans l'hobbisme politique ? Thomas Hobbes, face au dilemme qui consisterait à choisir entre la sécurité et la liberté, a-t-il vraiment préféré la sécurité à la préservation des libertés des citoyens ? D'ailleurs, la sécurité et la liberté s'opposent-t-elles diamétralement au point d'être foncièrement irréconciliables ? D'une certaine façon, le hobbisme politique n'est-il pas une philosophie qui tente de concilier ces deux composantes fondamentales de l'ordre politique ?

Ces interrogations trouveront des éléments de réponse dans la seconde grande partie à venir de ce travail.

DEUXIÈME PARTIE :

UNE DIALECTIQUE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA LIBERTÉ DANS LE HOBBISME POLITIQUE

Les hommes en quittant l'insécurité et les conjonctures de précarité analysées dans les pages précédentes ne l'ont pas fait « pour se jeter dans l'insécurité et la misère de l'état civil »154(*). S'ils ont consenti à sacrifier leurs libertés naturelles, c'est en vue d'un bien qu'ils estiment plus grand en termes de gains que leurs libertés naturelles. Ces avantages inopinés, pour plus de précision, c'est la sécurité et la paix que leur promet l'État-Léviathan. Mais on est tout aussi tenté de se poser la question de savoir si les citoyens une fois dans les liens de la société civile seraient prêts à subir toute sorte d'exactions dans le silence et la résignation totale et cela au nom de la sécurité que leur assurerait la république léviathanique. Sont-ils prêts à concéder autant de sacrifices pour la sécurité ? Si la réponse s'avérait affirmative alors quels sacrifices pourraient-ils consentir ? D'ailleurs, la fin de la politique peut-elle se réduire à la seule quête sécuritaire ? En d'autres termes, la mission de l'État hobbesien se réduit-elle véritablement à la poursuite inlassable de la sécurité ? Si oui, ne court-on pas le risque d'assister à l'émergence d'un État policier, sécuritariste et liberticide ? Sinon, ne faut-il pas dire que la sécurité dans le système politique hobbesien constitue un moyen terme pour accéder à d'autres biens ?

Notre hypothèse de travail de base, c'est que Thomas Hobbes ne réduit pas le rôle de l'État à la seule quête de la sécurité. En faisant de la sécurité un a priori, il veut en vérité faire voir qu'elle est un préalable nécessaire, la condition sine qua non, pour pouvoir réaliser tout projet viable et fiable de société. De l'ordre sécuritaire étatique découle la possibilité de pouvoir atteindre toutes les autres finalités politiques que sont l'éducation des citoyens, la santé, la justice pour tous, la jouissance des libertés individuelles et collectives. Bref, la sécurité c'est le tabernacle de toutes les autres valeurs régaliennes en bonne république. Pour être encore beaucoup plus explicite sur la question, notre préoccupation est celle de savoir, dans cette partie de cette tranche d'analyse, s'il n'y a pas un passage de la sécurité à la liberté au sein de l'État-Léviathan. Et comment s'opère dans les faits cette transmutation ?

Souscrivant à cette approche de l'hobbisme politique, il s'agira alors d'analyser, d'une part, au chapitre III, le contenu que Thomas Hobbes donne aux notions de sécurité et de liberté, et d'autre part, au chapitre quatre, nous nous intéresserons à la signification intrinsèque de ces deux notions pour l'État-Léviathan.

CHAPITRE III : LA SPÉCIFICITÉ DE L'APPROCHE HOBBESIENNE DES CONCEPTS DE SECURITÉ ET DE LIBERTÉ

Après avoir posé le postulat dans les pages précédentes, notamment au chapitre II à la section trois que la politique sous l'impulsion de Thomas Hobbes, a pour but de pacifier les rapports humains en assurant leur sécurité et éventuellement leur liberté, il apparaît à présent nécessaire de chercher à mieux cerner le sens de la sécurité et de la liberté pour l'auteur du Léviathandans la mesure où l'effectivité de celles-ci y contribuent. Autrement exprimé, la question est, dans ce présent chapitre, de savoir quel contenu Hobbesdonne-t-il aux concepts de sécurité et de liberté ? Il semble avoir une approche assez particulière de ces concepts. Son intuition de ses deux notions va au-delà de la conception commune. C'est cette restitution conceptuelle qui sera exposée dans les sections une (sécurité) et deux (liberté) de ce chapitre.

1. La sécurité synonyme de stabilité et de paix

De manière courante, on estime qu'être en sécurité, revient pour le citoyen à se sentir à l'abri de tout danger, de tout péril. Rendre la sécurité du citoyen effective coïncide alors pour l'État à travailler à écarter tout ce qui pourrait constituer une menace directe pour la vie de ses sujets ou une source d'inquiétude. Le citoyen est dès lors en sécurité, si et seulement s'il peut mener une existence paisible, sous la protection de ce dieu terrestre qu'est le Léviathan. Bien compris, le citoyen ne doit pas être exposé à des dangers de quelque nature que ce soit. C'est en ce sens qu'il faut comprendre cette définition de la sécurité que l'on retrouve dans le dictionnaire Larousse : Du latin securitas, la sécurité est la « situation dans laquelle quelqu'un, quelque chose n'est exposé à aucun danger, à aucun risque, en particulier d'agressions physiques, d'accidents, de vols, de détérioration : cette installation présente une sécurité totale »155(*). Cependant, une telle conception de la sécurité considérée comme fin de l'autorité politique paraît trop idéaliste, voire irréaliste. Comment la république pourrait-elle éliminer tous les dangers que pourrait encourir le citoyen ?

Au-delà de tout ce qu'on peut en dire de façon objective, la notion de sécurité revêt manifestement un caractère subjectif. Elle est foncièrement liée à l'état d'esprit du sujet. Sébastian Roché dans son livre intitulé Insécurité et libertés parle pour ce faire de sentiment de sécurité156(*). Autant dire que le sentiment de sécurité est plus un état psychologique qu'une réalité objective. Ce sentiment, il l'oppose au sentiment d'insécurité. Le sentiment d'insécurité est un malaise qu'éprouve l'individu face à l'hypothèse d'une menace future ou probable qui pourrait s'abattre sur lui. Cette inquiétude peut être justifiée ou pas. L'insécurité implique l'existence d'un risque ou d'une menace. On peut même être dans l'incapacité d'identifier celle-ci. Cependant, la sécurité suppose une distinction de ces différents types de menaces157(*) : Ce qui constitue une situation d'insécurité pour un citoyen peut ne pas l'être pour un autre. Pour preuve, le délinquant, le truand, le chauffard représentent à des degrés divers une menace pour le citoyen. Le sentiment de sécurité est en ce sens relatif : relatif à l'individu, relatif à la situation, relatif au moment. S'il en est ainsi, on pourrait bien partager l'avis subséquent de Daniel Marc Weinstock :

la sécurité est un concept gradué plutôt qu'absolu. C'est-à-dire que l'on peut être plus ou moins en sécurité, dépendant de l'intensité de la menace à laquelle nous faisons face, et à l'étendue des intérêts que ces menaces visent. Il n'existe aucun seuil métaphysique au-delà duquel un agent peut être vu comme étant en sécurité, et en deçà duquel on peut dire de lui que la sécurité lui manque158(*).

En propos moins ambigus, il n'existe pas de définition objective, claire et absolue de la notion de sécurité.

C'est le lieu d'indiquer pour proscrire tout quiproquo de mauvais aloi que, la sécurité hobbesienne n'est pas réductible à ces deux conceptions de la sécurité susmentionnées. Mieux, elle n'est pas nécessairement à situer au niveau de l'individu, donc par la même voie réductible à ce sentiment de sécurité qu'éprouverait ce dernier. La sécurité, telle que le conçoit Thomas Hobbes, concerne l'ensemble du corps politique. OEuvrer à sécuriser le corps politique pour l'État-Léviathan, c'est assurer la survie biologique de tous ses membres. Le faire, c'est les mettre à l'abri de la violence. Autrement exprimé, c'est veiller à protéger le citoyen de toutes les sources de violence. Et comme la principale source de violence, c'est l'autre, alors sécuriser le citoyen, c'est le protéger d'autrui. Car la violence s'exprime toujours dans un rapport à autrui. Dès lors, le citoyen a de bonnes raisons de craindre son prochain. Le prochain s'appréhende comme une autre conscience qui représente un obstacle à sa liberté. Au vu de cette omniprésence d'autrui, le risque d'affrontement paraît inévitable. C'est pourquoi il donne plein pouvoir à l'État en vue d'intervenir par le biais de ses Appareils Idéologiques et Répressifs pour veiller à ce que cela n'arrive pas ou du moins soit jugulé dans des proportions acceptables. C'est à cette condition minimale que le citoyen pourrait vivre dans la république à l'abri de la violence qu'autrui pourrait exercer sur lui.

Le terme de sécurité en lui-même se rencontre assez rarement sous la plume de Thomas Hobbes. En lieu et place de ce mot, ilpréfère utiliser le concept de sûreté. Dans son argumentation, il les inter-change pour signifier la même chose. Mais, quel contenu donne-t-il au vocable de sûreté ? À cette question, sa réponse paraît des plus claires : « Notez que par sûreté, je n'entends pas ici la seule préservation, mais aussi toutes les autres satisfactions de cette vie que chacun pourra acquérir par son industrie légitime, sans danger ni mal pour la République »159(*). La sécurité ne se réduit donc pas à la simple conservation biologique de soi. Elle va au-delà de cette simple conception mécanique que l'on rencontre chez bon nombre de ses détracteurs. Elle englobe, au-delà de la survie biologique des citoyens, tout ce qui pourrait concourir à rendre leur existence plaisante, et qui ne constituerait pas une source possible de déstabilisation de la république. La dimension de survie que l'on retrouve dans le concept de sécurité concerne, en premier lieu, le citoyen, en seconde position, l'État et ses institutions160(*).

La survie de l'État et de ses membres, chez Thomas Hobbes, implique l'ordre puisque la sécurité signifie ordre ; ils sont synonymes. Le passage de l'état de nature à l'état civil est bénéfique pour l'homme, dans la mesure où le Léviathan vient pour instaurer l'ordre. Il met fin au désordre originel. À l'état de nature, règne le chaos total. Le risque de mort violente était le lot des individus. À tout instant, l'homme pouvait passer de vie à trépas. En retour, le souverain travaille à extirper du corps politique tous les germes de violence et de tension qui pourraient replonger la république dans la situation qui avait cours à l'état de nature. En clair, l'État veille à l'organisation du corps politique pour conjurer la violence. La sécurité publique s'analyse ainsi sous le couvert de l'extinction par le pouvoir politique de la violence originelle.

La vérité politique qu'il s'agit de professer ici, c'est que, « plus l'ordre civil est stable et solide, mieux la paix est assurée »161(*). Il en est de même chez Thomas Hobbes, parce qu'« aussi longtemps que les hommes vivent sans aucun pouvoir commun qui les tienne tous en respect ils sont dans cette condition qui se nomme guerre, et cette guerre est guerre de chacun contre chacun »162(*). L'ordre étatique concourt à l'assise de l'harmonie et de la concorde sociales. L'ordre étatique vise à promouvoir la paix, entendu que la paix est l'absence de troubles. En l'absence de troubles, les citoyens peuvent, en toute assurance, agir, vivre en harmonie, et vaquer à leurs occupations respectives, ils s'entraident et s'assistent mutuellement.

Cependant, ne court-on pas le risque que cet impératif de l'État-Léviathan en vue de l'harmonie sociale se retourne en menace contre le citoyen ? La sécurité ne peut-elle pas se transformer en insécurité comme l'écrit Hélène L'Heuillet163(*) dans son introduction à l'ouvrage collectif intitulé Sociétés contemporaines et sécurités? Mieux, cette quête inlassable de sécurité, à la limite obsessionnelle, ne constitue-t-elle pas un danger pour la liberté des citoyens ? La réponse à cette interrogation est négative si l'on se situe dans la perspective de Raymond Paulin qui estime que, « la sécurité de chacun, qui représente l'absence de tout empêchement, de toute contrainte violente, s'identifie dans ce cas, aux yeux de Hobbes, avec la liberté elle-même : être libre, c'est être en sécurité »164(*). Ainsi, dans la perspective hobbesienne, la sécurité, en plus d'être synonyme de stabilité politique et de paix sociale, s'accompagne aussi de liberté.

2. De la liberté naturelle à la liberté civile

La liberté demeure l'une des caractéristiques essentielles de l'homme. Mieux, elle constitue son essence étant donné que le mot lui-même n'a de sens qu'appliqué à l'homme165(*). Elle le détermine à agir ou non. La liberté est ce qui guide les actes des hommes. Plus, elle est l'unité de mesure de la responsabilité humaine. Imputer un acte à quelqu'un présuppose que ce dernier soit un agent libre. Aussi sans elle, serait-il difficile, de parler de responsabilité humaine. Cependant, parler de liberté dans la sphère de l'humain, c'est reconnaître tacitement ou explicitement que celui-ci n'est pas toujours en mesure d'exercer cette liberté. Aussi, tous ceux qui ont abordé ce terme cherchent à établir les conditions de son exercice. D'ailleurs, la plupart des critiques contre Thomas Hobbes se sont faites au nom de la liberté humaine.Il serait un penseur liberticide.

Contrairement à ce que pensent ses détracteurs avec leurs critiques aux allures hâtives, Hobbes s'impose une démarche scientifique irréprochable d'autant qu'il recherche lui aussi les conditions qui vont permettre de rendre la liberté humaine effective. Vu sous ce prisme objectif, il ne serait pas excessif d'alléguer qu'il est le penseur par excellence de la liberté humaine. Pour preuve, dans toute son oeuvre politique, et ce au fil de son argumentation, il ne cesse de marteler que les hommes, sont à tout instant libres, qu'ils sont des êtres naturellement libres. Nous avons, par exemple, affaire à des individus libres à l'état de nature. Ce sont des sujets libres qui se retrouvent pour passer le contrat qui donne naissance au corps politique. Après le contrat social, ces derniers continuent d'être libres au sein de la société civile. Mais, il existe une différence entre la liberté dont ils jouissent à l'état de nature et celle qu'ils ont une fois le corps politique constitué. La liberté naturelle est différente de la liberté civile.

À l'état de nature hobbesien, les hommes jouissent d'une liberté totale. Cette liberté est illimitée et sans commune mesure. Elle n'a aucune borne, aucune barrière. Chaque individu agit, selon son bon vouloir. Tout y est permis. En effet, l'individu peut faire tout ce qui concourt à la réalisation de son intérêt. La liberté des individus dans cet état se mesure à l'aune de leurs aptitudes. La liberté naturelle est tout ce que nous permettent nos forces. Elle s'identifie à notre capacité à persévérer dans notre être. À l'état présocial hobbesien, l'homme est libre jusqu'à ce qu'il rencontre un obstacle qu'il ne peut surmonter. D'ailleurs, c'est en substance ce qui ressort de la définition qu'il donne lui-même de la liberté :

Les mots de LIBERTY ou de FREEDOM désignent proprement l'absence d'opposition (j'entends par opposition : les obstacles extérieures au mouvement), et peuvent être appliqués à des créatures sans raison, ou inanimées, aussi bien qu'aux créatures raisonnables166(*).

Et Jean Terrel d'expliciter davantage cette conception hobbesienne de la liberté en ces termes : « C'est pour un corps quelconque l'absence d'obstacles externes à son mouvement »167(*).

La limite de la liberté humaine à l'état de nature, c'est la rencontre avec une autre liberté : le prochain. L'égalité naturelle des hommes est ce qui justifie cet état de fait. En effet, de cette égalité naturelle découle une égalité de droit. Le droit naturel confère aux hommes les mêmes droits. Par conséquent, chacun jouit de la même liberté que son prochain. La liberté naturelle s'identifie au droit naturel ; j'ai les mêmes aspirations que mon prochain. Les moyens que je déploie pour atteindre cette fin, autrui est aussi en droit de déployer les mêmes moyens. Cet état de fait a pour corolaire que quand deux sujets libres se rencontrent, c'est le plus fort qui l'emporte. Aussi ces droits et ces libertés finissent-ils par s'annihiler. Cette situation conduit à l'insécurité et à une existence misérable. Nous n'avons alors affaire qu'à une liberté éphémère à l'état de nature.

En conséquence, le philosophe anglais soutient que la véritable liberté, c'est celle qui est prise en charge par le corps politique, c'est-à-dire la liberté civile. La liberté, pour lui, trouve son expression la plus complète dans le cadre sociétal. Il en est ainsi, parce que la société est régie par des lois. Le corps politique est à même de garantir la liberté humaine, le droit à la liberté par le biais des lois qui la régissent. Pour Thomas Hobbes,

le droit de nature, c'est-à-dire la liberté naturelle de l'homme, peut être amoindri et restreint par la loi civile : et même, la fin de l'activité législatrice n'est autre que cette restriction sans laquelle ne pourrait exister aucune espèce de paix168(*).

Les lois civiles ont pour visée de fixer des limites, des bornes au droit naturel des hommes. Ce qu'elles interdisent, elles l'interdisent pour tous. Il en est de même pour ce qu'elles autorisent. Il y a un rapport d'égalité devant la loi. Les lois civiles déterminent le droit des sujets ainsi que les peines et sanctions encourues. Elles confèrent ainsi aux citoyens la liberté et les encadre dans leur agir.

Pour Thomas Hobbes, la liberté civile ne s'apparente aucunement au libertinage en ce sens qu'elle n'est pas synonyme de licence. Être libre, ce n'est pas s'émanciper de la tutelle des normes sociales pour laisser libre cours à ses désirs ou encore faire tout ce que l'on veut comme bon nous semble169(*) à l'exemple de ce qui se passait à l'état de nature. En vérité, c'est là une fausse conception de la liberté. La véritable liberté des sujets réside plutôt dans l'acquittement de leurs devoirs civiques, ainsi que le respect strict des lois de la république. Certes, les lois civiles sont contraignantes, mais les limites qu'elles fixent n'ont pas pour but d'oppresser, de persécuter. Elles ont pour finalité de nous libérer du diktat des autres. Les hommes ne sont obligés que par les lois. Notre liberté ne dépend plus du bon vouloir d'un autre ni de nos aptitudes. Elle se trouve déterminée par les lois civiles. De cela, on peut affirmer que la contrainte peut être conciliée avec la liberté170(*).

