1.2. Catastrophes naturelles et
développement
Les recherches sur les économies des Caraïbes ou
d'Amérique Latine sujettes aux catastrophes naturelles entre 1970 et
1999 font apparaître que les catastrophes sont suivies d'un déclin
substantiel de la production et de l'investissement, d'un recul
modéré de la croissance, de la consommation et d'une
détérioration du compte courant de la balance des
paiements.7
Une catastrophe peut être envisagée comme
l'antipode d'un projet d'investissement8. Les projets, dont les
résultats prennent souvent une forme concrète, supposent de
prendre des décisions sur l'utilisation des ressources en ayant pour
objectif d'accroître, de maintenir ou d'améliorer la production de
biens ou la fourniture de services. Les trois paramètres de base d'un
projet d'investissement sont le montant de l'investissement initial, la
durée de vie du projet et le flux de coûts et
bénéfices générés par le projet sur toute la
durée de son exécution. La viabilité d'un projet sera
évaluée, en termes économiques, en comparant les
coûts et les bénéfices. Les catastrophes, en revanche,
causent des dommages aux biens (elles peuvent être assimilées
à des "désinvestissements") et affectent la production des biens
et des services tant en termes de disponibilité que d'efficience de la
production. Les phénomènes naturels, tels que les tremblements de
terre, les tempêtes et les inondations, ne produisent pas que des effets
immédiatement visibles. Ils provoquent aussi des effets post-catastrophe
pouvant évoluer lentement ou apparaître au bout d'un certain temps
: destruction de cultures par des parasites générés par
l'évènement, ou pénurie de produits essentiels plusieurs
mois après la survenue de la catastrophe.
En termes simplifiés, on peut dire qu'une catastrophe
affecte les biens (dommages directs), les flux de production des biens et
services (pertes indirectes) et la performance des principaux agrégats
macroéconomiques du pays (effets macroéconomiques). Par
convention les termes "dommage" ou "perte" sont utilisés, mais les
catastrophes peuvent aussi induire des effets positifs. Selon le CEPALC, les
dommages directs se produisent pendant la catastrophe ou dans les toutes
premières heures qui suivent. Les pertes indirectes et des effets
macroéconomiques sont susceptibles de se faire sentir sur des
périodes allant jusqu'à cinq années, variant en fonction
de l'amplitude de la catastrophe. Les
7Centre de développement de l'OCDE (2010)
8 CEPALC (2004)
PPge6
BARI SANKARA Aida Année Académique 2012-
2013
dommages directs peuvent frapper sur une longue période
et se manifester plusieurs fois de suite dans le cas d'évènements
de longue durée évoluant lentement, et ce, malgré la
réparation initiale des infrastructures endommagées, si elles
sont à nouveau touchées : par exemple, des ponts détruits
par des inondations récurrentes. Les pertes seront cependant dans ce
cas, généralement indirectes, résultant de l'impact par
l'interruption des flux économiques.
Les pertes de récoltes futures dues aux inondations ou
aux sécheresses prolongées constituent aussi des exemples
d'effets indirects. De même que les pertes de production industrielle
dues aux dommages subis par les usines ou à une pénurie de
matières premières et les coûts de transport accrus, dans
la mesure où le fait de devoir utiliser des itinéraires
différents ou d'autres moyens de communication suppose de recourir
à des options plus coûteuses, plus lentes et de moins bonne
qualité. Il s'agit de pertes indirectes pour le secteur concerné
qui seront ultérieurement aussi comptabilisées comme des effets
macroéconomiques. Comme le montre la Commission Economique pour
l'Amérique Latine et les Caraïbes (CEPALC), dans son « manuel
d'évaluation des effets socioéconomiques des catastrophes
naturelles paru en 2004, les catastrophes naturelles produisent aussi certains
effets indirects majeurs qu'il peut être difficile d'identifier et
impossible à quantifier. Ces effets induisent des dommages (ou
bénéfices) "intangibles" : souffrance humaine,
insécurité, sentiment de fierté ou désaveu de la
manière dont les autorités ont réagi face aux impacts de
la catastrophe, solidarité, participation généreuse,
impact sur la sécurité nationale et bien d'autres facteurs
similaires ayant un impact sur le bien-être et la qualité de vie
des populations. Selon ce même manuel, les effets positifs des
catastrophes naturelles sont à prendre en compte. Les catastrophes
naturelles peuvent être source de gain en taux de croissance
occasionné par les activités de reconstruction temporaire et par
la hausse des recettes d'importations à court terme.
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