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Soutenabilité des finances publiques des pays exportateurs de pétrole de la zone CEMAC. Cas du Tchad.

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par Kem-madje Erick TELIMSEIN
UNIVERSITE CATHOLIQUE DE L?AFRIQUE DE L?OUEST UNITE UNIVERSITAIRE A BOBO-DIOULASSO (UCAO/UUB) - MEMOIRE DE FIN DE CYCLE POUR L?OBTENTION DU DIPLÔME DE MASTER EN SCIENCES ECONOMIQUES ET GESTION OPTION : MACROECONOMIE ET GESTION DU DEVELOPPEM 2015
  

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Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

INTRODUCTION GENERALE

La situation des finances publiques des pays producteurs de pétrole est fortement liée au rythme des chocs et contre chocs pétroliers. En 1979, le monde venait d'encaisser le deuxième choc pétrolier après celui de 1973. Et cette grande redistribution des revenus et de la richesse avait profondément bouleversé et déstabilisé l'économie mondiale. Tous les pays à l'époque en avaient fait les frais. Les pays industrialisés, victimes de leur dépendance énergétique, avaient durablement ressenti le prélèvement pétrolier. Les pays exportateurs de pétrole qui ont bénéficié pendant un temps d'un afflux de pétrodollars sous forme de recettes nettes et sous forme de prêts massifs ont finalement été pris au piège de la dette publique avec la baisse des cours et la montée des taux d'intérêts et d'inflation.

Les pays africains producteurs de pétrole se sont eux aussi laissés surprendre par cette richesse vertigineuse et instable. Ce fut alors le début d'un long "purgatoire" marqué par des années de déficits cumulatifs ayant conduit à un endettement excessif et remis en cause la soutenabilité à long terme des finances publiques.

Les différentes stratégies de retour à l'équilibre des finances publiques mises en oeuvre par les Institutions financières internationales (IFI) depuis 1982 ont mené vers une impasse. Les plans Baker (1985), Brady (1989), les accords de Toronto (1988), les plans de Dakar (1988), de Trinidad (1990) et le Fonds de Libreville (1992) n'ont eu que des résultats insignifiants. Par conséquent, l'accumulation des déficits publics, la dette et ses charges d'intérêts ont continué de décroître au point de désorganiser tout le système économique des pays endettés.

Le Tchad certes vient juste de connaitre qu'une décennie d'exploitation pétrolière mais étant un pays d'Afrique centrale de plus de 11 millions d'habitants n'a pas échappé à cette réalité.

Depuis les années 90, la dette publique et les charges qu'elle induit se trouvent même être le principal point noir de l'économie tchadienne. En effet, la situation des finances publiques, s'est particulièrement dégradée au milieu des années 90 du fait de la dévaluation du franc CFA par rapport au franc français en 1994. A cette époque le Tchad dépendait fortement de l'aide internationale pour le financement des investissements car l'épargne privée était inexistante et les moyens publics très faibles. Cependant, en raison de la nature des financements accordés au Tchad constitués en majorité de dons et de prêts concessionnels, le poids de la dette restait relativement modéré. Dans le même temps, De 1993 à 1998, les comptes de l'État se sont largement améliorés malgré la nature fortement informelle de

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l'économie tchadienne. Le déficit budgétaire est passé de 8.6% du PIB à seulement 2.5%. Cette amélioration est due à la fois à un élargissement de l'assiette fiscale et à la maîtrise des salaires, par la suite avec les premiers investissements pour la construction du pipeline et les négociations entre l'état et avec le FMI dans le cadre d'une facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC) ont conduit à avoir des recettes de l'état à 217.4 milliards de francs CFA, dont. 69.8 Milliards de recettes pétrolières.

En 2000, en raison d'une gestion du bonus pétrolier jugée désastreuse, les bailleurs de fonds suspendaient les décaissements de l'aide (FMI, Union européenne...) entraînant un tarissement des financements extérieurs. En conséquence, dès Novembre 2000, l'État tchadien se remettait à accumuler des arriérés intérieurs et extérieurs pour la première fois depuis 1995. La reprise des décaissements en 2001 a permis la résorption d'une partie des arriérés.

Depuis, dix ans se sont écoulés, quelques centaines de millions de barils ont été pompés du sous-sol du pays. Et, à la faveur d'une bonne tenue des cours internationaux de l'or noir, plus de 10 milliards de dollars ont été engrangés entre 2004 et 2012, de quoi transformer l'économie du pays, Le budget de l'État à presque quadruplé entre 2002 et 2012 passant de 390 milliards à 1 500 milliards de F CFA (de 595 millions à 2,3 milliards d'euros)1. Désireux de voir les revenus pétroliers favoriser un développement rapide du pays, l'Etat s'est lancé dans le financement des projets ambitieux dont le coût élevé et la faible rentabilité se sont traduits par une accumulation des déficits publics, la montée de l'inflation et la croissance rapide et régulière de la dette, ainsi le stock de la dette publique du Tchad était estimé, fin 2012, à 1 655 milliards FCFA, dont 1197 milliards FCFA au titre de la dette extérieure (72 %) et 458 milliards (28 %) de la dette intérieure. Le service de la dette publique représente 11 % des recettes budgétaires en 2012. Le gouvernement n'a toutefois pas mis à profit la hausse des recettes pétrolières intervenue ces trois dernières années pour accélérer le rythme de son désendettement au plan intérieur. Au plan extérieur, le Tchad n'a pas accumulé d'arriérés de paiement.

En dépit de ces avancées, le rapport du FMI de 2011 souligne que « Comparé à d'autres pays d'Afrique subsaharienne a faible revenu, au Tchad la monétisation est faible et le crédit au secteur privé réduit. Le secteur financier est sous-développé avec huit banques commerciales,

1, Selon les chiffres publiés dans le cadre de l'Initiative pour la transparence des industries extractives 2012 (lire p. 85).

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deux compagnies d'assurance et deux fonds de pension. Les transactions interbancaires sont réduites au minimum et il n'existe aucun marché liquide établi pour la dette publique. »

Le dilemme de la gestion des revenus d'origine pétrolière et le comportement des politiques budgétaires n'est pas nouveau dans les pays pétroliers de la zone Cemac, car l'exemple des premiers pays producteurs de la zone (Gabon, et Cameroun) plusieurs décennies de productions a laissé plus de pessimisme sur la gestion des finances publiques et de sa soutenabilité. Ce dilemme se pose aujourd'hui avec plus acuité car le Tchad se trouve à un stade ou dix (10) contrats de partage de production ont été signés en 2011 et 2012 avec de nouveaux acteurs internationaux, dont certains sont assortis du paiement de bonus de signature significatifs. La SHT (société des hydrocarbures du Tchad) devenant ainsi partenaire sur chaque contrat et commercialise une partie de la production nationale sur le marché national mais aussi international. Dès lors, il se pose aux autorités Tchadiennes le problème de l'intégration de ces forts revenus dans les politiques budgétaires et son ajustement dans le temps.

La question principale à se poser : est celle de savoir si âpres une décennie d'exploitation, et un changement radicale dans le comportement des politiques budgétaires est ce que la soutenabilité des finances publiques est-elle empiriquement vérifiée ? De cette question fondamentale nous pouvons nous interrogé sur comment a évolué le déficit structurel de l'économie tchadienne sur la période de l'étude ? Et comment a aussi évolué la dynamique de la dette sur cette période ? Pour parvenir à des réponses appropriées, nous nous sommes fixés des objectifs et formuler des hypothèses de recherche.

Bien qu'il existe de nombreux travaux ainsi qu'une littérature abondante sur la soutenabilité des finances publiques en Afrique et surtout concernant les pays pétroliers de la zone Cemac (Gabon2 Cameroun3), cette étude présente un double intérêt d'abord sur le plan de la politique économique, elle traite la question de l'endettement des pays africains du point de vue des débiteurs ensuite elle présente une solution durable à l'endettement du point de vue

2 La soutenabilité des finances publiques dans les pays africains producteurs de pétrole : le cas du Gabon Mémoire présenté par M. Léandre E. BOULOUBOU « 2007 )> Ecole Nationale d'Administration PARIS

3 Thèse sur l'économie politique de la rente pétrolière dans les états africains par LUC DESIRE OMGBA « 2009 )> Université d'Auvergne Clermont-Ferrand I Faculté des Sciences Economiques et de Gestion Centre d'Etudes et de Recherches sur le Développement International (CERDI)

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des pays africains producteurs de pétrole qui ont une occasion presque inespérée, grâce aux surplus pétroliers exceptionnels, de résorber par eux-mêmes la question de l'endettement sans recourir à la charité de la communauté internationale.

En ce qui concerne le cas précis du Tchad, l'intérêt de ce travail est de montrer que la tentation forte et légitime des autorités d'affecter les revenus pétroliers à plusieurs objectifs à la fois compte tenu de l'ampleur des maux, mais sans priorisation préalable, peut être contre-productif à long terme et ne constitue pas une réponse appropriée à la question de la viabilité des finances publiques. C'est pourquoi, ce travail a pour vocation de répondre aux questions ci-dessus évoquées auxquelles sont confrontées actuellement les autorités Tchadiennes et plus précisément de répondre aux questions des politiques économiques en donnant la priorité à celles qui sont susceptibles de placer les finances publiques sur une trajectoire soutenable en permanence. Mais au delà des préoccupations urgentes du gouvernement sur la gestion des revenus pétroliers, ce travail voudrait également orienter son action vers des politiques économiques de long terme visant à assainir durablement les finances publiques et accroître le potentiel de croissance de l'économie. Ainsi, les recommandations et les propositions formulées dans ce travail seront considérées comme une contribution au renforcement de la soutenabilité des finances publiques à moyen terme.

Ce travail est conduit sous l'hypothèse générale que les finances publiques du pays à travers les politiques budgétaires menés actuellement ne sont pas soutenables. Deux hypothèses secondaires sont considérées : D'une part, nous faisons l'hypothèse que le déficit structurel du pays n'est pas soutenable malgré les importants flux de revenus qui sont générés par l'exploitation du pétrole D'autre part, la dynamique de la dette du pays n'est pas soutenable et ne cesse de croitre conduisant a un risque d'insoutenabilité a moyen terme. En effet, il est important de noté que la gestion de la dette du Tchad est assurée actuellement par la Direction générale du Trésor, avec l'appui de la Direction des études et de la prévision, de l'Institut national de la statistique, des études économiques et démographiques (Inseed) et de la BEAC. Ces différents organismes forment l'Équipe technique d'analyse de viabilité de la dette. Elle a pour mission, depuis près de trois ans, de suivre et d'actualiser l'ensemble des informations et données relatives à la dette. Elle élabore annuellement, en coopération avec les autres directions impliquées dans la gestion des finances publiques, une stratégie nationale d'endettement public. Ce document est joint à tous les projets de loi de finances présentés à l'Assemblée nationale.

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Le présent mémoire est divisé en 3 chapitres : Dans le chapitre I nous allons parler d'une manière générale du Tchad et surtout montré comment le processus de l'exploitation pétrolière a été réalisé, étant donné que cette exploitation a permis de gonfler les recettes publiques et amener la problématique de la soutenabilité des finances publiques à moyen terme.

Dans le chapitre II nous allons présenter les différentes théories sur la soutenabilité et les différents tests empiriques déjà réalisés.

Le chapitre III va nous permettre de faire une analyse descriptive et économétrique de la soutenabilité des finances publiques au Tchad mais aussi de suggère la mise en oeuvre des mesures de long terme, les reformes structurelles, visant à maintenir les ratios de la dette publique et le déficit structurel à un niveau soutenable en permanence.

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CHAPITRE 1 CADRE DESCRIPTIF ET CONCEPTUEL

Le Tchad, est un pays d'Afrique centrale sans accès à la mer, situé au sud de la Libye, à l'est du Niger et du Nigeria, au nord du Cameroun et de la République centrafricaine et à l'ouest du Soudan. Sa capitale est N'Djamena. Géographiquement et culturellement, le Tchad constitue un point de passage entre l'Afrique du Nord et l'Afrique noire.

Dans ce chapitre nous mettrons en évidence un aperçu sur le Tchad d'une manière générale, ensuite nous allons parler de l'avènement du pétrole, ainsi que de la gestion préconisée des revenus pétroliers.

1.1. PRESENTATION DU TCHAD

1.1.1. Aspects historiques et politiques

L'Etat du Tchad dans ses frontières actuelles est une création de la colonisation européenne. Ses frontières résultent de négociations entre Français et Allemands dans les années 1880. Mais l'espace tchadien possède une histoire riche et relativement bien connue. Il est sans doute un des berceaux de l'Humanité avec la découverte récente de Toumaï ( fossile inventorié TM 266-01-060-01, TM pour Toros-Menala, région de sa mise au jour, est le surnom d'un crâne fossile de primate découvert en 2001 au Tchad ) Il a conduit à la définition d'une nouvelle espèce, Sahelanthropus tchadensis, que certains paléoanthropologues considèrent comme l'une des premières espèces de la lignée humaine, probablement très proche de la divergence chimpanzés-homininés. Âgé d'environ sept millions d'années, il fait du Tchad aujourd'hui le Berceau de l'humanité. Le Tchad a été le siège de trois grands royaumes sahéliens : le Kanem-Bornou, le Baguirmi et le Ouaddaï.

Considéré comme protectorat français à partir de 1900, le Tchad fut érigé en colonie en 1920 dans le cadre de l'AEF (Afrique-Équatoriale française). Sous l'impulsion du Gouverneur Félix Éboué, il fut la première colonie française à se rallier à la France libre en 1940 pendant la second guerre mondiale. Devenu république autonome en 1958, le Tchad accéda à l'indépendance le 11 août 1960 sous la présidence de François Tombalbaye. Celui-ci dut bientôt faire face à la révolte des populations du Nord, en majorité musulmane, ce qui l'amena à solliciter l'aide des troupes françaises en 1968. Après l'assassinat de Tombalbaye en 1975, le pouvoir échut au général Félix Malloum, qui dut céder la place à Goukouni Oueddei à la suite de la première bataille de Ndjamena en 1979. En 1980, la seconde bataille de Ndjamena

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Tchad

permit à Goukouni Oueddei d'évincer son rival, Hissène Habré, avec l'aide décisive du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi.

Après l'échec d'un projet de fusion entre le Tchad et la Jamahiriya arabe libyenne en 1981, les troupes libyennes se retirèrent dans le cadre d'un accord conclu avec le gouvernement français. En 1982, Goukouni Oueddei fut renversé à son tour par Hissène Habré, qui dut faire appel l'année suivante au soutien des forces françaises pour l'aider à contenir une nouvelle invasion libyenne (Opération Manta). En 1987, une contre-offensive des forces tchadiennes contraignit finalement les troupes libyennes à évacuer le pays, à l'exception de la bande d'Aozou qui ne fut restituée au Tchad qu'en 1994. En 1990, Hissène Habré fut renversé du pouvoir par Idriss Déby ITNO, qui est en place depuis lors et maintient une politique de stabilité du pays.

1.1.2. Aspects biophysiques

Le Tchad se divise en trois grands ensembles géographiques : du nord au sud, on trouve successivement une région désertique, un espace semi-aride, puis la savane soudanaise. Le lac Tchad, qui donne son nom au pays, est son principal plan d'eau ; le point culminant du pays est l'Emi Koussi, dans le massif du Tibesti à une altitude de 3445m.

Le climat au Tchad est régi par l'action combinée de l'harmattan, vent du secteur Nord-Est et de la mousson, vent du secteur Sud-Ouest, tous deux sous l'influence du Front Inter Tropical (FIT) dont l'évolution (renforcement/affaiblissement) dépend essentiellement des anticyclones de Sainte- Hélène, et des Açores. Ce climat se caractérise par des précipitations marquées par de fortes irrégularités spatio-temporelles qui semblent être liées aux flux de la mousson, principale source d'humidité. Le régime thermique est marqué par une période relativement froide allant de décembre à février (11° - 22° C) et une période chaude de mars à juin (39 - 45°C).

La distribution de la pluviométrie et la répartition du couvert végétal permettent de distinguer trois zones bioclimatiques qui sont, du Nord au Sud, la zone saharienne, la zone sahélienne et la zone soudanienne.

Au Tchad, l'hydrographie est dominée par les principaux cours d'eau permanents que sont le Chari (1200 km) et le Logone (1000 km), cours d'eau permanents et par le Lac Tchad. Ces deux cours d'eau forment le système Chari-Logone couvrant un bassin versant de 600 000

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km2 de la confluence à N'Djamena alors que le Lac Tchad, relique d'une vaste mer intérieure dont la superficie a varié de 25 000 à 2500 km2 à l'heure actuelle. On note aussi l'existence d'autres plans d'eau comme les lacs Tikem, Léré, Fitri et des cours d'eau temporaires (Ouadis, Enneri).

