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Université Mohammed V Agdal
Faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales
Département de Droit Public
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MEMOIRE DE RECHERCHE POUR L'OBTENTION DU DIPLOME
DE
MASTER SPECIALISE MANAGEMENT DU DEVELOPPEMENT
SOCIAL
TITRE DE LA RECHERCHE :
LE MICROCREDIT AU MAROC :
TENSIONS ENTRE PERFORMANCE COMMERCIALE ET FINALITE
SOCIALE (Cas de l'association al Amana Microfinance / Région de
Rabat)
MEMOIRE DE RECHERCHE PREPARE PAR :
- L'ETUDIANT : M. BRAHIM NAHI
SOUS LA DIRECTION DU :
- PROFESSEUR : M. ABDERAHIM EL MASLOUHI ET LA
CODIRECTION DU :
- PROFESSEUR : M. FAIÇAL BENCHEKROUN
JURY :
PROFESSEUR : M. ABDERAHIM EL MASLOUHI
PRESIDENT
P ROFESSEUR : M. FAIÇAL BENCHEKROUN
SUFFRAGANT
P R OFESSEUR : M. MOHAMMED HADDY SUFFRAGANT
P ROFESSEUR : M. MOHAMED LAHBOUSS
SUFFRAGANT ANNEE UNIVERSITAIRE : 2012-2013
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
DEDICACES
A mes parents
A Ma femme, pour ton soutien indéfectible ainsi que
tes encouragements inestimables, que tu trouves ici l'expression de ma profonde
gratitude.
A ma fille RACHA,
A mes soeurs et frères,
A toute ma famille et à tous mes amis.
Je vous dédie ce travail en témoignage de
reconnaissance de vos soutiens permanents.
Etudiant Chercheur : Brahim NAHI PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social ii
Etudiant Chercheur : Brahim NAHI PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social iii
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
REMERCIEMENTS
Je remercie tout d'abord ALLAH le Tout Puissant de m'avoir
aidé et donné patience et courage durant ces longues et dures
années d'études et de recherches.
Mes remerciements s'adressent ensuite à :
Mon Professeur et Encadrant, Monsieur Abderrahim EL
MASLOUHI, qui n'a épargné aucun effort pour m'aider à
mener à bien ce travail.
Mon professeur et Co-encadrant Faiçal
BENCHEKROUN, pour son accompagnement tout au long de la réalisation
de cette recherche.
Mon Professeur Abdellah SAAF, Coordonateur du Master
Management de Développement Social, dont l'enseignement et le parcours
suscitèrent un challenge déterminant qui daignera accepter
l'expression de ma respectueuse sympathie.
Professeurs Mrs. Mohamed LAHBOUSS et Mohamed HADDY d'avoir
accepté d'être membres du jury et pour leurs remarques
constructives.
Tous mes professeurs du Master MDS pour la qualité
de l'encadrement, la patience, la pertinence des conseils et l'extrême
richesse de leurs enseignements.
Mr. Youssef ERRAMI, Directeur du Centre Mohamed VI de
Soutien à la Microfinance Solidaire pour ses conseils pertinents et pour
m'avoir permis d'utiliser pour ce mémoire une documentation
riche.
Le personnel du Centre Mohamed VI pour le Soutien de la
Microfinance Solidaire pour m'avoir accepté parmi eux et pour m'avoir
appuyé et facilité ma tâche pendant mon séjour de
recherche au centre.
Le personnel de l'Association Alamana Microfinance, du
siège et de la succursale de Rabat, pour m'avoir aidé à
réaliser l'enquête du terrain auprès des clients et
bénéficiaires du microcrédit et pour la qualité de
l'accueil, leur disponibilité et gentillesse.
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Monsieur ARIOUS Mohamed, Professeur de langue
française, d'avoir accepté de corriger la première version
de ce mémoire.
Enfin, je tiens à remercier tous ceux qui m'ont
aidé dans ma recherche et l'ensemble des praticiens du secteur de
microcrédit qui m'ont soutenu aussi le personnel de la FNAM pour m'avoir
fourni les statistiques récentes sur le secteur.
Merci à tous ceux qui ont contribué de
prés ou de loin à l'accomplissement de cette modeste contribution
de recherche.
Merci.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social iv
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social v
PRESENTATION DU MEMOIRE :
Depuis plus de trente ans, le microcrédit est devenu un
véritable secteur économique, qui pèse vingt milliards de
dollars avec plus de cent millions d'emprunteurs dans près de 150 pays.
Il a non seulement gagné en extension géographique, mais il est
aussi devenu industriel. Aussi, le microcrédit affiche -t-il une
identité sociale dont l'objectif est de servir les pauvres en les
incluant financièrement par l'accès au crédit.
La conciliation entre l'atteinte des pauvres et la
pérennisation de l'institution de MC est en quelque sorte la question
débattue dans ce mémoire de fin d'étude. Ce dernier est
articulé en deux parties pilotées d'un chapitre
préliminaire. Concernant les axes de la recherche on compte dans chacune
des parties composant le rapport deux chapitres où chacun contient deux
sections avec deux paragraphes par section et deux points par paragraphe. On
trouve ci-après l'ossature sommaire du rapport :
Partie I : Le microcrédit au
Maroc, un outil émergent de la politique publique sociale Chapitre 1
: Présentation et analyse de la politique publique sociale au
Maroc
Chapitre 2 : le Microcrédit au Maroc,
levier de développement socio-économique
Partie II : le microcrédit, d'un
discours articulé sur la finalité sociale vers une pratique
orientée vers la performance commerciale
Chapitre 1 : Le microcrédit au Maroc, un
secteur en expansion Chapitre 2 : Les effets de l'adoption du
référentiel de marché
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social vi
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
RESUME DU MEMOIRE
Microcrédit pour le Microcrédit ou
Microcrédit Engagé pour la cause du développement social ;
telle est la question fondamentale traitée dans cette recherche.
Seulement, la transcription de la mission sociale du MC dans la pratique a fait
couler beaucoup d'encre suite à la convergence que connait le secteur
aujourd'hui et qui découle du débarquement de nouveaux
arrivés confortés du paradigme commercial recherchant la
viabilité financière des institutions de MC. Or, les objectifs
affichés tournent autour de l'amélioration des conditions de vie
des pauvres et l'extension de la gamme des opportunités et options
offertes, leur réalisation passe par l'offre de services de
qualité en tenant compte des besoins et des demandes ; la distribution
de ces services à des coûts et des taux d'intérêt
équitables ; la contribution au développement des liens sociaux
et du capital social; la réduction de la vulnérabilité ;
mais aussi la surveillance des effets secondaires négatifs du
microcrédit comme le surendettement.
En revanche, il est illusoire d'attendre du microcrédit
d'opérer une transformation radicale dans la situation des personnes
pauvres. Il ne peut pas être l'unique outil de lutte contre toute forme
d'exclusion, genre d'outil «tout terrain» de lutte contre la
pauvreté. Donc, il ne doit pas être véhiculé en tant
qu'Alternatif au travail productif, à la protection sociale et aux
politiques publiques sociales.
De ce fait, il semble difficile de statuer de façon
concluante et scientifique sur les effets du microcrédit : tant les
expériences et les environnements dans lesquels se pratique restent
différents. Le succès institutionnel du MC ne doit pas dissimuler
le fait qu'il n'est en aucun cas un remède durable face à une
pauvreté chronique.
Bien que le microcrédit puisse être une
composante d'une approche globale et plus large de lutte contre toutes les
formes de pauvretés, il se trouve aujourd'hui à la croisée
des chemins entre une vision institutionnaliste et une autre solidariste. C'est
pourquoi les pouvoirs publics sont appelés à jouer un rôle
important dans la définition du microcrédit de demain :
performant ou non, aussi bien sur le plan social que commercial. Deux approches
qui placent la performance financière et la performance sociale du
microcrédit en opposition perpétuelle.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social vii
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ABSTRACT
The Microcredit for the Microcredit or Microcredit Engaged on
the cause of social development it's the fundamental question addressed in this
research. However, the transcript of the MC's social mission in practice has
been much written by many interested persons especially with the convergence
that knows the industry today, which follows the landing of newcomers,
reinforced the trade paradigm seeking financial viability of microfinance
institutions. But, the declared goals turn about improving the living
conditions of the poor and expanding the range of opportunities and options,
their achievement through the provision of quality services taking into account
the needs and demands; distribution of these services at cost and fair interest
rates, contributing to the development of social bonds and social capital, the
reduction of vulnerability, but also the monitoring of negative side effects of
microcredit as the debt overhang.
Nonetheless, it is unrealistic to expect the microcredit
implement significant change in the situation of the poor people. It can not be
the only tool in the fight against all forms of exclusion, such a tool" all
terrain" the fight against poverty. So it should not be seen as an alternative
productive work, social protection and social public policy.
Therefore, it seems difficult to decide conclusively on the
impacts of microcredit as the experiences and environments in which practice
are different. The institutional success of the MC should not disguise the fact
that it is by no means a lasting cure against chronic poverty.
Although microcredit can be a component of a comprehensive and
broader fight against all forms of poverty, it is now at a crossroads between
an institutionalist vision and solidaristic vision. That is why the government
will play an important role in shaping the future of microcredit: efficient or
not, both socially and commercially. Two approaches that place the financial
performance and social performance of microcredit in perpetual opposition.
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Etudiant Chercheur : Brahim NAHI PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social Vlll
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Etudiant Chercheur : Brahim NAHI PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social ix
MOTS CLEFS
Agent de crédit, Association de Microcrédit,
Conseil Consultatif de Microcrédit, Fédération Nationale
des Associations de Microcrédit, Institution de Microfinance,
Microcrédit, Microfinance.
KEYWORDS
Loan officer, Association of Microcredit, Microcredit Advisory
Board, Nation Federation of Microcredit Associations, Microfinance Institution,
Microcredit, Microfinance.
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Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social x
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
SOMMAIRE :
Titre
|
Page
|
Introduction
|
1
|
Chapitre préliminaire
|
10
|
Partie I : Le microcrédit au Maroc, un outil
émergent de la politique publique sociale
|
28
|
Chapitre I : Présentation et analyse de la
politique publique sociale au Maroc
|
29
|
Section 1 : Le référentiel social de la
politique publique
|
30
|
Section 2 : Réglementations, Institutions &
Programmes de la PPS
|
41
|
Chapitre II : le Microcrédit au Maroc, levier de
développement socio-économique
|
52
|
Section 1 : Le microcrédit, de la
génération de revenu au renforcement des
capacités
|
52
|
Section 2 : Le microcrédit, un outil de lutte
contre les pauvretés
|
64
|
Conclusion Partie n°1
|
73
|
Partie II : Le Microcrédit, d'un discours
articulé sur la finalité sociale vers une pratique
orientée vers la performance commerciale
|
76
|
Chapitre I : Le microcrédit au Maroc, un secteur
en expansion
|
77
|
Section 1 : Présentation du secteur au
Maroc
|
78
|
Section 2 : Al Amana Microfinance, un acteur du secteur
de MC au Maroc
|
98
|
Chapitre II : Les effets de l'adoption du
référentiel de marché
|
130
|
Section 1 : Le MC et les nouveaux paradigmes de
développement
|
134
|
Section 2 : Les pratiques des AMC, des dérives
quant à la finalité originelle du MC
|
150
|
Conclusion Partie n°2
|
163
|
Conclusion Générale
|
165
|
Bibliographie
|
171
|
Tables des matières
|
178
|
Annexes
|
180
|
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social xi
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ABREVIATIONS ET ACRONYMES
AC : Agent de crédit
ADIE : Association pour le Droit à l'Initiative
Economique
ADS : Agence de Développement Social
AFD : Agence française de développement
AMC : Association de Microcrédit
AMO : Assurance Maladie Obligatoire
AMSED : Association Marocaine de Solidarité et de
Développement
AMSSF : Association Marocaine Solidarité Sans
Frontières
ANAPEC : Agence Nationale pour la Promotion de l'Emploi et des
Compétences
BAJ1 : Programme de priorités sociales au Maroc
BEI : Banque européenne d'investissement
BRI : Bank Rakyat Indonesia
CCMC : Conseil Consultatif de Microcrédit
M6MS : Centre Mohamed Six pour le Soutien de la Microfinance
Solidaire
CSRP : Cadre stratégique de réduction de la
pauvreté
EN : Entraide Nationale
FMI : Fonds monétaire international
FNAM : Fédération Nation des Associations de
Microcrédit
FBPMC : Fondation Banque Populaire pour le
Micocrédit
FONDEP : Fondation pour le Développent Local et le
Partenariat
HCP : Haut Commissariat au Plan
IMF : Institution de Microfinance
INDH : Initiative Nationale pour le Développement
Humain
MC : Microcrédit
MF : Microfinance
MIXMARKET: Plateforme mondiale sur le web relative à la
microfinance
OMD : Objectifs du millénaire de
développement
ONG : Organisation non gouvernementale
PAR : Portefeuille à risque
PPSM : Politique publique sociale au Maroc
PERG : Programme d'Electrification Rurale Global
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social xii
PAGER : Programme d'Approvisionnement Groupé en Eau
Potable des Populations
Rurales
PNCRR : Programme National de Construction de Routes
Rurales
PME : Petites et moyennes entreprises
RAMED : Régime d'Assistance Médicale
TPE : Très petites entreprises
SDS : Stratégie de développement social
SMIG : Salaire Minimum Interprofessionnel de Garantie
SYZ (site) : Sidi Yahia Zaer (village à la
périphérie et site Al Amana à Rabat)
USAID : United State Agency for International Developpement
YM (site) : Yacoub Elmansour (site AlAmana à Rabat)
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 1
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
INTRODUCTION GENERALE :
Aujourd'hui, le microcrédit connaît un
véritable succès tant par son «implication réelle et
son efficacité pour la lutte contre la pauvreté''1,
que par sa vision développementaliste. Il est ajusté pour
s'inscrire dans le registre de participation au décollage2
économique des pays émergents.
En exigeant des garanties pour pouvoir accorder des
crédits, les banques excluent bon nombre de personnes jugées ne
disposant pas de fonds nécessaires au remboursement d'un prêt
puisque « tout le monde ne peut pas obtenir un crédit
bancaire3».
Or, le microcrédit est avant tout un crédit
comme les autres car il incarne et « conserve toutes les
caractéristiques du crédit tel qu'il se développe dans les
organisations (...) bancaires4». Relevant d'un contrat entre
prêteur et emprunteur visant à garantir son remboursement, le
microcrédit est prescrit comme un petit prêt remboursable à
court terme servant au financement d'une activité économique
durable et rémunératrice. Comme il est destiné à
accompagner le démarrage des projets et activités
génératrices des revenus (AGR) des individus n'ayant pas
accès aux services bancaires classiques.
Son objectif consiste en la promotion du développement
social, c'est ainsi qu'il participe à la lutte pour l'éradication
de la pauvreté grâce à sa forme innovatrice d'aide qui ne
s'identifie plus à de l'assistanat pur et simple.
Le concept a vu le jour au Bangladesh au début des
années 70, grâce au Dr. Mohamed YUNUS5, qui l'a
«relancé'' à travers son organisation « La GRAMEEN BANK
» laquelle reste la première et fameuse institution du
microcrédit au monde.
1 BANGOURA, Lansana. (2010). Contrat de
crédit, risque moral, sélection adverse et incitation à
l'effort pour le remboursement en Microfinance. Université de
Franche Comté, CRESE, Besançon.
2 Idem
3 KADIRI, Ghalia & BOUCHAIB, Sarah. (2010).
Tout savoir du microcrédit. Magazine Stop Arnaques, Septembre
2010. (Enquête sur le microcrédit en France).
4 GLEMAIN, Pascal et MOULEVRIER Pascale. (2011). Le
«microcrédit'' : un crédit comme les autres ? La Revue
des Sciences de Gestion, 2011/3 - n°249-250 pages 123 à
131_Url :
http://www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion-2011-3-page-123.html
5 Professeur d'Economie à
l'Université de Chittagong au Bangladesh, qui fût le premier en
1975 à initier et lancer le projet des microcrédits.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 2
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Par la suite, l'expérience s'est rapidement
généralisée à travers le monde au nord comme au
sud. Un sommet International lui a été consacré en 1997
aux USA, et le phénomène a pris une telle ampleur que les Nations
Unies ont décidé de déclarer 2005 année du
microcrédit. Ce faisant, les NU ont consacré le MC comme l'un des
principaux outils devant permettre d'atteindre les Objectifs de
Développement du Millénaire (OMD).
Le secteur du MC au Maroc est relativement jeune et dynamique,
la première expérience a débuté en 1993 dans la
région de Khénifra avec l'AMSED s'appuyant sur l'association
locale Oued Srou (AOS). Le secteur bénéficie d'un contexte
institutionnel favorable, il est régi par la loi 18-97 votée en
1999. Actuellement, il existe plus de 12 associations d'ampleur nationale
coordonnant leurs efforts depuis 2001 dans le cadre d'une structure
fédératrice appelée Fédération Nationale des
Associations de Microcrédit (FNAM).
Jusqu'en 2007, le microcrédit au Maroc a
été souvent cité comme exemple typique d'un « succes
story » suite au succès réalisé et à la
croissance fulgurante qu'a connu le secteur pendant les dix années
«glorieuses» (1997-2007). Une telle réussite a
été rendue possible grâce à la détermination
des associations de microcrédit (AMC), l'appui de l'Etat, le soutien
financier du Fonds Hassan II pour le développement, le soutien financier
de la Fondation Mohammed V à travers l'INDH, l'engagement des banques
commerciales locales et l'assistance de la communauté internationale des
bailleurs de fonds.
En décembre 2007, quelques signes de la crise
commençaient à apparaître (crise des impayés,
augmentation des portefeuilles à risque, abandons de créances,
...). Certains annoncent qu'une telle crise est due essentiellement à
une croissance dite «non maîtrisée» du secteur. En
effet, des actions à caractère correctif ont été
initiées au sein du secteur par le lancement d'opérations de
réorganisation des associations actives avec une certaine
réadaptation de l'offre du MC d'autant plus que le gouvernement et les
instances de supervision ont rapidement réagi pour rétablir la
confiance.
La présente étude tente de questionner les
orientations attribuées actuellement au microcrédit, celles d'une
approche commerciale basée sur les règles et pratiques du
marché qui risque d'oublier pourquoi le MC a été
«inventé», développé et existe encore.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 3
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
De plus, la recherche essaye d'enrichir le débat et
l'analyse sur le dilemme de compatibilité entre la course à la
commercialisation du microcrédit et son objectif de départ qui
n'est autre que l'inclusion sociale des (plus) pauvres.
Par la même occasion, sont abordés au cours de ce
mémoire le rôle du microcrédit, ses objectifs, son impact
sur la qualité de vie et le devenir de ses destinataires (état
d'esprit, qualité de vie, pouvoir d'achat, revenus, santé,
formation, habitat... etc.).
1. PROBLEMATIQUE DE LA RECHERCHE
Le recours au crédit est une pratique très
ancienne et enracinée dans l'histoire de l'humanité, le fait de
recourir à cette recette est classiquement dicté par une
situation du besoin de financement d'une action, activité ou
investissement à réaliser.
A l'origine, le microcrédit a été
conçu en tant que mécanisme de financement de proximité et
ce pour inclure socialement les plus pauvres qui sont exclus par nature du
système bancaire. Bien qu'il soit communément admis que ce
dispositif présente un levier de développement social dans la
mesure où il participe « activement » au processus de lutte
contre la pauvreté, à travers la mise en oeuvre d'une offre
financière décentralisée et « adaptée »
au profit des démunis. Quoique l'évolution rapide du secteur, sa
refonte et l'émergence de l'adoption des pratiques commerciales par les
AMC ont permis la fleuraison d'un nouveau «business dans les pauvres»
appelé «business social» recherchant pérennité,
rentabilité et viabilité financières. Ce business
découvre dans les pauvres un marché important à investir
et, dont la base est l'existence d'une réelle demande de financement
avec des besoins croissants.
Dans les pays en développement, le microcrédit
se présente comme un moyen de lutte contre la
pauvreté6. Il exige la présence de deux dimensions
fondamentales et transversales7 : la rentabilité de
l'institution et le principe de solidarité qu'elle véhicule.
Cependant, un problème, caractérisé par le
schisme8 du MC, est souvent confronté par les institutions de
microcrédit : Y-a- t-il une conciliation à faire entre ciblage
des pauvres (performance
6 BERGUIGA, Imène. « Performance
sociale versus performance financière des institutions de microfinance
» Doctorante. Université Paris XII, Val de Marne,
Créteil France. 1_E.R.U.D.I.T.E
7 Idem.
8 BERGUIGA, Imène. Op. Cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
sociale) et l'atteinte de la viabilité
financière qui exige la réalisation de la plus value (performance
financière)? Peut-on combiner ces deux buts ?
Néanmoins, dans quelle mesure le fait de prêter
de «petites» sommes d'argent à des personnes pauvres,
considérées comme «non solvables», selon les
règles du marché, permet-il leur inclusion sociale ? Qu'en est-il
de la réduction de la pauvreté ? du développement de
nouvelles activités, de la création de nouveaux emplois, voire la
génération de revenus supplémentaires ?
Du point de vue du marché financier de
proximité, les clients du microcrédit sont des « pauvres
» chassés du système de financement classique. Sa raison
d'être est la rentabilité financière à travers la
mise en oeuvre de produits adaptés à la demande existante. Dans
un cas pareil, la quête de performance commerciale et celle de
viabilité financière ne repoussent-t-elles pas les AMC à
s'écarter de leur mission sociale ? Or, la contrainte de la croissance
des AMC accentue l'endettement des populations pouvant être excessif,
sans oublier les conséquences amplificatrices d'une concurrence
acharnée entre AMC au niveau de l'endettement croisé. N'y a-t-il
pas donc un risque éminent de perte de la vision sociale du
microcrédit au profit de considérations de visibilité
financière. Est-il indispensable à la croissance ou
correspond-t-il à une bulle spéculative9 dangereuse
pour l'économie lorsque les promesses de revenus futurs sont
surestimées ?
En effet, il me semble nécessaire de définir
deux hypothèses d'étude dont il serait utile de vérifier
la véracité tout au long de la présente recherche :
1ère Hypothèse :
Le microcrédit est un levier de développement,
dans ce cas comment impacte-t-il positivement la situation
socioéconomique de ses destinataires (niveau de vie, revenu, formation,
assistance et accompagnement, développement du secteur formel, suivi des
projets des bénéficiaires, promotion des bonnes pratiques de
gestion, ... etc.)? Permet-il de créer de nouveaux emplois, de nouvelles
activités et de générer des revenus
9 DOLIGEZ, François. (2002). Microfinance et
dynamiques économiques : quels effets après dix ans d'innovations
financières ? In: Tiers-Monde. Tome 43 (n°172).
Microfinance : petites sommes, grands effets ? pp. 783-808. Url
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
complémentaires ? Ses effets se traduisent-ils par des
améliorations au niveau de l'économie locale et des conditions de
vie des « clients » ? Son action peut elle être
qualifiée de suffisante et efficace face à la pauvreté et
à l'exclusion sociale?
Toutefois, le microcrédit peut-t-il avoir un effet de
réduction de la vulnérabilité10 ? Et ainsi
prémunir ses bénéficiaires contre les risques des
aléas de la vie en leur permettant, notamment dans le cas des plus
« pauvres », de développer une activité
génératrice de revenus, de se constituer un capital, tout en leur
évitant d'avoir recours à des emprunts à fort taux
d'intérêt ?
2ème Hypothèse :
Il est évident que la réalité est aussi
complexe pour noter que les pauvres n'ont pas attendu le microcrédit
pour faire des emprunts et les utiliser dans le but de satisfaire leurs besoins
de consommation ou encore de développer une activité. Le
microcrédit arrive, bel bien, dans un « marché financier
déjà très actif11», et auprès d'une
population qui sait ce que sont les dettes.
Donc, le microcrédit conçu comme un
système financier de proximité est construit autour d'un
marché dont les clients sont généralement pauvres et
exclus. Sa raison d'être est la rentabilité de ses
opérations à travers la mise en oeuvre d'une offre de produits
adaptés à la demande existante. Quelles sont donc les
caractéristiques dudit marché ? Comment fonctionne-t-il ? Dans ce
cas, l'objectif de performance commerciale (croissance, profitabilité,
viabilité, part de marché, ...) ne pousse-t-il pas les acteurs
à se dériver de leur mission sociale ? D'autant plus que le souci
de la croissance par l'atteinte de nouveaux clients peut probablement
être à l'origine de situations excessives de surendettement et de
détournement des prêts de leur objectif
développementaliste.
La question de ciblage des clients est une autre piste
à creuser afin d'examiner les clients privilégiés des
acteurs de MC ; ces derniers ciblent-t-ils les pauvres, les plus pauvres ou
simplement les solvables financièrement parmi eux ? Ces crédits
sont-ils destinés à la
10 ROESCH, Marc & HELIES, Ophélie. (2007).
La microfinance, outil de gestion du risque ou de mise en danger par
surendettement ? Le cas de l'Inde du Sud. Presses de Sciences Po, Autrepart
2007/4 (n° 44) pp.119-140. Url
http://www.cairn.info/revue-autrepart-2007-4-page-119.html.
11 Idem.
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Spécialisé Management du Développement Social 6
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
production, à la distribution ou à la
consommation ? Changent-ils réellement quelque chose à la
situation des destinataires ? Améliorent-ils leurs conditions de vie ?
S'agit-il du microcrédit ou du microendettement destiné aux
particuliers pauvres ?
2/ PERTINENCE DU THEME
Le choix du thème est dicté pour plusieurs
raisons, tout d'abord les débats enclenchés dernièrement
autour de l'intérêt social du microcrédit (MC) ne se sont
pas positionnés clairement quant à sa conceptualisation (levier
de développement, mécanisme financier, outil de lutte ou
d'éradication de la pauvreté, dispositif d'inclusion sociale
...etc.). Ensuite, les difficultés qu'a connues récemment le
secteur au Maroc - après une bonne période de réussite et
de croissance progressive - ont imposé une révision des
politiques au niveau du secteur et une revue d'ordre organisationnel des AMC
opérantes. De plus, les tentatives d'appropriation du MC par le
système néolibéral (FMI, BM) grâce au
développement originel du secteur a fini par attirer l'attention et
susciter l'intérêt des bailleurs de fonds à l'existence
d'un marché alléchant. Chose qui exige une réflexion
prudente sur les incidences et les effets de cette action au niveau de la
mission du MC. Enfin, il y a peu de temps la multiplication des appels en
faveur de la bancarisation des AMC et leur transformation en
sociétés financières, témoigne clairement de cette
tendance. Tous ces aspects sont, à mon avis d'une importance capitale et
méritent d'être examinés dans le cadre de cette modeste
recherche.
3/ METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Sur le plan méthodologique, la recherche est conduite
théoriquement selon la méthode déductive qui part de
données générale et les vérifie sur le terrain de
façon concrète. Elle est définie comme un ensemble de
procédures systématiques permettant de traiter des données
qualitatives conformes aux objectifs de la recherche.
Cependant, la déduction est globalement comprise :
d'abord en tant que vérification
empirique directe des généralités du
départ, à grande échelle, Ensuite, en tant
que validation des théories, hypothèses ou intuitions à
une échelle plus réduite.
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Spécialisé Management du Développement Social 7
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Dans le présent mémoire, la déduction est
prise comme un type de raisonnement qui consiste à passer du
général au spécifique; cela signifie qu'à partir de
faits rapportés ou observés (résultats de l'enquête,
entretiens, observations, etc.), on va aboutir à une idée par
vérification à partir d'un cadre théorique
pré-établi.
De ce fait, la recherche comporte un travail de terrain sous
forme d'une enquête qualitative réalisée dans la
région de Rabat auprès des ciblés par le
microcrédit (un échantillon de 63 bénéficiaires du
microcrédit parmi les clients de l'association AlAmana, choisis de
façon aléatoire et interviewés dans les locaux de
l'association) tout en ayant des entretiens avec les acteurs des AMC.
Toutefois, la réussite de cette tâche dépend de la
participation et du soutien des acteurs du microcrédit en matière
d'accès aux données et de prise de contact avec leurs
«clients».
4. SCHÉMA DU TRAVAIL
Il me semble pertinent d'approcher cette recherche selon le
plan présenté ci-après. De ce fait, ce dernier est
divisé en deux grandes parties suivantes :
Partie I : Le microcrédit au Maroc, un outil
émergent de la politique publique sociale
Chapitre 1 : Présentation et analyse de
la politique publique sociale au Maroc Chapitre 2 : le
Microcrédit au Maroc, levier de développement
socio-économique
Partie II : le microcrédit,
d'un discours articulé sur la finalité sociale vers une pratique
orientée vers la performance commerciale
Chapitre 1 : Le microcrédit au Maroc, un
secteur en expansion
Chapitre 2 : Les effets de l'adoption du
référentiel de marché (L'appropriation du MC par les
instances de BW ou les nouveaux paradigmes de développement)
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 8
Aussi, un chapitre préliminaire est consacré
à la genèse, fondements et bases du microcrédit. Quant au
travail sur le terrain et vu son importance, on l'a abordé au niveau de
la section 2 du 1er chapitre de la 2ème partie. A
l'égard de l'analyse des résultats du secteur permettant
l'appréhension de ses tendances, un ensemble de recommandations a
été proposé concernant aussi bien acteurs, intervenants
que parties prenantes du secteur de MC.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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« Le droit de s'endetter a ainsi été
constitutif du projet
(utopique) de construction d'une société
prospère et
sans classe (...) »12.
Nicolas DELALANDE
Source : L'image dans son contexte, sur
la page
www.lewebpedagogique.com/maule64/2010/01/
12 DELALANDE, Nicolas. (2011). Endettez-vous ! Le
«rêve américain» et le crédit à la
consommation. Publié dans
www.laviedesidees.fr
, le 14 septembre 2011.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
CHAPITRE PRELIMINAIRE
En fait, le crédit peut devenir un levier de
développement du moment qu'il offre une ressource pour aider chacun
à réaliser ses projets. Le microcrédit est d'abord une
réponse à des carences13 d'ordre bancaires, publiques,
associatives ou parfois familiales. Il permet de satisfaire des besoins
spécifiques jusqu'alors sans réponse.
Durant ce chapitre préliminaire on traitera trois
points : le volet historique et conceptuel du microcrédit, le
microcrédit comme système de financement alternatif et enfin le
dernier point cernera la typologie des acteurs du microcrédit.
I. GENESE, FONDEMENTS ET BASES DU MICROCREDIT
1. Aperçu historique :
Le concept de microcrédit est né en Europe,
à la fin du XIXe siècle, dans les mutuelles du crédit
agricole. A l'époque, il s'agissait d'une forme de crédit
collectif, dont le risque était couvert par la caution solidaire et la
supervision des pairs. Longtemps oubliée, l'idée a finalement
été reprise et modifiée en 1974 par le professeur
d'économie Muhammad Yunus. Après plusieurs expériences du
même type, le professeur décida de lancer un projet de recherche
afin de tester, à grande échelle, sa méthode de
crédits et de services bancaires adaptées aux populations des
zones rurales. Cela aboutit en 1983 à la création de la Grameen
Bank (« Grameen » signifie « village » en Bengali), premier
organisme indépendant de microcrédit au monde.)
Par la suite, ce système d'emprunt fut transposé
progressivement dans d'autres pays en développement, en Afrique et en
Amérique latine, souvent avec succès. L'introduction du
microcrédit en Occident s'est faite plus tardivement.
Dans des économies intégrées,
dotées de systèmes bancaires performants et de populations plus
aisées, son utilité semblait moins flagrante. Pourtant, les
pouvoirs publics ont soutenu
13 ALAIN. Bernard, « Le microcrédit,
pour sortir de la pauvreté », Projet, 2010/4 n°
317, pp. 40-42. , Url
http://www.cairn.info/revue-projet-2010-4-page-40.html
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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sa mise en place, convaincus d'avoir trouvé un vecteur
d'intégration pour les personnes en difficulté, qui ne
répondent pas aux conditions d'emprunt habituelles. La France fut
l'initiatrice du mouvement en Europe, avec la création de l'Association
pour le droit à l'initiative économique (ADIE) en 1989.
De la finance informelle au microcrédit
:
« Certes, le crédit est aussi vieux que le monde.
Les historiens situent sa naissance en Babylonie, quelque trois mille quatre
cents ans avant Jésus-Christ... »,14 et on retient aussi
que des origines du microcrédit ont été recensées
dans les années 1960 en Afrique (Burkina Faso, Cameroun). Toutefois, on
ne peut parler de véritable naissance du microcrédit que dans les
années 1970 au Bangladesh par Muhammad Yunus («emblème»
du microcrédit) qui, après avoir prêté de son propre
argent à des femmes pour qu'elles développent de très
petites activités commerciales, a créé la Grameen Bank
(banque de village ou des pauvres).
Avant l'apparition du microcrédit, des systèmes
de tontines existent depuis des siècles en Afrique du moment où
certains historiens en parlent des premières traces au 16ème
siècle. Ces systèmes fonctionnent parfaitement tout en mettant en
oeuvre le principe de l'épargne préalable dont la base
sociale15 est la connaissance, les relations personnelles, la
confiance, les affinités professionnelles ou « ethniques », le
voisinage, ...etc. En fait, ce sont des regroupements, à
l'échelle d'un ou plusieurs villages, de clients qui peuvent obtenir un
prêt après avoir constitué une épargne suffisante
pour garantir ce prêt. En Europe du 18ème siècle
est mis en place un système de prêts (Irlande, Swift) au profit
des artisans, les systèmes mutualistes (coopératives de
crédit et d'épargne sont apparues en Prusse vers 1850 par le
bourgmestre Friedrich Raiffeisen), également très
répandues et depuis de longues années ont permis un financement
de proximité aux couches défavorisées de la population.
Bel et bien avant, les pratiques informelles d'épargne
et de crédit existaient sous différentes formes et ne
respectaient nullement un quelconque cadre (les garde-monnaies, les tontiniers,
Dart) et les relations entre débiteur et créancier reposaient
uniquement sur la confiance construite entre eux, chose qui continue toujours
d'exister dans certains pays en
14 NOWAK. Maria, « On ne prête (pas)
qu'aux riches : la révolution du microcrédit », 2005,
Edition JC Lattés, p.89.
15 AGNES Lambert et KEFING Condé, « Le
secteur endogène va-t-il disparaître ? Tontine, « usuriers
» et Crédit rural de Guinée », In:
Tiers-Monde. 2002, tome 43, n°172. pp. 829-846. Url :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
développement. Toutefois, l'absence d'un cadre
formalisé (pas de conditions préalables, pas de frais de gestion,
absence de cadre fixe, absence de contrôle) met en avant
l'efficacité d'un tel système désigné de finance
informelle qui marchait très bien sans complications.
« L'histoire de Microcrédit remonte aux
années 1840. Mais il fut redécouvert dans les années 1970,
cent ans après la naissance de la première coopérative
d'épargne-crédit initiée par Raiffeisen. Il est donc
difficile d'en accorder la paternité au professeur Yunus. F.W.
Raiffeisen lança en 1848, en Rhénanie, la première
coopérative de crédit pour lutter contre l'usure qui surchargeait
les paysans. Contrairement aux Monts-de-Piété remontant au
Moyen-âge en 1462, les coopératives d'épargne et de
crédit ne sont pas des entreprises de prêt sur gage mais de
véritables intermédiaires financiers »16.
Le microcrédit depuis sa création repose sur un
principe17 simple : les plus pauvres sont exclus du système
bancaire, donc du crédit, puisqu'ils ne peuvent offrir de garanties du
fait qu'ils ne possèdent rien. Ils restent donc à la merci des
prêteurs, qui leur fournissent chaque matin de quoi assurer une
activité économique minimale génératrice d'un
faible revenu dont la grande partie servira au remboursement du prêt, et
le peu de ce qui reste est réservé à quoi faire survivre
sa famille.
F.G. Raiffeisen se rend compte «que le crédit est
la source de la plupart des appauvrissements et de la misère » 18 .
La Société de secours aux agriculteurs qu'il a fondé est
chargée de «réaliser des prêts à taux
raisonnables, afin de permettre l'acquisition du bétail pour en
éviter la location»19.
La solution de la Grameen Bank consiste à prêter
à ces pauvres, collectivement et de façon solidaire. C'est dans
la logique du groupe que réside la garantie qui manquait aux banques :
le prêt est octroyé à un individu, à condition qu'il
fasse partie d'un groupe de plusieurs individus s'engageant surtout à
garantir le remboursement de ce prêt si l'emprunteur n'est pas en mesure
de le faire lui-même. De plus, si le prêt n'est pas
remboursé, aucun des membres du groupe ne pourra prétendre
à un prêt pour lui-même.
16 DARAICHE, Rabie. (2008). Impact du
microcrédit sur l'activité économique: cas pratique
AlAmana. Université polydisciplinaire de Tétouan -
Mémoire de licence en science économique et gestion.
17 OSTENCEVIC, Sabine. Du microcrédit et de
son histoire. Site
www.esf.asso.fr
18 NASZALYI, Philippe. Crédit
coopératif, histoire et actualité l'héritage de Raiffeisen
(1818-1888) et Schultze-Delitzsch (1808-1885). Professeur associé.
Université d'Evry.
19 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
De ce fait, le microcrédit existe aujourd'hui presque
dans tous les pays en voie de développement ou de transition des cinq
continents et l'est aussi dans les pays dits développés,
notamment en France dans les secteurs où les politiques sociales de
l'Etat s'avèrent déficientes. Certainement, il a
été adapté à chaque fois aux
caractéristiques socioéconomiques, religieuses, voire politiques
de chaque environnement ciblé.
Certes, le modèle de la Grameen Bank a joué un
rôle important mais non révolutionnaire dans l'évolution du
développement du microcrédit depuis les années 1990.
Cependant le microcrédit existait bien avant et continue de se
développer pour impulser d'autres formes de financement de
proximité, c'est le nouveau concept de « microfinance » qui y
évoque évolution et développement.
Du microcrédit à la microfinance :
Le mouvement de microcrédit est né des nombreux
programmes conduits sur le terrain pendant les années 1970, qui ont
prouvé que les pauvres désirant développer une
microentreprise, peuvent réellement rembourser leurs microcrédits
alors qu'ils dirigent leurs affaires avec succès. Pendant les
années 1980 et 1990, le « mouvement » a poursuivi sa
progression avec l'offre de programmes correspondants aux changements dans la
réflexion sur l'objectif du développement durant cette
période. Les programmes de microfinance ont développé
d'autres services pour leurs clients, ainsi qu'une promotion
générale du secteur privé qui va en augmentant au
détriment des initiatives publiques de développement.
Encore, il est incontestable que la formidable réussite
du microcrédit, plus particulièrement celle de la banque des
pauvres (la Grameen), a permis à la microfinance de connaître un
essor décisif, à la fois pour sa pérennisation, et pour
les pays qui sont désormais touchés par le
phénomène.
Cependant, l'immense diffusion et la grande promotion des
différents systèmes de microcrédit depuis une vingtaine
d'années ont fait émerger un certain nombre d'interrogations
quant à leur aboutissement. En effet, ces systèmes connaissent
une réussite brillante.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Avec le développement de la microfinance, le
thème de la viabilité financière20 est devenu
central. L'organisation de microfinance doit devenir économiquement
viable dans un délai raisonnable, dans cette optique on sent une version
qui ressemble à la banque commerciale. Pour obtenir cette
viabilité, l'institution de microfinance (IMF) en vient à adopter
des raisonnements et des conduites de plus en plus proches de ceux des
banques.
Et cela amène à un deuxième
questionnement, qui est lui aussi récent qui concerne l'impact de la
microfinance. Qui est réellement touché par ces IMF ? et dans
quelles mesures ? Les plus pauvres ne sont-ils pas des laissés pour
compte ? Or il est très difficile de mesurer le changement
apporté par la microfinance à l'échelle d'un foyer, d'un
quartier ou d'un village : une grande partie du " mieux vivre " apporté
ne peut se quantifier : une alimentation de meilleure qualité, plus
variée, plus équilibrée, des enfants scolarisés
plus longtemps, des soins plus réguliers, des conditions de vie plus
salubres, plus hygiéniques, etc.
Plusieurs débats restent ouverts : les risques
engendrés de la transformation des IMF en "petites banques", le
problème de l'évaluation de l'impact, mais aussi les moyens
alternatifs de financer le développement. La prise de conscience globale
actuelle, peut-elle redonner un nouvel élan et une nouvelle dimension
à la microfinance, et au financement du développement des pays
émergents ?
Après avoir traité l'aspect historique on va
aborder dans le point suivant relatif à la notion de microcrédit,
sa démarcation par rapport au nouveau concept de microfinance et son
contenu.
2. Définitions du concept
La définition du microcrédit n'est pas
consensuelle : le critère pris en compte généralement est
soit le public cible, soit le montant des prêts, soit le rôle
principal supposé des institutions. Le terme de microfinance
désigne une multiplicité de services. Aujourd'hui, l'expression
d'« inclusion financière » est susceptible de marquer une
nouvelle étape, dans laquelle l'absence d'accès aux services
financiers deviendrait plus importante que la question originelle de la
réduction de la pauvreté. Par conséquent, il n'existe
aucune définition légale ou réglementaire au terme de
«microcrédit», alors que plusieurs essais
20 « Microfinance en Afrique : évolutions et
stratégies des acteurs (La) ». Revue publiée par
l'association Epargne Sans Frontières, n° 59-60.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
tentent de «délimiter» l'idée. Selon
la Banque Mondiale, le microcrédit consiste à «offrir
à des familles en situation de précarité économique
un crédit de faible montant pour les aider à s'engager dans des
activités productives»21.
A partir des années 1990, le concept «
microcrédit » a subi une évolution similaire aux mutations
qu'a connu le mouvement qui l'entoure déclenchant ainsi un large
débat relatif à la nature des objectifs escomptés,
à la question de ciblage, aux montants de crédits, aux
activités à toucher, aux taux d'intérêt, ...etc. Une
telle évolution paraît autrement dans le discours
développementaliste soutenu. Habituellement, il est admis que le
microcrédit peut jouer un rôle aussi important pour impulser le
financement et l'appui de ses cibles. Toutefois, plusieurs définitions
sont maintenues pour éclaircir davantage ce concept composé dont
on propose dans ce qui suit une synthèse composée. Or, le concept
est définit soit en relation avec l'importance du montant
prêté, soit en liaison avec les cibles touchées, soit par
rapport à la nature des activités financées.
D'abord, le microcrédit désigne l'octroi de
petits crédits à court terme aux pauvres qualifiés de
personnes à très faibles revenus pour les aider à conduire
des activités génératrices de revenus. Ces personnes n'ont
pas accès aux services financiers classiques et formels. De plus, est
considéré comme microcrédit tout crédit dont
l'objet est de permettre à des personnes économiquement faibles
de créer ou de développer leur propre activité de
production ou de service en vue d'assurer leur insertion
économique22. Il s'est développé sur la base de
la solidarité à travers la constitution de petits groupes dont
l'objet est de garantir les remboursements par solidarité entre
emprunteurs23.
Puis, le microcrédit correspond à des petits
prêts (10024 $ en moyenne) accordés à des taux
d'intérêt en principe plus bas que ceux du marché. Or, dans
la communauté européenne pour parler de microcrédit il
faut que le montant du prêt soit inférieur à 25
00025 €, ou encore moins dans le cas du Maroc où son
montant du microcrédit, ne doit pas excéder 50.00026
DH. Dans l'encyclopédie wikipédia le microcrédit consiste
généralement en l'attribution de
21 ATTALI, Jacques. Voyage au coeur d'une
révolution : la Microfiance contre la pauvreté. 2007, Editions JC
Lathés, p.33.
22 Site web Ministère de l'Economie et des
Finances-Maroc (
www.mef.gov.ma)
23 SERVET. Jean-Michel. (2005). Magazine Grain de
sel, n° 32, Septembre 2005.
24 Site web Planet Finance :
www.planetfinance.org
25 GREFFE, Marie. (2010). « Le
microcrédit n'est pas l'apanage des pauvres du Sud ».
Publié le 28/12/10 sur le site web :
www.dautresreperes.be
26 Site web Ministère de l'Economie et des
Finances-Maroc (
www.mef.gov.ma)
Op.cit,
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
prêts27 de faible montant à des
entrepreneurs ou des artisans. Les prêts sont généralement
à court terme, mais peuvent être renouvelés,
éventuellement avec des montants supérieurs pour les bons
payeurs.
Ensuite, et étant donné qu'il ne doit pas
être perçu comme acte de charité mais plutôt comme un
acte économique générateur de richesse. L'impact
socio-économique du microcrédit est considérable :
amélioration des conditions de vie des pauvres, création
d'emplois et transformation des microentrepreneurs en agents économiques
en tant qu'acteurs du développement local selon le Professeur Rida
LAMRINI, président d'INMAE et ex-président de la FNAM. Dans une
perspective économique un microcrédit bien réalisé
personnalise à la fois ses termes, ses prix, ses critères, ses
évaluations et sa diffusion pour proposer le meilleur accès
possible aux clients, de limiter les risques et de proposer des services
à long terme. Le microcrédit donne aux gens les moyens d'investir
dans leur capital humain et productif de manière plus profitable.
Enfin, on peut dire que le microcrédit est « (...)
un petit crédit, d'un montant peu élevé, sensiblement
inférieur au crédit qu'une entreprise ou un ménage peut
solliciter d'une banque. Ce crédit est demandé par des personnes
qui disposent d'un revenu relativement bas. Il est le plus souvent
sollicité pour « développer une activité
génératrice de revenu », (...) l'emprunteur ne dispose
d'aucune garantie à offrir car il possède peu de choses et n'est
sans doute propriétaire ni du logement qu'il occupe, ni de la terre
qu'il cultive. La seule garantie qu'il puisse offrir est de nature sociale :
avec d'autres candidats au crédit de son quartier ou de son village, il
peut constituer un petit groupe dont tous les membres se connaissent et peuvent
s'engager solidairement28».
Par conséquent, l'évolution du secteur de
microcrédit a permis l'émergence d'un nouveau concept de
microfinance, chose qui va être abordée dans ce qui suit.
3. L'apparition de la notion de «Microfinance» :
Le concept de « microcrédit » a subi une
évolution suite aux mutations du secteur du MC pour ancrer le rôle
d'acteur financier local innovant à travers les prestations offertes,
d'où
27 Site web de l'encyclopédie Wikipedia :
www.wikipédia.org
28 LELART, Michel. (2006). De la finance
informelle à la microfinance. (Editions AUF), p.25.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
l'apparition du concept de microfinance pour contenir les
nouveaux instruments financiers en plus de l'octroi des prêts.
Laurent LHÉRIAU cadre le champ de la microfinance
autour de quatre volets29 : la mise en place de financements
spécifiques en faveur de personnes non «bancables» pour des
activités génératrices de revenus ; l'extension de la
bancarisation aux populations exclues du secteur bancaire ; l'offre de moyens
de paiement et de transferts de fonds et la fourniture de services non
bancaires (microassurance, microépargne, ...).
Quant à la notion de microfinance, diverses
définitions ont été développées pour
présenter son contenu. Conçue comme une offre de services
financiers destinée aux démunies, la microfinance est l'apport de
soutien financier qui s'adresse aux mêmes cibles du MC. Elle inclue un
ensemble de services financiers (microcrédit, mais aussi assurance,
épargne, garanties etc.). Rida LAMRINI, président d'INMAE et
ex-président de la FNAM la définit comme un « ensemble de
moyens permettant de mettre à la disposition des populations pauvres un
petit capital à fructifier. Sa finalité est de permettre à
cette population de contrôler entièrement son capital pour
bénéficier des fruits de son labeur. Autrement dit, les
débarrasser de l'emprise des usuriers ». Mais pour Jean-Michel
Servet la microfinance est caractérisée par «le faible
montant des opérations, la proximité non seulement spatiale, mais
aussi mentale et sociale entre l'organisation et sa population cible, et la
pauvreté supposée des client(e)s ou l'exclusion qu'elles ou ils
subissent ». Il ajoute que c'est un concept générique
où « se cache en fait une diversité de modèles : les
organisations tendent à y associer de plus en plus d'autres services que
le crédit, en particulier l'épargne, les assurances, les
transferts30».
Par ailleurs, le développement du secteur est
qualifié de particulièrement rapide partout dans le monde. En
effet, le microcrédit s'est élargi pour inclure désormais
une gamme de services plus large (crédit, épargne, assurance,
transfert d'argent etc.) et une clientèle plus étendue
également (porteurs de microprojets, microentrepreneurs, jeunes
diplômés, immigrés, ex incarcérés, ex
prostituées,...). Dans ce sens, la microfinance ne se limite plus
aujourd'hui à
29 LHERIAU, Laurent. (2009). Précis de
réglementation de la microfinance. Editions Agence Française
de Développement (AFD).
30 KAMALA, Marius-Gnanou. (2007). SERVET
Jean-Michel, Banquiers aux pieds nus. La microfinance., Les Cahiers
d'Outre-Mer, n°238. Avril-Juin 2007. Url :
http://com.revues.org/index2580.html.
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Spécialisé Management du Développement Social 18
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
l'octroi de microcrédit aux pauvres mais bien à
la fourniture d'un ensemble de produits financiers à tous ceux qui sont
exclus du système financier classique ou formel.
Quant au nouvel apport de la microfinance, Maria Nowak,
fondatrice de l'Association pour le droit à l'initiative
économique ADIE (France), assure que la différence principale, de
la MF par rapport au crédit classique, est qu'elle est orientée
sur une cible nouvelle : les pauvres et les exclus. Il reconnaît leurs
talents, leurs besoins et leur capacité à rembourser les
prêts. Au lieu de les éliminer, par avance, de la clientèle
du crédit parce que les méthodes, les critères et les
garanties ne sont pas adaptés à leur situation, elle invente des
méthodes et des garanties qui leur conviennent. Au lieu de leur imposer
l'objet de leur prêt, (...) elle est à l'écoute de leurs
besoins. Elle permet ainsi de découvrir que les gens exclus du
crédit bancaire sont, comme les autres, dotés de l'esprit
d'entreprise, de la capacité de jugement et qu'au surplus, ils
remboursent plutôt mieux que les riches. Microcrédit comme
microfinance s'adressent à cette cible nouvelle.
II. LE MICROCREDIT, UN SYSTEME DE FINANCEMENT DE
PROXIMITE
Le mouvement de microcrédit est né pour
répondre à une demande tangible. Son offre était standard
au début, et petite à petit elle a commencé à
s'élargir suite aux requêtes des destinataires avant
d'élargir le champ de ciblage pour toucher (en plus des pauvres) les
économiquement faibles exclus du système financier classique en
proposant de nouvelles prestations (assurance, épargne, transfert de
fonds, ...).
L'existence d'une demande réelle et d'une offre de
produits conçus pour toucher un maximum de « clients »
témoigne de l'importance de ce marché, appelé business
social31, où les affaires peuvent être
développées avec succès.
La microfinance est devenue un système de financement
de proximité avec une diversité d'acteurs mettant à la
disposition des populations pauvres divers services financiers. Autrement dit,
il s'agit de structures alternatives de financement de l'économie
-diverses par la taille, le degré d'organisation, les moyens techniques,
financiers et humains- mises en oeuvre pour les populations à la base
avec ou sans le soutien de partenaires extérieurs en vue d'assurer
l'autopromotion économique et sociale de ces populations.
31 YUNUS, Mohamed. (2008). Vers un nouveau
capitalisme. Editions JC Lattés. p. 133
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
La microfinance en tant que système de financement
alternatif présente certaines caractéristiques
générales similaires dans l'objectif général ainsi
que les principes de fonctionnement : conditions d'adhésion, organes de
décision, dispositions financières notamment les conditions
d'épargne et de crédit .Ainsi l'objectif général du
microcrédit est de permettre le financement des activités
économiques de leurs membres adhérents à travers la
mobilisation de l'épargne locale et de fonds de l'aide
étrangère. De ce fait, l'institution de MF devient un outil
financier au service du financement de l'économie locale. Elle est aussi
un instrument à cette fin de mobilisation de l'épargne.
Dorénavant les personnes avec de faibles revenus ont
prouvé réellement qu'ils remboursent leurs prêts et
gèrent efficacement leurs affaires. Cette réalité
remarquée récemment a changé de modèle dans le
développement économique car elle présentait les personnes
à bas revenus comme une population qui veut être traitée
sur un principe d'égalité à partir du moment où on
lui offre les mêmes opportunités. Les bénéficiaires
des prêts étaient alors considérés comme des «
partenaires » du développement.
Le microcrédit encourage une situation fondée
sur le « relationnel » client-prêteur que beaucoup
considèrent comme la relation d'avenir dans les affaires. Il y a
désormais de nombreux exemples de programmes de microcrédit
à travers le monde qui contribuent à la réduction de la
pauvreté, à la prise de pouvoir de la part des groupes
défavorisés (émancipation des femmes) et à la
création d'emplois.
1. Profil du secteur
Le secteur du microcrédit se compose de
différents types d'acteurs. Par ailleurs, le fonctionnement du secteur
en tant que système de financement de proximité présente
certains traits caractéristiques fondamentaux. Le profil du secteur peut
être appréhendé à travers une présentation
succincte (clients, produits, taux,...) et ses principales
spécificités. La typologie des acteurs sera abordée au
3ème point du chapitre préliminaire.