Si la liberté civile se trouve encadrée par les lois civiles ; signalons toutefois que celles-ci ne peuvent tout baliser. La loi ne peut tout régenter. Il y a certaines actions qui ne sont pas réglementées par celles-ci. Là où la loi ne se prononce pas, selon Hobbes, l'homme est libre d'agir, selon sa conscience. Il s'en remet à elle pour décider ce qu'il convient de faire. C'est ici que sa capacité à agir par lui-même, à se déterminer lui-même se manifeste. Il exprime cette idée en ces termes : « Dans tous les domaines d'activité que les lois ont passés sous silence, les gens ont la liberté de faire ce que leur propre raison leur indique comme étant le plus profitable »171(*). Le disant, sa conviction, c'est que l'homme n'est pas un robot, dont on pourrait prévoir ou encadrer au détail près toutes les actions par les lois civiles.

CHAPITRE IV : LE SENS DE LA SECURITÉ ET DE LA LIBERTÉ POUR L'ÉTAT HOBBESIEN

Que représentent la sécurité et la liberté pour l'État hobbesien ? C'est à cette interrogation qu'ambitionne de répondre à présent ce chapitre qui se décline en deux sections et qui éclaire d'une façon ou d'une autre les rapports qu'entretiennent la sécurité et la liberté au sein de l'hobbisme politique. Dans la première section, il va être question de montrer que la première tâche de l'État est, selon le philosopher hobbesien, de travailler à la sécurisation effective de ses citoyens. Mais la mission de l'État ne s'y réduit pas exclusivement. La sécurité ne constitue pas la raison d'être de l'État hobbesien ; elle n'est pas une obsession pour l'État-Léviathan. Aussi, à la section deux, nous verrons que la sécurité n'est en vérité qu'un tremplin qui permettra à l'État hobbesien d'assurer à tous les citoyens la jouissance paisible de leurs libertés individuelles et collectives. Il y a dans l'hobbisme politique un passage de la sécurité à la liberté d'autant qu'être en sécurité, c'est en réalité être libre172(*).

1. La sécurité comme première finalité de l'État

Au-delà de la régulation des rapports sociaux, l'État est aussi le garant de la sécurité des citoyens. Platon avait, dans l'Antiquité, en plus des philosophes-rois et des producteurs, senti la nécessité de la constitution d'un corps de gardiens, chargé d'assurer la sécurité de la Cité. Les soldats de la Cité idéale platonicienne devraient, d'une part, s'assurer de l'inviolabilité des frontières de la république, et veiller au maintien de l'ordre public au sein de la cité, d'autre part. À la renaissance, Nicolas Machiavel, dans la même perspective, soutiendra que tout prince soucieux de la stabilité de sa principauté devrait, en lieu et place du recours immodéré aux condottières, constituer un corps d'élite permanent à base majoritaire de nationaux pour sa propre sécurité et la défense de sa principauté.

Le concept de sécurité reste un mot-clef de l'hobbisme politique vu que tout le système hobbesien s'articule autour de cette notion. Le Léviathan, fruit de la volonté des hommes, a pour mission principale de protéger ses derniers173(*).

En tout état de cause, la sécurité demeure la base de la légitimité politique. Mieux, le corps politique est institué pour assurer la sécurité de ses membres. L'État, dans cette logique, prévient l'insécurité en réprimant les comportements déviants, puisqu'en intégrant le corps politique, les individus y entrent avec les tendances abominables qui les animaient à l'état de nature. L'agressivité et la violence se percevant quotidiennement dans les rapports sociaux, dès lors, l'action du politique doit viser, à travers la mise en place de mécanismes qui vont de l'organisation de l'éducation à l'organisation des villes et des forces de sécurité, à les dissuader de laisser libre cours aux pulsions belliqueuses et in fine asseoir la sécurité.

D'abord, il est nécessaire pour la sûreté des citoyens qu'ils soient instruits174(*) dans la mesure où l'éducation reçue impacte l'agir de ces derniers. Pour être plus explicite, l'enseignement de doctrines séditieuses se trouve être à l'origine de comportements séditieux qui peuvent déstabiliser l'État. Thomas Hobbes avait déjà remarqué que c'est dans l'enseignement des Anciens que s'enracine les troubles qui, à son époque, secouaient le corps politique anglais. Aussi pour parer à une telle éventualité, la république détermine-t-elle à l'avance ce qu'il convient d'enseigner. Il leur sera notamment enseigné les doctrines compatibles avec les exigences sécuritaires et à même d'assurer l'harmonie sociale. En conséquence, les curricula d'enseignement des jeunes doivent être minutieusement contrôlés par l'État. Il sera interdit, par exemple, l'enseignement de la philosophie aristotélicienne dans la mesure où il n'y a rien « de plus préjudiciable [à l'État](...) que le fait de permettre l'enseignement officiel de ces textes »175(*).La philosophie politique d'Aristote s'avère incompatible avec la paix civile, étant donné qu'elle renferme en son sein des enseignements qui pourraient être source de subversions. Or pour Thomas Hobbes, l'instruction doit être, compatible avec les buts poursuivis par l'État.

Ensuite, vient l'organisation des villes. L'aménagement de celles-ci doit obéir à une logique stratégique, sécuritaire. À cet effet, le souverain fera construire des fortifications qui permettront de protéger les villes des attaques des ennemis de la république. Au sein de la cité, des hommes seront mandatés par le souverain pour veiller au respect de l'ordre public. Ces sujets-soldats veilleront à ce que les sujets récalcitrants soient contraints de respecter les lois de la république. Ces hommes, chargés du maintien de l'ordre public, sont sous le commandement direct du souverain. Ces derniers doivent être bien rémunérés et dotés de moyens logistiques adéquats pour qu'ils puissent mener à bien leur mission. Par conséquent, en plus « des places fortes toujours prêtes pour la défense commune »176(*), l'État les dotera d'armes adéquates et de vaisseaux de guerre. S'il en est ainsi, c'est parce qu'au-delà du rôle de maintien de la sécurité intérieure et extérieure que leur assigne Hobbes, il est soucieux du bien-être de ces derniers. De ce fait et pour conduire à bien leurs différentes charges, ils devraient avoir droit à de bonnes conditions de travail, à de bons traitements pécuniaires. C'est à ce prix qu'ils pourront âprement défendre la république contre d'éventuelles attaques d'étrangers.

Enfin, si la sécurité de la république incombe à ces hommes dûment mandatés par le souverain, il faut dire que c'est parce que la sécurité nationale ne peut être dévolue à des mercenaires ou des groupes d'auto-défense inexpérimentés et mal formés. Le citoyen « disposant en effet de la protection de la République, il n'a pas besoin de celle de forces privées »177(*). Les mercenaires vendent leurs services au plus offrant. Aussi, on ne peut s'en remettre à eux. Dans la même veine que Nicolas Machiavel178(*), Thomas Hobbes estime que les mercenaires sont inutiles et dangereux en raison de leurs infidélités. Il est partisan de la création d'une armée nationale composée des sujets de la nation car on ne peut raisonnablement compter sur des forces étrangères, des milices pour assurer la défense de l'État. Par conséquent, il condamne le recours à ces forces malhabiles et âpres aux gains en tout genre. S'il advenait que le souverain se déchargeait de sa mission régalienne de protection des citoyens pour la laisser à la charge de mercenaires, il perdrait, de facto, sa légitimité. La perte de cette légitimité, en dernière instance, entraînerait la dissolution du corps politique.

Du reste, il n'est pas juste, d'après Hobbes, pour ses hommes que le souverain aura commis à la défense du territoire national et à la préservation des citoyens, de déserter le champ de bataille. Ce serait faire preuve de lâcheté et de grave trahison vis-à-vis de la république. Ces sujets-soldats devraient défendre avec fierté et bravoure la république. Cela doit se faire au péril de leurs vies. En vérité, ces sujets-soldats ont perdu tout droit d'être couards quand ils ont accepté volontiers de percevoir une solde pour défendre la république. Cette tranche de vérité, Hobbes l'exprime dans les termes suivants : « Celui qui s'enrôle comme soldat, ou qui touche une avance sur sa solde, se prive de l'excuse d'un naturel timoré : il est donc obligé non seulement d'aller au combat, mais aussi de ne pas s'enfuir du combat sans la permission de son capitaine »179(*).

Pour Thomas Hobbes, les citoyens s'ils ne peuvent faire recours à des milices privées, peuvent en revanche contribuer à la défense de la république. En effet, en situation de guerre, le salut de la république n'incombe pas qu'aux sujets-soldats. En pareille situation, la nécessité le commandant, tout le monde est appelé à s'engager sous les drapeaux nationaux pour la défense de la république. Autrement exprimé,

quand la défense de la République réclame l'aide simultanée de tous ceux qui sont aptes à porter les armes, chacun est obligé, car autrement c'est en vain qu'a été instituée cette République qu'ils n'ont pas l'intention ou le courage de protéger180(*).

En temps de paix, les citoyens pourvoient à leur propre sécurité en respectant les lois et en s'acquittant simplement de leurs impôts181(*). Et la bienséance impose qu'ils ne doivent pas rechigner à s'en acquitter. C'est de cette rente que le souverain pourra exécuter les dépenses relatives à leur sécurité quotidienne et aussi en cas de conflit supporter les dépenses que suscite la guerre.

La sécurité des citoyens implique que l'État-Léviathan jouisse du droit de déployer tous les moyens jugés nécessaires à l'accomplissement de sa tâche182(*). Des moyens de prévention, de dissuasion aux moyens de répression. À l'image du droit naturel qui confère le droit à chacun d'user de tous les moyens dont il dispose pour obtenir ce qu'il désire, le souverain aussi peut faire recours à tous les moyens qu'il juge nécessaires pour protéger les citoyens. Au-delà des restrictions des libertés civiles pour nécessité publique, il lui est permis d'entretenir des espions chez ses voisins et aussi d'entretenir des garnisons à ses frontières183(*). En outre, tout est permis contre ceux qui seront identifiés comme les ennemis de la république. Car, attenter à l'ordre public ou prendre les armes contre la république, c'est renoncer à sa citoyenneté, et donc accepter être traité en ennemi. Aussi, les textes juridiques qui s'appliquent aux citoyens ne sont pas applicables aux ennemis de la république184(*).

Au regard de tout ce qui précède, nous affirmons avec Dominique Weber que le modèle politique hobbesien constitue « une sorte de préfiguration des théories et des dispositifs sécuritaires »185(*) à l'oeuvre de nos jours. Et de la même manière que des États contemporains recherchent ainsi la sécurité, l'État-Léviathan cherche à préserver la vie humaine. Cependant, signalons que pour Hobbes, « les hommes ne souhaitent pas la préservation de la vie pour la préservation de la vie »186(*). Aussi, l'État après avoir rendu la sécurité effective se doit de travailler à assurer les autres conditions qui pourraient concourir à la réalisation de ces derniers.

2. La sécurité, socle des libertés au sein de l'État-Léviathan

La sécurité s'avère être un a priori, comme nous l'avons déjà dit,pour accéder à d'autres finalités. Sa réalisation permet à l'État-Léviathan d'atteindre tous les autres objectifs qu'il pourrait s'assigner. Une fois celle-ci assurée, les citoyens pourront jouir de certaines libertés individuelles et collectives et cela dans le strict respect des lois de la république. Au-delà même de la reconnaissance de ces libertés aux citoyens, l'État-Léviathan va s'évertuer à les rendre effectives et à leur en assurer cette jouissance. C'est à l'analyse de ces libertés que sera consacrée cette section

2.1. Les libertés individuelles dans l'État hobbesien

Les libertés des citoyens dans l'État hobbesien se résument à tout ce qu'ils peuvent faire sans courir le risque de s'attirer le courroux du souverain. L'exercice de ses libertés ne peut mettre à mal l'ordre public. Ces libertés, ce sont des droits auxquels ils peuvent prétendre et qui ne rentrent pas en conflit ouvert ou latent avec les lois de la république. On pourrait parler de droits-libertés. Partant de ce jugement, nous nous posons la question de savoir quels types de droits-libertés l'État hobbesien reconnait-il aux citoyens ? À cette interrogation, et ce à la lumière de la lecture du Léviathan, plus précisément le chapitre XXI, intitulé « De la liberté des sujets », nous pouvons affirmer que ces droits-libertés sont multiples. Pour en avoir une idée panoramique, nous allons en examiner quelques-uns.

L'État hobbesien reconnaît au citoyen la liberté de procréer. Si la conservation de soi des citoyens doit être assurée, alors l'État a en filigrane pour but de favoriser la reproduction du genre humain. Aussi, l'État-Léviathan, par l'ordonnancement de ses lois, devra favoriser la reproduction des sujets187(*). La survie de l'espèce, par la procréation, est érigée en droit incessible. Il est alors permis d'alléguer que l'hobbisme politique se trouve en opposition ouverte avec ces lois anti-natalité que votent certains États, de nos jours, pour réguler les naissances.

Comme telle, la sécurité implique le droit aux commodités du bien-vivre parce que c'est quand règne la sécurité que les commodités pour rendre la vie plus agréable peuvent effectivement être recherchées. Le tout n'est donc pas d'avoir la vie sauve ou d'avoir des enfants, mais aussi et surtout les moyens de rendre sa vie et celle des êtres chers agréables. S'il est prescrit que le citoyen a droit à une vie descente, c'est une obligation qui s'impose au souverain d'observer cette jouissance. Ce serait même « une négligence criminelle, de permettre que ceux dont le bien être (...)[est son] profit, vinssent à manquer de quelque chose nécessaire pour la vie, par (...)[sa] seule paresse et faute de prévoyance »188(*). Pour arriver à cet état de fait, il doit faire de telle sorte que les citoyens ne soient pas des oisifs : il est impérieux que « tout le monde s'occupe à quelque chose »189(*). On pourrait parler ici du droit à un travail pour chaque citoyen en vue de son insertion sociale.

Ce droit en entraîne nécessairement un autre, notamment celui de pouvoir s'enrichir. Permettre, en effet, aux citoyens de s'enrichir, c'est contribuer d'une façon ou d'une autre à enrichir la république. La richesse des citoyens ou la misère de ceux-ci se répercute sur le souverain. Le souverain n'a pas de biens propres à lui. Ses biens s'identifient à ceux de ses citoyens. Aussi faut-il les inciter à faire fortune. Cela est aussi dû au fait que la pauvreté fait partie des causes de sédition190(*). Et de cette liberté de s'enrichir, découle le droit de propriété puisqu'il est nécessaire que chaque citoyen « ait en propriété quelques biens et terres (...); car sans cela les hommes tomberaient tous les jours dans les querelles »191(*) nuisibles au développement de la république. Ainsi, et ce contrairement à ce qui est généralement avancé, Thomas Hobbes reconnaît-il aux citoyens un droit de propriété. Cependant, ce droit de propriété n'est valable qu'entre citoyens, et il n'est pas opposable au souverain. Leurs biens lui appartiennent dans la mesure où c'est lui qui leur en garantit la pleine et entière jouissance.

En conséquence, la liberté d'association est reconnue aux citoyens dans l'État hobbesien. En effet, ceux qui ont des intérêts communs ou qui exercent les mêmes activités peuvent, sous couvert de la loi, se regrouper pour poursuivre ensemble leurs activités. Ces associations peuvent être d'ordre politique, éducatif, commercial, sportif etc. Cependant, à l'image de ce qui est demandé de nos jours aux associations, ces organisations, dans la charte de leur création, doivent indiquer le but de leur regroupement, la durée de vie de leur structure et le lieu où ils sont censés mener leurs activités192(*). L'État décide, en dernière instance, des prérogatives que peuvent avoir ses associations. Celles-ci pour savoir ce qui leur est autorisé devront se référer aux lois de la république193(*). Si le souverain organise la vie associative, c'est pour éviter que des citoyens sous le couvert d'organisations ne se retrouvent pour comploter et attenter à la sûreté de l'État.

La sécurité favorise un égal accès à la justice à tous les citoyens. En période de conflits, il n'existe aucune instance capable de dire le droit. Nous nous trouvons ainsi dans une situation de chaos où règne le droit du plus fort, c'est-à-dire du non-droit. Alors qu'avec l'instauration de la stabilité, de la sécurité, au sein de l'État-Léviathan, exception faite du souverain, tous les autres citoyens, quel que soit leur rang, grade et qualité peuvent être traduits en justice, et la rigueur de la loi peut leur être appliquée. Il y va même de la survie de la république que la justice soit rendue à chacun des citoyens car, selon Thomas Hobbes, « l'impunité engendre l'insolence ; l'insolence engendre la haine ; la haine, enfin, fait qu'on s'efforce d'abattre toute grandeur oppressive et injurieuse, fût-ce au prix de la ruine de la République »194(*).

Enfin, les citoyens ont le droit de faire tout ce que n'interdit pas la loi comme déjà dit. Le disant cependant, Hobbes reste conscient que la loi ne peut embrasser tous les domaines de la vie. Aussi considère-t-il que toutes les actions sur lesquelles le souverain ne s'est pas prononcé sont de fait permises. Ce sont, entre autres, celles qui ne portent pas atteinte à l'autorité politique et qui s'avèrent aussi nécessaires à la vie humaine. Par exemple, celui de jouir de l'air, de voyager d'un endroit à un autre, «  la liberté d'acheter, de vendre, et de conclure d'autres contrats les uns avec les autres ; de choisir leur résidence, leur genre de nourriture, leur métier, d'éduquer leurs enfants comme ils jugent convenable, et ainsi de suite »195(*).

Au vu de l'analyse esquissée ci-dessus, on pourrait convenir que le souverain hobbesien n'est pas exempt d'obligations vis-à-vis de ses sujets. Pour pasticher Norbert Campagna, son but est de « garantir l'ordre public afin de permettre à chacun d'exercer paisiblement sa liberté raisonnable »196(*). Allons dès à présent plus loin dans notre interprétation en nous intéressant, hic et nunc, à ce droit à la vie hobbesien qui apparaîtrait à tous égards comme le droit le plus fondamental pour le citoyen, pour ne pas dire inaliénable.