En ce qui concerne la diversité biologique (faune et flore), le Tchad recèle d'importantes richesses dont l'exploitation rationnelle contribuerait à son développement économique et social, Les principaux faciès de formations forestières, dictés, du Nord au Sud, par les volumes pluviométriques, sont: les forêts galeries, feuillues denses situées le long des cours d'eau, et les îlots de forêts denses sèches qui font place, par endroits, à des formations dégradées à forêts claires et savanes boisées. Les formations forestières feuillues ouvertes, appelées formations mixtes forestières, regroupent les formations mixtes productives. Les forêts claires et les savanes boisées de la zone soudanienne. Les jachères forestières, rencontrées au niveau des terroirs agricoles. Les formations essentiellement arbustives, composées de steppes, de steppes arbustives et de savanes se rencontrent dans les secteurs sahariens et sahélo - soudanien.

Des ressources en eau renouvelables sont évaluées à 45 km3/an. Le volume prélevé chaque année est de l'ordre de 1,27 km3, dont 2/3 prélevés dans les eaux de surface, et 1/3 dans les eaux souterraines (en grande partie dans un aquifère non renouvelable). Environ 10 millions de bovins, 8 millions de petits ruminants, 1,2 million de camelins, 400.000 asins, 360.000 équins, 70.000 porcins et plus de 24 millions de volailles.

1.1.3. Aspects humains

Le Tchad est un pays vaste et de faible densité humaine. Il connaît pourtant d'importants contrastes, le Nord et le Centre représentent les deux-tiers de la superficie du pays et comptent environ 30 % de la population totale. Ces régions sont peuplées de populations négro-africaines et sahariennes disparates, mais toutes musulmanes, appartenant aux groupes linguistiques sahariens, soudanais oriental et central.

Les Arabes (de souche, métissés et négro-africains arabisés), musulmans, occupent trois grandes zones de peuplement, au Nord (nord-ouest du Kanem), au Centre (Batha, Guéra, Chari-Baguirmi et nord du Ouaddaï) et au Sud-est (Salamat), représentant environ 14,5 % de la population tchadienne. Les Hadjaraïs (8,5 %), nom de désignation ethnique, communément attribué aux divers groupes ethniques (plus en référence à la région administrative qu'à leurs

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divergences culturelles ou religieuses) qui peuplent le centre et le centre-ouest du pays, groupes linguistiques afro-asiatique, tchadique, nilo-saharien, bongo baguirmi, sara baguirmi, baguirmi, soudanais oriental et central, sont majoritairement musulmans. Néanmoins, il existe une minorité de chrétiens voire des animistes dans cette partie du territoire.

Enfin, le Sud-Ouest, chrétien, musulman et très marginalement animiste, est composé de populations négro-africaines appartenant aux groupes linguistiques tchadien et soudanais central (Saras 30 %, Ngambayes 5,5 %, Toupouris, Kotokos, Baguirmis, Massas, et autres 9,5 %).

1.1.4. Structure de l'économie

L'activité économique est portée par le dynamisme des secteurs agricole et pétrolier grâce notamment à la mise en oeuvre des projets de l'État en matière industrielle, énergétique et agropastorale. À cause des aléas climatiques subis par le secteur agricole en 2011 et 2012 l'inflation a connu une accélération à 7 % en 2012. Elle est retombée à 3.1 % en 2013.

L'évolution attendue des productions de coton et surtout de pétrole laissent espérer pour les cinq prochaines années une augmentation des recettes d'exportation. Ces ressources additionnelles pourront contribuer au financement du programme d'investissements publics dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie gouvernementale d'émergence économique. Mais la mobilisation des ressources financières exigées pour la réalisation de ce programme affecte la viabilité des comptes publics. À moyen et long terme elle est de nature à peser négativement sur les positions budgétaires du pays.

À ce premier défi s'ajoute un second qui tient à la nécessité d'améliorer fortement le cadre budgétaire de l'économie tchadienne par la mise en place d'une stratégie d'assainissement financier crédible. L'accession du point d'achèvement de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), dont le point de décision a été atteint en 2001, et la signature d'un programme de référence avec le Fonds monétaire international (FMI) devraient y contribuer grandement. Cet effort de consolidation budgétaire pourrait aussi être soutenu et renforcé par une diversification des sources actuelles de croissance de l'économie à travers la création de chaînes de valeur dans trois domaines pour lesquels le Tchad dispose de fortes potentialités : l'élevage, le coton et la gomme arabique. Un tel processus de diversification permettrait de générer des ressources fiscales supplémentaires en élargissant l'assiette de l'impôt grâce à des gains en valeur ajoutée et de créer de nouveaux emplois dans ces trois

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secteurs. Il contribuerait aussi au renforcement du secteur manufacturier et permettrait au Tchad d'accélérer la transformation structurelle de son économie et de rendre sa croissance plus inclusive.

Après l'année 2011 marquée par un fort repli, l'économie tchadienne a repris son élan. La croissance du PIB a atteint 7.2 % en 2012 contre 1.6 % en 2011 et devrait rester soutenue pour progresser à 7.4 % en 2013 et11.5 % en 2014.

Le secteur primaire a contribué à la croissance pour 0.96 point de PIB en 2012, grâce notamment à l'élevage, à l'agriculture industrielle et vivrière. Malgré de fortes inondations la production céréalière a plus que doublé, passant de 1.66 millions de tonnes pour la campagne 2011/12 à 3.7 millions de tonnes en 2012/13. Les actions publiques pour l'aménagement de grands périmètres agricoles, la distribution de semences améliorées et la mise à disposition dans les différentes régions du pays d'un millier de tracteurs ont contribué à l'accroissement de la valeur ajoutée dans l'agriculture.

La contribution du secteur secondaire à la croissance du PIB a été de 3.22 points en 2012, grâce à la bonne tenue du secteur manufacturier et du bâtiment et des travaux publics (BTP), à la montée en puissance des nouvelles industries du secteur énergétique, de la construction, du raffinage, et à la filière coton, avec la relance de la société étatique Cotontchad. Le secteur pétrolier a moins fortement contribué à la croissance en raison d'une baisse de la production liée aux difficultés géologiques rencontrées par les opérateurs dans le bassin de Doba.

Le secteur tertiaire reste important en termes de création d'emplois. Sa contribution à la croissance du PIB s'est élevée à 3.02 points en 2012. La bonne tenue des activités liées aux transports, aux télécommunications, aux activités commerciales et les embauches opérées dans la fonction publique ont concouru à la croissance de l'emploi au Tchad en 2012.

La formation brute de capital fixe a été le principal facteur de hausse de la demande globale en 2012 avec une contribution à la croissance du PIB de 4.9 points. Le niveau d'investissement global, qui a augmenté de 7.9 % Par rapport à 2011, et de 19% dans le secteur pétrolier, en est à l'origine. La consommation finale, essentiellement soutenue par la progression des dépenses de consommation privée, a contribué à l'évolution du PIB à hauteur de 4.6 points en 2012. S'agissant des échanges extérieurs, la demande extérieure nette a pesé négativement sur la croissance (-2.3 points).

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Une poursuite du redressement de la croissance entamé en 2012 après le fort recul enregistré en 2011 est prévue en 2013. Les changements et améliorations attendus à très court terme dans le secteur de la production de l'énergie électrique et l'entrée en fonction des zones d'activités industrielles permettront de conforter les prévisions pour 2013 et 2014.

Leur réalisation dépendra aussi de l'évolution du secteur pétrolier. Selon le rapport du Collège de contrôle et de surveillance des ressources pétrolières publié en 2012, la production annuelle de pétrole au Tchad s'est élevée à 41 880 000 barils.

Le Tchad à adhéré à l'Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) en 2007 et a acquis le statut de pays candidat en avril 2010. La publication, en 2012, des rapports de l'ITIE pour les années 2007, 2008 et 2009 a confirmé que les revenus tirés de l'activité pétrolière représentent la principale composante des recettes budgétaires : 74 % en 2007, 81 % en 2008 et 49 % en 2009. En 2012, les revenus pétroliers ont contribué pour près de 80 % aux recettes totales de l'État.

Au plan économique et industriel, les effets induits par l'activité pétrolière constituent de puissants relais pour la croissance du pays. Ils restent toutefois conditionnés à la capacité des opérateurs déjà présents à maintenir leur niveau de production dans les prochaines années. S'agissant des nouveaux opérateurs, la mise en exploitation dans les deux années à venir des gisements pétroliers de la compagnie canadienne Griffiths devrait permettre d'accroître le niveau de la production. Quant à la CNPC, une augmentation significative de sa production dans la région de Bongor compenserait le ralentissement de la production observé sur les premiers gisements exploités au Tchad et lui offrirait la possibilité d'exporter le surplus.

I.2. EVOLUTION HISTORIQUE DU PETROLE TCHADIEN

1.2.1. Du concept a l'histoire du pétrole

Le pétrole est conventionnellement défini comme un liquide composé principalement de molécules d'hydrocarbures, c'est-à-dire formées uniquement de carbone et d'hydrogène. Il contient aussi, en proportions variables, des molécules lourdes plus complexes comme de l'oxygène, de l'azote et du soufre appelées résines ou asphalténes (en moyenne 15 %). Il s'est constitué à partir d'organismes vivants comme des algues, du plancton et parfois des végétaux continentaux qui ont vécu il y a plusieurs millions d'années. Le pétrole est connu et utilisé depuis la plus haute antiquité Il est mentionné qu'il était utilisé de nombreuses façons comme

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pour le calfatage des bateaux, dans le ciment pour le pavage des rues, comme source de chauffage et d'éclairage, et même comme produit pharmaceutique. Sa distillation, décrite dès le Moyen Âge, ajoute un intérêt additionnel avec les lampes à pétrole. C'est seulement à partir des années 1850, suite à la révolution industrielle que le pétrole fait l'objet d'une exploitation et d'une utilisation industrielle. Il est d'abord exploité en Roumanie, puis aux États-Unis « dans l'État de Pennsylvanie ». Dès le début du 20e siècle, il devient une matière première mondialement stratégique aux niveaux économique et politique. La période entre 1920 et 1970 est imprégnée d'une série de grandes découvertes de gisements, principalement au Moyen-Orient, qui font la convoitise des grands pays consommateurs. Par le fait même, les marchés des produits pétroliers se développent. De plus, mis à part les carburants comme l'essence et le diesel qui génèrent l'essor des transports dans leur ensemble, l'industrie pétrolière engendre une multitude de produits dérivés, parmi lesquels il y a les matières plastiques, les textiles et le caoutchouc artificiels, les colorants, ainsi que les intermédiaires de synthèse pour la chimie et la pharmaceutique. Ces différents marchés permettent d'utiliser la totalité des composants du pétrole.

L'histoire du monde est marquée par la période 1973-1980 avec les premiers (73-74) et deuxièmes chocs pétroliers (79-80). Cependant, à partir de 1985, avec le contre-choc pétrolier, c'est plutôt un effondrement du prix du baril de pétrole qui se produit. En 2003, à cause de la spéculation sur les matières premières, le prix du baril remonte, et ce malgré une production soutenue et une relative paix internationale. Lorsque cette spéculation s'arrête subitement en 2008, le prix du baril chute avant de se stabiliser en 2009 et 2010.

1.2.2. De la découverte a l'exploitation

Les recherches pétrolières avaient commencé depuis le régime du Président Ngarta Tombalbaye qui soucieux de l'enclavement et de l'état de dénuement total de son pays, cherchait des sources des revenus pour le développement socio - économique de son pays, car assaillis de problèmes financiers. Dès lors deux permis sont créés pour poser le cadre juridique de la recherche pétrolière : l'autorisation de prospection et le permis exclusif de recherche dit permis H. En effet, les études d'exploitations menées entre 1962 et 1967 par une compagnie française, le Bureau des recherches pétroliers et l'ORSTOM, un Institut français de Recherche furent infructueuses. C'est ainsi qu'à partir de 1968, trois permis de recherche (permis H) ont été accordés. Le premier a été accordé à Monsieur Royer (un fonctionnaire français proche Des milieux diamantaires et pétroliers) pour la zone des Erdis au Nord du

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pays, Mais compte tenu de l'insécurité qui régnait dans la zone, celui-ci ne pouvait mener ses activités à terme et son permis fut annulé en 1970. La même année une entreprise française, à savoir la société internationale pour la recherche et l'exploitation pétrolière (SIREP) obtint un permis de 152.000 km2 dans la même zone. Puisque les mêmes causes produisent les mêmes effets, le projet fut un échec et le permis supprimé.

Le 09 septembre 1969, une compagnie pétrolière américaine, le Continental Oïl Company (CONOCO), obtient du gouvernement un permis exclusif de recherche d'hydrocarbures liquides et gazeux, pour une durée de cinq ans et couvrant une superficie de 603.900 km2 qui va du Lac Tchad à la région de Doba. Les travaux de CONOCO se sont avérés fructueux et ont occasionné un investissement qui se chiffre à plus de 10 milliards de FCFA sur une période de cinq ans

Tableau 1 : Résultats des forages par CONOCO

Année

Puits forés

Découvertes

Nom du puits

Investissements en millions de FCFA par an

1974

4

0

-

2 341,9

1975

4

2

MIANDOUM I SEDIGUI II

2 271,06

1976

4

0

-

2 713

1977

3

1

KOME I

2 440,525

1978

1

1

MANGARA I

1 004,5

TOTAL

16

4

-

10 770,985

Source : Tchad et culture n° 109 avril 1978

Ces résultats montrent que sur 4 découvertes avérées un seul (SEDIGUI) est dans la zone du Lac, par contre les trois autres (MIANDOUM I - KOME I et MANGARA I) sont dans la zone du sud du pays ce qui semble confirmer l'hypothèse que le sud du Tchad est assis sur une grande nappe pétrolière.

Malgré ces découvertes, l'exploitation n'a pas immédiatement suivi pour cause des divers problèmes liés à l'insécurité généralisée à l'intérieur du pays, le coût du baril est relativement élevé car la zone pétrolifère se trouve à plus de 1000 km des côtes du Cameroun et cela

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nécessite la construction d'un pipeline. Donc il faut une production à grande échelle pour rentabiliser l'exploitation et cela suppose la découverte d'un "méga - champ" (gros gisement)

Ainsi, compte tenu des difficultés du pays en matière énergétique, le Tchad a posé comme préalable, l'exploitation du pétrole de Sédigui (près du lac) pour alimenter N'Djaména. Il a fallu attendre, la découverte en 1989, d'importants gisements (130 millions de tonnes) dans le bassin de Doba pour envisager réellement son exploitation.

1.2.3. Mode d'exploitation du bassin de doba

Les premiers travaux d'exploitation du pétrole ont commencé en octobre 2000 après l'approbation par le Conseil d'Administration de la Banque mondiale du projet d'exportation tchadien le 06 juin 2000.

En effet, l'exploitation de cette ressource naturelle a été rendue possible par la Bénédiction financière et morale de la Banque mondiale qui a assuré le contrôle de la gestion financière de ces revenus pétroliers, pour que ça puisse effectivement contribuer à la réduction de la pauvreté au Tchad. Son apport financier se situe dans l'ordre de 93 millions de dollars de prêt dont 39,5 millions de dollars pour le Tchad et le reste pour le Cameroun et sa présence a été une caution pour favoriser l'intervention financière des autres sociétés financières internationales telles que la SFI.

Le scénario définitif qui a été retenu pour la mise en valeur des ressources pétrolières est la séparation du projet de Sédigui de celui de Doba qui était à un certain moment, un préalable posé par le gouvernement tchadien. Donc, le gisement de Sédigui (au Nord du Lac Tchad) d'une faible capacité (réserve estimée à 15 millions de tonnes), d'une teneur en soufre très faible (0,05%) et pas d'impuretés dans le fuel est un pétrole léger. Son exploitation est consacrée uniquement à la consommation locale pour pallier les difficultés en hydrocarbures.

A cet effet, une mini raffinerie à été construite à N'Djaména la capitale, et traite le pétrole de Sédigui qui est drainé par un pipeline de 450 km de long. Par contre, le site de Doba situé au sud du Tchad dont les réserves sont estimées à plus de 917 millions de barils est consacré exclusivement à l'exportation à l'état brut, avec une production de l'ordre de 225.000 barils par jour pour une durée de 25 à 30 ans soit 12,5 millions de tonnes de brut par an et ceci place le Tchad au même niveau de production que le Gabon (13,5 millions de tonnes en 2000) et au-dessus de celle du Cameroun (5,2 millions de tonnes). Ainsi, l'oléoduc qui relie Doba au

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terminal pétrolier du port de Kribi au Cameroun, a un coût estimé à 3,7 milliards de dollars US et revu à la hausse a 4,2 USD selon les données de ESSO en 2004. Dont plus de 2,2 milliards pour la construction du pipeline.