? Clients du microcrédit
Le microcrédit a été conçu pour
aider les personnes considérées comme étant pauvres. Il
s'agit d'un groupe très varié, réparti sur toute la
planète, y compris dans les pays en développement. Certains
bénéficiaires vivent mêmes dans des pays
industrialisés comme les
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Etats-Unis d'Amérique. Les études
démontrent que la majorité des clients (67%) sont des femmes,
avec seulement 33% des hommes.
Le client type des services de microcrédit est une
personne dont les revenus sont faibles et qui n'a pas accès aux
institutions financières formelles faute de pouvoir remplir les
conditions exigées par ces institutions (documents d'identification,
garanties, dépôt minimum etc.). Il mène
généralement une petite activité génératrice
de revenus dans le cadre d'une petite entreprise familiale :
- Dans les zones rurales, ce sont souvent de petits paysans ou
des personnes possédant une petite activité agroalimentaire ou un
petit commerce.
- Dans les zones urbaines, la clientèle est plus
diversifiée : petits commerçants, prestataires de services,
artisans, vendeurs de rue, etc.
On les dénomme généralement sous le terme
de microentrepreneur et la plupart d'eux travaillent dans le secteur informel.
C'est donc aux individus qui composent ce segment de marché exclu ou mal
servi par les institutions financières classiques que s'adresse le
microcrédit.
? Nombre de bénéficiaires du
microcrédit
L'objectif fixé par le Sommet du Microcrédit
organisé par l'ONG « Results Education32 » en 1997
était d'atteindre 100 millions des familles les plus pauvres du monde
à l'horizon 2005. Les chiffres les plus récents publiés
par Microfinance Information Exchange démontrent que l'on comptait 99.4
millions d'emprunteurs en 2008 alors que le nombre de
bénéficiaires au Maroc a dépassé un million pour la
même année (2008).
? Les produits du microcrédit
Ce point sera présenté brièvement,
à titre indicatif, puisqu'on reprend en détail la panoplie de
l'offre du microcrédit au niveau du chapitre 1 de la 2ème
partie.
En plus du crédit solidaire ; le secteur du MC propose
à ses clients le crédit individuel, le crédit au logement
et le financement du raccordement à l'eau potable, au réseau
32 Association Canadienne créée en 1991
dont l'objectif est la lutte contre la pauvreté dans le monde via la
recherche, l'éducation et la sensibilisation.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
d'assainissement et à l'électricité.
D'autres produits sont mis au point à savoir le crédit individuel
à l'équipement, le crédit d'élevage, le
crédit pour le tourisme rural et le prêt d'acquisition de kits
solaires dans les zones rurales enclavées.
Toutefois, d'autres produits sont en phase de
développement notamment la microépargne, les produits
destinés aux diplômés porteurs de microprojets, la
microassurance, le transfert d'argent, financement d'activités
créées par les anciens prisonniers...etc.
? Les taux d'intérêt appliqués aux
microcrédits
Fournir des services financiers à des personnes
à revenus modestes revient parfois cher, particulièrement en
proportion des montants des transactions concernées. C'est d'ailleurs
l'une des principales raisons pour lesquelles les banques n'octroient pas de
petits prêts. Un prêt de 1000 DH, par exemple, exige pour son
traitement le même personnel et les mêmes ressources qu'un
prêt de 10.000 DH, ce qui augmente considérablement le coût
par unité de transaction.
Les taux d'intérêts appliqués aux
microcrédits sont généralement élevés car le
traitement des transactions coûte cher aux AMC. La plupart des AMC
perçoit un taux d'intérêt d'environ 30%, mais il arrive que
des taux d'intérêt supérieurs soient appliqués.
Selon une enquête menée en 2006 par la Banque Asiatique (Asian
Development Bank), certaines IMF en Asie perçoivent jusqu'à 70%
d'intérêt. La Banque Grameen au Bangladesh applique un taux
d'environ 20%, tandis qu'au Maroc Alamana Microfiannce pratique un taux
avoisinant 20 %.
En MC, les agents de crédit doivent en effet rendre
visite au client à son domicile ou sur son lieu de travail,
évaluer sa solvabilité sur la base d'entretiens avec la famille,
le voisinage. Une fois le prêt accordé, ils doivent effectuer un
suivi rapproché et fréquent par le biais de visites pour
renforcer la culture de remboursement. Par conséquent, les coûts
de gestion d'une multitude de petits prêts sont donc très
importants, chose qui contraint les institutions à appliquer un taux
d'intérêt généralement élevé.
L'expérience prouve aussi que les clients sont
prêts à payer des taux d'intérêt assez
élevés pour s'assurer d'un accès permanent au
crédit. En effet, généralement, le retour sur les
investissements réalisés grâce au capital obtenu peut
s'avérer bien supérieur au taux
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
d'intérêt du crédit. En effet, le recours
à d'autres alternatives (prêteurs sur gages, usuriers) et
l'absence de toute source de financement peut être plus pénalisant
que le MC. A titre d'exemple, les taux d'intérêt dans le secteur
informel peuvent atteindre 20 % par jour pour certains usuriers sur le
marché.
? Rôle des gouvernements dans le
développement du microcrédit
Jusque récemment, les gouvernements considèrent
de leur devoir et de leur responsabilité de prendre une part active au
« financement du développement », en conduisant par exemple de
vastes programmes de crédit pour les populations
défavorisées (rurales en particulier). Ces dispositifs,
généralement fort coûteux, ont toutefois rarement
démontré une réelle efficacité et il existe
très peu d'exemples ou le crédit distribué aux pauvres par
l'Etat ou ses démembrements ait été
récupéré à un coût relativement
acceptable.
Aujourd'hui, la tendance consiste à ne plus intervenir
directement mais plutôt faire appel à des opérateurs
spécialisés en microcrédit.
Par contre, les gouvernements devraient beaucoup plus
s'impliquer en menant une réflexion globale avec les différents
acteurs quant au développement du secteur en général. Ces
réflexions devront également aboutir, dans les pays où le
microcrédit est le plus développé, à la
définition et à l'adoption d'une politique sectorielle. Or, cette
dernière peut constituer un appui à la mise en place
d'associations professionnelles, de centrales de risques et de cercles de
réflexion sur le cadre réglementaire et jurisprudentiel relatif
au secteur.
III. LES ACTEURS DU MICROCREDIT, DIFFERENTES FORMES
POUR UNE SEULE FINALITE
Dans ce qui suit on va traiter les trois points suivants : formes
des acteurs de microcrédit, nécessité du MC au nord et sa
présence dans les pays de l'Union Européenne.
1. Typologie des acteurs
Au cours des vingt dernières années, on a vu se
développer de nombreuses organisations actives en matière de
microcrédit. Il existe, de nombreux cas plus ou moins différents
de par le monde et quatre grands types d'acteurs coexistent dans cette
démarche :
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
? Le premier, d'inspiration plus coopérative, (genre
mutuelle ou coopérative) a cherché
à mettre en place ou à renforcer des
organisations populaires où les microentrepreneurs étaient
à la fois épargnants et emprunteurs du système. Il utilise
l'épargne collectée auprès de leurs membres pour octroyer
des crédits. Il cible les plus démunis. Sa
spécificité est de vouloir construire des institutions à
partir de leurs bénéficiaires, c'est en cela qu'on y retrouve un
côté coopératif plus affirmé.
? Le second est illustré par les banques : ce
sont généralement des organismes publics centralisés ayant
pour objet le financement ciblé de secteurs stratégiques comme
l'agriculture et l'industrie. Par exemple en Inde la National Bank for
Agricultural and Rural Development a instauré un système efficace
de "self-help groups" (SHG : groupes d'entraides autonomes) qui permet
l'accès aux services de microfinance à plusieurs millions de
personnes. En Indonésie on trouve la BRI qui a consisté à
transformer une partie de cette banque de manière à offrir des
services spécialisés en direction des microentrepreneurs.
? Le troisième a mis sur pied des ONG ayant pour
vocation de réaliser elles-mêmes l'intermédiation
financière. On a ainsi vu la création d'ONG de microcrédit
qui, après s'être procuré des fonds, soit à travers
des donations ou à travers des crédits, octroyaient
elles-mêmes des crédits aux microentrepreneurs. Dans ce cas,
l'accent a surtout été mis sur l'octroi de crédit alors
que la collecte de l'épargne étant généralement
interdite aux ONG.
? Le dernier est celui des institutions financières
: elles reflètent la commercialisation croissante de la microfinance
en fournissant des services de microcrédit, microassurance et
dépôts tout en étant orientées vers une
profitabilité économique.
? La surveillance et la supervision
Elle constitue un élément central de
l'équilibre du secteur de microcrédit et un point de divergence
sensible par rapport à la supervision bancaire «classique».
La diversité des enjeux et le grand nombre de
microstructures ont amené la plupart des autorités de
régulation à distinguer entre la « supervision prudentielle
» et la « surveillance non prudentielle » des très
petites IMF non assujetties au respect des normes prudentielles de la
profession.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
La supervision est désormais le plus souvent
réalisée par la banque centrale ou une commission bancaire, plus
rarement par le ministère des Finances. En appui à la
supervision, on note l'utilité de la délicate mission de
certification des comptes par des auditeurs externes agréés.
2. Le microcrédit : une nécessité dans
l'hémisphère nord
Quand on parle de microcrédit, on pense souvent aux
pays du Sud. Il est vrai que le microcrédit a revu le jour et s'est
développé principalement dans le Sud. Toutefois, le
phénomène a pris de l'ampleur quand l'ONU a décidé
de déclarer 2005 "année internationale du microcrédit".
Toutefois, cette façon originale d'encourager l'activité
économique est sujette d'ajustements possibles aux besoins des
activités de façon à limiter le poids de la dette et le
risque de crédit.
Le microcrédit existe donc aussi dans le nord. La
finance solidaire remonte en Belgique au XVIIe siècle, avec le Mont de
Piété qui prêtait sur gage à un taux
d'intérêt faible ou nul. Cette institution existe toujours. Ces
dernières années, le microcrédit s'est «
marchandé » dans les pays industrialisés. Il faut dire que
la part de la population exclue du système financier traditionnel ne
cesse de croître et ce comme ceci a été accentué par
la crise financière et économique de ces dernières
années qui a contribué à cette exclusion tant des
particuliers que des petites et moyennes entreprises (PME). La Grameen Bank,
active à la base au Bangladesh, a développé ses
activités dans d'autres pays. Elle possède d'ailleurs une filiale
aux Etats-Unis d'Amérique et compte s'implanter en Europe.
Le microcrédit a pris sa forme actuelle en Europe dans
les années 1990 (Belgique). Quelques institutions ont voulu alors
répondre à des besoins non satisfaits par les banques classiques
en proposant des crédits de faible montant à taux
d'intérêt réduit. Aujourd'hui, l'Europe compte de nombreux
organismes de microcrédit (En Belgique : le Crédal, Brusoc et le
Fonds de participation ; en Roumanie : Fair credit house ; au Royaume-Uni :
Fair Finance ; en Espagne : Acaf ; en Suède : Neem ; en France :
ADIE,...). Reste à dire que l'institution française ADIE
créée en 1989 est l'une des plus connues dans le vieux continent.
Ici, il s'adresse aux indépendants, exclus du système de
crédit bancaire traditionnel, qui veulent lancer ou développer
une affaire. Il est plafonné à 25000 euros et le taux
d'intérêt est stable et non lié au marché ni au
risque de crédit. L'octroi de microcrédits
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
va généralement de pair avec des services
d'accompagnement qui vont aider le bénéficiaire à
réaliser son projet.
Le microcrédit s'est donc révélé
au fur et à mesure du temps, un moyen efficace pour tenter d'aider les
personnes ayant du mal à accéder au marché de travail et
au système bancaire traditionnel. L'Europe s'y est
intéressée donc tout doucement en signant en 2007 l'initiative
européenne pour le développement du microcrédit et ainsi
mettant en place un réseau européen de la microfinance.
Le dynamisme du microcrédit en Europe centrale et de
l'Est s'est réellement fait sentir dès la chute du communisme. Le
désir de transition économique a été un
véritable moteur pour le microcrédit dans cette partie du
monde.
Plus généralement, dans les pays
développés, le microcrédit se traduit par la
création d'une activité économique
génératrice de richesses, la sortie du chômage ou de
l'exclusion, la création d'emplois.
? Groupes Cibles
Les groupes cibles sont différents entre le Nord et le
Sud. En effet, dans le Sud, le microcrédit s'adresse essentiellement
à un public pauvre et féminin. Dans l'Europe de l'Ouest par
exemple, deux groupes cibles peuvent être identifiés : ceux qui
risquent de tomber dans la pauvreté et les microentrepreneurs
déjà existants, mais qui ont du mal à obtenir des services
financiers des banques conventionnelles. Par ailleurs, en Europe, le terme
« pauvres » peut être remplacé par « exclus »,
tant par rapport au marché du travail que par rapport aux banques.
Depuis plusieurs années, la Commission
européenne impose certaines conditions à la microfinance. En
effet, dans le cadre du programme pluriannuel pour les entreprises et l'esprit
d'entreprendre, plus particulièrement pour les petites et moyennes
entreprises (2000/819/CE), le Conseil de l'Union Européenne
décrit un microcrédit comme un prêt dont le montant est
plafonnée à 25.000 euros. En effet, au regard du niveau de vie
plus élevé et des exigences légales, il est plus difficile
d'entamer une activité indépendante avec une somme très
modique dans les pays du Nord. En France, en Allemagne et au Royaume-Uni,
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les montants moyens tournent aux alentours de 10.000 euros, en
Belgique et aux Pays-Bas, ils sont nettement plus élevés
(respectivement 22.500 euros et 20.000 euros).
En Europe de l'Ouest, les organismes de microcrédit
relèvent principalement du milieu associatif, les cadres juridiques sont
assouplis grâce aux partenariats élaborés avec les
banques.
3. Cartographie du secteur en Europe
En 2007, un total de 26.658 microcrédits pour
297.779.000 euros a été distribué par sept pays de l'Union
Européenne. Toutefois, le microcrédit en Europe occidentale est
destiné à lutter contre l'exclusion sociale et financière
au moyen de la promotion de la micro-entreprise et du statut
d'indépendant.
Un rapide inventaire non exhaustif des acteurs de
l'activité de microcrédit dans certains pays européens, en
rapport avec les offreurs présents sur le marché est
présenté ci-après :
1. France : Le marché
est particulièrement développé par rapport aux autres
pays, ceci sous l'influence majeure de l'association ADIE créée
en 1989. Beaucoup d'autres institutions oeuvrent dans ce domaine, notamment les
associations France Initiative et France Active. L'ensemble de ces institutions
a pour objectif la lutte contre l'exclusion sociale et financière en
offrant des microcrédits, des prêts d'honneur à taux 0%, ou
encore par l'apport d'une garantie aux banques sur les prêts ; ceci
souvent dans le but de permettre le déblocage d'un prêt par le
système bancaire. De plus, les banques commencent elles- mêmes
à pénétrer le marché comme le témoignent les
initiatives de la Caisse d'Epargne à travers la création de
« Parcours Confiance » et de l'IMF Crea-Sol.
2. Italie : L'Italie est le
pays ayant le plus grand nombre d'offreurs, avec une plus grande
variété de types d'institutions. De plus, 44% sont des fondations
et 22% du marché italien sont des ONG. Les organismes à but non
lucratif dominent et se composent de trois systèmes (les
coopératives, les micro- prêteurs et les ONG). L'ensemble des
organismes vise particulièrement les personnes en situation d'exclusion
sociale et les nouvelles micro-entreprises.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
3. Espagne : bien que trois
types d'organismes différents distribuent du microcrédit, avec
notamment 88% de fondations et caisses d'épargne, un seul type de
fournisseur régule en fait le marché à savoir les caisses
d'épargne. Par exemple, la caisse d'épargne Caixa catalunya qui a
créé en 2001 la fondation « Un Sol Món » ciblant
les personnes démunies avec des prêts entre 5 000 et 8 000
€.
4. Allemagne : Les types
institutionnels en Allemagne sont divers et au nombre de cinq, avec toutefois
36% de banques et 27% d'organismes publics. Trois systèmes axés
sur le financement du microcrédit existent. Tout d'abord, les programmes
d'appui des banques, comme la KFW, couvrant un quart du marché, qui
fournit des lignes de crédit et garantit 80% des microcrédits
accordés par les banques commerciales. Ensuite, les organismes
privés accrédités par l'Institut Allemand de la
Microfinance qui financent la création d'entreprise en
coopération avec les banques. Et enfin, les organismes gouvernementaux
comme les ARGE, centres d'emploi locaux qui couvrent la moitié du
marché national, et travaillent spécialement avec les personnes
exclues.
5. Royaume- Uni : 100% des
institutions sont des ONG, avec un nombre d'acteurs assez important
comparé aux autres pays. Même s'il arrive que les banques
commerciales octroient des prêts d'un montant inférieur à
25 000€, cette activité relève davantage du ressort des
« Community Development Finance Institutions », organismes à
but non lucratif, qui se sont développés dans les années
1990 et qui prêtent pour des montants souvent inférieurs à
10 000€. Par exemple, l'association Fair Finance, créée en
2005, octroie des microcrédits personnels jusque 2.900€, des
prêts professionnels jusque 14 500€, et offre également des
conseils financiers.
6. Belgique : Le
marché semble plutôt être un oligopole dont 75% d'organismes
publics. Les principaux acteurs sont, au nombre de trois, toutes des IMF
à savoir le Fonds de Participation, le Credal, et Brussoc. Par exemple,
le Fonds de Participation, organisme public de crédit,
créé en 1984, permet l'octroi d'un microcrédit en
complément d'un prêt bancaire, et propose également un
service d'accompagnement aux personnes.
7. Finlande : Le marché du
microcrédit est un monopole régulé par un organisme
public
Finnvera qui est une société de financement. Cet
acteur majeur créé en 1999, est la propriété de
l'Etat. C'est un programme qui offre d'une part des prêts aux
microentreprises, facilite l'accès au financement pour les PME en
fournissant la garantie des risques complémentaires en
coopération avec les banques et autres institutions financières,
ainsi que des garanties de crédit à l'exportation.
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Partie I : Le Microcrédit au Maroc, un outil
émergent de la politique publique sociale
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
INTRODUCTION
La première partie du rapport se compose de deux
chapitres, le 1er chapitre est une présentation succincte de
la politique publique sociale au Maroc y compris certains projets phares
dédiés à l'amélioration des infrastructures de
base. Le second chapitre examine la promotion du MC comme un levier de
développement socio-économique permettant création de la
richesse, amélioration des conditions de vie, émancipation
sociale, réduction des pauvretés, ...etc. Il tente, aussi, de
nuancer les deux acceptions du MC : est-il un dispositif de
développement social ou juste un instrument financier plus ajusté
à l'échelle micro pour répondre aux besoins d'une
clientèle particulière.
Dans cette partie on examine l'importance de la valeur
qu'accordent les pauvres au MC dont l'utilité se démarque
notamment en tant que filet de sécurité permettant de
«transiter» la zone de vulnérabilité. Elle conclut en
outre que le MC diffère de l'assistanat et admet le financement de
l'investissement productif à l'instar des AGR participant à la
création de la richesse.
Chapitre I : Présentation et analyse de la politique
publique sociale au Maroc
La dimension sociale a toujours fait partie des
préoccupations du pouvoir public au Maroc. Ceci est affirmé par
l'affectation d'une part significative du budget de l'Etat aux secteurs
sociaux. Les dernières années ont été
marquées par la forte émergence de la société
civile et le renforcement de la solidarité nationale. De nombreux
acteurs participent activement à l'effort développementaliste
sociétal en partenariat avec l'Etat.
Certes, le bilan social du PAS (Programme d'Ajustement
Structurel appliqué au Maroc durant les années 1980) était
lourdement déficitaire chose qui a exigé une expansion des
programmes publics ou « privés » (société
civile) à caractère social. Etant donné le déficit
important enregistré au niveau des indicateurs sociaux, l'Etat a ouvert
divers chantiers sociaux en appelant d'importants investissements afin
d'atténuer les carences et y remédier aux manques
constatés.
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Spécialisé Management du Développement Social 30
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Le 1er chapitre se propose de présenter
sommairement la politique publique sociale au Maroc (section 1), de faire son
analyse avant d'aborder dans la 2ème section le cadre
réglementaire et institutionnel de ladite politique (PPSM) pour en
terminer avec le cas de l'INDH (Initiative Nationale pour le
Développement Humain) et la place qu'elle a réservé au
microcrédit dans ce projet décrit comme chantier de
règne.
Section 1 : Le référentiel social de la
politique publique
§ 1 : Présentation de la politique publique
sociale au Maroc
Dans le domaine social, le Maroc a mis en place, depuis les
années cinquante, une stratégie de développement social
basée sur l'élargissement de l'accès des populations
défavorisées aux services sociaux de base, l'accroissement des
opportunités d'emploi et de revenu et le renforcement de
l'intégration sociale des précaires. Cette stratégie a
été mise en oeuvre à travers un certain nombre de
programmes tels que le programme d'équipement rural, de lutte contre la
pauvreté et l'exclusion, de logement social et de lutte contre l'habitat
insalubre, programme national pour l'emploi, programme ville sans bidonville
... et aussi par l'initiation d'un certain nombre de réformes :
réforme du secteur de l'Education, de la Santé, de l'emploi, de
la protection sociale, ...etc.
Point 1 : Conception d'une vision du développement
social
Dans les années 80 du dernier siècle, la crise
économique des PVD a été marquée par le poids de la
dette extérieure. Les instances de Brettons Woods sont entrées en
ligne en proposant à ces pays des plans de relève. A l'instar des
pays touchés par cette crise, le Maroc s'est lancé en 1983 sous
l'impulsion du FMI et de la BM dans un programme d'ajustement structurel (PAS),
« pour faire face aux faiblesses de l'économie marocaine au niveau
interne et externe ainsi que pour rétablir ses grandeurs
macro-économiques au niveau de la balance des paiements et de la dette
extérieure »33.
Depuis 1995, la lutte contre la pauvreté a
été retenue au Maroc comme une priorité nationale et est
devenue l'une des préoccupations majeures de l'État. Ainsi et en
général, en matière de lutte contre la pauvreté,
deux axes d'intervention ont été identifiés. Le premier
33 BENJELLOUN, Mohammed Amine. (2006). Impact du
microcrédit sur l'activité économique : cas de
l'ASMSSF/MC. Université Sidi Mohammed Ben Abdellah - FES -
Mémoire de Licence fondamentale.
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Spécialisé Management du Développement Social 31
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
axe couvre des programmes de court terme avec des actions
à caractère concret et parfois urgent tandis que le second
constitué des actions de long terme qui forment ce que l'on peut appeler
de façon large la politique de développement économique et
social.
En effet, le développement social au Maroc a pris une
nouvelle ampleur par l'appui de l'Etat et la mobilisation des ONG. La part du
budget de l'Etat accordée au social est passée de
3934% à plus de 47% entre 1993 et 2002 pour atteindre plus de
50% en 2010. Les secteurs sociaux font ainsi l'objet de programmes d'envergure,
particulièrement l'éducation, la formation et les infrastructures
de base.
En parallèle, le Maroc s'est lancé dans
l'amélioration de son système de prévoyance sociale et la
modernisation de ses filets de sécurité. De plus de nombreuses
institutions gouvernementales (Fonds Hassan II pour le développement
économique et social, l'Agence Nationale de Promotion de l'Emploi et des
Compétences, l'Agence de Développement Social,...) ont
été créées pour mettre en oeuvre une
stratégie dans le domaine social.
Ainsi, une réorientation de la politique de
développement économique et sociale35 s'est
opérée. Déjà au niveau du discours, les mots
pauvreté et exclusion sociale ont remplacé ce qui était
dit dimension sociale de l'ajustement. Plus concrètement, des politiques
spécifiques de lutte contre la pauvreté ont vu le jour. Les
pressions intérieures et le contexte international ont favorisé
l'émergence et l'usage de nouveaux concepts.
L'axe développement du capital humain met de l'avant le
fait que la vraie lutte contre la pauvreté dépend de la mise en
valeur de ce dernier à travers l'accès des populations aux
différents services sociaux de base et à toutes les
infrastructures. L'objectif de long terme vise à renforcer les
capacités des populations à générer des revenus
durables qui les aident à sortir du cap de la pauvreté.
Certains des programmes de cet axe ont été mis
en place depuis l'indépendance et ont été toujours
reconduits et parfois ajustés. Ils ont en fait constitué le noyau
de ce qui est devenu
34 Rapport du Ministère d'Economie et des
Finances. Année 2002.
35 ABDELKHALEK, Touhami. (2009). Cadre
stratégique national de réduction de la pauvreté au Maroc
: à propos du concept de pauvreté et analyse de la situation.
Septembre 2009.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
par la suite des filets de sécurité (l'Entraide
Nationale, la Promotion Nationale, la Caisse de Compensation, les Cantines
scolaires, ..., etc.). Au fil des années, ces programmes ont plus ou
moins réussi à toucher une partie assez importante de la
population défavorisée. Au niveau de leur financement, plusieurs
de ces programmes ont été soutenus par des apports
d'organisations internationales.
L'axe assistance sociale des pauvres, au niveau de cette
stratégie, est peut-être le plus visible pour la population. Pour
éviter que cette assistance n'incite à la dépendance,
source d'une plus grande vulnérabilité dans le futur, la
stratégie de lutte contre la pauvreté n'adopte ce type
d'interventions que pour des strates spéciales de la population
défavorisée : les enfants abandonnés ou sans familles, les
personnes âgées sans assistance, les mères de familles sans
ressources régulières, les sans abri, les personnes
handicapées inactives, les femmes célibataires sans revenu ...,
etc.
Les différents axes de cette stratégie ont
été déclinés en plusieurs mesures et actions.
Certaines, d'ordre structurel, visaient principalement l'amélioration de
l'accès des populations pauvres actives à des emplois et à
des ressources productives. Un deuxième groupe de mesures cherche
à renforcer et à améliorer le niveau de ciblage des
différents filets de sécurité mis en place pour venir en
aide aux pauvres. D'autres, plus macroéconomiques, cherchaient à
rationaliser les dépenses publiques sociales en essayant de les
infléchir en faveur des secteurs sociaux.
Sur le plan pratique, un premier programme de priorités
sociales a été rapidement conçu et mis en place
baptisé BAJ1. Dans celui-ci, les provinces36 les plus pauvres
ont été retenues pour bénéficier de trois projets
intégrés : l'éducation de base, la santé de base et
les actions de la promotion nationale.
« En 20 ans, des progrès notables ont
été accomplis, attestés par l'évolution positive de
la plupart des indicateurs sociaux et socioéconomiques. Mais les
progrès enregistrés sont constamment meilleurs en milieu urbain
qu'en milieu rural où les déficits sociaux persistent
36 Au nombre de 14 provinces à l'époque
(Année 1997)
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
s'accompagnant d'une recrudescence de la pauvreté
rurale observée dans la décennie 90. Pourtant depuis le milieu de
cette décennie, les dépenses publiques dans les secteurs sociaux
ont connu une forte progression, particulièrement dans le milieu rural
et les provinces défavorisées. D'ambitieux programmes
d'infrastructure à orientation rurale comme le PERG, le PAGER, le PNCRR
sont venus compléter les dépenses publiques sociales sectorielles
et les autres programmes de développement rural (...) 37»
Dans le domaine de la santé, l'action publique a permis
d'améliorer sensiblement la situation, ce qui est démontré
par l'évolution de l'offre publique de soins de santé et des
indicateurs sanitaires.
L'extension de la couverture médicale de base pour
toucher l'ensemble de la population doit en partie être résolue
par l'allocation de ressources nécessaires pour relever ce dilemme
d'accès aux soins. Une Loi cadre38 a été
adoptée par le Parlement pour la création de deux systèmes
d'assurance maladie : un régime d'assurance maladie obligatoire (AMO)
destiné à couvrir les salariés des secteurs public et
privé et des titulaires de pension ainsi que leurs ayants droit, et un
régime d'assistance médicale couvrant les populations
défavorisées (RAMED).
Outre l'éducation et la santé, le bien
être de la population nécessite la garantie de conditions de vie
décentes. Malgré les efforts publics dans les domaines sociaux,
la problématique de pauvreté présente un réel souci
pour l'Etat, passé de 13% à 19% entre 1990 et 1999 pour
régresser à 9,2% en 2010 selon le Haut Commissariat au Plan.
En plus de ces actions d'autres mesures visent à
améliorer les infrastructures de base et faciliter l'insertion
économique des personnes défavorisées telles que le
renforcement des programmes d'alphabétisation ou l'institution du
microcrédit.
Concernant les infrastructures sociales, le Maroc a
lancé, au cours des dernières années, d'importants
programmes d'amélioration des conditions de vie, tant en milieu rural
qu'en milieu urbain. En milieu rural, ces programmes ont visé
l'amélioration du taux d'accès à
37 GREFFT-ALAMI Abdeljalil, JAIDI Laârabi et
BENALI Driss. Pour une Politique de Développement Social
Intégré. Mission d'appui du PNUD au Ministère du
Développement Social de la Famille et de la Solidarité Travail.
p.10.
38 Loi 65-00 promulguée par Dahir 1-02-296 du
21/11/02relative à l'AMO et du RAMED.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
l'eau potable et le taux d'électrification rurale. Le
rythme des réalisations est accéléré grâce
à l'adoption d'une approche participative permettant l'adhésion
des populations à ces projets. Alors qu'en milieu urbain, la lutte
contre l'habitat insalubre est activée par l'élaboration d'une
nouvelle stratégie pour faire face aux déficits dans ce domaine
au profit des ménages nécessiteux.
Toutefois, la garantie de sources de revenus reste
indispensable pour améliorer les conditions de vie et réduire les
inégalités. L'emploi constitue la source la plus répandue
de revenu et un des facteurs importants de redistribution des richesses.
L'action des pouvoirs publics pour la lutte contre le
chômage s'inscrit dans la création d'un environnement favorable
à la croissance et aux investissements générateurs
d'emplois. D'autres mesures de promotion de l'emploi direct ont
été mises en oeuvre et ont concerné la formation des
ressources humaines ou l'encouragement à l'auto-emploi.
Point 2 : Elaboration d'une stratégie de
développement social (SDS)
Pour concrétiser cette tendance, les pouvoirs publics
marocains ont élaboré et mis en place une première
stratégie de développement social. Elle a comme objectif
explicite la réduction de la pauvreté, notamment en milieu rural.
Cette stratégie a vu le jour en janvier 2002, a fait appel à un
partenariat renforcé entre l'Etat, les Collectivités Locales et
les bénéficiaires. Ce programme devrait s'étaler sur dix
ans et nécessite un investissement global de près de 29 milliards
de dirhams.
Les infrastructures et services sociaux de base ont fait ainsi
l'objet de programmes d'envergure qui visent l'amélioration des
indicateurs de développement humain.
Cette stratégie est fondée sur
l'évaluation du bilan social du pays, les nouveaux concepts et
paradigmes animant les politiques modernes de développement
(développement durable, développement humain, inclusion et
cohésion sociale), les nouvelles règles régissant l'action
publique (coresponsabilité sociale, implication, partenariat,
transparence, efficacité et responsabilité de l'action publique)
et la dimension territoriale du développement pour des interventions
groupées dans l'espace et le temps.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Présentée comme étant une
stratégie intégrée, elle s'articule autour de plusieurs
axes. En effet trois principaux angles d'attaque ont été
identifiés ; un angle de nature économique, un autre de
développement du capital humain et un troisième d'assistance
sociale directe aux populations dépourvues.
L'axe économique de cette SDS considère que la
véritable lutte contre la pauvreté à long terme passe par
une croissance économique forte et soutenue, couplée avec une
répartition plus correcte de ses effets. Cette croissance était
supposée aider directement, au moins en partie, les pauvres à
travers les nouvelles opportunités d'emplois et des revenus
générés, mais aussi indirectement puisqu'elle permet
à l'État de mettre en oeuvre et financer des programmes de lutte
contre la pauvreté.
Depuis la mise en place de cette stratégie nationale,
la tendance s'est accentuée et s'est traduite par un renforcement des
actions de lutte contre la pauvreté. Les secteurs sociaux ont
été placés au centre des priorités, même sur
le plan budgétaire. Sont présentées ci-après
certaines actions entreprises en la matière :
- la création de l'Agence de Développement
Social (ADS) (1999/2000) qui a pour mission la contribution à
l'amélioration durable des conditions de vie des populations les plus
vulnérables ;
- la mise en place du Fonds Hassan II qui se charge
d'améliorer l'habitat social, les infrastructures routières, les
projets d'irrigation, le secteur touristique, le sport et la culture, les
projets de microcrédit, ... ;
- l'adoption et la mise en place de la réforme de
l'enseignement (année 2000);
- l'adoption en 1998 de la loi sur le mode de fonctionnement
des structures financières impliquées dans le
microcrédit;
- la promotion de l'emploi à travers la mise en place
de nouveaux dispositifs et instruments susceptibles de dynamiser la
création d'emplois (l'insertion directe, la formation-insertion,
l'insertion par la promotion de l'entreprise et la réforme de
l'intermédiation au niveau du marché du travail
«ANAPEC») et d'autres mesures plus stratégiques visant les
petites entreprises ou l'emploi des jeunes.
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Spécialisé Management du Développement Social 36
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
- Lancement de l'INDH en 2005 en tant que chantier de
règne pour le pays dont l'objectif principal est de résorber les
déficits sociaux que connaît le Maroc d'aujourd'hui ; à
court et moyen terme par la réduction de la pauvreté, la
vulnérabilité, la précarité et l'exclusion sociale
alors qu'à long terme par l'instauration d'une dynamique pérenne
en faveur du développement humain et du bien-être de la
population.
Après avoir présenté dans la section
précédente le référentiel de la PPSM, on va
analyser par la suite cette politique à la lumière de son contenu
ainsi que ses effets en relation avec les aspects du développement du
pays.
§ 2 : Analyse de la politique publique sociale au
Maroc
La politique publique sociale au Maroc conduite jusqu'à
présent peut être schématiquement
caractérisée par deux traits essentiels39 : d'une
part, les pouvoirs publics ont tendance à intervenir de façon
réactive et contingente dans le but de réparer, a
posteriori, une pénurie humaine ou de corriger un dysfonctionnement
révélé par des tensions sociales. De l'autre, elle se
manifeste dans des « dépenses passives » ne produisant que peu
d'effet en termes d'amélioration des accessibilités et
d'accroissement des capacités. Logique assistancielle et saupoudrage de
l'aide publique : l'effort entrepris par l'Etat est du coup mal perçu,
voire éthéré.
Point 1 : Aspects fondamentaux de la politique publique sociale
au Maroc
L'examen de la politique publique sociale de l'Etat, son
impact sur la pauvreté, ses points forts et ses points faibles est un
exercice40 nécessaire pour arrêter son bilan et le
comparer aux objectifs avancés. À part ce que les objectifs du
millénaire pour le développement (OMD41)
précisent, aucun objectif chiffré particulier en matière
de lutte contre la pauvreté n'a jamais été fixé
explicitement. Cependant l'objectif toujours préconisé par
l'État est celui de rattraper les retards enregistrés sur divers
échelons. C'est une reconnaissance affichée de l'existence de
retards pourvu de les réduire.
39 El AOUFI, Noureddine. (2009). Le Maroc
solidaire : Projet pour une société de confiance. Impression
: El Maârif Al Jadida. p.54 (172 pages).
40 ABDELKHALEK, Touhami. op. cit.
41 OMD sont au nombre de huit, ces objectifs sont le
fruit des différentes recommandations qui découlent de la
conférence des Nations Unies, tenues à New York, en septembre
2000.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Les objectifs qui ont été adoptés en
matière de développement reviennent encore sur la
nécessaire valorisation des ressources humaines, via une réforme
du système de l'enseignement et de la formation en tenant une
réflexion quant à la lutte contre l'analphabétisme et
à la généralisation de l'enseignement fondamental. Cet
objectif convient bien avec les indicateurs de lutte contre la pauvreté
à long terme et l'amélioration d'indicateurs de
développement humain.
L'analyse des résultats de la stratégie de
développement social semble être à la base de la nouvelle
stratégie plus ambitieuse et plus ciblée en matière de
lutte contre la pauvreté. Cette nouvelle stratégie est
matérialisée principalement par l'Initiative Nationale pour le
Développement Humain (INDH) sur laquelle on revient ensuite. C'est une
Initiative qui se veut plurielle et intégrée prenant en compte
les caractéristiques essentielles du profil de la pauvreté et de
son évolution au Maroc.
Au delà des bonnes intentions de mener une politique de
développement social, la réalité confirme la
dégradation des conditions socio-économiques de la population :
le Maroc connaît toujours un gouffre qui se creuse entre ville et
campagne, le taux de chômage dépasse 13% 42 de la
population urbaine, l'analphabétisme touche presque 50%43 de
la population, alors que le nombre de pauvres a connu une augmentation
considérable pour atteindre en 1999 le chiffre de 5,3 Millions
d'individus.
En Fait, « (...) la question sociale44 au Maroc
revêt deux aspects fondamentaux :
- la situation de plus en plus préoccupante de l'emploi
et la montée en puissance du chômage de masse ;
- la persistance, voire la recrudescence de la pauvreté
et des inégalités sociales malgré les efforts des pouvoirs
publics pour les réduire : la répartition des revenus et des
patrimoines au sein de la société marocaine demeurant très
inégalitaire.
Le taux de chômage national estimé à 12%
masque mal les réalités suivantes : le chômage urbain est
de 19,5% et dépasse les 30% pour les diplômés de
l'enseignement supérieur. Le
42 Site web du Haut Commissariat au Plan (année
2010) :
www.hcp.ma
43 « Alphabétisation des adultes au Maroc : Bilan
de la période 1997-2003 ». Direction de la Lutte
contre l'Analphabétisme. Rapport national.
44 GREFFT-ALAMI Abdeljalil, JAIDI Laârabi &
BENALI Driss. op. cit. p.10.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
taux de chômage rural estimé à 4,5% est
à un niveau relativement bas en raison des critères retenus
(...)45».
Sur le plan sanitaire, malgré l'évolution, et le
chemin parcouru, la santé au Maroc présente encore des
indicateurs alarmants : le taux de mortalité maternelle atteint
22746 pour 100.000 naissances vivantes ; le taux de mortalité
infantile est de 47 pour 1.000 naissances et la couverture médicale ne
dépasse pas les 34 %47 de la population.
L'évaluation des politiques publiques48 en
matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale
menées depuis l'indépendance révèle que,
malgré les énormes efforts déployés par
l'État, les déficits demeurent encore importants, qu'il s'agisse
des services sociaux de base, d'activités génératrices de
revenus ou d'insertion socioprofessionnelle. Les données sur l'ensemble
de la période sont très éclairantes et assez
édifiantes dans tous les domaines.
De plus, le projet national ambitieux consistant à
élargir dans le champ de la protection sociale en
généralisant la couverture médicale, en offrant une
allocation logement, en octroyant une indemnité de chômage ou pour
perte d'emploi, en assurant une retraite universelle et décente aux
citoyens et en instituant un revenu minimum aux personnes les plus
démunies par le biais de la promotion des activités
génératrice de revenus impose une telle refonte.
Or, cette refonte à la fois en termes de renouveau de
l'approche et de la gouvernance de l'action sociale se trouve au coeur des
orientations inscrites en 2005 dans l'Initiative Nationale pour le
Développement Humain.
Point 2 : Politique publique sociale au Maroc
entre impacts et attentes des citoyens
Dans son rapport « Le Maroc Solidaire », Professeur
Noureddine El Aoufi affirme qu'entre 1994 et 1999 l'incidence de l'action
sociale (de l'Etat) sur la réduction de la pauvreté est
45 Idem.
46 « Etude sur le financement des soins de santé
au Maroc ». Rapport OMS 2007. p. 10.
47 Idem. p. 12.
48 GUERRAOUI, Driss. (2005). Cinquante ans de
politique sociale au Maroc_Enseignements pour l'avenir : Refonder l'approche et
la gouvernance des politiques sociales. p. 189.
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Spécialisé Management du Développement Social 39
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
restée faible49 avant d'ajouter que ce
résultat témoigne de l'essoufflement50 des mesures
sociales non centrées sur le développement humain et
l'investissement dans l'amélioration des capacités humaines. En
termes généraux, une politique efficace51 de lutte
contre la pauvreté doit avoir un impact positif à travers
l'augmentation des revenus des ménages, l'amélioration de la
satisfaction des besoins de base de la population et l'amélioration de
l'accès aux services de base.
Sur cette base, la stratégie de lutte contre la
pauvreté doit contenir des projets de nature économique,
(créations d'emplois et d'activités génératrices de
revenus) et des projets sociaux (éducation, santé, habitat, ...),
...ou des projets d'infrastructure (routes, eau, électricité,
...).
Toutefois, les politiques sociales mises en oeuvre
jusqu'à présent sont perçues comme étant à
la fois insuffisantes52 et produisant trop peu d'impacts à
l'égard aux investissements engagés socialement ; ainsi l'effort
consenti semble même neutralisé53 par l'ampleur des
déficits et par le caractère structurel des
déséquilibres.
En outre, le contenu des politiques et des actions entreprises
(par l'État) avait des composantes réduisant la pauvreté.
Il s'agit des objectifs de croissance économique ambitieux de certains
plans, des déploiements des ressources publiques pour faire face aux
besoins de la population en matière d'alimentation, de santé,
d'éducation, d'habitat et d'équipements collectifs.
Globalement, on peut dire que, si le Maroc a connu depuis
l'indépendance une panoplie impressionnante de filets de
sécurité sociale, avec l'INDH le pays dispose d'une nouvelle
doctrine traçant les contours d'un modèle social
spécifique pour le Maroc.
Dans ce cadre, le développement social doit
procéder d'une approche de lutte contre la pauvreté et
l'exclusion sociale dont les principales lignes directrices54 sont
les suivantes :
- Mettre l'Homme au centre de toutes les
préoccupations;
- Respecter la dignité du citoyen en dépassant
l'esprit de l'assistanat ponctuel à un traitement productif
pérenne de l'action sociale ;
49 EL AOUFI, Noureddine. op. cit. p.119
50 Idem.
51 ABDELKHALEK, Touhami. op. cit.
52 EL AOUFI, Noureddine. op. cit. p.53
53 EL AOUFI, Noureddine. op. cit.
54 « Maroc possible (Le)». Rapport du
cinquantenaire, (2005).
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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- Mettre en oeuvre des politiques publiques qui soient
à la fois globales, intégrées, efficaces et durables, qui
partent d'un diagnostic raisonné de l'état réel de la
pauvreté et de l'exclusion, qui s'appuient sur une définition
rigoureuse des objectifs et des priorités et qui mettent
l'économique au service du social;
- Fonder la mise à niveau sociale sur la
continuité et le pragmatisme et sur une démarche concertée
et participative;
- Puiser les ressources et les sources des politiques sociales
dans l'intelligence locale et nationale par la mobilisation créatrice de
toutes les forces vives de la Nation, par une gouvernance intelligente
basée sur l'éthique du respect du bien public à travers la
mise en place des procédures de suivi, d'évaluation et de
reporting. Ceci tout en gardant un rapport d'intelligence au monde
extérieur.
Selon le Travail réalisé par le Dr Abdeljalil
GREFFT-ALAMI, les conclusions55 relatives à l'analyse de la
PPSM peuvent être résumées dans trois points
ci-après :
- Toute démarche d'évaluation des programmes
sociaux doit commencer par le rétablissement d'un lien direct entre les
structures politiques, économiques et sociales du pays. A défaut,
on risque de ne pas mettre en évidence les relations dynamiques qui sont
à l'oeuvre entre ces trois facteurs pour rendre compte du bilan social
du Maroc. Ce bilan qui, malgré des progrès notables et une
accélération de la cadence des réformes et des efforts
dans le domaine social, laisse persister un taux de pauvreté
préoccupant et des inégalités sociales importantes,
n'étant somme toute que le résultat des choix d'organisation
économique et sociale, des politiques et des programmes en cours et de
leurs modalités de gouvernance.
- En outre, si le bilan social peut donner une image plus ou
moins fidèle du « stock » actuel des problèmes sociaux
non résolus, une démarche stratégique ne saurait
éluder une approche prospective visant à anticiper et à
identifier les nouveaux besoins sociaux qui ne manqueront pas de se manifester
en raison des transformations rapides qui affectent à la fois le pays et
l'environnement international.
- Enfin, la mondialisation n'est pas seule en cause dans le
processus de transformation sociale que connaît le pays. Les dynamiques
sociologiques qui sont à l'oeuvre ainsi que l'évolution des
moeurs, des modes de vie, de la culture et des structures familiales induisent
de nouvelles attentes exprimées par la population en direction de
l'Etat.
55 ABDELKHALEK, Touhami. op. cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
D'importantes attentes sont encore appelées à
être consenties au moment où les indices sociaux ne sont pas
totalement rassurant prouvant une quelconque inefficacité des politiques
publiques dictées parfois par les organisations monétaires
internationales, ainsi :
- le régime de sécurité sociale ne couvre
pas encore l'ensemble des salariés, alors que les non salariés ne
bénéficient pas encore de couverture sociale obligatoire.
- l'emploi salarié de la main d'oeuvre infantile existe
encore, alors que les petites filles « employées à la maison
» ne sont pas toutes scolarisées ;
- le taux de chômage urbain en 2010 selon les statistiques
officielles avoisine les 14%56.
- l'approvisionnement en électricité, selon les
indicateurs sociaux, n'est pas encore pas en mesure de couvrir l'ensemble de la
population rurale, alors que l'eau potable du réseau n'est disponible
que pour 6.2% seulement des ménages.
- le taux d'analphabétisme touche 50%57 de la
population en 2004 ;
- le taux de pauvreté relative atteint 10%58 de
la population en 2004 ;
- le taux de vulnérabilité à la
pauvreté concerne 20%59 de la population en 2004.
Section 2 : Réglementations, Institutions & Programmes
de la PPS
Cette section sera réservée à une
brève présentation aussi bien au niveau
réglementaire-institutionnel qu'au niveau des programmes mis en oeuvre
par l'Etat pour entamer la question sociale. D'abord, le volet du cadre
réglementaire touche vite à la question de la législation
à caractère social, ensuite le côté institutionnel
se limite à la présentation de certaines organisations pilotes
qui se chargent de l'action sociale avant de terminer avec la place du
microcrédit en tant que mécanisme social au service de la mise en
place partielle de certains programmes de l'INDH.
56 Site web du Haut Commissariat au Plan:
www.hcp.ma
57 Idem.
58 Ibid.
59 Ibid.
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§ 1 : Réglementation et Institutions
Sociales
Point 1 : Cadre Réglementaire
La dimension juridique du développement humain
introduit également l'implémentation d'un environnement normatif
favorable à la promotion de l'investissement et de l'initiative,
susceptible de contribuer à la réduction de la pauvreté et
à la création d'emplois et des richesses.
Depuis le début des années 1980, le
législateur marocain a intensifié le rythme des réformes.
Il est aujourd'hui clairement engagé dans la mise en place d'un droit
économique concurrentiel destiné à accroître la
compétitivité des entreprises et à consolider les droits
et les libertés des acteurs. L'objectif est de mieux répondre aux
exigences de globalisation de l'économie, aux tendances d'harmonisation
et de mise à niveau du tissu productif national induites par les accords
d'association et de libre échange et aux attentes des acteurs
économiques et sociaux. Le droit du travail (Dahir n° 1-03-194 du
14 rejeb (11 septembre 2003) portant promulgation de la loi n° 65-99
relative au Code du Travail), le droit des affaires, le droit administratif
constituent des dimensions déterminantes du développement
humain.
Ainsi, le concept de pauvreté60 est
aujourd'hui valorisé par le législateur même s'il
préfère d'autres concepts, moins négatifs dans leur
formulation comme les notions de « populations les plus vulnérables
», de « populations à faible revenu », de «
populations économiquement vulnérables » et ayant « des
difficultés d'insertion dans la vie active », de « personnes
économiquement faibles » (La loi 18/97 sur le microcrédit et
loi 12-99 portant création de l'agence de développement social).
Les nouveaux dispositifs valorisent l'insertion par l'économique et
l'auto-insertion des économiquement faibles.
En outre, l'institutionnalisation du microcrédit par le
législateur marocain traduit également l'importance de plus en
plus grande de la société civile et son implication dans le
financement des petits projets. La loi sur les microcrédits a
créé un véritable droit des associations de financement
des microprojets.
60 Rapport du cinquantenaire « Le Maroc
possible ». op. cit
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Sans pouvoir détailler le contenu de la
législation sociale et sans prétendre être exhaustif quant
à son présentation, on va exposer ci-après une liste
comportant certaines lois, décrets, circulaires, importants dans la
panoplie de la législation marocaine à caractère
sociale.
- Dahir n° 1-99-207 du 13 joumada I 1420 (25 août
1999) portant promulgation de la loi n° 12-99 portant création de
l'Agence de développement social ;
- Décret n° 1-72-124 du 15 Joumada II 1392 (27
juillet 1972) portant modification du décret n° 2-71-625 du 12
Moharrem 1392 (28 Février 1972) portant statut de l'Entraide Nationale,
tel qu'il a été modifié et complété ;
- Décision du Secrétaire d'État
auprès du premier ministre chargé de l'Entraide Nationale et de
l'artisanat n° 32974 du 6 Rabiâ I (29 avril 1974) fixant les
attributions et la composition des services centraux, des
délégations et des comités consultatifs de l'Entraide
Nationale dans les préfectures et les provinces. (Bulletin officiel
n° 4732 du 26 joumada II 1420 (7 octobre 1999) ;
- Loi 65-00 définissant les principes de l'AMO et du
RAMED par le Dahir 1-02-296 publié le 21 novembre 2002 ;
- Dahir n° 1-99-16 du 18 Chaoual 1419 (5 février
1999) portant promulgation de la loi n° 18-97 relative au
microcrédit (Bulletin Officiel : n° 4678 - 14 Hija 1419 (1er avril
1999) ;
- Décret n° 2-05-1016 du 19 juillet 2005 portant
création d'un compte d'affectation spéciale n° 3.1.04.06
intitulé « fonds de soutien à l'Initiative Nationale pour le
Développement Humain » ;
- Décret n° 2-05-1017 du 19 juillet 2005 relatif
aux procédures d'exécution des dépenses de l'Initiative
Nationale pour le Développement Humain ;
- Arrêté de Monsieur le Premier Ministre
n°3-108-05 du 30 novembre 2005, instituant messieurs les Walis et
Gouverneurs en qualité de sous-ordonnateurs des dépenses
imputées sur le compte d'affectation spéciale n° 3.1.04.06
intitulé « fonds de soutien à l'Initiative Nationale pour le
Développement Humain » ;
- circulaire de M. le Premier Ministre N° 7/2003 du 27
juin 2003 qui régit le partenariat entre l'Etat et les Associations ;
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
- note du Ministre de l'Intérieur n°86 en date du
03 août 2005 relative à la mise en place des Comités
Provinciaux et Préfectoraux de Développement humain (CPDH) ainsi
que des Divisions de l'Action Sociale ;
- note d'orientation du Ministre de l'Intérieur
n°04 en date du 6 janvier 2006 relative à la mise en oeuvre du
programme INDH pour la période 2006-2010 ;
- Le circulaire du Premier Ministre du 26 Rabii II (27 Juin
2003), traduit la volonté du Gouvernement de faire du partenariat avec
les associations et définit une nouvelle politique de la
réalisation de projets de développement ;
- Dahir n°1-06-154 du 30 chaoual 1427 (22 novembre 2006)
portant promulgation de la loi n° 14-05 relative aux conditions
d'ouverture et de gestion des établissements de protection sociale ;
- BULLETIN OFFICIEL N° 5544 du 4 Rajeb 1428 (19/7/2007)
Décret n° 2-07-809 du 17 joumada II 1428 (3 juilllet 2007) pris
pour l'application de la loi n° 14.05 relative aux conditions d'ouverture
et de gestion des établissements de protection sociale. Décret
pour l'application de la loi n°14-05 ;
- Loi n° 5-81 relative à la protection sociale des
aveugles et des déficients visuels ; - Loi n° 07-92 relative
à la protection sociale des personnes handicapées ;
- Loi n° 10-03 relative aux accessibilités (loi en
faveur des personnes en situation d'handicap).
Point 2 : Cadre Institutionnel
Certainement, il existe divers acteurs du MC relevant soit de
l'Etat soit de la société civile locale ou internationale qui
restent aussi actifs et mobilisés au service des populations
démunis dont l'apport est incontestable. Sur le plan institutionnel on
va canaliser notre intérêt sur la présentation des
attributions et missions de trois principaux acteurs du domaine social au Maroc
à savoir le Ministère du Développement Social de la
Famille et de la Solidarité, l'Agence de développement social et
l'Entraide Nationale.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
1. Ministère du Développement Social de la
Famille et de la Solidarité
Résultat d'une fusion opérée en 2007 par
le gouvernement entre le Ministère du Développement Social, de la
Famille et de la Solidarité et de l'ancien Secrétariat d'Etat
chargé de la Famille, de l'Enfance et des Personnes Handicapées.