2.2. Le droit à la vie : un droit inaliénable

Entendu que la vie est, pour Thomas Hobbes, le plus grand de tous les biens197(*), rien et absolument rien ne devrait la valoir en termes de dignité. La preuve tangible de cette allégation, c'est que si les hommes cherchent à fuir l'état de nature, c'est parce que leur vie y menacée. En intégrant le corps politique, ils cèdent tous leurs droits naturels au Léviathan, exception faite bien sûr du droit à la vie et du droit de la défendre contre vents et marées. De façon tacite, Thomas Hobbes reconnaît donc au citoyen la liberté de préserver sa vie. Sinon en cédant les autres droits, c'est en vue de la possibilité de la jouissance d'un bien futur. Dès lors, personne ne saurait raisonnablement céder à un autre un quelconque droit sur sa propre vie. Une telle cession est nulle et de nul effet. Si la mort constitue la borne de l'existence humaine, logiquement la conservation de soi reste à bon droit la condition sine qua non de la félicité, entendu comme « course indéfiniment renouvelée d'un désir à un autre »198(*). Cela dit, Hobbes fait du droit à la vie un droit naturellement inaliénable.

En clair, si le droit à la vie du citoyen est inaliénable et imprescriptible, il s'en suit bien évidemment que sa vie lui appartient en propre et ne peut faire l'objet d'aucune cession ou d'aucun compromis. Dès lors, et ce pour aussi illustre et omnipotent qu'il soit, l'État n'a aucune autorité sur cette vie. La vie des citoyens n'est pas à inclure au titre des biens publics dont le souverain disposerait à sa guise et selon son bon vouloir. Par conséquent, s'il advenait que le souverain fasse sommation au citoyen de se donner la mort, il est légitime pour ce dernier d'y opposer un refus catégorique. Contrairement à Jean-Jacques Rousseau qui dira plus tard que, « quand le Prince lui a dit, il est expédient à l'État que tu meurs, il doit mourir »199(*), Thomas Hobbes estime que le citoyen ne doit point s'exécuter pour toute réquisition qui serait attentatoire à son intégrité vitale. Pour le citoyen genevois, il est important de préciser que la vie des citoyens appartient exclusivement à l'État. S'ils vivent, c'est grâce à la république. De ce fait, pour les besoins de la république, la vie de ces derniers peut être sacrifiée. S'il en est ainsi, c'est parce que ce qui importe chez l'auteur du Contrat social, c'est le droit à vivre libre et non simplement le droit à la vie. Alors que pour Thomas Hobbes, la république elle-même n'a sa raison d'être que parce qu'elle préserve la vie de ses membres. En conséquence, attenter à la vie des citoyens, c'est remettre en cause les fondements même du contrat social, et ce serait participer sans le vouloir à son délitement certain.

Enfin, le souverain ne peut mettre le citoyen dans des situations embarrassantes qui menaceraient les fondamentaux de sa vie, à savoir l'affamer, lui priver de médicaments, l'inviter à faire la guerre pour assouvir ses desseins impérialistes ou encore lui priver de toute chose, sans laquelle la vie serait impossible200(*). Mettre ainsi la vie du citoyen en péril, ce serait en vérité pour l'État dissoudre lui-même le contrat social. Dans une telle situation, l'individu dont la vie est menacée, se retrouve dans la situation de l'état de nature. D'une part, il est légitime pour lui de marquer son refus, de résister ; et d'autre part, il est autorisé à user de tous les moyens à sa disposition pour défendre sa vie. À cet effet, des actes délictueux peuvent être commis par lui pour se préserver. Au cours d'une famine, pour ne pas mourir de faim, il a le droit de s'emparer de la nourriture par la fraude et la violence201(*). Il peut donner un faux témoignage pour échapper à une peine d'emprisonnement. De même, il lui est permis de s'évader de prison. En dernière instance, il est légitime de sa part d'user de violence à l'égard de ceux qui viendraient appliquer la peine d'emprisonnement ou de mort202(*).

TROISIÈME PARTIE :

UNE LECTURE CRITIQUE DU HOBBISME POLITIQUE ÀPARTIR DE SON APPLICATION DANS LA QUÊTE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA LIBERTÉ

Comme toute oeuvre humaine, le hobbisme politique reste diversement apprécié : c'est une doctrine qui a divisé et continue encore aujourd'hui d'opposer les spécialistes de la philosophie politique. Elle suscite la polémique, entraine des débats houleux et polémiques passionnées, dans lesquels les intervenants ont beaucoup de mal à s'entendre sur le minimum. On se trouve confronté à toutes sortes d'interprétations et mésinterprétations, des caricatures203(*), des travestissements204(*). Ces controverses paraissent irréductibles, en cela qu'elles ne sont pas prêtes de s'estomper. Faisant l'objet de toutes sortes de critiques, il est arrivé à Hobbes, par moment et quand les circonstances s'y prêtaient, de prendre sa plume pour répondre à certaines de ses critiques parfois très acerbes, de véritables vitupérations.

Notre travail aurait un goût d'inachevé, si nous terminons celui-ci sans passer en revue ces lectures qui furent faites de sa pensée politique. C'est ce qui justifie cette partie de notre étude. Précisons à toutes fins utiles que cette revue n'a nullement la prétention d'être exhaustive, mais elle est ébauchée juste pour donner une idée globale de la manière dont fut reçu le hobbisme politique. Pour ce faire, nous serons amené à nous interroger sur la postérité du hobbisme politique à travers l'analyse des questions suivantes : Qu'est-ce qui dans le hobbisme politique pourrait donner lieu à une société liberticide ? S'il advenait que le hobbisme politique ne soit pas une pensée liberticide, ne serait-il pas tout de même tendancieux de vouloir y voir la panacée pour remédier aux crises de sécurité qui sévissent actuellement à travers le monde ?

CHAPITRE V : HOBBES, UN PENSEUR LIBERTICIDE

Pour ses compatriotes et autres contemporains, Thomas Hobbes, eu égard à ses écrits politiques serait un penseur liberticide. De quelque côté on voudrait bien pénétrer son système de pensée, il n'est rien d'autre qu'un vulgaire concepteur de la subversion politique qui foulerait ouvertement aux pieds les principes moraux très basiques. Ce qui justifierait qu'il soit dépeint comme un personnage obscur, aux yeux de ses concitoyens, à telle enseigne qu'ils lui ont assignés toutes sortes de sobriquets, des plus burlesques aux plus méchants : « Le «corbeau» »205(*), « l'horrible Monsieur Hobbes »206(*), « l'affreux Monsieur Hobbes »207(*). Pire, l'Université d'Oxford, en 1683, fera brûler ses ouvrages majeurs que sont : Léviathan et De Cive208(*). La norme partout admissible, c'est que les attaques fusent de partout contre ses prétentions intransigeantes :

De son vivant, ce vigoureux penseur n'eut guère, si on met à part quelques sectateurs, que des adversaires parmi les savants, les philosophes et les théologiens de son temps ; et hormis quelques moments de faveurs, il ne rencontra guère que suspicion parmi les autorités temporelles et spirituelles de son pays ; il dut, bien souvent, cacher son nom et sa personne209(*).

Si la pensée politique de Thomas Hobbes n'a guère bénéficié d'un écho des plus favorables auprès de ses contemporains ou de ses pairs, il en est encore de même de nos jours. Elle fait scandale, d'autant qu'elle n'a pas bonne presse auprès des défenseurs des Droits de l'Homme qui la jugent en mauvaise part. Pour ces derniers notamment, Hobbes est le pourfendeur attitré des libertés citoyennes. D'ailleurs, quand ils parlent de la pensée politique de ce dernier, c'est généralement pour la condamner en cela que la plupart de ceux qui l'abordent, le plus souvent, voient en Thomas Hobbes un philosophe qui fait l'apologie de la dictature, comme le complimenteur d'un « sombre despotisme »210(*), sous couvert de démonstration de la nature vindicative et/ou agressive de l'homme. Pour des penseurs contemporains, tels Joseph Vialatoux, Hannah Arendt, Michel Foucault, il apparaîtrait de toute évidence comme le prototype de l'anti-citoyen, du philosophe pro-pouvoir, du laudateur déclaré de la monarchie absolue.

Si on n'y prend garde, la doctrine politique de Thomas Hobbes resterait saisie sous un prisme fort dépréciatif parce qu'appréhendée sous le signe exclusif du liberticide puisqu'accusée de concentrer tous les pouvoirs entre les mains du seul souverain. Il serait par voie de conséquence le philosophe qui promeut manifestement l'absolutisme politique, voire le précurseur de toutes les doctrines totalitaires et de leurs démembrements. Le fait est que, si l'on se situe dans la logique des défenseurs des Droits de l'Homme et du Citoyen, ce serait même soutenir un pléonasme insoluble que de vouloir alléguer que la doctrine politique de Thomas Hobbes est une doctrine libérale qui montrerait les voies et moyens de réalisation de la liberté humaine, estimant pour leur compte que ce dernier demeure surtout et de loin un philosophe qui privilégie la sécurité du corps politique, ce au détriment de la liberté citoyenne. Par voie de conséquence, dans nos sociétés en quête permanente de démocratie, régime politique où le culte de la liberté se trouve à son summum, la pensée de l'auteur du Léviathan, quand elle est convoquée, c'est pour être récusée purement et simplement. Elle est toujours précédée de tous les mauvais renoms.

Ce chapitre qui se compose de deux sections, ambitionne de montrer que ces critiques, qui font du hobbisme politique une pensée liberticide, pourraient dans une certaine mesure se justifier. Nous le ferons, en montrant que la philosophie politique du philosophe de Malmesbury est à craindre, car c'est une pensée qui promeut un étatisme exacerbé (section 1) ; et qui confère un pouvoir démesuré au souverain (section 2).

1. L'étatisme comme exhortation de l'hobbisme politique

La constance qui semble largement se dégager de l'interprétation du hobbisme politique, c'est une pensée qui promeut ouvertement l'instauration d'un État dirigiste. Toujours est-il que Hobbes préconise de donner pleins pouvoirs au souverain pour décider de tout. Les citoyens ne sont guère consultés comme cela se fait régulièrement dans les régimes démocratiques. Ils sont écartés des instances décisionnelles ou complètement ignorés. Le souverain demeure le seul législateur habilité à prendre toutes les décisions qui concernent l'ensemble du corps social. Comme tel, on se trouverait en présence d'un étatisme paroxystique. Tout doit être planifié par l'État dans les moindres détails. Aussi tous les domaines de la vie doivent-ils être passés au crible par le souverain et organisés par lui seul. En conséquence, l'État-Léviathan est un État superpuissant, omnipotent et omniscient.

Le souverain hobbesien s'arroge le droit de légiférer sur la vie privée des citoyens. Pour preuve, au niveau du mariage, l'État est habilité, selon le philosophe de Malmesbury, à les autoriser ou les dissoudre211(*) sans ménagement. Il ne doit, par exemple, « pas défendre ces honteux accouplements qui sont contre l'usage de la nature»212(*). Au titre de ces unions contre nature, il cite les mariages consanguins, ainsi que le lesbianisme213(*). À la lumière de ce propos, il ressort que Thomas Hobbes se soucierait très peu ou pas du tout du droit au mariage pour tous que défendent de nos jours certaines organisations des Droits de l'Homme. Ce qui compte avant toute chose, c'est la reproduction de l'espèce humaine. Partant, ces pratiques dégradantes et « si pernicieuses et préjudiciables à l'accroissement du genre humain »214(*) ne doivent pas être autorisées par l'État.

Par ailleurs, l'étatisme hobbesien est, selon Joseph Vialatoux, perceptible dans le fait que l'enfant est réclamé par l'État215(*). L'enfant est certes le produit de l'union libre entre deux citoyens, cependant, il n'appartiendrait pas en propre à ses parents-géniteurs. À l'instar des terres, des biens matériels, tous les êtres vivants qui naissent, vivent et prospèrent au sein de la cité, et grâce à la république lui appartiennent. Ce droit de propriété n'est pas simplement applicable aux animaux comme on pourrait le penser mais il est extensible même aux êtres humains. Aussi les parents n'ont-ils aucun droit patrimonial sur leurs progénitures. Joseph Vialatoux exprime cette idée en ces termes :

Pour Hobbes(...),tout homme né ou à naître dans la Cité appartient sans réserveà la Cité. N'a-t-elle pas droit absolu de propriété et de souverainetésur tous les corps qu'elle intègre, et partant sur tous lesproduits de ces corps ? et qu'est-ce que l'homme sinon le complexedes mouvements physiques et mentaux qui dérivent de la multiplicitédes organes et de la structure mécanique de son corps ?216(*)

Le savoir à inculquer à cet enfant, possession exclusive de la république, est soumis au préalable au contrôle étatique. En effet, « l'enfant étant à lui et pour lui, c'est à lui qu'il appartient de le pétrir et de le conformer »217(*). L'État forge donc sa mentalité, en décidant de ce qu'il convient de considérer comme étant vrai ou faux à lui enseigner. Car, les vérités scientifiques doivent s'accommoder des critères de la paix civile. Aussi en ce domaine, le souverain doit-il être très regardant sur les livres qui seront édités : il devra, lui-même ou par des censeurs, commis par lui, « examiner la doctrine de tous les livres avant qu'ils ne soient publiés »218(*). Cela reviendrait à dire de nos jours que l'État doit surveiller les écrits, en l'occurrence les ouvrages à caractère scientifique, éducatif, religieux, informatif comme les articles de presse. C'est un préalable avant qu'ils ne soient publiés ou puissent être vendus dans de la République. Ce sont là des mesures liberticides mais nécessaires « à la paix, et [susceptibles] de prévenir ainsi discorde et guerre civile »219(*).

Dans l'État hobbesien, la religion ne relève pas du domaine privé. Elle se trouve sous la tutelle étatique. Il s'observe une inféodation de la religion à l'autorité politique. Il en est ainsi, car elle est une pratique sociale qui influence le comportement des citoyens. Aussi l'État-Léviathan se donne-t-il pour attribution de légiférer sur le culte religieux : dire les pratiques saines et celles qui ne le sont pas. À l'État appartient ainsi le privilège d'interpréter les écritures saintes. C'est une vision pragmatique de la religion qu'a Thomas Hobbes. La religion doit, par ses commandements, servir l'État. Ce faisant, il ne saurait être question pour les citoyens d'embrasser le culte de leur choix. Seules celles qui ont été inspectées et agréés par le souverain peuvent être admises dans la République et être pratiquées. Le pluralisme religieux est proscrit car, pour lui, la multiplicité des religions dans la république est source de désordres. L'État doit par conséquent travailler à uniformiser les pratiques religieuses220(*). Pour Philippe Nemo, le souverain hobbesien fait la religion : « Le culte, l'entrée dans les ordres, les livres religieux, les catéchismes, le gouvernement des Églises, tout cela doit être dûment autorisé par le gouvernement »221(*). Nul ne peut se prévaloir d'une liberté religieuse sans l'aval de l'État hobbesien.

Au vu de ce qui précède on peut retenir que le caractère dirigiste de l'État-Léviathan se perçoit concrètement dans le fait que le souverain hobbesien manifeste explicitement sa prétention à légiférer, au-delà de la sphère publique, sur la vie privée de ses citoyens. L'hobbisme politique est une véritable invitation du politique à placer toutes les sphères de la vie des citoyens sous la coupe de l'État. Ce droit d'immixtion du souverain hobbesien dans tous les domaines de la société est absolu et sans exclusive. Cet état de fait a amené Joseph Vialatoux à soutenir que les États modernes qui ont de plus en plus la prétention de s'ingérer dans la vie des citoyens « trouveront dans le système de Hobbes leur justification théorique »222(*). Si tout doit être inspecté par l'État hobbesien, disons alors que son pouvoir est absolu, voire totalitaire.

2. L'absolutisme politique comme substrat de la théorie hobbesienne

Le « pouvoir absolu veut dire, pour Hobbes, le plus grand pouvoir qu'un être mortel puisse détenir de droit »223(*). Le pouvoir politique du souverain est incommensurable, indivisible, sans partages et sans bornes. Son essence est d'être absolue. Le souverain hobbesien détient à lui seul les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire : il est celui qui fait la loi, qui est habilité à l'interpréter et à la faire exécuter. Cet état de fait nous permet de proclamer avec Jean-Pierre Zaraderque Hobbes est fortement opposé à 

ces moyens de contrôle constitutionnels dont les démocraties modernes s'entourent pour s'efforcer de poser des limites au pouvoir (pouvoir soupçonné, implicitement ou explicitement, d'avoir une tendance à l'excès). L'idée même d'un Conseil constitutionnel relèverait donc, selon Hobbes, de ces «opinions séditieuses» qui sont susceptibles de mettre en danger la notion même de souveraineté224(*).

La doctrine hobbesienne se démarque visiblement du système démocratique qui veut qu'il y ait des limites, des garde-fous au pouvoir politique. C'est même une flagrante absurdité que de vouloir le faire.

Pour Thomas Hobbes, peu importe le type de gouvernement auquel nous avons affaire, la nature intrinsèque du pouvoir politique est d'être absolue. Il n'y a que les modalités d'accès et d'usage qui peuvent changer. Que ce soit donc un régime démocratique, aristocratique ou monarchique, la seule 

différence entre ces trois espèces d'État ne réside pas dans une différence de pouvoir mais dans une différence de commodité ou d'aptitude à procurer au peuple la paix et la santé et la sécurité, qui sont la fin en vue de laquelle elles ont été instituées225(*).

Le pouvoir est simplement exercé de manière différente et peut-être avec plus de facilité dans certains types de régime plus que d'autres, mais sa quintessence est d'être absolue. Les différents rapports existant entre les types de pouvoir dans l'État sont de telle nature que céder l'un de ses pouvoirs à un tiers, c'est en réalité, ne plus détenir le pouvoir.

En outre, l'absence d'un pouvoir absolu est, de l'avis de Hobbes, cause d'affaiblissement et de dislocation de la république : « Qu'est-ce en effet que diviser le pouvoir d'une République, si ce n'est le dissoudre ? »226(*) Il en veut pour preuve la toute puissante Rome dont le trépas est imputable au partage du pouvoir entre le sénat et le peuple227(*). En vérité, dans une telle situation, lorsqu'il faut prendre des décisions urgentes pour le salut de la république les hommes se perdent dans des discussions inutiles, ce qui a pour corolaire d'entraver le bon fonctionnement de l'État. De nos jours, il n'est pas rare de voir dans les républiques démocratiques, les tractations interminables plomber le bon fonctionnement de la machine gouvernementale. Si les décisions tardent à être prises en régime démocratique, c'est parce qu'il faut d'abord requérir l'avis de tous. Or, quand le pouvoir de décision appartient à un seul comme dans un régime dit absolutiste, les choses se font promptement et les pertes inutiles de temps sont circonscrites. D'autre part, la division du pouvoir politique et son exercice par diverses personnes a pour effet de créer des groupuscules qui se préoccupent plus de la défense de leurs intérêts égoïstes que du salut de la république. Chacun se lance dans des rhétoriques fastidieuses et fallacieuses pour rallier les autres à son opinion. Le constat hobbesien selon lequel « des pouvoirs divisés se détruisent l'un l'autre »228(*) est, certes, amer et triste, mais il se révèle au fond être un véritable truisme au regard de l'expérience quotidienne de la vie politique des sociétés démocratiques.