Le pétrole brut est transporté par pipeline jusqu'à Kribi où il est relié à un terminal flottant, un système de navire transformé en tanker et d'une capacité de 2 millions de barils et c'est à partir de là que ce fait, le chargement des navires pétroliers par conséquent, il n'y a pas de construction de raffinerie à Kribi.

Pour la gestion du pipeline, deux sociétés ont été créé : l'une de droit tchadien, le Tchad oïl Transportation Company (Totco) dont le Tchad a 15% d'actions et l'autre de droit camerounais, la Cameron oïl Transportation Company (Cotco) où le Tchad est actionnaire à 5% et le Cameroun à hauteur de 15%. Par contre, le consortium qui exploite et gére le pétrole tchadien est actionnaire majoritaire de ces deux sociétés (85% pour TOTCO et 80% pour COTCO).

1.2.4 Du cadre institutionnel et réglementaire de la gestion du pétrole au Tchad

L'enclavement géographique et l'instabilité politique du pays font de ce projet, un investissement à haut risque. C'est ce qui explique sans doute, la déconfiture qui apparaît dans la composition du consortium. En effet, la société pétrolière Américaine Conoco qui était la seule détentrice du permis de recherche à 100% depuis 1969, a cherché à minimiser ses propres risques en faisant entrer en 1971 la société SHELL qui prendra 50% des parts d'actions. Le 31 janvier 1976, la Chevron Oïl Company of Tchad qui est une filiale de standard Oïl of California ouvre une succursale à N'Djaména et entre à son tour dans le consortium en acquérant 25% des parts de Shell. Ainsi, Conoco a 25%, Shell 25%, Chevron 25% et les 25% restant reviennent au Gouvernement tchadien. Mais, les choses ne sont pas restées là, car le mouvement se poursuit. Conoco cherche à se débarrasser du projet, céda la moitié de ses actions à Exxon et en même temps Shell reprend la part du gouvernement tchadien. En 1992, le consortium change de nouveau de composition avec l'entrée d'une compagnie française Elf qui rachète 20% des parts de Chevron d'où la nouvelle composition : 40% pour Exxon, 40% Shell et 20% pour Elf.

En novembre 1999, juste quelques mois avant l'approbation du projet par la Banque Mondiale, un coup dur a été porté contre ce projet car Shell et Elf ont décidé de se retirer pour des raisons de changement de stratégie puisque Elf s'est fusionnée récemment avec le groupe

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TOTAL-FINA. En effet, ce n'est que le 31 mars 2000 que le nouveau consortium international qui devrait désormais exploiter le pétrole de Doba est constitué autour des compagnies américaines Exxon Mobil (40%) et Chevron (25%) ainsi que la compagnie Malaisienne PETRONAS qui détient enfin 35% des parts d'actions du projet.

1.2.5 Contrat et constitution du consortium de doba

L'Etat tchadien et le consortium sont liés par un type de contrat où les recherches, l'exploitation et la commercialisation du pétrole est l'affaire exclusive du consortium. Ce dernier est détenteur d'un droit minier de recherche et d'exploitation pour une période de 5 ans renouvelables deux fois. Au cas où, la recherche s'avérerait concluante, le consortium obtiendrait un droit d'exploitation et de commercialisation du pétrole pendant 50 ans Renouvelables. D'ailleurs c'est ce type de contrat similaire qui avait prévalu dans la plupart des pays producteurs de pétrole notamment dans la région du golfe persique en particulier en Arabie Saoudite car ces pays à l'époque n'avaient pas une maîtrise de l'industrie pétrolière. Ainsi, le Tchad peut bénéficier des recettes sous forme des redevances ou royalties (Indemnisation du propriétaire du sous-sol) qui s'élèvent à 12,5% (les pays du Proche - Orient avaient signé en 1948 le même taux de royalties mais celui-ci avait été remis en cause par la suite) de la production brute et de la taxe sur les profits (bénéfices) nets du consortium. A ces deux revenus principaux, il faut ajouter les dividendes de la participation au capital de Totco et Cotco, et la taxe sur le pipeline. Cependant, le consortium bénéficie des exonérations fiscales sur une période de 10 ans pour compter de la date de sortie sur le marché international du 1er baril de pétrole. Ces exonérations prennent en compte tous les investissements réalisés par le consortium depuis la prospection en 1969, en passant par les équipements, l'exploitation et les prospections qui s'effectueront sur les différentes localités du pays que leur permis couvre.

En somme, les avantages que le Tchad doit tirer de l'exploitation du pétrole semblent être dérisoires par rapport à ceux du consortium, vu les nombreuses exonérations accordées à ce dernier. A l'exception de la redevance sur la production et de l'impôt direct sur les bénéfices, le consortium, ses actionnaires et les sociétés affiliées sont exonérées de tout autre impôt direct sur le revenu frappant les résultats des opérations pétrolières, les bénéfices et les distributions de bénéfices, et de toute taxe, droit, impôt ou contribution de quelque nature que ça soit Frappant la production ou la vente des hydrocarbures et tout revenu y afférent, ou exigible sur les opérations pétrolières ou à l'occasion de l'établissement et du fonctionnement

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du consortium. En effet, le contrat pétrolier est fonction de la haute rentabilité de l'or noir à exploiter et d'une facilité d'exploitation du gisement, or le Tchad ne remplit pas totalement ces conditions. L'exploitation du gisement tchadien ressemble plus à une exploitation offshore puisque le coût est très élevé à cause de la construction du pipeline, et compte tenu de sa qualité, le prix du baril tchadien doit subir une décote de l'ordre de 3 dollars par baril par rapport au prix du baril de Brent et enfin l'enclavement du pays font que le consortium ne Pourrait accepter des taux d'imposition fiscaux très élevées à l'image des grands pays pétroliers où les compagnies se bousculent à leur porte malgré une taxation à plus de 70%.

Les avantages fiscaux consentis par l'Etat sont multiples et nous pouvons en citer : la taxe sur les véhicules, sauf ceux à usage privé ; la contribution foncière relative aux propriétés bâties, sauf pour les immeubles à Usage d'habitation ; la contribution foncière relative aux propriétés non bâties ; la patente ; les droits de timbre ; la taxe forfaitaire sur les salaires ; la taxe sur les primes d'assurance.

Donc, les recettes sont indexées sur l'évolution du prix du baril sur le marché international du pétrole autrement dit, la consistance de ces revenus est liée à une évolution favorable du prix du baril. Mais dans tous les cas, le Tchad qui étant un des pays les plus pauvres de la planète trouve une occasion unique, pour le financement de son développement et partant l'amélioration substantielle du niveau de vie de sa population.

1.2.6 Cadre institutionnel et réglementaire de la gestion des revenus pétroliers

Avant de parlé des mécanismes de gestion des revenus pétrolières nous mettrons en évidence la structure qui cordonne toute les activités de l'exploitation du pétrole.

? Le ministère du pétrole et de l'énergie est structuré autour d'une Direction de Cabinet, d'une Inspection Générale, d'une Administration Centrale ; des Délégations Régionales et des Sociétés sous tutelle comme :

La Société de Raffinage de N'Djaména (SRN), La Société des Hydrocarbures du Tchad (SHT) , la Société Nationale d'Electricité (SNE) , l' Agence Tchadienne de la Radioprotection et de la Sécurité Nucléaire( ATRSN ) et l' Autorité de Régulation du Secteur Pétrolier Aval du Tchad (ARSAT).

Depuis le démarrage des négociations en vue de l'exploitation du pétrole tchadien, deux préoccupations majeures hantent les esprits et sont au coeur de la controverse: Les impacts

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environnementaux et sociaux, et la gestion des revenus pétroliers. En effet, se fondant d'une part sur les expériences d'un certain nombre de pays producteurs de pétrole où richesse du sous-sol rime avec misère des populations, une partie de l'opinion nationale n'ont de cesse que de clamer leurs doutes quant à la capacité et à la volonté des dirigeants tchadiens de gérer les revenus pétroliers dans la plus grande transparence et dans l'intérêt de tout le peuple.

Le gouvernement tchadien, sous la houlette de la Banque Mondiale, a donné le gage de sa bonne foi en mettant en place un arsenal législatif et réglementaire que l'on pourrait qualifier sans exagération de révolutionnaire.

Cet arsenal est bâti autour de la loi 001/PR/99 du 11 Janvier 1999 portant sur la Gestion des Revenus Pétroliers qui détermine les modalités d'affectation des revenus pétroliers et crée le Collège de Contrôle et de Suivi des Revenus Pétroliers (CCSRP) qui est sous la coordination du Comité Technique National de Suivi et de Contrôle (CTNSC) des activités pétrolières qui s'occupe du contrôle des aspects environnementaux à savoir biophysique, socio-économique, santé et sécurité.

Malgré les structures de internes contrôle, la Banque Mondiale pour s'assurer de la bonne conduite du projet pour que celui-ci puisse atteindre son objectif, la réduction de la pauvreté au Tchad, a mis en place un Groupe International Consultatif (GIC). Le GIC a pour mission d'identifier et d'analyser les problèmes qui naîtront dans l'utilisation des ressources pétrolières et d'en informer la Banque Mondiale et au besoin faire des recommandations aux autorités tchadiennes.

Cette structure indépendante (le CCSRP) a pour mission de vérifié la conformité des engagements sur les comptes spéciaux avec la loi des finances et contrôler et autoriser l'affectation des fonds et les décaissements des comptes spéciaux. Par ailleurs, l'article 3 de cette même loi stipule que les ressources directes sont déposées sur le compte d'une institution financière internationale spécialement ouvert pour l'Etat tchadien et appelé compte séquestre off-shore. Elles sont réparties selon au moins deux modalités:

? Tout d'abord, les 90% sont versés sur des comptes spéciaux du trésor domiciliés dans une ou deux banques primaires sur place : la société générale de banque tchadienne (SGTB) et la Commercial Bank Tchad (CBT SA), le reliquat de 10% est déposé sur un compte d'épargne ouvert dans une Institution financière internationale au profit des générations futures.

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? Ensuite, il faudrait rappeler que les ressources directes déposées sur les comptes spéciaux (90% des ressources totales) sont affectées de la manière suivante: 80% sont destinés aux dépenses relatives aux secteurs prioritaires (Education, Santé, Infrastructure, Développement rural, Environnement et Ressources En Eau), 15% sont destinés à couvrir les dépenses de fonctionnement et d'investissement Courants de l'Etat pour une période de cinq ans à compter de la date de production et les 5% sont destinés aux collectivités décentralisées de la région productrice de pétrole.

En effet, cinq décrets d'application devront soutenir la loi sur la gestion des revenus pétroliers dont trois ont été adoptés. Il s'agit des décrets n°238/PR/MEF/03 sur la stérilisation des revenus pétroliers excédant la capacité d'absorption ; n°239/PR/MEF/03 sur la stabilisation des dépenses financées sur ressources pétrolières et le n°240 qui précise les contours des attributions du collège.

En attendant de pouvoir juger de la bonne application de ce dispositif, il faudrait en apprécier le caractère novateur. Un tel dispositif ne figure dans aucun arsenal juridique des pays producteurs de pétrole. Seule la Norvège, troisième producteur mondial, a un dispositif relativement comparable à certains égards.

Par la suite en 2006 la Loi n°002/PR/06 du 11 janvier 2006 portant Amendement de la loi N°001/PR/99 du 11 janvier 1999 portant Gestion des Revenus Pétroliers et la loi N°016/PR/2000 du 18 août 2000 portant modification de la loi N°001/PR/99 du 11 janvier 1999 a été promulgué4.

Apres avoir mis en évidence le système innovant d'exploitation du pétrole du Tchad, nous allons aborder dans le prochain chapitre la soutenabilité des finances publiques vue par la théorie économique.

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4 Annexe 1

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CHAPITRE II LA SOUTENABILITE DES FINANCES PUBLIQUES DANS LA THEORIE ECONOMIQUE

La soutenabilité des finances publiques revêt une importance particulière dans la théorie économique et particulièrement en matière de politique économique. Elle est une question centrale pour les décideurs publics et suscite des analyses foisonnantes dont il n'est pas toujours facile de discerner les enjeux ni les conséquences pour le service public. Vu son importance, plusieurs théories économiques sont avancées. Ainsi ce chapitre fait le point sur les notions générales de la soutenabilité budgétaire (I) et justifie la grille d'analyse théorique qui a été retenue qui englobe les différentes théories sur la soutenabilité des finances publiques et la synthèse des différents tests empiriques menés sur la question (II)

2.1. DEFINITIONS ET NOTIONS THEORIQUES DE LA SOUTENABILITE

La soutenabilité est une notion dérivée de la contrainte budgétaire inter-temporelle. La soutenabilité budgétaire englobe plusieurs éléments distincts. C'est une notion assez large et peut être traitée à l'aide de plusieurs mécanismes. Les points de vue ont toujours divergé autour de cette notion. Il y' à ceux qui traitent la soutenabilité à partir d'une logique purement budgétaire et de solvabilité. Il y' à aussi ceux qui analysent le problème du côté des marchés financiers et investisseurs. Enfin, certains privilégient d'aborder la soutenabilité en mettant en valeur les richesses de l'Etat. Nous nous s'apercevons donc que traiter la question de la soutenabilité revient à analyser et interpréter plusieurs facteurs susceptibles d'améliorer ou dégrader la situation de la dette. L'essentiel est de savoir comment exploiter les éléments favorables et comment éviter les facteurs défavorables. D'une façon générale, la condition de soutenabilité impose deux égalités équivalentes et complémentaires. Premièrement, la dette courante doit être égale à la valeur actualisée des excédents budgétaires futurs anticipés. Deuxièmement, l'anticipation de la valeur actualisée de la dette est nulle sur un horizon tendant vers l'infini. Ce qu'on doit retenir est que la soutenabilité, proprement dite, n'est respectée que lorsque le gouvernement est en mesure de dégager des excédents budgétaires c'est à dire après intérêt et que la dette actualisée tend nécessairement vers zéro. Techniquement la soutenabilité s'exprime donc par une condition de stabilité dans un univers déterministe, et par une propriété de stationnarité dans un univers stochastique. De ces définitions surgit alors de nouvelles distinctions théoriques dans la notion de la soutenabilité.

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2.1.1 La soutenabilité actuarielle vs soutenabilité effective

A) la soutenabilité actuarielle

On dit qu'un Etat est solvable lorsque sa dette publique suit un processus stationnaire. Cette définition implique clairement que le gouvernement ne joue pas un jeu « à la ponzi » en finançant intégralement les intérêts et le principal dus aujourd'hui par de nouveaux emprunts. Par contre, elle n'est pas la mieux placée pour évaluer la politique économique. En effet, la propriété explicitée par cette définition n'évite pas un accroissement sans limite de la dette. Cette définition rejoint la condition de transversalité dans le sens où elle suppose que le gouvernement prélève des impôts futurs. Cette définition a été sévèrement critiquée par Drazen et Masson (1994) en disant que cette propriété assure la crédibilité des politiciens théoriquement (dans la mesure où mathématiquement c'est réalisable), mais n'assure pas la crédibilité des politiques réellement engagées qui vont appliquer des valeurs excessives de taux d'imposition. D'autres auteurs ont signalé cette inadéquation à l'instar de Arthur Laffer (1970) qui croyait à cette idée ancienne qui disait que « trop d'impôt tue l'impôt » et qui a élaboré sa fameuse courbe appelée « courbe de laffer » en nommant le phénomène « l'allérgie fiscale ». D'autres auteurs libéraux ont aussi attaqué cette idée de taxation à l'exemple de Jean-Baptiste Say qui disait que « un impôt exagéré détruit la base sur laquelle il porte ». De cette perspective, nous constatons que cette définition n'est pas tenable. C'est la raison pour laquelle une autre définition émerge à savoir la soutenabilité effective.

B) La soutenabilité effective

Cette définition est qualifiée d'effective car elle fait appel à plus de sagesse et de raison. Elle dit que c'est vrai que la soutenabilité est un objectif incontestable mais il faut l'atteindre avec plus de crédibilité, de pragmatisme et d honnêteté. Le gouvernement a toute légitimité de prélever des impôts mais à condition que cela ne dépasse pas un certain taux d'imposition noté (t*) sur la courbe de Laffer. Il faut donc empêcher un éventuel risque d'évasion fiscale susceptible de diminuer les recettes de l'Etat et de limiter sa marge de main d'oeuvre dans l'atteinte de sa soutenabilité budgétaire. Nous notons également que Kremers (1989) et Artus (1989) ont souligné l'importance qu'une stabilité du ratio dette sur PIB soit atteinte avec un taux d'imposition raisonnable et praticable.