Le Ministère du DSFS a comme attributions et
prérogatives61 :
- la conception de la politique du développement
social, notamment les stratégies de lutte contre la pauvreté et
l'exclusion et la réalisation d'études, de rapports et d'analyses
pour promouvoir les domaines du développement social ;
- la préparation et l'actualisation des textes
législatifs et réglementaires relatifs aux champs d'action du
Ministère et la supervision de leur adéquation aux traités
internationaux et aux conventions signées et ratifiées ;
- la coordination des programmes du développement
social, de lutte contre la pauvreté et l'exclusion avec l'ensemble des
acteurs et des intervenants, ainsi que leur exécution, leur
évaluation et leur suivi, en tenant compte de l'approche genre ;
- la mise en oeuvre d'instruments de prévention des
fléaux sociaux et des causes de pauvreté et d'exclusion ;
- l'amélioration des conditions de vie, d'inclusion
sociale, d'intégration socio professionnelle des citoyens en situation
difficile, en particulier les personnes handicapées et les personnes
âgées ;
- l'organisation de la mobilisation sociale pour faire face
à la pauvreté, à la précarité et à
l'exclusion en prônant la culture de la solidarité, de la
participation et du partenariat ;
- l'élaboration et la mise en oeuvre des stratégies
de :
o promotion de la condition féminine, d'appui et de
renforcement de son statut juridique, de sa pleine participation au
développement et de sa protection contre les différentes formes
de violence et de discrimination ;
o promotion sociale des enfants et mise en place de mesures
de protection contre les différents fléaux sociaux qui entravent
leur intégration et menacent leur stabilité, avec une attention
particulière aux enfants en situation vulnérable (enfants en
situation de rue, de handicap, etc.) ;
61 Site web du Ministère de
Développement social (MDSFS) :
www.social.gov.ma
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
o communication et de sensibilisation dans les domaines des
femmes, de la famille, de l'enfance et des personnes en situation d'handicap
;
- l'appui aux associations oeuvrant dans le domaine social,
notamment celui de la famille, des femmes, des enfants et des personnes en
situation d'handicap et le suivi des réalisations de ces projets en
partenariat avec les différents acteurs du secteur ;
- la mise en place et le renforcement des liens de
coopération et de partenariat au niveau national et international,
gouvernemental et non gouvernemental ;
- l'émission d'avis sur les demandes d'utilité
publique présentées par les associations oeuvrant dans les
domaines du développement social, de la famille, des personnes en
situation d'handicap, des femmes et des enfants ;
- la contribution à la mise en place et à la
gestion des structures d'accueil consacrées aux personnes en situation
d'handicap, aux femmes et aux enfants.
Par ailleurs, le Ministère coordonne l'action des
institutions qui, sous son égide, constituent les piliers du pôle
social : l'Entraide nationale, l'Agence de Développement Social et
l'Institut National de l'Action Sociale.
En définitive, les attributions essentielles du Pôle
social peuvent se résumer comme suit :
- Promouvoir le développement social en stimulant une
dynamique interactive, positive et constante tout en favorisant les conditions
pour l'égalité des chances ;
- Traiter en profondeur les causes pour mieux lutter contre la
pauvreté, l'exclusion et la discrimination ;
- Favoriser les conditions pour l'inclusion des personnes en
situation difficile et leur réintégration sociale ;
- Généraliser la culture de
l'égalité, de la solidarité, de la participation, de la
responsabilité et du partenariat ;
- Intégrer la dimension genre et promouvoir la culture de
l'égalité.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
2. l'Agence de Développement Social
Créée en 1999, en vertu de la loi 12.99,
l'Agence de Développement Social a débuté son
activité en 2001. Son rayon d'action couvre tout le territoire
national.
L'Agence de Développement Social (ADS) est un
établissement public, dont la tutelle est assurée par le
Ministère du Développement Social, de la Famille et de la
Solidarité, dont la mission est de contribuer à la
réduction de la pauvreté et à la promotion du
développement social au Maroc, en complémentarité avec les
autres instruments étatiques contribuant à la réduction du
déficit social.
Son intervention se fait à travers la consolidation du
capital humain et social grâce à des actions de formation et de
renforcement des acteurs du développement local, la promotion et le
développement des activités génératrices de revenus
et créatrices d'emplois, ainsi que l'amélioration des conditions
de vie des populations ciblées en milieu rural et urbain.
L'ADS a pour mission de participer à la lutte contre
la pauvreté, la vulnérabilité et l'exclusion sociale en
milieu urbain, périurbain et rural. Dans ce cadre, elle a pour
rôle d'initier et de soutenir des projets de développement de
proximité, en apportant un appui technique financier et non
financier.
3. L'Entraide Nationale
Créée le 27 avril 1957, et
considérée comme l'organisme fédérateur de l'action
sociale au Maroc, l'Entraide Nationale a accompagné les politiques
sociales menées à l'échelon national. En tant
qu'établissement public doté de la personnalité civile et
de l'autonomie financière selon le décret n° 2-71-625 du 28
février 1972, l'Entraide Nationale est placée sous la tutelle du
Ministère du Développement Social, de la Famille et de la
Solidarité. Elle a pour mission d'apporter toute forme d'aide et
d'assistance aux populations et de concourir à la promotion familiale et
sociale.
Son action est orientée vers la satisfaction des
besoins des populations en situation de précarité.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
§ 2 : La place du MC dans les programmes de la PPS au
Maroc
Suite aux longues années d'expansion et de
succès, le microcrédit est observé actuellement comme
« l'un des instruments des politiques économiques et sociales les
plus commentés et privilégiés en matière de
développement62» particulièrement dans les
économies en transition.
Point 1 : L'Initiative Nationale pour le Développement
Humain (INDH)
L'INDH a été lancée au milieu de 2005 en
tant que projet de société traduisant la ferme volonté du
Maroc de faire de la lutte contre la pauvreté la priorité
n°1 du développement. Elle est fondée sur une vision globale
et intégrée du développement social et humain2,
elle a pour objectif de lutter contre la pauvreté et l'exclusion et
d'asseoir les bases d'un développement durable.
Elaborée selon une approche participative, l'INDH s'appuie
sur quatre axes stratégiques : - l'amélioration de
l'environnement économique, social et culturel en faveur des pauvres
;
- la promotion des activités génératrices de
revenus et l'auto-emploi en faveur des pauvres ;
- l'amélioration de l'accès des pauvres aux
services sociaux de base, à l'éducation et à la formation
;
- la promotion de la mise à niveau du monde rural par
des programmes d'équipement en électrification, en eau potable et
en assainissement.
Ainsi, au titre de la période 2006-2010, il a
été mobilisé plus de 10 milliards de dirhams au titre de
l'INDH dont une part importante provient du budget de l'Etat (70%); le reliquat
étant financé à parts égales par les
collectivités locales et la coopération internationale.
Se plaçant dans le cadre de la réduction de la
pauvreté et de la précarité, L'INDH63 en tant
que programme transversal cible les quartiers urbains et les communes rurales
parmi les communautés les plus pauvres et exclues. Cependant, elle n'est
pas mise en place pour se substituer aux programmes sectoriels ciblant la
pauvreté et l'exclusion sociale mais cherche
62 KOLOMA, Yaya. « Effets de seuil dans la
relation entre l'accès au microcrédit et l'amélioration du
bien-être des bénéficiaires », Mondes en
développement. N° 152, septembre 2010, pp. 13-30. Url:
http://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2010-4-page-13.html.
63 CSRP : Cadre Stratégique national pour la
réduction de la pauvreté (Ministère du
Développement Social).
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
à être un instrument permettant
d'améliorer l'allocation des prestations clés dans les zones
visées.
Elle est fondée sur l'existence d'une
société civile forte et active en leur assurant une nouvelle
reprise énergétique. Elle a pour but de créer une nouvelle
façon de gérer le développement en favorisant la
participation et l'implication de tous.
Dans sa structure générale, l'INDH se base sur
quatre axes de programmes prioritaires. Le premier se consacre à la
lutte contre la pauvreté dans le milieu rural et cherche plus
d'équité économique et sociale au niveau national.
Spécifiquement, ce programme intéresse 360 communes rurales parmi
les plus pauvres du pays couvrant une population potentiellement
bénéficiaire de plus de 3,5 millions d'habitants.
Le deuxième programme prend pour cible l'exclusion
sociale dans le monde urbain à travers le renforcement du capital humain
et la cohésion sociale. Plus exactement 250 quartiers urbains parmi les
plus défavorisés ont été ciblés pour un
montant de 1,5 million d'habitants bénéficiaires.
Le troisième programme de l'INDH vise la lutte contre
la précarité. Il est destiné à assister les
personnes vulnérables à travers des prises en charge dans des
centres spécialisés. Il est joint d'une démarche
d'accompagnement et d'insertion. Ce programme a visé quelques 50000
personnes dans sa première phase en plus des personnes
déjà prises en charge dans les différentes structures
publiques ou associatives actives dans le domaine. En termes d'actions, ce
programme vise la mise à niveau des centres existants (orphelinats,
centres sociaux, ...), l'insertion familiale, sociale et économique de
certaines personnes, la création de nouveaux centres polyvalents et
spécialisés, ...etc.
Le dernier programme de l'INDH est dit transversal. Il
concerne l'ensemble des provinces et préfectures du pays. Il a comme
objectifs la lutte contre les facteurs de risques sociaux, la création
d'une dynamique locale de développement humain et le renforcement du
capital social. Ses principales actions portent sur le renforcement de la
gouvernance locale, l'amélioration de l'accès aux services
sociaux, le soutien des projets à fort impact et l'animation
socioculturelle et sportive.
Par ailleurs, l'Initiative Nationale pour le
Développement Humain fonde ses interventions sur une dynamique
institutionnelle64, qui doit prendre appui sur des partenariats
locaux et nationaux entre les acteurs publics et privés, la
société civile ainsi que les autres forces
64 « Maroc Possible (Le)». op.
cit. , (2005).
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
s'activant (partis politiques et syndicats notamment) en
faveur des démunis et ce à une échelle locale.
Compte tenu de son importance stratégique et politique
et la portée profonde de ses dimensions gestionnaire et prospective,
elle doit être le guide essentiel de toutes les composantes dans toute
action de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.
Ce projet de société procède d'une
volonté politique affirmée, s'inscrit dans une vision de ce que
doit être à l'avenir toute action et programme visant à
lutter efficacement et durablement contre la pauvreté et l'exclusion
sociale et rentre dans le cadre d'une stratégie globale de
développement économique et social.
Point 2 : La place du microcrédit dans les programmes de
l'INDH
Les Associations de MC jouent un rôle crucial. En effet,
de par les missions qui leur sont assignées, les AMC sont des acteurs
réellement importants dans la lutte contre la pauvreté et le
développement de l'économie sociale.
Ainsi, en dépit de l'expérience récente
de notre pays dans ce domaine, le secteur du microcrédit a
réalisé des performances importantes qui le placent aujourd'hui
parmi les plus développés de la région MENA65.
Ce bilan positif résulte d'abord des efforts entrepris par les
associations de microcrédit en termes d'élargissement de leur
réseau d'implantations, d'expérience acquise en matière de
financement, d'encadrement et d'accompagnement de la micro-entreprise et
d'autres projets générateurs de revenus ainsi qu'une gestion
professionnelle et rigoureuse.
Pour leur part, les autorités publiques ont
contribué à ce développement par la mise en place d'un
cadre juridique approprié et son adaptation progressive aux besoins et
attentes des associations de microcrédit et de leur clientèle, et
par la mobilisation de ressources financières au profit du secteur dans
le cadre de conventions bilatérales ou multilatérales ainsi
qu'auprès de bailleurs de fonds nationaux.
65 MENA (Région du Moyen Orient et de l'Afrique
du Nord)
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
La signature, le 15 décembre 2005, de l'Accord-cadre
conclu entre l'Etat et la Fédération Nationale des Associations
de Microcrédit, traduit une reconnaissance des résultats
enregistrés par le secteur du microcrédit ainsi que le
degré de maturité atteint par le secteur en matière de
promotion des activités génératrices de revenus.
En effet, compte tenu du déploiement important des
associations du microcrédit à travers le maillage territorial du
pays, leur implication accentuée dans le financement de proximité
des projets, leur contribution dans la mise en oeuvre des Activités
Génératrices de Revenus parait favorable à une allocation
efficiente des ressources dont disposent les AMC.
Dans la perspective d'accorder un soutien technique et
financier important aux Activités Génératrices de Revenus,
l'intervention des associations de microcrédit se réalise en
privilégiant les objectifs et principes retenus dans le cadre de l'INDH,
tout en prenant en considération la spécificité du secteur
de microcrédit.
Dans cet esprit, l'INDH offre d'immenses opportunités
pour le microcrédit et vise à rendre la politique sociale plus
efficace et à mieux cibler les populations défavorisées.
Elle réserve une place de choix pour le microcrédit et lui offre
de nouvelles perspectives de développement.
Par sa démarche de réduction de la
pauvreté, la vulnérabilité, la précarité et
l'exclusion sociale, sa logique et son fonctionnement, l'INDH offre un cadre
opérant pour le microcrédit. Elle ouvre de réelles
perspectives pour le microcrédit. La contribution de ce dernier à
l'INDH touche certains domaines où les déficits sociaux sont plus
évidents comme le prouve l'expérience récente de certaines
AMC en matière de financement du logement. En règle
générale, les AMC continuent à développer des
produits et services financiers répondant aux besoins des populations
défavorisées et non éligibles au financement bancaire.
L'INDH accorde une place importante au microcrédit qui
est appelé à financer les activités
génératrices de revenu et éventuellement, l'accès
aux infrastructures de base des populations démunies.
En vertu de leurs atouts, les AMC sont à même de
contribuer sérieusement à la réalisation des objectifs de
l'INDH.
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Spécialisé Management du Développement Social 52
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Chapitre II : le Microcrédit au Maroc, levier de
développement socio-économique
«Emprunter au passé pour dessiner l'avenir
»66
Laurence Fontaine
Depuis qu'il a commencé à attirer l'attention du
grand public, le microcrédit a été présenté
comme un outil fort de développement via le financement de microprojets
et l'augmentation de revenus de ses bénéficiaires. Cela est
soutenu par diverses histoires de microentrepreneurs (succes stories) qui ont
lancé des activités grâce à de petits prêts et
ainsi tiré d'importants gains, non seulement en termes de revenus et de
consommation, mais aussi sur d'autres plans (santé, éducation et
émancipation sociale).
Partout, la mise en oeuvre du MC a connu une réelle
réussite, ainsi son originalité réside dans le fait
d'être une vision développée au Sud qui par la suite s'est
promue avec succès dans l'occident de la sorte qu'il reste l'une des
initiatives économiques originaires des pays en développement
montrant, partout, son utilité.
Section 1 : Le microcrédit, de la
création de micro-richesse au renforcement des capacités des
cibles
Le microcrédit est garanti par un petit groupe de
personnes solidaires, visant à long terme à amorcer un processus
de «bancarisation» de masse envers les pauvres, par l'accès au
crédit et l'intégration dans une économie formelle de
marché. En 2005, les Nations-Unies ont consacré l'année
internationale du MC chose qui a impulsé la popularisation du concept
selon le slogan : « Bâtir un secteur financier ouvert à tous
». En effet, ce label réunit bien deux aspects distincts : aide
à caractère social mais aussi produit financier couvrant ses
coûts voire même créant de la plus-value.
Au terme de ce travail d'analyse de l'évolution du
rôle du MC, la réponse affirme que celui-ci est une
nécessité dans certains cas et propose des voies permettant de le
développer.
66 FONTAINE, Laurence. (2008). L'Economie morale.
Pauvreté, crédit et confiance dans l'Europe
préindustrielle. Editions Gallimard 2008.
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
§ 1 : Le microcrédit, un mécanisme de
création de micro-richesses
Point 1 : Le MC, un élément de
création de la valeur ajoutée et d'amélioration des
conditions de vie.
Le MC permet aux pauvres de «faire» un choix et par
conséquent « d'élargir le champ du possible67
» pour observer des effets positifs sur les revenus, l'amélioration
de l'habitat, la santé, les frais d'éducation.
1. Elément de création de la valeur
ajoutée
Le microcrédit est-il capable d'apporter l'aide
nécessaire pour lancer des activités, créer des petites
entreprises et donc générer des richesses permettant de
résoudre des problèmes d'emploi, de croissance et de
développement économique ? En réalité, ce n'est pas
aussi simple d'y répondre. Des études68
réalisées en Asie constatent, d'abord, que les petits
crédits (plafonnés à un montant équivalent à
1000 DH) ne créent que très rarement de la richesse. Certes, ils
améliorent la trésorerie des bénéficiaires pour
répondre aux besoins indispensables (santé, nourriture, logement,
enseignement, etc.), mais s'il y a donc amélioration, rares sont les
bénéficiaires qui sortent de la pauvreté. Ensuite, que les
crédits moyens (d'un montant évolutif de 1000 à 10.000 DH)
sont du même ordre que les 1ers puisqu'ils améliorent juste le
pourcentage (7% à 12%) de création d'emplois et de petites
nouvelles entreprises. Alors que, toujours selon les mêmes sources, les
crédits relativement importants (dépassant 40.000 DH)
génèrent un réel processus de croissance par
l'investissement productif, l'amélioration du rendement et
l'accès à de nouveaux marchés.
Au Maroc, selon une étude69
commanditée par Planet-Finance Maroc en 2005 à ce sujet, le
microcrédit permet d'augmenter significativement l'emploi (66%), les
profits (38%) et les investissements (36 %) de ceux qui en
bénéficient. Toutefois, dans la même étude on trouve
que le microcrédit concourt de l'ordre de 5%70 des cas
à la création d'une nouvelle activité ; par
conséquent sa principale contribution reste dans le cadre du
renforcement d'une activité existante à travers
l'amélioration du fonds de roulement.
67 DOLIGEZ, François. « LeMonde
» du 24/11/2006
68 VINCENT, Fernand. «Effective Governance
for Micro-finance Institutions». Genève, le 7/11/1999
69 « Evaluation de l'impact du microcrédit au
Maroc (2005) ». Etude financée par Planet Finance Maroc,
2005.
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70 « Evaluation de l'impact du microcrédit au
Maroc ». , op. cit.
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Spécialisé Management du Développement Social 54
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Dans une autre étude71
(réalisée pour le compte de la FNAM), les analyses concluent
qu'un prêt équivalent à 1000 Dhs permet de
générer les impacts suivants : 2424 Dhs par ménage et par
an, alors que 11% des ménages bénéficiaires ont pu
créer leur petite entreprise grâce au microcrédit. Le plus
important c'est que le pourcentage de crédits destinés à
la création de ME s'est amélioré de 6 points en 4 ans par
rapport à celui affiché en 2005.
Donc, le microcrédit a un rôle
utile qui est avant tout un "plus social" et en cela, il doit être
développé. D'ailleurs, il apparaît nécessaire de
bien cibler ses bénéficiaires. Si on veut atteindre les plus
pauvres, on le fera avec de petits crédits (1000 à 3000 DH) avec
un objectif social qui ne peut pas être nécessairement rentable.
Or, si on veut créer des emplois stables et augmenter de façon
significative et durable les revenus, il faut recourir à des
crédits avec des montants plus consistants et ciblant des clients
différents.
« Le crédit est créateur de
richesse72 » selon Maria NOVAK qui considère que
l'accès au crédit permet la valorisation des ressources humaines
des démunis et « donne des chances plus égales à
tous73 » avant d'ajouter que le MC permet aux
microentrepreneurs d'investir dans des projets productifs qui «
génèrent un revenu plus que suffisant pour rembourser le
crédit obtenu et ses intérêts74».
2. Amélioration des conditions de vie
En fait, les services financiers continuent d'être des
outils privilégiés de prévention contre la pauvreté
pour les pouvoirs publics, vue leur utilité auprès des clients
dont le comportement exprimé par leur adhésion à ces
services traduisant combien ceux-ci restent importants à leurs yeux.
Or, l'expérience a montré que lorsque des AMC
proposent des services de MC à des clients qui n'en
bénéficiaient pas auparavant, ils n'ont pas besoin de faire appel
à la publicité. Alertés par l'entourage, les preneurs du
MC affluent en masse tant qu'ils en ont besoin. De
71 « Etude d'impact des programmes de microcrédit
au Maroc». Etude réalisée par Team Maroc pour le
secteur du MC, (2009).
72 NOVAK, Maria. (1994). La banquière de
l`espoir, celle qui prête aux exclus. Editions Albin Michel SA.
p.288
73 Idem.
74 ATTALI, Jacques & BERTRAND Yann Arthus.
(2007). Voyage au coeur d'une révolution : la microfinance contre la
pauvreté. Editions JC Lattès. p.255.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
plus, lorsque les fiables clients s'acquittent de leurs
échéances, leur principale motivation n'est plus la pression du
groupe75 mais l'intérêt et la volonté de
continuer à accéder au service même s'ils sont contraints
à payer des intérêts.
Pour Muhammad Yunus « lorsqu'une mère
misérable commence à gagner un peu d'argent, c'est d'abord
à ses enfants qu'elle destine ses revenus. Ensuite, vient la maison :
elle achète quelques ustensiles, refait la toiture et améliore
les conditions de vie de la famille »76, alors que
l'ex-secrétaire des NU considère que l'accès de tous aux
services financiers « a le pouvoir d'améliorer les conditions de
vie des populations, en particulier les pauvres77 » et le
surplus gagné ne peut qu'être « investi par le
microentrepreneur dans des éléments permettant
l'amélioration des conditions de vie de sa famille78 »,
or, pour qu'une telle amélioration soit globale il faut qu'elle touche
l'ensemble de microentrepreneurs d'une communauté donnée et
qu'elle puisse « déboucher sur l'amélioration des conditions
de vie de cette communauté79. »
Toutefois, il n'est pas sûr qu'il y ait une relation
linéaire entre l'accès au microcrédit et
l'amélioration du bien-être80. Ceci suppose, cependant,
qu'il peut exister un seuil ou un point à partir duquel l'accès
au microcrédit a un fort impact ou des effets dégradants sur le
bien-être des bénéficiaires.
Au Maroc, deux études ont «examiné» ce
volet dont les résultats affichent des améliorations dans les
conditions de vie des clients. En effet, les conditions d'habitat se sont
(dits) améliorées de 51%81 ; alors que
27%82 des clients ont vu leur détention d'actifs fluctuer
positivement durant les cinq dernières années (quatre ans
après, les chiffres ont été revus à la baisse
où seulement 19%83 l'ont confirmé) en plus des
améliorations relatives à
75 ROSENBERG, Richard. «Le microcrédit
aide-t-il vraiment les pauvres ?». Focus note CGAP N° 59.
Janvier 2010
76 YUNUS, Muhammad et JOLIS Alain. (1997). Vers un
monde sans pauvreté. Editions JC Lattès. p.134
77 LHERIAU, Laurent. (2009). Précis de
réglementation de la Microfinance. p.39
78 ATTALI. Jacques, op. cit., p.256
79 Idem.
80 KOLOMA, Yaya. (2010). « Effets de seuil
dans la relation entre l'accès au microcrédit et
l'amélioration du bien-être des bénéficiaires
». Mondes en développement. 2010/4 n° 152.
pp.13-30. Url :
http://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2010-4-page-13.html
81 « Evaluation de l'impact du microcrédit au
Maroc(2005) ». , op. cit.
82 Idem.
83 « Etude d'impact des programmes de microcrédit
au Maroc (2009) », p. 56. Op. cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
l'accès à la propriété
(13%84) et aux infrastructures sociales de base (0,5%85
des bénéficiaires ont été raccordés aux
réseaux d'eau potable, d'électricité et d'assainissement
grâce au MC).
Point 2 : Le MC, un facteur de maîtrise
de l'équilibre financier et de mobilisation de l'épargne
individuelle
1. Facteur de maîtrise de l'équilibre financier
La recherche de l'impact du MC - par des approches
quantitatives - retient des effets positifs comme l'accroissement des revenus
dû à l'amélioration des activités, du capital humain
(consommation alimentaire, nutrition et santé) et du patrimoine des
bénéficiaires. Toutefois, certains reprochent au MC de n'apporter
que de modestes améliorations dans la vie de ses clients, comme des
augmentations dans le fonds de roulement permettant la maîtrise du budget
familial. Puisqu'il est observé que les revenus engendrés par les
activités supportées (par le MC) servent d'abord à
diminuer la dépendance aux autres formes de financement (fournisseurs,
usuriers , prêts , familiaux) et dans certains cas à
améliorer les conditions de vie par la diminution de la période
de soudure, l'amélioration de l'alimentation, l'augmentation des
dépenses d'éducation et de santé, l'achat de biens de
consommation ou encore l'amélioration de l'habitat.
Cependant, d'après des études86
menées par l'IRD-Genève, le MC ne peut être
considéré comme un instrument de lutte contre la pauvreté
et encore moins contre les inégalités, dans la mesure où
25% de clients en profitent réellement, 50% améliorent simplement
la gestion du budget familial et les 25% restant voient leur situation
s'aggraver puisqu'ils échouent. Certes, le MC améliore la gestion
des budgets familiaux et stabilise les petites activités
entrepreneuriales pour fonctionner en fin de compte comme instrument de survie
plus qu'un outil de lutte contre la pauvreté ou de création de
richesses.
En fait, d'autres études conduites au Maroc ont
remarqué que les clients du MC les plus anciens contribuent de
manière plus significative au budget du ménage (moyenne de
84 « Etude d'impact des programmes de microcrédit
au Maroc (2009) », p. 56. Op. cit.
85 Idem.
86 GUERIN, Isabelle. « LeMonde » du
14/11/2006.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
54%87). De plus, leurs dépenses mensuelles
sont supérieures de 33%88 à celles des clients
nouveaux. Ceci confirme l'existence d'une relation positive entre le
degré de participation et celui de contribution aux dépenses du
ménage. D'un autre côté, il est observé que le
revenu moyen des ménages bénéficiaires a été
augmenté de 26%89 après l'obtention du prêt
alors que les dépenses moyennes des ménages ont été
accrues de 48%90 contre uniquement 15%91 pour les
témoins (n'ayant pas bénéficié du MC).
2. Mobilisation de l'épargne individuelle
Malgré que « la MF n'est pas toujours
censée favoriser un processus d'accumulation à long terme, elle
peut s'avérer fructueuse du fait qu'une « petite somme est tout
aussi rentable si (...) beaucoup de pauvres »92 y ont
accès. Il s'agit en fait d'un outil de survie à court terme : ces
modes de financement sont souvent perçus comme un moyen d'assurer une
survie que comme un moyen de favoriser un véritable développement
»93.
Epargne et création des comptes
bancaires
L'étude94 commanditée par Planet
Finance, en 2005, a montré un niveau important d'épargne des
micro-entrepreneurs tout en relevant qu'en matière d'utilisation des
services financiers les clients épargnent une proportion significative
de leurs revenus (moyenne de 550 DH), de plus 21% possèdent un compte
bancaire et 20% un livret d'épargne tandis que 22% pratiquent la
tontine. Après quatre ans, on enregistre dans une
étude95 sectorielle une augmentation moyenne de l'ordre de
10%96 en termes d'épargne des bénéficiaires.
Il s'avère, à travers l'évaluation de
l'impact du MC et d'après les études réalisées, que
l'effet sur l'épargne est certes significatif mais pas aussi fortement
manifesté comme sur les dépenses et les revenus. Ceci peut
être expliqué par le fait que l'excédent résultant
de
87 « Evaluation de l'impact du microcrédit au
Maroc (2005)». , op. cit.
89 « Etude d'impact des programmes de microcrédit
au Maroc (2009) », op. cit.,
88 Idem.
90 Idem.
91 Ibid.
92 Hedwige Peemans-Poullet, (2005) _Défis du
Sud n°68
93 ATTALI , Jacques. op. cit. p.266.
94 « Evaluation de l'impact du microcrédit au
Maroc(2005) ». op. cit.
95 « Etude d'impact des programmes de microcrédit
au Maroc(2009) ». op. cit.,
96 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
l'augmentation du revenu est prioritairement affecté et
en grande partie aux dépenses quotidiennes.
§ 2 : Le microcrédit, un mécanisme
d'ancrage des capacités de ses destinataires
Point 1 : Le MC, facteur du
développement socialement soutenable et stimulant de la formalisation du
secteur informel
1. Facteur du développement socialement soutenable
Au cours des dernières années, le succès
du MC a renforcé l'intérêt pour le secteur en attirant des
acteurs privés en particulier des banques pour lesquels la
rentabilité financière est capitale. Cette tendance a permis au
secteur de poursuivre sa croissance et de mieux se professionnaliser. Quoiqu'on
voit, aujourd'hui, une prolifération des critiques sur les menaces de
dérives de la mission des AMC et des questionnements quant à
leurs apports aux bénéficiaires.
De plus, la maturité du secteur appelle à une
croissance maîtrisée reposant sur des principes de base solides
(proximité, inclusion, services adaptés, protection des clients,
transparence, etc.) afin de se prémunir contre les dérives d'une
«commercialisation» disproportionnée. Encore les AMC ayant
comme vocation d'assumer une mission de développement auprès de
leurs clients et ne pas s'acharner sur la rentabilité financière
aux dépens des démunis. Certains apprécient le MC du fait
qu'il facilite l'accès «de tous» au crédit.
Sûrement, le MC ne peut pas prétendre se substituer aux politiques
publiques ou aux initiatives charitables, il vient les compléter avec
son apport, sous forme de services financiers destinés aux pauvres, et
contribuer au niveau local à l'effort d'organisation de la
société civile. A cet égard, son rôle dans la
sensibilisation à l'émancipation sociale mérite
d'être souligné puisque « la MF est non seulement un outil de
lutte contre la pauvreté mais elle est aussi un outil de
développement durable »97 . Toutefois, le nombre des
organisations de MC, intégrant les questions de développement
durable, s'est réduit. D'une part, il s'agit d'un « vecteur
puissant pouvant potentiellement apporter un plus indispensable à de
nombreuses populations à faibles revenus98», d'autre
part, il ne s'agit pas d'un outil « tout terrain » de
97 BOUDEDJA, Karima. (2008). Microfinance et
ONG. Thèse master of science n°89/2008 CIHEAM de
Montpellier.
98 ATTALI. Jacques op. cit. p.269
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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lutte contre la pauvreté. En conséquence, le MC
ne remplace jamais une politique publique sociale, tant que certains auteurs
préconisent le microcrédit comme une «stratégie
capable de relever le défi99» et le considèrent
comme une « alternative sérieuse aux diverses politiques de
développement100 ».
2. Stimulant de la formalisation du secteur informel
L'informalité regroupe généralement
l'ensemble des activités qui ne respectent pas les règles
administratives et échappent au contrôle de l'Etat. Comme la
plupart des clients de MC exercent en dehors des règles prescrites loin
du champ de contrôle des pouvoirs publics et leurs activités
restent souvent ambulantes ou semi-sédentaires, leur formalisation
devient une priorité pour les acteurs. Par ailleurs, le souci de
formalisation du secteur informel est toujours présent chez les meneurs
des politiques publiques pour lesquels l'objectif est d'accroître
l'efficacité et la rentabilité des micro-entreprises existantes
de manière à assurer leur passage au secteur formel.
Malgré sa faible capacité à transformer
les activités qu'il procure en petites et moyennes entreprises modernes,
le MC reste stratégique du fait qu'il se développe à un
rythme rapide et reste l'une des causes de l'expansion de l'économie
non-formelle.
Au sujet des changements pouvant être induits dans
l'entreprise grâce au MC et selon les résultats de
l'étude101 sectorielle déjà mentionnée,
on trouve que 11% des cas des crédits sont alloués à la
création d'entreprises, 2% aux nouvelles inscriptions au registre de
commerce, 2 % à l»immatriculation au rôle de patente, 1% aux
déclarations fiscales, 0,2% à instaurer des bulletins de paie
pour leur personnel et 4% à la qualification du personnel. Chose qui
montre que le microcrédit encourage, même «timidement»,
ses bénéficiaires à amorcer un passage vers le secteur
formel puisque « l'idée de départ a toujours
été celle-là : de transformer l'informel en formel, (...)
et de ramener tout ça dans le secteur de la banque102
».
99 BWANGA M'VUANDA, Kim. « Microfinance et
lutte contre la pauvreté », Mémoire de Licence en
Sciences Commerciales 2009/ Institut Supérieur de Commerce de Kisangani,
CONGO.
100 Idem.
101 « Etude d'impact des programmes de
microcrédit au Maroc », (2009), op. cit.
102 PEEMANS-POULLET. Hedwige, Défis du Sud. , N°68,
2005
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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Point 2 : Le MC participe au renforcement des
capacités des bénéficiaires 1. Renforcement des
capacités des bénéficiaires
Si l'impact du MC se mesure peu en termes d'augmentation des
revenus, il l'est beaucoup plus en termes de meilleure gestion de la
trésorerie familiale, d'amélioration du patrimoine et parfois la
formation d'épargne monétaire et de diminution de la
vulnérabilité, une meilleure capacité à
résister aux chocs extérieurs et enfin, d'amélioration du
bien-être via une alimentation de qualité, une éducation de
haut niveau et un meilleur accès à la santé.
Pourtant, toutes les analyses réalisées à
partir d'un travail sur le terrain approfondi convergent vers une
synthèse concluante : le microcrédit améliore certainement
la gestion des budgets familiaux et stabilise de petites activités
entrepreneuriales et, en cela, il est fortement utile103. Dès
lors la question suivante s'impose : cet outil financier permet-il
réellement d'élargir l'éventail des choix et des
opportunités des pauvres, de stabiliser et de diversifier leurs sources
de revenus souvent aléatoires ?
Globalement, les clients des associations de
microcrédit perçoivent d'une manière positive leur
participation au programme de microcrédit. De la sorte que l'ensemble
des perceptions de changement s'intensifie avec la durée de
participation, et ce selon une étude menée par Planet-Finance la
majorité des clients témoigne d'un changement positif de
l'alimentation au sein de leur ménages (62%)104, d'une
autonomie renforcée (68%)105 et d'une amélioration du
bien-être (57%)106. De plus une analyse de l'impact, sur les
emprunteurs des programmes de MC au Côte d'Ivoire, a confirmé que
« les bénéficiaires des microcrédits ont
été capables d'augmenter et de stabiliser leurs revenus
107», et les études menées ont constaté
l'impact sur la croissance des revenus et des dépenses des
ménages visant à satisfaire les besoins essentiels.
103 FOUILLET, Cyril et al. , « Le
microcrédit au péril du néolibéralisme et de
marchands d'illusions. Manifeste pour une inclusion financière
socialement responsable »
104 «Evaluation de l'impact du microcrédit au
Maroc », (2005), op. cit.
105 Idem.
106 Ibid.
107ABANDA, Ambroise. « Accès à
la microfinance, inégalité et pauvreté en Côte
d'Ivoire ». Mémoire de DESS en Analyses Statistique
Appliquées au Développement / Avril 2004. Ecole Nationale
Supérieure de Statistique (ENSEA) d'Abidjan Côte-D'ivoire.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
2. Emancipation sociale de la femme
L'émancipation, l'empowerment ou encore
l'autonomisation est un processus relativement complexe et non
linéaire108, pouvant prendre différentes formes. Au
cours de ce processus, les femmes acquièrent ou étendent leur
droit de parole, leur reconnaissance sociale et leur pouvoir d'action. En fait,
le concept est né dans le Sud (Inde) puis a été
récupéré par les grands acteurs de la mondialisation
(Banque Mondiale et organismes onusiens) qui insistent fortement sur la
nécessaire contribution des programmes de développement à
l'empowerment des femmes (UNIFEM, 2000).
Dans la déclaration de Pékin (septembre 1995),
épigraphe 13, on lit : « L'empowerment des femmes et leur pleine
participation dans des conditions d'égalité dans toutes les
sphères de la société, incluant la participation aux
processus de décision et l'accès au pouvoir, sont fondamentaux
pour l'obtention de l'égalité, du développement et de la
paix »109.
Par ailleurs, certains organisations féministes, dont
l'origine remonte à 1975110, « (...) aident les femmes
à prendre conscience de leurs droits et à les défendre,
à améliorer leurs conditions de vie et leur statut social et
encouragent chez elles l'esprit de solidarité ». Grâce aux
groupes solidaires, l'accès des personnes démunies au MC est
rendu possible. Ces groupes offrent une opportunité aux femmes
d'exprimer leur volonté, de créer des lieux de parole, d'action
collective et de bâtir des espaces de sociabilité, d'autonomie, de
négociation et d'accès au pouvoir.
Il est aujourd'hui largement admis que les programmes de
microcrédit s'adressent presque majoritairement aux femmes. Le risque
est que ces programmes augmentent la pression111 sur les femmes du
fait que ces dernières assurent déjà une charge de travail
importante et l'activité créée ou renforcée
grâce au microcrédit ajoute du temps de travail
supplémentaire pouvant alourdir leur tâches.
108 « Le microcrédit est-il le faux-nez du
néolibéralisme ? La microfinance et les femmes pauvres ».
Les Cahiers d'Outre-mer. 2007. N° 238. pp. 217-233.
109 FALQUET, Jules.
http://www.penelopes.org/xarticle.php3
? Le 25 septembre 2004.
110 « Le microcrédit engendre t-il l'empowerment tant
souhaité des femmes ?». Revue du CADTM/ Les Autres Voix de
la Planète, 2005. Url. :
http://www.cadtm.org/spip.php?page=imprimer&id_article=1889
111 KAMALA, Marius-Gnanou. « Mondialisation,
activités économiques et nouveaux rapports de genre : des
exemples en Inde du Sud »
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Dans son rapport sur le rôle du MC dans
l'élimination de la pauvreté, le SG de l'ONU considère que
« Les mécanismes de microcrédit et de microfinance
s'accompagnent souvent de services sociaux qui ont un effet
d'émancipation sur les pauvres 112».
Or, l'émancipation de la femme peut être
appréciée par son accès au pouvoir au sein du
ménage consécutif à l'accroissement du revenu
généré par le prêt. L'étude113
sectorielle précitée tire la conclusion que 18% de femmes
deviennent chef de ménage après obtention de prêt et suite
à une augmentation moyenne de son revenu annuel d'une somme
équivalente à 3324 DH généré par un
prêt de 1000 DH.
Quant au sujet de la nature de l'empowerment visé on
distingue trois114 axes pouvant permettre d'éclairer les
mécanismes en jeu. D'abord, l'empowerment économique individuel
qui cherche à faciliter l'accès des femmes au microcrédit
et permet d'augmenter le revenu et par conséquent accroître
l'action du pouvoir détenu au sein du ménage. Ensuite,
l'empowerment par l'amélioration du bien-être du foyer qui permet
d'améliorer le statut social. Et enfin, l'empowerment social et
politique visant l'accès au pouvoir politique.
Pour Mark Malloch Brown, Administrateur du Pnud, le MC est
bien plus qu'un simple outil pour la génération de revenus tout
« en renforçant les rapports de force en faveur des pauvres, et en
particulier les femmes115».
Diverses études identifient également des
bénéfices sociaux retirés par les femmes participantes aux
programmes de MC contrairement aux autres femmes dans la mesure où les
1ères : « se sentent moins marginalisées, ont des
aspirations plus élevées pour l'éducation et à
l'avenir de leurs enfants 116».
Dans un contexte marqué par la mondialisation, la
question est de savoir si un revenu «régulier» - même
s'il est petit que celui procuré par le MC - permet ou non
«réellement
112 « Rôle du microcrédit et de la
microfinance dans l'élimination de la pauvreté ».
Rapport du Secrétaire général de l'ONU. 9 août
2010.
113 « Etude d'impact des programmes de
microcrédit au Maroc », (2009), op. cit.
114 « Le microcrédit est-il le faux-nez du
néolibéralisme ? La microfinance et les femmes pauvres
». op. cit.
115 LHERIAU, Laurent. op. cit. p.38
116 ABANDA, Ambroise. op. cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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et collectivement» aux femmes d'accroître leurs
capabilités117, de négocier un partage de
l'autorité au sein de la famille ou de reconstruire de nouveaux rapports
de genre.
L'UNESCO à son tour traduit l'empowerment par
habilitation en le définissant ainsi : « il s'agit de la
capacité des gens -hommes et femmes- à s'organiser,
individuellement et collectivement, afin d'avoir un meilleur accès
à la prise de décision, à l'information, aux
connaissances, à l'éducation, aux ressources économiques
et aux chances118».
D'après Maria Novak le pouvoir et l'argent sont les
deux faces d'un même phénomène et elle avance que «
dans le système capitaliste l'argent mène au
pouvoir119 » en considérant que « le salut des
pauvres ne viendra pas des riches sous quelques formes de charité
institutionnelle que ce soit. Il viendra de leur autopromotion120
». En fait, elle plaide à « mettre le crédit à
la disposition de ces millions de micro-entrepreneurs potentiels
équivaut à leurs donner le droit d'être autonomes. C'est
une façon de décentraliser le pouvoir de le rendre plus
démocratique121 ». Dans le même sens le
président de Planet-Finance défend la promotion du MC en tant que
facteur ayant des effets positifs sur l'émancipation des femmes puisque
grâce à lui « elles gagnent en autonomie et en
considération122 ».
117 Selon A. Sen, il faut non seulement prendre en compte ce
que possèdent les individus, mais aussi leur capacité, leur
liberté à utiliser leurs biens pour choisir leur propre mode de
vie. Les principaux concepts de cette théorie sont ceux de « modes
de fonctionnement » (...) et de « capabilités » ou «
capacités » (...) La capabilité est, par conséquent,
un ensemble de vecteurs de fonctionnements qui indique qu'un individu est libre
de mener tel ou tel type de vie. (...) L'ensemble des capabilités
reflètent, (...), sa liberté de choisir entre des modes de vie
possibles » (« being and doing ») (repenser
l'inégalité, Sen 1992).
118 GUERIN. Isabelle et al. « La Microfinance en
Asie : entre traditions et innovations », p.196,
119 NOVAK, Maria. La banquière de l`espoir.
op. cit. p.289.
120 NOVAK, Maria. On ne prête (pas) qu'aux riches : la
révolution du microcrédit. op. cit. p.83.
121 NOVAK, Maria. La banquière de l`espoir.
op. cit. p.290.
122 ATTALI, Jacques. Voyage au coeur d'une
révolution. op. cit. p.156.
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Source :
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Section 2 : Le microcrédit, un outil de lutte
contre les pauvretés
Dans les pays en voie de développement, le
microcrédit est promu en tant que stratégie de
développement qui suscite beaucoup d'espoir123. Il ambitionne
d'atteindre plusieurs objectifs : les services financiers aux pauvres,
l'accès à l'éducation, l'accès aux services
sanitaires et sociaux. Mais, pour certains le MC ne peut être à
lui seul le bon instrument de lutte contre la pauvreté et encore moins
contre les inégalités. Dans cette perspective des
études124 conduites par l'IRD-Genève le confirment en
démontrant que seulement 25 % des clients y profitent vraiment, 50 %
améliorent simplement la gestion de la trésorerie du
ménage alors que les 25 % restant échouent car leur situation
s'aggrave. Donc, le MC améliore la gestion des budgets familiaux et
stabilise les petites activités entrepreneuriales même s'il «
fonctionne plus comme un instrument de survie que de lutte contre la
pauvreté125 » et ce, mieux que rien, mérite
d'être encouragé. Alors que le parti opposé
considère que « les plus démunis auront facilement
accès au crédit et à l'information, ce qui aura pour effet
d'éliminer la pauvreté à brève
échéance126 » puisque l'accès aux services
financiers « demeure une façon pour les plus pauvres
d'accéder aux autres composantes du
123 ACCLASSATO, Denis. (2010). « Le microcrédit
entre shopping institutionnel et ciblage des plus pauvres », Mondes en
développement, 2010/4 n° 152, p. 31-44. Url :
http://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2010-4-page-31.html
124 GUERIN, Isabelle. « LeMonde ». 14/11/2006.
op. cit.
125 Idem.
126 YUNUS, Mohamed. Vers un monde sans pauvreté. op.
cit. p.344
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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développement que sont l'accès aux soins et
à l'éducation127. » et d'après Kofi Annan
ex-SG des NU/2006 un tel accès aide « à réduire la
pauvreté128» qui « pourrait être vaincue par
un développement généralisé et rentable de la
MF129 » conçue « pour amoindrir le risque, (..), de
tomber dans la pauvreté ou de devenir plus pauvre
encore130».
C'est pourquoi, le microcrédit doit être promu
comme outil «pertinent» de lutte contre l'exclusion
financière. Par ailleurs, des recherches réalisées
montrent son « utilité » dans la lutte contre la
pauvreté, même avec le «renforcement» de certains
dangers. Certes, sa légitimité ne fait pas de doute, les pauvres
en ont besoin plus que quiconque des autres services financiers. Or, dans la
pratique ses effets sont parfois limités soit par une vision trop
réductionniste de la pauvreté basée sur le volet
économique soit par une offre qualifiée parfois
d'inappropriée.
Face à la conception d'un capitalisme
«bienveillant»131 (selon la vision de Med
Yunus) envers les pauvres, intervenant dans un monde où la
pauvreté est liée aux faiblesses du marché capitaliste,
dans lequel le rôle de l'État a été
marginalisé et face à l'approbation des médias sur la
contribution du MC à la lutte contre la pauvreté, des voix
discordantes remettant en cause, non pas sa légitimité mais sa
position comme outil unique de lutte contre la pauvreté, ont bien du mal
à se faire entendre. Quoique, l'écart entre promesses et
réalité est important notamment en milieu rural.
§ 1 : Le MC et la pauvreté dans le monde
rural
Point 1 : Lutte contre la pauvreté
dans le monde rural
Offrir plus d'opportunités aux populations rurales en
leur permettant de créer des AGR, est le créneau du MC qui est
proposé comme instrument par excellence de la lutte contre la
pauvreté. Promouvoir et financer des activités qui conviennent
avec le milieu des ruraux permet la stimulation de leurs capacités
à pouvoir se prendre en charge et à assurer leurs besoins ainsi
que ceux de leurs familles. Ces populations ont besoin de l'appui financier
nécessaire pour entamer ou améliorer un projet. Cependant, le
développement des AGR en
127 ATTALI, Jacque. Voyage au coeur d'une révolution.
op. cit. p.57
128 LHERIAU, Laurent. Précis de réglementation
de la MF. op. cit. p.38
129 ATTALI. Jacque. Voyage au coeur d'une
révolution. op. cit. p.55
130 « Rôle du microcrédit et de la
microfinance dans l'élimination de la pauvreté ».
Rapport du Secrétaire général de l'ONU du 9 août
2010.
131 YUNUS, Mohamed. Vers un nouveau capitalisme. op.
cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
milieu rural se trouve parfois freiné par des
aléas souvent naturels, mais aussi faute de moyens financiers pour
développer ce type d'activités. Quoique, le montage financier du
MC et sa mise en oeuvre en milieu rural restent coûteux et risqués
au regard des AMC.
Point 2 : Combat contre l'enclavement dans le
monde rural (précarité sociale)
Le concept de précarité
(vulnérabilité) inclue les différents risques sociaux et
leur probabilité de survenance ainsi que la capacité d'un
ménage à s'en défendre sans s'appauvrir. Si tous les
ménages sont plus ou moins exposés aux mêmes risques, la
différence de précarité est liée principalement
à l'existence d'un « capital » économique et/ou social
pouvant être utilisé afin d'atténuer l'impact de tels
risques.
Généralement, dans les différentes
situations de pauvreté, les malaises viennent principalement de
l'irrégularité, l'incertitude et l'inadéquation des
revenus par rapport aux dépenses du ménage ainsi que de l'absence
de ressources sociales. Le moindre aléa peut plonger les familles dans
des situations de dépendance inquiétante, les conduisant
bientôt aux griffes de la pauvreté. Si le MC présente du
mal à agir efficacement sur l'importance du montant des revenus, il peut
permettre aux familles pauvres d'atténuer certaines contraintes de
liquidité, de stabiliser et diversifier des sources de revenu, de
renforcer un patrimoine productif mince et, ce faisant, de rendre les familles
« moins » fragiles. Jacques Attali pose la question majeure suivante
«La MF s'adresse-t-elle à tous les citoyens en situation de
précarité économique ? » avant d'ajouter que «
non seulement la MF peut être utile aux plus démunis, mais que
cette population cible doit également être son objectif
réel132 »
§ 2 : Le MC lutte contre l'exclusion sociale
(Accès aux services de base)
La notion d'exclusion fait référence à
l'ensemble des mécanismes de rupture133 aussi bien sur le
plan symbolique que sur le plan des liens sociaux. Elle est à la fois un
processus et un état consacrant un défaut d'intégration.
Bourdieu distingue le capital économique134
132 ATTALI, Jacques. Voyage au coeur d'une révolution.
op. cit. p.255
133 GLOUKOVIEZOFF, Georges. « De la bancarisation de
masse à l'exclusion bancaire puis sociale » La Documentation
Française. Revue Française des Affaires sociales 2004/3.
N° 3. pp.9-38. Url :
http://www.cairn.info/revue-francaise-des-affaires-sociales
134 FERRARY, Michel. « Microfinance et lutte contre
l'exclusion. Du contrat formel de financement au contrat implicite de
socialisation », Sociologies Pratiques. 2006/2 n° 13, pp.
61-76. Url :
http://www.cairn.info/revue-sociologies-pratiques
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
(patrimoine matériel et revenus d'un individu) du
capital social (réseau des relations personnelles d'un individu). Dans
cette perspective, un exclu se caractérise par une absence des deux
types de capitaux. Ainsi, l'isolement social s'accompagne d'un faible niveau de
revenu et inversement.
Solène Morvant-Roux affirme que « La microfinance
seule ne peut lutter contre la pauvreté et les
inégalités135 » sans nier la
légitimité de services financiers destinés aux pauvres et
adaptés à leurs nécessités. Gloukoviezoff parle de
l'exclusion sociale comme conséquence de l'exclusion bancaire qui reste
« le processus par lequel une personne rencontre de telles
difficultés d'accès et/ou d'usage dans ses pratiques bancaires,
qu'elle ne peut pas ou plus mener une vie sociale normale dans la
société qui est la sienne. Une situation d'exclusion bancaire
n'est donc définissable que par rapport aux conséquences sociales
des difficultés d'accès et d'usage qui la composent136
». De plus M. Yunus décrit la situation comme « un apartheid
bancaire et financier 137» et « les banques avaient en
quelque sorte construit une muraille que les pauvres ne pouvaient pas franchir
», en constatant que « ce sont près de trois quarts de la
planète qui n'ont pas accès aux services financiers et ne peuvent
par conséquent rien entreprendre. Pour mettre fin à ce
système financier d'exclusion déshumanisant, il a fallu lui
adjoindre un système plus favorable aux pauvres : le
microcrédit138 ».
Exclusion financière, effet et cause de
l'exclusion sociale
La problématique du crédit s'inscrit dans le
cadre plus large de l'exclusion bancaire et financière telle qu'elle est
définie par le centre Walras « Une personne est en situation
d'exclusion bancaire et financière, lorsqu'elle subit un degré
d'entrave dans ses pratiques bancaires et financières, qui ne lui permet
plus de mener une vie sociale normale dans la société qui est la
sienne139 ». Partant du principe que « l'argent appelle
l'argent (comme) dit un proverbe,... Si vous en avez un peu, vous pouvez en
avoir beaucoup. Le plus difficile, c'est d'avoir ce peu là (...) comme
dit Adam Smith) 140». Malgré cela, le microcrédit
peut
135 MORVANT-ROUX, Solène. « Microfinance et
réduction de la pauvreté : la fin d'un mythe ? ».
Magazine
Grain de Sel. N° 38, Mars/Mai 2007.
136 CORNEE, Simon. (2006). Microfinance : entre marché
et solidarité. IGR-IAE, Université de Rennes 1
Centre de recherche en Economie et Management. Master Recherche
en Sciences de Gestion 2006.
137 YOMBO ISSA, Ahmed. « La gestion du risque sur
l'activité de microcrédit dans un organisme de service
public: le cas du FNE » Université
Catholique d'Afrique Centrale, Mémoire de Master en Comptabilité
Finance
138 Idem.
139 NOVAK, Maria. « On ne prête (pas) qu'aux
riches : la révolution du MC », p.56, op. cit.
140 BWANGA M'VUANDA. Kim, op. cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
produire « des effets rentables pour leurs
bénéficiaires qui arrivent à nourrir, scolariser et
soigner leurs familles141 ».
Point 1 : Accès aux services urbains ou
lutte contre la vulnérabilité dans le monde urbain
Beaucoup de gens estiment que les personnes victimes
d'exclusion sociale n'ont pas suffisamment accès aux services
financiers. Une telle exclusion constitue un désavantage pour les
personnes désireuses de créer une activité autonome. C'est
à ce type de désavantage que le microcrédit se propose de
rétablir. D'autres obstacles liées à l'exercice d'une
libre activité, comme une participation sociale insuffisante et/ou des
problèmes d'accès aux services publics ou encore une
intégration sociale imparfaite peuvent être surmontés par
l'offre de services associés en l'occurrence à la
sensibilisation, l'accompagnement, l'aide pour les procédures
administratives, l'assistance pour l'accès aux institutions publiques,
etc.
