République
Démocratique du Congo
Enseignement Supérieur Universitaire et
Recherche Scientifique Instituts Supérieurs Techniques
Institut Supérieur de Développement Rural
de Bukavu
ISDR-Bukavu
B.P 2849/BUKAVU
LES PRATIQUES FONCIERES LOCALES EN MILIEU RURAL ET
LEUR IMPACT SUR LE DEVELOPPEMENT AGRICOLE CAS DE LA CHEFFERIE DE
NGWESHE
PAR : BUBALA WILONDJA Isaac
DIRECTEUR: Prof. Dr.
MUGANGU MATABARO Séverin Professeur
ordinaire
Docteur en sciences du Développement
Année académique : 2015-2016
Mémoire présenté et défendu en vue de
l'obtention du Diplôme de Licencié en
Développement Rural
Option: Planification Nationale et
Régionale
Niveau de technicité : A0
Amon père et ma
mère.
Pour l'exemple d'abnégation et de
service.
Ames frères, soeurs, cousins, neveux
pour tant d'affections, de dévouements et sacrifices
;
Aboniface cirhegereza.
En souvenir d'une amitié
sincère
Je dédie ce travail
REMERCIEMENTS
Le présent travail a bénéficié de
la précieuse collaboration sous diverses formes de nombreuses personnes.
Nous tenons à leur rendre ici un hommage mérité pour leur
disponibilité et leurs encouragements sans lesquelles nous ne serions
pas arrivés au bout de l'ouvrage.
Le professeur Ordinaire Séverin MUGANGU MATABARO notre
directeur a dirigé notre travail dès la conception du sujet
jusqu'à la fin de ce travail, il fait également partager sa
passion pour les problèmes foncier de la RDC. Le fond et la forme de ce
travail doivent beaucoup à ses conseils. Qu'il trouve ici l'expression
de notre immense gratitude.
Nous remercions très vivement le professeur Espoir
BISIMWA BASENGERE et le C.T. BUGEME ZIGASHANE, lecteurs, dont les critiques
pertinentes ont contribué à améliorer notamment les
aspects liés à la forme de notre travail.
Nos vifs remerciements vont également à BALAGIZI
MUHIMUZI Bagi., HERI CHALAZIRE sylvestre, AMANI MACUMU Germain, Assistant
KAPINGA SHAIDI et à la famille KAHINDO Bin KANYERE. Qui nous ont
apporté appui et réconfort à des moments de doute et de
détresse. Elle retrouvera en ces lignes les témoignages de notre
reconnaissance.
Nous pensons aussi à toutes les personnes qui, de
près et de loin, nous ont apporté leur aide et leur soutien. Nous
disons en particulier un tout grand merci à :
? Tout le personnel académique, administratif et
scientifique de l'institut supérieur de développement rural de
Bukavu dont nous garderons longtemps les souvenirs d'une efficacité et
dynamique exemplaires,
? Tous nos amis et toutes nos connaissances,
? Tous nos collègues, spécialement BAZILERE
BAHULISIRE Jean de Dieu, BALOLEBWAMI MANENO Arsène, BISIMWA KENDAKENDA
Janvier, CUMA JANVIER Jean jacques richel, BUHERWA EKA Solange, MUKUZO KALIMIRA
Marina, MWANAHANO KASHAFALI Harmine, OLIVIER ITULAMYA, ORHACIFUNYIRE TEGANYI
Jean Esther, BUBALA KAZAMWALI Bienfait, NSIKU KATUKU David, BIRHU BYAMUNGU
pascal, BISIMWA MATABISHI Christian, pour le moment partagés avec
eux.
La présence à nos côtés des amis du
quartier nous a apporté un grand réconfort. Nous nous en
voudrions de ne pas remercier spécialement Olivier MUTIKI, SHUKURU
MBIRIBINDI walcott, Christian MAGAMBO. Pour tout ce qu'ils sont pour nous.