Par ailleurs ces deux définitions restent pertinentes mais dans différents contextes. Buiter et Patel (1992) ont approuvé cette thèse en faisant la part des choses. En effet lorsque le taux de

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croissance excède le taux d'intérêt, la soutenabilité actuarielle serait plus efficace dans la mesure où la croissance permet aux contribuables de répondre aux besoins de l'Etat en payant la part d'impôt demandée. Par contre lorsque le taux d'intérêt dépasse le taux de croissance alors il n'est pas judicieux de taxer davantage les contribuables car cela risque encore d'étouffer la croissance et de creuser l'écart avec le taux d'intérêt. La soutenabilité effective serait alors dans ce cas plus pratique et plus efficace que la soutenabilité actuarielle.

2.1.2 La soutenabilité brute vs soutenabilité nette

A) La soutenabilité brute

La soutenabilité brute est la soutenabilité qui prend en compte les différents chocs qui peuvent se produire sur l'économie durant un laps de temps donné. Cette définition met en lumière la capacité d'un Etat à absorber les effets néfastes d'un choc sur l'économie. Elle implique donc la stabilité de la dette dans un monde déterministe ; la réponse de la dette à chaque choc est finie.

B) La soutenabilité nette

La soutenabilité nette fait allusion à la stationnarité de la dette dans un univers stochastique. Grâce à un terme aléatoire d'habitude. Un choc est pris en compte dans le processus de stationnarité. L'inconvénient de la soutenabilité nette par rapport à la soutenabilité brute est qu'une accumulation de chocs persistants serait exclue par la méthode de calcul. Par conséquent, si la conjoncture à laquelle est confrontée l'économie est moyennement stable, alors les deux définitions seront valables. Si la conjoncture est caractérisée par des chocs persistants et aléatoires, alors les résultats de la soutenabilité nette seraient biaisés tandis que la soutenabilité brute d'un monde déterministe serait plus pertinente. Malgré la diversité des définitions, des points de vus et des interprétations, cette condition de soutenabilité demeure une énigme que chacun essaie de résoudre à sa manière en se référant à sa propre idéologie. Par contre, un point commun entre les différentes analyses est que la condition de soutenabilité est inspirée de la condition de transversalité. Elle retient les mêmes fondamentaux mais diverge sur certains points précis. En d'autres termes la condition de soutenabilité est une condition de transversalité plus technique et plus développée.

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2.1.3 La distinction entre liquidité, solvabilité et soutenabilité

Une fois qu'on a défini la soutenabilité budgétaire, il est nécessaire de faire la différence entre quelques notions semblables.

A) La liquidité

On parle de liquidité lorsque le raisonnement vise le court terme. Lorsqu'une dette publique arrive à échéance et que le gouvernement n'est pas capable d'assurer la charge de la dette et le remboursement du principal, alors on dit que l'Etat est face à un problème de liquidité. Autrement dit, si les actifs immédiatement disponibles ne sont pas suffisants pour assurer le paiement de ces charges financières alors le gouvernement souffre d'une illiquidité temporaire. La notion de liquidité diffère largement de la notion de solvabilité et de soutenabilité. Ces deux dernières par contre sont proches l'une de l'autre côté signification et sont souvent utilisées comme termes équivalents dans la littérature.

B) La solvabilité

La solvabilité caractérise la situation financière d'un Etat qui est capable de faire face à ses engagements, c'est-à-dire dont la contrainte budgétaire inter-temporelle est respectée, y compris en recourant à des ajustements budgétaires lorsque cela s'avère nécessaire. Si un Etat n'est pas en mesure d'effectuer des ajustements budgétaires ou bien s'il a déjà fait recours à tous les ajustements possibles, alors il risque une insolvabilité qui pourrait déboucher sur une crise des finances publiques qui se résout soit par défaut (répudiation de la dette) soit par monétisation de la dette.

C) Soutenabilité vs solvabilité

Comme on l'a déjà annoncée, la soutenabilité correspond à la situation d'un Etat dont la solvabilité est assurée sans qu'il y ait particulièrement besoin d'ajuster sa politique budgétaire dans l'avenir. La distinction entre les deux termes réside dans le fait que l'Etat peut faire appel à un ajustement budgétaire ou pas. La solvabilité s'intéresse plutôt à un « bilan de santé financière » d'un Etat et à la capacité de remboursement en prenant en compte toutes les corrections éventuelles. Alors que la soutenabilité vérifie la cohérence de la politique budgétaire pratiquée. Par ailleurs, une politique peut être qualifiée de non soutenable et solvable à la fois. En effet, tant que le gouvernement peut procéder à des ajustements budgétaires, la solvabilité demeure intacte. En revanche, si l'insoutenabilité persiste alors la

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solvabilité devient de plus en plus limitée jusqu'à ce qu'elle disparaisse complètement. En résumé, l'absence de soutenabilité des finances publiques n'est pas synonyme d'une impasse budgétaire mais traduit la nécessité d'un ajustement fiscal considérable dans le but de respecter la contrainte budgétaire inter-temporelle.

A partir de cette distinction et en faisant la liaison avec ce que nous avons dit à propos de la condition de transversalité, nous pouvons tirer une conclusion importante. En effet la condition de transversalité est plus pertinente lorsqu'on raisonne d'un point de vue solvabilité. Tant que l'Etat a les moyens d'ajuster sa politique fiscale et de garantir de nouveaux impôts futurs alors la condition de transversalité est respectée. Par contre, la condition de soutenabilité est plus dédiée à juger de la politique budgétaire suivie à un moment donné. Elle exige la cohérence de la politique présente indépendamment des potentiels fiscaux susceptibles d'améliorer la situation. Pour mieux décrire cette soutenabilité budgétaire.

2.1.4. La politique budgétaire soutenable

Nous avons énoncé auparavant que la contrainte budgétaire inter-temporelle signifiait qu'une dette présente doit pouvoir être remboursée par des surplus futurs. Par conséquent, une politique budgétaire est dite soutenable si l'apparition de ces surplus ne nécessite aucun changement important de l'évolution des recettes ou des dépenses. Autrement dit, on affirme qu'une politique budgétaire est soutenable lorsqu'elle parvient à couvrir la dette actuelle par des surplus futurs sans changement majeur sans ajustement fiscal significativement plus important que ceux constatés par le passé. En plus, une politique budgétaire soutenable ne doit pas conduire à une accumulation excessive de la dette publique et exclut tout recours à un « jeu à la ponzi ».

La soutenabilité caractérise donc une politique budgétaire particulière du gouvernement, ainsi que ses répercussions futures. En raisonnant sur une période assez longue, on qualifie des finances publiques de soutenables lorsqu'elles sont acheminées par des politiques budgétaires soutenables. Pour évaluer donc une finance publique d'un Etat donné, il faut analyser les politiques budgétaires menées sur une période assez longue. Cela signifie qu'on doit observer et caractériser les résultats observés des politiques mises en oeuvre au cours de cette période. Une fois on a conclut que les politiques budgétaires appliquées étaient soutenables, il devient équivalent de parler de soutenabilité budgétaire ou de soutenabilité de la dette publique.

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2.2. SYNTHESE DES TRAVAUX ANTERIEURS

2.2.1. L'approche type « contrainte de la solvabilité intertemporelle »

Cette approche présente l'approche standard qui repose sur la « contrainte de solvabilité intertemporelle de l'Etat » pour évaluer la soutenabilité de la politique budgétaire et aussi expose les limites. La soutenabilité de la politique budgétaire est définie par le respect de la contrainte budgétaire intertemporelle de l'Etat. Pour cela, la dette courante doit être inférieure ou égale à la valeur présente des surplus futurs primaires (condition de transversalité). Cette condition a pour corollaire la nullité de la valeur actualisée de la dette à l'infini qui assure que l'Etat ne joue pas à des jeux de Ponzi pour financer sa dette. Cette approche est sujette à un certain nombre de limites. Elle fait l'hypothèse irréaliste d'un taux d'actualisation constant de la dette. Ainsi l'analyse de la soutenabilité de la politique budgétaire et celle de la cohérence des différents objectifs macroéconomiques commence par la spécification de la contrainte d'endettement du secteur public qui lie l'évolution des passifs de ce secteur au surplus primaire.

A) la contrainte d'endettement du secteur public

Considérons la contrainte d'endettement du secteur public consolidé (gouvernement et banque centrale) et définissons le surplus primaire du secteur public à la période t comme la différence entre les revenus totaux du secteur public Tt et ses dépenses totales Gt nettes des intérêts :

????? = ?? - ?? (1)

Les valeurs négatives de SURPt représentent le déficit primaire. L.'hypothèse est faite que la dette publique extérieure, Bt, supportent un taux d'intérêt nominal it. La contrainte d'endettement du secteur public devient alors :

?? = (1 + ??) ???? - ????? (2)

Pour plus de commodité, la dette est réécrite en termes réels, en la divisant par le niveau des

prix Pt. En posant ??

???? = (1 + ?? ) avec ?? le taux domestique d.'inflation entre t et ? - 1 ,

nous obtenons :

?? = (1 + ??) ?????? - ?????

?? = (????) ????

(???? )???? - ????? ?? (3)

??

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L'équation (3) peut se réécrire de manière plus compacte. Les caractères minuscules représentent les variables exprimées en termes réels :

bt = ( 1 + n)bt_1 - SURPt (4)

n est le taux d.'intérêt réel domestique sur la dette avec n = 1+Lt 1 La contrainte

t

d.'endettement du gouvernement en (4) décrit la dynamique d.'accumulation de la dette5. B) La condition de solvabilité intertemporelle

La contrainte budgétaire de l'Etat a une dimension intertemporelle. Pour déterminer celle-ci et la condition de solvabilité intertemporelle qu'elle implique considérons la contrainte d.'endettement en termes réels du gouvernement. L'équation (4) peut être réécrite :

(4')

bt+SurPt

bt_1 = 1+rt

1??

En résolvant cette équation dans le futur pour N périodes et en faisant l'hypothèse simplificatrice que le taux d'intérêt réel est constant, on obtient :

bt_1 =

EN SurPt+j

+ bt+N

J-0 (1+n) j+1 (1+rt)t+N (5)

L'hypothèse de taux d.'intérêt réel constant est faite ici par souci de simplicité. A ce stade, la condition de « Non jeu de Ponzi » (NPJ) impose que :

li bt+N ( )

fY1n~8 (1+rt)t+N 6

5 - Si le gouvernement a un surplus primaire qui est nul (SURPt = 0), alors le stock de dette réelle croît à un taux égal au taux d.'intérêt réel : Lbt = nbt_1

- Si le gouvernement a un déficit primaire (SURPt < 0), le stock de la dette croîtra à un taux excédant le taux d.'intérêt réel.

- Si le gouvernement a un surplus primaire (SURPt > 0), le stock de la dette croîtra moins vite que le taux d.'intérêt réel. Si le surplus primaire couvre plus que les paiements d.'intérêts, le stock de la dette se réduit au cours du temps.

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Cette condition impose que la valeur présente de la dette gouvernementale dans un futur indéfini converge vers zéro. Pour que ceci arrive, la dette réelle b au numérateur doit croître moins vite que le taux d'intérêt réel r (qui est le taux de croissance du facteur d.'actualisation). La condition de non jeu de Ponzi (NJP) est souvent justifiée par le fait que probablement les prêteurs ne permettront pas au gouvernement de rembourser ses dettes par de nouveaux emprunts. S'ils le faisaient, l'équation (4) montre que la dette à ce moment là, croîtrait à un taux égal au taux d'intérêt réel. Par conséquent la dette actualisée en (6) ne convergerait pas vers zéro. En faisant l'hypothèse que la condition NJP (équation 6) est satisfaite, à partir de l'équation (5) on déduit que la valeur de la dette gouvernementale à chaque point du temps doit être égale à la valeur présente des ses surplus primaires anticipés :

???? = ? ???????

??? (7)

8

(???)???

Cette condition, aussi appelée condition de transversalité, définit la contrainte de solvabilité du gouvernement. Notons que le taux d'intérêt réel doit être positif pour que la valeur présente des surplus futurs soit finie.

C) Une généralisation de la contrainte de solvabilité intertemporelle pour un environnement stochastique

Bohn (1995) a réexaminé les fondements théoriques de la soutenabilité de la politique budgétaire en plaçant celle-ci dans un cadre d'équilibre général stochastique. Son analyse a été motivée par une observation empirique. Les taux d'intérêts sur les bons du trésor américain on été historiquement en dessous du taux de croissance moyen de l'économie américaine. Dans un cadre déterministe, de tels niveaux de taux d'intérêts auraient indiqué une inefficience dynamique6. Cependant dans un cadre stochastique l'efficience dynamique dépend des relations entre le taux de croissance de l'économie et le taux d'intérêt du capital

6 L'inefficience dynamique caractérise l'état d.'une économie dans laquelle à l'état stationnaire il y a trop de capital (Diamond 1965). L'économie investit plus qu'elle ne gagne. Pour mesurer l'efficience dynamique on peut comparer la productivité marginale du capital ou les taux de rendements des actifs peu risqués au taux de croissance de l'économie. Quant ceux-ci sont inférieurs au taux de croissance de l'économie, l'économie est dynamiquement inefficiente. Abel (1998) montre que dans un environnement stochastique la mesure la plus appropriée est la comparaison du taux d'intérêt du capital risque au taux de croissance de l'économie. Car le risque le plus important supporté par les agents n'est pas la baisse de leurs dividendes, mais la chute de la valeur de leur actifs (baisse des prix des actifs si l'anticipation des rendements futurs baisse).

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risque. Par ailleurs Abel et al (1989) ont démontré par une analyse empirique que l'économie américaine était dynamiquement efficiente. L'association de taux d'intérêts faibles et d.'une économie dynamiquement efficiente pose un certain nombre de questions. Le gouvernement peut-il financer son déficit par jeu de Ponzi ? D'autre part, l'efficience dynamique suggère que celui-ci ne peut pas jouer à un jeu de Ponzi. Bohn prétend que le cadre théorique de l'étude de la soutenabilité est trop simple et inapproprié. Les contraintes de solvabilité et les conditions de non jeu de ponzi doivent dériver d'un cadre stochastique.

Aussi il utilise un modèle d'évaluation des actifs contingents (contigent claim) à la Lucas (1978) avec un nombre discret d'états de la nature pour chaque période future. Ainsi le gouvernement doit satisfaire un ensemble de conditions de non jeu de Ponzi (ou de manière équivalente un ensemble de conditions de transversalité). Ces conditions empêchent le financement par jeu de Ponzi pour chaque état de la nature possible. Les politiques budgétaires qui satisfont ces contraintes seront qualifiées de soutenables. En faisant l'hypothèse que tous les individus sont identiques et en se servant des conditions de premier ordre des modèles de contigent claims, Bohn formalise la contrainte budgétaire intertemporelle du prêteur représentatif comme suit :

(1 + ?)?? - 1 = ?7?? ??(?? + ? ???????) + lim??o, ??[(?? + ? + (1 + ? + ?)?? + ???]

(8)

Avec, ?? + ? = ?'?'(?? + ?)/?'(??) le taux marginal de substitution intertemporel du prêteur entre la période t et la période t+j ; ? le taux d'actualisation subjectif de la fonction d'utilité de l.'agent représentatif ; (1 + ?)?? - 1 la richesse du prêteur (celle-ci inclut les paiements d'intérêt entre t-1 et t). La condition de transversalité requiert que la valeur présente des passifs futurs du gouvernement qui correspond au second terme de l'équation (8) tende vers zéro lorsque N tend vers l'infini.

lim??o, ??[(?? + ? + (1 + ? + ?)?? + ???] (9)

La contrainte de solvabilité qui en résulte s.'écrit alors :

(1 + ?)?? - 1 = ?7?? ??(?? + ? ???????) (10)

Les équations (9) et (10) sont différentes des équations (6) et (7) en ce sens qu'elles utilisent le taux marginal de substitution intertemporel au lieu du taux d'intérêt réel sur la dette gouvernementale. Contrairement à la pratique généralisée dans la littérature, les facteurs

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d'actualisation de la dette gouvernementale, des dépenses gouvernementales et des taxes dépendent de la probabilité de distribution de ces variables dans différents états de la nature. Aussi les conditions de non jeu de ponzi ou les conditions de transversalité ne peuvent être actualisées avec des taux d'intérêts fixes que dans des cas bien précis. Actualiser correctement ces contraintes est important. Une mauvaise spécification des taux d'actualisation peut aboutir à des résultats erronés en ce qui concerne la soutenabilité de la politique budgétaire. Cette généralisation de la contrainte d'endettement pose ainsi le problème de l'actualisation de la dette par des taux d.'intérêts supposés constants.