Point 2 : Le MC au coeur des objectifs du
millénaire de développement (OMD)
Pour Mark Malloch Brown administrateur du Pnud, le MC est
devenu un des mécanismes clés pour l'atteinte des OMD et en
particulier la « réduction de moitié de l'extrême
pauvreté et de la faim à l'horizon 2015142 ». En
fait, il est reconnu, dans les cercles du développement, que les pauvres
ont besoin de quelque chose de plus que le MC seul, s'ils veulent trouver des
issues aux origines et états de leur pauvreté. Leurs
problèmes vont bien plus loin que le manque d'argent ou de biens. En
réalité, ils sont plongés dans une situation de
désavantage. L'accès aux services financiers est important vu
qu'il offre une opportunité d'agir sur le quotidien. Dans
l'idéal, ils peuvent accéder à une combinaison
étendue de services de développement y compris le MC. Chose qui
leur permet d'améliorer l'ensemble : affaires, revenus et patrimoines,
santé, nutrition, éducation, réseaux de soutien social,
etc. Il s'agit de savoir comment peut-on assurer une telle combinaison de
services appropriés, notamment là où ces services de base
sont absents ?
Mohammed Yunus à écrit : « En 2000, toutes
les nations du monde se sont rassemblés au siège des NU à
New York et ont proclamé leur détermination à atteindre 8
objectifs
141 BWANGA M'VUANDA. Kim, op. cit.
142 LHERIAU Laurent, op. cit. p.38
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
importants en 2015, dont la réduction de moitié
de la pauvreté » 143 une telle situation représente
d'après le fondateur de la Gramen, une réelle « menace pour
la paix144» mondiale.
Dans ce cadre, la diversité des besoins chez les
pauvres «se retrouve» ciblée, au moins, partiellement dans les
huit objectifs établis par les accords et les résolutions
adoptés par les Nations Unies dans les années 1990
(appelés OMD). Ces objectifs visent la réduction de moitié
le pourcentage de personnes vivant en état d'extrême
pauvreté ; la scolarisation de tous les enfants du primaire;
l'émancipation des femmes par l'élimination des disparités
de genre ; la réduction des taux de mortalité infantile de
2/3 ; la réduction des taux de mortalité maternelle de
3/4 ; l'accès aux services de santé génésique et la
mise en place de stratégies nationales en faveur du développement
durable. Ce sont là les objectifs dont les termes sont fixés pour
l'année 2015.
Idéalement, l'atteinte de ces objectifs contribue
à la création d'un «monde débarrassé de la
pauvreté et de la misère» selon M. Yunus comme tout le monde
s'entend sur la nécessité de soutenir davantage les pauvres,
d'abord en tant que bénéficiaires privilégiées des
services de développement et notamment comme vrais acteurs de
développement.
Parfois, les opérateurs de MC sont motivés par
l'idée de fournir des services non financiers à leurs clients
lorsqu'ils en constatent l'utilité. Pourtant, le souci de
viabilité financière les a rendus prudents quant à l'offre
de ces prestations non-financières, et fait qu'ils pensent que celles-ci
peuvent constituer un frein à leur pérennité.
Mais le crédit, même s'il est combiné avec
d'autres services financiers, ne s'adresse qu'à un facteur parmi
plusieurs engorgeant les pauvres : celui du manque de liquidités.
Brisés par le désengagement de l'Etat et l'application du PAS,
les pauvres ont peu ou pas d'accès à l'éducation, la
santé et d'autres services qui les aident à retrouver leur
«humanité» ; de la même manière qu'ils ont
été délaissés par le secteur financier
traditionnel.
143 YUNUS Muhammad, « Vers un monde sans pauvreté
», op. cit. p.335
144 Idem. p. 356
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Conclusion de la section
« (...) Si nous découvrons que les personnes ayant
obtenu des microcrédits s'en sortent mieux que les autres, cela
signifie-t-il pour autant que les microcrédits en question sont la cause
de l'amélioration ? (...)»145 En ce sens,
différentes explications restent acceptables et peuvent être
prises. Et, s'il est «constaté» que le MC ne concourt pas
à sortir les gens de la pauvreté, ses autres avantages ne
méritent-t-ils pas d'être cités ? Entendre que la preuve
n'est pas faite de l'augmentation des revenus des pauvres par le MC, et que de
nombreux clients l'utilisent juste pour un lissage de leur consommation sans
pouvoir développer des activités productives ce qui ne signifie
pas que le MC est un simple palliatif146 pour ceux qui
l'apprécient, du moins pour son rôle dans la gestion de leur
trésorerie familiale.
Or, tous les effets présumés positifs du MC
supposent la réunion de conditions liées à la fois
à la qualité de l'offre et aux conditions de l'environnement
local. En leur absence, le microcrédit peut devenir source de danger en
surchargeant l'endettement familial voire même conduisant au
surendettement.
En outre, le MC ne peut prétendre bouleverser les
rapports hommes/ femmes ni remettre en question les normes sociales
ancrées dans l'imaginaire collectif. Par un meilleur accès aux
ressources, le MC peut permettre aux femmes d'élargir leurs
opportunités et au mieux protéger leurs intérêts
sans pouvoir renverser règles et valeurs sociales.
La contribution du MC est indiscutable et représente un
immense progrès vers une certaine viabilité dans la vie des
pauvres. Dés lors que son aide apparente n'est totalement pas mise en
doute dans la mesure où nombre de prestations complémentaires
(formation, services divers d'appui) sont donc nécessaires pour qu'il y
ait réellement création de richesse.
145 ROSENBERG, Richard. « Le microcrédit
aide-t-il vraiment les pauvres ?», Focus note CGAP N°
59/2010.
146 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Conclusion du chapitre 2
Le microcrédit semble être une issue au
problème de la pauvreté quoique dans certaines conjonctures
devient inopérant et peut ne pas marcher d'autant plus lorsque le
bénéficiaire est trop pauvre, les projets sont trop nombreux,
généralement trop concurrentiels, parfois trop peu rentables ;
alors les risques seront grands pour l'emprunteur particulièrement le
risque de surendettement. S'ajoute à cela la difficulté de
contrôler l'usage des prêts : le client pauvre peut
privilégier d'utiliser (au moins partiellement) l'argent pour sa
subsistance et celle de sa famille plutôt que de l'investir totalement
dans une AGR dont la rentabilité n'est pas garantie. En effet, les plus
pauvres sont chassés d'office du crédit qui s'adresse d'abord aux
solvables capables de rembourser les intérêts. Pour les autres,
l'échec de leur entreprise peut avoir des effets bouleversants. En fait
les cibles potentielles de cet instrument sont les personnes « moyennement
pauvres », et non les plus pauvres. Ces dernières n'en
bénéficient pas réellement et bien peu d'entre elles
peuvent prétendre être sorties définitivement de leur
précarité.
En outre, Thomas Dichter147, est l'un des experts
qui a le plus étudié le phénomène, conclue que les
personnes les plus pauvres ne peuvent utiliser ce type de crédit «
de manière productive » et confirme qu'il est exagéré
d'affirmer que le microcrédit permet à ses
bénéficiaires de transiter de l'état du pauvre au statut
d'entrepreneur. Pour lui, le grand paradoxe du microcrédit lorsque "les
plus pauvres ne peuvent pas faire grand chose de productif avec le
crédit, et ceux qui peuvent en faire le meilleur usage sont ceux qui ont
besoin non pas d'un microcrédit, mais d'un prêt plus important,
assorti de conditions différentes". Dans cette perspective, le
microcrédit reste un bon instrument pour une
«stratégie» de survie sans qu'il constitue une clé au
développement. Ces programmes ne sont que des filets de
sécurité pour les démunis ; et JM Servet considère
qu'il, « (...) paraît aussi irresponsable de prétendre que la
pauvreté pourrait être vaincue mondialement par un
développement généralisé et professionnel de la
microfinance qui constituera aussi, dans l'avenir, un formidable marché
pour les banques commerciales » 148. À court terme, une
telle conscience peut permettre à certains opérateurs de MC et
à leurs conseillers de « capter
147 Thomas Dichter a publié les études parmi les
plus fouillées sur le microcrédit , Site web :
www.microfinancegateway.org)
148 FOUILLET, Cyril et al. Le microcrédit au
péril du néolibéralisme et de marchands d'illusions :
Manifeste pour une inclusion financière socialement responsable.
Op.cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
des ressources, mais ni les investissements de
responsabilité sociale, ni les placements financiers à but
lucratif, ni les autorités publiques n'ont intérêt à
long terme à ce qu'elle perdure » 149.
Malgré que son impact n'a jamais été une
question consensuelle, il se trouve que la majorité des études
sur le MC tirent un bilan relativement positif quoiqu'il est mitigé et
hétérogène. Une minorité non négligeable de
recherches conclue à un impact neutre voire parfois négatif
(surendettement, revente d'actifs pour rembourser les prêts, conflits
sociaux autour des remboursements au sein des groupes, etc.). Par contre ses
admirateurs le conçoivent comme une forme nouvelle visant l'humanisation
du capitalisme (capitalisme social) et un dispositif de promotion du
développement et de lutter contre la pauvreté.
Aujourd'hui, le microcrédit est devenu une mode parmi
nombre de ceux qui soutenaient la vision macro-économique d'ajustement
structurel. Cet engouement pour le microcrédit a le mérite
d'attirer l'attention des institutions financières sur le besoin de
services financiers des populations les plus pauvres. Fort heureusement, la
microfinance ne se limite plus au microcrédit ; une épargne en
sécurité est souvent un service plus important que le
crédit. Or le microcrédit est de plus en plus mobilisé,
selon J.M. Servet, dans une logique néolibérale niant la
nécessité des interventions publiques.
Que ce soit pour pauvres ou non pauvres, les besoins de base
et fondamentaux relatifs à l'éducation, l'alphabétisation,
soins de santé, prévention des risques, eau potable,
réseaux d'épuration et de communication sont plus urgents
à satisfaire que la diffusion à grande échelle de petits
prêts. Le microcrédit ne peut à court terme assurer les
besoins des démunis. Une politique volontariste de lutte contre la
pauvreté et les inégalités ne peut s'appuyer exclusivement
sur un outil comme celui-là. La vulgarisation de l'outil et sa
médiatisation à grande échelle peut-être une
occasion de retourner vers les concernés en leur donnant la parole, de
prendre conscience que la priorité n'est peut-être pas de «
placer du crédit » auprès des pauvres, mais qu'ils ont
d'abord besoin de se nourrir, de se soigner et que, pour cela, il faut de
l'emploi, des rémunérations et de la formation. Une
véritable réflexion sur le MC ne peut se faire en fin qu'à
partir d'une approche compréhensive tout en s'intéressant au sens
que chaque acteur donne à sa propre conduite et non au sens que l'on
aimerait bien lui attribuer.
149 ATTALI, Jacques. (2006). « Association d'économie
financière ». Président de Planet Finance. (2006) p.115.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
CONCLUSION DE LA PARTIE N°1 :
Le Maroc est reconnu comme leader de microcrédit dans
sa région. Il dispose du plus grand nombre de
bénéficiaires avec 40% des personnes servies dans le monde arabe,
et compte des AMC parmi les plus performantes au monde. Le secteur a connu
l'une des plus formidables croissances en matière de microcrédit.
En moins de quatre ans (2003-2007), le portefeuille de prêts des AMC a
été multiplié par onze, et la clientèle par quatre,
selon les données du MIX (Plateforme mondiale sur le web relative
à la microfinance). Cette croissance exceptionnelle a été
portée par quatre AMC leaders : Zakoura150, Al Amana,
Fondation des Banques Populaires et Fondep. Ces institutions affichent des
résultats remarquables selon les critères de performance
appliqués en microcrédit, notamment l'échelle, le
degré de pauvreté de la clientèle, la qualité des
actifs et la rentabilité. Ces résultats impressionnants ne sont
pas passés inaperçus : Al Amana et Zakoura ont reçu
plusieurs prix internationaux (le prix du MIX récompensant les IMF les
plus performantes et le Prix Européen de la Microfinance). En 2007, le
secteur de microcrédit au Maroc était l'un des plus actifs et des
plus performants au monde.
Ce succès n'aurait pas été possible sans
l'appui continu de l'Etat. La loi 18-97 sur le microcrédit a fourni un
cadre clair pour le développement du secteur, et l'Etat a apporté
un soutien financier important par le biais d'un fonds public (Fonds Hassan II)
qui a permis aux premières AMC du pays de se doter en capital. Le
ministère des Finances a exercé un suivi rapproché et la
banque Centrale (BAM) a pris en charge la supervision des AMC à partir
de 2007.
Le secteur a également bénéficié
de l'appui de la communauté internationale des bailleurs de fonds,
principalement de l'USAID et de la Commission européenne, la
SFI151 et la KfW152. Une grande spécificité
du secteur marocain du microcrédit réside dans l'engagement des
banques locales qui sont des bailleurs importants du secteur, elles ont
créé deux des principales AMC et finançaient 85 % des
actifs du secteur en 2008.
150 Absorbée par la FBPMC fin 2009.
151 Société Financière Internationale
(SFI) est une structure créée en 1956
dont l'objet est d'accorder des prêts à des investisseurs
privés s'ils sont garantis par l'État.
152 Groupe bancaire KfW qui appartient
à l'Etat Fédéral Allemand.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Cependant, vers la fin de 2007, le secteur a été
frappé par une crise. Ses signes ont commencé à se
manifester, notamment une hausse des taux d'impayés et une progression
de l'endettement croisé. En 2006, une étude
réalisée pour le compte de Planet-Finance153 a mis en
lumière la concentration des microcrédits dans les grandes
villes, comme Casablanca, Fès et Marrakech, et le développement
de l'endettement croisé dans les centres urbains. Les portefeuilles
à risque ont commencé à augmenter de manière
significative, de 0,42 % en 2003 (l'un des niveaux les plus bas au monde)
à 1,9 %154 en 2007. En décembre 2007, la crise des
impayés avait déjà débuté, mais son ampleur
était encore dissimulée par la croissance exceptionnelle du
portefeuille de prêts.
Les impayés étaient déjà
importants pour les prêts accordés au début de
l'année 2007, mais l'essentiel du portefeuille datait des six derniers
mois et n'était pas encore exposé aux arriérés. Le
portefeuille à risque à plus de 30 jours était de 1,9 %,
soit encore bien en deçà de la moyenne mondiale de
2,7155 % rapportée par le MIX. Les dirigeants et les
bailleurs de fonds des AMC, et même les agences de notation, se
déclaraient satisfaits et ne voyaient pas la crise due aux
impayés se profiler. La hausse brutale des portefeuilles à risque
a eu lieu en 2008 et a affecté toutes les IMF. En décembre 2008,
le PAR156 30 jours était de 5 %, et il atteignait le niveau
alarmant de 10 % en juin 2009. Les abandons de créance ont eux aussi
considérablement augmenté avec un impact négatif sur la
rentabilité et la solvabilité des IMF. En mai 2009, Zakoura,
l'une des IMF marocaines leaders, annonçait un PAR 30 jours de plus de
30 % et décidait de fusionner avec une autre institution, la Fondation
des Banques Populaires.
Dans une étude157 qui date de 2008 on trouve
que 40 % des impayés pouvaient être attribués à des
changements de méthodologie de crédit (une évolution vers
les prêts individuels, une augmentation du montant des prêts et le
passage d'échéances de remboursement hebdomadaires à des
échéances mensuelles). L'endettement croisé constitue
également un autre facteur aggravant, même s'il n'est pas à
l'origine de la crise. Cette même étude158 estimait que
40 % des bénéficiaires de microcrédits disposaient de plus
d'un prêt. Ce problème est particulièrement marqué
dans les centres urbains.
153 « Étude sur les endettements croisés
au Maroc », Juin 2006, Étude réalisée par
Planet-Finance Maroc.
154 D'après les données du MIXMARKET et rapports
d'audit des IMF site web :
www.mixmarket.org
155 Bulletin MicroBanking du 17 août 2008, site web :
www.microbanking.org
156 Portefeuille à risque.
157 « Enquête sur les impayés du secteur de
MC au Maroc », Étude réalisée par Bank Al
Maghreb en 2008.
158 Idem.
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Le secteur marocain de MC a promptement réagi ; l'Etat
a organisé l'acquisition, en un temps record, de Zakoura par la
Fondation des Banques Populaires une grande AMC soutenue par une banque
d'État solide, de façon à restaurer la confiance et
à éviter tout effet de contagion au niveau des impayés.
Les prêteurs se sont également montrés coopératifs.
Les banques commerciales locales ont maintenu leurs lignes de crédit, et
les institutions financières de développement n'ont pas
exigé le remboursement de leurs prêts. Dans le même temps,
les AMC ont considérablement freiné leur croissance et ont
réduit la taille de leur bilan.
En conclusion, les domaines d'intervention sont très
diversifiés pour les AMC. Il s'agit des créneaux actuels
(Activités Génératrices de Revenus «AGR»,
Micro-entreprises «ME»), de l'approfondissement vers le bas (rural),
du relèvement vers la petite entreprise marginalisée (PE) et du
traitement des besoins non satisfaits des ménages (logement,
équipement, urgences...). Par ailleurs, les AMC pourraient investir dans
de nouvelles activités telles que : l'épargne, les comptes
courants, les cartes automatiques, les transferts, les retraites et les
services non financiers de développement.
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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Partie II : le microcrédit, entre un discours
articulé
sur la finalité sociale et une pratique
orientée vers
Source :
http://info-resistance.org/2011/12/jacques-attali-le-micro-credible-il-vous-gonfle-nous-aussi/microcredit/
la performance commerciale
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
INTRODUCTION
Depuis plus de trente ans, le microcrédit est devenu un
véritable secteur159 économique qui pèse vingt
milliards de dollars. Aujourd'hui, il touche tous les continents et se pratique
dans plus de 150 pays. Il a non seulement gagné en extension
géographique, mais il est aussi devenu industriel et on comptait
déjà en 2006 plus de dix-mille programmes160 et
institutions de microcrédit de par le monde servant plus de 150 millions
de bénéficiaires. Cette industrie connaît une croissance
fulgurante de 30 %161 par an et de 100 %162 dans certains pays comme
l'Inde.
Elle est organisée en deux chapitres, le 1er
est consacré à un examen thématique au sujet du
microcrédit. Il comprend une présentation des fondements
référentiels et cadres régissant le secteur, une analyse
des mesures promotionnelle du MC et de renforcement des capacités des
AMC ainsi que leur action quant à l'atténuation de la
pauvreté. De plus, on relate le cas de l'Association Alamana prise comme
modèle dans ce mémoire à travers son organisation, sa
stratégie de financement et sa politique de croissance. Aussi, la
réalisation d'une enquête de terrain a-t-elle, bel et bien,
été l'occasion de s'approcher plus de la réalité du
MC pratiquée par cette institution dans la région de Rabat dont
résultats et recommandations feront l'objet de la 2ème
section de ce chapitre. Cependant, le chapitre 2 présente une analyse
critique des effets de l'adoption du paradigme marchand sur le devenir du MC et
ses dérives sur le plan opérationnel et leurs effets sur les
clients.
Chapitre I : Le microcrédit au Maroc, un secteur
en expansion
Ce chapitre vise à mettre en relief les performances du
secteur par un benchmarking des réalisations des AMC qui le composent.
Il se propose de présenter une radioscopie analytique du secteur du
microcrédit. Pour ce faire, deux axes seront examinés : le
cadre
159 DE LUTZEL, Emmanuel. (2007). « La microfinance, Une
industrie socialement responsable ». Magazine Échanges,
Juillet 2007, N° 245.
160 JEGOUREL, Yves. (2008). « La microfinance : entre
performance sociale et performance financière », La
Découverte.| Regards croisés sur l'économie,
2008/1 - n° 3 pp.197-205 Url :
http://www.cairn.info/revue-regards-croises-sur-l-economie
161 DE LUTZEL, Emmanuel. Op.cit.
162 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
réglementaire et institutionnel régissant le
secteur (section 1), et la présentation du secteur au Maroc (section 2)
à travers sa genèse, ses acteurs opérants et ses mutations
profondes.
Section 1 : Présentation du secteur au Maroc
Le microcrédit au Maroc a connu un accroissement
extraordinaire à « deux chiffres entre 2004 et 2007
»163 le situant parmi les pays plus actifs dans ce domaine ;
les AMC ont été soutenues amplement par la communauté
internationale. De plus « environ un tiers des emprunteurs des
institutions de microfinance actives dans un pays arabe habitent au Maroc
»164 puisqu'il comptait, fin 2003, environ 42 %165
des emprunteurs actifs pour toute la région Moyen Orient/Afrique du nord
(MENA). De la sorte qu'à la fin de 2007, le Maroc a servi environ
1,5166 millions de bénéficiaires actifs du
microcrédit ce qui lui a permis d'avoir un meilleur classement et par
conséquent « en 2006, le PNUD l'a élevé au premier
rang mondial »167.
§ 1 : Cadre réglementaire et institutionnel
Point 1 : Cadre réglementaire du MC
1. Présentation de la réglementation
régissant les activités de MC :
Le secteur de microcrédit est régi par le droit
des associations (15 novembre 1958) tel que modifié et
complété en 2002 et principalement par la loi 18-97 relative au
microcrédit. Le secteur bénéficie d'un environnement
favorable à son développement168, grâce surtout
à cette loi. Elle a été promulguée par le dahir du
5 février 1999 qui a créé un nouveau type d'association
spécialisé dans le microcrédit et autorise les
associations agréées à octroyer seulement les
microcrédits, sans pouvoir collecter l'épargne.
La loi relative au microcrédit a été
amendée, pour la 1ère fois, en 2004 afin de permettre
aux associations de microcrédit de financer, en plus des
activités productives et des services,
163 SERVET, Jean-Michel. (2010). L'inclusion
financière au Maroc par la microfinance : une responsabilité
sociale sous tensions. Compte-rendu de mission au Maroc du 19 au 29 juin
2010 /Projet IRD/UMR n°201
164 Idem.
165 REILLE, Xavier et LYMAN, R. Timothy (2005). Diagnostic de
l'environnement juridique et réglementaire de la Microfinance au
Maroc.
166 AYOUCH, Noureddine. (2008). Zakoura récit d'un
défi. Editions Tarek. p.84.
167 Idem.
168 DUVAL, Ann. (2001). Evaluation du secteur du MC au Maroc.
PNUD. p.8.
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Spécialisé Management du Développement Social 79
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
l'accès des "personnes économiquement faibles"
à l'acquisition et/ou la construction de logement et à son
équipement en eau potable et en électricité. De plus, en
date du 6 janvier 2011 un autre amendement de cette loi a vu le jour par la
promulgation de la loi n° 53-10 qui vise la consolidation de l'arsenal
juridique national régissant les microcrédits et la garantie de
son évolution progressive.
Ce dernier amendement a permis aux AMC d'exercer leurs
activités, soit directement par une association de microcrédit,
soit indirectement à travers une autre association de MC ou une
société anonyme agréée169 par Bank
Al-Maghreb. Le nouveau texte cherche également à permettre aux
AMC d'intégrer, parmi leurs ressources, les produits des participations
au capital des établissements de crédit dûment
agréés. Aussi, de nouvelles dispositions170 viendront
l'étoffer en vue de la soumission des opérations de fusion,
d'absorption et d'octroi d'une nouvelle autorisation par le ministre
chargé des finances sur avis du conseil consultatif des
microcrédits.
En plus, le secteur est régi par quatre décrets
:
- décret n° 2-99-1044 fixant le montant de
microcrédit à 30.000 DH ;
- décret n° 2-99-1045 chargeant le Ministre des
Finances de fixer les modèles des états comptables des AMC ;
- décret n° 2-99-1046 fixant la composition et les
modalités de fonctionnement du Comité de Suivi des
activités des AMC ;
- et le décret n°2-00-138 fixant la composition et
les modalités de fonctionnement du Conseil Consultatif du
Microcrédit.
Selon la loi 18-97, le microcrédit est défini
comme : «Tout crédit dont l'objet est de permettre à des
personnes économiquement faibles de créer ou de développer
leur propre activité de production ou de services en vue d'assurer leur
insertion économique ».
Ainsi pour exercer l'activité de microcrédit, selon
les termes de la loi (18-97), il faut :
- Etre constitué sous la forme juridique d'association
;
- N'exercer comme activité que l'activité de
microcrédit ; - Etre préalablement agréé par le
Ministère des finances ;
169 En tant qu'établissement de crédit, selon la
loi 34-03 relative aux établissements de crédit et organismes
assimilés
170 Article 7 bis de la loi 18-97 relatif au
microcrédit
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
- Assurer sa viabilité financière au bout de 5 ans
; - Tenir une comptabilité régulière.
Au terme du premier article de la loi 18-97: « est
considéré comme association de microcrédit toute
association constituée conformément aux dispositions du dahir
n° 1-58376 du 3 Joumada I 1378 (15 novembre 1958) réglementant le
droit d'association et dont l'objet est de distribuer des microcrédits
dans les conditions prévues par la présente loi et les textes
pris pour son application ».
Au terme de l'article unique de la loi 58-03 du 6 mai 2004
modifiant et complétant la loi 1897 relative au microcrédit
permettant l'extension de l'objet des prêts accordés aux
bénéficiaires : « est considéré comme
microcrédit tout crédit dont l'objet est de permettre à
des personnes «économiquement faibles» :
- de créer ou de développer leur propre
activité de production ou de service en vue d'assurer leur insertion
économique ;
- d'acquérir, de construire ou d'améliorer leur
logement ;
- de se doter d'installations électriques ou d'assurer
l'alimentation de leurs foyers en eau potable... ».
La loi a également fixé le seuil des prêts
à 50.000 DH, mais son décret d'application s'est contenté
d'un plafond de 30.000 DH. Cette restriction a permis de segmenter le
marché du crédit où les AMC servent essentiellement les
petites activités génératrices de revenu et les
microentrepreneurs.
2. Atouts et obstacles du cadre
réglementaire
En plus de la simple autorisation à opérer les
programmes de microcrédit, la loi 18-97 comporte certains avantages pour
les associations de microcrédit. Ces avantages impactent positivement le
volet de leur financement comme suit :
- la loi restreint le champ d'action des AMC à des
activités de microcrédit (art. 3 de la loi 18-97), cela a permis
aux AMC de se concentrer davantage sur le microcrédit et de
développer leur professionnalisme dans le domaine. Cette
spécialisation a donné ses fruits avec l'existence d'AMC
performantes techniquement et financièrement, et dont la
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
reconnaissance est mondiale. Les AMC ne peuvent faire que le
microcrédit et les opérations qui lui sont directement
liées, ce qui a nécessité, au moins pour certaines d'entre
elles, la création de nouvelles associations
spécialisées171 ;
- La loi oblige les AMC à présenter des
projections financières garantissant leur viabilité au terme
d'une période n'excédant pas cinq ans, à compter de la
date de leur autorisation. Cette obligation a été favorable
à l'émergence d'institutions viables172 plus
attractives à l'égard des différentes sources de
financement ;
- L'approbation du plan comptable du MC par le Conseil
National de la Comptabilité (CNC) (le 26/05/2006 ; devenu
opérationnel à partir de 2008) a permis aux AMC de disposer d'un
tableau de bord composé de ratios prudentiels173, ce qui a
renforcé leur transparence174 à l'égard des
bailleurs de fonds. De même, la supervision du secteur a
été confiée à Bank Al Maghreb qui a défini,
en concertation avec la FNAM, des règles prudentielles
spécifiques au secteur ;
- La loi autorise le Ministère des Finances à
fixer les taux d'intérêts propres au secteur. Ceci démontre
que le gouvernement observe le microcrédit en tant que domaine
spécialisé et distinct des opérations bancaires
classiques. En plus, il est prévu que ces taux seront fixés en
consultation avec le conseil consultatif du microcrédit (CCMC) ;
- La loi exige des audits externes annuels, et ce pour assurer
plus de transparence au niveau du secteur et aider les associations à
capter d'autres sources de financement ;
- La loi prévoit aussi la mise en place des structures
et procédures importantes pour l'encadrement du secteur en
général pour améliorer la coordination et la supervision
du secteur.
En dépit de ses apports, la loi relative au
microcrédit souffre de certains obstacles qui peuvent limiter le
développement des AMC et du secteur. Citons-en les aspects suivants :
- le statut d'association sans but lucratif des AMC entrave
l'accès à certaines sources de financement;
- la loi ne permet pas encore aux AMC de mobiliser
l'épargne;
171 La majorité des programmes de microcrédit
était administré au départ comme un programme parmi
d'autres programmes de développement opérés par les
associations
172 La loi 18-97 impose aux AMC un délai de 5 ans pour
réaliser leur autonomie opérationnelle (couverture des charges
administratives par les produits nets) et financière (couverture des
charges administratives et des charges liées aux risques (provisions)
par les produits nets).
173« Nouvelle loi bancaire : ça bouge dans le
microcrédit ». L'Economiste, 20 février 2005.
174 Pour plus de détails voir l'article « Grosse mise
à niveau comptable », L'Economiste, n°2030.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
- le taux d'intérêt maximum applicable aux
opérations de microcrédit devrait en principe être
fixé175 par arrêté du Ministre chargé des
Finances sur avis du CCMC. Dans la pratique, à ce jour ce taux n'est pas
encore déterminé et les taux d'intérêt
appliqués sont parfois jugés élevés.
Il ressort donc que le cadre réglementaire
régissant les activités de microcrédit contient des
avantages et des entraves au développement des AMC. Les atouts doivent
être renforcés et les entraves endiguées. L'objectif
étant de créer des AMC viables et performantes
financièrement sans pour autant s'éloigner de la finalité
sociale de leur action.
Point 2 : Cadre institutionnel du MC
La loi 18-97 relative au microcrédit a prévu et
mis en place trois structures pour assurer le suivi, l'encadrement et la
supervision du secteur : un comité de suivi des activités de
microcrédit, un conseil consultatif et une entité
fédératrice des AMC. Ce texte de loi a doté le secteur de
deux structures d'encadrement : La Fédération Nationale des
Associations de Microcrédit (FNAM) où toutes les associations de
microcrédit sont tenues d'adhérer. Elle a vu le jour le 4 octobre
2001176. C'est l'organe de concertation, de coordination interne et
de représentation du secteur dont le rôle consiste à
organiser l'activité des associations de microcrédit et y assurer
leur représentation. Toutefois cette organisation (FNAM) ne peut
afficher « qu'une expérience institutionnelle relativement
brève, marquée des désaccords provoqués par la
nature hétérogène de ses membres » 177.
Elle ne dispose pas des moyens humains nécessaires dans la mesure
où elle ne compte qu'un seul poste permanent (Responsable administratif
et financier). Et pour de nombreuses questions de gouvernance « les 7
membres de taille moins importante ont fait bloc pour voter, privant ainsi de
véritable représentation les quatre membres plus importants en
taille »178 .
Quant au Conseil Consultatif pour le Microcrédit
(CCMC), il est consulté sur toutes les questions liées au
développement du secteur. Ce Conseil est présidé par le
Ministre des
175 Article 8 de la loi 18-97 relative au microcrédit.
176 LAMRINI, Rida. (2009). Les chevaliers de l'infortune,
Microcrédit au Maroc : la genèse. Editions Marsam. p.73
177 XAVIER, Reille. et TIMOTHY. R. Lyman, op . cit.
178 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Finances et composé de 15179
membres180 représentant l'ensemble des organismes pouvant
contribuer au développement du microcrédit, dont seulement 3 du
secteur de microcrédit (nommés par la Fédération).
Egalement, il donne son avis au Ministre des Finances sur l'octroi et le
retrait d'agrément, sur les règles comptables et prudentielles,
sur le montant maximum de microcrédit et sur les taux
d'intérêt à appliquer par les associations de
microcrédit.
Dans le but d'assurer une transparence au niveau de la gestion
des AMC, la loi prévoit la création d'un Comité de Suivi
des activités des AMC qui veillera au respect des dispositions de la
loi. Ce comité est composé des représentants de trois
départements ministériels (Finances, Intérieur, Emploi)
chargé de veiller au respect par les associations de microcrédit
des dispositions de la loi régissant le microcrédit et des textes
pris pour son application.
Concernant le contrôle sur pièces et sur place
des associations de microcrédit, la loi n° 3403 (loi bancaire de
2006) a transféré cette attribution à Bank Al-Maghreb. Les
résultats des contrôles effectués par cette structure de
supervision sont adressés au Comité de suivi pour
instruction.
§ 2 : Présentation du secteur au Maroc
Le Maroc se dote d'un secteur de microcrédit fort et
dynamique, et rare sont les pays qui en disposent. Reconnu comme un champion du
microcrédit, servant 40 %181 des clients dans le monde arabe,
il compte également certaines des organisations les plus performantes en
la matière, au niveau international. Entre 2003 et 2008, le nombre des
clients actifs a été multiplié par quatre, passant de
300.000 à 1.200.000182.
179 DUVAL, Ann. Op. cit.
180 Membres du CCMC : Selon l'article 19 de la loi N°
18-97 relative au microcrédit : Il est institué un conseil
consultatif du microcrédit composé : de représentants de
l'administration ; de représentants des associations des chambres
professionnelles ; de représentants de la Fédération
Nationale des Associations de Microcrédit ; d'un représentant de
Bank Al Maghreb ; d'un représentant du Groupement Professionnel des
Banques du Maroc ; d'un représentant de l'Association Professionnelle
des Sociétés de Financement.
181« Le secteur marocain du microcrédit en
2010 : Eléments d'éclairage et d'analyse », Etude du
Centre M6MS, 2011.
182 Idem.
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Spécialisé Management du Développement Social 84
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Au cours de 2010, 12 AMC ont été en
activité, totalisant un portefeuille d'encours d'environ
4,7183 milliards de dirhams et plus de 880.000 clients actifs. Et
à fin 2011, le nombre de clients a subi une légère
variation en baisse en enregistrant 997.700184 clients pour
4,6185 milliards de dirhams.
Or, la finance informelle demeure une pratique courante au
Maroc, qui a existé, depuis toujours, sous différentes
formes186 (thésaurisation, usuriers, «Dart» ou
«Jamaiat»). Le recours continu à ces pratiques informelles
s'explique largement par l'absence d'une offre financière adaptée
aux besoins des populations démunies et des microentrepreneurs, chose
qui trouve son explication partiellement dans le taux faible de
bancarisation187 de la population qui tourne aux alentours de 20%.
Toutefois, l'apparition du MC au Maroc, dans les années 1990, a
bouleversé réellement la donne de la finance informelle sans
l'abattre totalement du fait qu'il continue toujours d'exister dans certaines
couches sociales. D'année en année, l'expérience marocaine
s'est considérablement enrichie, et les capacités des AMC se sont
réellement renforcées. Aujourd'hui, le secteur recèle un
immense potentiel de développement.
Point 1 : Fondements et
référentiels du secteur
Au Maroc les activités de microcrédit ont
débuté au milieu des années 1990, malgré cela le
microcrédit reste relativement jeune au pays. La première mention
de cette notion, a été faite en 1992, lors d'une
conférence organisée par l'Ecole Nationale pour l'Agriculture de
Mekhnès sur la désertification au Maroc. Afin de répondre
aux besoins des populations démunies et des microentrepreneurs, et
à la lumière de l'émergence du microcrédit de par
le monde, les premières opérations de MC débutèrent
effectivement au Maroc en 1993, avec l'appui de l'ONG «
AMSED188 », ainsi le premier prêt a été
accordé en 1993 à une femme. Par la suite, à la fin des
années 1990, plusieurs actions ont été entamées
soit par les autorités
183 « Le secteur marocain du microcrédit en 2010
: Eléments d'éclairage et d'analyse », op.
cit.
184 Chiffres du Centre Med 6 pour le soutien de la microfinance
solidaire
185 Idem.
186 ABDAIMI M, (ed.). (1991). La finance informelle au
Maroc. in Salahdine Mohamed, L'emploi invisible au Maghreb, SMER,
Rabat, p.83.
187 Cela ne s'explique pas par une volonté d'exclusion,
mais probablement par la non rentabilité financière des produits
offerts (dispersion géographique de la population, absence de garanties
réelles...) pour des banques soumises à des contraintes de
rentabilité.
188 Association Marocaine pour la Solidarité et le
Développement
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Spécialisé Management du Développement Social 85
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
publiques, soit par les bailleurs de fonds ou par des ONG. Et
ce dans le but de consolider le secteur et de renforcer les capacités
institutionnelles et financières des AMC.
C'est à partir de 1998 que le programme Microstart du
PNUD189 a fourni une assistance financière et technique aux
associations de MC marocaines avec un budget 1,7 millions US$. Cet appui au
secteur a été suivi par celui de l'USAID190 pour plus
de 16 millions US$ en faveur surtout de l'association Al Amana.
L'octroi de microcrédit a longtemps été
une composante des activités d'ONG généralistes qui ont
dû diviser leur structure en 1999 avec la mise en vigueur de la loi sur
le microcrédit qui exigeait la séparation des programmes de
microcrédit de leurs ONG mères.
A ces efforts de soutien du secteur s'ajoute une subvention de
100 millions de DH du fonds Hassan II pour le développement
économique et social en 2000. Cette contribution financière a
permis d'accroître le nombre et le montant des prêts
accordés, en particulier pour les deux principales associations de
l'époque (Al Amana et Zakoura191).
Face au développement des activités de
microcrédit, les pouvoirs publics ont adopté, en 1999, un cadre
réglementaire (la loi n°18-97) et confié la supervision du
secteur au ministère des Finances et à la banque centrale (Bank
Al Maghreb). En fait, le MC au Maroc représente une expérience
assez riche et un exemple à suivre pour les pays du Maghreb et du
Moyen-Orient. Le secteur a, effectivement, connu un développement
remarquable puisqu'aujourd'hui 12 Associations de Microcrédit (AMC) de
tailles différentes exerçant tout en servant plus de 800 000
clients actifs et employant plus de 4700 personnes permanentes. Le
marché est très concentré avec deux associations (Al Amana
et la Fondation BPMC) qui détiennent, à ce jour, plus de 60% du
marché local.
Le microcrédit reste relativement adapté aux
besoins du pays en raison de l'importance de la pauvreté dans le pays,
la domination de la microentreprise et de l'activité informelle.
189 Programme lancé en février 1998 par le PNUD
pour apporter un appui technique et financier au secteur de
microcrédit.
190 Agence des USA pour le développement international
(USAID).
191 Zakoura Microcrédit est absorbée par la FBPMC
courant l'année 2009.
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Spécialisé Management du Développement Social 86
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Les Associations de microcrédit
opérationnelles
a. Les Associations de microcrédit au Maroc
Grâce à la loi sur le microcrédit, il
existe aujourd'hui 12 associations de microcrédit
spécialisées192 actives au Maroc. Ces associations
sont : Al Amana, la FBPMC, FONDEP, ARDI, AMSSF, ISMAILIA MC, AMOS, Al Karama,
TAWADA, MC du NORD, INMAA et ATIL-APS. La plus part des AMC pratiquaient les
programmes de microcrédit pendant quelques années avant
d'établir une vraie association de microcrédit telle qu'exige la
loi.
En réalité, il existe des disparités
claires entre associations, du point de vue taille et capacité
institutionnelle. Le portefeuille et le nombre de clients actifs des deux plus
grandes associations ensemble (Al Amana et FBPMC) représentent
près de 60% des clients actifs du secteur. Si on ajoute ARDI et FONDEP,
les quatre plus grandes comblent près de 95193% du
marché. Le nombre de clients actifs des 8 autres associations varient
entre 800 et 16000 pour un encours moyen de 5836, avec un encours financier
total de l'ordre de 4742 millions DH.
b. Les AMC, des tailles différentes :
En principe, divers critères peuvent être
mobilisés pour rendre compte de la performance des AMC. Comme le montant
des crédits est plafonné en vertu de la loi, le nombre des
clients servis peut donner une idée sur le poids de chaque AMC. En
adoptant ce critère les AMC peuvent être classées comme
suit (voir tableau n°1 ci-dessous) :
192 Tous les acteurs du secteur au Maroc sont des ONG, et
même les deux banques qui ont décidé de poursuivre le
microcrédit ont décidé de le faire à travers une
association séparée de la banque.
193 Site web de la fédération nationale des
associations de microcrédit (FNAM) :
www.fnam.ma (30/09/2010).
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Tableau n°1 : La liste des AMC opérationnelles selon
le nombre de leurs clients actifs au 30/09/2010.
Nom de l'institution
|
Nombre de clients actifs
Au 30/09/2010
|
|
ALAMANA
|
346.929
|
FONDATION BANQUE POLPULAIRE
|
174.103
|
FONDEP
|
124.508
|
FONDATION CREDIT AGRICOLE
|
104.080
|
ALKARAMA
|
16.223
|
AMSSF/MC
|
15.951
|
INMAA
|
5.836
|
AMOS
|
2.781
|
FONDATION MICROCREDIT DU NORD
|
1.254
|
ISMAILIA
|
1.040
|
TAWADA
|
921
|
ATIL
|
874
|
Source194 : Données tirées à
partir du site web de la FNAM.
Ces données montrent que le secteur est
caractérisé essentiellement par son
hétérogénéité. Par conséquent, trois
grandes entités de tailles différentes peuvent être
distinguées :
? Les grandes AMC : cette catégorie se compose de
quatre grandes associations
(ALAMANA, FBPMC, FONDEP, ARDI) disposant chacune de plus de
100.000 clients actifs. Ces quatre AMC sont toutes de vocation nationale. Elles
arrivent à réaliser leur viabilité opérationnelle
et financière comme en témoignent les ratings195
réalisés, aussi elles arrivent à drainer des
financements de sources nationales et internationales;
? Les AMC de taille moyenne : il s'agit de deux associations
moyennes ayant plus de 15.000 clients actifs chacune. Les deux à
couverture locale (Al Karama ; AMSSF/MC). Ces deux institutions ont reçu
des fonds de crédit de sources nationales et étrangères
pour consolider davantage leur capacité institutionnelle et satisfaire
les demandes ascendantes de leurs clients ;
194 Site web:
www.fnam.ma Op. cit.
195 Les rapports de rating représentent une opinion
objective et indépendante sur la solvabilité des institutions.
Pour plus de détails sur le déroulement du rating, voir le
document publié par Patrick Kerr et Gregory Thys in Micro Rate Africa :
www.microrate.com
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
? Les petites AMC : il s'agit des AMC à vocation
régionale ou locale (INMAA,
ISMAILIA, AMOS, ATIL, FONDATION MICROCREDIT DU NORD), à
l'exception d'INMAA qui a un rayon d'action nationale. Elles servent chacune
moins de 10.000 clients actifs. Ces institutions gagneraient à renforcer
leur attractivité vis-à-vis des sources de financement.
Au total, le secteur de microcrédit au Maroc est un
secteur hétérogène, caractérisé par un
développement inégal des AMC qui le forment.
Point 2 : Un secteur en mutation
Le secteur de microcrédit au Maroc a connu de profonds
changements durant ses vingt ans
d'existence : une vulgarisation de taille et une croissance
impressionnante sur le plan
mondial. En effet, les principaux événements qu'a
vus le secteur sont récapitulés ci-après :
- 1993 : Octroi du 1er prêt microcrédit a
la région de Khénifra ;
- 1995 : Création de la Fondation ZAKOURA196
;
- 1995 : Création de AMSSEF ;
- 1996 : Création de FONDEP ;
- 1997 : Création de AL AMANA ;
- 1998 : Création de FBP MC ;
- 1998 : Lancement du Programme Micro Start du PNUD ;
- 1999 : Promulgation de la loi 18-97 relative au
microcrédit ;
- 1999 : Création de AL Karama ;
- 1999 : Création de INMAA ;
- 2000 : Création de AMOS ;
- 2000 : Appui financier du Fonds Hassan II ;
- 2001 : Création de la fondation ARDI (CNCA) ;
- 2001 : Création de la FNAM ;
- 2003 : Amendement de la loi 18-97 (Loi 58-03 :
Amélioration des conditions de vie);
- 2005 : Forum National de la Microfinance ;
- 2006 : Fixation du plafond de microcrédit à
50.000 DH ;
- 2007 : Création du Fond de refinancement de
microcrédit «Jaida » au Maroc ;
- 2007 : Création du Centre Mohamed VI pour le soutien de
la Microfinance solidaire.
196 AMC qui ne fait plus partie du maillage du MC au Maroc, elle
a été fusionnée à la FBPMC en 2009
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
- 2007-2009 : Crise des remboursements au sein du secteur ;
- 2009 : Restructuration du secteur de MC par l'intervention de
l'Etat ;
- 2009 : Fusion-absorption de la Fondation Zakoura MC par la
FBPMC ;
- 2010 : Regroupement en réseau de 8 petites et moyennes
associations, elles se sont
agrégées à Crédit Agricole du Maroc
au sein du «Réseau Microfinance Solidaire
(RMS)»;
- 2011 : Retrait de la licence à la Fondation Zakoura MC
;
- 2011 : Amendement de la loi 18-97 par la loi n° 53-10 ;
A. Le microcrédit au Maroc en chiffres
En 2007, le secteur de MC au Maroc plafonnait à 1 354
000197 le nombre des prêts actifs et depuis il a connu un
repli suite à la mise en oeuvre d'un plan de restructuration du secteur
en régressant à 933 000198 en 2009 avant de poursuivre
sa baisse pour atteindre 797 700199 clients actifs à la fin
de 2011.
Au Maroc le nombre de micro-entreprises est estimé
à plus de 500.000 selon les chiffres communiqués par la
Fédération Nationale des Associations de Microcrédit
(FNAM), le nombre de clients actifs s'établit, à la fin de 2010,
à 816.019 enregistrant une régression de 15% par rapport à
la même période de l'année 2009. L'encours global de
prêts, se situant à 4.731 MDH pour un cumul des montants des
crédits distribués qui atteint 25,5 MM.DH par les 12 associations
de microcrédit agréées. A noter également, que
l'encours moyen du prêt est de 5.856200 DH au 31/12/2011.
A partir de 2008 le secteur a connu des difficultés
traduites par l'importance des créances en souffrance ayant un impact
sur les indicateurs d'activité et de rentabilité des AMC. En
effet, le resserrement des politiques de crédit engagé en 2008
s'est traduit par un repli de 16%201 de l'encours des prêts
à la clientèle à moins de 5 milliards de dirhams,
générant un encours moyen, par client, de près de 5.000
dirhams. Or suite auxdites fragilités, le secteur a mis en place des
actions visant l'assainissement du portefeuille des clients et
l'amélioration du dispositif de gestion des risques. Ainsi, l'encours de
crédit « a décru de 1% pour totaliser un
197 SERVET. Jean-Michel, « l'inclusion financière
au Maroc par la microfinance .... ». op. cit.
198 Idem.
199 Centre Med 6 pour le soutien de la MF solidaire.
Op.cit.
200 Idem.
201 Rapport annuel de Bank Al Maghreb sur le contrôle,
l'activité et les résultats des établissements de
crédit_ Exercice 2009
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 90
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
montant de 4,7 milliards de dirhams fin 2010, ramenant le
nombre de clients actifs à moins de 900.000 bénéficiaires,
en baisse de 11%»202.
En outre, le secteur bénéficie certes
d'avantages fiscaux importants comme le cas des dons octroyés par les
personnes physiques ou morales qui sont déductibles de l'impôt
annuel (IR, IS), les équipements et matériels destinés au
fonctionnement des AMC bénéficient de l'importation en franchise
des droits de douanes et les opérations de crédit
effectuées par les AMC au profit de leur clientèle sont
exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée. Ces avantages
sont valables pour une durée de 5 ans à compter de la date de la
publication au Bulletin officiel de l'arrêté d'agrément de
l'association de microcrédit. La loi de finances pour l'année
2006 a prorogé l'exonération de la TVA jusqu'au 31
décembre 2010.
Aujourd'hui, le Maroc a su créer un environnement
favorable au développement du microcrédit. Cependant, les
associations de microcrédit se trouvent confrontées à des
contraintes liées à leur financement et à la
diversification des produits et services offerts à leur
clientèle.
Partant du crédit solidaire, le secteur a lancé
le crédit individuel et ce, compte tenu de son engagement dans
différents programmes mis en place par les autorités publiques
(Moukawalati, logement social, INDH). Pour le financement des activités
génératrices de revenus, il a évolué vers le
financement du raccordement à l'eau potable et à
l'électricité du logement et la souscription de produits
d'assurance. En fait, le côté de financement de l'activité
des AMC par des dons et des subventions s'avère insuffisant c'est
pourquoi elles ont eu recours de plus en plus à un financement
commercial.
Un Fonds de refinancement des AMC dénommé
«Jaïda» a été mis en place courant 2007.
Créé sous forme de société de financement
dédiée au secteur, il vise à faciliter l'accès de
l'ensemble des AMC au financement grâce au mécanisme de
mutualisation des risques, à augmenter les fonds mobilisés au
profit des AMC grâce à la réduction des coûts
d'intermédiation, à assurer le renforcement institutionnel des
AMC, à diversifier les formes
202 Rapport annuel de Bank Al Maghreb sur le contrôle,
l'activité et les résultats des établissements de
crédit_ Exercice 2010
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 91
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
d'intervention au profit des AMC et à améliorer
la coordination entre les bailleurs de fonds intervenant dans le secteur.
Parallèlement, une réflexion est
déjà entamée au sujet de la transformation
institutionnelle des AMC afin de déterminer la nouvelle forme juridique
cible que pourraient revêtir ces dernières et qui permettrait
à celles souhaitant la transformation d'accéder à de
nouvelles sources de financement et de proposer de nouveaux produits financiers
à leur clientèle (monétique, microcrédit leasing,
micro-épargne).
B. Profil du secteur
Par ailleurs, le fonctionnement du secteur en tant que tel
laisse apparaître certains traits caractéristiques fondamentaux.
Le profil du secteur peut être globalement appréhendé
à travers une présentation des principales
spécificités du secteur.
La structure du « marché » peut être
qualifiée de type oligopolistique203, c'est-à-dire, un
petit nombre d'offreurs qui servent un nombre important de clients.
Afin de donner plus de lisibilité au secteur, nous
traiterons successivement de l'évolution de la taille du marché,
du nombre des clients actifs et de leur répartition
géographique.
? Analyse du secteur du microcrédit au Maroc
Durant la décennie 1997-2007, le secteur du
microcrédit au Maroc a connu un essor frappant en termes de croissance
et de nombre de bénéficiaires pour arriver à toucher plus
d'un million 350 milles clients actifs fin 2007.
On présente dans ce qui suit les chiffres du secteur
tout en l'analysant selon les informations communiquées par la FNAM en
commençant d'abord par l'effectif du personnel, puis la taille du
marché ensuite le nombre des clients et leur répartition
géographique tout en terminant avec la typologie des produits du
microcrédit.
203 BAGUARE, Khalil. (2005). Financement des Associations de
Microcrédit (AMC). Rapport réalisé pour le compte du
PNUD Maroc, p.13.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 92
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
1. Evolution des effectifs des AMC :
L'effectif global du personnel travaillant dans le secteur a
connu une croissance particulière jusqu'à fin 2007, il a
été multiplié par cinq, chose qui qu'on attribue à
la croissance fulgurante du secteur durant cette période.
|
31/12/2003
|
31/12/2005
|
31/12/2007
|
31/12/2009
|
31/12/2010
|
31/12/2011
|
Effectif
|
1339
|
2562
|
6700
|
5534
|
4712
|
5548204
|
Nombre d'agents de terrain
|
1057
|
2180
|
5150
|
3736
|
3801
|
4816205
|
Nombre du personnel hors terrain
|
282
|
382
|
1550
|
1798
|
911*
|
732*
|
|
Source206 : site web de la FNAM * Chiffres obtenus
par déduction
Tableau n°1 : évolution de
l'effectif des AMC
A partir de 2008 l'effectif a commencé à
régresser de 17% en 2009 par rapport à 2007 et de 15% en 2010 par
rapport à la même période de 2009. Ceci est dû aux
réajustements opérés au sein du secteur. Or, en 2011
l'effectif global du secteur a connu une augmentation de l'ordre de 17,74% par
rapport à 2010 qui est due à l'accroissement du nombre du
personnel de terrain de 26,70% aux dépens du personnel hors terrain qu'a
vu son nombre diminué de 19,65 % par rapport à 2010.
2. Evolution de la taille du marché
Malgré le jeune âge du secteur, la taille du
marché a évolué d'une façon remarquable avant de se
stagner pour rebondir à nouveau mais cette fois-ci avec des pas
sûrs. Le tableau suivant décrit cette évolution du
31/12/2003 jusqu'à décembre 2010.