BUBALA WILONDJA ISAAC
RESUME
Depuis plusieurs décennies des écrits des
auteurs comme MAFIKIRI T. (1996), KALAMBAY G. (1973), J.P. KIFWABALA (2015),
FAO (2008), MUGANGU M. (1997), (2008) et (2014), etc. rapportent qu'il y a une
dualité juridique entre le droit réel foncier et la coutume en
matière foncière. Ces deux normes n'arrivent pas à
apporter la sécurité juridique sur le statut des terres rurales
mais laisse ce dernier dans une situation confuse et reste source des nombreux
conflits fonciers qui se vit actuellement dans tous les milieux ruraux du Bushi
en Général et particulièrement dans toute la
collectivité de Ngweshe. L'on remarque d'une part la
prolifération des nombreuses pratique en marge de la loi et les modes
d'accès à la terre qui ne sont au profit des tous, ces derniers
sont au profit de la bourgeoisie urbaine et épargne certains paysans qui
ne vient que de l'agriculture à accéder équitablement
à la terre et a développé le secteur agricole.
Pour faire face à ce défi, les acteurs
passionnés de la gestion foncière décentralisée
continuent à mettre un accent particulier sur le plaidoyer pour la
réforme foncière à fin de sortir les paysans dans
l'impasse où ils se retrouvent.
En vue de mieux appréhender cette situation, nous avons
procédé à l'analyse de la gestion foncière dans la
collectivité de Ngweshe et trois objectifs ont été
poursuivis : Déterminer l'impact de la législation
foncière sur le développement de l'agriculture à
walungu/chefferie de ngweshe, Déterminer l'impact des pratiques
foncières en marge de la loi sur la production agricole dans le
territoire de walungu/chefferie de ngweshe et Proposer les mesures à
prendre pour que les pratiques foncières locales influent positivement
à la production agricole dans le territoire de walungu/chefferie de
ngweshe sud- Kivu.
Nos résultats confirment l'existence d'une crise
foncière si nous prenons en considération les modes
d'accès à la terre, les spoliations des terres rurales par la
nouvelle bourgeoisie, les différents conflits fonciers, les superficies
des parcelles exploitée par les ménages, l'évolution du
rendement des cultures.
Il y a une amélioration progressive à la
sécurisation foncière des ménages et à la diffusion
des nouvelles techniques culturales, initiative faite par certains ONG
intervenant dans le milieu mais cette initiative n'a pas encore trouver gain de
cause.
BUBALA WILONDJA ISAAC
Quatre stratégies ont été
développées dans cette étude comme voies de sorties :
l'amélioration de la sécurité foncière,
réduire les conflits fonciers et promouvoir le développement
local, le renforcement de l'encadrement agricole au sein des ménages, la
facilitation aux ménages ruraux a l'accès au crédit
agricole et aux intrants, et une réforme agraire par remembrement et/ ou
redistribution.
Cette étude a le mérite de présenter
l'Etat de lieu du Régime foncier en RDC, les pratiques foncières
locale en milieu rural, l'impact des pratiques foncières locale sur la
production agricole à Ngweshe et proposer les stratégies de
l'amélioration de la production agricole a Ngweshe en territoire de
Walungu.
BUBALA WILONDJA ISAAC
SIGLES ET ABREVIATIONS
% : pourcentage
Art. : Article
ASOP : Action Sociale et d'Organisation Paysanne
CNKI : Comité National du Kivu
CAB : Comité Anti Bwaki
DCSRP: Document de stratégie et de croissance pour la
réduction de la pauvreté
ETD : Entité Territoriale
Décentralisée
RDC: République Démocratique du Congo
RTNC : Radiotélévision Nationale Congolaise
USAID: Département des Nations Unies pour l'Aide
humanitaire
IADL: Initiative et Action pour le Développement
IPAPEL : Inspection Provinciale de l'Agriculture, Pêche
et Elevage
IFDP : Innovation et Formation pour le Développement et
la Paix
ONU : Organisation de Nations Unies
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
OGP : Observatoire Gouvernance et Paix
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
Développement
SENASEM : Service National des Semences
SOMIKI : Société Agricole Minière du
Kivu
FAO : Fond des Nations Unies pour l'Alimentation et
l'Agriculture
Sprl : Société Privée à
Responsabilité Limitée
1
INTRODUCTION
I. PROBLEMATIQUE
La République Démocratique du Congo s'est
doté d'un code foncier depuis ces deux dernières
décennies, c'est-à-dire d'un corpus des règles
régissant le secteur foncier. Cette intervention du législateur
comble une lacune qu'on appellerait dualité juridique entre les
règles foncières coutumières reconnaissant que la terre
fait l'objet d'un droit de propreté collective dont chaque habitant du
terroir villageoise dispose en tant que membre du corps social de la
communauté, et le droit foncier permettant l'octroi par l'Etat d'un
droit de jouissance de la terre sous forme d'une concession foncière
individuelle1. Toutefois, la coexistence de deux systèmes de
normes foncières, celle de l'Etat et celle de la coutume (le pluralisme
juridique) reste a souligné. En vue de préserver
l'intégrité des domaines fonciers des communautés locales,
le législateur exclut du régime du certificat d'enregistrement
l'appropriation individuelle des terres agricoles sur les terres des
communautés locales. En d'autres mots, ce sont les règles
coutumières qui s'appliquent à ces terres.