D) La possibilité de jeux de Ponzi rationnels

La politique budgétaire est contrainte par la nécessité de financer les déficits. Virtuellement, n'importe quel déficit serait soutenable s'il était possible de payer les intérêts de la dette en empruntant de manière indéfinie. La contrainte de solvabilité intertemporelle se fonde sur l'impossibilité de financer la dette par jeu de Ponzi. Dans la littérature, un tel financement n'est possible dans un cadre déterministe que si l'économie est dynamiquement inefficiente, c'est à dire lorsque les taux d'intérêts de long terme sur la dette publique sont inférieurs au taux de croissance de l'économie [voir Diamond (1965), Gale (1983), Tirole (1985)]. Dans le cas des économies dynamiquement efficientes, Mc Callum (1984) montre qu'avec des prêteurs rationnels et une population constante, le financement par jeu de Ponzi est impossible car la condition de non-jeu de Ponzi dérive de la maximisation de l'utilité du prêteur.

Il existe cependant un certain nombre de situations où le financement par jeux de Ponzi est possible. O' Connell et Zeldes (1988) montrent que des jeux de Ponzi rationnels sont possibles dans une économie avec une population croissante et en l'absence d'altruisme intergénérationnel. Le fait que chaque individu satisfasse sa propre condition de transversalité ne suffit pas à empêcher l'existence de jeux de Ponzi. Même si la richesse de chaque individu ne croît pas plus vite que l'inverse du facteur d'actualisation de la dette, la croissance démographique (au taux n) rend possible le fait que la richesse agrégée puisse croître à un taux égal ou supérieur au taux d'intérêt réel. Ils notent aussi que le fait que les emprunteurs jouent à des jeux de Ponzi n'implique pas forcément que les prêteurs soient lésés. Dans leur modèle, les jeux de Ponzi rationnels sont possibles dans une économie dynamiquement inefficiente, avec des agents à horizon de temps infini, mais dont l'équilibre est sous optimal au sens de Pareto.

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Dans cette situation l'introduction de jeux de Ponzi n'empire pas la situation de l.'économie prêteuse, mais l'améliore relativement à une situation sans jeux de Ponzi. Les conditions de transversalité des individus impliquent que si la population croît au taux n, la dette gouvernementale doit croître à un taux inférieur à (r + n) et non à (r) comme l'indique la condition NJP standard. La condition de transversalité d'un prêteur dans une économie avec une population croissante s'écrit comme suit :

??

lim??8 (???) ? (???)? =0 (11)

?? est le stock agrégé de dette et ??

(???)? est le stock de dette par habitant. Pour satisfaire les

conditions de transversalité de tous les prêteurs de l'économie, le Gouvernement doit s'assurer que le stock de dette par habitant croît moins vite que le taux d'intérêt (r). Normaliser la dette par le PIB n'a aucune influence sur la condition de transversalité et la condition non-jeu de Ponzi, comme l'a montré Cuddington (1997). Blanchard et Weil (1992), montrent que des jeux de Ponzi sont possibles dans un cadre stochastique si l'équilibre concurrentiel est sous optimal au sens de Pareto, car celui-ci, ne parvient pas à garantir un altruisme intergénérationnel. Buiter et Kletzer (1992) dans le cadre d'un modèle à générations imbriquées montrent quant à eux que le financement par jeu de Ponzi est possible indépendamment des relations de long terme entre le taux d'intérêt et le taux de croissance de l'économie. Si le gouvernement n'est pas limité dans le choix de ses instruments fiscaux, c'est à dire s'il peut choisir librement le montant de ses impôts forfaitaires, il n'est pas soumis à une contrainte de solvabilité intertemporelle et peut pratiquer des jeux de Ponzi. Leur démonstration repose sur la spécification de la faisabilité des plans fiscaux d'un gouvernement à horizon de temps infini, faisant face à une infinité d.'agents à horizon de temps fini, sans altruisme intergénérationnel. La faisabilité des plans fiscaux du gouvernement est spécifiée par des contraintes sur les séquences possibles de taxes, de transferts, de dette publique et de dépense publique. Ces contraintes dérivent de la nécessité que le stock de capital privé, la consommation privée de chaque génération et la consommation du gouvernement soient non négatifs à chaque période. En d'autres termes, la faisabilité des plans fiscaux d'un gouvernement à horizon de temps infini découle des restrictions bien comprises que la contrainte de solvabilité impose à chacune des séquences infinies de l'horizon de temps fini des ménages. Dans l'horizon de temps infini du modèle à générations imbriquées, les contraintes de faisabilité peuvent coïncider avec des plans fiscaux qui ne satisfont pas la contrainte standard de solvabilité intertemporelle. Aussi, lorsque la possibilité

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de recourir à des impôts forfaitaires est restreinte, les jeux de Ponzi sont non seulement possibles mais essentiels car ils permettent aux gouvernements de supporter des allocations d'équilibre concurrentiel qu'il n'aurait pas pu supporter autrement.

E) La contrainte de solvabilité et le ratio dette sur FIB

Un élément important est que la contrainte de solvabilité n'implique que de faibles restrictions sur la politique budgétaire et notamment sur la taille du ratio dette sur PIB. En reprenant notre condition de non jeu de Ponzi (équation 6), on observe que tout ce qui est requis pour que la contrainte de solvabilité intertemporelle soit respectée est que le numérateur (c'est à dire le stock de la dette) croisse moins vite que le dénominateur (le taux d'intérêt réel). Si le dénominateur croît plus vite que le numérateur ceci implique qu'à l.'infini, notre ratio s'annule. En effet si la dette croît moins vite que le taux d.'intérêt réel, la contrainte de solvabilité est respectée. Cependant, le taux de croissance de la dette (k) peut être inférieur au taux d.'intérêt réel (r) tout en étant supérieur au taux de croissance de la production (g). Dans ce cas (r>k>g), la contrainte de solvabilité est respectée alors que la dette croît plus vite que les ressources nécessaires à son remboursement (le ratio dette sur PIB croît sans limites). Lorsque (r>g), borner le ratio dette sur PIB est un critère plus fort que la contrainte de solvabilité intertemporelle. D'autre part, si le ratio dette sur PIB est borné, le taux de croissance de la dette sera au plus égal au taux de croissance du PIB. Le taux d.'intérêt réel étant supérieur au taux de croissance du PIB, la contrainte de solvabilité est ainsi respectée.

En pratique, la taille du ratio dette / PIB peut avoir une influence importante sur la perception du secteur privé de l'engagement du gouvernement à faire face à sa contrainte budgétaire intertemporelle, ainsi que sa capacité à le faire. Cette perte de crédit peut se traduire par des taux d'intérêts plus élevés. En outre, plus le ratio de l'encours de la dette à la production est grand, et plus longtemps les mesures appropriées de politiques économiques sont différées, et plus grande sera l'ampleur du surplus primaire nécessaire à satisfaire la contrainte de solvabilité. Parce que les gouvernements sont confrontés à une limite de la charge de l'impôt qu'ils peuvent imposer aux citoyens (notamment à cause des effets défavorables sur l'incitation et la distribution de revenus), ils font face à une contrainte de faisabilité sur le montant de revenu qu'ils peuvent lever (Spaventa, 1987).

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F) Borner le ratio dette sur PIB

Aussi Buiter et Kletzer tentent de dériver la contrainte de solvabilité d'un cadre théorique qu'ils estiment mieux approprié que les modèles théoriques standard qui partent de la contrainte de financement du gouvernement. Ils imposent des contraintes raisonnables et suffisantes aux taxes et aux transferts pour que leurs contraintes de faisabilité impliquent la contrainte de solvabilité intertemporelle standard. Ils avancent l'idée que l'analogie souvent faite avec le cas en horizon fini est potentiellement source d'erreurs. Il n'est pas évident de spécifier quelles sont les restrictions raisonnables que l'on peut imposer aux stratégies d'endettement d'un gouvernement à horizon de temps infini, faisant face à une séquence infinie de générations imbriquées avec des horizons de temps finis, dans une économie sans date terminale [voir Shell (1971) et Wilson (1981)]. Ces auteurs montrent par ailleurs qu'en présence de taxes distorsionnaires (ce qui représente le cas le plus fréquent), leurs contraintes de faisabilité sont plus restrictives que la conventionnelle contrainte de solvabilité. Elles impliquent un ratio de la dette aux ressources physiques borné. Dans ce cas la contrainte de solvabilité intertemporelle est une condition nécessaire mais pas suffisante de la faisabilité de leurs plans fiscaux. Crettez, Michel et Wigniolle (2000) se posent aussi la question de savoir comment la capacité d'endettement du gouvernement est limitée par sa capacité à taxer dans le cadre d'un modèle à générations imbriquées et arrivent à la même conclusion que les auteurs précédents. Lorsque le gouvernement n'est pas restreint dans ses choix d'impôts forfaitaires, aucune contrainte budgétaire intertemporelle ne pèse sur lui. Lorsqu'il existe des contraintes sur les impôts que l'Etat peut lever, Wigniolle, Crettez et Michel (2000) montrent qu'un équilibre intertemporel existe pourvu qu'une contrainte sur la dette soit vérifiée. Cette contrainte s'énonce ainsi : à chaque date le volume de la dette ne doit dépasser ni la valeur du PIB courant, ni la valeur actualisée du PIB de la période suivante. Lorsque la limite de la valeur actualisée du PIB est nulle, ces auteurs montrent que la condition dette-PIB implique la réalisation de l'équilibre budgétaire intertemporel. De plus, il est impossible de pratiquer un jeu de Ponzi.

Il ressort globalement de cette section que la notion généralement retenue de contrainte de solvabilité intertemporelle souffre de deux limites importantes. Pour assurer la solvabilité du gouvernement, elle assure que celui-ci ne joue pas à des jeux de Ponzi. O.' Connell et Zeldes (1988), Blanchard et Weil (1992), Buiter et Kletzer (1992) et Crettez, Wigniolle et Michel (2000) ont montré que dans certaines situations, notamment lorsque la population est

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croissante, lorsque l'on est dans un environnement stochastique, ou lorsque la possibilité de recourir à des impôts forfaitaires est restreinte, les jeux de Ponzi étaient non seulement possibles, mais essentiels, car ils améliorent l'équilibre concurrentiel au sens de Pareto. Par ailleurs la contrainte de solvabilité n'impliquait dans certaines situations que de faibles restrictions sur la politique budgétaire. Borner le ratio dette sur PIB est une contrainte plus forte qui implique aussi le respect de la condition de solvabilité. Dans notre étude de la soutenabilité des finances publiques du Tchad nous retiendrons cette dernière comme définition de la soutenabilité.

2.2.2. Revue des tests empiriques sur la soutenabilité

Les tests économétriques trouvent leur origine dans les premières recherches effectuées par quelques économistes surtout lorsque la crise de l'endettement a pris de l'ampleur dans les pays du tiers monde.

Les premières analyses économétriques ont été effectuées en 1986 par Hamilton et Flavin. Ces deux économistes ont abordé la soutenabilité de la politique budgétaire américaine à travers une perspective stochastique. Ils sont les premiers à tester empiriquement le respect de la contrainte budgétaire inter-temporelle de l'Etat américain en faisant recours à des tests de stationnarité (ADF) aux séries de dette et de solde primaire sur la période (1960-1984). Ils considéraient que la soutenabilité de la politique budgétaire signifiait la stabilité de cette dernière. Leur test de soutenabilité reposait donc sur la stationnarité de la dette et du déficit primaire. A terme de leurs travaux de recherches, ils ont conclut que la politique budgétaire américaine était soutenable.

Par ailleurs, les travaux de Hamilton et Flavin étaient critiqués par Kremers (1988) dans la mesure où leur régression manquait de retards et n'éliminait pas l'autocorrélation des résidus. Il a mis en cause également le choix du taux d'actualisation qui se basait sur un taux réel. Pendant, la même année Wilcox (1988) a repris la méthode de Hamilton et Flavin mais en introduisant le taux constant comme taux d'actualisation. Il a fini par donner une conclusion contraire à celle donnée par Hamilton et Flavin à savoir la non stationnarité de la dette américaine.

Les troisièmes et quatrièmes études empiriques ont été élaborées par Trehan et Walsh (1988). Ils ont introduit les tests de cointégration des séries. Ils ont appliqué ces tests sur les séries dette et déficits primaires aux Etats-Unis de 1964 à 1984, et ont fini par conclure que la

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politique budgétaire américaine était non soutenable. Par contre, leurs études ne se sont pas arrêtées à ce niveau, ils ont entamé une nouvelle étude empirique en 1991 sur la même période mais en remplaçant l'ancien taux d'actualisation constant par un taux d'actualisation variable qui leur a permis cette fois de conclure quant à la soutenabilité de la politique budgétaire.

La cinquième technique économétrique d'analyse de la soutenabilité de la dette publique a été avancée par Hakkio et Rush (1991). Ils affirmaient que l'existence d'une relation de cointégration entre les recettes et les dépenses totales est une condition nécessaire et suffisante à la soutenabilité. Malgré cela, ils ont fini par rejoindre Kremers (1988) et Trehan et Walsh (1988) en affirmant que la politique budgétaire américaine était non soutenable entre 1960 et 1984.

Ces tests de cointégration sont une sorte de généralisation des tests de stationnarité des séries de dette et solde primaire. La cointégration des recettes aux dépenses totales sous entend l'existence d'une combinaison linéaire stationnaire entre ces deux variables. Autrement dit, la relation de long terme entre les recettes et les dépenses est stable en moyenne. La première à avoir profité des travaux de Hakkio et Rush est Carmela Quintos (1995). Elle a repris leurs travaux en introduisant une nouveauté à savoir la distinction entre la soutenabilité forte et la soutenabilité faible. Elle qualifie la relation de cointégration entre recettes et dépenses de soutenabilité forte lorsque le coefficient entre les deux variables est unitaire. Autrement dit, une soutenabilité forte signifie que les recettes et les dépenses s'ajustent complètement. Dans ce cas, il y a une forte présomption de la stationnarité de la série des déficits. En revanche, Quintos qualifie cette relation de soutenabilité faible lorsque le coefficient de cointégration est compris entre 0 et 1. En d'autres termes, les recettes évoluent dans le même sens que les dépenses mais de moindre amplitude. Dans cette situation, la série des déficits n'est plus nécessairement stationnaire.

Les travaux de Hakkio et Rush (1991) et de Quintos (1995) ont été largement critiqués respectivement par Wickens et Uctum (1993) et par Hénin (1996). Ces auteurs s'opposent à l'idée que les tests de cointégration soient une généralisation plus flexible du test de stationnarité du solde global. Ils disent que le principal intérêt des tests de cointégration est de donner une estimation du coefficient de couverture des dépenses par les recettes. Dans son article « Soutenabilité des déficits et ajustements budgétaires » Pierre-Yves Hénin (1996) affirme que : « ...la cointégration n'est ni nécessaire à la soutenabilité brute, ni suffisante à la

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soutenabilité nette. Son intérêt est donc essentiellement de fonder une estimation convergente du coefficient de couverture des dépenses par les recettes quand ces variables sont elles-mêmes non stationnaires. » . Il partage également avec Wickens et Uctum le fait que la stationnarité ne signifie pas une couverture directe des dépenses par les recettes, mais plutôt une couverture suffisante de la charge de la dette par le solde primaire. Par ailleurs, les notions de soutenabilité forte et faible sont également discutables dans la mesure où elles n'empêchent pas le ratio dette sur PIB d'atteindre des niveaux très élevés.

Notons enfin, que Bohn (1995) partageait également ces critiques et a proposé un test de cointégration différent des précédents. Sa stratégie consistait à tester la soutenabilité en étudiant la relation de cointégration entre le solde primaire et le stock de la dette.

Pour bien distinguer les disparités et les similitudes qui existent entre ces différents tests, nous allons les regrouper dans un tableau qui récapitule les différentes techniques économétriques d'analyse de la soutenabilité de la dette publique.7

A partir de ces différents types de tests et en étudiant les spécificités de chacun d'entre eux, nous pouvons dégager quelques enseignements sur la soutenabilité de la politique budgétaire :

" Premier enseignement : Lorsque le taux d'intérêt est supposé constant, la stationnarité du déficit public global est une condition nécessaire et suffisante à la soutenabilité. Par contre, elle est seulement suffisante lorsque le taux d'intérêt est supposé variable. Quant à la stationnarité du déficit primaire, elle n'est pas pertinente pour juger de la soutenabilité ; elle n'est ni nécessaire ni suffisante.