204 Centre Med 6 pour le soutien de la MF solidaire. Op.cit.
205 Idem.
206 Site web de la FNAM :
www.fnam.ma , Op.
cit.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 93
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
|
31/12/2003
|
31/12/2007
|
31/12/2008
|
31/12/2009
|
31/12/2010
|
31/12/11207
|
Total des prêts en cours
|
537. 319. 853
|
5.598.433.528
|
5.689.886.514
|
4.865.907.601
|
4.731.124.922
|
4.557.000.000
|
Prêts distribués depuis la création
|
3.406.213.191
|
19.057.882.417
|
23.947.958.374
|
25.927.229.425
|
n.c*
|
n.c*
|
Encours moyen du prêt
|
1747
|
4138
|
4436
|
5261
|
5798
|
5856
|
Source208 : Données tirées à
partir du site web de la FNAM n.c.* : non communiqué
Tableau n°2 : Evolution de la
taille du marché
A partir de ce tableau on peut tirer les remarques suivantes :
- Le nombre total des prêts distribués depuis la
création a connu un accroissement
considérable : il s'est presque multiplié par 6
entre 2003 et 2008. Cela témoigne de la croissance considérable
qu'a connu le secteur et les besoins financiers substantiels qu'il a
affiché jusqu'au 31/12/208, et ce avant de régresser à
partir de 2009 (année de restructuration du secteur) ;
- Le montant total des prêts encours du secteur a
enregistré son pic au 31/12/2008 avec
5 700 millions de MAD pour régresser de 16%, 18% et 21%
en 2009, 2010 et 2011 avec successivement 4800, 4700 et 4557 millions de MAD
successivement par rapport à fin 2008.
- Le montant de l'encours moyen du prêt pour l'ensemble du
secteur avoisine 5860 DH fin
2011. Il importe de signaler qu'il est loin du plafond
réglementaire fixé à 30.000 DH. La faiblesse de ce montant
peut s'expliquer par les besoins immenses en financement des AMC et par le
recours des clients à plus d'une AMC pour financer leur activité.
Il a été constaté, à cet égard, que
l'insatisfaction des clients par rapport à ce montant209 les
poussent à diversifier leurs crédits en sollicitant plus d'une
AMC. Cette pratique, non conforme au code déontologique du secteur,
cause le surendettement des clients, ce qui affecte la
207 Centre Med 6 pour le soutien de la MF solidaire. Op.cit.
208 Site web de la FNAM :
www.fnam.ma , Op.
cit.
209 Le taux d'endettement croisé est estimé
à 25% au niveau de l'échantillon global (1250
bénéficiaires) sondé dans l'étude d'impact, cf.
« L'étude d'impact de microcrédit au Maroc 2004
».
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Spécialisé Management du Développement Social 94
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
solvabilité de ces derniers et augmente le portefeuille
à risque et par conséquent prolifère le nombre les
impayés au sein du secteur.
3. L'évolution du nombre des clients
actifs
L'évolution de l'effectif des clients actifs est un
indicateur pertinent, reflétant l'ampleur des interventions des AMC et
leur contribution à la lutte contre la pauvreté. Le tableau
n°3 retrace cette évolution des clients actifs.
|
31/12/2003
|
31/12/2007
|
31/12/2008
|
31/12/2009
|
31/12/2010
|
31/12/11210
|
Nombre de clients actifs
|
307.523
|
1.353. 074
|
1.282. 721
|
924.966
|
816.059
|
797.700
|
% Femmes
|
75.58%
|
63.94%
|
64%
|
n.c.*
|
n.c.*
|
n.c*
|
|
Source211 : Données tirées à
partir du site web de la FNAM. n.c.* : non communiqué
Tableau n°3 : Evolution du nombre
des clients et des femmes
Ce tableau permet de faire ressortir les remarques suivantes
:
- Le nombre total des clients de microcrédit a connu un
immense accroissement : il a plus
que multiplié par 4 entre 2003 et 2007 pour atteindre son
top avec un million 350 milles bénéficiaires, pour avoir
régressé successivement en 2008, 2009 et 2010 de 5 %, 28 % et 12
% avant de «stagner» en 2011;
- le pourcentage des femmes parmi les clients du MC a
été majoritaire en 2003 par plus de
75% avant de diminuer de 11% en 2007.
4. Répartition géographique des
clients
L'ampleur et l'intensité de la pauvreté varient
d'une région à l'autre. Les AMC tendent de plus en plus à
tenir compte de cet état de fait dans leurs interventions. Le tableau
n°4 retrace la répartition des clients actifs par zone
géographique.
Historique et Encours
|
31/12/03
|
31/12/07
|
31/12/08
|
31/12/09
|
31/12/10
|
31/12/11
|
Urbain
|
50.22%
|
55.35%
|
49.03%
|
57.39%
|
50.35%
|
*
|
Péri Urbain
|
15.95%
|
2.05%
|
5.35%
|
4.45%
|
4.80%
|
*
|
Rural
|
33.66%
|
42.61%
|
44.99%
|
38.04%
|
45.14%
|
*
|
Source212 : Données tirées à
partir du portail de la FNAM * Non disponible Tableau
n°4 : Répartition des clients actifs par zone
géographique
210 Centre Med 6 pour le soutien de la MF solidaire. Op.cit.
211 Site web de la FNAM :
www.fnam.ma , op.
cit.
212 Idem.
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Spécialisé Management du Développement Social 95
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
A la fin de 2003, le secteur servait plus de clients en zones
urbaines et périurbaines qu'en zones rurales, alors qu'à la fin
de 2007, la zone périurbaine s'est rétrécie par rapport
aux clients d'origine rurale. Au mois de décembre 2008, la zone
périurbaine s'est, à nouveau, élargi en même temps
que la zone rurale. En bref, le secteur est relativement concentré dans
les zones urbaines avec une importance accrue aux zones rurales 2007 et 2008.
Cela pourrait être s'expliquer par le fait que la majorité des
AMC213 a choisi de servir au départ les clients se situant
aux zones urbaines et périurbaines afin de réduire leurs
coûts, et de pouvoir réaliser leur viabilité
opérationnelle et financière au bout de cinq ans de leur
existence. Une fois réalisée, cette viabilité, les AMC
tendent à servir plus de ruraux qu'auparavant. L'importance accrue aux
zones rurales s'explique également par la volonté de certaines
AMC de s'éloigner de la concurrence, plus aiguë dans certaines
zones urbaines et périurbaines, et par la volonté du secteur de
s'attaquer à la pauvreté dans le milieu rural, réservoir
de pauvreté.
L'objet du paragraphe suivant est d'exposer les
différents types de produits offerts et envisagés par les AMC.
5. Les produits de microcrédit
Comme il a été déjà
signalé, la loi restreint le champ d'action des AMC aux seules
activités de microcrédit destinées à financer les
petites AGR. Ce n'est qu'en 2004 qu'elles ont été
autorisées à étendre leur offre pour la restauration et
l'amélioration du logement, à financer les installations
électriques et le raccordement des foyers pauvres en eau potable.
5.1. Produits offerts par le secteur du MC :
Le secteur a développé sa méthodologie de
prêt : il offre essentiellement le crédit solidaire et
récemment le crédit individuel, tandis que les autres produits
(crédit au logement, financement du raccordement à l'eau potable,
assainissement et l'électricité) sont en cours de
développement.
1) le crédit solidaire : il s'agit
d'un crédit octroyé à un groupe de personnes,
généralement cinq ou sept, qui s'engagent à
réaliser des investissements rentables à court
213 Il est à noter qu'INMAA est plutôt
concentrée dans le rural, FONDEP et AMOS visent aussi le monde rural.
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Spécialisé Management du Développement Social 96
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
terme, et à se cautionner mutuellement pour le
remboursement de prêts. Cette catégorie de prêt
représentait il y a peu presque la majorité du portefeuille de
certaines AMC.
2) le crédit individuel : ce produit
vise «essentiellement» les clients ayant réussi leurs
prêts dans le système solidaire et ayant besoin de financements
plus élevés, de durées de prêt plus longues ou de
conditions adaptées aux spécificités des
activités.
3) le crédit logement : ce n'est
qu'en 2004 que les AMC commencent à fournir des prêts pour
l'habitat. C'est un produit destiné aux populations ayant besoin d'un
financement pour l'amélioration, l'extension ou la rénovation de
leur logement principal.
4) le crédit d'accès aux
infrastructures de base : ce produit a été
autorisé avec le crédit logement. Il s'agit de crédits
octroyés aux populations ayant besoin d'un financement pour faire le
raccordement de leur logement aux réseaux d'eau potable et
d'électricité.
5) la micro-assurance : c'est un produit
nouveau qui permet aux clients de prévoir une provision
financière leur permettant de partager leurs risques. L'un des avantages
de ce produit c'est qu'il permet de réduire la
vulnérabilité des clients des AMC. Ce produit est actuellement en
phase d'expérimentation par ARDI et Al Amana.
A côté des produits cités ci-dessus, le
secteur offre d'autres types de crédits mais à titre restreint.
Il s'agit, entre autres, du crédit individuel à
l'équipement, du crédit d'élevage, du crédit pour
le tourisme rural et du prêt d'acquisition de kits solaires dans les
zones rurales enclavées. En outre, certaines AMC offrent des services de
formation et d'encadrement techniques aux bénéficiaires, afin de
les accompagner et les aider à rationaliser la gestion de leurs projets
et la commercialisation de leurs produits.
Certes, la modification de la loi 18-97 a permis aux AMC
d'offrir de nouveaux produits, mais la place qui leur sont
réservée est encore minime au sein du portefeuille des AMC
témoigne de l'insuffisance des ressources nécessaires pour les
développer et les mettre en oeuvre. En effet, le lancement de nouveaux
produits nécessite un financement supplémentaire pour
étudier le marché, lancer un programme pilote, assurer le suivi
de l'expérience et en évaluer les résultats, et enfin
adapter les politiques et les procédures.
5.2. Produits potentiellement envisageables pour
compléter l'offre des AMC :
Malgré le double amendement de la loi 18-97 (2004 et
2011), toute une gamme de produits reste encore non `touchée' et
à explorer par les AMC. En effet, le champ d'action des AMC
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Spécialisé Management du Développement Social 97
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
est «restreint» aux activités de
microcrédit, alors que d'autres produits peuvent être
proposés notamment la microépargne, des produits destinés
aux diplômés porteurs des microprojets et les transferts
d'argent.
? la microépargne : le taux de la
bancarisation de la population défavorisée est estimé
à
20%. Or, cette dernière manifeste des besoins aussi
bien en termes de microcrédit qu'en termes de produits d'épargne,
surtout lorsque ceci est appuyé par les résultats d'une
étude d'impact214 réalisée en 2004 constatant
que « la durée de participation des clients au microcrédit
favorise la constitution de l'épargne ».
? produits destinés aux diplômés
porteurs de microprojets : Ce projet est intéressant,
dans la mesure où il envisage d'offrir aux jeunes
diplômés l'opportunité de créer leur propre
microentreprise malgré que sa mise en oeuvre requiert de mettre en place
des mécanismes novateurs en matière de financement et surtout de
couverture des risques.
? les services de transfert d'argent : Ces
prestations constituent un marché
potentiellement important, et les AMC sont invités
à investir (après amendement de la loi) d'autant plus que le
Maroc est une zone de forte émigration.
Les AMC peuvent aussi envisager d'autres produits comme le
financement des activités créées par les ex-prisonniers et
les ex-prostituées afin de les aider à se prendre en charge par
eux-mêmes et de les soutenir à s'intégrer davantage dans la
société.
Il importe toutefois de signaler que la diversification
requiert une certaine maîtrise de la croissance et peut aboutir à
une éventuelle transformation institutionnelle réfléchie.
Pour que les AMC puissent réussir la définition et l'introduction
de nouveaux produits, après l'amendement de la loi, bien entendu, il est
nécessaire d'adopter une démarche progressive et prudente, car la
diversification implique un coût d'investissement réel et des
risques spécifiques à chaque produit qu'il faut
maîtriser.
Au total, le secteur du MC demeure un secteur
hétérogène, dépendant des crédits classiques
(solidaire et individuel) et relativement concentré dans les zones
urbaines. Toute stratégie de développement du secteur devrait
tenir compte du développement inégal des AMC et de la
214 « L'étude d'impact de MC au Maroc 2004
», Etude d'impact et de marché réalisé pour le
compte du secteur de MC au Maroc.
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Spécialisé Management du Développement Social 98
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
différenciation de leurs besoins financiers et
institutionnels, afin de renforcer leur capacité dans la lutte contre la
pauvreté.
Cette 2ème section comporte deux points,
dans le 1er on aborde l'association AlAmana Microfinance à
travers sa présentation (création, organisation, stratégie
de financement et politique de croissance) ; dans le 2ème on
expose les résultats du travail effectué sur le terrain
(enquête auprès des clients de microcrédit).
Section 2 : Alamana Microfinance, un leader du secteur
de MC au Maroc
Al Amana est l'une des associations les plus populaires au
Maroc. C'est le résultat produit d'un projet Maroco-Américain
dénommé « Activité de financement de la micro
entreprise » dont le démarrage a été assuré
par une ONG américaine spécialisée, Volunteers In
Technical Assistance (VITA). Al Amana cherche à développer ses
compétences dans l'industrialisation du microcrédit, aux fins de
la satisfaction du plus grand nombre et de la livraison de services financiers
adaptés à ses destinataires.
§ 1 : L'association ALAMANA
Point 1 : Création et organisation de
l'association
? Création de l'association215
Créée le 13 février 1997, Al Amana est
une association de droit marocain, autorisé le 31 mars 2000 à
faire du microcrédit par agrément du Ministère des
Finances en tant qu'Association de microcrédit.
L'histoire d'Al Amana commence à la deuxième
moitié de la décennie du siècle précédent
lorsque quelques hommes d'affaires marocains, des militants de la
société civile et autres ont décidé ensemble de
créer une association oeuvrant dans le domaine de microcrédit, et
ce avec l'appui de l'ONG américaine Vita. Aujourd'hui, Al Amana occupe
la place du leader dans la trame financière de proximité au
Maroc.
215 Site web de l'association Alamana :
www.alamana.org.ma
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Spécialisé Management du Développement Social 99
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Ci-après sont exposées certaines dates marquant
la voie de cette institution dans sa
«bataille» contre la pauvreté :
1997 : Création de l'Association Al Amana.
2000 : Autorisation du Ministère des Finances pour
exercer le microcrédit.
2001 : Al Amana assure son autonomie financière.
2002 : Al Amana acquiert une autonomie institutionnelle.
2004 : Al Amana est récompensée par
différents Prix d'Excellence pour son rayonnement
dans le secteur.
2005 : Al Amana passe le cap des 1.000 salariés et des
360 points de vente.
2007 - 2009 : Al Amana lance les prémices de la
bancarisation de masse.
2010 : Al Amana adopte une nouvelle identité
visuelle.
Organisation de l'association216
Al-Amana est gouverné à travers un conseil
d'administration, un bureau exécutif et diverses commissions. Sa gestion
est assurée par un Directeur Général et trois directeurs
de pôles. Les organes sociaux de l'association orientent sa politique
générale, notamment au niveau de la planification,
l'élaboration des programmes et des stratégies de
développement.
L'Association emploie 2081 salariés217
engagés pour rendre les services financiers accessibles à tous ;
parmi eux plus de 90% sont des agents de terrain. «Al Amana était,
fin 2009, avec 2100 salariés le plus gros employeur du secteur ; de
même que l'association dominait, avec 45 % des parts du marché en
nombre de prêts actifs et 57 % en termes d'encours de
prêts»218.
L'organisation219 d'Al-Amana est construite autour
de trois pôles : pôle support, pôle exploitation et
pôle finances. Elle dispose de départements centralisés et
de six directions régionales pour encadrer et appuyer son réseau
de 465220 points de vente répartis entre agences, antennes,
bureaux de rattachement et véhicules guichets.
216 Site web de l'association Alamana. op. cit.
217 Idem. Chiffres Novembre 2012.
218 SERVET, Jean-Michel. « L'inclusion financière
... ». , op. cit.
219 Site web Alamana. op. cit. (organigramme l'association en
Annexes)
220 Site web de l'association Alamana. Op. cit.(
Chiffres Novembre 2012)
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Spécialisé Management du Développement Social 100
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
L'association a entamé depuis 2006 une mutation dans
son organisation, visant à la mettre au diapason des institutions
financières les plus performantes. Pour ce faire, elle a
déclenché la préparation à la diversification de
services, à la spécialisation des équipes, au renforcement
du système de contrôle interne et au dépassement du risque
de personnes-clés.
Services financiers offerts par Al-Amana
Microfinance221 :
Depuis sa création, l'association Al-Amana n'a
cessé de développer et de diversifier son offre pour
répondre aux besoins (réels et potentiels) de sa
clientèle. Pour ce faire, plusieurs produits sont opérationnels
et dont les bénéficiaires ciblés restent les clients de
microcrédit au Maroc nommés « personnes
économiquement faibles».
Dans ce qui suit, on présente les produits offerts par
Al-Amana sur le marché de microcrédit :
Prêt Solidaire
Prêt de groupe d'une durée de 3 à 18 mois
et un montant variant entre 1.000 et 15.000 Dirhams, remboursable par
échéances hebdomadaires, bimensuelles ou mensuelles. Pour les
activités d'engraissement du bétail, les clients
bénéficient d'une période de grâce de deux mois
entre le déboursement et le premier remboursement.
Prêt Individuel Entreprise
Destiné aux microentreprises (financer
l'équipement et la promotion des entreprises), sa durée varie
entre 6 mois et 5 ans pour des montants allant de 1.000 DH à 48.000 DH
et les échéances sont remboursables, au choix, mensuellement ou
bimensuellement.
Prêt Individuel au Logement
Ces prêts sont octroyés individuellement aux
personnes recherchant un financement pour améliorer, acquérir, ou
construire, en tout ou en partie, leur logement, ou leur raccordement aux
réseaux d'eau potable et d'électricité. Leur durée
varie de 6 mois à 7 ans, et leur montant de 1.000 à 48.000
Dirhams.
221 Site web Alamana. op. cit.
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Spécialisé Management du Développement Social 101
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Accompagnement à la création : Prêts
à la création
Afin d'étendre ses financements à la
création de micro et très petites entreprises, Al Amana a
lancé une opération pilote qui s'adresse à des porteurs de
projets dont le besoin de financement ne dépasse pas les 50.000 DH.
Accompagnement AGR
Il consiste au financement de l'accompagnement technique et
financier des projets par une subvention jusqu'à hauteur de 70% du
coût de l'opération.
Financement véhicule utilitaire
Le prêt consiste à financer 75% du prix du
véhicule à hauteur de 48.000 Dirhams. Programme Villes sans
bidonvilles
Dans le cadre du programme « Villes Sans Bidonvilles
» initié par le Ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme, Al
Amana s'est engagée à participer à la résorption
des bidonvilles et à financer les besoins des
bénéficiaires via une adaptation du produit « logement
».
Point 2 : Stratégie de financement &
Politique de croissance de l'association
Stratégie de financement de
l'association222
a - Vision, mission et valeurs de l'institution
La vision de l'association Al-Amana s'articule autour de la
lutte contre l'exclusion financière en prenant comme slogan «Un
monde sans exclusions». C'est pour cela qu'elle étend ses
services financiers aux populations qui en sont exclues à cause de la
faiblesse de leurs ressources. Al-Amana voit que le secteur financier peut et
doit proposer une large gamme de services à l'essentiel de la population
faiblement bancarisée, et que les institutions de microcrédit
sont appelées à y participer fortement par leur
intégration au secteur financier.
La raison d'être d'Al-Amana est d'abord sociale, de ce
fait elle ne peut être entendue que dans le cadre d'une forte
contribution sociale. Pour cela, elle se consacre en priorité au service
des moins servis (populations et territoires) à travers des prestations
qui leur
222 Site web AlAmana, op. cit.
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Spécialisé Management du Développement Social 102
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
permettent une valeur ajoutée substantielle. Elle est
engagée à la qualité du service, à la transparence
et au partage, considérant que la réalisation de sa mission passe
aussi par la mise en commun des savoir-faire développés entre les
divers acteurs du développement. Elle agit en tant qu'institution
responsable socialement à l'égard de l'ensemble de ses parties
prenantes et de son environnement.
De plus, Al-Amana ambitionne à contribuer à
l'intégration sociale et au développement économique par
la microfinance et la promotion des micro-entreprises en vue de participer
à l'amélioration des conditions de travail et de vie personnelle
et familiale des clients.
Quant au système de valeurs de l'association Al-Amana,
les trois valeurs ci-après sont considérées comme
spécialement importantes à son regard : Qualité de service
(Considération, Innovation, Transparence, Honnêteté),
Solidarité (Appartenance, Disponibilité, Partage, Equité)
et Professionnalisme (Pérennité, Performance, Effort,
Rigueur).
b - Stratégie de financement de l'institution
Pour accompagner la croissance de son portefeuille clients,
Al-Amana s'investit beaucoup par la mise en oeuvre d'une stratégie
ambitieuse de financement. Par conséquent, elle base sa stratégie
de financement sur quatre objectifs à savoir :
1. La diversification des sources de financement par le
renforcement des fonds propres et des financements bancaires et
institutionnels, le recours aux certificats de dépôt, à la
titrisation du portefeuille et éventuellement à l'actionnariat,
et par la mobilisation des dépôts auprès du public.
2. L'amélioration du coût de la ressource : Les
charges financières rapportées à l'encours de
crédit devront diminuer progressivement pour passer de 4,8% en 2008
à 2,87% en 2013.
3. La sécurité : Limiter les emprunts avec
risque de taux de change à un maximum de 7% du total du bilan.
4. L'autonomie et la solvabilité : Réaliser et
capitaliser des excédents d'exploitation annuels suffisants comme levier
de la croissance.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Politique de croissance de l'association223
La stratégie d'Al-Amana vise une forte croissance du
portefeuille de crédit (25% par an en moyenne). Cette croissance sera
d'autant plus aisée que l'Etat aura opéré les choix
opportuns pour l'encadrement et l'évolution du secteur, et que la
clientèle, la concurrence et les ressources humaines auront eu un
comportement favorable. La stratégie admet le maintien d'un niveau
élevé des incidents de paiement, qui coûterait annuellement
3,70% du portefeuille moyen. Al-Amana doublerait quasiment le nombre de ses
prêts actifs, multiplierait par plus de 3 son portefeuille de
crédits (de 2,7 à 9 milliards de Dirhams), et réaliserait
un retour sur fonds propres qui s'élèverait à 30% en
2013.
Une stratégie de repli reste envisageable si
l'environnement venait à réunir plusieurs facteurs
répresseurs, tels le surendettement endémique des clients,
l'inflation galopante et durable, des incidences graves de la crise alimentaire
ou financière mondiale ou des coups de boutoir politiques. En pareil
cas, l'institution devrait pouvoir maintenir son activité, mais au prix
du gel de son potentiel de développement. La stratégie de repli
résulterait non d'un choix privilégiant la
sécurité, mais de la conjonction de la
décélération de la croissance (11% l'an ou moins) et la
hausse des incidents de paiement (coût des incidents de paiement
dépassant les 4%).
Depuis sa création, Al-Amana a servi
3,076224 millions prêts dont 1,523225 millions
destinés aux femmes, pour un cumul d'encours déboursé de
21226 Milliards de dirhams et a fait bénéficier
1,222227 million de clients.
Al-Amana a défini sa politique de croissance à
deux niveaux : l'un national et l'autre international.
Quant au niveau national, l'institution vise des objectifs
plus volontaristes tant au niveau de l'extension des services de crédit,
de diversification des prestations financières, d'amorce de sa
contribution internationale que de consolidation de son organisation. Elle vise
à doubler
223 Site web AlAmana. Op. cit.
224 Tableau de bord (Février 2O12), Site web AlAmana.
Op. cit.
225 Idem.
226 Ibíd.
227 Ibíd.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
le nombre de ses clients en le portant à 800 milles
clients228 à l'horizon 2013. De ce fait, l'offre de
crédit est appelée a être diversifiée en montants,
durées, cibles et modalités, notamment pour s'ajuster aux
attentes des petites entreprises non servies actuellement. Elle sera
adaptée en termes de coûts et contraintes pour la
clientèle, de manière à aboutir à des produits
optimisés et à moindre prix, tout en demeurant soutenable dans la
durée et pour la masse. Le portefeuille de crédit
s'élèvera à 8,6 milliards de Dirhams et le coût des
incidents de remboursement sera de 3,75% du montant moyen du portefeuille.
De plus, Elle vise à développer de nouveaux
produits financiers : dépôts et épargne, assurances,
transferts d'argent, monétiques. Ces nouveaux produis financiers
pourront être utilisés par l'essentiel des clients emprunteurs,
mais aussi par un demi-million d'autres clients.
Au niveau international, Al-Amana veut contribuer au
développement de l'offre de microfinance dans la région
arabo-africaine en mettant à contribution son savoir faire et sa
réputation. L'objectif est de contribuer à l'établissement
d'institutions financières pérennes dans la région qui
serviront ensemble un million de clients. Afin que cette activité ne se
fasse pas au détriment de la population initialement servie, elle sera
traitée en centre de profit et ses charges seront facturées aux
institutions bénéficiaires. Al-Amana sera par ailleurs
associée aux bénéfices réalisés à
terme, et elle pourra par la suite constituer cette activité en groupe
financier international.
Dans ce contexte, Al-Amana est invitée à se
doter de capacités requises pour relever les défis sur les plans
institutionnel et opérationnel (gouvernance, partenariats, organisation,
forme juridique, savoir-faire), en cohérence avec les évolutions
du cadre législatif et réglementaire du secteur. Elle portera ses
effectifs à 3.600 salariés, renforcera son encadrement moyen et
supérieur, spécialisera plus ses équipes,
développera un montage institutionnel pour accompagner la mise en oeuvre
de sa stratégie, acquerra les savoir-faire et les systèmes requis
pour l'amélioration de son efficience et le développement de ses
nouveaux services, et agira sur les leviers de renforcement de son image, et de
sa notoriété et de l'impact de ses prestations.
228 Objectif trop ambitieux du fait que le secteur n'en compte
que 797.900 clients au 31/12/11.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
§ 2 : Présentation des résultats du
travail de terrain (l'enquête)
Faire du terrain revient à rendre juste,
réhabiliter les pratiques ignorées, mal comprises ou
méprisées229. Dans le cadre de cette recherche, on a
conduit une enquête auprès des bénéficiaires du MC
de l'association Al-Amana, et ce dans l'objectif d'examiner cette
activité, représenter ses bénéficiaires et
d'élaborer un profil type de ses clients, aborder la destination des
prêts, saisir la nature de la relation clients-AMC,... etc.
Bien qu'une partie du reporting relatif à
l'enquête a été réservée à la
méthodologie employée, il convient d'exposer les
difficultés majeures auxquelles s'est confronté cette
étude, dresser les résultats et analyser leur contenu avant de
pouvoir conclure et de dresser des recommandations appropriées au
contexte de l'étude.
Point 1 : Démarche, méthodologie et terrain de
l'enquête
Le travail consiste en une enquête, un regard
réfléchi sur les utilisateurs du microcrédit. Il est
basé sur une étude principalement qualitative, et ce sans laisser
tomber l'importance du volet quantitatif. Cette enquête a
été effectuée sous forme d'interviews de 63
bénéficiaires de microcrédit auprès de
l'association Al-Amana, issus de quatre sites différents appartenant
à la région Rabat Salé Zemmour Zaïr.
Le type d'entretien reste peu directif vis-à-vis des
clients-bénéficiaires, parfois une seule question suffit et
suscite un flux d'informations de leur part. Dans ce cadre, on a insisté
sur ce qu'ils font concrètement et on a essayé, dans la mesure du
possible, de modérer les appréciations sur ce qu'ils pensent.
Les entretiens ont duré en moyenne 30 minutes par
bénéficiaire, administrés sur place et au hasard tout en
sollicitant la participation des arrivés au point de vente. Parfois
l'entretien prenait l'aspect d'une conversation de groupes composés de
2, 3 ou 4 clients.
229 EL BOUANANI, Rachid. (2009). Les impacts sociaux
économiques des microcrédits : le cas de l'association Alamana
pour la promotion des microentreprises. Mémoire de DESA, Rabat
2009.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
1. Echantillon
L'enquête faisant objet de base de la présente
recherche est essentiellement qualitative ; et ce sans négligence de
l'aspect quantitatif. Cependant l'examen quantitatif va nous permettre
d'apprécier certaines caractéristiques de l'échantillon
cible, fournir assez d'éléments utiles quant à
l'élaboration du profil du bénéficiaire de
microcrédit et ainsi enrichir l'analyse à faire.
L'étude a pour objectif de mener des entretiens sur la
base de questionnaires touchant un échantillon composé d'une
soixantaine de bénéficiaires du MC. L'enquête examine
différents critères d'étude caractérisant les
bénéficiaires à savoir : secteur d'activité,
âge, situation de famille, sexe, ancienneté au programme de
microcrédit, zone géographique, nombre d'enfants à charge,
taille du ménage, niveau d'instruction... etc.
Cependant, il a été mis au point un plan
d'enquête (selon les étapes qui suivent : choix
d'échantillons représentatifs à faire tirer d'une
population mère réelle, élaboration des questionnaires
selon la nature de l'échantillon et l'objet étude, programmation
du planning de visites sur le terrain, choix de la zone et des sites, ...
etc.), qu'on n'a pas pu l'exécuter malheureusement puisque l'association
Alamana n'était pas en mesure d'assumer la responsabilité de
communiquer des données et des informations au sujet de ses clients.
Pour contourner cet obstacle on a proposé la réalisation de
l'opération d'échantillonnage par les agents d'Alamana tout en
leur fournissant les données relatives à l'échantillon en
matière de critères et de caractéristiques, mais encore
une fois de plus il était impossible d'investir cette piste selon l'avis
d'Alamana. Comme solution « alternative » à la question
soulevée pour la réalisation de l'enquête, l'association
Alamana m'a proposé la possibilité de se déplacer le jour
« j » au niveau des sites choisis et de travailler directement avec
les bénéficiaires parvenus ce jour là au local (point de
vente de l'association). C'est-à-dire se livrer au hasard et au bon
gré des clients tout en les sollicitant à participer à
l'étude sans l'intervention des agents de crédit du site. Certes,
ce n'est ni le meilleur choix ni la manière optimale d'opérer
cette étude puisqu'on était contraint de travailler selon l'offre
déclinée par l'AMC du fait qu'il n'y a pas une autre alternative.
Toutefois une revue des questionnaires et des cibles à atteindre a
été rendue obligatoire du fait qu'un seul type de
bénéficiaires sera entretenu (clients actifs et parfois des
nouveaux).
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Présentation du terrain d'enquête
2. Echantillonnage
La Direction Succursale de Rabat Zemmour Zaïr tourne avec
27354230 prêts actifs pour un encours de 176 402
031,79231 Dhs, avec l'appui de 78 agents de crédit. C'est
grâce au soutien des agents de crédits des points de vente
visités que les entretiens ont pu être réalisés
levant ainsi la barrière psychologique auprès des clients. Afin
d'avoir une vue relativement représentative de la zone, 20 personnes ont
été interviewés à Sidi Yahia Zaer, 15 à
Skhairates, 16 à Temara, et enfin 12 Yacoub Elmansour.
L'échantillonnage a été fait de
façon aléatoire tout en privilégiant la rencontre des
bénéficiaires les plus anciens. A cet effet, 63
bénéficiaires ont été entretenus. Il aurait certes
pu être préférable d'un point de vue quantitatif de
rencontrer davantage de «clients» selon un plan de travail
préparé à l'avance mais les contraintes organisationnelles
et administratives reliées à la disponibilité des agents
de crédit d'Alamana ne l'ont pas permis. Toutefois, poursuivre les
entretiens ne semblait pas apporter plus de diversité. C'est pour cela
que l'on a privilégié une approche axée aussi sur les
aspects qualitatifs que quantitatifs. L'échantillon ainsi produit a
suffit, à notre sens, à l'analyse suivante.
Un questionnaire semi-directif enrichi, à partir de
quatre questionnaires préétablis, a été soumis aux
bénéficiaires actifs. Celui-ci comportait une série de
questions sous différents termes « aspects de satisfaction »,
« expériences vécues dans le programme », « ....
» et une série de questions ouvertes suscitant la
subjectivité des individus et leur permettant de s'exprimer pleinement.
Ces questions étaient enregistrées sous les libellés
« représentation et perceptions », « avis sur le
programme » et « suggestions »...etc.
Cependant, malgré les efforts faits pour amener
l'entretien en discussion informelle et ainsi réduire les biais induits
par la situation d'enquête, la distance
enquêté-enquêteur n'a pu être réduite
significativement. Notre arrivée était présentée
comme une étude universitaire indépendante d'Alamana mais
était pourtant perçue parfois comme une sorte de contrôle
et
230 Données relatif au mois de Juillet 2010
(Source : données communiquées par Alamana)
231 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
les enquêtés «semblaient» essayer de
produire les réponses que nous aurions pu attendre,
préparées à l'avance pour ce genre d'opération. En
revanche, l'accueil a toujours été chaleureux et nous n'avons pas
été confrontés à de réels refus. Les rares
cas enregistrés étaient motivés.
Point 2 : Présentation des
résultats232 de l'enquête
Analyse Quantitative :
Guidé par la volonté de comprendre ce qui peut
déterminer une situation de pauvreté des
bénéficiaires des cycles de crédits afin de pouvoir
proposer des services toujours mieux appropriés, on cherche à
dégager un ensemble de variables discriminantes du niveau
socio-économique des ménages. L'étude du questionnaire
suggère divers variables : secteur d'activité, niveau
d'instruction, fidélité aux cycles de crédits,... dont
nous allons vérifier la pertinence à travers cette
enquête.
1. Répartition par secteur
d'activité
Les activités menées par les
bénéficiaires sont relativement diversifiées mais peuvent
être appréhendées par les catégories suivantes : les
agriculteurs ayant comme activité principale la culture ou
l'élevage, les commerçants sédentaires et ambulants, les
façonniers et les prestataires de services qu'il s'agisse de
travailleurs journaliers avec ou sans métier. En constatant qu'une
partie des enquêtés tire partiellement leur revenu d'une autre
source : salaire, retraite ou aide familiale et par conséquent non
financé par le microcrédit.
Cette classification permet de savoir la distribution des
ménages selon leur secteur d'activité principal. On remarque
alors que 31 bénéficiaires sur un échantillon de 63, soit
49 % tirent leur revenu principal d'une activité agricole
pratiquée surtout par les femmes (1/2 des bénéficiaires
est constituée d'agriculteurs), 22 bénéficiaires, soit 35%
exercent une activité commerciale qui est pourtant l'activité qui
bénéficie majoritairement du financement par le
microcrédit souscrits par des femmes (1/3 des
bénéficiaires fait du commerce). Seuls 3 ménages parmi
l'ensemble de l'échantillon, soit 5 % exercent leur activité
principale dans le secteur des services.
232 Les résultats de cette enquête restent valables
seulement à cet échantillon et ne peuvent donc en aucun cas
être généralisés.
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Répartition des bénéficiaires par
secteur d'activité
Services 5%
Artisanat 11%
Agriculture 49%
Commerce 35%
Commerce Agriculture Artisanat Services
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Spécialisé Management du Développement Social 109
GRAPHIQUE :
On peut donc en conclure que l'agriculture et le commerce
représentent tous deux un complément important de revenu des
ménages sinon leur source principale. Les services et l'artisanat
procurent respectivement à 5 % et à 11 % des ménages leur
principal revenu. Il faut noter que parmi les ménages
enquêtés il y en a ceux qui complètent leur revenus par
d'autres sources telles que : rente, salaire, retraite ou aide familiale...
etc.
2. Répartition par zone géographique
:
L'enquête a été menée sur quatre
communes : Yacoub elmansour (YM), Temara, Skhirates et Sidi Yahia Zaer (SYZ).
Ces quatre zones se différencient par leur aspect urbain pour Yacoub
Elmansour et Temara Centre, et par leur aspect rural pour les deux autres
(Skhirate et Sidi Yahia Zaer). Il est à noter que si les
bénéficiaires habitant Yacoub Elmansour et Temara Centre
disposent des équipements et infrastructures indispensables, ce n'est
pas le cas pour ceux de la zone rurale. En effet, à l'exception des
habitations à proximité du centre de Skhirate et celles du
village de Sidi Yahia Zaer, les autres ne disposent pas encore des
infrastructures nécessaires de base.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
GRAPHIQUE :
Répartition des bénéficiaires par
zone géographique
Urbain Rural
Certaines de ces habitations plutôt dispersées
restent enclavées, loin des axes routiers, ce qui constitue un
réel handicap quant au développement de la zone. Il est clair
donc que plus de la moitie (56%) demeurent dans le rural.
3. Répartition des bénéficiaires par
situation matrimoniale
On constate que 41 bénéficiaires sur un
échantillon de 63, soit 81 % sont mariés; 6
bénéficiaires divorcés soit 9% ; 5
bénéficiaires Célibataires soit 8%. Seulement 1
bénéficiaire veuve parmi l'ensemble de l'échantillon, soit
2 %.
GRAPHIQUE :
Répartition des bénéfciaires par
sitatution matrimonale
Veuvage 1%
Célibat 8%
Mariage 81%
Divorce 10%
Célibat Mariage Divorce Veuvage
On relève donc que les mariés représentent
à eux seuls la majorité absolue parmi les
bénéficiaires du MC.
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4. Répartition des bénéficiaires
selon l'âge
L'âge moyen de l'étude s'élève
à 37,3 ans donnant ainsi une image d'une population jeune, active et
ambitieuse. On constate que 38 bénéficiaires sur un
échantillon de 63, soit 60 % âgés de moins de 40 ans, 22
bénéficiaires leur âge varient entre 40 et 50 ans soit 35%,
seuls 3 des bénéficiaires dépassent 50 ans.
GRAPHIQUE :
40 à 50 ans
35%
Répartition des bénéficiaires
par âge
Plus de 50 ans
5%
19%
41%
20 à 30 ans
30 à 40 ans
Donc on peut dire que les jeunes représentent la
majorité des bénéficiaires du MC.
5. Répartition par niveau
d'instruction
L'analyse montre que 49% des bénéficiaires
enquêtés sont analphabètes, 40 % des
bénéficiaires ayant un niveau primaire, 11 % un niveau secondaire
et aucun bénéficiaire n'a un niveau supérieur.
L'étude essaie de contribuer à vérifier
la relation qui pourra exister entre niveau d'instruction et niveau de vie du
bénéficiaire, observons également que plus une personne
est instruite, plus elle a tendance à améliorer les conditions de
sa vie en diversifiant ses sources de revenu.
Globalement, le niveau d'instruction ne semble pas impacter
positivement le niveau de revenu puisque l'on observe des cas de
bénéficiaires analphabètes percevant plus de revenus que
d'autres instruits.
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Spécialisé Management du Développement Social 112
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Répartition des bénéficiaires par
niveau d'instruction
Secondaire
11%
Supérieur
0%
Primaire
40%
Sans
49%
Sans Primaire Secondaire Supérieur
GRAPHIQUE :
De même, on remarque que les cas de grande pauvreté
se concentrent sur les bénéficiaires analphabètes dans des
proportions plus fortes en zone rurale qu'en urbain.
6. Répartition par niveau de revenu
mensuel
Le revenu mensuel moyen s'élève à 1452 DH
représentant ainsi une population relativement pauvre puisque son revenu
moyen est inférieur au SMIG233 (environ 2200 DH par mois). On
remarque que 25 bénéficiaires sur un échantillon de 63,
soit 40 % dont le revenu mensuel est inférieur à 1500 DH, 27
bénéficiaires dont le revenu varie entre 1500 et 2000 DH soit
43%, 8 bénéficiaires dont le revenu varie entre 2000 et 2500 DH
soit 13%, seuls 3 bénéficiaires dont le revenu dépasse
2500 DH.
233 Salaire Minimum Interprofessionnel de Garantie (avant la
revalorisation du 01/05/2011)
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
GRAPHIQUE :
Répartition des bénéficiaires par
niveau du revenu mensuel (en DH
Moins de 1500 1500 à 2000 2000 à 2500 Plus de
2500
1500 à 2000
43%
2000 à 2500
13%
Plus de 2500
4%
Moins de 1500
40%
Donc on peut dire que les faibles revenus représentent la
majorité des bénéficiaires du MC avec 83%.
7. Répartition par niveau de dépense
mensuelle
Le niveau moyen des dépenses ménagères par
mois s'élève à 1361 DH représentant ainsi un niveau
« bas » d'une population pauvre. On observe 32
bénéficiaires sur un échantillon de 63, soit 51 % dont le
niveau mensuel des dépenses du ménage reste inférieur
à 1500 DH, 16 bénéficiaires dont le niveau varie entre
1500 et 2000 DH soit 25%, 15 bénéficiaires dont leur
dépenses varient entre 2000 et 2500 DH soit 24%, et 4% dépensent
plus de 2500 DH par mois.
Répartition des bénéficiaires par
niveau de dépense mensuelle (en DH)
1500 à 2000
43%
Moins de 1500 1500 à 2000 2000 à 2500 Plus de
2500
2000 à 2500
13%
Plus de 2500
4%
Moins de 1500
40%
GRAPHIQUE :
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Spécialisé Management du Développement Social 114
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Donc on peut dire que le niveau des dépenses des
bénéficiaires (pouvoir d'achat) ainsi que celui de leur famille
est fortement au niveau de leur revenu régulier.
8. Répartition par nature de logement
occupé
L'enquête constate que 49% des bénéficiaires
enquêtés sont propriétaires de leur logement 31
bénéficiaires sur 63, toutefois 51% des
bénéficiaire restent non propriétaires de leur demeure.
Répartition des bénéficiaires
par nature de logment
Non propriétaire
51%
|
|
Propriétaire
49%
|
|
Propriétaire Non propriétaire
GRAPHIQUE :
Les 49% représentant la moitié des
propriétaires ne peut rien dire sur la qualité du logement :
équipements de base, raccordement aux réseaux d'eau,
d'électricité, d'assainissement ...
9. Répartition par nombre d'enfants à
charge
L'étude montre que le nombre moyen des enfants à
charge de l'échantillon s'élève à 2,26 enfants par
bénéficiaire.
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Répartition des bénéficiaires par
nombre d'enfants à charge
Sans
14%
Plus de 3
24%
1 à 3
62%
Sans 1 à 3 Plus de 3
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 115
GRAPHIQUE :
Les résultats détaillés donnent que 9 des
bénéficiaires enquêtés n'ont pas d'enfants à
charge et représentant 14%, 39 des bénéficiaires ayant
entre 1 et 3 enfants (62%), 15 bénéficiaires ayant un nombre
supérieur à 3 (24%).
10. Répartition par taille du
ménage
L'étude relève que le nombre moyen des personnes
à charge de l'échantillon s'élève à 4,15
personnes par ménage.
Les résultats détaillés donnent 11 des
bénéficiaires enquêtés ayant moins de 3 personnes
à charge et représentant 18%, 34 ayant entre 3 et 4 personnes
à charge (54%), 14 ménages ayant entre 5 et 6 personnes à
charge (22%), seuls 4 ménages ont un nombre supérieur à 7
(6%).
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Répartition des bénéficiaires par
taille du ménage
Plus de 7
6%
Moins de 3
18%
5 à 6
22%
3 à 4
54%
Moins de 3 3 à 4 5 à 6 Plus de 7
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Spécialisé Management du Développement Social 116
GRAPHIQUE :
La taille du ménage ne semble pas dégager
directement un meilleur revenu puisque l'on observe des cas où des
ménages de taille assument des conditions de vie difficiles et
perçoivent moins de revenus que d'autres dont la taille est
réduite. De même, on remarque l'existence de ménages de
taille relativement grande où un seul membre les prend en charge.
11. répartition par ancienneté au programme
microcrédit
En classant les bénéficiaires en fonction du
nombre de cycles de crédit éteints, on se fait une idée
sur le type de population attirée par ce service financier de
proximité et sur son évolution au fil des cycles ainsi que sur le
taux de pénétration de l'association Alamana.
Cette classification peut aussi fournir des
éléments d'information quant à l'évolution des
revenus moyens des ménages au fur et à mesure des
crédits.
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Spécialisé Management du Développement Social 117
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Répartition des bénéficiaires par
ancienneté au programme du MC
1 à 2 cycles
22%
Plus de 4 cycles
21%
2 à 3 cycles
57%
1 à 2 2 à 3 Plus de 4 cycles
GRAPHIQUE :
On procédera d'abord à l'analyse des
résultats globaux puis, à celle des résultats par zones
géographiques.
On constate que 22 % des bénéficiaires sont des
nouveaux destinataires du MC puisqu'ils viennent de contracter le premier
crédit, 78 % des bénéficiaires ont à leur actif
plus d'un crédit. Alors que les plus anciens représentent 21 %
avec 13 bénéficiaires ayant plus de 4 cycles de crédits.
On peut dire que le taux de fidélité des
bénéficiaires est assez élevé.
Résultats par zones géographiques:
En distinguant les résultats obtenus à Yacoub el
Mansour et à Temara centre de ceux recueillis dans les communes rurales
(Skhirates et Sidi Yaia Zaer), on ne peut qu'appuyer le constat fait quant au
taux de pénétration de l'institution.
En effet, si au centre 25 % des bénéficiaires
enquêtés ont au moins 4 cycles de crédit alors
que seulement 7% sont des nouveaux clients
La situation des campagnes est autre. Selon
l'échantillon dont nous disposons, seul 17 % des enquêtés
ont plus de 4 cycles à leur actif et 35 % sont des nouveaux clients.
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Spécialisé Management du Développement Social 118
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
12. Essai d'élaboration du
profil234 « type » des
enquêtés :
Le profil du bénéficiaire de microcrédit
servi par Alamana Microfinance est celui d'un jeune actif âgé en
moyenne de 37,3 ans, marié dans 51 des cas sur nombre global de 63, avec
un niveau de scolarisation n'excédant pas le niveau primaire dans 25 sur
63 des cas (31 sont analphabètes), s'activant dans l'agriculture et le
commerce dans 53 des cas (22 dans le commerce) et assurant un revenu mensuel
moyen de 1452 DHS provenant essentiellement de l'activité principale. Il
est propriétaire de son logement dans 31 des cas et vie dans un
ménage moyen composé de 4,15 personnes à charge dont en
moyenne 2,24 enfants et dépensant en moyenne 1361 DHS par mois
réservés entièrement aux dépenses alimentaires.
Analyse Qualitative :
A - Aspects de satisfaction :
1. Relation avec l'agent de crédit (AC)
:
La relation liant l'agent d'Alamana et ses clients peut
être qualifiée de bonne du fait que tous les
bénéficiaires confirment ceci en fait les AC prennent en compte
l'importance de cet aspect dans leurs objectifs et font en sorte que la
satisfaction de leurs clients passe en premier.
2. Procédures d'octroi des
prêts
Les procédures en vigueur pour l'octroi des prêts
MC restent un peu lourdes et lentes, d'une part le nombre et la
diversité des papiers à préparer restent importantes et
d'autre part la lenteur de la procédure oblige les clients à
former une file d'attente parfois importante.
D'ailleurs, la plupart des clients d'Alamana demandent la
simplification des procédures et leur assouplissement pour pouvoir
percevoir les prêts consentis en temps opportun, leur permettant ainsi de
réagir positivement envers leurs activités.
234 Le « profil » établi dans cet enquête
ne peut en aucun cas prétendre représenter le profil réel
des clients Alamana, c'est un simple et modeste essai de réalisation
d'un profil «approximatif».
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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3. Produits offerts
Les clients d'Alamana sont globalement satisfaits de l'offre
actuelle, toutefois les bénéficiaires de MC souhaitent que les
montants octroyés soient revus à la hausse, la durée de
remboursement l'est aussi tant que la périodicité des
échéances ne gêne pas beaucoup d'entre eux.
B - Expérience dans le programme
1. Difficulté de remboursement
Il est difficile d'admettre que les clients du MC ne se
préoccupent pas de l'acquittement de leurs engagements en matière
de crédit. Et ce, malgré les « bonnes »
déclarations qui peuvent induire en erreur et faire penser que
l'opération de remboursement ne souffre d'aucune difficulté. Et
c'est aux AC de s'exprimer sur l'importance d'effort déployés
contre les retards au niveau de chaque journée et les batailles
menées contre le temps pour l'encaissement du montant total du jour
selon un plan préétabli.
Ceci est à relativiser selon la qualité du
portefeuille des clients et selon aussi les points de vente. Au site du
Skhirates par exemple, il est pratiquement attendu - au moins pour certains
clients - que chaque jour les AC utilisent tous les moyens de contact et de
pression (téléphone, voisinage, se rendre sur les lieux,...) pour
éviter que les déboursements des clients soient inférieurs
aux rentrées prévues.
2. Retard de paiement
Les interviewés n'ayant jamais eu de retard, chose qui
est normale, puisque la règle stipule que tout client tombant
impayé doit être marqué au niveau de la centrale des
risques et est par conséquent reconnu, auprès des AMC, comme
n'ayant plus droit de recourir prochainement aux services du MC.
Ce qui est avancé par les clients du MC ne peut cacher
la réalité des impayés existants, le PAR (portefeuille
à risque) est un vrais dilemme pour les AMC alors qu'on n'a pas pu
écouter et sonder des clients en situation de retard ou
impayés.
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Spécialisé Management du Développement Social 120
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
3. Problèmes du groupe
Quant aux relations entre éléments du même
groupe, certains conflits dominent le groupe de temps à autre chose qui
risque de faire éclater le groupe et parfois être cause de sa
disparition. Dans la plupart des cas les causes des problèmes sont dues
à des difficultés de déboursement d'un membre, voire sa
défaillance.
C - Représentations, Perceptions et Avis sur le
programme :
Malgré le fait qu'il est difficile de cerner et
recenser l'ensemble des données qualitatives tirées des
destinataires du MC, il est clair qu'il est très tôt de parler
d'une convergence des interviewés vis-à-vis au moins des
appellations utilisées. Les données soulevées attestent
d'une certaine variabilité dans ce sens, liée essentiellement
à la nature de la zone, au langage et aux termes locaux utilisés
couramment par les gens.
1. Définitions du MC
On relève ainsi pour le concept de «
microcrédit » :
- « bab elfaraj dial darouiche » : «l'issue de
secours du pauvre»
- « fekkak louhail » : le «dépanneur»
des crises
- « moussa3ada dial houkouma lil masquin » : aide du
gouvernement au pauvre
D'après les définitions
précitées, il apparaît clairement que les perceptions des
enquêtés vont d'abord vers l'assistance économique et
monétaire des démunis. Ainsi, dans les discours recueillis, ce
sont les termes, traduisant (véhiculant) le secours économique et
l'aide monétaire, qui sont en premier lieu avancés.
2. Représentation de l'association Alamana par
ses « destinataires »
L'association de MC est représentée
différemment chez ses bénéficiaires, les appellations
restent variables chez les enquêtés d'où certains d'entre
eux la considérant comme une banque classique avançant ainsi le
crédit à intérêts, d'autres la distinguent par
l'afflux important des femmes, cependant d'autres la voient comme une maison de
bienfaisance du fait qu'elle leur assure du financement même non
gratuit.
Soulignons que le besoin de financement rend parfois les
nécessiteux indifférents devant les conditions leur permettant
l'accès. Chose qu'on trouve lorsque certains bénéficiaires
n'ont
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Spécialisé Management du Développement Social 121
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
le souci de connaître quoi que ce soit sur le
crédit du fait qu'ils pointent leurs doigts uniquement sur la chose
intéressante : à savoir l'obtention de crédits.
Pour représenter leur fournisseur de fonds, les
bénéficiaires avancent les éclaircissements suivants :
- « bhal elbank kay essalafnna belmourabaha » :
c'est comme la banque, il donne des crédits à
intérêts.
- « Jam3ia dial la3yalat » : association des
femmes235
- « ... 9ablat elmesquin waket elhazza... » :
destination des pauvres au mauvais temps
3. Prêt du groupe
Quant au prêt du groupe on relève les
déclarations suivantes :
- « salaf madmoun » : du crédit garanti
- « damana liljam3ia ila hrab chi wahed elmajou3a hia
edamen» : une garantie pour
l'AMC au cas où un membre du groupe tombe
impayé.
Certains bénéficiaires acceptent difficilement
le crédit solidaire (crédit de groupe) et souffrent aussi bien au
niveau de sa constitution que dans son cheminement jusqu'à la
dernière échéance, ils préfèrent le
crédit individuel du moment où la responsabilité est
limitée au montant prêté à l'encontre du prêt
de groupe où tous les membres restent solidaires et coresponsables du
montant global octroyé au groupe. C'est pourquoi ils optent davantage
pour l'individualisation des crédits.
4. Epargne
L'épargne est comme un luxe pour certains d'entre eux,
un « rêve difficile à réaliser » au moins
à court terme, pour d'autres elle constitue un dilemme, quand la bonne
partie des gens éprouvent beaucoup de difficultés juste pour
assurer le nécessaire sinon le minimum vital. Des discours
enregistrés on relève les dires suivants relatifs à la
perception de la question de l'épargne dans la vie des
enquêtés :
- « wailli tanta rak tahlem matkafina hatta m3a elma3icha
» : Epargner pour moi c'est presque rêver, la vie est dure.
235 Au début du lancement du MC, les AMC sont reconnues
localement par l'appellation d'« association des femmes ».
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
- « li jam3ato namla fi 3am, kay eddih ejmal fi hamstou
» : le peu qu'on arrive difficilement à mettre de côté
se volatilise devant n'importe quel événement familial. - «
S3ib takdar tajma3 koun 9dart nwafar matalkanich hna» : C'est très
difficile de pouvoir épargner, si j'avais pu je n'aurais pas
fréquenté ce lieu.
