B. Paris
La capitale est la première ville française
à avoir mis en place une règle semblable à celle de Berlin
(en 2006). Celle-ci est d'ailleurs en cours de révision et sera
probablement améliorée d'ici fin 2016, dans le cadre du nouveau
PLU de Paris. On parle ici de coefficient de végétalisation et
non de coefficient de biotope.
Cette dernière se base sur le zonage PLU. Pour rappel,
le PLU est composé d'une partie réglementaire. Dans cette partie,
des règles sont énoncées sous forme d'articles qui
abordent plusieurs thématiques (stationnement, emprise au sol des
bâtiments, desserte, etc.), dont une concernant les espaces libres
(Article 13). Parallèlement à ces règles, le PLU
définit des zones au sein du territoire sur lequel il s'applique. Les
appellations de ces zones varient d'un PLU à l'autre, même si on
retrouve globalement la même typologie (zone naturelle « N »,
zone urbaine « U » avec une distinction selon les types d'habitat,
etc.).
39
Ainsi, en fonction de la zone sur laquelle on se trouve, les
règles ne sont pas les mêmes et il en est de même pour celle
du coefficient de végétalisation mise en place à Paris.
Cette dernière ne concerne d'ailleurs que la zone Urbaine
Générale (en bleue sur la Figure 18), lorsque la profondeur du
terrain est supérieure à celle de la bande Z33 (Figure
19).
![](Reflexion-sur-la-prise-en-compte-du-changement-climatique--Rennes-Eau-vegetation-et-lot-de22.png)
Figure 18 : Plan de zonage de Paris : zone urbaine
générale (UG) en bleue (PLU Paris, 2006)
![](Reflexion-sur-la-prise-en-compte-du-changement-climatique--Rennes-Eau-vegetation-et-lot-de23.png)
Figure 19 : Illustration de la bande Z, de la parcelle S
et des espaces libres (Mairie de Paris 2014, modifié)
33 La bande Z de 15 m se mesure à partir de la
voirie et parallèlement à celle-ci
40
La règle stipule que les espaces libres, qui
correspondent donc à la surface hors emprise bâtie, doivent
représenter au moins 50% de la surface de la parcelle
(désigné par S sur la Figure 19), hors bande Z. En plus de cela,
les espaces libres comprennent obligatoirement au moins 20% de la surface de la
parcelle en pleine terre, ainsi qu'une surface complémentaire qui est
égale à 10 ou 15% de la surface de la parcelle. Ce pourcentage
dépend de la localisation : soit en secteur de mise en valeur du
végétal (10%), soit en secteur de renforcement du
végétal (15%). Cette surface complémentaire doit
être réalisée prioritairement en pleine terre. Sinon, elle
peut être remplacée par une surface
végétalisée pondérée. C'est à ce
niveau qu'intervient le calcul et les coefficients de pondération
associés aux types d'espaces verts (Figure 20).
![](Reflexion-sur-la-prise-en-compte-du-changement-climatique--Rennes-Eau-vegetation-et-lot-de24.png)
Figure 20 : Calcul de la surface
végétalisée pondérée et coefficients des
types de surfaces (PLU Paris 2006,
modifié)
Là encore, le choix est laissé à
l'aménageur pour la disposition et le choix des surfaces, tant qu'il
atteint le pourcentage qui lui est imposé.
Le schéma suivant (Figure 21) permet de résumer
la règle qui peut paraître lourde à première vue,
mais qui reste en fait relativement simple.
![](Reflexion-sur-la-prise-en-compte-du-changement-climatique--Rennes-Eau-vegetation-et-lot-de25.png)
Figure 21 : Schéma synthétique du
fonctionnement du coefficient de végétalisation de Paris
(Filliol, 2016)
Pour mieux visualiser l'application de ce coefficient de
végétalisation, on peut l'illustrer par un exemple :
Si on se base sur une parcelle S de 300 m2, on a une
obligation de traiter 20% de S en pleine terre, soit 60 m2.
S'ajoute à cela une surface complémentaire de 10 ou
15%, qui doit être réalisée prioritairement en pleine
terre.
En cas d'impossibilité de réalisation en pleine
terre, on applique la règle avec les coefficients : Svp = Spt +
0.5*Sve + 0.3*Stv + 0.2*Smv
41
Si on se situe en zone de mise en valeur du
végétal, alors on doit végétaliser 10% de la
parcelle S, soit 30 m2. Dans cette situation, plusieurs associations
sont possibles, comme par exemple :
? 5 m2 de surface en pleine terre (soit 5
m2 de surface écoaménageable : 5*1)
? 10 m2 de surface avec au moins 80 cm de terre ? 50
m2 de surface avec au moins 30 cm de terre
? 25 m2 de mur
végétalisé/toiture/terrasse
végétalisée
C. 42
Malakoff
La commune de Malakoff est située dans le
département des Hauts-de-Seine (92) en Ile-de-France et rassemble
environ 30 000 habitants. Elle a mis en place une règle de coefficient
de biotope en 2015, lors de la révision de son PLU. Celle-ci s'applique
également sur le zonage du PLU et comprend deux conditions. La
première impose un certain pourcentage de surface du terrain devant
être aménagé en pleine terre : de 25% en zone
d'équipements d'intérêt général à 80%
en zone pavillonnaire. La deuxième contraint l'aménageur à
végétaliser au minimum 35% de la surface totale du terrain. Il
est cependant précisé que ces deux conditions peuvent varier
selon la nature du projet.