" Deuxième enseignement : Dans le cas où le taux d'intérêt est variable, la stationnarité du déficit global est équivalente à l'existence d'une relation de cointégration entre les recettes et les dépenses totales (charges d'intérêts incluses).

" Troisième enseignement : Lorsque le taux d'intérêt est supposé constant, la soutenabilité peut être justifiée par la présence d'une relation de cointégration entre le déficit primaire et la dette publique. Par ailleurs, si le taux d'intérêt n'est pas constant la cointégration entre ces deux séries n'est pas une preuve sure de la soutenabilité.

Enfin et depuis les travaux de Pierre-Yves Hénin et Garcia (1998), toutes les études de soutenabilité se sont focalisées sur les tests de stationnarité du ratio de la dette et du déficit

7 Annexe 2

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global, mais également sur les tests de cointégration entre les recettes et les dépenses totales. Nous allons donc présenter graduellement les critères proposés de la soutenabilité de la dette, ainsi que les tests économétriques les plus souvent utilisés.

A) Les critères et les types de soutenabilité économétrique

Il y a deux types de soutenabilité qui sont souvent évoqués et prouvés par les études empiriques : la soutenabilité « forte » et la soutenabilité « faible ». Cette distinction est née à partir d'un examen de la relation de long terme entre les dépenses et les recettes publiques. Autrement dit, ces notions correspondent à différents cas de figure concernant la relation entre dépenses et recettes et la dynamique du déficit. D'ailleurs c'est l'économiste américaine Carmela Quintos qui a développé ces concepts en 1995 dans son article « Sustainability of the Deficit Process with structural shifts ». Son travail consiste plus précisément à étudier s'il existe ou non une combinaison de ces deux variables qui soit stationnaire à long terme c'est-à-dire stable en moyenne. Cette relation de long terme se fonde sur cette expression :

?? = ? + ?.?? + ??

Avec

Tt : recettes totales

Gt : Dépenses budgétaires + charge de la dette

?? : Terme aléatoire

? : Constante

C'est cette expression qui permet de mettre en évidence les 3 cas de figure de la soutenabilité mentionnés par Quintos. Nous aborderons donc en premier lieu la soutenabilité forte suivie de la soutenabilité faible et enfin l'absence de soutenabilité.

A1. La soutenabilité forte

Le cas de la soutenabilité forte correspond au cas particulier où le coefficient ? de cointégration entre ces deux variables (régression des recettes sur les dépenses) est unitaire. En effet si ? est égal 1 alors le déficit public ( ???? ?? - ?? ) est égal à -? - ? .

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La différence entre recettes et dépenses est alors stationnaire et fluctue autour d'un niveau moyen constant. Ce constat est équivalent à la stationnarité de la série des déficits. Carmela Quintos (1995) affirme que tant que les recettes et les dépenses s'ajustent complètement, le signe de (?) n'a aucune importance sur la connotation « forte » de la soutenabilité. Quant au ratio de dette/PIB, il suit en moyenne une tendance linéaire à la hausse ou à la baisse.

D'après Quintos (1995), la soutenabilité demeure forte même si le ratio d'endettement suit une marche aléatoire ascendante. En effet, tant que le coefficient d'actualisation de la condition de transversalité reste supérieur à la dynamique du déficit, celle ci (la condition de transversalité) demeurera respectée.

A2. La soutenabilité faible

Le cas de la soutenabilité faible correspond au cas où le coefficient ? de cointégration entre recettes et dépenses est compris entre 0 et 1. Cette valeur positive du coefficient signifie que les deux variables évoluent à long terme dans la même trajectoire. Plus précisément, les recettes évoluent dans le même sens que les dépenses dans le temps mais avec une amplitude moindre. Dans ce cas, la série des déficits n'est plus nécessairement stationnaire.

D'après Quintos (1995), le ratio d'endettement empruntera une marche aléatoire progressive plus accentuée que lorsque les recettes et les dépenses sont parfaitement cointégrées. Toutefois la condition de transversalité serait toujours vérifiée pour la même raison signalée précédemment.

Par conséquent, étudier la cointégration entre les recettes et les dépenses revient à effectuer des tests de stationnarité directement sur la série des déficits.

A3. L'absence de soutenabilité

Finalement, s'il n'existe pas de relation de cointégration alors certainement il n'y a pas un lien à long terme entre recettes et dépenses. Cette situation correspond à l'inexistence de soutenabilité. Le déficit public serait de plus en plus creusé. Le ratio d'endettement suivra une allure exponentielle. La condition de transversalité ne serait pas donc respectée vu que le dégagement de surplus futur serait plus pénible à réaliser.

Par ailleurs, ces notions de soutenabilité supposent la stabilité du taux d'actualisation (écart entre le taux d'intérêt et le taux de croissance). Ce qui peut parfois être mis en cause car

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Tchad

l'évolution du ratio d'endettement pourrait avoir une incidence sur ce paramètre. Ceci n'empêche pas de faire recours à ces notions à condition de les utiliser avec beaucoup de prudence.

Voici donc un récapitulatif des types de soutenabilité utilisés par la littérature récente et classés selon les propriétés de la relation entre dépenses et recettes :

Tableau 2 : types de soutenabilité

Coefficient /3

Cointégration

Evolution des ratios

Type

soutenabilité

de

Déficit/PIB

Dette/PIB

 

/3

=

1

 

Oui (les recettes et les

dépenses s'ajustent
complètement)

Ratio stationnaire

(stable en
moyenne)

Marche aléatoire

autour d'une

tendance linéaire

Soutenabilité forte

 

0

<

/3

<

1

Oui (les recettes et les

dépenses s'ajustent
partiellement)

Ratio non

nécessairement stationnaire

Combinaison de

deux tendances

stochastiques

(recettes et
dépenses

Soutenabilité faible

 
 
 
 
 

-

Non

Ratio non

nécessairement stationnaire

Allure imprévisible

Absence soutenabilité

de

Source : Auteur

B) Des approches alternatives

Une approche alternative qui évite les limites évoquées plus haut consiste à examiner la propriété de retour à la moyenne de la dette. Celle-ci revient-elle vers sa tendance déterministe après un choc ? Wickens et Uctum (1993) et Bohn (1998) montrent que cette propriété est satisfaite pour la dette publique américaine. Fève et Hénin (1998) retiennent comme critère de soutenabilité la stationnarité du ratio dette sur PIB. Ils proposent une approche (feedback augmented Dickey et Fuller) qui teste conjointement la stationnarité du ratio dette et la correction du déficit primaire en réponse à un stock de dette hérité. Ce test permet d'une part, d'éviter les problèmes liés à la faible puissance des tests de racine unitaire classiques lorsque l'échantillon est faible ou lorsque l'on est en présence d.'une quasi racine unitaire, et d'autre part, renforce le critère de soutenabilité retenu. Selon eux, la stationnarité

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 38

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 39

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Tchad

du ratio dette PIB est une condition nécessaire mais pas suffisante de la soutenabilité. Une condition suffisante de la soutenabilité impose des contraintes additionnelles à la moyenne et à la variance de la dette publique. Les équations auxiliaires associées à leur test FADF assurent que le solde primaire réagisse positivement en présence d'un choc de dette.

? Les tests de soutenabilité pour les pays en voie de développement

Le cadre théorique couramment utilisé pour les pays industrialisés n'est pas forcément pertinent pour les pays en voie de développement. L'importance des revenus du seigneuriage, le caractère concessionnel de la dette, le volume important des dons, sont autant de sources de financement des déficits qui ne sont pas prises en compte dans la plupart des modèles théoriques.

Lorsque les revenus du seigneuriage sont pris en compte, le surplus primaire peut être défini

comme suit : Surpt = Tt - Gt + rct ?? avec ? la base monétaire réelle.

?? ?

Dés que la possibilité de monétisation de la dette est introduite, une politique budgétaire qui implique des déficits budgétaires plutôt que des surplus. La plupart des pays en voie de développement reçoivent un volume important de dons et de prêts subventionnés. Par ailleurs la dette est souvent renégociée en des termes plus concessionnels. Comment ces sources de financement peuvent-elles être incorporées dans l'analyse de la soutenabilité de la politique budgétaire ? Une des approches serait de modéliser les processus de décisions des institutions internationales qui allouent ces ressources aux pays en voie de développement. Une approche plus empirique serait de faire l'hypothèse que les séries reflétant les financements concessionnels passés vont prévaloir dans un futur indéfini. Aussi ces flux de financement pourrait être intégrés afin d.'obtenir une mesure ajustée de Surpt qui serait utilisée dans les tests de la contrainte de solvabilité. Pour ce qui concerne les prêteurs officiels, ces approches alternatives semblent toutes préférables à l'hypothèse de rationalité des prêteurs et de la condition de transversalité qu'elle implique. Probablement la condition de non-jeu de Ponzi n'est pas applicable aux dons ni à la dette concessionnelle. Pour appliquer des tests de la contrainte de solvabilité en présence de dette concessionnelle, Cuddington (1997), propose de séparer la dette concessionnelle et les dons (qui peuvent être considérés comme une dette concessionnelle à un taux de -100%), de la dette non concessionnelle.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 40

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Tchad

En notant Bi, la dette concessionnelle et ri le taux d'intérêt sur la dette concessionnelle, la contrainte de financement du gouvernement devient :

Bt = (1 + n - 1)Bt_1 - Surpt - Bi + (1 + r1_1)Bi_1

Ici le deuxième terme de l'égalité représente le déficit primaire incluant les flux d'aide et de dette concessionnelle. Une autre spécificité des pays en voie de développement est l'importance de la dette extérieure dans la dette publique. La question serait plus axée sur l'analyse d'une solvabilité extérieure pour plusieurs raisons. La majorité de la dette est libellée en monnaie étrangère d.'une part et d'autre part, la composante interne de la dette publique est assez peu connue. Une caractéristique des pays en voie de développement est l'absence et la difficulté d.'obtention de données longues et fiables permettant d.'appliquer les outils de l'économétrie des séries temporelles dans des conditions satisfaisantes.

Pour éviter le problème lié à l'absence de données longues, Hénin et Fève (1998) ont proposé une nouvelle procédure de tests de la soutenabilité effective de la dette qui exploite l'information apportée par les séries de dette et les séries de solde courant considérées conjointement. Leur approche consiste à associer une équation d'accumulation de la dette à une équation de réaction du solde courant, Bt+1 = (1 + i)Bt - NXt+1 = Bt - CA le compte courant.

Dans leur application, la dette extérieure et le solde sont alternativement normalisés par le PNB et par les recettes d'exportations. L'apport de cette approche bivariée réside dans le gain de précision et de robustesse. D'autre part, elle résout le problème lié à la brièveté de leur échantillon.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 41

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

CHAPITRE III ANALYSE EMPIRIQUE

Les résultats sur la soutenabilité des finances publiques, exposés dans le chapitre II, se fondent généralement sur des constructions théoriques ou sur des constats et vécus dans différents pays. Ainsi l'objectif de ce chapitre est de les confronter aux réalités locales, à travers deux sections. A la section I , nous ferons une analyse descriptive de la soutenabilité des finances publiques au Tchad et dans la section II nous présenterons l'analyse économétrique.

3.1. ANALYSE DESCRIPTIVE DE LA SOUTENABILITE DES FINANCES

PUBLIQUES AU TCHAD

Dans les pays de la zone franc comme le Tchad, le problème de l'équilibre de la balance des paiements est tout à fait secondaire en raison de la garantie monétaire du trésor français qui assure une disponibilité presque illimitée des devises. La question du déficit budgétaire et de son financement par l'emprunt reste en effet l'élément essentiel d'appréciation de la soutenabilité des finances publiques. Ainsi nous analyserons de la viabilité des finances publiques au Tchad sur la période 2000-2010, en nous basant sur les critères élaborés par le FMI et la Banque mondiale dans le cadre de l'initiative PPTE qui conditionnent l'accès ou non d'un pays comme le Tchad aux mécanismes d'allègement de sa dette extérieure. Et également à l'une des critères de surveillance multilatérale de la CEMAC qui obligent le Tchad au respect des critères de convergence.

3.1.1. Analyse de la politique budgétaire

Au Tchad, comme dans la plupart des pays africains, l'exécution du budget est soumise à de lourdes procédures. Par ailleurs, l'inefficacité du contrôle de la conformité aux lois fiscales et l'absence d'un système d'information financière performant, empêchent la production de rapports réguliers et exacts permettant d'établir avec certitude et dans les délais, le niveau annuel du déficit public. Ainsi, pour apprécié le caractère insoutenable du déficit public nous utiliserons l'évolution du solde budgétaire de base. Ce solde est obtenu à partir du Tableau des opérations financières de l'Etat (TOFE) élaboré mensuellement.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 42

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Tchad

Tableau 3 : Evolution du solde budgétaire de base et part des dépenses publiques dans le FIB nominal de 2000 à 2010 (%FIB).

Années

Solde

budgétaire de base =0

Dépense totale/PIB

2000

-2,9

20,3

2001

-2,2

17,4

2002

-3,2

20,8

2003

-1,7

20,8

2004

2,1

23,8

2005

1,1

13,1

2006

3,9

16,5

2007

3,7

20,6

2008

4,9

23,2

2009

-7,9

27,4

2010

-2,8

34,3

Source : Auteur a partir des données du FMI, consultation au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

L'analyse du tableau 4 montre que le solde budgétaire de base a une évolution en dent de scie : Elle est négatif sur la période pré exploitation (2000 -2003) cela est du a un faible niveau des recettes budgétaires a cette période ; ensuite elle est positive de (2004 -2008) correspondant au meilleur niveau de production avec le prix du baril assez élevé ; avant d'être encore négative (2009-2010). Ce qui nous permet de dire que le solde primaire ne permet pas de faire face à tout au moment à la charge des intérêts de la dette. Néanmoins, ce critère d'équilibre annuel de court terme ne nous permet pas de savoir si la politique budgétaire est sur une trajectoire soutenable en permanence car il ne prend pas en compte les vulnérabilités et chocs susceptibles de remettre en cause cet équilibre. En effet, la primauté des résultats comptables de court terme sur les objectifs économiques à moyen terme fait souvent perdre de vue que la réalisation d'un excédent budgétaire peut très bien s'accommoder d'un déficit structurel, c'est-à-dire le déficit budgétaire corrigé d'éléments ponctuels et temporaires ou des variations cycliques. Dans le cas du Tchad, une bonne approximation du déficit structurel est donnée par le solde primaire hors pétrole dont

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 43

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Tchad

l'évolution rapportée au PIB hors pétrole donne une meilleure idée du caractère soutenable ou non des comptes de l'Etat à moyen terme.

Tableau 4 : Evolution du déficit structurel entre 2000 et 2010

Années

Solde

primaire

HP/PIBHP (%PIB hors pétrole)

2000

-1,9

2001

-1,4

2002

-2,3

2003

-3,2

2004

-3,9

2005

-5,1

2006

-15

2007

-22

2008

-28,1

2009

-17,1

2010

-20,1

Source : Auteur a partir des données du FMI, consultation au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

Le tableau 5 nous illustre l'évolution du déficit primaire hors pétrole qui, dans le cas du Tchad exclut les revenus d'origine pétrolière, est trop tributaires de la conjoncture internationale et du rythme des découvertes de champs. Il n'arrive pas a s'établit au niveau de sa trajectoire d'équilibre de 5% 8et reste sur toute la période négative.

Les recettes non pétrolières du Tchad en pourcentage du PIB hors pétrole sont nettement inférieures à celles des autres pays africains exportateurs de pétrole d'où la nécessité de d'accélérer les reformes pour renforcé la croissance hors secteur pétrolier, tout en réduisant le déficit primaire hors pétrole.

8 Critère utilise par les Economistes au Département Afrique du FMI, notamment dans les travaux de Daniel LEIGH et Jan- Peters OLTERS "Gabon preparing fiscal policies for the post-oil era», IMF Servey, juin 2006

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Tchad

Par ailleurs, pour que la trajectoire de la politique budgétaire soit soutenable il faut que la progression des dépenses publiques soit inférieure en volume à la croissance du PIB réel, à niveau des recettes donné.

Graphique 1 : Evolution comparée de la croissance des dépenses publiques et du FIB

45,0

40,0

35,0

30,0

25,0

20,0

15,0

10,0

-5,0

0,0

5,0

2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010

Taux de croissance (PIB réel) Dépenses totales

Source : Auteur a partir des données du FMI, consultation au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

Or dans le cas du Tchad le graphique figure que les dépenses publiques croient durablement plus vite que la richesse nationale. En moyenne, les dépenses ont progressé d'environ 11,3% de plus que le PIB sur la période d'étude.