Les enquêtés sont presque tous d'accord sur
l'importance prioritaire de l'épargne dans leur vie, mais cet exercice
reste pénible pour eux, tant que l'équilibre est
dorénavant fragile entre ressources face aux charges de la vie, elles ne
leur permettent pas un plus dont ils peuvent exploiter en cas de crises
familiales ou de dépenses imprévues.
5. Expérience de participation
Quand à l'appréciation de leur expérience
de microcrédit, l'ensemble des bénéficiaires
s'accordent sur son utilité et ne nient nullement qu'elle
fût riche d'enseignements pour eux.
De leurs déclarations on relève :
- « tajriba maziana » : bonne expérience
- « naf3atna » : il nous est être utile
- « daouarna biha alharaka » : grâce au MC on a
pu faire marcher les choses
- « nakdatna » : ça nous a sauvés
- « koun madarnaha makayn fin namchiou » : sans
ça on ne sait pas où aller !
6. Destinataires profitables
La valeur ajoutée du MC reste à vérifier,
ici on constate une divergence d'avis entre les enquêtés. Le gain
attendu du prêt de microcrédit n'est pas spontané, il est
lié à plusieurs conditions tels que : montant alloué,
nature du projet, responsabilité de l'emprunteur, destination
réelle du crédit, .... Réaliser des profits par le biais
du MC n'est pas une chose facile à atteindre ; les
bénéficiaires pensent différemment cet aspect selon leurs
expériences personnelles :
- « Koun makan lakridi n'fa3 annass ga3 mai raj3o tani
» : le MC est utile, c'est pourquoi les gens y font appel
- « May khass khair » : le profit est réel
- « 3la hssab koul wahed, kayn li rbah ou kayn lima
rbahch bazzaf » : Ça dépend, il y a les gagnants du MC et il
y a les autres.
- « 3la hssab elouajbate inta ou razkak » : ceci
dépend des saisons et des opportunités.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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- « Ila khdamti bih kollo maziane rak rabeh 100% » :
le gain est réel si le prêt est utilisé en totalité
dans un bon projet
- « Ila chaditih fi lwaket dial khadma rak
matakhssarch» : si le MC est accordé au moment opportun et sans
retard, il ne peut qu'être rentable
- «Ana dima rabeh bihad lakridi li anni makanaklouch fi
karchi» : pour mon cas, le MC est toujours rentable tant que je ne le
consomme pas
- «Ba3ed elmarrat kanhass m'zayar ch'ouya» : parfois je
me sens en crise
- «Inta ou ssouk ya rabeh ya `lla» : ceci est
lié aux formalités du marché
7. Nature de la relation : Bénéficiaire et
Alamana MC
La relation bénéficiaire AMC est perçue
différemment : assumer son rôle social ou être acteur
économique reste encore une équation sans explication pour les
bénéficiaires/clients du MC. Certes, ils affirment avoir un
relationnel de qualité avec l'AMC mais devant la tendance actuelle de
transformation du rôle des AMC, peut-être qu'ils ne sont pas encore
au courant de cette convergence. On relève ainsi les
appréciations suivantes :
- « 3alaka m'ziana » : bonne relation
- « Fiha mounfi3a lina bazzaf » : il y a du
succès pour tout le monde
- « Kay t3aonou m'3ana ou ma kay khassrouch lina » :
elle nous aide beaucoup
- « H'nna rah ouallina kliane dialhoum » : nous sommes
devenus leurs clients fidèles
8. Impact du MC (sur le bénéficiaire ;
ménage ; ...)
L'impact du MC reste, selon beaucoup d'avis,
immatériel, les bénéficiaires éprouvent une
difficulté à chiffrer l'incidence en terme économique.
Ceci ne signifie pas qu'il n'y avait pas d'impact mais peut être
expliqué par le culturel des gens et leur niveau d'instruction quant au
calcul de ce dernier et sa liaison avec le MC. On relève ainsi les
déclarations suivantes :
- « 3andhoum elajr bazzaf fi hadchi li kay dirou m'3a
addarouihe » : c'est bien ce qu'ils
font avec les pauvres
- « Houma kay rabhou m'3ana ou tahna karabhou m'3ahoum
» : nous sommes tous gagnants
- « Rah bhal rahma dial ALLAH mchina l'banka tawahed
maddaha fina » : c'est une bénédiction d'Allah, avant on
s'est adressé à la banque sans résultat
- « M'3aounana 3la z'man » : il nous aide à
survivre
- « Chal man haja kana9diouha bilakridi » : beaucoup
de choses sont accomplies grâce au MC
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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- « Kat houl lina bazzaf dial almachakil » : il nous
permet de régler beaucoup de choses
9. Intérêts et frais de dossier
Les enquêtés perçoivent d'un oeil
différent le coût du microcrédit, des fois comme un plus
normal et des fois comme un fardeau qui leur est imposé par les AMC, on
relève les avis suivants :
- « ... M3andna mangoulou hna 9ablin » : le pouvoir du
plus fort s'applique, et on n'y peut rien
- « Makayench hal ghiro» : on n'a pas d'autres
alternatives
- « Kolla khedma 3andha tamanha mabkach elfabor lyoum»
: tout service doit être payé, il n'y a plus de gratuités
aujourd'hui.
- « lazem ikoun lihoum nassib ma3koul » : c'est normal
qu'ils prélèvent une contrepartie raisonnable
10. Destination du prêt
La destination des prêts du MC reste la «bête
noire» des chercheurs de l'impact ou de
l'incidence d'un tel dispositif sur la vie de ses utilisateurs.
Dans notre cas on a recensé les
dires suivants :
- « Ghaliban kanbi3 ou nachri bih » : globalement on
l'utilise dans le commerce
- « Chi marrat kanat9adda minou liddar walakin machi kolchi
» : parfois je l'utilise
partiellement dans le projet
- « Kolchi fi alhanout » : la totalité du
crédit est utilisé dans le projet
- « Khalaset bihoum wahed lakridi » : j'en ai
utilisé pour m'acquitter d'un autre crédit
- « Chrit bihoum doua loualida hit kant makhsouss » :
j'ai acheté avec des médicaments
pour ma mère.
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SYNTHESE DE L'ENQUETE :
Selon les résultats de l'enquête, on peut
conclure qu'il y a trois façons d'utiliser les microcrédits ayant
chacune des portées propres sur les bénéficiaires. En
fait, l'exploitation des crédits varie en fonction aussi bien du niveau
d'instruction, de la catégorie socio-économique que de
l'expérience de ses destinataires. Les crédits de
démarrage sont alloués pour initier un projet ou réaliser
une idée, alors que les crédits de financement restent
destinés à l'augmentation du fonds de roulement et les
crédits de développement visent l'augmentation de la taille du
projet. Leur exploitation par les bénéficiaires peut être
faite dans le commerce, ce type d'utilisation s'opère pour
développer une activité existante qui peut se traduire par
l'augmentation du troupeau, du stock de marchandises ou de matières
premières,... etc. Une autre forme d'utilisation est l'investissement
qui va permettre de démarrer ou développer une
activité.
Certains bénéficiaires avouent avoir
utilisé le microcrédit pour faire face aux frais
occasionnés par des événements familiaux. L'emploi initial
d'un crédit peut donc n'avoir aucune relation avec la source future du
remboursement.
Les bénéficiaires dans des situations
précaires auraient tendance à faire de leurs emprunts des
crédits de trésorerie que l'on pourrait assimiler à des
crédits de consommation. Ces derniers ne bénéficient pas
d'entrée d'argent régulière et doivent parfois faire face
à des dépenses imprévisibles nécessitant une sortie
importante d'argent. La prise de crédit leur garantit de disposer de
sommes d'argent et de pouvoir ainsi mieux supporter les périodes de
conjoncture difficile. Ces bénéficiaires en situation de
vulnérabilité sont les plus exposés aux aléas de la
vie. C'est pour cela que si les crédits ne leur permettent pas
forcément d'investir pour augmenter leurs revenus, ils leur assurent au
moins le maintien de leurs conditions de «pauvreté» et la
résistance à la misère qui les menace.
Même si la plupart des bénéficiaires
reconnaissent au moins avoir senti une petite amélioration de leur
condition de vie à la suite de leur souscription au système du
MC, les appréciations sont encore partagées selon la
catégorie socio-économique des bénéficiaires. De
manière générale on peut dire que les femmes affirment
plus que les hommes avoir
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perçu une amélioration de leurs conditions de
vie et que le niveau d'appréciation s'accentue en fonction de
l'âge des bénéficiaires et de leur niveau de revenu.
Le microcrédit en tant qu'instrument parmi d'autres de
lutte contre la pauvreté s'avère efficace auprès des
pauvres sur le long terme mais ne semble que rarement pouvoir sortir les
bénéficiaires de la grande pauvreté. Cet instrument a
cependant le mérite d'éviter à ces destinataires
d'être précipités vers la misère. Il a donc un
rôle de facilitateur dans des situations difficiles et
d'accélérateur dans un environnement favorable. En tant qu'outil
financier, il permet plus la concrétisation de projets qu'il ne provoque
leur émergence. Toutefois, il risque de jouer un rôle destructeur
des niveaux de vie de ses destinataires lorsqu'il se tourne contre eux en les
faisant emprisonner dans le cercle vicieux de l'endettement.
Si le microcrédit a fait la preuve de son impact
positif, au moins pour certains, sur l'activité et parfois au niveau de
la vie de ses bénéficiaires, il reste insuffisant et ne peut en
aucun cas régler à lui seul les problèmes
macro-économiques et structurels dont souffre le pays.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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RECOMMANDATIONS :
L'enquête propose un certain nombre de recommandations
en matière d'adaptation des prestations et services permettant
d'optimiser les avantages pour les clients du MC.
? Identifier les clients : dans les
programmes qui parviennent le mieux à atteindre leurs
cibles, les agents de crédit sont très
dynamiques : ils ou elles vont chercher les clients sur les marchés,
dans les quartiers, les rues et les zones d'habitation modestes.
? Viser la proximité et la flexibilité
des heures d'ouverture : les transactions de
services financiers destinés aux pauvres doivent
pouvoir avoir lieu près de leur domicile ou de leur travail et
être rapides. Les femmes ont tendance à avoir moins de temps libre
que les hommes et à être moins mobiles.
? Communiquer efficacement au sujet des services
financiers : dans la plupart des
pays, les canaux de communication des ruraux diffèrent
de ceux des urbains. Les ruraux ont souvent un niveau d'éducation
moindre et ont moins accès aux médias, notamment écrits.
Les visites des agents de crédit dans les lieux publics et de
rassemblement peuvent être très fructueuses. Toute sensibilisation
doit souligner l'importance des matériaux visuels permettant de
dépasser les barrières dues au faible niveau d'instruction et des
méthodes participatives de groupe.
? Réexaminer la procédure l'embauche
d'agents de crédit : le choix d'agents
hommes ou femmes pour les prêts dépend largement
des conditions locales. Il faut charger les femmes de cette fonction dans des
zones conservatrices. Cependant, dans les zones urbaines à forte
criminalité, il faut prendre en compte la sécurité des
femmes agents de crédit car elles doivent souvent rendre visite aux
emprunteurs.
? Réfléchir à des programmes
destinés aux hommes et aux femmes : certains
programmes ciblent encore spécifiquement les femmes
pour toute une série de raisons (volonté d'impact sur le
bien-être du foyer et des enfants, perception de la plus grande
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Spécialisé Management du Développement Social 128
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
responsabilité des femmes en tant que clientes,
inquiétude que dans des groupes mixtes les femmes ne soient
laissées à l'écart, etc.). Des programmes
spécifiques doivent être envisagés lorsque le contexte
culturel empêche les femmes d'accéder aux services mais lorsque la
culture le permet, l'objectif poursuivi doit être la parité
d'accès. Certaines organisations commencent par privilégier les
femmes puis élargissent leurs services aux hommes une fois qu'elles ont
réussi à établir une clientèle permanente de femmes
dans la communauté.
Dans les cas où les femmes ont plus de
possibilités que les hommes d'obtenir des microcrédits, on pense
que les femmes détournent souvent les prêts vers leurs maris. Bien
que cela ne soit pas forcément négatif si l'on considère
le ménage comme une unité économique, cela risque aussi
d'ajouter un poids sur les épaules des femmes si elles sont responsables
des remboursements sans avoir leur mot à dire sur l'utilisation ou la
gestion des fonds obtenus.
· Encourager la participation et mesurer la
satisfaction : les AMC, bailleurs de fonds et chercheurs ont mis au
point toute une série de méthodes pour obtenir l'avis des clients
sur les services existants, sur la conception d'un produit, sur leurs
préférences etc. Lorsqu'elles sont intégrées dans
les opérations quotidiennes, ces méthodes ont l'avantage d'avoir
un coût minimal pour l'IMF. On trouve beaucoup d'instruments formels
d'étude de marché, groupes de discussion thématique,
méthodes d'enquêtes. Lorsque ces recherches sont correctement
intégrées dans les processus de gestion, ces données
peuvent se révéler très précieuses pour identifier
les tendances dans la demande de la clientèle.
· Orienter le ciblage des
bénéficiaires : Se baser sur une vision claire pour
toucher les clients des services offerts (solvables, faibles
économiquement, pauvres, plus pauvres, ...).
· Viser des projets viables et rentables
· Encourager le financement des projets destinés
à la production
· Accompagner les bénéficiaires et suivre
l'utilisation des prêts
· Sensibiliser et former les clients sur les techniques
de gestion des projets
· Offrir des prêts adaptés en montants et
diversifier l'offre selon les besoins des bénéficiaires
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? Faire des enquêtes de satisfaction
? Revoir la politique des taux d'intérêt
? Trancher sur l'optique à suivre : commerciale ou
sociale
? Ajuster les procédures pour proposer des services
financiers adaptés aux pauvres
(montants faibles, procédures simples et délais
rapides)
? Améliorer l'effort d'identification du type de clients
dans une relation de prêt où la qualité de la relation
client/AMC est déterminante.
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Chapitre 2 : Les effets de l'adoption du
référentiel de marché (paradigme marchand)
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
INTRODUCTION
Ce chapitre aborde la nature de l'adoption de l'approche
commerciale par le secteur du MC et ses effets sur la vie des pauvres. Il passe
en revue les éléments de cette approche et examine la relation
entre la promotion du dispositif de MC et le système
néolibéral afin d'éclairer sa position à
l'égard des instances internationales (BM et FM).Pour traiter ensuite,
les dérives relevées dans la pratique du MC qui peuvent
constituer un début de convergence au niveau du secteur.
Chapitre 2 : Les effets de l'adoption du
référentiel de marché
Le terme microcrédit renvoie à l'offre de
prestations financières, comme il désigne aussi par extension un
secteur d'activité, c'est-à-dire l'ensemble des prestataires
dispensant ces services. Il a été conçue comme un «
outil au service du développement tout en restant ancrée dans le
secteur marchand, marquant une ambivalence qui brouille les distinctions
traditionnellement établies entre le politique et l'économique,
le public et le privé, le commercial et le
social»236.
Dans les années 1980, l'application des
PAS237 ordonnée par le FMI et traduite par une
réduction des budgets destinés aux secteurs sociaux, a eu des
effets négatifs sur le plan social, en particulier à
l'égard des pauvres qui ont été les premières
victimes à en payer le coût fort. Cependant, afin de lutter contre
la pauvreté, les politiques publiques des PED ont favorisé le
développement du MC destiné, essentiellement, aux femmes. En
effet, le secteur a connu une promotion aussi importante au point de voir les
banques commerciales jouer le rôle d'animateurs de la démarche
parrainée par les pouvoirs publics.
Certes, les banques ne sont pas des organismes de
bienfaisance, mais les riches ont la possibilité d'emprunter des
montants importants quoiqu'ils restent une minorité devant le nombre
important des pauvres. Il paraît donc plus rentable de consentir de
petits prêts à de nombreux pauvres. En plus, les études
réalisées sur les systèmes informels de financement
236 BEDECARRATS, Florent. « Evaluer la microfinance,
entre utilité sociale et performances financières », La
Découverte | Revue Française de Socio-Économie
2010/2 - n° 6 pp. 87-107, Url
http://www.cairn.info/revue-francaise-de-socio-economie
237 Le FMI et la Banque mondiale ont prescrit les PAS afin
d'imposer leur vision de développement (production, commerce et
consommation).
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ont démontré l'existence d'énormes sommes
d'argent circulant dans l'informel et qui échappent au contrôle du
système financier. Par conséquent, les banques ont observé
autrement ce filon avant de se lancer dans une politique de microendettement
taillée sur mesure pour les pauvres. Ainsi, comme l'explique Serge
Latouche : «les banques (...) cachent derrière leur bonne
volonté des intérêts peu avouables. En Afrique du Sud par
exemple, elles ont jeté un oeil avide sur les énormes masses
d'argent épargné sous forme de tontine. C'est pour elles un
potentiel appréciable de chiffre d'affaires qui (...) leur passe sous le
nez»238.
En fait, le nombre important des pauvres forme aussi un
marché potentiellement rentable, chose qui ouvre l'appétit des
banques. Et selon Med Yunus « en août 1996, il y avait au seul
Bangladesh, (...) 2.059.510 personnes (...) endettées auprès de
la Grameen Bank » pourvu que son ambition vise plus loin, en
déclarant : «nous nous sommes fixés un but pour l'an 2005 :
Si on peut aider cent millions de familles en leur prêtant de l'argent
par l'intermédiaire des femmes, (...) c'est la moitié des pauvres
(...). (...) si on réussit (...), il suffit de multiplier notre action
par deux pour toucher les autres»239, et ce dans le cadre du
système capital que défend Med Yunus puisqu'il considère
que « la mondialisation peut apporter plus de bénéfices aux
pauvres que n'importe quel système alternatif »240.
Toutefois, la vision excessive des vertus du
microcrédit repose sur le «mythe»241 du
«pauvre entrepreneur». Ce «mythe» s'est forgé
grâce à la difficulté d'évaluer l'apport réel
du microcrédit pour les populations concernées. Or, selon ce
mythe, il suffirait de doter les pauvres en capital pour développer leur
potentiel entrepreneurial. Mais, le challenge réside dans la grande
difficulté à se transformer en vrais entrepreneurs.
Partout dans le monde, la commercialisation du
microcrédit a connu une progression rapide, au point de décrire
cette évolution, pour certains, comme signe de maturité du
secteur caractérisée par une survente massive aux pauvres par des
entreprises commerciales. On peut constater que certaines AMC ont adopté
une approche commerciale plus rentable que
238 BISILLIAT, Jeanne et VERSCHUUR, Christine. « Genre et
économie: un premier éclairage », p.353
239 PEEMANS-POULLET. Hedwige, « La miniaturisation de
l'endettement des pays pauvres passe par les femmes », Revue
Féminismes et Développement, (Bruxelles), n°71-72,
février-mai 2000, p. 60-66 (extraits. Cahiers Genre et
Développement)
240 YUNUS Muhammad & WEBER Karl. (2008). Vers un nouveau
capitalisme, Editions JC Lattès 2008, p. 28
241 FOUILLET Cyril et al. , op. cit.
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Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
les banques commerciales traditionnelles. Alors, une fois que
ces institutions de microcrédit ont commencé à
gérer leur activité sur une base commerciale, leur environnement
a été progressivement marqué par la concurrence.
M. Yunus pense que l'Etat , sous sa forme actuelle, «
devrait se désengager presque intégralement (à l'exception
de la défense nationale et de la politique étrangère) pour
laisser le secteur privé (...) - animé par un souci de bien
être social- jouer son rôle242 » et défend
l'idée que « les pauvres ont tout intérêt à
voir s'ouvrir d'important marchés243 » tout en assurant
que la libre circulation des marchandises, des capitaux et des personnes
engendrera des bénéfices à tous et pas seulement aux
pauvres.
Depuis plusieurs années, le microcrédit fait
l'objet d'une attention particulière de la part de la communauté
internationale, puisque dès 1997 le Sommet mondial de Washington sur le
MC a fixé comme objectif de permettre à 100 millions de personnes
d'y accéder. Par contre, le marché tourne parfois à
l'envers notamment en temps de crise, dans ce cas « les investissements
étrangers se font rares et que le niveau des échanges commerciaux
est au plus bas, que le microcrédit s'avère décisif pour
libérer des moyens favorisant l'entreprenariat
local244». Or, si on croit Hedwige Peemans-Poullet « le
projet de lutte contre la «paupérisation» en endettant tous
les pauvres (...) (en leur donnant accès au crédit) fait l'objet
d'une promotion sans précédent » 245 de la sorte que «
l'endettement se diffuse progressivement aux classes moyennes et aux couches
populaires dans les années 19501960, en particulier par le biais du
crédit revolving (crédit renouvelable)246 ».
C'est donc cette présumée «révolution
financière», qui a « placé la dette au coeur du
capitalisme américain,... »247 dont la principale
barrière quant à sa diffusion n'était pas d'ordre
institutionnel à ces temps-là puisque l'action d'emprunter
suscitait une forme de « désapprobation morale », et la
personne endettée était regardée comme « un
être irresponsable, incapable de réprimer ses besoins et de bien
gérer ses finances248», bien que l'esprit
d'épargne n'avait pas encore été écarté dans
l'échelle des valeurs du capitalisme. Et ce dans le cadre d'un
système financier considérant la petite somme prêtée
assez
242 YUNUS Mohammed, « Vers un monde sans pauvreté
». op. cit. p.321.
243 Idem.
244 ABANDA, Ambroise. op. cit.
245 PEEMANS-POULLET, Hedwige. « La miniaturisation de
l'endettement des pays pauvres passe par les femmes », op.
cit.
246 DELALANDE. Nicolas, op. cit.
247 Idem.
248 Ibid.
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rentable devant la présence d'une demande importante ;
et comme « il y a beaucoup plus de pauvres que de riches, on peut aussi
bien faire fortune avec les petits pauvres qu'avec les gros
riches249».
Section 1 : Le MC et les nouveaux paradigmes de
développement
Beaucoup de chercheurs estiment que le MC ne doit pas
être conçu comme un phénomène purement local, mais
il doit « s'inscrire dans le processus général de
mondialisation », reconnu comme un « levier de développement
», cependant, il ne représente « qu'un élément
important qui doit rentrer en synergie avec d'autres facteurs pour obtenir des
changements durables et significatifs250 ».
§ 1 : dilution de la mission sociale du MC dans le
référentiel du marché
Depuis son apparition dans les années 1970, le MC a
évolué pour devenir une véritable industrie au niveau
mondiale, composée d'une grande ramification d'organisations fournissant
des services financiers aux pauvres entrepreneurs. Cette industrie a
donné naissance au terme de « commercialisation », un nouveau
paradigme251 par lequel les institutions de microfinance (IMF) se
doivent d'assurer la pérennité de leurs activités de
façon indépendante des subventions et de gérer leur
fonctionnement selon une approche commerciale, de façon à ce que
les services délivrés puissent être assurés sur le
long terme. Par ailleurs, la commercialisation s'est accompagnée d'une
évolution du financement du MC à deux niveaux252 et
par : le niveau de la dynamique de l'investissement international et celui des
institutions avec l'évolution de leurs structures de financement vers le
modèle des banques traditionnelles.
En 1997, à Washington et au moment de son premier
sommet médiatisant l'efficacité de son action contre la
pauvreté, le MC était assimilée à un tournant
historique pour l'humanité. Toutefois, les célébrations
faites au MC sont aussi fastes au point qu'il peut paraître
249 Hedwige Peemans-Pollet_Défis du Sud. op.
cit.
250 SERVET J.M., DOLIGEZ François, GUERIN Isabelle &
GENTIL Dominique (Sciences au Sud- le journal
de l'IRD - mars/avril 2004).
251 URGEGHE, Ludovic. «Commercialisation et financement de
la microfinance : quels enjeux de gouvernance ?
», Reflets et perspectives de la vie
économique, 2009/3 Tome XLVIII, pp. 39-50. Url
http://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique
252 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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intolérable sinon « interdit » d'interroger
les limites de ce mouvement qualifié d'une sorte de «
révolution de la finance ».
Pour J.M. Servet, « trop de mythes continuent de circuler
autour de la nature, l'impact et les effets du microcrédit
»253, et pour lui ceux qui diffusent les prêts qui
mènent « régulièrement à un surendettement des
emprunteurs » 254 doivent être dénoncés. Aussi, le
microcrédit est fortement accusé de servir le
néo-libéralisme et de renforcer les inégalités et
les hiérarchies sociales.
Tant ses défenseurs que ses opposants se trompent de
cible, bien qu'il ne doit pas être considéré comme
instrument unique de lutte contre la pauvreté et les
inégalités à partir du moment où il ne peut
qu'être un simple « service » auquel les pauvres devraient
avoir droit.
Parmi les limites255 de cette forme d'intervention
financière on trouve la faible implantation dans le rural, pendant que
le milieu urbain fait l'objet d'une intense concurrence entre AMC.
Actuellement, le microcrédit tend vers la domination de
l'approche commerciale, et dans de nombreux pays s'est d'ailleurs
développé un véritable marché dédié
à ce genre de prestation. Kamala Marius Gnanou parle de l'inexistence
d'une réponse claire et définitive quant au rôle
joué par cet outil dans le processus de mondialisation, tout en
révélant que ses effets sont multiples et peuvent renforcer des
évolutions allant dans le sens de la mondialisation avec des
répercussions parfois tragiques256, comme c'est le cas
d'incitation de personnes vulnérables économiquement à
l'endettement.
Bien que le microcrédit soit promu d'une manière
faisant croire que les plus pauvres et les plus vulnérables peuvent
devenir entrepreneures et créateurs de leur emploi, favorisant ainsi le
processus de mondialisation. Celui-ci peut devenir un filet de
sécurité retardant « l'explosion » sociale mais sans
être une réelle issue de secours durable à l'égard
de la
253 FOUILLET, Cyril et al. , op. cit.
254 Idem.
255 SERVET, Jean Michel. (2006). Banquiers aux pieds
nus, La Microfinance. Editions Odile Jacob, Paris
256 MARIUS-GNANOU, Kamala. « Mondialisation,
activités économiques et nouveaux rapports de genre »,
UMR Ades-CNRS, Université de Bordeaux, version auteure, Acte du Colloque
« Genre en mouvement, Conflits, Négociations, Recompositions
», 30 sept-2 oct. 2009
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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pauvreté. Ainsi, le microcrédit participe au
mouvement de mondialisation en devenant une «forme de
subsidiarité» de l'action publique dont l'efficacité est
à revoir en profondeur.
Point 1 : Le MC, une facette du « micro
» capitalisme
1. Le microcrédit comme instrument
néolibéral
Selon les travaux de Georg Simmel et de Karl Polanyi la
monnaie est bien plus qu'une marchandise permettant simplement de faciliter la
réalisation de l'échange marchand257. Son rôle
sociétal est souvent considéré comme une survivance des
sociétés traditionnelles bien qu'il soit, en fait, un
élément fort des sociétés modernes. En effet,
parallèlement au développement de la concurrence marchande, il
s'étend aux différentes sphères de la vie sociale. C'est
dans cette perspective que s'est investi le courant du MC pour lequel une
simple vue du processus de son mouvement l'incarne plus comme « une
nouvelle extension de l'esprit capitaliste. Celui-ci s'incarne dans les
objectifs de lutte contre la pauvreté du fait de leur logique
néolibéral258 ». Or, le microcrédit a pris
son essor dans les années 1980 comme il a connu une diffusion rapide et
une reconnaissance internationale comme il a suscité de grands espoirs
en tant que voie permettant aux pauvres de se prendre en charge. Il constitue
un élément concurrentiel essentiel et traduit, selon l'expression
d'un des plus hauts responsables de la Banque mondiale, la «vibration du
marché259» dans les aires les plus pauvres.
L'une « des multiples manifestations de la
financiarisation » qui s'est étendue et intensifiée au cours
du dernier quart du 20ème siècle sous la pression des
idéologies néolibérales qui « faisaient de la finance
et de la monnaie un vecteur essentiel parce qu'en apparence
neutre»260 et ce afin d'assurer la dominance et le
contrôle du marché mondial.
Sa pratique s'accompagne parfois de règles très
strictes, d'un protocole minutieux et apparait comme l'un des aspects d'une
nouvelle « fabrique de l'habitus économique» (selon Bourdieu),
le MC participe à ce processus et on observe d'ailleurs la mise en place
et
257 GLOUKOVIEZOFF, Georges. op. cit.
258 SERVET, Jean Michel. (2006). Banquiers aux pieds
nus. Editions Odile Jacob _ Paris, 511 pages.
259 GENTIL Dominique & SERVET Jean-Michel. « Entre
« localisme» et mondialisation : la microfinance
comme révélateur et comme levier de changements
socio-économiques ». Tiers-Monde. 2002, tome 43
n°172. pp. 737-760. Url_
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers
260 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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l'application d'une véritable doctrine de la discipline
financière qui vise la maîtrise de l'argent qui circule entre les
mains des pauvres.
L'orientation commerciale des organisations de
microcrédit provoque des divisions entre réseaux de
microcrédit et ceux de l'économie solidaire. Or il semble que peu
de gens se soucient réellement du sort des destinataires du MC puisque
le système néolibéral est le seul qui donne à
penser que l'imputation des coûts aux bénéficiaires de
certains services présente la meilleure solution. Et pourtant, les
subventions restent une nécessité, notamment dans les domaines
sociaux et sont indispensables dans un contexte marqué par une
financiarisation croissante. Le soutien public permettrait uniquement au MC de
se développer auprès de clientèles peu ou non rentables et
d'assurer la coordination des différents acteurs, en vue d'une offre
équilibrée et adaptée.
Le succès du MC repose sur la discipline aussi bien au
sein de la clientèle que des institutions du MC. D'un autre
côté Brigg Morgan261 montre, dans ses études sur
la Grameen Bank, comment une telle discipline se transforme en véritable
rituel lorsqu'en particulier l'agent de crédit arrive hebdomadairement
devant le groupe rassemblé pour lui remettre le remboursement du
prêt en cours, les membres du groupe se lèvent, le saluent et
récitent le slogan de la Grameen : « Discipline, Unité,
Courage, Travail dur ».
Contrairement au système bancaire qui impose certains
pratiques formelles permettant aux banquiers d'évaluer la
solvabilité des clients tout en leur exigeant des garanties, Mohammed
Yunus évoque que les clients du MC doivent uniquement « faire
preuve de leur pauvreté262», pour pouvoir en
bénéficier et être, ainsi, exonérés de
justificatifs et de garanties.
Malgré les critiques qu'on a pu retenir à propos
du MC, il est clair que bon nombre de ses bénéficiaires, qui
enclenchent le cercle de l'investissement, est relativement significatif. Les
autres, qui l'utilisent comme moyen de lissage des besoins de
trésorerie, demeurent dépendants d'un service financier
permanent. Ce constat peut cependant être interprété de
deux manières. La première, selon le point de de vue «
capitaliste » véhiculé par les AMC et l'aide internationale
dont la vision est aussi libérale et individualiste, en ce qui touche au
développement économique. En outre, la main invisible du
marché régule l'ensemble des
261 MORGAN Brigg 2006: 79-80
262 YUNUS, Mohammed. Vers un monde sans pauvreté. op.
cit.
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activités de production d'individus pour lesquels le
sens de l'évolution de cette production est caractérisé
par une diminution des coûts assortie d'une amélioration des
performances matérielles de la société. La deuxième
analyse d'un point de vue plus anthropologique, vise à permettre aux
gens de se soulager de la souffrance, de jouir des biens de consommation
voulus, de progresser socialement et d'être indépendant,
l'activité productive devient incontournable. Ici, les coups durs de la
vie sont absorbés «matériellement», soit par des
assurances individuelles ou par des systèmes de protection sociale
collective mis en place. Quoique la dynamique d'ensemble des modèles de
développement est basée sur l'accumulation individuelle où
le crédit, dans sa conception occidentale, est considéré
comme accélérateur d'évolution.
Le MC conçu comme modèle économique est
devenu credo pour des notables comme Hillary Clinton, qui est touchée
par " la capacité de ces prêts à permettre aux femmes les
plus pauvres de débuter une activité et de sortir ainsi leurs
familles et leurs villages de la pauvreté" ou Paul Wolfowitz,
ex-président de la BM, qui évoque l'ingénieux "pouvoir de
transformation" dont dispose le MC. Alors que Mohammed Yunus le
considère en tant que mobilisateur du «social business» qui
est décrit comme « une entreprise qui ne réalise pas de
perte et ne distribue pas de dividendes» 263. Or cette vision
ressemble bien à celle d'une association ou ONG à but lucratif du
fait qu'il reste « (...) différent, fonctionnant
conformément aux principes de gestion qui concourt dans une entreprise
classique » 264 et ajoute que ce genre de business « vise à
couvrir au moins l'ensemble de ses coûts, même s'il crée des
biens et des services procurant des avantages sociaux »265 au
point de « (...) porter le combat pour l'élimination de la
pauvreté à un niveau supérieur » 266.
Point 2 : Le MC, n'est -il pas un «
piège » pour les pauvres (face à l'épargne) ?
Pour Hedwige Peemans-Pollet l'idée de départ du
capitalisme a toujours été de « convertir l'argent qui
circule sans intérêt en argent qui circule avec des
intérêts et de ramener tout ça dans le secteur de la
banque267 ». Toutefois, le microcrédit met en
évidence l'imbrication du social et de l'économique et plusieurs
fois se trouve en situation de puiser dans le référentiel social
comme le remarque Michel Lelart, surtout en Afrique, « l'acte
d'épargne n'est pas
263 YUNUS, Mohamed. Vers un Nouveau Capitalisme. op. cit.
p.55
264 Idem.
265 Ibid.
266 Ibid.
267 PEEMANS-POLLET, Hedwige. op. cit.
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posé dans le temps mais dans
l'espace»268. Ceci, alors que l'individu ne cherche pas la
garantie de son avenir tout seul en plaçant discrètement son
argent pour en disposer demain. II « privilégie ses relations
sociales, il s'enracine dans un groupe »269, en trouvant
auprès des autres membres de la société la
sécurité dont il a besoin. C'est l'investissement social qui fait
la différence, puisque «l'épargne n'est pas une attitude
face au temps qui passe »270, mais plutôt, une position
au sein du milieu social. Solidarité, assistance, aide, appui,... ce
sont là des valeurs sociales où sont puisées et
satisfaites diverses carences sociales.
En fait, les associations informelles de types
tontinières agissent par des regroupements volontaires d'individus
proches qui s'élisent et se donnent comme obligation de livrer, à
échéance régulière, une somme fixe, au collectif
qu'ils forment. A tour de rôle, les membres utilisent le total des
dépôts et doivent le restituer à l'issue de la
période. Ces sommes constituent simultanément une épargne
collective disponible et un prêt, dont chacun peut profiter à son
tour. Le fait de déposer régulièrement une faible somme
d'argent constitue une incitation à économiser, donc une
manière de se forcer à ne pas vivre au jour le jour, et de se
constituer une réserve. Ces pratiques soutiennent l'apprentissage
collectif, les membres se connaissant, se font confiance, s'entraident mais
simultanément n'hésitent pas à faire pression sur ceux qui
seraient tentés de manquer à leurs engagements.
1. Les tontines africaines, expérience regroupant
épargne et crédit
On peut constater que le problème ne concerne pas la
formation de l'épargne puisqu'il existe déjà dans la
plupart des pays en voie de développement et certains parlent même
«des gisements d'épargne»271 mobilisés par
les tontines. Ainsi la difficulté serait de mobiliser cette
épargne et de la faire servir au financement de l'économie et de
l'investissement productif. Il y a non seulement ces sommes
considérables qui échappent au système bancaire formel
mais aussi le défi des systèmes traditionnels d'entraide
économique qui se basent sur des règles de mutualisation en
dehors de la question d'intérêts. En fait, ces
268 LELART, Michel. (1990). Les circuits parallèles de
financement : état de la question », L'Entrepreneuriat en
Afrique francophone. Paris, Aupelf-Uref, 1990, p. 52.
269 Idem.
270 Ibid.
271 PEEMANS-POLLET, Hedwige. « La miniaturisation de
l'endettement des pays pauvres passe par les femmes », op.
cit.
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tontines présentent une forme originelle
d'épargne et de crédit où chaque membre « accepte de
prêter et d'emprunter à la fois »272.
Eric Toussain273 dévoile une autre facette
du microcrédit en la soumettant à un examen minutieux, tout en
révélant qu'au-delà du droit des femmes à
s'endetter, le microcrédit représente une façon de
«récupération (par les circuits du Nord) de l'épargne
des femmes», et «dévoile» la mainmise exercée par
la Banque mondiale et des banques privées sur les envois des migrants
vers leurs familles.
Toutefois, Hedwige Peemans-Poullet a fait le rapprochement
entre systèmes traditionnels du Sud (tontines, etc.) et ceux de
protection sociale européens construits sur des modèles
mutualistes274. En réalité, ces systèmes
traditionnels présentent l'avantage d'être conduits par leurs
bénéficiaires dans la mesure où « l'effort
d'épargne se situe davantage au coeur d'une relation de chacun avec les
autres que d'une relation isolée de chacun dans le temps. (...) Il
s'agit d'un mode de développement (...) contrôlé par les
intéressés et concernant les intéressés
»275.
Source : L'image dans son contexte sur la
page www.dossierde-surendettement.blogspot.com/
272 LELART Michel et LESPES. J.L. Revue de l'Economie Sociale
n°5, juillet-septembre 1985, pp. 157-159
273 TOUSSAIN, Eric.. La Finance contre les peuples.
pp.239-240
274 PEEMANS-POULLET Hedwige « La miniaturisation de
l'endettement des pays pauvres passe par les femmes », op.
cit.
275 LELART Michel et LESPES J.L. cité par Elisabeth
Hoffmann et Kamala Marius -Gnanou
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§ 2 : Le MC « face cachée » d'une
politique de micro-endettement des pauvres
Dans les années 1980, les politiques d'ajustement
structurel ont provoqué un important désengagement de l'Etat, et
par conséquent le vide ainsi crée a permis de promouvoir les
solutions « individualistes » annonçant ainsi la fin de
l'ère des institutions publiques (de l'Etat Providence) assurant une
responsabilité sociale auprès des citoyens. En effet, ceci a
encouragé l'individualisme clamant haut le recours « à
l'endettement pour réduire la pauvreté et améliorer
l'empowerment des femmes276 ».
En fait, les effets de la crise éco-financière
ont partout amplifié la teneur et l'espace de la pauvreté et les
expériences initiées par l'action du MC ont, de plus en plus,
connu du succès. Une telle réussite requiert certaines conditions
comme le cas d'une société diversifiée
économiquement en plus de l'existence d'un réel pouvoir
d'achat.
Au sud, la coutume veut que la femme verse le prêt
à son mari tout en garantissant la responsabilité du
remboursement. Dans ce cas, le remboursement peut devenir aléatoire. Le
règlement intégral des prêts par les femmes n'exprime pas
les difficultés qu'elles supportent pour l'honorer. Or, cet instrument
est accusé de vouloir s'adresser aux femmes en fonction de leur
capacité de soumission, et de ce fait il engendre le risque de conduire
les emprunteuses ou leurs familles dans une situation d'endettement
perpétuel. Ceci se trouve renforcé particulièrement au
moment où les AMC adoptent des stratégies autorisant d'octroyer
un nouveau crédit aux clients en difficultés pour rembourser un
premier emprunt. Et ainsi faire rentrer les femmes dans le cercle vicieux
d'endettement qui se trouve confirmé par des travaux sur le terrain dans
la mesure où « sur quelques rares marchés, notamment ceux
pour lesquels de nombreuses institutions de microfinance desservent les
mêmes groupes de population, certaines des réponses à
l'enquête expriment une inquiétude au sujet d'un excès de
l'offre de crédit et du surendettement277».
276 PEEMANS-POLLET, Hedwige. op. cit.
277 « Microfinance Peaux de banane 2011 ».
Enquête du CSFI, CITI & CGAP sur les risques de la microfinance :
« La fin du conte de fée». Publié par CSFI. N°99
Février 2011.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 142
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Point 1 : Le MC, un cercle « vicieux
» de `l'addiction' à l'endettement (lorsque le MC sert juste
à générer du crédit)
L'objectif « non affiché » des organisations
Internationales genre FMI et BM est de faciliter la transposition de
l'endettement des pays pauvres, chose qui ne peut être possible
qu'à travers le passage « de l'endettement des Etats à
l'endettement de la population278 » : ce qui fait, selon
Hedwige Peemans-Poullet, que « ces populations sont forcés au
silence et à la résignation et obligées de survivre dans
l'endettement ». Par conséquent, une telle
«démarche» peut parfois amener les concernés aux
conditions de servitude à cause d'une dette qui « peut être
comprise comme l'état d'un débiteur dans l'obligation de
travailler pour un créancier gratuitement ou contre une très
faible rémunération (...) du fait d'une dette qu'il a
contracté auprès de lui279». Le crédit
renouvelable masqué par la technique de rééchelonnement
est une pratique courante des prêteurs privés informels qui
recherchent un versement régulier dés intérêts et un
remboursement du capital prêté. Une telle pratique existe aussi
dans le secteur du MC à quoi bon nombre d'AMC recoure en cas de
problèmes dans le remboursement.
Du côté des adeptes du MC, Maria Novak
défend un «libéralisme à visage humain» dans
lequel « le développement du MC peut et doit jouer un rôle
important 280» dans cette humanisation présumée,
le capitalisme « permet une croissance rapide au prix d`une destruction du
lien social 281» avant d'avancer que l'accès au
crédit de tous les acteurs économiques « favorise la
réussite personnelle, mais aussi l'égalité des chances et
la préservation du capital social282 ». En effet, ceci
ne profite pas à tous les membres de la société mais
seulement à une minorité.
En outre, permettre à un pauvre, qui n'a pas
accès au crédit, de pouvoir réaliser son projet par le
crédit, lui permet d'enchaîner sur un autre en cas de
réussite, ceci devient une mission noble comme elle peut être une
action portant des risques. Lorsque l'objectif est de permettre à la
personne d'augmenter son niveau de vie le premier prêt, vise
l'augmentation des revenus générés et permet à la
famille d'améliorer relativement sa nutrition en quantité
278 PEEMANS-POLLET, Hedwige. op. cit.
279 SERVET, Jean Michel. Banquiers aux pieds nus. op. cit.
p. 176
280 NOVAK, Maria. « On ne prête (pas) qu'aux
riches : la révolution du microcrédit », op.
cit. , p.82
281 Idem.
282 Ibid.
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Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
et en qualité. Dans la même démarche, le
deuxième améliore l'habillement, le troisième c'est pour
gagner de quoi scolariser les enfants, le quatrième c'est pour mieux se
soigner et les suivants pour renforcer l'activité économique ou
en créer une nouvelle.
Cependant, une partie du crédit octroyé est
généralement utilisée, par les clients du MC, à des
dépenses improductives (biens de consommation, dépenses de
scolarité des enfants, dépenses de type social...). Cette partie
reste variable et peut dans certains cas atteindre la moitié du montant
attribué ; c'est ainsi que l'emprunteur n'utilise que partiellement le
prêt et que son projet doit avoir une rentabilité suffisante pour
rembourser capital et intérêts. Mais il n'y arrive que si son
activité est largement rentable. En effet, la situation
économique du client n'évolue pas dans le temps, elle peut se
détériorer et au moins rester stable ; et l'on est en droit de se
demander quelle aurait été la situation économique de ce
microentrepreneur sans le MC, meilleure, identique,... ou pire ! Toujours
est-il utile de faire un arrêt et de se demander : lorsque le
crédit est terminé, l'emprunteur n'aura pas-t-il besoin d'un
nouveau crédit ? et ainsi devient dépendant du crédit tout
en bataillant pour le rembourser. Dans un tel contexte, le crédit ne
contribue pas au phénomène d'accumulation économique, non
plus à la constitution d'une épargne, c'est ainsi qu'on parle du
crédit au service d'un nouveau crédit ou encore de
«l'addiction» à l'endettement.
Affirmer que le risque pour les prêteurs est faible, vu
que les taux de remboursement affichés sont élevés, ne
peut que viser à minimiser l'importance du recours au
rééchelonnement des prêts. On observe, par contre, une
« forte dépendance des clients des organisations de
microcrédit283 » dont bien peu d'entre eux arrivent
à se libérer. Certainement, une utilisation
répétée du MC ne prouve pas que le service soit
intéressant. Alors que le recours répété au
crédit par certains emprunteurs peut être source d'endettement
excessif. Nombre d'études réalisées par l'IFD de
Pondichéry montrent que « le MC produit le surendettement dans 15%
des cas, profite à 15% des destinataires et ne change rien à la
situation des autres 70%284 ».
Bien que la prolifération des institutions de
microcrédit cache le risque que l'offre de MC atteint un seuil de
saturation comme c'est le cas de plusieurs pays (Amérique latine)
où les
283 SERVET, Jean Michel. LeTemps du 08/12/2006.
284 SERVET, Jean Michel. Magazine Finance - 2006
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programmes reconnaissent se faire concurrence pour les
mêmes clients, parmi lesquels beaucoup détiennent des
crédits de plusieurs institutions à la fois. La concurrence
accrue et la saturation potentielle du marché soulèvent
d'importantes questions sur la nature de la demande et le potentiel d'impact
dans un environnement compétitif. Au Maroc et à partir de la fin
de 2009 on remarque « une concurrence forte entre
organisations285 » du secteur qui comptait douze associations
actives, « parmi lesquelles quatre (...) couvraient 90 % de la
clientèle286 ».
1. Commercialisation et concurrence
Commercialisation et concurrence vont souvent de pair et l'une
entraînant l'autre. En fait, la reconnaissance progressive de
l'utilité du MC a incité les autorités publiques à
développer des programmes du genre et à encourager le secteur
bancaire à s'y investir. La concurrence a ainsi conduit à
l'accroissement de la pénétration du marché et
progressivement à sa saturation.
Dans de nombreux pays, les institutions de MC se font une rude
concurrence pour servir un groupe cible commun. En Bolivie par exemple, la
concurrence est devenue tellement acharnée que les pratiques de
certaines IMF ont conduit à la dégradation de la qualité
du portefeuille de tous les acteurs présents sur le marché.
Au Maroc, les données recueillies sur
l'utilisation des services financiers montrent qu'une proportion importante de
clients (25%287) du MC a emprunté auprès d'une autre
AMC alors même qu'ils recevaient un crédit de l'association
considérée comme principale. Lorsqu'on prend en compte le nombre
d'associations par site, la proportion de l'endettement croisé varie
significativement. En effet, lorsque trois associations sont sur un même
site, le taux d'endettement croisé est de 32%288 alors qu'il
est de 23%289 lorsqu'une association seulement est présente.
Par ailleurs, une autre étude a montré que « par milieu de
résidence,
285 SERVET, Jean Michel. « L'inclusion financière au
Maroc par la Microfinance : une responsabilité sociale
sous tensions». Compte-rendu de mission au Maroc du 19 au 29
juin 2010 / Projet IRD / UMR n°201. 286Idem.
287 « Evaluation de l'impact du microcrédit au
Maroc (2005) ». op. cit.
288 Idem.
289 Ibid.
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l'endettement croisé est présent dans l'urbain et
le rural avec des proportions respectives de
63%290 et 37%291».
De plus dans la récente enquête sectorielle du
fonds Jaida sur la question on relève que « le taux d'endettement
croisé est estimé à 26% » enregistrant une baisse
significative après l'opération d'assainissement que connut le
secteur depuis 2008. Selon la même enquête se sont les femmes qui
sont les plus concernées par ce phénomène dans 70% des
cas. Aussi, il ressort de l'enquête terrain que « 50% des
bénéficiaires interrogés croisent le prêt solidaire,
27% croisent l'individuel et le solidaire contre 23% seulement qui croisent
l'individuel292. »
Pourtant, la concurrence exacerbée entre les
associations (AMC) engendre « des effets pervers. La course à la
première place débouche sur l'octroi de microcrédits pour
des projets insuffisamment étudiés, sur la diminution du suivi
sur le terrain, et, pire encore, aboutit à des crédits
croisés293 ». Or cette dérive dite de
l'endettement croisé porte en elle, pour Noureddine Ayouch
prédisent de l'ex-Fondation Zakoura MC « les germes d'une crise
pouvant mettre en danger l'ensemble du secteur. La première
conséquence logique en est le surendettement des
bénéficiaires et son corollaire l'augmentation dangereuse des
impayés294 ».
Point 2 : Le MC, une cause de surendettement des
pauvres
290 « Etude d'impact des programmes de
microcrédit au Maroc (2009) ». op. cit.
291 « Etude d'impact des programmes de
microcrédit au Maroc (2009) ». op. cit.
Le surendettement est un phénomène courant,
fréquemment causé par l'accumulation de crédits ; ainsi ce
phénomène « s'amplifie depuis l'apparition du
microcrédit, surtout depuis que celui-ci est utilisé à la
consommation295». En effet, il est considéré
comme « véritable » fléau social, « le
surendettement participe au processus d'exclusion sociale »296
même s'il n'est pas obligatoirement lié à la
pauvreté, ces deux vont souvent de pair du fait que l'un entraîne
souvent l'autre.
292 « Enquête sectorielle réalisée
par le fonds JAÏDA ». Janvier 2011.
293 AYOUCH, Noureddine. (2008). Zakoura récit d'un
défi. Editions Tarik. p.86.
294 Idem. p.87
295 « Tout savoir du microcrédit ».
Enquête réalisée par KADIRI Ghalia et BOUCHAIB Sarah
Publiée dans Magazine Stop Arnaques. Septembre 2010.
296 « Avis et rapports du conseil économique et
social république française ». Année 2007.
p.104-210.
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Le surendettement des personnes ou des ménages est
inscrit comme l'impossibilité de rembourser en totalité et au
moment voulu toutes ses dettes. Il ne survient que lorsque cette situation se
présente de manière chronique, c'est-à-dire dans le cadre
de plusieurs périodes consécutives, et contre la volonté
des emprunteurs. Toutefois, c'est la prévention du surendettement qui
demeure l'axe majeur sur lequel la mobilisation doit s'effectuer. Celle-ci peut
s'inscrire dans une réglementation plus protectrice mais aussi dans le
renforcement, par les AMC, des bonnes pratiques envers leur
clientèle.
Certes, l'accès durable au crédit peut
être un élément déterminant motivant le
remboursement. Mais là aussi, plusieurs cas montrent que les
ménages peuvent rentrer dans le cercle vicieux de l'endettement. Il
serait innocent de penser que tout «bon» emprunteur est raisonnable
et en mesure de gérer correctement son niveau d'endettement. Et puis, on
peut toujours emprunter ailleurs pour rembourser un crédit.
Par ailleurs certaines analyses soulèvent des questions
touchant au secteur du microcrédit où l'on observe des «
difficultés de remboursement liés à un surendettement des
clients » 297. Des ménages contractent plusieurs crédits
à la fois et ne sont ensuite pas en mesure de les rembourser tous en
même temps, en raison d'une utilisation non raisonnée des
crédits, et des problèmes de rentabilité des
activités où les clients ont parfois souscrit des crédits
trop importants qu'ils n'arrivent pas à débourser et par
conséquent peuvent devenir à terme
«surendettés».
Les causes potentielles du surendettement pour le MC peuvent
être résumées ainsi : les sources informelles de
financement et de prêts à la consommation qui sont largement
dispersées que des points de crédit ne soient pas en place ou ne
fonctionnent pas correctement et que certaines AMC suivent la voie d'une
croissance combative ou proposent une offre inadéquate par rapport
à la demande réelle.
1. Surendettement ou chemin vers la pauvreté
Résultat d'un processus progressif conscient, rarement
voulu et fortement lié à des évènements
extérieurs à l'emprunteur, le surendettement dépend du
niveau de vulnérabilité
297 VAN EECHOUT, Laetitia. « L'effet de l'endettement des
ménages sur la croissance fait débat ». LeMonde Economie
du 22 févier 2000.
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des ménages et des capitaux qu'ils ont pu accumuler.
Souvent, ils sont d'abord fragilisés par des dépenses bien
supérieures à leurs ressources et pour lesquelles ils prennent
des emprunts qu'ils espèrent pouvoir gérer. Cet endettement
amène le capital économique à être
dégradé et le capital social à s'affaiblir. Lorsque
survient un imprévu pouvant alourdir la dette, l'endettement devient
alors incontrôlable et les ménages tombent dans le surendettement.
Pour prévenir et traiter le surendettement, il faut donc identifier les
familles vulnérables, sécuriser leurs capitaux, leur proposer des
crédits adaptés à leurs besoins et à leurs
capacités tout en en leur offrant des filets de sécurité
pour les protéger des risques (formations, assurances, épargne,
rachat de dettes,...).
Il se peut que de nombreux clients du MC soient
captivés dans un cyclone d'endettement qui les oblige à
contracter de nouveaux prêts pour rembourser des anciens ? Lorsqu'un
nombre important de clients s'endettent au-delà de leur capacité,
il est possible qu'une partie d'entre eux finissent par être
défaillants298 et que le taux de recouvrement du
créancier s'écroule. « Faute d'accroître de
façon sensible les revenus des plus pauvres, le microcrédit peut
conduire à leur surendettement et créer alors plus de drames
(...) parmi les plus démunis. En Inde, par exemple, le pays a connu au
début de l'année 2006 une vague de suicides de clientes
surendettées, en partie, à cause de la microfinance et
harcelées par des agents de crédit peu scrupuleux »
299. C'est ainsi qu'en Andhra Pradesh, lors des
évènements de 2006, le MC a été pointé du
doigt comme ayant participé au processus d'endettement des pauvres.