L'autre atout indéniable, c'est que le pouvoir absolu ne peut faire l'objet d'une contestation. Exception faite de la résistance à toute tentative d'atteinte à leur droit à la vie, les citoyens doivent, selon Thomas Hobbes, se résigner dans toutes les autres circonstances à une obéissance totale, une déférence complète à l'autorité politique et à l'exécution pure et simple de ses décisions. Aussi manquer de docilité envers le souverain constitue-t-il un crime de lèse-majesté. Se révolter dans toute autre situation que celle que nous avons mentionnée, c'est être atteint de folie229(*). Mieux, contester l'autorité du souverain s'apparenterait à une remise en cause du contrat social, donc à un retour à l'état de nature. Autrement dit, la contestation de l'autorité politique conduirait inéluctablement à sa ruine. En vérité, si Hobbes réclame une soumission sans réserve de la part des citoyens, Gabriel Hürlimann estime que, loin d'être un fossoyeur des libertés individuelles et collectives, sa préoccupation reste de savoir

comment déployer un système politique susceptible de réduire au minimum la possibilité de recourir à la force dans l'élaboration des stratégies de résolution de conflits en matière de politique intérieure ? Comment éviter qu'un groupe d'individus mécontents et prêts à recourir à la violence ne puisse revendiquer son droit d'opposer ouvertement résistance à un ordre émanant du monarque ?230(*)

De toute évidence, le hobbisme politique ambitionne de bannir toute violence du corps politique, exception faite de celle qui émane de l'autorité politique. Dès lors, on comprend qu'il ne puisse admettre le droit de révolte.

À en croire, Philippe Nemo, « en définitive, le souverain est tout et peut tout, les sujets rien. Certes, c'est là, pour les sujets, Hobbes l'admet, une situation misérable ; mais il faut comparer cette situation à celle de la guerre civile »231(*). Une telle lecture du philosopher politique de Hobbes permet de voir que cette pensée est aux antipodes de la conception actuelle du pouvoir politique. Elle ne pouvait susciter que des critiques. À cet effet, certains analystes politiques déploieront un autre type d'argumentaire pour montrer que l'auteur du Léviathan est en vérité victime de mauvaises interprétations. Dans leur approche de son système, Thomas Hobbes apparaît comme un penseur soucieux du bien-être des citoyens. C'est ce que nous allons voir dans le chapitre qui suit.

CHAPITRE VI : LE HOBBISME POLITIQUE COMME CONSOLIDATION DES DROITS DE L'HOMME EN MATIÈRE DE POLITIQUE SÉCURITAIRE

Au-delà de toutes les critiques et autres récriminations contre la pensée hobbesienne, relevées dans les pages précédentes, il faut reconnaître que Thomas Hobbes, bien qu'étant du XVIIe siècle, reste pour beaucoup d'analystes politiques incontournable dans le champ de la philosophie politique. Si la philosophie hobbesienne continue encore d'attirer, mieux, de fasciner232(*), il serait alors hasardeux, voire périlleux de vouloir faire ou parler de philosophie politique, sans faire mention de l'auteur du Léviathan. Il ne serait point excessif de dire de lui, qu'il reste une des meilleures clés de voûte de la philosophie politique. En effet, personne ne pourrait véritablement réfléchir sur la chose politique, en ce XXIe siècle, sans visiter ou (ré)visiter le hobbisme politique. Sa pensée demeure pour les analystes pointilleux le soubassement sur lequel repose la réflexion philosophique politique moderne. À certains égards d'ailleurs, le hobbisme politique reste la substantifique sève nourricière des philosophies politiques de John Locke, Baruch Spinoza, Samuel Pufendorf, Charles Louis de Montesquieu, Jean-Jacques Rousseau, Emmanuel Kant.

Soit, ces derniers tentent de résoudre certains problèmes qu'il a soulevés, soit ils lui empruntent certains concepts, notamment le conatus, l'idée d'état de nature, de contrat social, etc. On pourrait même affirmer, que l'excellent livre Du Contrat social de Jean-Jacques Rousseau qui sert de bréviaire aux ardents défenseurs des Droits de l'Homme est une réponse233(*), une déconstruction de la philosophie politique hobbesienne. Même la réflexion philosophique contemporaine sur la politique n'est pas ménagée de l'ombre de Thomas Hobbes234(*). On le retrouve ici et là : John Rawls ne peut construire sa théorie de la justice sociale, sans convoquer Thomas Hobbes ; Jürgen Habermas ne peut élaborer sa théorie de la démocratie délibérative, sans faire référence à l'auteur du Léviathan, etc.

S'il en est ainsi, il faut en déduire que le philosophe de Malmesbury n'est peut-être pas si liberticide au point de faire de lui le père d'un étatisme politique exacerbé. Thomas Hobbesne prône pas le dirigisme politique, le totalitarisme, le régime despotique où l'État contrôlerait le moindre fait et geste des citoyens. Le hobbisme politique plus précisément son idée, selon laquelle le pouvoir du souverain est absolu, en réalité, fait l'objet de confusions, d'amalgames et de contresens malveillants. D'ailleurs, comment s'expliquer que ce père de l'absolutisme dit politique puisse être vu dans le même temps, par d'autres notamment Léo Strauss235(*), Jürgen Habermas236(*), comme celui qui a fondé la pensée de l'État moderne, démocratique, voir libéral ? C'est une façon non-éclectique de voir les choses qui, pour beaucoup, paraît trop radicale et fort réductrice. La pensée politique de Thomas Hobbes, à bien d'égards, est une pensée humaniste237(*) qui cherche à établir les conditions de réalisation de la liberté humaine. Nous nous évertuerons à prouver cela dans ce chapitre.

Cela dit, le présent chapitre se décline en deux sections : dans la première, il s'agira pour nous d'opérer quelques distinctions conceptuelles. Concrètement, nous verrons que le concept d'absolu si cher à Hobbes est assimilé à d'autres notions qui ne reflètent pas ce qu'il veut signifier. Dans la deuxième section, nous allons relever des éléments de preuves qui attestent du souci hobbien des Droits de l'Homme et du Citoyen. Aussi le hobbisme politique pourrait-il s'avérer comme une philosophie à forte valeur pour les crises sécuritaires actuelles auxquelles se trouvent confrontés les États.

1. L'absolutisme politique de Hobbes : objet de confusions, de contre-sens et d'amalgames

Selon Robert Derathé, c'est pour avoir soutenu que le pouvoir du souverain devait être absolu que « Hobbes a passé, tant aux yeux de ses contemporains qu'aux regards de la postérité, comme un théoricien et l'apôtre du despotisme »238(*). C'est là l'origine de tous les griefs qui lui sont adressés. À voir les choses sous un angle essentiellement objectif, ces critiques ne partiraient-elles pas manifestement d'une volonté inouïe de dénigrer le philosophe anglais ? La vérité qu'il s'agira dès à présent d'alléguer, c'est que le hobbisme politique ne se réduit pas à cette vision trop sectaire de sa doctrine politique. Sa pensée est un grand tout à l'intérieur duquel se rencontrent beaucoup de thématiques. Aussi quelques précisions sémantiques s'imposent-elles, pour prévenir toute méprise.

Vu son le prisme de l'objectivité scientifique, l'absoluité du pouvoir hobbesien reste bien particulière : le souverain détient, certes, un pouvoir sans bornes, mais ce pouvoir est légitimé par les citoyens. Son autorité ne lui vient pas du ciel. Le souverain ne s'impose pas non plus par la force des armes aux peuples. En vérité, les citoyens sont la source de la légitimité du pouvoir que détient ce dernier. On se rappellera que les citoyens ont de leur propre chef décidé lors du contrat social de lui déléguer le pouvoir, pour parler et agir en leurs noms. Aussi après le contrat fondateur du corps politique, la volonté des citoyens s'identifie-t-elle à celle du Léviathan. La volonté politique publique devient dès lors volonté de tous. Le souverain et les citoyens ne font qu'un. Par conséquent, quand le souverain décide et agit c'est, en vérité, les citoyens qui décident et agissent. Le hobbisme politique est en ce sens une doctrine qui réconcilie le peuple avec son représentant.

Par ailleurs, il est reproché à l'absolutisme hobbesien de concentrer tous les pouvoirs entre les mains du souverain. Mais, s'il convient de rendre justice à Hobbes, alors autant démontrer qu'une telle accusation s'avère quelque peu exagérée. S'il est vrai que, dans le système hobbesien, le Léviathan reste le seul détenteur légitime du pouvoir souverain, il n'est pas aussi faux de reconnaître qu'il n'exerce pas tout seul ce pouvoir. Le souverain n'est pas omniprésent. Il n'a pas le don d'ubiquité. Il ne peut non plus tout faire seul. Aussi délègue-t-il certains de ses pouvoirs à des personnes de confiance et qu'il juge compétentes. Pour preuve tangible, il nomme des magistrats pour dire le droit et ainsi l'épauler dans le règlement des contentieux. Il charge aussi certains de l'instruction du peuple ; d'autres encore sont assignés à la collecte des impôts. Il nomme des généraux pour commander son armée. Toutes ces personnes dont s'entoure le souverain et auxquelles il a bien voulu déléguer une partie de son pouvoir lui rendent des comptes.

Le souverain hobbesien ne s'identifie pas nécessairement à une seule personne. Le souverain peut être un individu comme dans le cas d'une monarchie. Il peut être aussi une assemblée d'hommes à l'instar d'un gouvernement démocratique. Si l'auteur du Léviathan marque sa préférence pour le régime monarchique, en cela que ce régime offre plus de facilité que tous les autres, il a pris le soin de signifier que sa doctrine était valable pour tout type de régime. S'il n'exclut pas la logique de la délégation du pouvoir à des personnes aux compétences avérées, on peut dire que l'absolutisme politique qu'il impulse est relatif.

L'autre angle d'analyse, c'est que l'État-Léviathan est à l'image du Dieu des religions révélées. Ses attributs doivent aussi être à son image. D'une part, tout comme il ne viendrait à l'idée des croyants de concevoir ce Dieu comme impuissant et sujet aux erreurs, il en va de même pour l'État-Léviathan. Il est partout omnipotent et toujours infaillible. D'autre part, de même que les actions qu'on impute à la divinité sont considérées comme étant rationnellement fondées et justifiées, de même les actes que pose le souverain hobbesien dans l'exercice de sa pourpre sont inattaquables. L'État-Léviathan a le droit de concentrer tous les pouvoirs et de s'affirmer comme tel, car contrairement au Dieu immortel des religions révélées, il est un dieu mortel. Conséquemment, pour éviter de trépasser et atteindre la fin pour laquelle il a été institué, c'est un impératif pour lui de jouir de l'absoluité du pouvoir.

Nullement, l'absoluité de son pouvoir ne renvoie pas à un certain degré de puissance, comme on a coutume de l'interpréter, mais à la nature raisonnable du pouvoir qui détermine son étendue et ses limites239(*). En clair, s'il est vrai qu'il n'y a pas d'instances extérieures qui fixent des limites à ce que le souverain peut faire ou pas, la raison ainsi que la fin pour laquelle il a été institué lui en fixe. Elles déterminent les bornes du pouvoir qu'il détient. Les actes posés par le souverain sont ainsi rationnellement fondés.

Dès lors, c'est se fourvoyer ou faire preuve de mauvaise foi que d'insérer l'absolutisme hobbesien dans la liste des régimes arbitraires, despotiques et totalitaires qui ne trouvent leur justification que dans les passions désordonnées de celui ou ceux qui exercent le pouvoir politique. L'absolutisme hobbesien n'est ni l'arbitraire, ni le despotisme, encore moins le totalitarisme comme on a pris l'habitude de nous le faire croire240(*).

1.1. Distinctions entre l'absolutisme et l'arbitraire

Un régime politique est dit arbitraire, lorsque celui qui détient le pouvoir politique fait fi dans sa gestion des lois de la république. En lieu et place de celles-ci, il gouverne selon son bon vouloir. Ses décisions sont prises au gré de ses humeurs et de ses caprices. Aussi les citoyens se trouvent-ils être l'objet de toute sorte de brimades. En vérité, un tel État est un État sans foi ni loi. Il est illégitime d'identifier l'absolutisme hobbesien à un pouvoir arbitraire : il y a une distinction nette et claire entre l'État hobbesien et les régimes arbitraires dans la mesure où le souverain hobbesien ne gouverne pas, selon ses appétences.

Le souverain gouverne en effet à l'aide de lois, c'est-à-dire de règles universelles qui s'appliquent à tous les citoyens (le souverain lui-même mis à part). Il s'agit donc d'un état de droit qui est, comme tel, à l'opposé de l'arbitraire241(*).

L'opposition entre l'État absolutiste hobbesien et l'État arbitraire se manifeste au niveau même de l'élaboration des lois : dans un régime arbitraire, à défaut d'une surabondance de lois, il y a une quasi absence de celles-ci. Les desiderata du souverain faisant office de normes de l'action politique. Le souverain hobbesien, en plus du fait qu'il se réfère aux lois pour gouverner, opère une distinction entre loi juste et bonne loi. On pourrait être tenté de se poser la question de savoir ce qu'est une loi juste ou une bonne loi pour lui ? « Par bonne loi, je n'entends pas une loi juste, nous dit Thomas Hobbes, car aucune loi ne peut-être injuste. (...) Une bonne loi se caractérise par le fait qu'elle est, en même temps nécessaire au bien du peuple, et claire »242(*). Toute loi est dite juste, dans la logique hobbesienne, en cela qu'elle émane du souverain. Le souverain étant seul habilité à décider de ce qui est juste ou injuste, alors tout décret émanant de lui devrait être juste. Mais, il ne suffit pas à la loi d'être décrétée par le souverain pour être bonne. Elle doit être formulée dans un style clair, intelligible et portée à la connaissance des citoyens243(*). Pour être bonne, elle doit viser l'intérêt supérieur du peuple. L'État hobbesien, en se souciant ainsi du bien-être de ses membres, se démarque des régimes arbitraires.

Selon Yves Charles Zarka, au sein de l'État-Léviathan :

Au point de son exercice, le pouvoir absolu du souverain ne s'identifie pas au bon plaisir du prince et ceci en fait comme en droit. En fait, parce que, en affaiblissant et en opprimant les sujets, le prince s'affaiblirait lui-même et risquerait de susciter les désordres précurseurs des révoltes et des guerres civiles. En droit, parce que tout ce que fait le souverain n'est pas ipso facto légitime, la justice elle-même n'aurait plus de sens s'il n'agissait conformément à la droite raison, c'est-à-dire suivant les prescriptions des lois naturelles. De sorte que le pouvoir souverain chez Hobbes est moins absolu que la volonté générale chez Rousseau244(*).

1.2. Nuances entre l'absolutisme et le despotisme

Un État despotique est un État dans lequel celui qui détient le pouvoir politique dispose comme le souverain hobbesien d'un pouvoir absolu. Cependant, il existe une nuance entre l'État despotique et l'État hobbesien qui n'est peut-être pas perceptible à première vue. Celle-ci se situe notamment dans le but poursuivi par les deux États : l'un, le despote, à travers l'exercice du pouvoir a comme aiguillon de son action l'assouvissement de ses caprices ou de ceux de ses proches ; alors que le but de l'État hobbesien est le salut du peuple. Le pouvoir despotique travaille à contenter les intérêts d'un groupuscule de personnes au détriment de ceux du peuple. C'est une gestion népotique du pouvoir qu'exerce le pouvoir despotique. Ce qui n'est pas le cas du souverain hobbesien. Pour mieux cerner cette différenciation qui existe entre le despotisme et l'absolutisme hobbesien, nous jugeons opportun de rappeler ces propos de Jean-Pierre Zarader :

C'est le plaisir personnel, la jouissance qui meut le despote. Le souverain de Hobbes est à l'opposé d'une telle conception : il légifère dans l'intérêt du peuple. C'est le bien du peuple, non le sien propre, que recherche le souverain245(*).

Si à première vue, les décisions du souverain hobbesien peuvent passer pour insensées, elles s'inscrivent en réalité dans un ordre logique, qui peut certes échapper à la perspicacité de la foule, mais qui en réalité, ne vise que le salut de ses citoyens. Que la mesure soit populaire ou impopulaire, l'essentiel est que le souverain ne la met en place qu'en vue du bien-être de ses sujets. Le salut du peuple passe pour ainsi dire au-dessus de ses intérêts et autres caprices246(*).

1.3. Confusions entre l'absolutisme et le totalitarisme

L'absolutisme, tel qu'envisagé par Thomas Hobbes, donnerait lieu à un État de type totalitaire. Mais en fait qu'est-ce qu'unÉtat totalitaire, pour qu'on puisse y confiner l'absolutisme hobbesien ? À cette question, Jean-Pierre Zarader répond qu'un État totalitaire,

c'est un État dans lequel l'autorité politique prétend tout régir, non seulement la sphère proprement politique mais également la vie privée, la vie économique, artistique, ... C'est dire que l'État totalitaire entend présider, comme son nom l'indique, à la totalité de la vie des individus247(*).

En des propos plus limpides, l'État totalitaire serait un État qui veut tout soumettre à son contrôle, la sphère publique comme la sphère privée. Il en découle que l'individu en régime totalitaire n'est qu'une infime partie d'un tout, le tout ayant plus de valeur sur la partie : il y a une primauté abyssale de l'État sur l'individu. Ce faisant, les États totalitairescompriment gravement les libertés, car ils ne veulent rien laisser échapper à leur examen.

Dissertant sur le sujet, Raymond Aron en vient à distinguer cinq caractéristiques de l'État totalitaire :

le monopole de l'activité politique par un parti [avec à sa tête un seul homme], l'exercice d'une idéologie monopolistique, le monopole des moyens de force et des moyens de persuasion détenus par ce parti, la subordination des activités économiques et professionnelles à l'idéologie et à la politique du parti, et enfin la terreur à la fois policière et idéologique248(*).  

