Conclusion partielle
Pour mieux apprécier l'impact de l'utilisation des
pesticides et engrais chimiques sur les cultures légumières de
VIMAS, une étude plus approfondie s'avère nécessaire
à travers une bio-surveillance. (un outil qui permet de surveiller la
présence, dans l'organisme, des substances chimiques de notre corps, de
notre environnement ou de leurs produits de dégradation). Elle peut
aussi consister à surveiller certains effets précoces des
substances chimiques sur l'organisme. Les dosages peuvent être faits dans
le sang, l'urine, les cheveux, le lait maternel... les substances ainsi
dosées sont appelées biomarqueurs des pesticides ou autres
indicateurs, établir une liste exhaustive des pesticides les plus
utilisés et évaluer leur toxicité vis-à-vis des
espèces biologiques (végétales, animales et humaines) les
plus menacées dans les productions maraîchères par des
travaux de terrain et des expériences de laboratoire.
Au terme de ce chapitre, Les pesticides les utilisés
sont le Lambdacal P 630, le Cypercal p330 EC, le Pacha et l'Emacot. Le
traitement des cultures à une fréquence bihebdomadaire est la
plus utilisée par les maraîchers de Sèmè-Podji. Les
maraîchers enquêtés n'utilisent pas une mesure
complète de protection avant de traiter les légumes. Certains
maraîchers consomment l'eau des forages utilisée pour l'arrosage
des cultures maraîchères et s'exposent indirectement aux
pesticides. Cette étude est basée sur les déclarations des
maraîchers qui peuvent ne pas corréler avec les analyses au
laboratoire. Une étude sur l'impact des pesticides sur la santé
des maraîchers devrait être envisagée. La sensibilisation
des maraîchers sur les bonnes pratiques d'utilisation de pesticides et
sur les méthodes alternatives aux produits phytosanitaires de
synthèse afin de protéger la santé des exploitants
maraîchers et celle des consommateurs de légumes contre les effets
néfastes provoqués par les résidus de pesticides est d'une
importance capitale pour la durabilité de cette activité. Il
serait aussi intéressant de poursuivre cette étude par la
quantification des résidus de pesticides dans les légumes, les
eaux souterraines et les sols.
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CONCLUSION
La présente étude constitue une mise au point
sur les risques liés à l'utilisation des pesticides et engrais
chimiques dans la culture des légumes à Sèmè-Podji.
Malgré le caractère prohibitif des intrants agricoles de
synthèse, malgré que les différents acteurs soient
informés sur les conséquences de l'utilisation des pesticides et
engrais chimiques, ils continuent de manipuler frauduleusement les pesticides
sur les légumes et avec peu de soins car ils estiment avoir très
peu d'alternatives. La prise de décision du maraicher de
Sèmè-Podji en matière de choix et d'usage de pesticides
s'inscrit dans un contexte social et économique. Les facteurs
impliqués dans les prises de décisions sont multiples et
hétérogènes et ne sont pas tous mobilisés de la
même manière. Ils sont mobilisés en fonction de la
structure cognitive du maraicher, de sa situation économique, de son
réseau d'informations et surtout de la confiance accordée aux
vendeurs de pesticides.
Il ressort de notre étude que les pesticides
utilisés en maraichage sont en grande partie inadaptés
(pesticides du coton), non recommandés, non homologués voire
même interdits. Les modalités d'usages des pesticides sont la
plupart du temps en dehors des normes et des recommandations, que ce soit en
termes d' indications, de mélanges de produits, de dosages, de respect
des précautions d'usages pour l'épandage, de respect du temps de
rémanence, etc. Par ailleurs, les ruptures de stocks, les changements de
nom commercial pour un même produit, la différence de dosages
d'une spéculation à une autre ne facilitent pas un usage
rationnel des pesticides par les maraichers. Les différents groupes
humains du site de VIMAS ont principalement révélé que les
usages de pesticides par les maraîchers sont étroitement
imbriqués avec le reste des activités qu'ils mènent et
qu'aucune innovation ne peut être envisagée dans ce domaine sans
prendre en compte la globalité du travail quotidien des maraichers et
leurs préoccupations. L'une des conclusions importantes qui se
dégage de cette étude est que pour induire un quelconque
changement en termes de pratiques, c'est sur le facteur temps qu'il faut
concentrer les efforts. Autrement dit, c'est en diminuant les charges de
travail sur des activités autres que la lutte contre les ravageurs
(arrosage, désherbage etc.) que l'on pourrait introduire des techniques
innovantes (biopesticides, filets anti-insectes) dans ce domaine. En effet, ces
techniques innovantes bien que moins toxiques, respectueuses de l'environnement
et ne favorisant pas de résistances, sont pour les maraichers
astreignantes et nécessitent beaucoup de temps.
Par ailleurs, les vendeurs de pesticides très peu
étudiés dans ce travail sont très
hétérogènes et mériteraient une étude
anthropologique spécifique pour comprendre à la fois la
circulation des
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produits au niveau des différents circuits commerciaux
mais aussi comment les savoirs de ces vendeurs se sont construits. En effet,
les circuits d'approvisionnement en pesticides sont multiples. Les boutiques
n'ont pas toutes ni la même politique de vente en termes de choix des
produits, ni les mêmes fournisseurs. Un changement de pratiques en
matière d'usage de pesticides passe nécessairement par une prise
en compte des vendeurs et un véritable plan d'encadrement et de
formations de ce secteur économique.
La conclusion en est que des efforts importants s'imposent si
l'on veut diminuer le nombre de cas d'intoxication par des pesticides et
engrais chimique. Pour y parvenir, il faut une collaboration entre les pouvoirs
publics, l'agriculture la santé, l'environnement, les
collectivités, les organisations non gouvernementales et les
établissements de recherche qui devront réunir les données
de référence indispensables, adopter une législation
appropriée, assurer aux travailleurs agricoles une formation et un
encadrement convenables pour tourner définitivement la page des
pesticides et engrais chimiques au profit des pesticides et engrais biologiques
pour un développement durable et le respect du droit des
générations futures à un environnement sain.
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