Cette progression plus rapide des dépenses par rapport au PIB accentue leur rigidité à la baisse, Cela est dû pour le Tchad par l'expression d'une volonté politique forte sur un nombre sans cesse important des priorités gouvernementales. Ce qui conduit à une sanctuarisation d'une part importante des dépenses publiques. La définition des priorités gouvernementales s'accompagne en effet dans la plupart des cas d'une programmation financière pluriannuelle, source de dépenses nouvelles qui, par effets de cliquet rend incompressible une part de plus en plus importante des dépenses totales et réduit sensiblement les dépenses discrétionnaires sur lesquelles le Gouvernement peut agir

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 44

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Tchad

3.1.2. Analyse de la dette

Dans le cas de la dette du Tchad les indicateurs qui portent sur les stocks renseignent sur le volume des capitaux étrangers générateurs de dette9 dont le pays a bénéficié dans le passé et qui restent dus. Ils mesurent à cet effet le montant de la dette qui devra un jour être remboursé. Ces indicateurs en termes de stocks sont donc sensés fournir une information sur la solvabilité du pays. Les indicateurs qui portent sur les flux permettent de déceler d'éventuels problèmes de liquidité liés au paiement du service de la dette.

A) Indicateurs de solvabilité

Tableau 5 : Les indicateurs de solvabilité de la dette extérieure (%PIB)

Années

Encours dette

totale/PIB

Encours dette

extérieur/PIB

Encours dette

totale /exportation (XBNF)

Encours dette

extérieur/exportat ion (XBNF)

Références

 
 
 
 

PPTE

200%

 

275%

 

CEMAC

70%

 
 
 

2000

74,2

51,1

43,3

302,8

2001

57,6

46,1

49,3

314,6

2002

52,9

47,7

57,8

376,6

2003

49,5

46,2

32,0

188,6

2004

49,5

47,4

12,4

68,2

2005

32,5

27,9

18,2

50,3

2006

28,8

26,5

18,5

49,6

2007

28,9

26,6

18,6

49,8

2008

25,8

23,1

18,4

43,4

2009

34,9

27,2

27,4

66,0

2010

7,6

28,4

28,2

59,0

Source : Auteur a partir des données du FMI, consultation au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

9 Les flux des capitaux non générateurs de dette correspondent aux Investissements directs étrangers (IDE)

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 46

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Tchad

L'analyse du tableau 6 nous permet de constater que le Tchad ne connaît pas des problèmes profonds de solvabilité au regard des références édictées par les IFI et même par les organismes communautaires de surveillance multilatérale. Le ratio dette/PIB qui s'établit à 42,79% en moyenne sur la période se trouve en deçà des critères d'éligibilité de l'initiative PPTE (200%) et des critères de la CEMAC (70%).

Néanmoins, comme dans toute analyse des ratios, les ratios de solvabilité dans le cas du Tchad, pris isolement manquent de pertinence compte tenu du biais introduit dans leur interprétation, d'une part par la structure des exportations et d'autre part, par la nature du PIB. En effet, une notion fondamentale se dégage de la définition de la solvabilité : celle de la stabilité des ressources permettant de faire face aux engagements financiers à tout moment.

Dans le cas du Tchad, le ratio "Encours dette/Recettes d'exportation" ne prend pas en compte le déséquilibre structurel des échanges extérieurs. Les exportations du Tchad étant essentiellement constituées d'un petit nombre des produits primaires au caractère erratique car largement tributaires de l'évolution des variables exogènes. Le PIB pour sa part est le produit de la rente essentiellement pétrolière que du résultat de l'évolution spasmodique des investissements privés. C'est pourquoi, il importe de compléter l'analyse des ratios de solvabilité par celle des indicateurs de liquidité.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 47

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Tchad

B) Indicateurs de liquidité

L'analyse de ce dernier indicateur, dans le cas du Tchad permet de fonder une analyse sérieuse de la viabilité de la dette dans la mesure où ce ratio budgétaire constitue le seul lien réel entre le secteur pétrolier et le secteur hors pétrole.

Tableau 6 : Les indicateurs de liquidité de la dette extérieure

Années

Service

dette/Recettes budgétaire

Service

dette/exportation (XBNF)

Références

 
 

PPTE

20 -25%

25%

2000

628,9

302,8

2001

630,4

314,6

2002

600,8

376,6

2003

549,2

188,6

2004

362,3

68,2

2005

6,4

1,1

2006

4,0

1,2

2007

4,6

1,9

2008

6,3

3,1

2009

5,6

2,4

2010

 
 

Source : Auteur a partir des données du FMI, consultation au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

Le tableau 7 montre que les ratios de liquidité ne confirment pas l'analyse sur la solvabilité. Ils se situent durablement tous les deux au-dessus de seuils de soutenabilité de l'initiative PPTE.

Les problèmes de liquidité qui sont en général passagers ou conjoncturels, sont d'origine structurelle dans le cas du Tchad. Le ratio du service de la dette est supérieur en moyenne à 25% et le ratio budgétaire avec une moyenne de 279,85% sur la période alors que le maximum supportable est de 25% prouvent qu'en dépit d'une relative solvabilité à moyen terme, le Tchad reste confronté à une crise de liquidité aigue d'origine structurelle.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 48

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Tchad

La difficulté pour l'Etat à assurer le service de sa dette provient des conditions de remboursement extrêmement défavorables : une maturité des emprunts courte, des taux d'intérêts élevés et des risques de change importants.

3.2. ANALYSE ECONOMETRIQUE

Cette section justifie la démarche méthodologique au regard de la littérature sur la soutenabilité des finances publiques et présente les résultats de l'application économétrique suivie de leur discussion.

3.2.1 Approche méthodologique de l'étude économétrique

Cette partie vise essentiellement à donner un éclairage sur l'approche méthodologique adoptée. Ainsi, la question de la base de données, du choix des variables (3.2.2), la justification du choix du modèle (3.2.3) et la procédure du test de soutenabilité (3.2.4.) seront abordés successivement.

3.2.2 Base de données, choix des variables

Il est ici question de la présentation des données et de leurs sources, ainsi que les variables qui seront utilisées dans la modélisation.

A - base des données et outils d'analyse

Les données utilisées dans le cadre de cette étude proviennent essentiellement de l'Institut National de la Statistique, des Etudes Economiques et démographiques (INSSED), de la Banque des Etat de l'Afrique de Centrale (BEAC) du Fond Monétaire International (FMI) et de la Banque mondiale.

Nous avons utilisé des séries d'observations annuelles pour mener les différentes analyses. Les observations concernent la période allant du premier janvier 2000 au 31 décembre 2010, soit 11 observations.

Les données sont analysées à l'aide des logiciels SPSS, Eviews et le tableur Excel en référence aux objectifs de la recherche.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 49

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Tchad

B - Choix des variables

L'analyse de soutenabilité des finances publiques fait intervenir plusieurs ratios intéressants. Les variables retenues pour cette étude sont celles qui sont apparues plus significatives notamment le ratio Dette/PIB, Déficit/PIB, Dépenses et Recettes budgétaires.

3.2.3 Justification du choix du modèle

Face a une multitude de travail économétrique sur la soutenabilité nous nous sommes inspirés des travaux de HENIN et FEVE de 1998 a partir de l'approche standard de la solvabilité budgétaire. L'objet est d'étudier la présence de stationnarité sur les ratios Dette /PIB et Déficit/PIB caractéristique de la présence ou non de la soutenabilité. Et dans le souci de vérifié nos résultats nous allons voir s'il y'a une relation de cointégration entre les Dépenses et Recettes déterminant le degré de la soutenabilité. Cette relation de long terme des deux variables se fonde sur cette expression :

Tt = a+f3.Gt+Et

En nous inspirant de cela nous obtenons un modèle :

RETt = a + f3DEPt + Et

Avec

RETt : Recettes totales

DEPt : Dépenses budgétaires + charge de la dette

Et : Terme aléatoire

a : Constante

Ce modèle à le mérite d'être adapté a nos hypothèse et nous permet d'étudié en profondeur la question de soutenabilité.

3.2.4. La procédure du test de soutenabilité

La démarche de la mise en oeuvre des tests est différente d'une étude économétrique à une autre. De notre côté, nous avons choisi de procéder en trois tests indépendants l'un de l'autre.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 50

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

La prise en compte de ces trois différents tests nous aiderait à mieux dégager les enseignements et à confirmer notre conclusion.

1er type de test : consiste à appliquer les tests de stationnarité sur les séries de dette/PIB.

2ème type de test : consiste à appliquer les tests de stationnarité sur les séries de déficit/PIB. S'ils sont conceptuellement équivalents, ces deux tests portent en pratique sur des séries qui ne sont pas strictement comparables car le terme flux de créances vient en moyenne augmenter la dette brute sans pour autant affecter le déficit public.

Tableau 7 : Test de stationnarité

 
 

DETTE/PIB ou

DEFICIT/PIB

Test appliqués

Résultat

ADF

 

PP

 

KPSS

 

Source : Auteur

3ème type de test : Pour vérifier et confirmer les résultats précédents, nous faisons recours à ce troisième test en effectuant les tests de cointégration entre les recettes et les dépenses totales. Nous effectuerons d'abord un test de stationnarité des recettes et des dépenses globales prises séparément . Si celles-ci sont non stationnaires en niveau (et stationnaires en différence), on teste l'hypothèse nulle d'absence de relation de cointégration entre ces deux variables. Dans le cas où une relation de cointégration existerait, il nous resterait qu'à déterminer le vecteur de cointégration.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 51

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

Tableau 8 : Test de cointégration entre les recettes et les dépenses

 

Test de cointégration entre les recettes et les dépenses

Soutenabilité

Test de

stationnarité

Test de

cointégration

Test de johansen

Ho : stationnarité

-

-

Oui

H1 : non stationnarité

Ho : non

cointégration

Ho : vecteur de

cointégration (1 -1)

Oui (forte)

H1 : cointégration

H1 : vecteur de

cointégration

(1 - f3) avec f3 ~ 1

Oui (faible)

Source : Auteur

3.2.5 Règle de décision

A) Test ADF

Les tests de Dickey-Fuller (1981) permettent de mettre en évidence le caractère stationnaire ou non d'une série par la détermination d'une tendance déterministe ou stochastique. Au terme d'une procédure séquentielle décrite10, nous testons l'hypothèse nulle de racine unitaire (non stationnarité) en comparant la t-statistique de Æ aux valeurs tabulées par Dickey et Fuller. La règle de décision est la suivante :

- Si la t-statistique est inférieure à la valeur critique, on rejette l'hypothèse nulle. La série est donc stationnaire.

- Si la t-statistique est supérieure à la valeur critique, on accepte l'hypothèse nulle de présence de racine unitaire. La série est donc non stationnaire.

B) Test PP

Le test de Phillips-Perron (1988) étend la procédure de Dickey-Fuller en prenant en compte la possibilité de rupture de tendance dans les séries. Ce teste suit la même procédure

10 Annexe 3

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 52

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

que celle du test ADF11. Les valeurs critiques sont les mêmes que celle tabulées par Dickey-Fuller. La règle de décision est également identique :

- Si la valeur calculée de tÁ est inférieure à la valeur critique, l'hypothèse nulle de présence de racine unitaire est rejetée. La série est donc stationnaire.

- Si la valeur calculée de tÁ est supérieure à la valeur critique, l'hypothèse nulle (Ho#177; 1 ) de présence de racine unitaire est acceptée. La série est donc non stationnaire.

C) Test de KPSS

Le test KPSS (1992) apporte une spécificité par rapport aux précédents tests en décomposant la série en une somme d'un trend déterministe, d'une marche aléatoire et d'un terme d'erreur ut stationnaire. A la différence également des autres tests, nous testons l'hypothèse nulle d'absence de racine unitaire (stationnarité) en comparant la t-statistique aux valeurs tabulées par Kwiatowski et al (1992)12. La règle de décision est la suivante :

- Si la valeur calculée de est inférieure à la valeur critique correspondante, on accepte l'hypothèse nulle de stationnarité.

- Si la valeur calculée de est supérieure à la valeur critique correspondante, on rejette l'hypothèse nulle de stationnarité.

3.2.6. Application économétrique des tests de soutenabilité sur des données de l'économie tchadienne

Après avoir donné une cartographie générale des tests économétriques appliqués, ainsi que la démarche et les règles de décision. Nous allons les appliquer sur des données de l'économie tchadienne. Nous avons décidé d'étudier la soutenabilité de la dette publique tchadienne entre 2000 et 2010.

Notre travail est divisé en trois parties. La première sera réservée à l'étude de la stationnarité du ratio dette/PIB. La deuxième sera consacrée à l'étude de la stationnarité du ratio déficit/PIB. La troisième sera dédiée à étudier la relation de cointégration entre les recettes et les dépenses.

11 Annexe 4

12 Annexe 5

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

A) Test de stationnarité applique à la série du ratio dette/PIB

Ce test de stationnarité est effectué selon la procédure séquentielle décrite précédemment. Nous avons donc appliqué les 3 tests de stationnarité (ADF, PP, KPSS) sur la série. La procédure complète et les résultats intermédiaires sont détaillés en annexe13. Nous allons donc extraire uniquement les résultats finaux tout en les commentant et dégageant les principales conclusions. Mais avant de présenter les résultats, voici un graphique (dessiné à l'aide d'Eviews) qui décrit l'évolution de ce ratio :

Graphique 2 : Evolution du ratio Dette/PIB de 2000 à 2010

80 70 60 50 40 30 20 10

0

 

00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

DETTEPIB

Source : Auteur à partir des données de consultation du FMI au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

Tableau 9 : Résultats des tests de stationnarité sur le ratio dette/PIB :

Variable analysée

Test

Hypothèse nulle

testé

Trend

constante

Test de racine unitaire

Résultat

Ratio dette/PIB

ADF

Non stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

-2,64 > -2,84

Non

stationnaire

PP

Stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

-3,7 < -2,81

Stationnaire

KPSS

Stationnaire

Significatif

-

0,19 < 0,21

stationnaire

Source Auteur

13 Document annexe des résultats économétriques page 1-12

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 53

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

D'après ces résultats, nous constatons que le ratio Dette/PIB n'est pas stationnaire entre 2000 et 2010 et ce pour le test ADF. En revanche, le ratio dette/PIB est considéré stationnaire lorsqu'on applique les tests PP KPSS. La décomposition de la série permet de rendre celle ci stationnaire. Par conséquent, le ratio d'endettement n'est pas soutenable d'après le test ADF. Par contre, il est soutenable en considérant les tests PP KPSS.

Ce résultat ne nous permet pas de trancher sur la soutenabilité de la politique budgétaire de l'Etat. Il est donc nécessaire d'étudier la stationnarité du ratio solde public (déficit) par rapport au PIB.

B) Test de stationnarité applique à la série du ratio déficit/FIB

Ce test de stationnarité est effectué selon la même procédure séquentielle décrite. La procédure complète et les résultats intermédiaires sont détaillés14. Avant de présenter et de commenter les résultats obtenus, nous montrons à l'aide d'un graphique l'allure et l'évolution de ce ratio dans le temps

Graphique 3 : Evolution du ratio déficit/FIB de 2000 à 2010

0

-5 -10 -15 -20 -25 -30

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 54

00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

DEFICITPIB

Source : Auteur à partir des données de consultation du FMI au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

14 Document annexe des résultats des tests économétriques page 13-24

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

Tableau 10 : Résultats des tests de stationnarité sur le ratio déficit/PIB :

Variable analysée

Test

Hypothèse nulle

testé

Trend

constante

Test de racine unitaire

Résultat

Ratio

déficit/PIB

ADF

Non stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

0,16 > -2,81

Non

stationnaire

PP

Stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

0,16 > -2,81

Non

stationnaire

KPSS

Stationnaire

Significatif

-

0,084 < 0,21

stationnaire

Source : Auteur

D'après ces résultats, nous constatons que le ratio déficit/PIB n'est pas stationnaire et donc non soutenable entre 2000 et 2010 et ce pour les tests ADF et PP. En revanche, le ratio déficit/PIB est considéré stationnaire et donc soutenable lorsqu'on applique le test KPSS.

Pour les deux séries étudiées, aucune conclusion ne peut donc être raisonnablement donnée quant au caractère stationnaire ou non stationnaire des séries. Par conséquent, l'étude de la stationnarité du ratio d'endettement et du ratio solde public ne permet pas de trancher sur la soutenabilité de la politique budgétaire de l'Etat. Il est donc nécessaire de raffiner l'analyse en s'intéressant à l'étude des recettes totales et des dépenses totales.