L'État hobbesien est loin de remplir de telles conditions. Certes, c'est un État qui a la prétention d'intervenir dans les différentes sphères de la vie des citoyens, mais l'assimiler à un État totalitaire relève d'un véritable embrouillamini, d'un contresens doublé d'un anachronisme249(*).

Il y a une absence de ces critères d'éligibilité dans l'hobbisme politique pour pouvoir élever l'État-Léviathan au rang d'État totalitaire. Nullement dans toute l'oeuvre politique de Hobbes, il n'est question de la présence d'un quelconque parti unique, de la prédominance d'une idéologie, d'une étatisation de l'économie, d'une police de terreur. Notons aussi que le mot250(*) et le système totalitaire sont postérieurs à l'absolutisme hobbesien. La théorie hobbesienne de l'absolutisme fut formulée au XVIIe siècle, alors que le totalitarisme est un système politique apparu au XXe siècle, précisément au lendemain de la première guerre mondiale. Sa naissance coïncide avec l'apparition des sociétés dîtes industrielles. Ces types de sociétés paraissent comme la condition sine qua non de l'émergence des régimes totalitaires251(*).

En outre, si sur le plan de l'économie, dans les régimes totalitaires, il y a une mainmise totale de l'État sur tous les secteurs d'activités économiques, chez Thomas Hobbes, il est laissé la possibilité aux citoyens de passer les contrats commerciaux comme bon leur semble : ils peuvent acheter et vendre. En plus, l'État ne détermine pas ce qu'ils peuvent vendre ou acheter. Il ne fait que superviser les échanges commerciaux comme c'est le cas de nos jours. La présence même de ces notions, en l'occurrence, acheter et vendre dans la sphère économique au sein de l'hobbisme politique fait dire à Jean-Pierre Zarader que l'auteur du Léviathan est un partisan du libéralisme économique. Car, celles-ci révèlent qu'il n'y a pas de planification rigoureuse de l'économie par l'État-Léviathan ; ce qui est tout le contraire des États totalitaires252(*). L'État-Léviathan est donc loin d'être liberticide en la matière.

Si l'État hobbesien a compétence pour réguler le commerce, il faut dire que c'est pour combattre le système des monopoles. Il joue le rôle de superviseur en la matière à l'image des États modernes qui fixent le prix de certaines marchandises notamment celles jugées de première nécessité. L'État-Léviathan s'immisce dans la sphère économique pour éviter qu'un seul particulier ou un groupe d'individus ne s'arrogent le droit de contrôler à eux seuls tout un domaine du commerce national. Cela pourrait concourir à la ruine de l'État. Il faut que l'État empêche que tout soit amassé « abondamment entre les mains de quelques particuliers ou d'un seul, sous l'effet de monopoles, ou de la mise en ferme des revenus publics »253(*).

Enfin, pour parvenir à ses fins, à savoir avoir un contrôle total et sans partages sur la vie des citoyens, l'État totalitaire utilise dans sa gouvernance la terreur comme moyen de coercition. On pourrait être tenté de voir ici, encore, quelques similitudes entre la contrainte qu'exerce le souverain hobbesien sur ses sujets et la terreur des régimes totalitaires, mais il n'en est rien puisque ces présupposées analogies devraient s'arrêter aux simples apparences. Pour dire vrai, la contrainte du souverain hobbesien n'est nullement synonyme d'oppression du citoyen. L'État-Léviathan n'a pas pour but d'opprimer ces sujets. La contrainte, dans ce cas d'espèce, ne s'exerce que si et seulement si le citoyen décide de s'opposer aux desseins du souverain. Mais, une fois cette rébellion contenue, la contrainte cesse automatiquement. À la vérité, cette contrainte ne visait qu'une fin bien déterminée dans le temps, à savoir faire plier le citoyen récalcitrant ; amener le citoyen indocile à se soumettre. Et d'ailleurs, ce recours se fait en préservant sa vie. La finalité atteinte, la contrainte n'a plus sa raison d'être ; alors que la terreur du régime totalitaire perdure indéfiniment. Elle est quotidienne et ininterrompue. Elle peut souvent aller jusqu'aux extrêmes d'autant que la vie du citoyen peut lui être ôtée sans ménagement. Cette terreur semble ne pas avoir d'objectif précis et circonscrit. Les choses se passent comme si la terreur induite par le régime totalitaire était elle-même sa propre fin. Sous ce registre, on pourrait même penser qu'elle constitue l'essence même dudit régime. Par voie de fait, Claude Polin a raison quand il écrit qu' :

il faut se garder de confondre contrainte et terreur, car l'une n'a d'autre but que de réduire l'opposition, tandis que l'autre tend à détruire en chacun, et précisément par la terreur, sa propre dignité, c'est-à-dire à réduire l'homme en l'homme254(*).

Au regard de ces commentaires susmentionnés, nous pouvons dire avec Yves Charles Zarka : « Si le pouvoir du souverain[chez Hobbes] est absolu, cela ne signifie ni qu'il soit sans loi, ni que l'État soit totalitaire »255(*). En outre, si Thomas Hobbes n'apparaît en rien comme le chantre tout désigné d'une politique qui rime avec l'arbitraire, le despotisme ou encore le totalitarisme, peut-on néanmoins voir en sa philosophie une pensée qui pourrait servir à la consolidation des Droits de l'Homme en matière de politique sécuritaire ?

2. L'habeas corpushobbesien

Dans le débat actuel sur la question d'une meilleure harmonisation des impératifs sécuritaires avec les exigences de l'État de droit qui animent la vie politique des États confrontés à des problèmes sécuritaires, le hobbisme politique pourrait se révéler être la panacée. N'en déplaise aux détracteurs de Thomas Hobbes, le hobbisme politique, pour ce qu'en pense Adamou Dilwani, est un véritable plaidoyer en faveur du respect de la liberté et des Droits de l'Homme256(*). Dans la même veine, Michel Villey, dans son livre Le Droit et les droits de l'homme, même s'il ne fait pas de Hobbes l'inventeur du concept de Droits de l'Homme, il estime néanmoins que c'est sous sa plume notamment au chapitre XIV de son ouvrage Léviathan que le terme a été amplement tamisé pour la première fois257(*). C'est pourquoi selon toujours Michel Villey, il pourrait être désigné comme celui-là même qui aura posé les premiers jalons de la science juridique moderne258(*). À l'écouter, il est permis de voir dans l'hobbisme politique la source de la fondation des Droits de l'Homme. Et cela, à cause de sa rupture avec les classiques et la rigueur de sa démarche et de la suite logique des arguments qu'il développe dans son approche du droit. Sur cette base, il reste établi que l'auteur du Léviathan, en véritable défenseur des Droits de l'Homme et du Citoyen, inviterait l'État dans la poursuite de sa mission principale d'assurer la sécurité des citoyens au respect strict de leurs droits civiques. Pour utiliser une terminologie juridique adéquate, il promeut ce que nous pourrions qualifier d'habeas corpus.

L'habeas corpusest une notion juridique qui énonce une liberté fondamentale, celle de ne pas être emprisonné sans jugement, contraire de l'arbitraire qui permet d'arrêter n'importe qui sans raison valable. En vertu du principe, toute personne arrêtée a le droit de savoir pourquoi elle est arrêtée et de quoi elle est accusée. Ensuite, elle peut être libérée sous caution, puis amenée dans les jours qui suivent devant un juge259(*).

Ces dispositions juridiques révolutionnaires qui visent à éviter aux citoyens de tomber sous le coup de l'arbitraire, sont perceptibles dans le hobbisme politique. L'auteur du Léviathansoutient, d'une part, qu'un citoyen ne peut être tué sous prétexte de la prévention d'un crime qu'il pourrait commettre260(*). Il faut que le crime soit constaté et établi avant la prononciation de toute condamnation. D'autre part, le citoyen ne peut être arrêté de manière arbitraire, en tenant de la présomption d'innocence dont il bénéficie. Il ne peut être condamné, sans être auparavant passé devant un juge pour défendre sa cause. Ce serait bafouer ses droits, notamment celui d'être entendu. Convoquons Hobbes lui-même pour étayer nos dires : On ne peut « punir aucun homme avant de l'avoir entendu en justice et déclaré coupable »261(*) parce que sa conviction, c'est que « les juges qui condamnent sans avoir entendu les preuves sont des juges injustes. »262(*)

En outre, s'il advenait que la détention soit nécessaire pour s'assurer que l'accusé ne prenne la fuite avant la tenue de son procès, le mis en cause ne doit faire l'objet d'aucune torture263(*). L'intégrité de sa personne doit être préservée. Autant comprendre avec Hobbes que toute forme de torture, physique ou psychologique, est absolument proscrite : Le justiciable ne doit être victime ni de mutilation ni de viol. On ne peut non plus lui inspirer la terreur, en lui faisant croire qu'il sera tué ou blessé pour lui arracher des aveux. Cette manière de faire constitue en elle-même des crimes graves contre sa personne, fut-elle suspectée de crimes odieux. Ce que Hobbes prévient ici, c'est que sous l'effet de la torture, un prisonnier est capable d'avouer n'importe quoi rien que pour faire cesser son supplice. Et on ne pourrait point l'en vouloir. De tels aveux, soutirés sous le coup de la torture, ne peuvent être retenus comme juridiquement valables contre la personne de l'accusé264(*).

Par ailleurs, le juge commis pour juger l'affaire doit être impartial. D'une part, ce ne doit pas être une cause dans laquelle il a lui-même des intérêts et cela en vertu du principe juridique qui stipule que personne ne peut être juge et parti. D'autre part, avant de rendre son verdict, il se doit d'écouter soigneusement et objectivement toutes les parties au conflit, en prenant soin de vérifier la véracité des faits rapportés par les témoins. Il devra s'assurer de l'objectivité de la déposition des témoins qui ont assisté à l'événement. Pour Thomas Hobbes, « un témoin doit avoir vu ce qu'il atteste, sans quoi son témoignage ne vaut pas »265(*) un penny. Un témoin qui se ferait payer pour parjurer devant le juge serait passible de poursuites juridiques266(*) pour faux témoignage puisqu'induisant volontairement le juge en erreur. En sus, la loi en elle-même ne peut prévoir des dispositions qui éliminent du procès des preuves qui peuvent innocenter un individu267(*) mensongèrement accusé.

Au-delà de son impartialité, le juge doit posséder certaines qualités accessoires. Le philosophe de Malmesbury en identifie quatre268(*) principalement. La première, c'est qu'il doit avoir une compréhension assez correcte de la principale loi de la nature qu'est l'équité. La seconde est celle d'être une personne incorruptible. Car percevoir de l'argent préalablement ou après pour rendre un verdict favorable à l'accusé, constitue un délit plus grave que le crime du mis en cause269(*). Ainsi, Thomas Hobbes condamne-t-il la corruption des magistrats. Pour lui, un bon magistrat doit éprouver le mépris des richesses superflues et de l'avancement immérité pour l'ensemble de sa carrière professionnelle. La troisième, le bon magistrat doit avoir une grande capacité à se dépouiller de ses émotions et sentiments, telles la colère, la haine, l'affection et la pitié. Il ne doit s'en tenir qu'à la loi et seulement qu'à la loi. Enfin, ce doit être une personne qui a le sens de l'écoute, c'est-à-dire qui a la patience d'écouter.

Bien plus, Hobbes va plus loin pour dire qu'un citoyen ne peut être condamné sur la base d'une loi édictée après son délit. On peut alléguer qu'il formule, en droit et ce avant l'heure, ce qu'on appelle de nos jours le principe de la non rétroactivité de la loi.  Seul le crime postérieur à la loi tombe sous le coup de celle-ci : « Aucune loi faite après qu'un acte a été accompli ne peut faire de cet acte un crime »270(*). Mieux, sous son instigation, la loi doit faire l'objet d'une publicité. Une fois élaborée, elle doit être publiée, notifiée aux citoyens pour avoir valeur de loi271(*), exception faite des lois de nature que tout homme découvre grâce à la raison272(*). Ce principe hobbesien peut-être l'instigateur de l'article 8 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 qui stipule : « Nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit »273(*).

Si Thomas Hobbes prescrit une hiérarchisation des crimes, c'est parce qu'il estime qu'il y a des crimes plus graves que d'autres. Si « les Stoïciens tenaient pour un aussi grand crime de tuer une poule illégalement que de tuer son père »274(*), tel n'est pas la certitude du philosophe de Malmesbury. En somme, il y a dans le hobbisme politique ce qu'on pourrait qualifier, selon le lexique juridique, de délit mineur. Les crimes commis à l'encontre de particulier tels le vol, l'infidélité, sont moins graves que ceux commis contre la personne de la république, notamment le vol de derniers publics, l'usurpation de titres des agents publics, le monnayage de secrets d'État. Bref, « le même acte, quand il a pour résultat de causer un dommage à beaucoup de gens, est plus grave que s'il a pour résultat de nuire à un petit nombre »275(*).

S'il y a des crimes plus graves que d'autres, les châtiments à infliger devraient suivre la même logique. Les peines corporelles, pécuniaires, l'emprisonnement, l'exil, l'ostracisme doivent être prononcées en fonction de la gravité du crime. Thomas Hobbes le dit expressément en ces termes : « Les châtiments les plus sévères doivent être réservés aux crimes qui sont les plus dangereux pour le bien public »276(*). Toutefois, s'il advenait que la peine encourue a été notifiée au coupable avant son délit, il est permis de lui faire écoper d'une peine plus lourde277(*) dans la mesure où ce dernier a agi en connaissance de cause.

De tout ce qui précède, on se rend compte que l'auteur du Léviathan met un point d'honneur à l'observance du respect des droits civiques des citoyens. Ces garde-fous juridiques sonnent comme des injonctions clairement faites à l'État de quêter la sécurité publique dans la stricte révérence de la dignité humaine.

CONCLUSIONGÉNÉRALE

L'État cherche quotidiennement à opérer un aménagement harmonieux entre les impératifs sécuritaires et les libertés individuelles et collectives. Cette conciliation n'est pas toujours évidente et facile à opérer. Notre préoccupation essentielle a été de démontrer, dans ce Mémoire, en quoi le hobbisme politique pouvait contribuer à solutionner ce dilemme auquel se trouve confronté l'État. La philosophie politique hobbesienne pourrait permettre la conciliation entre politique sécuritaire et respect des droits civiques. Pour vérifier cette hypothèse, la réflexion s'est articulée autour de trois grandes parties.

La première partie s'est intéressée à la nouvelle grille d'intelligibilité introduite par l'auteur du Léviathandans le champ épistémologique de la philosophie politique. À cet effet, dans le premier chapitre, nous avons examiné le caractère scientifique du hobbisme politique. Les griefs de ce dernier contre la philosophie politique classique, ainsi que la scolastique, ont d'abord été relevés avant de passer à sa systématisation de la science politique. L'essentiel du reproche que Thomas Hobbes fait aux Anciens est que leur philosophie politique repose plus sur des chimères que sur la réalité. Quant à la scolastique, elle s'est fourvoyée, en logeant dans la divinité la légitimité du pouvoir politique alors que celle-ci se situe au niveau des hommes. Nous avons établi, ensuite, un rapport entre le hobbisme politique et la pensée du philosophe florentin Nicolas Machiavel. Si tous deux s'en sont pris aux classiques, il n'en demeure pas moins que leurs approches de la politique diffèrent en bien des points. Contrairement au philosophe de Malmesbury, le secrétaire florentin n'a pas senti la nécessité de s'attarder sur la question de l'organisation sociale. Thomas Hobbes, après avoir montré les lacunes de ses devanciers, a fait de la philosophie politique une science soucieuse de la rigueur, de la clarté. Il lui a donné un caractère démonstratif. Pour arriver à ce résultat, il a dû introduire de nouveaux concepts dans ce champ disciplinaire, car ceux existants ne lui permettaient pas de rendre compte de façon efficiente de ce qu'il voulait exprimer. Ces nouvelles notions systématisées par lui sont, entre autres, le concept d'état de nature et le contrat social.

C'est à l'analyse de ces concepts novateurs que nous avons consacré le deuxième chapitre. L'idée d'état de nature a contribué à saisir l'idée que Thomas Hobbes se fait de l'homme ; et aussi le type de contrat social à même de lui assurer une existence paisible. Cette existence paisible passe par la pacification des rapports que l'homme entretient avec son prochain au quotidien. D'ailleurs, c'est à cette tâche que le philosophe anglais voue l'activité politique. Pour atteindre cet objectif, l'État doit pouvoir asseoir la sécurité et faire prospérer les libertés individuelles et collectives.

C'est cette équation difficile à laquelle doit faire face l'État hobbesien, et tout État en général, que nous avons tenté de résoudre dans la deuxième partie de notre travail. Pour être beaucoup plus explicite, nous avons montré le lien dialectique qui existe entre la sécurité et la liberté dans la philosophie politique hobbesienne. Le chapitre trois a alors consisté en l'analyse des concepts de sécurité et de liberté, à partir de l'idée qu'il s'en fait. Le contenu que l'auteur du Léviathan donne à ces concepts va au-delà de la conception commune. D'une part, la sécurité n'est pas, comme le pense le sens commun, le simple fait d'éviter tout ce qui pourrait nuire à l'intégrité physique et morale de notre personne, mais elle est synonyme de paix et englobe tout ce qui pourrait concourir à rendre l'existence humaine agréable. D'autre part, la liberté hobbesienne n'est pas synonyme de libertinage. Elle trouve sa manifestation dans ce qu'autorise la loi civile. Tout ceci concourt à faire de l'approche hobbesienne de ses deux notions une conception assez particulière et révolutionnaire.

Après ce travail d'analyse conceptuelle, nous avons montré, au quatrième chapitre, la signification de la sécurité et la liberté pour l'État hobbesien. Pour Thomas Hobbes, l'assise de la sécurité est la première finalité que devrait s'assigner l'État. Cependant celle-ci, en elle-même, ne constitue pas une fin en soi, c'est un moyen terme. Cette étape passée, l'État assurera aux citoyens la jouissance d'un certain nombre d'éléments de droits. Il en est ainsi, car, pour Hobbes, si les individus sacrifient la liberté illimitée qu'ils possédaient à l'état de nature pour intégrer la société civile, ce n'est pas pour vivre sous le joug de l'esclavage, de l'oppression d'un quelconque tyran ou despote. En revanche, c'est pour mieux jouir de leur liberté, une liberté plus raisonnable, celle qu'encadrent les lois de la république. C'est à l'abri de celles-ci que chacun pourra véritablement travailler à sa propre réalisation.