Néanmoins, les suicides ne sont qu'un résultat de tout un
processus qualifié « d'appauvrissement par
l'endettement300 ». Or, le surendettement n'est pas lié
exclusivement à des aléas climatiques et au marché, il
touche bien des ruraux et des urbains. Les études de l'IFP (Institut
français de Pondichéry) « ont montré qu'il existait
aussi des cas fréquents de surendettement chez des populations urbaines
et salariées »301.
Le microcrédit né d'une véritable
volonté d'aider les plus pauvres à s'en sortir et à
retrouver un semblant de vie honorable, est tombé dans les mains de la
finance et du capitalisme où les prêteurs ne pensent qu'à
l'argent et aux intérêts. Au moins, il faut s'interroger sur les
outils de vérification de la capacité de remboursement des
bénéficiaires, la viabilité de leurs
298 HÉLIÈS, Ophélie. BIM n° 13. Janvier
2007,
299 FOUILLET Cyril et al. , « Le microcrédit
au péril du néolibéralisme et de marchands d'illusions.
Manifeste pour une inclusion financière socialement responsable »,
op. cit.
300 BIM 25-04-2006
301 SERVET, J.M., « Conflits autour du crédit
». Article résumé d'une étude faite en
1991/92 pour l'INSTRAW
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projets et les encourager à épargner pour
survivre dans un état de pauvreté. Il est donc important de
rester fidèle à la conception de départ et de mieux cibler
les personnes susceptibles de bénéficier du microcrédit
pour qu'il demeure un outil d'émancipation sociale et
économique.
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Conclusion de la section :
Ce "magnifique" outil qu'est le microcrédit
s'accompagne parfois d'un encadrement contraignant censé éduquer
les pauvres aux avantages de l'accumulation pour soi. « S'il est
«pauvre» c'est parce qu'il est incapable de se gérer d'une
manière qui lui permette de participer au progrès de son pays et
de contribuer à la croissance économique, il faut donc
l'éduquer et l'initier à l'individualisme rationnel, responsable
et rentable»302. Pire, encore lorsque le MC se sert des valeurs
sociales à l'instar de la solidarité collective comme instrument
d'accès au crédit de groupe, et utilise la confiance
réciproque comme garantie pour l'entrée dans la
«sphère d'accumulation» au sens de Karl Polanyi, dans le cas
du MC « le lien social est inversé pour être fonctionnel au
marché, alors que c'est le premier qui devrait être
encastré dans le second »303. Il faut savoir que les
agriculteurs n'ont pas attendu Med Yunus (créateur de la Grameen) pour
mobiliser leur épargne sous des formes mutualistes (exemple des
tontines). Sauf qu'avant la célébrité du
microcrédit, le marché restait fonctionnel au lien social et le
cadre collectif empêchait que ces instruments de financement ne servent
à l'accumulation privée au bénéfice d'une
minorité de microentrepreneurs. Le microcrédit encourage les plus
ambitieux et les plus dynamiques parmi les pauvres à quitter le monde
des réseaux d'obligations réciproques garantissant la
sécurisation collective de tous depuis des siècles. «
À terme cette évolution ne peut qu'évidemment induire de
nouvelles contradictions entre acteurs du bas" et ainsi affaiblir leur
capacité de résistance. Ce détournement ne peut que casser
la solidarité du groupe qui fait sa force et aboutir à une
polarisation entre une minorité de microentrepreneurs transformés
en acteurs `'performants» du marché, et une majorité de
dépendants dont le revenu dépendra de l'accès à
l'emploi dans les entreprises des premiers. Les relations sociales se seront
profondément transformées dans un sens que beaucoup
d'intervenants extérieurs considèrent comme normal et
souhaitable, mais qui ne correspond pas au sens actuel des pratiques
observées des populations 304».
302PEEMANS-POULLET, Hedwige. Le développement
des peuples, face à la modernisation du monde. , p.455
303 BIM 25-04-2006
304 Idem.
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Section 2 : Les pratiques des AMC, des dérives
quant à la finalité originelle du MC
"Je suis inquiet. Certaines personnes ont pris une
mauvaise direction et ont franchi la ligne jaune, en prêtant n'importe
comment, avec souvent des objectifs assez éloignés de
leur
mission"305 Muhammad Yunus "Dans certains cas,
le microcrédit est devenu une sorte de crédit à la
consommation servant
à financer les achats courants des
ménages"306 Muhammad Yunus
Le microcrédit est certainement une technique
financière «nouvelle» succédant à d'autres
moyens utilisés au fil des siècles par la population
démunie pour survivre, créer son propre emploi et vivre dans des
conditions meilleures. L'une des raisons principales de son succès tient
à l'existence d'un accompagnement dans le processus de création
de la microentreprise. Comme dans tout crédit, la confiance est
primordiale lorsque l'accompagnement permet de la renforcer encore. De plus, le
challenge du MC est de pouvoir conduire le client à retrouver le statut
d'emprunteur ordinaire auprès du secteur bancaire. Donc, il est
appelé à se traduire par une sortie d'un dispositif
essentiellement temporaire, faute de quoi tout échec peut
entraîner une souffrance accrue des individus et une marginalisation plus
rapide. Après la création de la microentreprise, l'accompagnement
représente une clé de la réussite du microentrepreneur.
Or, que ce soit avant ou après l'étape de la création, il
semble qu'il y a insuffisance à ce niveau: c'est pourquoi les AMC sont
appelées à déployer plus d'effort.
La proclamation de 2005 «Année Internationale du
Microcrédit» par l'ONU a appelé à
l'internationalisation de cette pratique bancaire. De plus, la remise du prix
Nobel de la paix conjointement à la Grameen Bank et son créateur,
l'année suivante, a parachevé la réhabilitation du
microcrédit auprès du grand public. Toutefois, certaines
dérives, se rapportant soit au plan social soit au plan commercial, et
qui, constatées au niveau de la pratique du MC, ont
déclenchés un long débat.
305 YUNUS. Mohamed, « Vers un nouveau capitalisme »,
Op.cit.
306 Idem
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§ 1 : Dérives « sociales », de la
lutte contre la pauvreté à l'inclusion financière
Les dérives du microcrédit : Entre confusion
sur la mission et convergence au niveau du rôle
Le succès du microcrédit dans le monde n'est pas
édifié sans poser problème. Pour les agents de
crédit (AC) chargés de vérifier l'utilisation des
prêts octroyés, la tâche est devenue lourde, vu l'importance
du volume de leur portefeuille qui atteint parfois plus de 500 clients par AC.
Or, il semble très difficile d'affirmer que les prêts sont
toujours utilisés pour des raisons de développement
économique et social. D'ailleurs, il a été
révélé par différentes enquêtes que nombreux
clients du MC, contractaient de nouveaux prêts pour rembourser les
premiers ou encore pour faire face à des dépenses
exceptionnelles.
Par conséquent l'une des ambiguïtés de la
situation actuelle du MC tient à ce que le rôle des acteurs du
secteur est particulièrement confus du fait qu'il est instable et
fragile.
Confusion entre lutte contre la pauvreté et
l'inclusion financière
La principale confusion est entretenue par la plupart des
acteurs entre lutte contre la pauvreté et inclusion financière.
Les AMC ont une responsabilité dans la seconde mission du fait de leurs
activités mêmes et du risque d'accroissement de l'exclusion
financière qu'elles engendrent. Elles doivent agir de telle sorte que
leur action n'ait pas pour effet secondaire, en dotant les uns, de
détériorer les conditions de vie et de survie des autres. En
revanche, si les institutions financières ont une responsabilité
en matière d'inclusion financière, elles n'ont pas de
responsabilité plus forte que les autres institutions de la
société en matière de lutte contre les exclusions, en
général et contre la pauvreté, en particulier.
L'objectif premier est de lutter contre l'exclusion tout en
permettant aux populations économiquement fragilisées
d'accéder aux services financiers de base. Ainsi, deux postulats
permettent d'assurer la forte valeur sociale ajoutée du MC. Tout
d'abord, celui-ci doit être envisagé comme un moyen et non comme
une fin en soi. Bien que son efficacité ne soit plus à
démontrer, le microcrédit n'a pas vocation à se substituer
aux autres outils de lutte contre
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la pauvreté ou contre l'exclusion, mais doit intervenir
en complémentarité des différents dispositifs existants.
Ensuite, le MC doit financer des projets productifs, qui participent à
la réinsertion sociale et professionnelle des
bénéficiaires et permettent de créer des richesses. Dans
le cadre des créations d'entreprise, il est ainsi extrêmement
important de s'assurer que le microcrédit finance des projets viables
économiquement et que ceux-ci permettent effectivement une
amélioration du niveau de vie de leurs porteurs.
En outre, «dans les pays en développement, la
partie de la population qui n'a pas accès à des services
financiers est beaucoup plus vaste que la population dite
pauvre''307, déclare JM Servet et il l'explique en ces termes
« pour le comprendre, imaginons une pyramide. À sa base se trouvent
les populations qui sont en permanence en dessous du fameux seuil de
pauvreté. Contrairement à nombre d'idées reçues, le
microcrédit s'adresse exceptionnellement à cette clientèle
et, quand il le fait, les risques de surendettement sont
considérables''308. Et qu'au-dessus se trouvent des
populations vulnérables qui se retrouvent périodiquement en
situation de pauvreté ; elles ne le sont pas de façon permanente
et connaissent une situation de plus ou moins forte précarité.
Pour elles, il importe plus d'en avoir d'autres services comme l'épargne
et l'assurance.
En privilégiant des clientèles qui sont en
réalité au-dessus de la ligne de pauvreté et sans que
soient apportés des services de base, coûteux pour les finances
publiques, aux populations les plus démunies, le microcrédit
risque fort d'accroître plus les inégalités et ne peut pas
non plus prétendre être une forme de solidarité.
Point 1 : de la solidarité collective
à la responsabilité individuelle
En 2000 la Grameen Bank a été confrontée
à un accroissement considérable du nombre de prêts non
remboursés et qu'elle a dû abandonner le modèle du
prêt solidaire au profit de prêts individuels. Par
conséquent, les effets de la concurrence se font principalement sentir
dans la conception des produits de prêt, évoluant dans le sens
d'une adéquation optimale aux besoins de la clientèle.
307Hulme et Mosley. (1996). Gentil et Servet. (2002)
308Idem.
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Sur les marchés de MC les plus concurrentiels on
observe une évolution marquée au cours des dernières
années du crédit de groupe vers le crédit individuel, une
approche qui reflète la préférence des clients pour les
produits de prêt individuels par rapport aux produits de groupe dans la
mesure où les principaux prestataires commerciaux qui entrent sur le
marché favorisent le recours aux techniques du crédit
individuel.
Enfin, le prêt individuel est de plus en plus
utilisé par les AMC, soit en tant qu'alternative au crédit de
groupe ou en tant qu'outil de financement des microentrepreneurs. De
façon plus générale, le microcrédit individuel est
de plus en plus l'instrument de financement privilégié dans les
économies en transition.
Les résultats d'une étude309 d'impact
montrent qu'entre 50 et 60% des clients veulent régler les
crédits mensuellement, en 12 termes et un système de garantie
solidaire, chose qui montre l'existence d'une demande importante pour les
produits individuels (40 à 50%).
Selon un rapport établi sur l'environnement de la
microfinance au Maroc, en 2005 «le prêt de groupe dominait, mais un
grand nombre des associations de microcrédit ont évolué
relativement rapidement vers les produits de prêt individuels
»310, entre-temps les choses ont évolué de la
sorte qu'en 2009 la part des prêts individuels dans le portefeuille
global s'est stabilisée à 40%311. Alors que, selon la
mission de Michel Servet sur le secteur au Maroc réalisé en 2010,
le MC continue son évolution vers l'individualisation des prêts
avec une diminution des crédits de groupes au profit des prêts
individuels car « la part des premiers est tombée de 86 % des
dossiers actifs en 2007 à 60 % en 2009 pour l'ensemble du secteur. Comme
la clientèle des prêts de groupe était surtout
féminine, la part des femmes est tombée de 68 % en 2005 à
48 % en 2008. Chez Al-Amana, entre 2008 et 2009, le nombre de prêts
solidaires a chuté de 336 000 à 169 000, alors que les
prêts dits « à l'entreprise » (prêts individuels)
ont presque doublé en passant de 95 000 à 183 000
»312.
309 « Evaluation de l'impact du microcrédit au
Maroc (2005) », op. cit.
310 REILLE Xavier et LYMAN Timothy. « L'environnement
juridique et réglementaire de la Microfinance au Maroc », op.
cit.
311 Rapport Bank Al Maghreb. Exercice 2009. op. cit.
312 SERVET, Jean-Michel. « L'inclusion financière
au ... », op. cit.
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Point 2 : Du ciblage des plus pauvres à
la prestation des économiquement faibles
M.NOVAK dévisage le MC et démarque ses deux
faces, la première est celle de « la justice sociale se traduisant
par la sélection de la population-cible »313
constituée des personnes aux revenus faibles alors que la seconde est
relative à « la viabilité de l'institution de MC » 314
garantissant juste la pérennité de l'offre de ces services aux
démunis. Or, « une bonne solvabilité est susceptible
d'intéresser les investisseurs et bailleurs de fonds et dénote
une capacité à mobiliser des fonds propres via un financement
externe. »315. Quoique les pauvres situés tout en bas de
l'échelle économique sont fréquemment soient exclus de la
microfinance, ou écartés d'eux-mêmes puisque
généralement « leurs revenus sont trop faibles et trop
aléatoires pour permettre le remboursement de prêts ou tout
investissement au delà de la satisfaction de leurs besoins alimentaires
essentiels » 316.
Contrairement à l'idée très
répandue, le microcrédit ne s'adresse pas aux populations les
plus défavorisées, c'est-à-dire celles ayant des revenus
inférieurs au seuil de pauvreté absolue. Cette catégorie
représente un coût et un risque supplémentaire que ne
peuvent supporter les AMC. Il faut déjà avoir un bagage minimum
à proposer au bailleur de fonds.
En effet, ce dernier se soucie plus de la viabilité
financière du projet, ce qui constitue un obstacle entraînant un
abandon spontané, une manière « d'autoexclusion » de la
part d'une frange importante de la population pauvre. Ainsi l'offre du MC
convient mieux aux personnes proches du seuil de pauvreté ou l'ayant
dépassé. Parmi elles, une autre différenciation existe,
d'une part les entrepreneurs mobilisent les ressources pour créer ou
étendre leur activité dans le secteur informel ou non
structuré. Dans les zones rurales, ce sont généralement
des paysans ou des personnes possédant une activité agricole,
tandis qu'en milieu urbain, les artisans, les petits commerçants et les
prestataires de services sont les principaux clients. D'autre part, les purs
gestionnaires utilisent l'argent comme un fonds de roulement de l'unité
domestique de façon à faire la soudure entre les périodes
de besoin et celles de perception des revenus. En tout cas, les AMC destinent
leurs services en priorité
313 NOVAK, Maria. On ne prête (pas) qu'aux riches. op.
cit. p.91
314 NOVAK, Maria. On ne prête (pas) qu'aux riches. op.
cit.
315 ATTALI, Jacques. Voyage au coeur d'une révolution.
op. cit. p.153
316 « Créer des mécanismes de sortie de la
pauvreté pour les plus démunis ». Note du
CGAP/Décembre 2009.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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aux individus disposant d'un minimum de connaissances et de
responsabilisation, mais qui sont désavantagés dans
l'accès au crédit.
Le fonctionnement du microcrédit : de la
solidarité au réalisme économique
Le microcrédit n'est pas un acte de charité, non
plus une forme d'assistance aux pauvres, mais un outil sensé produire de
la valeur et permettre à l'emprunteur de dégager un revenu
minimum pour vivre et s'insérer dans la vie active. C'est une
opportunité de se prendre en charge en sortant de la pauvreté par
ses propres efforts. Pour Med Yunus « le microcrédit
c'est aider chaque personne à atteindre son meilleur potentiel. Il
n'évoque pas le capital monétaire mais le capital humain. [C'est]
un outil qui libère les rêves des hommes et aide même le
plus pauvre (...) à parvenir à la dignité, au respect et
à donner un sens à sa vie »317.
Le microcrédit se distingue pourtant des instruments
financiers classiques à plus d'un titre. La caution et la garantie sont
remplacées par la constitution d'un groupe solidaire dont les membres
s'engagent à s'entraider pour effectuer le remboursement. Dans cette
optique, l'utilisation du prêt est régulièrement suivie par
les créanciers et peut éventuellement s'accompagner d'une aide
à la gestion pour les bénéficiaires.
En d'autres termes, toutes les nécessités du
développement ne relèvent pas du crédit seulement. Le
crédit suppose ne pas être dans la misère totale ou dans
une précarité empêchant d'envisager l'avenir à moyen
terme. C'est peut être une erreur de présenter le MC comme une
réponse à la pauvreté dans le monde ce n'est en fait qu'un
outil parmi d'autres, qui peut être adapté à certaines
situations mais pas à toutes. En situation d'urgence, où le
fonctionnement économique est déstructuré, pour
reconstruire il faut de l'aide suffisante au rétablissement des choses
à la place du crédit.
L'idée de proposer un crédit à des
populations pauvres peut porter le risque d'être destructrice : il
paraît plus normal d'accorder de l'aide au lieu d'endetter ce qui ne peut
qu'empirer davantage la situation. Mais le crédit est plus respectueux
de la personne qui est en face quand elle est en situation de pouvoir
rembourser.
317 YUNUS, Muhammad. Vers un monde sans pauvreté. op.
cit. p. 399.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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Partout, le microcrédit et l'exclusion
financière sont devenus des préoccupations sociétales
courantes. Toutefois, « le génie du microcrédit en terme
socio-économique suppose que les populations bénéficiaires
soient «clairement» dévoilées afin que les
degrés de nécessité observés trouvent une
réponse leur convenant en fonction du statut des personnes
accompagnées »318 , ce qui reste c'est juste de savoir
comment éliminer les obstacles à l'identification des familles
les plus pauvres.
Si les programmes de MC veulent remplir l'objectif de lutte
contre la pauvreté, il est nécessaire d'adopter une approche
différente et orientée volontairement en matière de
ciblage des bénéficiaires, sans quoi il serait difficile de
toucher la clientèle cible. Cette approche de ciblage
particulière risque de poser le problème de la durabilité
sociale de l'institution du MC dans la mesure où il chasse une partie
non négligeable de la population. Le ciblage de la population pauvre
pose en plus le problème, non encore réglé, de
l'identification des plus pauvres parmi les pauvres, du fait que la perception
de la pauvreté est relative selon les sociétés, la
position sociale et le chemin à parcourir. Généralement,
avec ou sans ciblage administré « les programmes de
microcrédit touchent une catégorie de population qui n'est pas
les plus pauvres parmi les pauvres ». Ils touchent une population, certes
pauvre, mais qui est insérée dans la vie économique et
dispose de ressources suffisantes pour exercer une activité
économique.
Les bénéfices du microcrédit : du capital
économique au capital humain
En tant qu' « espoir », pour ceux qui souffrent de
difficultés d'accès aux produits bancaires classiques ou de leur
usage, le microcrédit s'impose comme un des moyens déterminants
dans les politiques de lutte contre la pauvreté : le crédit
permet d'investir dans une activité lucrative afin d'en tirer des
profits suffisants pour compenser les charges liées au remboursement et
emprunter à nouveau de manière à se développer. Il
est l'un des outils majeurs d'une finance de proximité qui tend à
valoriser le capital humain et local autant que le capital financier et global,
réconciliant ainsi principes économiques et valeurs
éthiques. Ainsi, le microcrédit peut jouer rôle de
créateur d'emplois et de revenus : il « profite » au client,
mais aussi à son foyer, son quartier et son environnement.
318 GLEMAIN, Pascal. « La crise accentue
l'intérêt pour le microcrédit ». LeMonde du
06/02/2009
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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§ 2 : Dérives « commerciales » :
Point 1 : de l'autonomie des
bénéficiaires à la viabilisation des AMC
Si le microcrédit joue raisonnablement donc plus le
rôle de béquille que de tremplin il ne peut pas être
dressé en remède miracle pour les démunis. Or agir
auprès des familles pauvres ne signifie pas s'engager dans une mission
sociale, notamment lorsque celui-ci peut être rentable et devenir
même viable financièrement.
Les objectifs de rentabilité financière et
d'efficacité institutionnelle représentent des conditions
fondamentales pour la garantie de la pérennité de l'institution
du MC et ce tout en servant une clientèle parmi les plus pauvres. La
promotion du MC vient pour satisfaire un besoin dans le cadre d'une demande
évincée par le système financier classique. Cependant
lorsque l'on scrute ce qui est derrière cette demande, on trouve
nécessairement que des ménages pauvres. Or, compte tenu des
moyens limités, il faut faire un choix, qui reste difficile à
déjouer car objectifs financiers et sociaux ne sont pas toujours
compatibles.
Dans une situation où les clients ont rarement la
parole, il paraît que la pratique du MC dans le monde peut être
caractérisée par un va-et-vient entre le financier et
l'éthique et parfois un mélange hybride des deux. Mais la
tendance actuelle reste souvent dictée par des soucis d'ordre
matériel et des intérêts des promoteurs.
Confusion sur le statut des acteurs
Une autre confusion porte sur le statut des acteurs. Certains
viennent d'organisations privées à but non lucratif, d'autres du
secteur public ou de coopérations internationales appliquant des
programmes administrés, d'autres, enfin, de la finance à but
lucratif. Ces différents acteurs peuvent agir de concert et en
complémentarité ou par subsidiarité. Le fait d'avoir tel
ou tel statut et de le mettre en avant, par exemple d'être «
à but non lucratif », ne garantit pas que les pratiques puissent
être qualifiées de solidaires. De même qu'avoir un statut
commercial est tout à fait compatible avec la captation de subventions
publiques et d'aides privées.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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Transformer les AMC en « banques» ou
sociétés de financement spécialisées
Force est de constater aujourd'hui une dérive «
commerciale » visant à transformer les organisations de MC en
« banques des pauvres » ou sociétés de financement
spécialisées, à plaider pour leur refinancement sur les
marchés financiers et même pour le déplafonnement des taux
d'intérêt. Cette position peut être irréaliste si on
veut l'appliquer à tous les modèles de MC, mais, plus encore,
elle peut se révéler risquée quant au devenir du
secteur.
Régulièrement, il est entendu dire que la
pérennisation et la commercialisation du microcrédit poussent les
institutions à se positionner sur un segment de marché «
haut de gamme » que celui où elles se situeraient naturellement.
Autrement dit, les institutions de MC proposent à leurs clients des
crédits plus élevés. A première vue, il semble que
l'approche commerciale du MC peut laisser les pauvres sur le bord du chemin, ce
qui conforterait l'argument selon lequel la déviation par rapport
à la mission initiale est une conséquence inévitable de la
viabilisation commerciale.
Comme les IMF ont « démontré la
viabilité à terme des opérations de microprêt, les
banques commerciales ont transformé le modèle en un secteur
d'activité majeur. Entre 2004 et 2008, ces établissements ont
connu une croissance annuelle moyenne de leurs actifs de 39 % et ont ainsi
accumulé plus de 60 milliards de dollars d'actifs. En 2008, la
majorité des capitaux étrangers provenaient d'investisseurs
privés s'intéressant au double aspect de la question le rendement
social et le rendement financier »319.
Point 2 : de la lutte contre les pratiques
usurières à l'adoption du modèle commercial
1. Le MC, une alternative aux pratiques usurières
Le microcrédit était « conçu
à l'origine comme un moyen d'emprunter sans avoir recours aux
prêteurs locaux, souvent usuriers »320 ; et l'une des
meilleures façons pratiquées pour obtenir des prêts
auprès des banques commerciales reste la garantie. Or, les garanties
sont différentes et peuvent porter sur des salaires de membres de la
famille ou d'amis ; et en cas de retard de paiement ou lorsque le client
n'aurait pas les capacités financières pour faire
319 « Rôle du microcrédit et de la microfinance
dans l'élimination de la pauvreté » _Rapport du
Secrétaire
Général de l'ONU. 9 août 2010
320 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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face à une échéance de son prêt,
l'une des premières mesures de rétorsion est d'établir une
amende. Si l'absence de remboursement se poursuit, d'autres pressions sont
exercées, le plus souvent, par le banquier ou le garant. Une
méthode classique de recouvrement de prêt a été
relevée consistant à exiger au client la signature d'un
chèque ou d'une reconnaissance de dette en blanc ou d'un montant
équivalent au montant dû. Parfois, certaines institutions de MC
bloquent une partie du prêt contracté comme sûreté.
Le client se trouve ainsi doublement taxé, payer des
intérêts sur l'emprunt et n'en utiliser qu'une partie.
Les taux d'intérêt du MC
Esther Duflo écrit321 : « les familles
de pauvres ne manquent pas d'occasions d'investir, mais seulement de garanties
bancaires ». Cette idée, qui est le fer de lance de la
justification de la « libération » des taux
d'intérêt, est largement répandue dans les médias.
Surtout lorsqu'on constate que les taux d'intérêts
appliqués dans le modèle de la Grameen sont de l'ordre de
26%322 en moyenne ; d'ailleurs, les IMF des pays en voie de
développement appliquent un taux d'intérêt effectif entre
10 et 30 %323 par an ce qui reste sûrement plus
élevé que dans le cadre d'un système bancaire
classique.
Maria NOVAK324 voit qu'il est impossible de parler
de l'exclusion financière sans faire le point sur le taux
d'intérêt, celle -ci distingue le crédit du don. Elle
ajoute que le débat sur le taux d'intérêt est aussi ancien
comme celui relatif au traitement de la pauvreté pour conclure que
« l'argent n'est pas un bien comme un autre. Il n'est pas seulement un
instrument de valeur et d'échange»325, dans ce cadre
Jacques Attali défend la libération des taux
d'intérêt pour la microfinance malgré que ces derniers
« se situent la plupart du temps entre ceux des banques commerciales et
ceux des usuriers »326 et leur plafonnement « ne
protège paradoxalement pas la clientèle pauvre et peut nuire en
limitant l'accès à des services financiers »327.
Cependant lorsque les taux d'intérêt sont plafonnés
plusieurs effets se reproduisent particulièrement le retrait de nombre
d'IMF du marché, sinon elles réduisent au moins l'ampleur de
leurs activités, et ce afin de couvrir l'intégralité de
leurs coûts
321 FOUILLET Cyril et al. op. cit.
322 ATALLAH Clara et EL HAYANI Omar. « Microfinance :
Quelles perspectives de développement pour les IMF : Cas du Maroc
». Mémoire de Recherche, Cycle Grande Ecole ESCP. Europe, Mai
2009.
323 KADIRI Ghalia et BOUCHAIB Sarah, op. cit.
324 NOVAK, Maria. On ne prête (pas) qu'aux riches. op.
cit. p.59
325 Idem.
326 ATTALI, Jacques. Voyage au coeur d'une révolution.
op. cit. p.27
327 Idem. p.169
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
d'exploitation. Toutefois, il reconnait que « les taux
d'intérêts, même lorsqu'ils ne relèvent pas de
l'usure pure et simple, demeurent souvent très élevés
»328 et certainement cela ne sert pas les intérêts
des populations pauvres.
En fait, les AMC se limitent souvent à dire à
leurs clients ce qu'ils doivent rembourser par échéance, la
période du remboursement et le nombre d'échéances et ce
sans se soucier d'évoquer le taux d'intérêt appliqué
et le total des intérêts à payer. Certainement, le taux
appliqué aux clients du MC est supérieur à celui
demandé par les banques traditionnelles et en l'absence d'un taux
référentiel pour le secteur le taux appliqué ne suit
aucune règle et chaque AMC peut avoir ses propres taux.
De la justification du taux d'intérêt du
MC
Du côté des AMC, les taux d'intérêt
sont établis de façon à permettre l'offre de services
financiers durables, à grande échelle et à un très
grand nombre de clients. En plus, il est présumé que le
coût d'un prêt de petite taille est proportionnellement plus
élevé que celui d'un prêt important. E effet, les
premières critiques viennent du fondateur de la Grameen,
M. YUNUS : « Nous avons créé le
microcrédit pour lutter contre les requins du prêt ; nous n'avons
pas créé le microcrédit pour les encourager329
».
Alors à quel taux d'intérêt faut-il
prêter en matière de MC ? Pour traiter cette question on est en
présence de plusieurs visions. D'abord certains Bailleurs de fonds,
surtout le cas des ONG chrétiennes qui défendent « le
principe que les pauvres ne peuvent payer des intérêts au prix du
marché », en conséquence il faut prêter sans
intérêt ou à des taux d'intérêt très
bas. Puis il y a les caisses d'épargne et de crédit adoptant des
taux d'intérêt en dessous de ceux du marché. Enfin, les
autres gérant autrement le microcrédit où le taux de
prêt doit inclure tous les frais (participation à la couverture de
risque, assistance et autres contributions).
Mais pourquoi le taux est relativement si élevé
? Les AMC avancent en premier lieu l'importance des charges fixes que
représente la gestion des prêts. En effet, la fourniture de
prestations financières à des personnes pauvres est relativement
couteuse. Or, l'activité
328 ATTALI, Jacques. Voyage au coeur d'une révolution.
Op. cit. p.255
329 YUNUS. Mohamed, « Vers un nouveau capitalisme »,
Op, cit.
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implique de saisir les clients chez eux ou sur leur lieux de
travail pour évaluer leur projet et les assister dans ses
démarches suite à l'obtention du prêt, tout ça
engendre des coûts qui font objet d'imputation à quelqu'un.
Or, il a été constaté dans certains
travaux de terrain330 que les deux tiers des clients du MC
interrogées ne connaissaient ni le taux d'intérêt effectif
de leur prêt en cours, ni la méthode de calcul ni non plus le
montant des frais de dossiers.
En réalité, cette question porte assez de
divergences entre acteurs, experts et intéressés ; du rapport du
secrétaire général de l'ONU de 2009 on retire que l'une
des préoccupations qu'inspire la commercialisation de la microfinance
touche le niveau élevé des taux d'intérêt
pratiqués ainsi à « l'échelle mondiale, les taux
d'intérêt annuels et les frais divers sur les microprêts
accordés représentent en moyenne 37 %, et peuvent parfois
atteindre 125 %. On a pu montrer qu'un taux d'intérêt situé
entre 10 et 15 % au-dessus du loyer de l'argent était approprié,
et pourtant une estimation constate que 75 % des établissements de
microfinance demandent des taux d'intérêt plus
élevés »331.
La caution solidaire, un instrument de pression sur les
bons clients
Jouant un rôle important dans le MC (dit de groupe), la
caution solidaire responsabilise tous les membres du groupe sur l'ensemble des
prêts accordés au groupe et « en cas de défaillance de
l'un des membres du groupe, les autres membres doivent le rappeler à ses
obligations et, le cas échéant, se substituer à lui »
332. Tant que le groupe n'a pas remboursé l'ensemble des
prêts octroyés, aucun de ses membres ne peut solliciter un nouveau
prêt : c'est pourquoi dans ce cas de prêt il est
privilégié l'approche collective dans la mesure où les
garanties matérielles sont quasi-inexistantes et chaque client ne peut
prétendre à un crédit que s'il appartient à un
groupe. En outre, les bénéficiaires constituent un groupe pour
être habilités à obtenir un crédit et le groupe se
porte garant pour les dettes de chaque membre. Ainsi, la caution solidaire
génère des incitations au remboursement et contraint le groupe
à se charger de la sélection, de la surveillance et du respect
des obligations. Il est
330 « Enquête réalisée en 2006 par
l'APMAS ». APMAS, 2006 (Inde). (APMAS est une institution indienne de MF :
l'enquête a porté sur 130 groupes de MC suite aux
événements des suicides à l'Etat de l'Andra Pradesh).
331 Rapport du Secrétaire général de l'ONU
(9 août 2010). op. cit.
332 BOYÉ Sébastien et al. (2006). Le guide
de la microfinance : Microcrédit et épargne pour le
développement. Éditions d'Organisation. p.55/304.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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certain que les «groupes solidaires » jouent un
rôle essentiel dans l'accès des personnes démunies au
microcrédit parce qu'ils permettent de remplacer les garanties
matérielles.
Par contre, dans le cadre du prêt individuel le garant
agit essentiellement comme un vecteur de pression sociale sur le
débiteur plutôt qu'une alternative de remboursement333.
C'est alors que le prêt de groupe est fondé sur le
mécanisme de la caution solidaire entre ses membres. Cette forme de
prêt (solidaire) s'appuie sur une menace crédible d'une sanction
sociale pour limiter le défaut du remboursement. Dans ce contexte,
chaque membre reçoit un prêt, de façon individuelle, mais
à la condition de se porter caution des crédits accordés
aux autres membres du groupe. En d'autres termes, le contrat de prêt
(reconnaissance de dette) prévoit qu'en cas de défaillance de
certains membres du groupe, les autres s'engagent à honorer la dette des
premiers. Si, en définitive, la totalité de la dette du groupe
n'est pas éteinte, l'ensemble du groupe perd l'accès au futur
crédit. Il y a donc incitation dynamique consistant à soumettre
l'octroi de nouveaux prêts aux remboursements des crédits
précédents. Cette technique s'appuie sur le «capital
social» détenu par chaque individu ; le principe est qu'un agent
possède des informations privilégiées sur les autres
membres et réciproquement. En outre, ce capital social permet de
réduire les problèmes d'anti-sélection et d'aléa
moral puisque les agents ont la possibilité de se surveiller et de se
sanctionner mutuellement. Il s'agit du mécanisme de « surveillance
par les pairs » qui incite au respect du contrat. En effet, le
prêteur « délègue » le contrôle de chaque
individu au groupe et se contente de surveiller et le cas échéant
de sanctionner l'ensemble du groupe.
Si la constitution de groupe est présentée comme
une condition pour l'obtention du crédit et non comme « la garantie
du prêt sollicité, le risque est réel de voir des groupes
se former par pure nécessité » 334. De plus, si
la solidarité est fictive, les taux de remboursements risquent de
s'effondrer aux premières difficultés dues aux problèmes
des créances en souffrances et des clients défaillants.
333 JAUNAUX Laure et VENET Baptiste. « Microcrédit
individuel et pression sociale : le rôle du garant »
334 BOYÉ Sébastien et al. op. cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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CONCLUSION DE LA PARTIE 2
Plusieurs études menées à des
années d'écart et sur différents continents « ont
montré des résultats impressionnants : sur le plan
économique, avec des impacts sur le niveau de revenu et la
capacité à épargner, sur le plan social, avec des effets
sur la scolarisation des enfants, l'accès aux soins ou
l'amélioration de l'habitat, grâce à l'impact
économique et dans certains cas grâce à des services
complémentaires proposés par les IMF»335. Ainsi,
le MC peut avoir « un impact sur la capacité des individus à
prendre en main leur propre situation. La possibilité d'emprunter et
d'investir, d'épargner, de travailler, a une valeur en soi : celle
d'élargir les options disponibles» 334 Or, depuis une
décennie, le développement du MC fait partie de la panoplie
d'instruments que préconisent la Banque mondiale, le Pnud ou encore le
BIT pour sortir les populations des pays en développement de la
pauvreté. Ces institutions internationales insistent sur l'ardente
obligation de favoriser l'accès au MC pour concrétiser le passage
d'une politique macro-économique d'aide au développement à
un ensemble d'initiatives individualistes « luttant contre la
pauvreté ».
Or, très récemment les banques classiques qui
repoussaient les pauvres loin de leurs bancs, s'y sont d'un coup
précipitées notamment devant l'immense potentialité de
développement du microcrédit. Ainsi, de nombreux organismes
bancaires ont développé des branches dédiées
à ces petits clients. Si on l'examine de près, on peut se rendre
compte que parfois ces prêts sont des crédits à la
consommation dissimulés. Aujourd'hui, le microcrédit, qui
était, à la base, le fruit d'organisations à but non
lucratif, se retrouve ainsi organisé dans certains cas par des
entreprises commerciales. Ce segment d'activités se révèle
très lucratif et si rentable : intérêts
élevés, cibles très larges (pauvres), remboursement quasi
garanti, etc. Son objectif indirect consiste à réduire la
pauvreté, mais les limites de telle démarche et ses
dérives sont réelles.
Divers acteurs de développement intègrent le MC
dans leurs agendas ; le « marché » commence également
à s'y intéresser à travers la vulgarisation336
de l'accès aux services financiers qui forme un objectif fortement
affiché du microcrédit. Dans ce contexte, les «
335 BOYÉ Sébastien et al. op. cit. p.93
336Isabelle Guérin, économiste, est
chargée de recherche à l'IRD et membre du LPED. Elle est
également responsable du programme « Labour, Finance and Social
Dynamics » à l'Institut Français de
Pondichéry.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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pauvres » ont besoin de plusieurs services financiers
(crédit, épargne, assurance, des services de transferts de fonds
pour les migrants,...) et pas uniquement de la dette.
Bien loin d'être l'unique résultat de l'action
associative, laquelle se développerait contre l'«État »
ou le « marché », le MC se présente comme le fruit
d'une dialectique permanente entre ces trois entités. Son
caractère novateur consiste « à joindre logique de profit,
logique administrée et logique de solidarité, prédisant
ainsi un renouvellement des formes d'action publique. L'enjeu consiste à
concilier mission « sociale » et mission « financière
». Il consiste également à trouver un équilibre entre
des dynamiques collectives issues de la société civile et des
politiques publiques aux objectifs parfois multiples » 337.
337Isabelle Guérin. op. cit.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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CONCLUSION GENERALE
L'opportunité donnée aux exclus des circuits
financiers d'entreprendre une activité génératrice de
revenu constitue un moyen efficace de combattre l'exclusion et la
pauvreté. Le microcrédit est donc apparemment appelé
à se développer considérablement à la fois dans le
Sud et dans le Nord. Actuellement deux grandes tendances sont en train de se
créer dans le secteur. D'une part, on enregistre que la frontière
entre les banques et les AMC est de plus en plus fine. Les banques
engagées dernièrement dans un processus de
downscaling338, s'acharnent de plus en plus à toucher les
couches supérieures de la clientèle cible du secteur. D'autre
part, certaines ONG se lancent dans le microcrédit dit « social
» cherchant à venir en aide aux populations les plus
défavorisées. Il est donc fort de constater qu'établir une
norme de bonne pratique dans le microcrédit semble être
impératif pour le bien du secteur afin d'éviter une possible
perte de lisibilité des missions incombant aux AMC. D'un
côté, ces dernières dont l'objet est la pratique du
microcrédit économique (ou professionnel) doivent trouver leur
place dans ce paysage. On peut leur assigner un rôle triple : servir les
clients que les banques ne voudront pas servir, poursuivre en collaboration
avec les ONG l'effort de recherche développement et construire des
partenariats avec des banques et d'autres financeurs afin de créer des
circuits financiers qui atteignent les plus démunis. Par ailleurs, les
AMC en poursuivant un double objectif qui consiste d'abord à faire
reculer les frontières du microcrédit et à accroître
l'impact social de leurs activités et ensuite à se montrer bon
gestionnaire des ressources financières qu'elles reçoivent. Leur
performance se base donc à la fois sur des critères sociaux et
financiers, mettant en exergue le caractère hybride du
microcrédit qui « concilie » marché et
solidarité malgré que la relation entre performance
financière et performance sociale est encore floue, mais son examen est
certainement riche d'enseignement. On ne peut pas comprendre facilement que
l'une et l'autre sont réellement corrélées,
c'est-à-dire qu'une AMC est d'autant plus pérenne
financièrement qu'elle obtient de bons résultats sur le plan
social, quoique ceci ne soit pas toujours sûr. Toutefois, il semble
important de valoriser une association positive entre les deux types de
performance et une telle mission paraisse utopique et encore difficilement
réalisable.
338 Downscaling : implication directe des banques classiques dans
le secteur du microcrédit.
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En fait, le modèle économique du
microcrédit reste « très proche de celui des
sociétés de crédit à la consommation339
» consistant à offrir de petits prêts à un grand
nombre d'emprunteurs. Il existe cependant des différences majeures
surtout au niveau des cibles à atteindre. Or existe-t-il des failles
dans le système du microcrédit ? «
La principale faille c'est le décalage qu'il y a entre ce
qu'on attend du microcrédit et la réalité. Le
microcrédit est une approche très séduisante parce qu'elle
est construite sur l'idée qu'on croit au potentiel de
chacun340 », répond un expert.
De création noble, le microcrédit est une
idée originellement simple et porteuse de beaucoup d'espoir. Il amorce
peut-être une révolution dans le domaine financier à
l'échelle micro, en posant les prémices d'un secteur financier
inclusif et ouvert à tous. Ainsi, il pourrait constituer un moyen de
« réconcilier l'économique et le social341 »
même s'il parait un mécanisme insuffisant, à lui seul, pour
relever le dilemme du développement.
Théoriquement les institutions de microcrédit
ont la double mission « de poursuite des objectifs financier et social.
Mais dans la réalité, les performances obtenues
privilégient souvent la performance financière au
détriment de la performance sociale ou, au mieux, réussissent un
arbitrage entre les deux missions342 ». Cette poursuite
concomitante d'objectifs financiers et sociaux le place dans une dialectique
singulière car depuis la fin des années 1990 un courant se
renforce selon lequel la seule manière de créer des
systèmes financiers inclusifs à grande échelle serait de
faire du microcrédit « un secteur commercial rentable et
relié à la finance internationale343 », de sorte
qu'il puisse saisir plus de capitaux et que les banques s'y engagent
fortement.
Aujourd'hui, le positionnement du microcrédit
répond bien à la demande d'un ensemble de services financiers
(bancaires et d'assurance) que le marché n'arrive pas à
satisfaire. Il comblerait une défaillance du marché qui
s'explique en grande partie par les coûts élevés
339 DE LUTZEL, Emmanuel. « La microfinance, Une industrie
socialement responsable ». Magazine Échanges, juillet
2007. N° 245.
340 BERGER Arnaud. Magazine Stop-Arnaques. Septembre
2010.
341 CORNEE Simon. (2006). « Microfinance : entre
marché et solidarité » IGR-IAE, Université de
Rennes 1/ Centre de Recherche en Economie et Management, Master Recherche en
Sciences de Gestion.
342 ACCLASSATO, Denis. « Le microcrédit entre
shopping institutionnel et ciblage des plus pauvres » De Boeck
Université, Mondes en développement. 2010/4 - n°
152 pp. 31-44 Url :
http://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement
343 BEDECARRATS, Florent. « Evaluer la microfinance, entre
utilité sociale et performances financières ». La
Découverte, Revue Française de Socio-Économie. 2010/2
- N° 6. pp. 87-107.
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Spécialisé Management du Développement Social 167
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
des transactions bancaires. En simplifiant procédures
et structure organisationnelle, une institution de microcrédit arrive
à faire mieux qu'une banque. Son rôle d'intermédiaire
financier de proximité est acquis, mais celui « de l'inclusion
financière positive est encore loin d'être atteint notamment dans
les pays en développement344». De plus, la question de
la performance financière des AMC n'est pas neutre
idéologiquement345 et témoigne de la volonté de
promouvoir, par le microcrédit, un modèle
libéral346 de lutte contre l'exclusion financière et
la précarité sociale. En outre, la mesure de la performance
sociale est à la fois plus large et plus complexe que la question de la
performance financière. Trois éléments sont
traditionnellement évalués347 : la capacité
à atteindre le plus grand nombre, la capacité à
atteindre des personnes initialement défavorisées et enfin la
capacité à améliorer leur bien-être et celui de leur
famille. Ainsi, ce n'est pas toujours réel d'agir sur le financier pour
avoir un impact social positif comme le défend ceux qui stipulent que
« en augmentant les ressources disponibles, les performances
financières favorisent l'investissement social. À l'inverse, la
performance sociale (...), induit un management plus performant des
institutions et de meilleurs résultats
financiers348».
Toutefois, deux approches d'évaluation dites
complémentaires sont promues à présent et qui peuvent
être adoptées pour analyser la performance sociale de l'AMC :
« une approche centrée sur l'institution à travers la
portée sociale et une approche centrée sur les clients à
travers l'analyse de l'impact. Toutefois, la performance sociale ne peut se
réduire au ciblage des pauvres et l'analyse d'impact et il faut
élargir son cadre d'analyse »349.
Cependant, diverses études conduites sur le terrain
témoignent que la performance sociale du MC reste
ambiguë tout en montrant que « la capacité
des IMF à lutter contre la pauvreté pouvait être
extrêmement variable»350. De plus, les analyses des
impacts restent relativement équivoques et font l'objet de controverses
méthodologiques. Compte tenu de la
344 YVES, Somé. « Responsabilité sociale et
solidarité : la microfinance peut-elle être plus solidaire
?». Finance & Bien Commun. 2010/2 No 37-38. p. 158-169.
Url:
http://www.cairn.info/revue-finance-et-bien-commun
345 JEGOUREL, Yves. « La microfinance : entre performance
sociale et performance financière ». La
Découverte, Regards croisés sur
l'économie, 2008/1, n° 3 pp. 197-205. , Url :
http://www.cairn.info/revue-regards-croises-sur-l-economie
346 Idem.
347 Ibid.
348 ACCLASSATO, Denis. op. cit.
349 BERGUIGA, Imène. op. cit.
350 JEGOUREL, Yves. op. cit.
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Spécialisé Management du Développement Social 168
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
fongibilité des crédits, il est difficile
d'attribuer au microcrédit seul la responsabilité351
de certains effets observés.
Après le renforcement du paradigme commercial
privilégiant l'approfondissement de la concurrence pour accroître
l'efficacité du marché du MC, « les dérives d'une
croissance débridée se sont révélées
à travers des crises de surendettement et des pratiques parfois abusives
à l'égard des clients 352». (...) S'il a
été érigé en modèle par les institutions
multilatérales, la vision minimaliste d'un microcrédit
débarrassé de toute préoccupation non financière
provoque aujourd'hui de nombreuses critiques. En effet, l'influence croissante
du modèle commercial en microcrédit suscite de nombreuses
discussions au sein du secteur. Chose qui incite les AMC à « se
tourner vers des segments de clientèle plus rentables353
», c'est-à-dire essentiellement urbains et moins pauvres, ou encore
à augmenter leur taux d'intérêts ce qui induit favorise le
danger de « décapitaliser ou de surendetter les emprunteurs
»354. Bien qu'encore dans le registre de la prospective, les
tendances d'évolution du secteur confortent ces craintes, à
l'heure où les statistiques montrent que les fonds privés
commencent à envahir le secteur pour dépasser les engagements
publics de sorte que certains analystes « estiment que l'investissement
étranger en microcrédit est appelé à
décupler d'ici 2015355».
Plus fondamentalement, le microcrédit est accusé
de « véhiculer l'idéologie néolibérale et/ou
patriarcale 356». En misant sur l'émancipation des
pauvres par le marché, en particulier celle des femmes, le
microcrédit contribuerait à légitimer une vision
économique et individuelle357 de la pauvreté et un
désengagement de l'État.
La question fondamentale traitée dans cette recherche
est celle de la transcription de la mission sociale du MC dans la pratique
(particulièrement avec l'arrivée des nouveaux intrus armés
d'une logique commerciale «habillée» d'un ensemble de mesures
rappelant le rôle social du microcrédit), car les objectifs
doivent se limiter à améliorer les conditions de vie
351 GENTIL Dominique & SERVET Jean-Michel. « Entre
«localisme» et mondialisation ... », op. cit.
352 BEDECARRATS, Florent et al. Op. cit.
353 BEDECARRATS, Florent. « Evaluer la microfinance, entre
utilité sociale et performances financières ».
La
Découverte | Revue Française de
Socio-Économie_ 2010/2 - n° 6 pp. 87-107.
354 Idem.
355 Ibid.
356 GUERIN Isabelle. « Les effets
insoupçonnés de la microfinance ». Revue Travail,
Genre et Sociétés. 2011/1 n° 25, pp. 61-79. Url
:
http://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes
357 Idem.
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
des clients pauvres et de leurs familles et étendre la
gamme des opportunités ouvertes à leurs communautés. Pour
ce faire, il faut améliorer la qualité des services
offerts358 : donc tenir compte des besoins et des demandes,
distribuer ces services à des coûts bas et avec des taux
d'intérêt équitables, contribuer au développement
des liens et du capital sociaux au sein des communautés, contribuer
à réduire la vulnérabilité, mais aussi surveiller
et agir contre les effets secondaires négatifs de la microfinance, comme
le surendettement et la cavalerie ou les formes multiples d'endettement.
Par ailleurs, c'est une illusion d'attendre du
microcrédit d'opérer une transformation radicale de la situation
des personnes cibles. On ne pourrait pas y faire l'unique outil de lutte contre
toute forme d'exclusion, une sorte d'outil tout terrain dédié
à la lutte de toute forme de pauvreté et
d'inégalité. Il faut veiller à ce que le crédit
« ne devienne pas un substitut au salaire et à la protection
sociale, une sorte de réponse normative, l'outil unique pour faire face
à la pauvreté359».
Enfin, qu'il s'agisse de lutter contre la pauvreté ou
en faveur de l'émancipation de certaines catégories sociales, il
semble difficile de conclure objectivement sur les effets du microcrédit
tant les expériences et les environnements dans lesquels il agit
apparaissent variés. Le succès institutionnel que connaît
pourtant le MC ne doit pas occulter le fait qu'il n'est en aucun cas une
panacée face à une pauvreté durable et variable. Le
microcrédit doit s'intégrer360 dans un dispositif
beaucoup plus large de lutte contre toutes les formes de pauvretés. Il
se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins entre une vision
institutionnaliste et welfariste361 et les pouvoirs publics ont un
rôle considérable pour définir ce que sera le
microcrédit de demain : performant ou non, aussi bien sur le plan social
que commercial. Ces deux approches placent la performance financière et
la performance sociale en opposition.
Pour creuser plus profondément, en termes de
perspectives de recherches académiques à caractère
prospectif, éventuellement dans le cadre de mes études
doctorales, j'ai l'honneur
358 JEGOUREL, Yves. Op. cit.
359 ALAIN, Bernard. « Le microcrédit, pour sortir de
la pauvreté ». Projet. 2010/4 n° 317, pp. 40-42. Url_
http://www.cairn.info/revue-projet
360 JEGOUREL, Yves. Op. cit.
361 BERGUIGA, Imène. Op. cit
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de proposer différentes pistes dont chacune pourrait
être conduite à part comme sujet de réflexion. En effet,
ces axes sont exposés ci-après :
- Industrialisation du microcrédit et financement du
développement local : Essai d'analyse et contribution à la
compréhension de la convergence des AMC vers le statut de
sociétés de financement.
- Stratégies de gouvernance des AMC au Maroc :
Microcrédit à la croisée des chemins entre Marché
et solidarité.
- Fondation Zakoura Microcrédit : Crise de gouvernance
et stratégie de croissance (disparition d'un acteur de
microcrédit).
- Microcrédit et les risques sociaux d'appauvrissement
de la population par l'endettement.
- Le microcrédit comme mode de subsidiarité
à l'action publique (aux politiques publiques).
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Spécialisé Management du Développement Social 171
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
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Schultze-delitzsch (1808-1885)''Professeur associé Université
d'Evry
- PEEMANS-POULLET. Hedwige, « La miniaturisation de
l'endettement des pays pauvres passe par les femmes » Cahiers genre et
développement _In : Féminismes et développement Chronique
Féministe, (Bruxelles), n°71-72, février-mai 2000.
- ROESCH Marc et HELIES Ophelie, (2007) « la Microfinance,
outil de gestion du risque ou de mise en danger par surendettement ? Le cas de
l'Inde du Sud », Presses de Sciences Po | Autrepart 2007/4 - n° 44
pp. 119-140.
- ROSENBERG. Richard, « Le microcrédit aide-t-il
vraiment les pauvres ? » focus note N° 59 Janvier 2010
-
SERVET. JM résumé d'une
étude faite en 1991/92 pour l'INSTRAW, «Conflits autour du
crédit» - URGEGHE. Ludovic, «Commercialisation et
financement de la microfinance : quels enjeux de
gouvernance ? », Reflets et perspectives de la vie
économique, 2009/3 Tome XLVIII, pp. 39-50. - VINCENT, Fernand.
«Effective Governance for Micro-finance Institutions» ,
Genève, le
7/11/1999.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 176
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
- "La microfinance en Afrique : évolutions et
stratégies des acteurs", n° 59-60, revue publiée par
l'association "Epargne sans frontières"
- « Créer des mécanismes de sortie de la
pauvreté pour les plus démunis » _ Note du
CGAP/Décembre 2009
- « Nouvelle loi bancaire : ça bouge dans le
microcrédit », L'Economiste, du 20 février 2005.
- « Grosse mise à niveau comptable »,
L'Economiste, n°2030, du 27 mai, pp1-2.
- «Grain de sel » n° 32 , Septembre 2005, Jean M.