Si le porteur du projet n'atteint pas ce pourcentage de 35%,
alors il y a une compensation qui s'exerce, au travers d'une surface
végétale pondérée (Svp). L'équation est
similaire à celle mise en place à Paris, où chaque type de
surface est multipliée par son coefficient de pondération. En
revanche, ce sont ces coefficients associés aux surfaces qui vont varier
entre les deux règles (Figure 22). En complément de cette
règle, la ville a mis en place des normes de plantations, en indiquant
notamment le nombre et le type d'arbre à planter selon la taille du
terrain.
![](Reflexion-sur-la-prise-en-compte-du-changement-climatique--Rennes-Eau-vegetation-et-lot-de26.png)
Figure 22 : Coefficients de pondération de la
règle mise en place à Malakoff (PLU Malakoff, 2015)
D. Saint-Quentin-en-Yvelines
Située en Ile-de-France (78), la commune de
Saint-Quentin-en-Yvelines possède des caractéristiques assez
proches de Rennes. Tout d'abord, de par leur nombre d'habitants qui est
relativement proche : environ 211 000 à Rennes contre 15 000 de plus
à Saint-Quentin-en-Yvelines. D'autre part, au travers de leur
démarche qui est similaire. En effet, le PLUi de
Saint-Quentin-en-Yvelines s'est achevé en 2015 et est donc tout
récent.
De plus, il s'avère que cet exemple est assez
intéressant, car la méthodologie employée est cette-fois
ci assez différente des autres exemples qui ont pu être
étudiés. En effet, la règle ne s'effectue pas sur le
zonage PLU, mais sur la densité et le type d'habitat. Il y a donc eu un
travail supplémentaire avec un nouveau zonage pour établir
spécifiquement la règle du coefficient de biotope (Figure 23).
Selon l'indice propre à chaque secteur, un pourcentage
d'espaces verts et une règle de répartition est attribuée
à chaque zone (Figure 24).
![](Reflexion-sur-la-prise-en-compte-du-changement-climatique--Rennes-Eau-vegetation-et-lot-de27.png)
Figure 23 : Les différentes zones de densité
et de type d'habitat qui conditionnent le coefficient de biotope
(PLUi SQY, 2015)
![](Reflexion-sur-la-prise-en-compte-du-changement-climatique--Rennes-Eau-vegetation-et-lot-de28.png)
43
Figure 24 : Pourcentages à atteindre selon l'indice
de la zone (PLUi SQY, 2015)
44
Le porteur du projet réalise alors le pourcentage
nécessaire : soit en totalité en pleine terre, soit
conformément à la règle de répartition. Dans la
deuxième situation, on retrouve nos coefficients de pondération,
qui varient des autres exemples cités précédemment (Figure
25).
![](Reflexion-sur-la-prise-en-compte-du-changement-climatique--Rennes-Eau-vegetation-et-lot-de29.png)
Figure 25 : Coefficients de pondération (PLUi SQY,
2015)
Dans la même logique que pour l'exemple de Malakoff, des
normes de plantations ont été rajoutées en plus de cette
règle du coefficient de biotope.
Cette partie permet d'exposer un panorama très
général des règles qui peuvent exister sur cette notion de
coefficient de biotope. Il existe d'autres communes ayant mis en place ce type
de dispositif, même si elles restent encore peu nombreuses. La
méthodologie employée reste la plupart du temps la même,
bien qu'on observe quelques modifications, notamment sur la valeur des
coefficients de pondération reliés à chaque surface. Ce
dispositif intéressant peut néanmoins paraître contraignant
pour le porteur du projet, même si le choix de l'aménagement lui
est laissé. Plusieurs questions émergent quant à la mise
en place de ces coefficients, ainsi que sur la définition de la notion
de « pleine terre », qui varie selon les règles. Ces aspects
seront discutés dans la troisième partie qui traite des
difficultés de mises en oeuvre, notamment sur ce coefficient de
biotope.