Si Thomas Hobbes a adressé un certain nombre de critiques à ses devanciers, disons que lui-même n'en a pas été épargné. Nous avons alors décidé de consacrer la troisième et dernière partie de cette étude à l'analyse de ses critiques. À cet effet, nous ne sommes pas voulus exhaustifs, mais sélectifs. Ces critiques ont été abordées sous l'angle de l'application du hobbisme politique dans la quête de sécurité publique et des libertés civiques. Au chapitre cinq, nous nous sommes intéressé à ce qui dans le hobbisme politique en ferait une pensée liberticide notamment sa conception du pouvoir politique comme devant être absolu ou encore son appel à l'instauration d'un État qui aurait compétence à régir toutes les sphères de la vie des citoyens. Bref, c'est à une véritable exhortation à un étatisme exacerbé. Après cette critique, somme toute négative du hobbisme politique, nous avons tout de même voulu rendre justice au philosophe de Malmesbury. Nous l'avons fait en montrant que s'il y a effectivement étatisme et absoluité du pouvoir chez ce dernier, sa pensée n'en est pas pour autant liberticide. Ce à quoi a été consacré entièrement notre sixième et dernier chapitre. Nous y avons d'abord relevé les amalgames et autres confusions qui sont faits sur le concept d'absolutisme hobbesien et nous avons clos avec l'analyse des garde-fous juridiques formulés par Thomas Hobbes pour préserver la dignité humaine.

En guise de conclusion, nous estimons, et ce à juste raison d'ailleurs, que même si la philosophie politique hobbesienne prête le flanc à certaines critiques, il n'en demeure pas moins que si des analyses sérieuses, exemptes de tous ces travestissements dont elle est généralement l'objet, étaient faites, c'est une pensée dont la mise en application pourrait concourir à la consolidation des droits humains tant en matière de politique sécuritaire que dans d'autres domaines. Cependant, l'époque contemporaine n'étant pas l'époque qui a vu naître l'hobbisme politique, il convient de l'adapter aux réalités actuelles. Les conditions d'adaptation et d'application pourraient constituer l'objet d'un sujet d'étude.

Index rerum

A

absolu, 38, 57, 59, 60, 63, 66, 67, 70, 76

absolutisme, VI, 4, 27, 54, 56, 59, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 77

arbitraire, 65, 66, 70, 71

B

bien commun, 7, 33

bonheur, 10

C

champ épistémologique, 5, 8, 21, 75

chaos, 1, 3, 28, 39, 50

Cité, 8, 9, 22, 44, 55, 57, 59

citoyen, 1, 2, 4, 7, 10, 13, 16, 17, 18, 19, 23, 25, 29, 33, 37, 38, 40, 42, 45, 46, 47, 48, 49, 51, 52, 55, 56, 57, 69, 71, 73

citoyens, 1, 2, 3, 4, 5, 8, 9, 10, 13, 30, 34, 40, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 56, 57, 58, 60, 61, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 71, 73, 74, 76

conservation de soi, VI, 1, 24, 48, 51

contractualiste, 22, 23

contrat, 5, 11, 22, 23, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 33, 40, 52, 60, 62, 64, 75

convention, 11, 28, 29

corps politique, 17, 18, 29, 32, 33, 38, 39, 41, 42, 45, 46, 49, 51, 55, 57, 61, 64, 67

corps social, 56

crainte, 26

crimes, 72, 73

crise, 1, 5, 12, 21

crises sécuritaires, 63

D

défense, IV, 2, 9, 44, 46, 47, 60

démocratie, 38, 56, 62, 70

démocratique, 1, 59, 63, 64

désir, 1, 3, 5, 25, 26

désordre, 3, 11, 28, 31, 33, 39

despotique, 63, 67

despotisme, 55, 63, 65, 67, 70

dictature, 55

Dieu, 12, 13, 27, 30, 65

dignité humaine, 74, 77

droit, 3, 5, 13, 18, 22, 28, 29, 32, 33, 41, 42, 46, 47, 49, 50, 51, 57, 59, 60, 64, 65, 66, 69, 70, 71, 73, 76

droit naturel, 22, 28, 32, 41, 42, 47

droits civiques, VI, 71, 74, 75

droits de l'Homme, 73

droits humains, VI, 4, 70, 77

E

égalité, 10, 41, 42

égalité naturelle, 10, 41

État, 1, 2, 3, 4, 5, 10, 13, 22, 24, 27, 29, 32, 33, 36, 37, 38, 39, 40, 44, 45, 46, 47, 48, 50, 51, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 63, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 73, 74, 75, 76

état de nature, 5, 17, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 30, 32, 39, 41, 42, 45, 51, 52, 60, 62, 75, 76

État hobbesien, 44, 48, 50, 58, 59, 66, 67, 68, 69, 76

étatisme, 4, 56, 57, 62, 76

État-Léviathan, 33, 36, 38, 40, 44, 47, 48, 50, 57, 58, 65, 66, 68, 69

États, VI, 2, 5, 20, 48, 49, 59, 63, 67, 68, 69, 70

G

guerre, 1, 11, 19, 20, 25, 30, 31, 32, 39, 46, 47, 52, 58, 61, 68

H

habeas corpus, 70, 71

hobbisme politique, VI, 5, 20, 21, 34, 54, 56, 61, 62, 63, 64, 70, 71, 75, 76, 77

I

impératifs sécuritaires, 3, 5, 75

injustice, 33

inquiétude, 1, 37, 38

insécurité, 1, 5, 36, 38, 40, 42, 45

iréniste, 26, 33

J

justice, 9, 33, 50, 62, 64, 66, 71, 77

L

légitimité, 2, 9, 12, 13, 14, 23, 27, 30, 45, 46, 64, 75

Léviathan, VI, 1, 4, 5, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 20, 22, 24, 25, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 44, 45, 46, 47, 48, 50, 51, 52, 55, 56, 58, 59, 61, 62, 64, 65, 66, 69, 70, 71, 73, 74, 75, 76

léviathanique, 36

libéral, 2, 3, 63

liberté, VI, 1, 2, 3, 4, 5, 10, 11, 12, 29, 30, 33, 34, 36, 37, 38, 40, 41, 42, 44, 48, 49, 50, 51, 56, 58, 63, 70, 71, 76, 81, 85

libertés individuelles et collectives, VI, 5, 36, 44, 48, 61, 75, 76

liberticide, 2, 4, 5, 40, 54, 55, 56, 62, 69, 76

M

matérialisme, 8, 17

matérialiste, 17

mécanisme, 17, 18, 45

modernité, 8, 55, 62

N

nature, 9, 10, 11, 14, 15, 17, 18, 19, 20, 22, 23, 24, 25, 28, 30, 31, 32, 33, 37, 39, 41, 42, 55, 57, 59, 65, 72, 73

O

obéir, 9, 10, 13, 19, 45

obéissance, 9, 13, 60

oppression, 69, 76

ordre, 1, 2, 3, 8, 9, 11, 19, 23, 27, 30, 31, 32, 34, 39, 44, 45, 47, 48, 50, 51, 61, 67, 70

ordre étatique, 40

ordre public, 44, 45, 47, 48, 51, 70

P

paix, 1, 3, 5, 14, 26, 30, 31, 32, 33, 37, 39, 40, 42, 44, 47, 51, 58, 59, 70, 76

passion, 8, 12, 15, 25, 26

peuple, 2, 27, 28, 59, 60, 64, 66, 67

philosophie, 3, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 14, 15, 17, 19, 20, 21, 22, 23, 26, 27, 32, 34, 39, 44, 45, 51, 54, 56, 62, 63, 70, 75, 76, 77

philosophie politique, VI, 3, 5, 7, 8, 10, 12, 14, 15, 16, 17, 22, 23, 27, 45, 54, 56, 62, 75

politique, 2, 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 36, 37, 39, 40, 41, 42, 44, 45, 47, 49, 50, 51, 54, 55, 56, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 73, 75, 76, 77

politique sécuritaire, VI, 75

pouvoir, 2, 3, 4, 7, 8, 9, 12, 13, 14, 15, 16, 18, 19, 22, 23, 26, 28, 29, 30, 31, 39, 49, 56, 59, 60, 61, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 70, 75, 76

pouvoir politique, 3, 8, 9, 12, 13, 14, 15, 16, 18, 19, 22, 23, 26, 28, 31, 59, 60, 61, 65, 67, 70, 75

pragmatisme, 15

préservation de soi, 2

problèmes sécuritaires, 70

protéger, 2, 38, 44, 45, 47

R

raison, 1, 10, 15, 26, 27, 31, 32, 41, 43, 44, 46, 52, 65, 66, 69, 71, 73

république, 11, 37, 39, 42, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 52, 57, 60, 65, 73, 76

résistance, 60

révolte, 61, 81

S

salut, 26, 47, 60, 67

science, 3, 7, 9, 15, 16, 17, 20, 23, 29, 30, 39, 44, 51, 62, 63, 71, 75

sécurisation, 44

sécuritaire, VI, 5, 36, 39, 45, 70, 77

sécurité, IV, VI, 1, 2, 3, 4, 5, 9, 33, 34, 36, 37, 38, 39, 40, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 54, 56, 59, 71, 74, 76

sécurité collective, VI, 3

sécurité nationale, 2, 46

sécurité publique, 1, 39, 74, 76

sécurocrate, 3

société, 3, 9, 10, 11, 16, 18, 22, 23, 24, 26, 29, 31, 33, 41, 42, 54, 62, 65, 76

société civile, 41, 76

souci de sécurité, 1

soumission, 10, 13, 61

souverain, 4, 9, 12, 29, 30, 39, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 63, 64, 65, 66, 67, 69, 70

souverain hobbesien, 9, 29, 30, 51, 57, 58, 59, 64, 65, 66, 67, 69

sphère publique, 58, 68

stabilité, 1, 3, 33, 37, 40, 44, 50

stipulation pour autrui, 29

sujets, 12, 13, 30, 37, 41, 42, 45, 46, 47, 48, 49, 51, 61, 66, 67, 69

sûreté, 39, 45, 50

système, 3, 31, 32, 44, 59, 61, 64, 68, 69

T

terreur, 1, 68, 69, 71

terrorisme, 1

terroriste, IV, 2

torture, 71

totalitaire, 22, 55, 57, 59, 67, 68, 69, 70

totalitarisme, 63, 65, 67, 68, 70

troubles, 11, 40, 45

V

victime, 1, 4, 61, 71

vie, 1, 10, 11, 17, 23, 24, 26, 28, 29, 31, 32, 33, 37, 39, 46, 48, 49, 50, 51, 52, 56, 57, 58, 60, 67, 68, 69, 70, 76

vie privé, 58

violence, IV, 1, 3, 31, 32, 38, 39, 45, 52, 61

Index nominum

A

Adamou Dilwani, 70

Anciens (les), 7, 12, 13, 14, 16, 32, 45, 75

Aristote, 9, 10, 11, 23, 32

B

Bacon, 8

Baruch Spinoza, 62

C

Charles Louis de Montesquieu, 62

classiques (les), 5, 8, 11, 12, 13, 16, 17, 71, 75

Claude Polin, 69

D

Dominique Weber, 47

Daniel Marc Weinstock, 38

E

Emmanuel Kant, 62

Épicure, 22

G

Gabriel Hürlimann, 61

Galilée, 8, 15

H

Hannah Arendt, 55

Hélène L'Heuillet, 40

Hugo Grotius, 23

J

Janine Chanteur, 28

Jean Terrel, 41

Jean-Jacques Rousseau, 26, 51, 52, 62

Jean-Pierre Zarader, 59, 65, 66, 67, 69

John Locke, 27, 62

John Rawls, 62

Joseph Vialatoux, 22, 55, 57, 59

Jürgen Habermas, 62, 63

K

Kumar Bose Pradip, 2

L

Léo Strauss, 4, 14, 63

Louis Roux, 18, 19

Lucrèce, 22

M

Michel Foucault, 55

Michel Villey, 70

modernes (les), 31, 58, 59, 61, 68

Monarchomaques (les), 27

N

Nicolas Machiavel, 14, 15, 16, 44, 46, 75

Norbert Campagna, 11, 20, 51

P

Pasquale Pasquino, 23

Philippe Nemo, 58, 61

Platon, 8, 9, 16, 44

R

Raymond Aron, 67

Raymond Polin, 40

René Descartes, 8, 15, 17

Robert Dérathé 63

S

Samuel Pufendorf, 62

Scolastique (la), 12, 13, 14, 75

Sébastian Roché, 37

Simone Goyard-Fabre, 4, 19, 27

Socrate, 7

T

Thomas Hobbes, VI, 1, 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 31, 32, 33, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 49, 50, 51, 52, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 75, 76

Y

Yves Charles Zarka, 4, 24, 66

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES :

· Le corpus de Thomas Hobbes278(*) :

1. HOBBESThomas, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971.

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· Les livres et articles consacrés à Thomas Hobbes279(*) :

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2. BERTHIER Jauffrey, Lectures de Hobbes, Paris, Ellipses, 2013.

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11. FOISNEAU Luc, Hobbes et la toute-puissance de Dieu, Paris, PUF, 2016.

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13. HÜRLIMANN Gabriel, « Hobbes, Foucault et la peur de la révolte », trad. Ariane Kiatibian, in Rue Descartes, Vol.1, n° 77, 2013, pp. 52-68.

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21. TERREL Jean,Les Théories du pacte social. Droit naturel, souveraineté et contrat de Bodin à Rousseau, Paris, Seuil, 2001.

22. TERREL Jean, Le vocabulaire de Hobbes, Paris, Ellipses, 2003.

23. TERREL Jean, Thomas Hobbes : philosopher par temps de crises, Paris, PUF, 2012.

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25. TINLAND Frank, « Droit à la vie, fondement contractuel de la paix civile et nécessités de l'ordre public selon Th. Hobbes et J.-J. Rousseau », in Revue d'histoire et de philosophie religieuse, Vol. 65, n°2, Avril-juin 1985. pp. 153-168.

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27. VIALATOUX Joseph, La Cité de Hobbes. Théorie de l'État totalitaire. Essai sur la conception naturaliste de la civilisation, Paris, Librairie Lecoffre et Gabalda, 1935.

28. ZARKA Yves Charles, Hobbes et la pensée politique moderne, Paris, PUF, 1995.

29. ZARKA Yves Charles, Hobbes et son vocabulaire. Études de lexicographie philosophique, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1992.

· Les ouvrages et articles généraux280(*) :

1. ARENDT Hannah, La Nature du totalitarisme, suivi de Religion et politique, trad. Michelle-Irène Brudny, Paris, Éditions Payot et Rivages, 2018.

2. ARENDT Hannah, Les origines du totalitarisme. L'impérialisme, trad. Martine Leiris, Paris, Fayard, 1982.

3. ARISTOTE, Les Politiques, trad. Pierre Pellegrin, Paris, Flammarion, 2015.

4. BAMBARA Romuald Évariste, Les villes forteresses. De la peur à l'urgence sécuritaire, Paris, L'Harmattan, 2021.

5. BERCIS Pierre, Guide des droits de l'homme. La conquête des libertés, Paris, Hachette Éducation, 1993.

6. BOUVIER Pascal, Petite histoire de la philosophie politique, Paris Ellipses, 2009.

7. DERATHÉ Robert, Jean-Jacques Rousseau et la science politique de son temps, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1995.

8. DESCARTES René, Discours de la méthode, Paris, GF Flammarion, 1966.

9. FOUCAULT Michel, Sécurité, territoire, population. Cours au collège de France (1977-1988), Paris, Seuil/Gallimard, 2004.

10. GOYARD-FABRE Simone, Philosophie politique XVIe-XXe siècle, Paris, PUF, 1987.

11. GOYARD-FABRE Simone,L'État. Figure moderne de la politique, Paris, Armand Colin, 1999.

12. HABERMAS Jürgen, Théorie et pratique, trad. Gérard Raulet, Paris, Éditions Payot etRivages, 2006.

13. JACQUARD Albert, Un monde sans prison ?, Paris, Seuil, 1993.

14. KONE Cyrille, « Nature et Politique chez Aristote », in Revue Repères, PUCI, Vol. n°1, 2002, pp. 55-78.

15. L'HEUILLET Hélène et ZUPPINGER Thibaud, Sociétés contemporaines et sécurités, dossier printemps 2010, disponible sur www.implications-philosophiques.org, consulté le 04/07/2021.

16. LOCKE John, Traité du gouvernement civil, trad. David Mazel, Paris, Flammarion, 1992.

17. LUCRÈCE, La Nature des choses, trad. Jackie Pigeaud, Paris, Gallimard, 2015.

18. MACHIAVEL Nicolas, Le Prince et autres textes, trad. Jean-Vincent Périès, Paris, Union Générale d'Éditions, 1962.

19. MINEAU André, « Nature et finalité de la politique », in Laval théologique et philosophique, t. 1, vol. 45,1989, pp. 87-93.

20. NAKOULIMA Gomdaogo Pierre, La Préservation de la planète. Défis contemporains de la modernité, Paris, L'Harmattan, 2010.

21. NAY Olivier, Histoire des idées politiques. La pensée politique occidentale de l'Antiquité à nos jours, Paris, Armand Colin, 2016.

22. NEMO Philippe, Histoire des idées politiques dans l'Antiquité et au Moyen Âge, Paris, PUF, 1998.

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28. RODIS-LEWIS Geneviève, Épicure et son école, Paris, Gallimard, 1975.

29. ROUSSEAU Jean-Jacques, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes,Paris, Gallimard, 1985.

30. ROUSSEAU Jean-Jacques, Du Contrat social, Paris, GF Flammarion, 2001.

31. SAVADOGO Mahamadé, La Parole et la cité. Essais de philosophie politique, Paris, L'Harmattan, 2002.

32. STRAUSS Léo, Droit naturel et histoire, trad. Monique Nathan et Éric de Dampierre, Paris, Flammarion, 1986.

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34. WEINSTOCK Daniel Marc, « Sécurité et démocratie », in Philosophiques, vol. 29, n°2, Automne 2002, pp. 351-370.

