SIGLES ET ABREVIATIONS
% : pourcentage
Art. : Article
ASOP : Action Sociale et d'Organisation Paysanne
CNKI : Comité National du Kivu
CAB : Comité Anti Bwaki
DCSRP: Document de stratégie et de croissance pour la
réduction de la pauvreté
ETD : Entité Territoriale
Décentralisée
RDC: République Démocratique du Congo
RTNC : Radiotélévision Nationale Congolaise
USAID: Département des Nations Unies pour l'Aide
humanitaire
IADL: Initiative et Action pour le Développement
IPAPEL : Inspection Provinciale de l'Agriculture, Pêche
et Elevage
IFDP : Innovation et Formation pour le Développement et
la Paix
ONU : Organisation de Nations Unies
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
OGP : Observatoire Gouvernance et Paix
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
Développement
SENASEM : Service National des Semences
SOMIKI : Société Agricole Minière du
Kivu
FAO : Fond des Nations Unies pour l'Alimentation et
l'Agriculture
Sprl : Société Privée à
Responsabilité Limitée
1
INTRODUCTION
I. PROBLEMATIQUE
La République Démocratique du Congo s'est
doté d'un code foncier depuis ces deux dernières
décennies, c'est-à-dire d'un corpus des règles
régissant le secteur foncier. Cette intervention du législateur
comble une lacune qu'on appellerait dualité juridique entre les
règles foncières coutumières reconnaissant que la terre
fait l'objet d'un droit de propreté collective dont chaque habitant du
terroir villageoise dispose en tant que membre du corps social de la
communauté, et le droit foncier permettant l'octroi par l'Etat d'un
droit de jouissance de la terre sous forme d'une concession foncière
individuelle1. Toutefois, la coexistence de deux systèmes de
normes foncières, celle de l'Etat et celle de la coutume (le pluralisme
juridique) reste a souligné. En vue de préserver
l'intégrité des domaines fonciers des communautés locales,
le législateur exclut du régime du certificat d'enregistrement
l'appropriation individuelle des terres agricoles sur les terres des
communautés locales. En d'autres mots, ce sont les règles
coutumières qui s'appliquent à ces terres.
Ceci revient en fait à reconduire le dualisme juridique
en matière foncière que la loi du 20 juillet 1973 a aboli en
domanialisant les terres des communautés locales. Ce faisant, le
législateur viole le principe constitutionnel de l'égalité
des citoyens devant la loi en ce sens qu'il offre une sécurité
juridique plus faible aux titulaires des droits fonciers coutumiers. La
plasticité des coutumes est en effet source d'insécurité
juridique. De même les inégalités que consacre le
système traditionnel trouvent là un fondement juridique pour se
reproduire et se perpétuer2. Face à cet échec
de tentative de gestion étatique du foncier, il est rarement
prôné une meilleur prise en compte des systèmes foncier
coutumiers, mais d'une compréhension suffisamment claire des logiques et
de la dynamique de ces systèmes, ce souci débouche sur des
erreurs d'interprétation, des biais opérationnels au des effets
contraires à ce qui était souhaité.3
Relativement à cet aspect en effet, au Bushi, la coutume par devers de
la
1 MAFIKIRI TSONGO, Mouvement de population,
accès à la terre et question de la nationalité au Kivu
in Démocratie, enjeux fonciers et pratiques locales en Afrique,
Paul MATHIEU et al Institut Africain-CEDAF, Harmatan Paris,
Bruxelles-Brussel décembre 1996, p181
2 MUGANGU MATABARO Séverin,
législation et politique agricole en RDC : Examen critique du projet
de code agricole, p.6
3 JEAN-PIERRE CHAUVEAU, la logique des
systèmes coutumiers in Philippe Lavigne DELVILLE, quelles
politiques foncières pour l'Afrique rurale ?, KARTHALA-COOPERATION
FRANCAISE, p66
2
législation, continue à jouer un rôle
prépondérant dans la gestion des terres et l'arbitrage des
conflits fonciers, les chefs locaux se considèrent désormais
comme de véritables propriétaires des terres de la tribu au point
de s'estimer apte à les aliéner4.