C) Test de cointégration entre les recettes totales et les dépenses totales

A la lumière des analyses précédentes, le test de cointégration s'avère indispensable pour la suite de notre procédure et à la synthèse de nos conclusions. Comme nous l'avons évoqué précédemment, la première étape de ce test consiste à étudier la stationnarité des séries. Pour espérer entamer par un test de cointégration, les tests de stationnarité des séries doivent déboucher sur des résultats non stationnaires en niveau et stationnaires en différence tout en étant de même ordre d'intégration. (La définition et les détails de la démarche du test de cointégration sont résumés)15.

C.1.Test de stationnarité des recettes totales

Ce test de stationnarité est effectué selon la même procédure séquentielle décrite en annexe 3.
La procédure complète et les résultats intermédiaires sont détaillés en annexe16. Avant de

15 Annexe 6

16 Document annexe des résultats des tests économétriques page 25-40

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Tchad

présenter et de commenter les résultats obtenus, nous montrons à l'aide d'un graphique l'allure et l'évolution de ce ratio dans le temps :

Graphique 4 : Evolution du ratio recettestotales/PIB de 2000 à 2010

36 32 28 24 20 16 12

 

00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

RECETTESTOTALESPIB

Source : Auteur à partir, des données de consultation du FMI au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

Tableau 11 : Résultats des tests de stationnarité sur le ratio Recettes/PIB :

Variable analysée

Test

Hypothèse nulle

testé

Trend

constante

Test de

racine unitaire

Résultat

Ratio

Recettes/PIB

ADF

Non stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

0,64 > -2,81

Non

stationnaire

PP

Stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

0,78 > -2,81

Non

stationnaire

KPSS

Stationnaire

-

-

0,13 < 0,21

Stationnaire

Source : Auteur

l Un seul test prouvant le non stationnarité en niveau suffit à continuer la procédure et effectuer le test de

stationnarité sur la série différenciée. Pour le test de stationnarité de la série différenciée, nous nous sommes contentés du test ADF.

D'après ces résultats, nous constatons que la série des recettes totales/PIB n'est pas stationnaire pour les tests ADF et PP, et stationnaire pour le test KPSS. En réalisant le test de stationnarité (ADF) sur la série en différence première, nous remarquons que celle ci devient stationnaire. Par conséquent la série recettes totales/PIB est intégrée d'ordre 1 (il faut la

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Tchad

différencier une fois pour la rendre stationnaire). Il nous reste alors qu'à vérifier la série des dépenses totales/PIB de la même manière afin de trancher sur la légitimité d'un éventuel test de cointégration.

C.2.Test de stationnarité des dépenses totales

Ce test de stationnarité est effectué selon la même procédure séquentielle décrite. La procédure complète et les résultats intermédiaires sont détaillés en annex17e. Avant de présenter et de commenter les résultats obtenus, nous montrons à l'aide d'un graphique l'allure et l'évolution de ce ratio dans le temps :

Graphique 5 : Evolution des dépenses totales de l'état de 2000 à 2010

28 24 20 16 12

8

4

 
 

00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

DEPENSESTOTALESPIB

Source : Auteur à partir des données de consultation du FMI au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

Tableau 12 : Résultats des tests de stationnarité sur le ratio Dépenses/PIB

Variable analysée

Test

Hypothèse nulle

testé

Trend

constante

Test de

racine unitaire

Résultat

Ratio

dépenses/PIB

ADF

Non stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

0,57 > -2,81

Non

stationnaire

 

Non stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

1.72 > -2,81

Non

stationnaire

 

Stationnaire

-

-

0,16 < 0,21

stationnaire

 

17 Document annexe des résultats des tests économétriques page 41-56

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Tchad

Source : Auteur

l Un seul test prouvant le non stationnarité en niveau suffit à continuer la procédure et effectuer le test de

stationnarité sur la série différenciée. Pour le test de stationnarité de la série différenciée, nous nous sommes contentés du test ADF.

D'après ces résultats, nous constatons que la série des dépenses totales/PIB n'est pas stationnaire pour les tests ADF et PP, et stationnaire pour le test KPSS. En réalisant le test de stationnarité (ADF) sur la série en différence première, nous remarquons que celle ci devient stationnaire. Par conséquent la série dépenses totales/PIB est intégrée d'ordre 1 (il faut la différencier une fois pour la rendre stationnaire). Les deux séries considérées sont intégrées du même ordre 1.

Il est donc possible d'effectuer un test de cointégration entre les recettes et les dépenses. Pour cela, nous nous baserons sur l'approche d'ENGLE et GRANGER (1987) et nous réaliserons une estimation de long terme de la relation à l'aide d'une régression par les MCO (Moindres Carrés Ordinaires).

Graphique 6 : Evolution du ratio depensestotales/PIB et recettestotales/PIB de 2000 à 2010

35 30 25 20 15 10

5

 

00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

DEPENSESTOTALESPIB RECETTESTOTALESPIB

Source : Auteur à partir des données de consultation du FMI au titre de l'article IV, 2006, 2010, et 2013

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Tchad

C.3. Le test de cointégration

Pour mettre en place un test de cointégration, trois différentes étapes sont à prévoir :

La première consiste à mener un test de causalité au sens de GRANGER afin de déterminer s'il existe une variable endogène dans la relation de long terme entre les recettes et les dépenses.

La deuxième repose sur une estimation de la relation de long terme en effectuant une régression par la méthode des moindres carrés ordinaires (MCO).

Enfin la troisième consiste à appliquer les tests ADF sur les résidus estimés. Si la série des résidus récoltés par l'estimation est stationnaire alors il existerait bel et bien une relation de cointégration et un test de détermination du vecteur de cointégration à la Johansen serait légitime. Si la série des résidus est non stationnaire, alors c'est une preuve indiscutable de la non existence de relation de cointégration

Dans ce qui suit, nous allons exposer uniquement les résultats finaux (ceux de la troisième étape), et nous gardons le détail dans l'annexe18.

Tableau14 : Résultats du test d'ADF sur les résidus estimés

Variable analysée

Test

Hypothèse testée

Trend

Constante

Test de

racine unitaire

Résultat

Resid01 (rest)

ADF

Non

stationnaire

Non

significatif

Non

significatif

-1,41> -4,48

Non

stationnaire

Source : Auteur

Le test de stationnarité sur la série des résidus estimés a fini par confirmer la non stationnarité de celle ci. Et comme nous l'avons signalé précédemment, la non stationnarité des résidus signifiait la non cointégration entre les recettes totales et les dépenses totales. Il est donc inutile de poursuivre la démarche et déterminer un vecteur de cointégration. Ainsi les différents tests de stationnarité et de cointégration, nous confirme la non stationnarité du ratio déficit/PIB et bien évidemment la non stationnarité du ratio dette/PIB. D'une manière

18 Document annexe des résultats des tests économétriques page 57-67.

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Tchad

générale, ces résultats nous poussent à confirmer le non soutenabilité de la politique budgétaire et d'une manière général des finances publiques Tchadienne entre 2000 et 2010 (période correspondant a la décennie d'exploitation pétrolière). Ce constat est d'une part alarmant et d'autre part très délicat à gérer. En effet, ce n'est pas l'existence des déficits qui met en cause la solvabilité du gouvernement, mais leur persistance à un niveau excessif. Le graphique du ratio déficit/PIB témoigne de la persistance de ce phénomène et montre que durant toute la période étudiée le déficit n'a jamais pu être résorbé ou du moins n'a plus retrouvé des valeurs proches de l'équilibre. En réalité, lorsque le déficit s'aggrave, cette aggravation n'aura pas tendance à être corrigée ultérieurement, ce qui pourra conduire à une augmentation trop rapide de la dette. Ces résultats sont ainsi peu favorables à l'hypothèse de soutenabilité. La non stationnarité du déficit est la cause essentielle de la non soutenabilité. L'absence de relation de long terme entre les recettes et les dépenses conduit à rejeter la soutenabilité même au sens faible. Par ailleurs, il est à noter que les résultats obtenus dépendent d'une part de la période d'estimation et d'autre part de méthode empirique adoptée.

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Tchad

CONCLUSION GENERALE

A travers un ensemble de travaux théoriques et empiriques variés, ce mémoire donne plusieurs résultats sur la soutenabilité des finances publiques au Tchad, à travers une approche d'analyse descriptive et économétrique.

Il ressort que la politique budgétaire du Tchad est sur une trajectoire insoutenable à moyen terme. La dette publique, en dépit de son stock relativement faible dans le PIB, fait peser par ses charges d'intérêts d'énormes tensions sur le budget de l'Etat et constitue une lourde hypothèque pour l'avenir, dans la mesure où elle réduit de manière inter temporelle la consommation des générations futures.

Le déficit primaire hors pétrole, qui mesure l'ampleur du déficit structurel et par conséquent l'effort d'ajustement, s'établit durablement au delà de 5% du PIB hors pétrole et sa trajectoire connaît une tendance explosive au cours des dernières années.

Depuis 2003, les pays africains producteurs de pétrole dans leur ensemble enregistrent des plus values pétrolières considérables. Plus qu'une simple bouffée d'oxygène, ces pays ont une chance historique d'amorcer un retour à l'équilibre permanent de leurs finances publiques et d'enclencher la dynamique d'un développement durable.

Le Tchad en particulier se trouve actuellement à un stade décisif de son évolution : celui du stade ou dix (10) contrats de partage de production ont été signés en 2011 et 2012 avec de nouveaux acteurs internationaux, dont certains sont assortis du paiement de bonus de signature significatifs.

Dans ce contexte d'élargissement des champs d'exploitations , des risques de retournement de conjoncture et de dérives des finances publiques liées à la pression politique et sociale, le Tchad doit profiter des revenus pétroliers futurs pour : « réduire son déficit structurel » et assurer la viabilité de la politique économique.

Ainsi, cette étude préconise t-elle à court terme :

- le prépaiement de la dette extérieure afin de favoriser une réduction importante des charges d'intérêts annuelles afin d'atténuer la vulnérabilité de l'économie aux chocs futurs et d'accroître l'espace budgétaire au profit des investissements et de l'épargne.

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Tchad

Cette étude suggère que la priorité soit accordée à l'épargne publique. Car, sans stabilité macroéconomique et sans une bonne gestion des finances publiques, une forte augmentation des dépenses d'investissement ne saurait être, ni efficace, ni soutenable.

Pour ces raisons, il est essentiel d'économiser le gros des marges budgétaires supplémentaires qui seraient libérées par l'opération de rachat de dette et de la manne pétrolière à venir, tout en veillant à la diversification des moyens de placement de cette "cagnotte". Il conviendrait dans à cet effet de mettre en place un cadre institutionnel plus efficace aux fins de l'accumulation d'actifs financiers.

A moyen terme, l'étude recommande :

- de ramener sur 5 ans le déficit structurel à son niveau soutenable en permanence en réduisant la croissance des dépenses courantes en volume, en remédiant à l'érosion des recettes non pétrolières et par une gestion plus efficace des recettes publiques ;

- d'élaborer une trajectoire pluriannuelle soutenable grâce à la mise en oeuvre avec le budget A venir d'un cadre de dépenses à moyen terme (CDMT)19 ;

- en amorçant une étape décisive dans la modernisation de l'Etat grâce à la mise en oeuvre de la gestion par la performance en utilisant un cadre de viabilité de la dette (CVD) .20

Après les mesures de court et moyen terme dont le principal pilier est l'opération de rachat de la dette extérieure pour placer les finances publiques sur une trajectoire soutenable, cette étude propose des reformes structurelles visant à maintenir cette trajectoire à long terme à

19 (CDMT) fourni un horizon de pilotage à la gestion des finances publiques, permet d'assurer une meilleure traçabilité des dépenses réalisées et, contribue à la transparence et à l'efficience des processus budgétaires en permettant d'assurer la cohérence des projections macroéconomiques des différents ministères et directions ; de préparer le budget pour 2014 dans un cadre de dépenses à moyen terme pour 20014-19 ; Hiérarchiser les priorités des projets d'investissement figurant au Programme d'investissement public (PIP) pour établir un système de sélection cohérent ;Veiller à ce que la classification fonctionnelle des dépenses soit finalisée et entre en application avec le budget 2014.

20 La mise en place par les autorités d'un cadre de viabilité de la dette (CVD) inspiré de celui élaboré par la Banque mondiale et le FMI pour les pays à faible revenu et éligibles à l'initiative d'allègement de la dette multilatérale. Le CVD est élaboré pour aider ces pays à mobiliser les ressources financières dont ils ont besoin pour leur développement tout limitant les risques d'endettement excessif.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 63

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

travers l'assainissement des finances publiques et au renforcement des capacités de gestion de la dette.

Mais le meilleur gage pour maintenir les finances publiques sur une trajectoire soutenable en permanence, est d'avoir plus de croissance et d'augmenter son potentiel à long terme. Pour cela l'étude propose une accélération de la diversification de l'économie à travers le lancement des projets concrets dans cadre du DSCRP.

En guise de piste de réflexion, nous dirons que l'endettement a appauvri des milliers d'habitants des pays africains. Alors que les perspectives économiques s'améliorent, on assiste à la fois à un réel espoir de sortir définitivement de cette crise et une résurgence des risques surendettement du fait de l'abondance de la liquidité mondiale et la diversité de ses sources y compris de la part des pays émergeants qui s'illustrent par un laxisme dans les conditionnalités d'octroi des crédits.

Il est indispensable pour les IFI de faire adopter aux pays débiteurs et créanciers un code de bonne conduite fixant le rapport à 20% à ne pas dépasser entre le service de la dette et les recettes budgétaires. Car ce ratio donne une indication plus juste des distorsions que la dette crée dans le système économique, même si sa part dans le PIB est relativement faible.

En outre, dans le cas des pays exportateurs de pétrole, le ratio budgétaire permet de fonder une analyse sérieuse de la viabilité de la dette dans la mesure où il constitue le seul lien réel entre le secteur pétrolier et le secteur hors pétrole.

Le maintien du ratio budgétaire à 20% constitue une garantie offerte aux débiteurs et aux créanciers. Un Etat arrivant à ce seuil, devra chercher des moyens intérieurs de financement. Il appliquera, s'il le faut, une politique d'austérité sans contraintes extérieures. En revanche, il pourra emprunter davantage si les recettes d'exportations augmentent. Une coordination des créanciers permettra d'examiner la rentabilité financière et l'importance socio-économique du projet pour lequel le prêt est consenti.

De même, l'exercice de surveillance multilatérale de la CEMAC doit être renforcé. L'absence de sanctions, l'inefficacité du mécanisme de pression par les pairs, l'absence d'une structure indépendante des statistiques et la rivalité entre les Etats favorisent le recours à la

Soutenabilité des finances publiques dans les pays exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du

Tchad

comptabilité créatrice21 pour respecter artificiellement les critères. Tout en remédiant à ces insuffisances, l'apport supplémentaire de cette structure communautaire serait de s'assurer de la rentabilité des projets financés par emprunts en exigeant pour chaque Etat une analyse coûts- avantages rigoureuse des projets d'investissements. Car l'on sait que la mauvaise utilisation des prêts est la cause principale de la crise de la dette dans les pays en développement et pour laquelle on n'a pas encore trouvé de solution.

Le travail effectué dans ce mémoire présente quelques limites et ouvre en même temps des pistes de recherche.

La première limite réside au fait que Dans les pays de la zone franc comme le Tchad, le problème de l'équilibre de la balance des paiements est tout à fait secondaire en raison de la garantie monétaire du trésor français qui assure une disponibilité presque illimitée des devises. Ce qui conduit à ce que La question du déficit budgétaire et de son financement par l'emprunt reste en effet l'élément essentiel d'appréciation de la soutenabilité des finances publiques.

La deuxième limite tient au fait que la collecte des données statistiques au niveau de l'INSSED car l'exécution du budget est soumise à de lourdes procédures, l'inefficacité du contrôle de la conformité aux lois fiscales et l'absence d'un système d'information financière performant, empêchent la production de rapports réguliers et exacts permettant d'établir avec certitude et dans les délais, les données annuelles. En conséquence nous recommandons a l'INSSED de cordonnées ses publications de données avec celle de la BEAC, de la CEMAC et des institutions financières internationales (FMI et BANQUE MONDIALE).

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21 C'est-à-dire des manipulations statistiques ou comptables visant à gonfler ou diminuer artificiellement les recettes fiscales ou les dépenses -comme ce fut le cas de la Grèce en 1999 pour intégrer la zone euro et de l'Italie sous la présidence de Berlusconi ou encore dans le cas du scandale Enron aux USA dans le secteur privé.

TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 65

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Tchad

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MOHAMED MANSOUR Evaluation théorique et empirique de la soutenabilité de la dette publique : cas de la France mémoire de Master






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"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King