4.2 Les nouvelles méthodes de
végétalisation (livret en Annexe 17)
La proportion d'espaces publics disponibles étant de
plus en plus faible au fil de l'urbanisation et de la densification urbaine, de
nouveaux dispositifs de végétalisation ont vu le jour depuis
quelques années. Ceux-ci constituent une alternative à la
création de parcs urbains, qui sont depuis quelques années plus
difficiles à aménager au sein des villes, par manque de place
mais aussi de moyens. Au travers de ces nouveaux aménagements, tels que
les toits et murs végétalisés, ce sont à la fois
les infrastructures publiques qui sont visées, mais également les
parcelles privées.
45
Il existe deux types de dispositifs pour
végétaliser la surface des bâtiments : les murs et les
toitures végétalisées. On dénombre en revanche
plusieurs techniques différentes dans la façon de concevoir ces
ouvrages. Les murs végétalisés existent depuis plusieurs
siècles. En 1646, certains jardiniers italiens s'affairaient
déjà à la réalisation d'un mur
végétal sur un parement de briques (Ferrari, 1646). En revanche,
ce n'est que dans les années 2000 qu'on commence à utiliser cette
technique pour ses effets bénéfiques sur l'environnement, avec
notamment l'architecte français Jean-François Daures. Il existe
plusieurs types de murs végétalisés : du système le
plus simple, comme l'implantation de plantes grimpantes, aux systèmes
plus complexes, qui permettent de potentialiser les effets de l'ouvrage (Malys,
2009). Parmi ces derniers, on retrouve généralement le mur sur
nappe horticole, muni d'une plaque servant de support à la
végétation, associé à un mécanisme
d'irrigation. Ce mécanisme demande néanmoins beaucoup d'entretien
et reste relativement cher. Le mur végétal monobloc est donc
généralement privilégié, car il demande une mise en
place plus simple et peut accueillir une multitude d'espèces
végétales (Fuchs & Med, 2009).
Les toitures végétalisées sont encore
plus anciennes, puisqu'on retrouve des traces de ces structures depuis le
néolithique. Si les pays du Nord ont été les premiers
à les mettre en avant dans les années 1970, on retrouve
aujourd'hui ces ouvrages dans la majorité des pays (Acqualys, 2015). On
distingue généralement deux types de toitures
végétalisées : celles dites « extensives », qui
sont essentiellement réalisées à partir de
graminées ou de sédums et celles dites « intensives »,
qui peuvent accueillir des arbustes, voire des arbres. Ces dernières
sont logiquement bien plus chères à mettre en place et à
entretenir (ECOVEGETAL).
Les murs et les toits végétalisés, bien
qu'ils soient assez chers à mettre en place, apportent en contrepartie
à la fois une amélioration du confort de vie pour les individus
(isolation thermique et phonique, esthétisme), tout en rendant des
services à la ville (gestion des eaux pluviales, filtration des
pollutions de l'eau et de l'air, lutte contre l'ICU, etc.).
Ces deux techniques ont vocation à être
utilisées à l'avenir, en priorité sur les
aménagements futurs, où la marge de manoeuvre est plus
conséquente que sur les installations existantes. Il faudra
néanmoins veiller à choisir la bonne méthode et les bonnes
espèces végétales, en fonction des caractéristiques
du bâti et des objectifs visés.
Les espaces publics sont également mis à profit
pour de nouveaux types d'aménagements, en lien avec le
végétal. L'objectif est à la fois d'assurer les fonctions
essentielles des espaces publics, comme les zones de rencontre ou de repos,
ainsi que des fonctions « décoratives » et
écosystémiques comme la gestion des eaux pluviales ou la lutte
contre l'îlot de chaleur urbain. Ce genre d'initiative, comme à
Rennes ou à Vannes (livret en Annexe 17), a le mérite
d'interroger le grand public sur le dispositif installé et de le
sensibiliser aux problématiques climatiques des zones urbaines.
Il existe également d'autres dispositifs non
végétalisés qui permettent de limiter l'apport de chaleur
par les toits et donc de diminuer l'îlot de chaleur urbain. On les
appelle généralement « Cool roof » (« toitures
fraîches »).
46
Ces dispositifs sont généralement plus faciles
à mettre en oeuvre et beaucoup moins chers que les toitures
végétalisées (Trottier, 2008). Le principe est assez
simple, puisqu'il consiste à recouvrir le toit du bâtiment par un
enduit ou une membrane réfléchissante (du gravier blanc peut
également être utilisé). Plusieurs sociétés
se sont d'ailleurs spécialisées dans cette technique, comme
l'entreprise alsacienne SOPREMA. Bien qu'intéressante d'un point de vue
bioclimatique (isolation des bâtiments), cette technique n'inclut pas de
gestion des eaux pluviales, comme c'est le cas pour les toitures
végétalisées. Pourtant, cet enjeu est de plus en plus
important au sein des zones urbaines, si on considère que les
évènements extrêmes types pluies intenses et inondations
seront plus nombreux.
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