Introduction Générale
Le laser est l'acronyme de Light Amplification by Stimulated
Emission of Radiation, c'est à-dire amplificateur de lumière par
émission stimulée de rayonnement électromagnétique.
S'est peu à peu imposé dans notre vie sans que nous en soyons
forcément conscients. Incontournable dans la fabrication d'objets aussi
divers que les smart phones, les écrans LCD, les cellules
photovoltaïques ..., il est tout aussi indispensable au fonctionnement
d'Internet et joue un rôle crucial en médecine. Toute l'industrie
du numérique - musique, vidéo, informatique - repose sur les
lasers. De plus en plus utilisé pour l'analyse des matériaux, on
le trouve dans les laboratoires de police scientifique, dans les usines de
l'agroalimentaire, ou même sur Mars!. En 2021, plus de 1,8 milliards de
lasers ont été fabriqués dans le monde. Il s'agit pour
l'essentiel de lasers à semi-conducteur : moins de 800 000 autres
lasers, notamment des lasers à gaz, des lasers à fibre et des
lasers à état solide, sont fabriqués chaque
année.
Malgré cette production massive, le laser fait encore
l'objet de recherches intenses, pour atteindre des puissances plus
élevées, des impulsions plus courtes, des caractéristiques
spectrales meilleures, des rendements plus importants, ou tout simplement de
nouvelles longueurs d'onde. Par exemple, en 2012, l'un des plus importants
chalenges de la recherche industrielle dans le domaine des lasers a
été la réalisation d'un laser à semi-conducteur
émettant dans le vert. L'objectif est de compléter les lasers
bleus et rouges déjà largement maîtrisés, afin de
produire des images vidéo couleur, et de réaliser ainsi des
petits vidéoprojecteurs puissants. La conception de nouveaux lasers est
donc toujours d'actualité, et les questions que se posent aujourd'hui
les chercheurs, ainsi que les problèmes auxquels ils sont
confrontés pour concevoir ces lasers, sont les mêmes que ceux
rencontrés par les pionniers de la discipline, il y a plus de 50 ans.
La première brique : l'émission
stimulée
C'est le 16 mai 1960 qu'un chercheur américain,
Theodore Maiman (fig. 1), réussit à produire le premier rayon
laser. Mais l'histoire du laser commence 43 ans plus tôt avec Albert
Einstein. Dans un article de 1917 intitulé « Zur Quant en theorie
der Strahlung », il donne une interprétation de la loi du
rayonnement du corps noir de Planck. Pour résoudre ce problème,
il décrit les échanges d'énergie entre matière et
rayonnement par les processus connus à l'époque, c'est
à-dire l'émission spontanée et l'absorption. Mais ces
processus ne suffisent pas, et il a l'idée lumineuse d'ajouter un
nouveau processus : l'émission stimulée.
La deuxième brique : l'inversion de
population
Mais pour obtenir cette lumière cohérente, il
faut exciter massivement les atomes. En fait, nous verrons qu'il faut que dans
un échantillon, la population d'atomes excités devienne
supérieure à la population d'atomes non excités. On
appelle cela réalisé une inversion de population. C'est la
découverte du pompage optique, en 1950, par le physicien français
Alfred Kastler, qui donne une première méthode pour
réaliser cette inversion de population. Le pompage optique permet
d'exciter un grand nombre d'atomes, et ouvre ainsi la porte à la
réalisation d'un rayonnement cohérent.
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FIGURE 1 - Theodore Maiman avec le premier laser.
Le Maser
Maser est l'acronyme de Microwave Amplification by Stimulated
Emission of Radiation, c'est-à-dire amplification d'un rayonnement
micro-onde par émission stimulée. Dès lors, deux groupes
de physiciens se lancent dans la réalisation d'une source de
lumière cohérente, le maser. Ces deux groupes ne communiquent pas
entre eux et travaillent indépendamment, pour la simple raison qu'ils
sont de part et d'autre du rideau de fer. Charles Townes, de
l'université de Columbia, à New-York, affirme avoir eu
l'idée du maser dès 1951, mais ce n'est qu'en 1954 qu'il
construisit le premier maser avec deux de ses collaborateurs, J. P. Gordon et
H. J. Zeiger. Ces résultats furent publiés en juillet 1954. Au
contraire, à l'Institut de Physique Lebedev, à Moscou, Nikolay G.
Basov et Aleksandr M. Prokhorov présentent publiquement le principe du
maser dès 1952, lors d'une conférence organisée par
l'Académie des Sciences, à Moscou. Leurs résultats
théoriques furent publiés en septembre 1954, et ils
réalisèrent leur premier maser en 1955.
De nombreux prix Nobel
En conclusion, on ne peut omettre d'évoquer le
rôle central joué par le laser dans les avancées de la
science au cours des 50 dernières années. On peut ainsi
dénombrer au moins douze prix Nobel attribués à la fois
pour les travaux fondateurs du laser et pour des résultats obtenus
grâce au laser. Parmi les inventeurs du laser, Charles H. Townes, Nicolay
G. Basov et Aleksandr M. Prokhorov reçurent le prix Nobel en 1964,
pour des travaux fondamentaux dans le domaine de l'électronique
quantique, conduisant à la construction d'oscillateurs et
d'amplificateurs basés sur le principe du maser-laser. Deux ans
plus tard, Alfred Kastler reçut aussi le prix Nobel, pour la
découverte et le développement de méthodes optiques pour
l'étude des résonances hertziennes dans les atomes. En 1981,
Arthur L. Schawlow partage la même récompense avec Nicolaas
Bloembergen, pour le développement de la spectroscopie laser.
Theodore Maiman fut sélectionné deux fois pour le prix
Nobel, mais jamais retenu. Il reçut cependant d'autres prix prestigieux,
notamment le prix Wolf et le Japan Prize. Gordon Gould, dont le rôle
réel dans l'invention du laser est toujours contesté par une
partie de la communauté scientifique, a été élu au
National Inventors Hall of Fame, une organisation américaine qui honore
les plus grands inventeurs. C'est la plus haute récompense qu'il
reçut, si l'on exclut les millions de dollars qu'il a gagné
grâce à ses brevets, dont la validité a été
reconnue à la suite d'une longue bataille judiciaire qui dura 30 ans.
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