En dépit de cette dualité ayant comme
conséquence, à savoir la confusion des règles de gestion
foncière, un accroissement de l'insécurité en
matière de possession et d'utilisation de la terre, la permanence et la
recrudescence des conflits fonciers,... ils s'observe de nos jours une
pluralité des pratiques et contrats foncières traditionnel, qui
sont au sens de Max Weber des contrats de fraternisation, se transforment en
contrat fonction entraînant des malentendus et des conflits5 ;
c'est ainsi qu'est né plusieurs types des contrats foncier, dont
certains ont caractère politique (mulagiro et kalinzi), d'autre par
contre seraient essentiellement économiques (l'obuhashe, le bwigwarhire
et le bwassa).ces pratiques foncières ne réfèrent ni
à la coutume ni à la loi mais sont légitimées aussi
bien par les tribunaux modernes que par les tribunaux
coutumiers6 . Ces pratiques mettent en rapport
différents acteurs (autorités politico-foncière,
autorité coutumière, commerçants, paysans, militaire, ...)
qui tentent pendant ce temps de concrétiser une maitrise du sol à
travers des pratiques très variables. Ceux qui sont à même
de manipuler les rouages de l'administration s'approprient et «
thésaurisent » des espaces en milieu rural en se fondant sur le
droit de l'état.7
Dans la chefferie de Ngweshe! territoire de walungu qui
constitue notre zone de recherche, l'agriculture constitue la principale
activité économique de la population. On note d'une part, les
cultures vivrières et d'autre part les cultures
industrielles.8
La production agricole accuse un déficit pour toutes
les cultures qui constituent une alimentation de base de la population. La
situation agricole et! ou alimentaire est au plus bas niveau en août,
septembre et octobre (cfr calendrier agricole en annexe). Rare sont les
ménages qui se constituent une réserve alimentaire. Ce
déficit est assez énorme. Presque tous les produits de
consommation dans les ménages proviennent de la ville de Bukavu qui les
importe à partir du Nord-Kivu ou du Rwanda.
4 MUGANGU MATABARO Séverin, la gestion
foncière rurale au zaïre : reforme juridique et pratiques
foncières locales cas du Bushi, Louvain-la- neuve, Academia
-Brylant, 1997, p3
5 MUGANGU MATABARO Séverin, la crise
foncière à l'est de la RDC, 2008, p14
6 Ibidem, op cit, p18
7 Ibidem, op cit, p5
8 OBSERVATOIRE GOUVERNANCE ET PAIX (OGP asbl),
étude socio-économique des groupements Mushinga, Lubona,
Kaniola, Burhale, Mulamba, Tubimbi et Luntukulu en chefferie de ngweshe,
Misereor, p25.
9 DANIEL Gaye, la pauvreté rurale et
insécurité alimentaire au Sud-Kivu : situation des milieux
précarisés à l'est de la RDC, Louvain
développement, 2008, P.16-17.
3
En ce qui concerne les cultures industrielles qu'on rencontre
généralement dans la zone. Ces dernières sont
vouées quasi exclusivement à l'exportation, sont en
régression et limitées au thé, au café et au
quinquina. Relativement aux contraintes à la promotion de
l'activité agro-pastorale, le système agricole de la zone
d'étude est caractérisé par une association des cultures
de type extensif et faiblement productif9au point de se demander si
les pratiques foncières ne sont-elles pas responsables de cette
régression ?
De ce qui précède et tenant compte de l'ampleur
des problèmes liés aux pratiques foncières locales en
milieu rural, le questionnement suivant va constituer l'objet de notre
recherche :
1. La législation foncière a-t-elle un impact sur
le développement de l'agriculture à walungu/chefferie de ngweshe
?
2. Quel est l'impact des pratiques en marge de la loi sur la
production agricole à walungu/chefferie de ngweshe ?
3. Que faudrait-il faire pour que les pratiques
foncières locales actuelles influent positivement sur la production
agricole des ménages à walungu/chefferie de ngweshe ?
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