35. WOLFF Francis, Aristote et la politique, Paris, PUF, 2015, in https://fr.booksc.org, consulté le 15/12/2020.

36. ZARADER Jean-Pierre, Petite histoire des idées philosophiques suivi d'un essai : Le statut de l'oeuvre d'art chez André Malraux, Paris, Ellipses, 1994.

37. ZARKA Yves Charles et MÉNISSIER Thierry, Machiavel, le Prince ou le nouvel art politique, PUF, 2001.

· Les Dictionnaires281(*) :

1. HUISMAN Denis, Dictionnaire des philosophes, Paris, PUF, 1984.

2. JULIA Didier, Dictionnaire de la philosophie, Paris, Libraire Larousse, 1988.

3. LALANDE André, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Paris, PUF, 1926.

· Les Thèses282(*) :

1. MOGUÉ N'GbessoMobio Justin, La Liberté individuelle chez Thomas Hobbes, Thèse de Doctorat Unique, sous la direction deYao Edmond KOUASSI, Université Alassane OUATTARA, Bouaké, Côte d'Ivoire, soutenue, publiquement le 25 Octobre 2018.

2. N'GUESSAN Kouadio Louis, Les Figures de la gouvernance de la paix chez Thomas Hobbes, Thèse de Doctorat Unique, sous la direction de Yao Edmond KOUASSI, Université Alassane OUATTARA, Bouaké, Côte d'Ivoire, soutenue, publiquement le 27 Janvier 2018.

· Webographie283(*) :

1. BINDEDOU Justine, « Hobbisme et démocratie », in http:/www.unesco.chairephilo.uqam.ca, consulté le 03/07/2020.

2. ÉZOUAH Léon, Hobbes, philosophe de la paix, in http://ezoleon.blogspot.com, consulté le 04/03/2021.

3. « Habeas corpus » in https://www.wikipédia.org, consulté le 21/06/2021.

4. BRAUDO Serge, « Définition de la stipulation pour autrui » in www.dictionnaire-juridique.com, consulté le 24/06/2021.

5. « Sécurité » in www.larousse.fr, consulté le 27/06/2021.

TABLE DES MATIÈRES

SOMMAIRE III

DÉDICACES IV

REMERCIEMENTS V

RÉSUMÉ : VI

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIÈRE PARTIE : 6

HOBBES : UNE NOUVELLE GRILLE D'INTELLIGIBILITÉ DE LA POLITIQUE 6

CHAPITRE I : UNE APPROCHE SCIENTIFIQUE DU POUVOIR POLITIQUE CHEZ HOBBES 8

1. La critique de la philosophie politique traditionnelle à l'initiative de Hobbes 8

2. Le projet hobbesien d'une rationalisation du pouvoir politique 16

CHAPITRE II : DE L'ÉTAT DE NATURE AU CONTRAT POLITIQUE : UNE ANTHROPOLOGIE PESSIMISTE AU FONDEMENT DU CONTRAT POLITIQUE 22

1. L'état de nature comme postulat d'appréhension de la nature humaine 22

2. Le contrat hobbesien : un contrat léonin 27

3. La saisie du pouvoir politique comme quête de rapport pacifié 31

DEUXIÈME PARTIE : 35

UNE DIALECTIQUE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA LIBERTÉ DANS LE HOBBISME POLITIQUE 35

CHAPITRE III : LA SPÉCIFICITÉ DE L'APPROCHE HOBBESIENNE DES CONCEPTS DE SECURITÉ ET DE LIBERTÉ 37

1. La sécurité synonyme de stabilité et de paix 37

2. De la liberté naturelle à la liberté civile 40

CHAPITRE IV : LE SENS DE LA SECURITÉ ET DE LA LIBERTÉ POUR L'ÉTAT HOBBESIEN 44

1. La sécurité comme première finalité de l'État 44

2. La sécurité, socle des libertés au sein de l'État-Léviathan 48

2.1. Les libertés individuelles dans l'État hobbesien 48

2.2. Le droit à la vie : un droit inaliénable 51

TROISIÈME PARTIE : 53

UNE LECTURE CRITIQUE DU HOBBISME POLITIQUE À PARTIR DE SON APPLICATION DANS LA QUÊTE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA LIBERTÉ 53

CHAPITRE V : HOBBES, UN PENSEUR LIBERTICIDE 55

1. L'étatisme comme exhortation de l'hobbisme politique 56

2. L'absolutisme politique comme substrat de la théorie hobbesienne 59

CHAPITRE VI : LE HOBBISME POLITIQUE COMME CONSOLIDATION DES DROITS DE L'HOMME EN MATIÈRE DE POLITIQUE SÉCURITAIRE 62

1. L'absolutisme politique de Hobbes : objet de confusions, de contre-sens et d'amalgames 63

1.1. Distinctions entre l'absolutisme et l'arbitraire 65

1.2. Nuances entre l'absolutisme et le despotisme 67

1.3. Confusions entre l'absolutisme et le totalitarisme 67

2. L'habeas corpus hobbesien 70

CONCLUSION GÉNÉRALE 75

Index rerum 78

Index nominum 80

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES : 81

TABLE DES MATIÈRES 87

* 1Thomas Hobbes est un philosophe anglais du XVIIe siècle. Il voit le jour, de façon prématurée, à Wesport, en Angleterre, le 05 Avril 1588. Abandonné très tôt par son père, il sera éduqué par son oncle. Ce dernier l'envoie, à quatre ans, à l'école de Wesport où il apprit à lire, à écrire et à compter. À huit ans, Hobbes intégra l'école de Malmesbury. Il y apprendra le latin et le grec avec Robert Latimer. Hobbes entre, à l'université d'Oxford en 1603, qu'il quittera en 1608 après avoir obtenu son diplôme Bachelier-ès-Arts. Il est recommandé à William Cavendish, baron de Hardwick, qui sera plus tard Comte de Devonshire. Il devient le précepteur du fils aîné du Comte. Grâce à son rôle de précepteur, il fera de nombreux voyages sur le continent européen avec son jeune maître. En 1610, tous deux partent pour un premier voyage, puis en 1629, un deuxième voyage. Hobbes côtoiera les plus grands savants de son époque : il fut le secrétaire de Bacon. Il fréquente Descartes, Gassendi, Digby... Il rencontrera Galilée à Florence (avril 1636), Mersenne à Paris (en 1634 et 1635). En raison de la guerre civile que connait l'Angleterre, Hobbes s'installe en France, précisément à Paris, en 1640. Il restera, en exil, en France, pendant 11 ans. Ce n'est qu'en 1651, qu'il retournera en Angleterre. En 1642, Hobbes fait paraître De Cive à Londres, en 1651, paraît Léviathan, en 1658, De Homine. Hobbes meurt, à Hardwick Hall, en Angleterre, le jeudi 4 Décembre1679.

* 2Kumar Bose Pradip, « Sécurité, terreur et paradoxe démocratique », trad. MountahaKobsi, in Rue Descartes, Vol. 4, n°62, 2008, p. 29.

* 3Après les attentats terroristes dont ont été victimes les États-Unis, le 11 Septembre 2001, plusieurs États dans le monde, sous couvert de la Raison d'État, ont fait voter des lois pour renforcer les pouvoirs de l'État en matière de sécurité nationale. Nous avons aux États Unis, le « PatriotAct » qui fut voté par le Congrès Américain et promulgué par le président George W. Bush le 26 octobre 2001. En témoigne, en France, la loi n0 2001-1062, en Angleterre, la loi Anti-terrorism, crime and Security Act 2001, au Canada, le Projet de loi c-36. Des lois que beaucoup d'organisations de défense des Droits de l'Homme jugent liberticides. Plus récent et près de nous : après l'attaque terroriste du village de Solhan, perpétré dans la nuit du 03 Juin au 04 Juin 2021, l'État burkinabè a décidé de la création d'une unité des Forces Spéciales au sein de son armée. L'article 10 du Décret n°0481/PRES/PM/MDNA/ portant Statut Particulier des Forces Spéciales stipule expressément : « Les personnes des Forces Spéciales ne peuvent être poursuivies pour des actes accomplis dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions ». Un article qui a d'ailleurs suscité de vives polémiques.

* 4 Kumar Bose Pradip, Op. cit.,p. 25.

* 5 Jean-Pierre Zarader, Petite histoire des idées philosophiques, suivi d'un essai : Le Statut de l'oeuvre d'art chez André Malraux, Paris, Ellipses, 1994, p. 47.

* 6 Roger Labrousse, « Hobbes et l'apologie de la monarchie », in Revue française de science politique, Vol. 3, n°3, 1953, p. 478.

* 7Kumar Bose Pradip, Op. cit., p. 27.

* 8Justine Bindedou, « Le Sens de l'humanité dans l'absolutisme de Thomas Hobbes », in Revue Ivoirienne de Philosophie et de Culture, Le Korè, n°37, Abidjan, Éditions Universitaires de Côte d'Ivoire, 2006, p. 124.

* 9 Justine Bindedou, Op. Cit., p. 138.

* 10Nous avons notamment la question du Beau pris en charge par l'esthétique, philosophie de l'art ; celle du Vrai, domaine réservé à la logique qui s'intéresse aux conditions de validité d'un raisonnement ; il y a aussi la question du Bien, objet de la philosophie morale qui cherche à déterminer les règles qui doivent régir l'agir humain.

* 11 Léo Strauss, Droit naturel et histoire, trad. Monique Nathan et Éric de Dampierre, Paris, Flammarion, 1986, p. 115.

* 12 Par Anciens, si on se situe dans une logique hobbesienne, c'est faire référence à Platon et son disciple Aristote ainsi que Cicéron, Sénèque, Tacite, Plutarque. Cf. Léo Strauss, Op. cit., p. 154.

* 13 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 68.

* 14 Léo Strauss, Op. cit., p. 155.

* 15 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 392.

* 16 Olivier Nay, Histoire des idées politiques. La pensée politique occidentale de l'Antiquité à nos jours, Paris, Armand Colin, 2016, p. 78.

* 17 De ce fait, la tâche du législateur selon Platon est, au moyen des lois de la Cité, de rendre les citoyens meilleurs, vertueux. Cf. Platon, Les Lois, I, 630c in Platon, OEuvres complètes, sous la direction de Luc Brisson, Paris, Flammarion, 2008. Cette idée est aussi perceptible chez Aristote, Les Politiques, trad. Pierre Pellegrin, III, 9, 1280b 5-10, Paris, Flammarion, 2015.

* 18Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 392.

* 19Thomas Hobbes, Idem.

* 20Thomas Hobbes, Op.Cit., p. 685.

* 21 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 120.

* 22Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 154.

* 23 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 95.

* 24 Norbert Campagna, Thomas Hobbes. L'Ordre et la liberté, Paris, Éditions Michalon, 2016, p. 45, in https://fr.booksc.org, consulté le 05/01/2021.

* 25 Aristote, Les Politiques, trad. Pierre Pellegrin, I, 1, 1252a 4, Paris, Flammarion, 2015.

* 26Aristote, Op. Cit., 1280b 38-40.

* 27Jürgen Habermas, Théorie et pratique, trad. Gérard Raulet, Paris, Éditions Payot et Rivages, 2006, p. 10.

* 28Norbert Campagna, Thomas Hobbes. L'Ordre et la liberté, Paris, Éditions Michalon, 2016, p. 21, in https://fr.booksc.org, consulté le 05/01/2021.

* 29Aristote, Op. cit, I, 2, 1253a 29.

* 30 Cyrille Koné, « Nature et Politique chez Aristote », in Revue Repères, PUCI, Année 2002, Vol. n°1, p. 56.

* 31Aristote, Op. cit., I, 2, 1252b.

* 32 Nous reviendrons plus amplement sur cet aspect à la section 2 du chapitre II de ce Mémoire.

* 33 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 352.

* 34 Thomas Hobbes, Op. Cit.,p. 348.

* 35 Thomas Hobbes, Op. cit., p. 228.

* 36 Thomas Hobbes, Op. Cit.,p. 349.

* 37 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. Gérard Mairet, Paris, Gallimard, 2000, p. 345.

* 38 Norbert Campagna, Thomas Hobbes. L'Ordre et la liberté, Paris, Éditions Michalon, p. 32, in https://fr.booksc.org, consulté le 05/01/2021.

* 39 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 711.

* 40 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 288.

* 41 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 346.

* 42Thomas Hobbes, Béhémoth ou Le Long Parlement, trad. numérique Philippe Folliot, p. 8, in http://classiques, consulté le 17/07/2020.

* 43 Thomas Hobbes, Idem.

* 44Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 9.

* 45 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 22.

* 46 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 17.

* 47 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 209 et p. 596.

* 48 Thomas Hobbes, Béhémoth ou Le Long Parlement, trad. numérique Philippe Folliot, p. 17, in http://classiques, consulté le 17/07/2020.

* 49Simone Goyard-Fabre, « Introduction » Cf. Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 32.

* 50 Nicolas Machiavel, Le Prince et autres textes, trad. Jean-Vincent Périès, Paris, Union Générale d'Éditions, 1962, p. 67.

* 51 Sur la question voir Nicolas Machiavel, Op. cit.,p. 61. Thomas Hobbes, de son côté, nourrit l'espoir de voir les souverains daignés s'intéresser à son oeuvre, et qu'elle leur serve, et qu'on enseigne sa pensée dans les universités. Cf. Thomas Hobbes, Léviathan, François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 392.

* 52 Jürgen Habermas, Théorie et pratique, trad. Gérard Raulet, Paris, Éditions Payot et Rivages, 2006, p. 81.

* 53 Yves Charles Zarka et Thierry Ménissier, Machiavel,Le Prince ou le nouvel art politique, Paris, PUF, 2001, p. 28.

* 54 Léo Strauss, Droit naturel et histoire, trad. Monique Nathan et Éric de Dampierre, Paris, Flammarion, 1986, p. 162.

* 55 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 681.

* 56 Nicolas Machiavel, Le Prince et autres textes, trad. Jean-Vincent Périès, Paris, Union Générale d'Éditions, 1962, p. 61.

* 57 Jürgen Habermas, Théorie et pratique, trad. Gérard Raulet, Paris, Éditions Payot et Rivages, 2006, p. 89.

* 58Thomas Hobbes, Éléments de la loi naturelle et politique, trad. Dominique Weber, Paris, Librairie Générale Française, 2003, p. 78.

* 59Norbert Campagna, Thomas Hobbes. L'Ordre et la liberté, Paris, Éditions Michalon, p. 14, in https://fr.booksc.org, consulté le 05/01/2021.

* 60 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 67.

* 61 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 69.

* 62 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 71.

* 63 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 44

* 64 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. Gérard Mairet, Paris, Gallimard, 2000, p. 120.

* 65Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 75.

* 66 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 32.

* 67 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 31.

* 68 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 101.

* 69 André Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Paris, PUF, 1926, p. 591.

* 70 Didier Julia, Dictionnaire de la philosophie, Paris, Libraire Larousse, 1988, p. 171.

* 71 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, pp. 5-6

* 72 René Descartes, Discours de la méthode, Paris, GF Flammarion, 1966, p. 33.

* 73 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 374.

* 74 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 41.

* 75 Nous analyserons ce concept hobbesien dans le chapitre II de ce Mémoire.

* 76Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 71.

* 77 Michel Villey, Le Droit et les droits de l'homme, Paris, PUF, 1983, p. 138.

* 78 Thomas Hobbes, Op. cit., p. 23.

* 79 Thomas Hobbes, Éléments de la loi naturelle et politique, trad. Dominique Weber, Paris, Librairie Générale Française, 2003, p. 77. Selon Simone Goyard-Fabre, Jean Bernhardt parle d'une « illumination euclidienne » de Thomas Hobbes lors de son second voyage, en 1629, sur le Continent. Cf. Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 25.

* 80Louis Roux, « Préface » Cf. Thomas Hobbes, Le Corps politique, trad. Samuel de Sorbière, Saint-Étienne, Publication de l'Université de Saint-Étienne, 1972, p. 11.

* 81 Thomas Hobbes, Idem.

* 82 Thomas Hobbes, Ibidem.

* 83 Thomas Hobbes, Ibidem.

* 84 Simone Goyard-Fabre, « Introduction » Cf. Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 23.

* 85 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 125.

* 86 Thomas Hobbes, Idem.

* 87 Pasquino Pasquale, « Thomas Hobbes : la condition naturelle de l'humanité », in Revue française de science politique, Vol. 44, n°2, 1994, p. 298.

* 88 Thomas Hobbes,Op. cit., p. 125.

* 89 Thomas Hobbes,Idem.

* 90 Thomas Hobbes,Op. Cit., p. 126.

* 91 Thomas Hobbes,Idem.

* 92 Norbert Campagna, Thomas Hobbes. L'Ordre et la liberté, Paris, Éditions Michalon, 2016, p. 11, in https://fr.booksc.org, consulté le 05/01/2021.

* 93 Souligné par l'auteur.

* 94 Pasquino Pasquale, Op. Cit., p. 301.

* 95 Jean Terrel, Thomas Hobbes : philosopher par temps de crise, Paris, PUF, 2012, p. 81.

* 96 Thomas Hobbes, De la nature humaine, trad. baron d'Holbach, p. 1, in www.gallica.bnf.fr, consulté le 20/11/2020.

* 97 Geneviève Rodis-Lewis, Épicure et son école, Paris, Gallimard, 1975, p. 336.

* 98 Joseph Vialatoux, La Cité de Hobbes. Théorie de l'État totalitaire. Essai sur la conception naturaliste de la civilisation, Paris, Librairie Lecoffre et Gabalda, 1935, p. 22.

* 99Lucrèce, La Nature des choses, Chant V, V. 932, trad. Jackie Pigeaud, Paris, Gallimard, 2015.

* 100Lucrèce, Op. Cit., Chant V, V. 955.

* 101 Lucrèce, Op. Cit., Chant V, V. 937-938.

* 102 Pasquino Pasquale, « Thomas Hobbes : la condition naturelle de l'humanité », in Revue française de science politique, Vol. 44, n°2, 1994, p. 294.

* 103 Léo Strauss, Droit naturel et histoire, trad. Monique Nathan et Éric de Dampierre, Paris, Flammarion, 1986,p. 167.

* 104 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982,p. 73.

* 105 Pasquino Pasquale, Op. cit., p. 295.

* 106 Pour Charles Edwyn Vaughan, parmi les philosophes dit contractualistes, il n'y a que Rousseau qui échappe à cette logique. Sa conception du contrat social est tout à fait indépendante de son approche de l'état de nature. Cf. Robert Derathé, Jean-Jacques Rousseau et la science politique de son temps, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1995, p. 130.