Servet
- « Aider les femmes à améliorer leurs moyens
d'existence : un guide des bonnes pratiques » _ BIM
- 06 juillet 2004 _ Karin BARLET
- MicroBanking Bulletin du 17 août 2008
- BIM n° - 13 janvier 2007 Ophélie
HÉLIÈS
- BIM 25-04-2006
- (Lemonde 24/11/2006), François Doligez _IRAMD France
- « La crise accentue l'intérêt pour le
microcrédit », Source : LeMonde, 6 février 2009 _ Pascal
Glémain
- LeMonde14/11/2006. , Isabelle Guérin, IRD
Genève,
- « l'effet de l'endettement des ménages sur la
croissance fait débat » Le Monde Economie _ du 22
févier 2000, Laetitia Van Eechout,
- (Le Temps) du 08/12/2006., J-M-Servet
5. WEBOGRAPHIE :
Sites scientifiques :
-
www.persee.fr
- www.cairn.info
-
www. laviedesidees.fr
Sites spécialisés
-
www.penelopes.org
-
www.cadtm.org
-
www.dautresreperes.be
-
www.esf.asso.fr
-
www.fnam .ma
-
www.microrate.com
-
www.mixmarket.com
-
www.cm6-ms.ma
-
www.jaida.ma
-
www.adie.org
-
www.formation-microfinance.com
-
www.cgap.org
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
-
www.microcreditsummit.org
-
www.lamicrofinance.org
-
www.planete-finance.org
Autres Sites :
- Site web : Ministère de l'Economie et des
Finances-Maroc (
www.mef.gov.ma)
- Site web : Ministère de développement social
(
www.social.ma)
- Site web :
www.wikipédia.org
- Site web :
www.hcp.ma
- Site web :
www.fm5.ma
- Site web :
ww.fbpmc.ma
- Site web :
www.fondep.ma
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 177
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 178
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
TABLE DES MATIERES :
Titre
|
Page
|
Introduction
|
1
|
1. Problématique de la recherche
|
3
|
2. Pertinence du thème
|
6
|
3. Méthodologie de la recherche
|
6
|
4. Schéma du travail
|
7
|
Chapitre préliminaire
|
10
|
1. Genèse, fondements et bases du microcrédit
|
10
|
2. Le microcrédit, un système de financement de
proximité
|
18
|
3. Les acteurs du microcrédit, différentes formes
pour une seule finalité
|
22
|
|
Partie I : Le microcrédit au
Maroc, un outil émergent de la politique publique sociale
|
28
|
Chapitre I : Présentation et analyse de la
politique publique sociale au Maroc
|
29
|
Section 1 : Le référentiel social
de la politique publique
|
30
|
§ 1 : Présentation de la politique
publique sociale au Maroc
|
30
|
Point 1 : Conception d'une vision de
développement social
|
30
|
Point 2 : Elaboration d'une stratégie de
développement social
|
34
|
§ 2 : Analyse de la politique publique
sociale au Maroc
|
36
|
Point 1 : Aspects fondamentaux de la politique
publique sociale au Maroc
|
36
|
Point 2 : Politique publique sociale au Maroc
entre impacts et attentes des citoyens
|
38
|
Section 2 : Réglementations, Institutions
& Programmes de la PPS
|
41
|
§ 1 : Réglementation et institutions
sociales
|
41
|
Point 1 : Cadre réglementaire
|
44
|
Point 2 : Cadre institutionnel
|
47
|
§ 2 : La place du MC dans les programmes de
la PPS au Maroc
|
47
|
Point 1 : l'initiative nationale de
développement humain (INDH)
|
49
|
Point 2 : La place du MC dans
les programmes de l'INDH
|
52
|
Chapitre II : le Microcrédit au Maroc, levier de
développement socio- économique
|
52
|
Section 1 : Le microcrédit, de la
génération de revenu au renforcement des capacités
|
52
|
§ 1 : Le microcrédit, un
mécanisme de renforcement des capacités
|
53
|
Point 1 : Le MC, un élément de
création de la valeur ajoutée et d'amélioration des
conditions de vie
|
53
|
Point 2 : Le MC, un facteur d'atteinte de
l'équilibre financier et de mobilisation de l'épargne
individuelle
|
56
|
§ 2 : Le microcrédit, un
mécanisme de génération de revenu additionnel
|
58
|
Point 1 : Le MC, un facteur du
développement social et stimulant de la formalisation du secteur
informel
|
58
|
Point 2 : Le MC participe au renforcement des
capacités des bénéficiaires (émancipation de la
femme)
|
60
|
Section 2 : Le microcrédit, un outil de
lutte contre les pauvretés
|
64
|
§ 1 Le MC et la lutte contre la
pauvreté dans le monde rural
|
65
|
Point 1 : lutte contre la pauvreté dans
le monde rural
|
65
|
Point 2 : combat contre l'enclavement du monde
rural (précarité sociale)
|
66
|
§ 2 : Le MC lutte contre l'exclusion
sociale (Accès aux services de base)
|
66
|
Point 1 : Accès aux services urbains ou
lutte contre la vulnérabilité en urbain
|
68
|
Point 2 : Le MC au coeur des OMD définis
par l'ONU
|
68
|
Conclusion Partie I
|
73
|
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 179
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Titre
|
Page
|
Partie II : Le Microcrédit, entre un discours
articulé sur la finalité sociale et une pratique orientée
vers la performance commerciale
|
76
|
Chapitre I : Le microcrédit au Maroc, un secteur
en expansion
|
77
|
Section 1 : Présentation du secteur au
Maroc
|
78
|
§ 1 : Cadre réglementaire et
institutionnel
|
78
|
Point 1 : Cadre réglementaire du MC
|
78
|
Point 2 : Cadre institutionnel du MC
|
82
|
§ 2 : Présentation du secteur au
Maroc
|
83
|
Point 1: Fondements et référentiel
du secteur
|
84
|
Point 2 : Un secteur en mutation
|
88
|
Section 2 : Al Amana Microfinance, un leadeur du
secteur de MC au Maroc
|
98
|
§ 1 : L'association ALAMANA
|
98
|
Point 1 : Création et organisation de
l'association
|
98
|
Point 2 : Stratégie de financement &
Politique de croissance de l'association
|
103
|
§ 2 : Présentation des
résultats du travail de terrain
|
106
|
Point 1 : Démarche, méthodologie
et terrain de l'enquête
|
107
|
Point 2 : Présentation des
résultats de l'enquête
|
109
|
Chapitre II : Les effets de l'adoption du
référentiel de marché
|
130
|
Section 1 : Le MC et les nouveaux paradigmes de
développement
|
134
|
§ 1 : Dilution de la mission sociale dans
le référentiel du marché
|
134
|
Point 1 : Le MC, une facette du « micro
» capitalisme
|
136
|
Point 2 : Le MC, un « piège »
pour les pauvres (face à l'épargne)
|
139
|
§ 2 : Le MC « face cachée
» d'une politique de microendettement des pauvres
|
141
|
Point 1 : Le MC, un cercle « vicieux »
de l'addiction d'endettement
|
142
|
Point 2 : Le MC, une cause de surendettement des
pauvres
|
145
|
Section 2 : Les pratiques des AMC, des
dérives par rapport à la finalité sociale du
|
150
|
MC
|
|
§ 1 : Dérives « sociales »
: de la lutte contre la pauvreté à la lutte contre l'exclusion
financière
|
151
|
Point 1 : de la solidarité collective
à la responsabilité individuelle
|
152
|
Point 2 : du ciblage des plus pauvres à
la prestation des économiquement faibles
|
153
|
§ 2 : Dérives « commerciales
»
|
156
|
Point 1 : de l'autonomie des
bénéficiaires à la viabilisation des AMC
|
156
|
Point 2 : de la lutte contre les pratiques
usurières à l'adoption du modèle commercial
|
158
|
Conclusion Partie II
|
163
|
Conclusion Générale
|
165
|
Bibliographie
|
171
|
Tables des matières
|
178
|
Annexes : 180
|
Annexe n° 1 : Loi 17-98 relative au
microcrédit
|
Annexe n° 2 : Liste des figures
|
Annexe n° 3 : Liste des tableaux
|
Annexe n° 4 : Liste des graphiques
|
Annexe n° 5 : Réglementation,
supervision et principaux acteurs
|
Annexe n° 6 : Adresses des AMC
|
Annexe n° 7 : Données relative
à l'enquête sur le terrain
|
Annexe n° 8 : Echantillonnage
|
Annexe n° 9 : Questionnaires
|
Annexe n° 10 : Organigramme de
l'association Al Amana Microfinance
|
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 180
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXES
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 181
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXE N° 1 : Loi n° 18-97 Relative au
microcrédit362
Chapitre premier
Dispositions générales
Article premier
Est considérée comme association de
micro-crédit toute association constituée conformément aux
dispositions du dahir n° 1-58-376 du 3 joumada 1 1378 (15 novembre 1958)
réglementant le droit d'association et dont l'objet est de distribuer
des micro-crédits dans les conditions prévues par la
présente loi et les textes pris pour son application.
Article 2
Est considéré comme micro-crédit tout
crédit dont l'objet est de permettre à des personnes
économiquement faibles de créer ou de développer leur
propre activité de production ou de service en vue d'assurer leur
insertion économique. Le montant du microcrédit, qui ne peut
excéder cinquante mille dirhams (50.000 DH), est fixé par
décret. Ce décret peut prévoir plusieurs niveaux de ce
montant en fonction des objectifs de chaque association de micro-crédit
et de ses moyens financiers.
Article 3
Outre l'octroi de micro-crédit, les associations de
micro-crédit peuvent effectuer au profit de leurs clients, toutes
opérations connexes liées à l'octroi de
micro-crédit, notamment la formation, le conseil et l'assistance
technique.
Toutefois, les associations de micro-crédit ne peuvent
recevoir des fonds du public au sens de l'article 2 du dahir portant loi
n° 1-93-147 du 15 moharrem 1414 (6 juillet 1993) relatif à
l'exercice de l'activité des établissements de crédit et
de leur contrôle.
Article 4
Les associations de micro-crédit ne sont pas soumises
aux dispositions du dahir portant loi n° 1-93-147 du 15 moharrem 1414 (6
juillet 1993) précité.
362 Bulletin officiel N° 4678 du 01/04/1999
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 182
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Chapitre II
Conditions d'exercice de l'activité de
micro-crédit.
Article 5
Toute association de micro- crédit doit.
préalablement à l'exercice de toute activité de
micro-crédit, être autorisée à cet effet, par
arrêté du ministre chargé des finances pris après
avis du conseil consultatif du micro-crédit prévu à l'
article 19 ci-après.
Cet arrêté doit être publié au
«bulletin officiel ».
Article 6
L'autorisation prévue à l'article 5 ci-dessus
est accordée si l'association remplit les conditions suivantes :
- les statuts de l'association doivent prévoir, en
particulier :
· que son objet exclusif est d'effectuer les
opérations prévues aux articles 1, 2 et 3 de la présente
loi ;
· que l'octroi de micro-crédit se fait sans
discrimination, de quelque nature que ce soit ;
· qu'elle s'interdit l'exercice de toute activité
politique ou syndicale ;
· les conditions de dissolution des associations de
micro-crédit prévues au chapitre VIII ci dessous ;
- les moyens humains et financiers que l'association entend
mettre en place doivent être suffisants pour la réalisation de son
objet ;
- le plan de développement de l'association, notamment
en matière d'implantation, de ressources, d'activité de
crédit et sa répartition entre le milieu urbain et rural doit
être compatible avec le cadre des programmes nationaux d'insertion
économique et sociale des personnes économiquement faibles ;
- les projections financières de l'association doivent
faire ressortir sa viabilité au terme d'une période
n'excédant pas cinq ans à compter de la date de
l'autorisation.
A l'appui de sa demande d'autorisation, l'association de
micro-crédit doit produire, outre les pièces et documents
afférents aux éléments visés ci-dessus, le
récépissé de la déclaration ou du
dépôt prévu à l'article 5 du dahir n° 1-58-376
du 3 joumada 1 1378 (15 novembre 1958) précité.
L'octroi ou le refus de l'autorisation d'exercer les
activités de micro-crédit est communiqué à
l'association requérante par le ministre chargé des finances dans
un délai maximum de six mois à compter de la date de
réception de la demande.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 183
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Article 7
Nul ne peut être fondateur ou membre d'un organe
d'administration ou de direction d'une association de micro-crédit, ni
administrer, diriger, gérer, ou représenter à un titre
quelconque une association de micro-crédit s'il n'est pas de bonne
moralité et ;
1. s'il a été condamné
irrévocablement pour l'un des délits prévus par les
articles 334 à 391 et 505 à 574 du code pénal ;
2. s'il a été condamné
irrévocablement pour infraction à la législation des
changes ;
3. s'il a fait l'objet d'une liquidation judiciaire ;
4. s'il a fait l'objet d'une condamnation prononcée
par une juridiction étrangère et passée en force de chose
jugée, pour l'une des infractions énumérées ci
dessus.
Article 8
Par dérogation aux dispositions du dahir 8 Kaada 1331
(9 octobre 1913) fixant, en matière civile et commerciale, le taux
légal des intérêts et le maximum des intérêts
conventionnels, le taux d'intérêt maximum applicable aux
opérations de micro-crédit est fixé par
arrêté du ministre chargé des finances après avis du
conseil consultatif du microcrédit.
Article 9
Les associations de micro-crédit doivent porter
à la connaissance du public, notamment par affichage dans leurs locaux,
les conditions appliquées à leurs opérations de
micro-crédit, particulièrement en matière de taux
d'intérêt de commissions. de frais de dossier et autres à
la charge du bénéficiaire de micro- crédit.
Chapitre III
Des ressources des associations de
micro-crédit
Article 10
Outre les cotisations et contributions de leurs membres, les
ressources des associations de
micro-crédit peuvent être constituées par
:
- les dons ou les subventions publiques ou privées ;
- les emprunts ;
- les intérêts et commissions, perçus sur les
micro-crédits qu'elles octroient ;
- les fonds mis à leur disposition dans le cadre de
conventions de partenariat, de
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Spécialisé Management du Développement Social 184
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
contrats-programmes conclus avec des administrations, des
organismes publics ou des collectivités locales ;
- les ressources concessionnels que l'Etat peut mobiliser
à leur profit dans le cadre de la coopération bilatérale
ou multilatérale ;
- les revenus générés par le placement de
leurs fonds ;
- le remboursement du principal des prêts.
Article 11
Par dérogation à la loi n° 004-71 du 21
chaâbane 1391 (12 octobre 1971) relative aux appels à la
générosité publique, les associations de
micro-crédit peuvent recourir, sans autorisation préalable,
à la collecte de fonds par voie d'appel à la
générosité publique.
Toutefois, à l'issue de tout appel à la
générosité publique, les associations de
micro-crédit sont tenues d'adresser au ministre chargé des
finances une déclaration relative aux conditions, aux circonstances et
aux résultats de cet appel.
Article 12
Les subventions, les ressources concessionnels et les
résultats de fin d'exercice des associations de micro-crédit
doivent être affectés à l'octroi de micro-crédit.
La distribution, sous quelque forme que ce soit, des
bénéfices par les associations de micro-crédit est
interdite.
Chapitre IV
Du contrôle des associations de
micro-crédit
Article 13
Les associations de micro-crédit doivent tenir une
comptabilité régulière faisant ressortir l'ensemble de
leurs ressources, de leurs emplois, de leurs produits et de leurs charges selon
des modèles fixés par voie réglementaire.
Les pièces et documents ayant servi de base aux
écritures comptables doivent être conservés par
l'association pendant au moins dix ans.
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Spécialisé Management du Développement Social 185
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Article 14
Il est institué un comité de suivi des
activités des associations de micro-crédit, qui est
composé de représentants de l'administration et chargé de
veiller au respect par lesdites associations des dispositions de la
présente loi et des textes pris pour son application.
La composition et les modalités de fonctionnement de ce
comité sont fixées par voie réglementaire.
Dans l'accomplissement des missions qui lui sont imparties, le
comité est habilité à effectuer tout contrôle sur
place et sur pièces sur les activités des associations
précitées par des agents commissionnés à cet effet
par l'administration. Ce contrôle porte également sur le
caractère licite de l'origine des fonds dont disposent les
associations.
Les associations de micro-crédit sont tenues de
communiquer au comité tous documents et renseignements qu'il juge
nécessaires au contrôle du suivi de leurs activités.
Article 15
Les associations de micro-crédit doivent
procéder annuellement et chaque fois que nécessaire à
l'audit externe de leur gestion.
Les rapports d'audit sont communiqués au ministre
chargé des finances.
Article 16
Le ministre chargé des finances fixe, après avis
du conseil consultatif du micro-crédit, des rapports minimum devant
être observés par les associations de micro-crédit entre
les éléments de leur actif et certains ou l'ensemble des
éléments de leur passif.
Chapitre V
Du régime fiscal de l'activité de
micro-crédit
Article 17
Sont exonérées de la taxe sur la valeur
ajoutée les opérations de crédit que les associations de
micro-crédit effectuent au profit de leur clientèle.
Les dons en argent ou en nature octroyés par des
personnes physique ou morales aux associations de micro-crédit
constituent des charges déductibles au sens de l'article 7 de la loi
n° 24-86 instituant un impôt sur les sociétés et de
l'article 9 de la loi n° l7-89 relative à l'impôt
général sur le revenu.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 186
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Les équipements et matériels destinés
exclusivement au fonctionnement des associations de micro-crédit
bénéficient de l'importation en franchise des droits de douanes
et autres droits et taxes.
Article 18
Les exonérations, déductions et franchises
prévues à l'article 17 ci-dessus sont accordées à
chaque association de micro-crédit pour une durée de cinq ans
à compter de la date de publication au Bulletin officiel de
l'arrêté du ministre chargé des finances l'autorisant
à exercer l'activité de micro-crédit.
Ces exonérations, déductions et franchises, ne
peuvent être reconduites au profit des associations de
micro-crédit même si ces associations sont reconnues
d'utilité publique.
Chapitre VI
Du conseil consultatif du micro- crédit
Article 19
Il est institué un conseil consultatif du
micro-crédit composé :
- de représentants de l'administration ;
- de représentants des associations des chambres
professionnelles ;
- de représentants de la fédération des
associations de micro-crédit prévue au chapitre
VII ci-après ;
- d'un représentant de Bank Al-Maghrib ;
- d'un représentant du groupement professionnel des
banques du Maroc ;
- d'un représentant de l'Association professionnelle des
sociétés de financement ;
Le nombre et les modalités de désignation des
membres du conseil consultatif du
micro-crédit ainsi que les modalités de
fonctionnement dudit conseil sont fixés par décret.
Article 20
Le conseil consultatif du micro-crédit est
consulté sur toutes les questions liées à l'octroi et au
développement du micro-crédit. A cet effet, il est chargé
de donner son avis au ministre chargé des finances sur :
· les demandes d'autorisation d'exercice ;
· le montant maximum du micro-crédit ;
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 187
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
· Les modèles destinés à la tenue
d'une comptabilité régulière ;
· Le taux d'intérêt maximum applicable aux
opérations de micro-crédit ;
· Les rapports devant être maintenus entre les
éléments de l'actif et les éléments du passif des
associations de micro-crédit ;
· Les statuts de la fédération des
associations de microcrédit et les modifications y afférentes
;
· Le retrait de l'autorisation d'exercice ;
· La procédure de dissolution.
Chapitre VII
De la Fédération des associations de
micro-crédit
Article 21
Les associations de micro-crédit autorisées
à effectuer les opérations de micro-crédit
conformément à l'article 5 ci-dessus sont tenues d'adhérer
à la Fédération des associations de
micro-crédit.
Article 22
Les statuts de la fédération des associations de
micro-crédit ainsi que les modifications desdits statuts doivent
être approuvés par le ministre chargé des finances
après avis du conseil consultatif du micro-crédit.
Article 23
La Fédération des associations de
micro-crédit a pour attributions :
- d'établir les règles de déontologie
relatives à l'activité de micro-crédit et les soumettre
à
l'approbation du ministre chargé des finances :
- de veiller à l'application, par ses membres, des
dispositions de la présente loi et des textes
pris pour son application ainsi que des règles de
déontologie et de saisir le ministre chargé des
finances de toutes violations y afférentes ;
- de proposer au ministre chargé des finances toute action
de nature à favoriser de
développement du micro-crédit :
- de servir d'intermédiaire entre ses membres et
l'administration et ce à l'exclusion de tout
autre groupement ;
- de désigner ses représentants au sein du conseil
consultatif du micro-crédit ;
- de créer et gérer tous services communs de nature
à favoriser le développement du
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Spécialisé Management du Développement Social 188
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
micro-crédit.
Chapitre VIII
Des sanctions
Article 24
Lorsqu'une association de micro-crédit ne respecte pas
les dispositions prévues aux articles 8.9. 11(alinéa 2), 13, 15
et 16 de la présente loi, le ministre chargé des finances peut
adresser à ses dirigeants une mise en garde.
Si cette mise en garde demeure sans effet, le ministre
chargé des finances peut adresser un avertissement à
l'association de micro-crédit concernée et suspendre un ou
plusieurs de ses dirigeants. Ces mesures sont portées à la
connaissance du conseil consultatif du micro-crédit.
Article 25
En cas d'infraction aux dispositions des articles 12 et 14
ci-dessus ou si l'association de micro-crédit ne remplit plus les
conditions au vu desquelles elle a été autorisée, le
ministre chargé des finances peut, par arrêté pris
après avis du conseil consultatif du micro-crédit, lui retirer
l'autorisation d'exercer.
Le retrait de l'autorisation entraîne, de plein droit, la
dissolution de ladite association.
Article 26
Par dérogation aux dispositions de l'article 37 du dahir
n° 1-58-376 du 3 joumada I 1378 (15 novembre 1958) précité,
en cas de dissolution d'une association de micro-crédit pour quelque
cause que ce soit, le produit net de liquidation est attribué à
l'Etat pour être consacré à des organismes ayant le
même objet après avis du conseil consultatif du
micro-crédit.
La nomination du liquidateur et la détermination des
modalités de liquidation sont fixées par arrêté du
ministre chargé des finances.
Article 27
Est punie d'un emprisonnement de six mois à un an et
d'une amende de 5.000 à 10.000 dirhams toute personne qui, agissant pour
son propre compte ou pour le compte d'une personne morale, effectue des
opérations de micro-crédit sans avoir été
autorisée à cet effet conformément aux dispositions de
l'article 5 ci-dessus.
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 189
Article 28
Toute personne qui contrevient à l'interdiction
prévue à l'article 7 de la présente loi est passible d'un
emprisonnement de 6 mois à un an et d'une amende de 5.000 à
10.000 dirhams.
Chapitre IX
Dispositions diverses et transitoires
Article 29
Les associations qui effectuent des opérations de
micro-crédit à la date de publication de la présente loi
au Bulletin officiel disposent d'un délai d'un an à compter de
cette date pour se conformer à ses dispositions.
Article 30
En attendant la mise en place du conseil consultatif du
micro-crédit et de la Fédération des associations de
micro-crédit, le ministre chargé des finances exerce les
attributions qui lui sont dévolues par la présente loi sans
recueillir l'avis de ces organismes.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 190
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXE N° 2 : Liste des figures
Figure
|
Page
|
Figure n°1
|
9
|
Figure n° 2
|
28
|
Figure n°3
|
64
|
Figure n° 4
|
76
|
Figure n° 5
|
130
|
Figure n° 6
|
141
|
ANNEXE N° 3 : Liste des tableaux
Tableau
|
Page
|
Tableau n°1 : La liste des AMC opérationnelles selon
le nombre de leurs clients actifs au 30/09/2010.
|
87
|
Tableau n°2 : évolution de l'effectif des AMC
|
92
|
Tableau n°3 : Evolution de la taille du marché
|
92
|
Tableau n°4 : Evolution du nombre des clients et des
femmes
|
93
|
Tableau n°5 : Répartition des clients actifs par zone
géographique
|
94
|
ANNEXE n° 4 : Liste des graphiques
|
Graphique
|
Page
|
1.
|
Répartition par secteur
d'activité
|
110
|
2.
|
Répartition par zone
géographique
|
111
|
3.
|
Répartition des bénéficiaires par
situation matrimoniale
|
112
|
4.
|
Répartition des bénéficiaires selon
l'âge
|
113
|
5.
|
Répartition par niveau d'instruction
|
114
|
6.
|
Répartition par niveau de revenu
mensuel
|
114
|
7.
|
Répartition par niveau de dépense
mensuelle
|
115
|
8.
|
Répartition par nature de logement
occupé
|
116
|
9.
|
Répartition par nombre d'enfants a
charge
|
116
|
10.
|
Répartition par taille du
ménage
|
117
|
11.
|
répartition par ancienneté au programme
microcrédit
|
118
|
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 191
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXE n° 5 : Réglementation, supervision
et principaux acteurs363
Type
|
Acteurs clés ou législation
|
Description
|
Autorité de
supervision
|
Bank Al Maghrib
|
Les AMC doivent soumettre régulièrement leurs
informations de portée, états financiers
et détails de financement à Bank
Al Maghrib.
|
Législation
spécifique à la microfinance
|
Loi N° 18-97 relative au Microcrédit
promulguée en 1999
|
La loi de 1999 n°18-97 relative au
microcrédit impose un statut
légal spécifique aux IMF, un plafond de prêt de 50.000
DHS et la viabilité financière des AMC à partir de 5 ans
d'existence.
|
Soutien &
Assistance
|
Centre Mohammed VI de Soutien à la Microfinance
Solidaire
|
Le Centre intervient sur trois axes majeurs : 1- Formation du
personnel des AMC et des bénéficiaires de leurs produits et
services ;
2-Appui à la commercialisation et promotion de la
micro-entreprise ; 3-Observatoire national de la Microfinance.
|
Réseau
|
Fédération Nationale des Associations de
Microcrédit (FNAM)
|
La FNAM a été créée en 2001, et
ses statuts revus en 2008. La fédération offre son apport
à la restructuration du secteur à travers notamment des
commissions et des groupes de travail.
|
Réseau de Microfinance Solidaire (RMS)
|
C'est une association à but non lucratif
constituée de 8 AMC devant mutualiser
leurs moyens de développement et rassemblées
autour de la Fondation ARDI.
|
Centrale des
Risques
|
Centrale des Risques informelle
|
8 des 12 AMC partagent leurs informations. La centrale a
été initiée par les 4 plus grandes AMC vers la fin de
2007.
|
Centrale des Risques formelle de Bank Al Maghrib
|
Opérationnelle depuis octobre 2009 et
gérée par Experian Maroc, cette Centrale des Risques devrait
donner plus de visibilité aux AMC sur l'endettement de leur
clientèle.
|
Programmes de
développement
|
Millenium Challenge Account (Projet
Services financiers/Microcrédit). L'APP (Agence pour
le Partenariat et le Progrès) est chargé de la mise en oeuvre de
ce projet.
|
L'objectif recherché est le développement des
AMC pour accroître leur efficience dans leur mission sociale.
|
JAÏDA
|
Fonds d'investissement dédié au secteur de la
microfinance marocain
|
JAÏDA facilite l'accès au financement des AMC via
une offre de prêts senior et subordonnées.
|
363 « Le secteur marocain du microcrédit en 2010 :
Eléments d'éclairage et d'analyse», Centre Mohammed
VI de Soutien à la Microfinance Solidaire
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 192
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXE n° 6 : Adresses des Associations de
microcrédit (AMC)364
Dénomination sociale
|
Adresse du siège social
|
Association AL AMANA pour la Promotion des
Micro-entreprises (AL AMANA)
|
40, Rue Al Fadila, quartier industriel, Q.Y.M., RABAT
10.000
|
Association Al Karama pour le Micro-Crédit (AL
KARAMA)
|
38, Bd Abdelmoumen, Appt 23, 4ème étage,
Hassan, Rabat
|
Association Ismaïlia pour le
Micro-Crédit
(AIMC)
|
115, Bd Lahboul- BP 2070 MEKNES
|
Association Marocaine de Solidarité
Sans
Frontière (AMSSF)
|
1, Rue Abi Dar El Ghoufari - Quartier Prince Héritier -
1er étage, FES
|
Association Oued Serou pour le Micro-Crédit
(AMOS)
|
Rue Oued Sbou, Hay Ettakaddoum - El Kbab - Khénifra
|
Association Tétouanaise des Initiatives
Sociaux- Professionnelles (ATIL)
|
70, Avenue Hassan II, Résidence Paloma Blanca, 1er
étage, Appt 1, Tétouan
|
Fondation Banque Populaire pour le Micro-
Crédit (FBPMC) « ATTAOUFIK »
|
3, Rue Docteur Veyre, Résidence Patio, CASABLANCA
|
Fondation ARDI (Fondation du Crédit Agricole
pour le microcrédit)
|
137, Avenue Allal Ben Abdallah, Rabat 10.000
|
Fondation Micro-Crédits du Nord
|
6, Rue Rachid Réda, Résidence Hayat 2, entresol,
appt. 34, TANGER
|
Fondation pour le Développement Local et le
Partenariat (FONDEP)
|
17, Rue Cadi Senhaji, Pinède - Souissi II, RABAT 10.000
|
TAWADA
|
119, avenue de la Résistance, appt. 27, RABAT
|
Institution Marocaine d'Appui à la Micro-
Entreprise (INMAA)
|
9, Rue Kser Essok, appt. 6, Quartier Hassan,
3ème étage, RABAT
|
364 « Le secteur marocain du microcrédit en 2010 :
Eléments d'éclairage et d'analyse», op.
cit.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 193
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXE N° 7 : Données
relatives à l'enquête (Tables statistiques relatives à
l'enquête) Table n° 1 : REPARTITION DES BENEFICIAIRES PAR
SECTEUR D'ACTIVITE365
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
Commerce
|
Agriculture
|
Artisanat
|
Services
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
6
|
3
|
|
|
1
|
1
|
1
|
|
8
|
4
|
12
|
Temara
|
5
|
2
|
6
|
1
|
1
|
1
|
|
|
12
|
4
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
3
|
3
|
5
|
1
|
1
|
|
1
|
1
|
10
|
5
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
|
|
12
|
6
|
2
|
|
|
|
14
|
6
|
20
|
Sous-Total
|
14
|
8
|
23
|
8
|
5
|
2
|
2
|
1
|
44
|
19
|
63
|
TG
|
22
|
31
|
7
|
3
|
63
|
%
|
35%
|
49%
|
11%
|
5%
|
100%
|
Table n° 2 : REPARTITION DES BENEFICIAIRES PAR
SITUATION FAMILIALE366
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
Célibat
|
Mariage
|
Divorce
|
Veuvage
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
|
|
6
|
4
|
1
|
|
1
|
|
8
|
4
|
12
|
Temara
|
1
|
1
|
9
|
3
|
2
|
|
|
|
12
|
4
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
|
1
|
10
|
4
|
|
|
|
|
10
|
5
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
2
|
|
11
|
4
|
1
|
2
|
|
|
14
|
6
|
20
|
Total
|
3
|
2
|
36
|
15
|
4
|
2
|
1
|
0
|
44
|
19
|
63
|
%
|
8%
|
81%
|
9%
|
2%
|
|
|
|
Table n° 3 : REPARTITION DES BENEFICIAIRES PAR
AGE367
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
20-30
|
30-40
|
40-50
|
+ 50
|
TG
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
2
|
6
|
4
|
0
|
12
|
Temara
|
4
|
6
|
5
|
1
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
3
|
4
|
7
|
1
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
3
|
10
|
6
|
1
|
20
|
Total
|
12
|
26
|
22
|
3
|
63
|
%
|
19%
|
41%
|
35%
|
5%
|
|
365 Données tirées de l'enquête du terrain
(Zone de Rabat auprès des clients AlAmana MF, Juillet 2010)
366 Idem.
367 Ibid.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 194
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Table n° 4 : REPARTITION DES BENEFICIAIRES PAR
NIVEAU D'INSTRUCTION368
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
Sans
|
Primaire
|
Secondaire
|
Supérieur
|
TG
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
2
|
6
|
4
|
0
|
12
|
Temara
|
4
|
10
|
2
|
0
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
10
|
4
|
1
|
0
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
15
|
5
|
0
|
0
|
20
|
Total
|
31
|
25
|
7
|
0
|
63
|
%
|
49%
|
40%
|
11%
|
0%
|
|
Table n° 5 : REPARTITION DES BENEFICIAIRES SELON
REVENU MENSUEL369
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
- 1500
|
1500-2000
|
2000-2500
|
+2500
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
1
|
1
|
3
|
1
|
3
|
1
|
1
|
1
|
8
|
4
|
12
|
Temara
|
2
|
2
|
7
|
1
|
2
|
1
|
1
|
|
12
|
4
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
4
|
1
|
6
|
3
|
|
1
|
|
|
10
|
5
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
10
|
4
|
4
|
2
|
|
|
|
|
14
|
6
|
20
|
Total
|
17
|
8
|
20
|
7
|
5
|
3
|
2
|
1
|
44
|
19
|
63
|
%
|
40%
|
43%
|
12%
|
5%
|
100%
|
Table n° 6 : REPARTITION DES BENEFICIAIRES SELON
DEPENSE MENSUELLE370
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
- 1500
|
1500-2000
|
2000-2500
|
+2500
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
1
|
0
|
2
|
1
|
5
|
3
|
|
|
8
|
4
|
12
|
Temara
|
1
|
2
|
5
|
2
|
6
|
|
|
|
12
|
4
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
7
|
3
|
3
|
1
|
|
1
|
|
|
10
|
5
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
13
|
5
|
1
|
1
|
|
|
|
|
14
|
6
|
20
|
Total
|
22
|
10
|
11
|
5
|
11
|
4
|
|
|
44
|
19
|
63
|
%
|
51%
|
25%
|
24%
|
0%
|
100%
|
368 Données tirées de l'enquête du terrain,
op. cit.
369 Idem.
370 Ibid.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 195
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Table n° 7 : REPARTITION DES BENEFICIAIRES PAR
NATURE DE LOGEMENT371
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
Propriétaire
|
Non propriétaire
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
4
|
1
|
4
|
3
|
8
|
4
|
12
|
Temara
|
7
|
2
|
5
|
2
|
12
|
4
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
6
|
2
|
4
|
3
|
10
|
5
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
6
|
3
|
8
|
3
|
14
|
6
|
20
|
Total
|
23
|
8
|
21
|
11
|
44
|
19
|
63
|
%
|
51%
|
49%
|
100%
|
Table n° 8 : REPARTITION PAR NOMBRE D'ENFANTS A
CHARGE372
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
0
|
1 à 3
|
+ de 3
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
3
|
|
4
|
3
|
1
|
1
|
8
|
4
|
12
|
Temara
|
1
|
|
9
|
3
|
2
|
1
|
12
|
4
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
2
|
1
|
6
|
2
|
3
|
2
|
10
|
5
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
2
|
1
|
8
|
4
|
4
|
1
|
14
|
6
|
20
|
Total
|
7
|
2
|
27
|
12
|
10
|
5
|
44
|
19
|
63
|
%
|
14%
|
62%
|
24%
|
100%
|
Table n° 9 : REPARTITION DES BENEFICIAIRES PAR
TAILLE DU MENAGE373
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
- de 3
|
3 à 4
|
5 à 6
|
+ de 7
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
3
|
1
|
4
|
3
|
1
|
|
|
|
8
|
4
|
12
|
Temara
|
2
|
1
|
7
|
3
|
3
|
|
|
|
12
|
4
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
1
|
1
|
5
|
3
|
4
|
1
|
|
|
10
|
5
|
15
|
Sidi Yahia Zaer
|
2
|
|
5
|
4
|
4
|
1
|
3
|
1
|
14
|
6
|
20
|
Total
|
8
|
3
|
21
|
13
|
12
|
2
|
3
|
1
|
44
|
19
|
63
|
%
|
18%
|
54%
|
22%
|
6%
|
100%
|
371 Données tirées de l'enquête du terrain,
op. cit.
372 Idem.
373 Ibid.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 196
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Table n° 10 : REPARTITION PAR ANCIENNETE AU
PROGRAMME MICROCREDIT374
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
1 à 2
|
2 à 3
|
+ de 4 Cycles
|
|
TG
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
1
|
7
|
4
|
12
|
28
|
Temara
|
1
|
12
|
3
|
16
|
Rural
|
Skhirates
|
2
|
11
|
2
|
15
|
35
|
Sidi Yahia Zaer
|
10
|
6
|
4
|
20
|
Total
|
14
|
36
|
13
|
63
|
%
|
22%
|
57%
|
21%
|
100%
|
374 Données tirées de l'enquête du terrain,
op. cit.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 197
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXE n° 8 : Echantillonnage
Enquête auprès des
bénéficiaires du microcrédit (Association Alamana) :
Projet d'échantillonnage (cas Alamana MC)
1- Population
Données375 sur l'association
Alamana pour l'année 2009 :
- Nombre global des clients : 401.000
- Nombre de prêts : 408.000
·
|
Dont Femmes
|
:
|
167. 000 - 41
|
%
|
·
|
Dont prêts solidaires
|
:
|
169.000 - 41
|
%
|
o
|
Rural
|
:
|
86.000
|
- 51%
|
o
|
Urbain
|
:
|
83.000
|
- 49%
|
·
·
|
Clients nouveaux de la période :
Clients anciens de la période :
|
102.000
300.000
|
- 25%
- 75%
|
|
·
|
Clients non renouvelants de la période :
|
172.000
|
- 43%
|
|
·
|
Nombre de prêts en retard à 30 jrs :
|
22.000
|
- 5.4
|
%
|
·
|
Nombre de prêts radiés (impayés) :
|
34.000
|
- 8.3
|
%
|
|
Données376 sur l'association
Alamana pour l'année 2009 : - Nombre de prêts par
secteur d'activité : 407.000
o
|
Commerce
|
:
|
161.000
|
- 40%
|
o
|
Artisanat
|
:
|
64.000
|
- 16%
|
o
|
Services
|
:
|
59.000
|
- 14 %
|
o
|
Agriculture
|
:
|
124.000
|
- 30%
|
|
2- Echantillon
L'enquête faisant objet d'une partie du mémoire
reste principalement qualitative, les entretiens vont
toucher un échantillon de 100 bénéficiaires
du MC. Notre échantillon sera déterminée selon les
critères de : ancienneté au MC ; sexe ; zone ;
secteur d'activité comme suit :
- Ancienneté dans le programme : au moins
4 ans sans interruption
- Sexe : 75% des femmes et 25 % des hommes
- Zone : 50% rural et 50% urbain
- Secteur d'activité : 40% commerce ; 15%
agriculture ; 15% artisanat ; 30% services
L'échantillon sera tiré aléatoirement et
répartit comme suit :
- clients actifs (2009) : 72
- Clients nouveaux de la période 2009 :
8
- Clients non renouvelants (2009) :
8
- Clients en retard (PAR 30 jrs) (2009) :
8
- Clients radiés (impayés 2009) :
8
375 Site web Alamana : Tableau de bord Alamana Mai 2009
376 Rapport d'activité Alamana 2009
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 198
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Clients actifs : 72
Zone
|
Site
(Point de vente)
|
Commerce
|
Agriculture
|
Artisanat
|
Services
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub Mansour
|
5
|
2
|
4
|
1
|
2
|
1
|
2
|
1
|
13
|
5
|
18
|
Temara
|
5
|
2
|
4
|
1
|
2
|
1
|
2
|
1
|
13
|
5
|
18
|
Rural
|
Skhirates
|
5
|
2
|
4
|
1
|
2
|
1
|
2
|
1
|
13
|
5
|
18
|
Ain Aouda*
|
5
|
2
|
4
|
1
|
2
|
1
|
2
|
1
|
13
|
5
|
18
|
Total
|
20
|
8
|
16
|
4
|
8
|
4
|
8
|
4
|
52
|
20
|
72
|
Clients Non Renouvelants volontairement : 8
Zone
|
Site
|
Total
|
TG
|
Femme
|
Homme
|
Urbain
|
Temara
|
3
|
1
|
4
|
Rural
|
Skhirates
|
3
|
1
|
4
|
Total
|
6
|
2
|
8
|
Clients Nouveaux : 8
Zone
|
Site
|
Total
|
TG
|
Femme
|
Homme
|
Urbain
|
Yacoub M
|
3
|
1
|
4
|
Rural
|
Ain Aouda / S Yahya Zaer
|
3
|
1
|
4
|
|
|
6
|
2
|
8
|
Clients en retard 30j ( PAR 30jrs) : 8
Zone
|
Site
|
Total
|
TG
|
F
|
H
|
Urbain
|
Yacoub M
|
3
|
1
|
4
|
Rural
|
Ain Aouda / S Yahya Zaer
|
3
|
1
|
4
|
Total
|
6
|
2
|
8
|
Clients Radiés 2009 (Impayés 2009) :
8
Zone
|
Site
|
Total
|
TG
|
Femme
|
Homme
|
Urbain
|
Temara
|
3
|
1
|
4
|
Rural
|
Ain Aouda / S Yahya Zaer
|
3
|
1
|
4
|
Total
|
6
|
2
|
8
|
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Echantillon 1 : liste des clients
actifs
Zone :
Site (Point de Vente) :
N°
|
Nom et prénom
|
N°
du client
|
Ancienneté au MC (Nombre d'années)
|
Nombre de cycles (Nbre prêts)
|
Mt prêt actuel
|
Cycle du prêt Actuel (H/BM/M ...)
|
1
|
|
|
|
|
|
|
2
|
|
|
|
|
|
|
3
|
|
|
|
|
|
|
...
|
|
|
|
|
|
|
22
|
|
|
|
|
|
|
23
|
|
|
|
|
|
|
24
|
|
|
|
|
|
|
Echantillon 2 : liste des clients Non Renouvelants
volontairement
Zone :
Site (Point de Vente) :
N°
|
Nom et prénom
|
N° du client
|
Ancienneté au
MC (Nombre d'années)
|
Nombre de cycles
|
Mt prêt actuel
|
Cycle du prêt Actuel (H/BM/M
...)
|
1
|
|
|
|
|
|
|
2
|
|
|
|
|
|
|
...
|
|
|
|
|
|
|
11
|
|
|
|
|
|
|
12
|
|
|
|
|
|
|
Echantillon 3 : liste des clients Nouveaux
Zone :
Site (Point de Vente) :
N°
|
Nom et prénom
|
Observations
|
1
|
|
|
2
|
|
|
...
|
|
|
11
|
|
|
12
|
|
|
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 199
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 200
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Echantillon 4 : liste des clients en retard de
paiement ( PAR 30 jrs)
Zone :
Site (Point de Vente) :
N°
|
Nom et prénom
|
N° du client
|
Ancienneté au
MC (Nombre d'années)
|
Nombre de cycles
|
Mt prêt actuel
|
Cycle du prêt Actuel (H/BM/M
...)
|
1
|
|
|
|
|
|
|
2
|
|
|
|
|
|
|
...
|
|
|
|
|
|
|
11
|
|
|
|
|
|
|
12
|
|
|
|
|
|
|
Echantillon 5 : liste des clients
Radiés
Zone :
Site (Point de Vente) :
N°
|
Nom et prénom
|
N° du client
|
Ancienneté au
MC (Nombre d'années)
|
Nombre de cycles
|
Mt prêt actuel
|
Cycle du prêt Actuel (H/BM/M
...)
|
1
|
|
|
|
|
|
|
2
|
|
|
|
|
|
|
3
|
|
|
|
|
|
|
...
|
|
|
|
|
|
|
11
|
|
|
|
|
|
|
12
|
|
|
|
|
|
|
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 201
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXE n° 9 :
QUESTIONNAIRES377
|
|
- Site :
- Agent :
- Date :
|
- Ancienneté :
- Nbre prêts accordés :
- Interruption :
- Prêt actuel :
|
QUESTIONNAIRE DES CLIENTS ACTIFS (PRETS
SOLIDAIRES)
Clt n° :
CONDITIONS GENERALES DE L'ENQUETE :
Date et Heure de début de questionnement : Le
. . / . . / . . Heure de début d'interview : .
. h . . min.
I. Aspects de satisfaction
Jusqu'à quel point êtes-vous satisfait ou
non de... ?
1. Relation Client/Agent :
La Ponctualité Oui / Non
Niveau de Disponibilité Oui / Non
Services d'Information et de Conseil Oui /
Non
Respect des engagements Oui / Non
La Communication Oui / Non
L'implication et l'intérêt
porté au bien des clients Oui / Non
La Confidentialité et Discrétion ?
Oui / Non
Maintien de la qualité des rapports avec
les clients ? Oui / Non
Respect du client Oui / Non
Favoritisme ? Oui / Non
L'agent motive-t-il les clients à bien
utiliser leur prêt et à bien gérer leur activité ?
___ Oui / Non
Etes-vous encours de remboursement d'une autre
AMC ? Remarque : Oui / Non
L'agent sensibilise-t-il les clients aux dangers du
surendettement ? Oui / Non
Etes-vous globalement satisfait de la relation avec
l'agent ?
2. Procédures d'octroi des prêts :
Conditions d'accès Oui / Non
Condition de Solidarité Oui / Non
Délais d'Attente Entre l'inscription et
le déboursement Oui / Non
Processus d'octroi du prêt dans
l'ensemble Oui / Non
3. Produits offerts:
Montants accordés Oui / Non
Durée des prêts offerts ? Oui / Non
Montant des échéances Oui / Non
Périodicité des échéances? Oui /
Non
Coûts et Frais supportés Source
principale de coût : Oui / Non
Gamme de Produits Solidaires Offerts Oui / Non
377 Les questionnaires de l'enquête ont été
développés à partir des études sectorielles
réalisées par Planet Finance (2004) et Team Maroc (2009).
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
Etes vous satisfait des choix offerts actuellement par rapport au
besoin de financement approprié à votre
projet ? Oui / Non
II. Expérience vécue dans le programme:
1. Trouvez-vous le remboursement difficile? Oui / Non
2. Avez-vous déjà remboursé en
retard ? Oui / Non
3. Avez-vous déjà eu un problème avec un
membre du Groupe Solidaire ? (Dernier GS)
Oui / Non
4. Etes-vous globalement satisfait du programme du MC
dans son ensemble ?
Satisfaction du programme par rapport aux attentes
du client et aux offres concurrentes
éventuellement
III. Suggestions
1. Que suggérez-vous pour permettre d'améliorer
davantage la qualité des prestations du MC ?
IV. Représentations, Perceptions et avis :
1. MC et la femme
2. MC et amélioration du revenu du ménage
3. MC et dépenses imprévues
4. MC et dépenses ponctuelles ( rentrée scolaire,
ramadan, fêtes religieuses, ...)
5. Alamana MC
6. Prêt du groupe
7. Pauvreté
8. Epargne
9. Assurance
10. Principales dépenses ménagères
11. destination du prêt
*** MERCI BEAUCOUP POUR VOTRE COLLABORATION ***
Heure de fin d'interview : . . h
. . min.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 202
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 203
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
|
- Ancienneté :
- Nbre prêts accordés :
- Interruption :
- Prêt actuel :
|
- Site :
- Agent :
- Date :
|
QUESTIONNAIRE POUR LES NOUVEAUX
CLIENTS
Clt n° :
1. -Avez-vous déjà
bénéficié d'un prêt Al Amana ?
(Vérification)
1=Oui (Arrêter) 2 = Non
2. - Durant les 12 derniers mois, avez-vous participé
à d'autres programmes de microcrédit ou emprunté
auprès d'une institution financière ?
1= Oui Spécifier 2= Non
3. - Que saviez- vous sur le micro crédit ?
4. - Que comptez-vous faire avec le prêt MC ?
5. - Qu'attendez-vous de l'association Alamana ?
6. - Que connaissiez- vous de l'association Alamana
?
7. -Avez-vous une activité à
développer, un projet à créer, un métier à
faire valoir ?
8. - Qu'allez-vous faire sans le prêt d'Al Amana
?
9. - Pensez-vous que l'activité du microcrédit
de l'association Alamana est plutôt : ? activité de bienfaisance
(relations donnateurs/bénéficiaires) ? activité
commerciale (relation clts/frs)
? autres
10. - En général et
en vous basant sur les expériences des autres, comment qualifiez-vous
l'impact des prêts des associations de MC ?
1= Aident beaucoup les
gens
2= Les aident un peu
3= Ne les aident pas
4= Au contraire, le prêt est
une charge lourde
5= NSP
11. - Que voulez-vous ajouter a
propos des prêts des AMC ?
Les remercier pour leur temps
Répondre aux éventuelles questions ou soucis qu'ils
peuvent avoir concernant l'interview Date de réalisation :
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
|
- Ancienneté :
- Nbre prêts accordés :
- Interruption :
- Prêt actuel :
|
- Site :
- Agent :
- Date :
|
QUESTIONNAIRE DE SORTIE DES CLIENTS378
(VERSION PRETS SOLIDAIRES)
Circonstances de départ selon l'agent gérant :
[ ] Le Client a volontairement quitté le
groupe/programme
[ ] Groupe défaillant, donc le client a
quitté
[ ] Autre :
«Nous voudrions savoir un peu pourquoi vous avez
quitté le programme de prêt d'Al Amana pour que nous puissions
éventuellement le changer et l'améliorer dans l'avenir.
Prière de penser à toutes les raisons principales qui vous ont
poussé à décider de quitter le programme. Nous allons
combiner vos réponses avec celles des autres pour comprendre pourquoi
certains de nos clients quittent le programme. Nous vous garantissons la
confidentialité de vos réponses qui ne seront utilisées
qu'à des fins d'étude.»
1. Qui a principalement pris la décision que vous ne
participerez plus au programme ?
Pourquoi ?
2. Quelles sont les principales raisons pour lesquelles vous
avez quitté le programme?
? Problèmes avec la politique et procédures
d'Alamana
? Raisons personnelles:
? Problèmes avec le groupe solidaire:
? Raisons socio-économiques:
? Raisons liées à l'activité du client:
Votre avis sur le programme dans son
ensemble
3. Comment qualifiez-vous votre expérience de
participation dans le programme?
4. Pensez-vous que vous pourriez rejoindre le programme dans
l'avenir ?
5. Y a-t-il des changements spécifiques dans le programme
que vous exigez avant de rejoindre le programme.
378 Exclusivement pour les sortants volontaires
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 204
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
6. Encourageriez-vous quelqu'un d'autre à joindre ce
programme du MC ?
[ ] Oui [ ] Non [ ] Ne sais pas
7. D'après votre expérience et celle
d'autrui, la relation destinataires du microcrédit et AMC est
plutôt :
· Relation client_fournisseur
· Relation de bienfaisance sociale
· Relation à finalité le développement
de la société sans dépendance
· Relation fort_faible
· Autres
8. D'après votre
expérience et celle d'autrui, les prêts du microcrédit sont
plutôt :
· destinés à la création de la valeur
ajoutée (investissement)
· destinés à l'amélioration des
conditions de vie des bénéficiaires
· destinés à la consommation
· Autres
«Merci beaucoup de votre temps. Nous allons profiter de vos
réponses pour nous aider à améliorer notre programme pour
d'autres clients. »
Remarques relatives à :
Collaboration de l'agent concerné
Collaboration de ses collègues de la même antenne
Collaboration du client
Autre
*** MERCI BEAUCOUP POUR VOTRE COLLABORATION *** Heure de
fin d'interview : . . h . . min.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 205
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 206
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
|
- Ancienneté :
- Nbre prêts accordés :
- Interruption :
- Prêt actuel :
|
- Site :
- Agent :
- Date :
|
QUESTIONNAIRE DES CLIENTS EN SITUATION DE RETARD DE
PAIEMENT (IMPAYES)
(PRETS SOLIDAIRES)
Clt n° :
«Nous voudrions savoir un peu pourquoi vous avez
quitté le programme de prêt d'Al Amana pour que nous puissions
éventuellement le changer et l'améliorer dans l'avenir.
Prière de penser à toutes les raisons principales qui vous ont
poussé à décider de quitter le programme. Nous allons
combiner vos réponses avec celles des autres pour comprendre pourquoi
certains de nos clients quittent le programme. Nous vous garantissons la
confidentialité de vos réponses qui ne seront utilisées
qu'à des fins d'étude.»
1. Y a-t-il une valeur ajoutée à cause du MC dans
ta vie ?
2. Quelles sont les causes de cette situation de retard dans le
paiement de votre prêt MC ?
Votre avis sur le programme du MC :
3. Comment qualifiez-vous votre expérience de
participation dans le programme?
4. Pensez-vous que les destinataires du programme auront
tirés des bénéfices ?
5. Pensez vous que les prêts du MC permettent ils
de rentabiliser les activités des bénéficiaires
?
6. D'après votre expérience et celle
d'autrui, quelle est la nature de la relation destinataires du
microcrédit et AMC ?
«Merci beaucoup de votre temps. Nous allons profiter de vos
réponses pour nous aider à améliorer notre programme pour
d'autres clients. »
Remarques de l'enquêteur :
Collaboration de l'agent concerné
Collaboration de ses collègues de la même antenne
Collaboration du client
Autre
*** MERCI BEAUCOUP POUR VOTRE COLLABORATION *** Heure de
fin d'interview : . . h . . min.
Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master
Spécialisé Management du Développement Social 207
Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance
Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
ANNEXE n° 10 : Organigramme379 AlAmana
Microfinance
379 Site web AlAmana. op.cit.(Juillet 2011)
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