* 107 Contrairement aux autres théoriciens de l'état de nature, notamment Thomas Hobbes, Samuel Pufendorf, Jean-Jacques Rousseau et Emmanuel Kant qui conçoivent l'état de nature comme une hypothèse de travail, John Locke admet son existence réelle. L'état de nature aurait bel et bien existé. Aux yeux de Locke, c'est un état dans lequel les hommes ont vécu antérieurement à la société civile. Cf. Simone Goyard-Fabre, « Introduction » in John Locke, Traité du gouvernement civil, trad. David Mazel, Paris, Flammarion, 1992, p. 62. Sur la question, Léo Strauss estime qu'au-delà de la divergence, que l'on constate, dans la conception hobbesienne et lockéenne de l'état de nature (pour Hobbes, l'état de nature est un état de guerre, pour Locke, c'est un état de coexistence pacifique), « Locke est plus catégorique que Hobbes, lorsqu'il pose que les hommes vivent réellement dans l'état de nature ou que l'état de nature n'est pas simplement une hypothèse ». Cf. Léo Strauss, Droit naturel et histoire, trad. Monique Nathan et Éric de Dampierre, Paris, Flammarion, 1986, p. 202.

* 108 Yves Charles Zarka, Hobbes et la pensée politique moderne, Paris, PUF, 1995, p.128.

* 109 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 123.

* 110 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. Gérard Mairet, Paris, Gallimard, 2000, p. 221.

* 111 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 228.

* 112Yves Charles Zarka, Op. cit., p. 140.

* 113 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 123.

* 114 Thomas Hobbes, Idem.

* 115 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982,p. 72.

* 116Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 83.

* 117 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 124.

* 118 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 125.

* 119 Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, Paris, Gallimard, 1985, p. 62.

* 120 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 124.

* 121 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 125.

* 122 Janine Chanteur, « Nature humaine et pouvoir politique chez Hobbes et chez Rousseau », in Revue européenne des sciences sociales, t. 20, n° 61, 1982, p. 202.

* 123 Olivier Nay, Histoire des idées politiques. La pensée politique occidentale de l'Antiquité à nos jours, Paris, Armand Colin, 2016,p. 269.

* 124 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982,p. 38.

* 125 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 137.

* 126Thomas Hobbes,Ibidem.

* 127 Parmi les philosophes contractualistes, John Locke se démarque en cela qu'il estime que le contrat social est une réalité historique. Il a effectivement eu lieu. Il évoque les gouvernements de Rome, Venise et Tarente pour illustrer son propos. La théorie du contrat social serait conforme à « la pratique de l'humanité ». Cette thèse est développée tout le long du chapitre VIII. Cf. John Locke, Traité du gouvernement civil, trad. David Mazel, Paris, Flammarion, 1992. Voir aussi Jean Terrel, Les Théories du pacte social. Droit naturel, souveraineté et contrat de Bodin à Rousseau, Paris, Seuil, 2001, p. 242.

* 128 Nous avons notamment ceux formulés par John Locke, Samuel Pufendorf, Baruch Spinoza, Jean-Jacques Rousseau. Cf. Simone Goyard-Fabre, Philosophie politique XVIe-XXe siècle, Paris, PUF, 1987.

* 129 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 135.

* 130 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 132.

* 131 Olivier Nay, Histoire des idées politiques. La pensée politique occidentale de l'Antiquité à nos jours, Paris, Armand Colin, 2016,p. 270.

* 132 Janine Chanteur, « Nature humaine et pouvoir politique chez Hobbes et chez Rousseau », in Revue européenne des sciences sociales, t. 20, n° 61, 1982,p. 192.

* 133 Janine Chanteur, Idem.

* 134 Thomas Hobbes, Op. cit.,p. 137.

* 135Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982,p. 92.

* 136 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 181.

* 137Robert Derathé dans une note de bas de page à la page 219. Cf. Robert Derathé, Jean-Jacques Rousseau et la science politique de son temps, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1995, p. 219.

* 138 Serge Braudo, « Définition de la stipulation pour autrui », in www.dictionnaire-juridique.com , consulté le 24/06/2021.

* 139 Robert Derathé, Op. cit., notes de bas de page, p. 219.

* 140 Robert Derathé, Idem.

* 141 Franck Tinland, « La Souveraineté et la modération des pouvoirs selon Th. Hobbes et J. J. Rousseau », in Revue européenne des sciences sociales, t. 20, n° 61, 1982, p. 210.

* 142Olivier Nay, Histoire des idées politiques. La pensée politique occidentale de l'Antiquité à nos jours, Paris, Armand Colin, 2016, p. 270.

* 143 Robert Derathé, Jean-Jacques Rousseau et la science politique de son temps, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1995, pp. 220-221.

* 144 Notamment pour des philosophes épris de la liberté des citoyens tels Spinoza, Locke, Montesquieu, Rousseau.

* 145 Robert Derathé, Op. cit., p. 221.

* 146Léon Ezouah, Hobbes, philosophe de la paix, in http://ezoleon.blogspot.com, consulté le 04/03/2021.

* 147 Jürgen Habermas, Théorie et pratique, trad. Gérard Raulet, Paris, Éditions Payot et Rivages, 2006, p. 82.

* 148 Léon Ezouah, Idem.

* 149 C'est l'idée qui se trouve développée dans toute l'oeuvre politique de Thomas Hobbes.

* 150 Jürgen Habermas, Op. cit., p. 82.

* 151 Louis Roux, « Préface » Cf. Thomas Hobbes, Le Corps politique, trad. Samuel de Sorbière, Saint-Étienne, Publication de l'Université de Saint-Étienne, 1972,p. 8.

* 152 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982,p. 71.

* 153 André Mineau, « Nature et finalité de la politique », in Laval théologique et philosophique, t. 1, vol. 45, 1989, pp. 92-93. 

* 154Norbert Campagna, Thomas Hobbes. L'Ordre et la liberté, Paris, Éditions Michalon, p. 9, in https://fr.booksc.org, consulté le 05/01/2021.

* 155« Sécurité », in www.larousse.fr, consulté le 27/06/2021.

* 156 Sébastian Roché, Insécurité et Libertés, Paris, Seuil, 1994.

* 157 Daniel Marc Weinstock, « Sécurité et démocratie », in Philosophiques, vol. 29, n°2, Automne 2002, p. 353.

* 158Daniel Marc Weinstock, Op. Cit.,p. 354.

* 159Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 357.

* 160 Romuald Évariste Bambara, Les villes forteresses. De la peur à l'urgence sécuritaire, Paris, L'Harmattan, 2021, p. 40.

* 161 Raymond Polin, « Sur la signification de la paix d'après la philosophie de Hobbes », in Revue française de science politique, Vol. 4, n°2, 1954, pp. 267-268.

* 162Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 124.

* 163 Hélène L'Heuillet et al., Sociétés contemporaines et sécurités, Introduction, dossier printemps 2010, coordination Hélène L'Heuillet et Thibaud Zuppinger, p. 7, in www.implications-philosophiques.org, consulté le 04/07/2021.

* 164 Raymond Polin, Op. Cit., p. 268.

* 165 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 222.

* 166 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 221.

* 167 Jean Terrel, LeVocabulaire de Hobbes, Paris, Ellipses, 2003, p. 24.

* 168Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 285.

* 169 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 189.

* 170 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 222.

* 171Thomas Hobbes, Op. cit., p. 224.

* 172Raymond Polin, « Sur la signification de la paix d'après la philosophie de Hobbes », in Revue française de science politique, Vol. 4, n°2, 1954, p. 268.

* 173 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 357.

* 174Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 233.

* 175 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 349.

* 176 Thomas Hobbes, Le Corps politique, trad. Samuel de Sorbière, Saint-Étienne, Publication de l'Université de Saint-Étienne, 1972, p. 170.

* 177 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 251.

* 178 Le chapitre 12 de LePrince est consacré à la critique des condottières. De même que le Livre I de L'Art de la guerre. Cf. Nicolas Machiavel, Le Prince et autres textes, trad. Jean-Vincent Périès, Paris, Union Générale d'Éditions, 1962.

* 179 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 231.

* 180 Thomas Hobbes, Idem.

* 181 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 233.

* 182Thomas Hobbes, Idem.

* 183 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 126.

* 184Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 334.

* 185 Dominique Weber, « Léviathan, la sécurité et le monde liquide », in Sociétés contemporaines et sécurités, dossier printemps 2010, coordination Hélène L'Heuillet et Thibaud Zuppinger, p. 38, in www.implications-philosophiques.org, consulté le 04/07/2021.

* 186 Dominique Weber, Idem.

* 187 Thomas Hobbes, Le Corps politique, trad. Samuel de Sorbière, Saint-Étienne, Publication de l'Université de Saint-Étienne, 1972,p. 164.

* 188 Thomas Hobbes, Op. cit., p. 165.

* 189 Thomas Hobbes, Ibidem.

* 190 Thomas Hobbes, Éléments de la loi naturelle et politique, trad. Dominique Weber, Paris, Librairie Générale Française, 2003, p. 331.

* 191 Thomas Hobbes, Le Corps politique, trad. Samuel de Sorbière, Saint-Étienne, Publication de l'Université de Saint-Étienne, 1972, p. 166.

* 192 Thomas Hobbes,Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 239.

* 193 Thomas Hobbes,Op. cit., p. 250.

* 194 Thomas Hobbes,Op. cit., p. 367.

* 195 Thomas Hobbes,Op. cit., p. 224.

* 196 Norbert Campagna, Thomas Hobbes. L'Ordre et la liberté, Paris, Éditions Michalon, 2016, p. 33, in https://fr.booksc.org, consulté le 05/01/2021.

* 197 Raymond Polin, « Sur la signification de la paix d'après la philosophie de Hobbes », in Revue française de science politique, Vol. 4, n°2, 1954, p. 266.

* 198 Jean Terrel, Les Théories du pacte social. Droit naturel, souveraineté et contrat de Bodin à Rousseau, Paris, Seuil, 2001, p. 184.

* 199 Jean-Jacques Rousseau, Du Contrat social, Paris, GF Flammarion, 2001, p. 74.

* 200 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 230.

* 201 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. Gérard Mairet, Paris, Gallimard, 2000, p. 452.

* 202 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 132.

* 203Justine Bindedou, « Le Sens de l'humanité dans l'absolutisme de Thomas Hobbes », in Revue Ivoirienne de Philosophie et de Culture, Le Korè, n°37, Abidjan, Éditions Universitaires de Côte d'Ivoire, 2006, p. 124.

* 204 Jean Bernhardt, Hobbes, Paris, PUF, 1989, p. 5.

* 205Thomas Hobbes, Le Corps politique, trad. Samuel de Sorbière, Saint-Étienne, Publication de l'Université de Saint-Étienne, 1972,p. 19.

* 206 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 17.

* 207 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 45.

* 208Gérard Mairet, « Introduction » Cf. Thomas Hobbes, Léviathan, trad. Gérard Mairet, Paris, Gallimard, 2000, p. 17.

* 209 Joseph Vialatoux, La Cité de Hobbes. Théorie de l'État totalitaire. Essai sur la conception naturaliste de la civilisation, Paris, Librairie Lecoffre et Gabalda, 1935, p. 8.

* 210 Gomdaogo Pierre Nakoulima, La Préservation de la planète. Défis contemporains de la modernité, Paris, L'Harmattan, 2010, p. 42.

* 211 Thomas Hobbes, Le Citoyen, trad. Samuel Sorbière, Paris, GF Flammarion, 1982, p. 162.

* 212 Thomas Hobbes, Le Corps politique, trad. Samuel de Sorbière, Saint-Étienne, Publication de l'Université de Saint-Étienne, 1972,p. 164.

* 213 Thomas Hobbes, Idem.

* 214 Thomas Hobbes, Idem.

* 215 Joseph Vialatoux, La Cité de Hobbes. Théorie de l'État totalitaire. Essai sur la conception naturaliste de la civilisation, Paris, Librairie Lecoffre et Gabalda, 1935, p. 203.

* 216Joseph Vialatoux, Idem.

* 217Joseph Vialatoux, Ibidem.

* 218Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 184.

* 219Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 185.

* 220 Thomas Hobbes, Op. Cit.,p. 390.

* 221 Philippe Nemo, Histoire des idées politiques aux Temps modernes et contemporains, Paris, PUF, 2002, p. 153.

* 222Joseph Vialatoux, La Cité de Hobbes. Théorie de l'État totalitaire. Essai sur la conception naturaliste de la civilisation, Paris, Librairie Lecoffre et Gabalda, 1935, p. 30.

* 223 Yves Charles Zarka, « Hobbes » in Denis Huisman, Dictionnaire des philosophes, Paris, PUF, 1984, p. 1231.

* 224 Jean-Pierre Zarader, Petite histoire des idées philosophiques, suivi d'un essai : Le Statut de l'oeuvre d'art chez André Malraux, Paris, Ellipses, 1994, p. 45.

* 225 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 195.

* 226 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 347.

* 227 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 343

* 228 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 347.

* 229 Thomas Hobbes, Op. Cit.,p. 71.

* 230 Gabriel Hürlimann, « Hobbes, Foucault et la peur de la révolte », trad. Ariane Kiatibian, in Rue Descartes, Vol. 1, n°77, 2013, p. 52.

* 231 Philippe Nemo, Histoire des idées politiques aux Temps modernes et contemporains, Paris, PUF, 2002, p. 153.

* 232 François Tricaud, « Hobbes et Locke : convergences et divergences », in XVII-XVIII, Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles, n°25, 1987, p. 86.

* 233 Gomdaogo Pierre Nakoulima, La Préservation de la planète. Défis contemporains de la modernité, Paris, L'Harmattan, 2010, p. 42.

* 234 Pasquale Pasquino soutient que « toute la pensée politique moderne, Rousseau y compris, est inconcevable sans Hobbes, et que on est loin d'être sorti, aujourd'hui même, de ce que on peut appeler le moment hobbesien. » Cf. Pasquale Pasquino, « Thomas Hobbes : la condition naturelle de l'humanité », in Revue française de science politique, Vol. 44, n°2, 1994, p. 295.

* 235 Léo Strauss, Droit naturel et histoire, trad. Monique Nathan et Éric de Dampierre, Paris, Flammarion, 1986, pp. 165-166.

* 236 Hobbes serait « le véritable fondateur du libéralisme politique ». Cf. Jürgen Habermas, Théorie et pratique, trad. Gérard Raulet, Paris, Éditions Payot et Rivages, 2006, p. 97.

* 237Justine Bindedou, « Le Sens de l'humanité dans l'absolutisme de Thomas Hobbes », in Revue Ivoirienne de Philosophie et de Culture, Le Korè, n°37, Abidjan, Éditions Universitaires de Côte d'Ivoire, 2006, pp. 121-141.

* 238 Robert Derathé, Jean-Jacques Rousseau et la science politique de son temps, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1995, p. 308.

* 239 Franck Lessay, « La Figure cachée du tyran dans le Léviathan de Thomas Hobbes », in XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles, n°16, 1983, p. 15.

* 240 Jean-Pierre Zarader, Petite histoire des idées philosophiques, suivi d'un essai : Le Statut de l'oeuvre d'art chez André Malraux, Paris, Ellipses, 1994, p. 48.

* 241Jean-Pierre Zarader,Idem.

* 242 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,p. 370.

* 243 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 371.

* 244 Yves Charles Zarka, « Hobbes » in Denis Huisman, Dictionnaire des philosophes, Paris, PUF, 1984, p. 1231.

* 245Jean-Pierre Zarader, Petite histoire des idées philosophiques, suivi d'un essai : Le Statut de l'oeuvre d'art chez André Malraux, Paris, Ellipses, 1994, p. 48.

* 246 Thomas Hobbes,Le Corps politique, trad. Samuel de Sorbière, Saint-Étienne, Publication de l'Université de Saint-Étienne, 1972, p. 163.

* 247 Jean-Pierre Zarader, Op. Cit., p.48.

* 248Claude Polin, Le totalitarisme, Paris, PUF, 1982, pp. 30-31.

* 249 Jean-Pierre Zarader, Op. Cit., p. 48.

* 250 Benito Mussolini, homme politique italien, au XXe siècle, a forgé le terme pour désigner le type d'État qu'il souhaitait construire. Cf. Claude Polin, Op. cit., p. 5.

* 251 Claude Polin, Op. Cit., p. 116.

* 252Jean-Pierre Zarader, Petite histoire des idées philosophiques, suivi d'un essai : Le Statut de l'oeuvre d'art chez André Malraux, Paris, Ellipses, 1994, p. 50.

* 253 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971,pp. 353-354.

* 254 Claude Polin, Le totalitarisme, Paris, PUF, 1982, p.76.

* 255 Yves Charles Zarka,« Hobbes » in Denis Huisman, Dictionnaire des philosophes, Paris, PUF, 1984, p. 1231.

* 256Adamou Dilwani, « Le Hobbisme comme théorie de la démocratie », in Perspectives philosophiques, Vol. 8, n°16, 2018.

* 257 Sur le sujet, Frank Tinland estime que se référer à Hobbes dans la formation des Droits de l'Homme comme le fait Michel Villey relève de la provocation car il serait difficile de concilier le caractère absolu du pouvoir politique hobbesien et les droits humains. Cf. Frank Tinland, « Droit à la vie, fondement contractuel de la paix civile et nécessités de l'ordre public selon Th. Hobbes et J.-J. Rousseau », in Revue d'histoire et de philosophie religieuse, Vol. 65, n°2, Avril-juin 1985, p. 154.

* 258Michel Villey, Le Droit et les droits de l'homme, Paris, PUF, 1983, p. 136.

* 259 « Habeas corpus », in www.wikipédia.com, consulté le 21/06/2021.

* 260 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 320.

* 261 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 336.

* 262 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 298.

* 263 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 336.

* 264 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 140.

* 265 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 525.

* 266 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 140.

* 267 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 298.

* 268 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 302.

* 269 Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 328.

* 270Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 316.

* 271Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 289

* 272Thomas Hobbes, Op. Cit.,p. 290.

* 273 Pierre Bercis, Guide des droits de l'homme. La conquête des libertés, Paris, Hachette Éducation, 1993, p. 43.

* 274 Thomas Hobbes, Léviathan, trad. François Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 322.

* 275Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 327.

* 276Thomas Hobbes, Op. Cit., p. 371.

* 277Thomas Hobbes, Idem.

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