Ceci revient en fait à reconduire le dualisme juridique
en matière foncière que la loi du 20 juillet 1973 a aboli en
domanialisant les terres des communautés locales. Ce faisant, le
législateur viole le principe constitutionnel de l'égalité
des citoyens devant la loi en ce sens qu'il offre une sécurité
juridique plus faible aux titulaires des droits fonciers coutumiers. La
plasticité des coutumes est en effet source d'insécurité
juridique. De même les inégalités que consacre le
système traditionnel trouvent là un fondement juridique pour se
reproduire et se perpétuer2. Face à cet échec
de tentative de gestion étatique du foncier, il est rarement
prôné une meilleur prise en compte des systèmes foncier
coutumiers, mais d'une compréhension suffisamment claire des logiques et
de la dynamique de ces systèmes, ce souci débouche sur des
erreurs d'interprétation, des biais opérationnels au des effets
contraires à ce qui était souhaité.3
Relativement à cet aspect en effet, au Bushi, la coutume par devers de
la
1 MAFIKIRI TSONGO, Mouvement de population,
accès à la terre et question de la nationalité au Kivu
in Démocratie, enjeux fonciers et pratiques locales en Afrique,
Paul MATHIEU et al Institut Africain-CEDAF, Harmatan Paris,
Bruxelles-Brussel décembre 1996, p181
2 MUGANGU MATABARO Séverin,
législation et politique agricole en RDC : Examen critique du projet
de code agricole, p.6
3 JEAN-PIERRE CHAUVEAU, la logique des
systèmes coutumiers in Philippe Lavigne DELVILLE, quelles
politiques foncières pour l'Afrique rurale ?, KARTHALA-COOPERATION
FRANCAISE, p66
2
législation, continue à jouer un rôle
prépondérant dans la gestion des terres et l'arbitrage des
conflits fonciers, les chefs locaux se considèrent désormais
comme de véritables propriétaires des terres de la tribu au point
de s'estimer apte à les aliéner4.
En dépit de cette dualité ayant comme
conséquence, à savoir la confusion des règles de gestion
foncière, un accroissement de l'insécurité en
matière de possession et d'utilisation de la terre, la permanence et la
recrudescence des conflits fonciers,... ils s'observe de nos jours une
pluralité des pratiques et contrats foncières traditionnel, qui
sont au sens de Max Weber des contrats de fraternisation, se transforment en
contrat fonction entraînant des malentendus et des conflits5 ;
c'est ainsi qu'est né plusieurs types des contrats foncier, dont
certains ont caractère politique (mulagiro et kalinzi), d'autre par
contre seraient essentiellement économiques (l'obuhashe, le bwigwarhire
et le bwassa).ces pratiques foncières ne réfèrent ni
à la coutume ni à la loi mais sont légitimées aussi
bien par les tribunaux modernes que par les tribunaux
coutumiers6 . Ces pratiques mettent en rapport
différents acteurs (autorités politico-foncière,
autorité coutumière, commerçants, paysans, militaire, ...)
qui tentent pendant ce temps de concrétiser une maitrise du sol à
travers des pratiques très variables. Ceux qui sont à même
de manipuler les rouages de l'administration s'approprient et «
thésaurisent » des espaces en milieu rural en se fondant sur le
droit de l'état.7
Dans la chefferie de Ngweshe! territoire de walungu qui
constitue notre zone de recherche, l'agriculture constitue la principale
activité économique de la population. On note d'une part, les
cultures vivrières et d'autre part les cultures
industrielles.8
La production agricole accuse un déficit pour toutes
les cultures qui constituent une alimentation de base de la population. La
situation agricole et! ou alimentaire est au plus bas niveau en août,
septembre et octobre (cfr calendrier agricole en annexe). Rare sont les
ménages qui se constituent une réserve alimentaire. Ce
déficit est assez énorme. Presque tous les produits de
consommation dans les ménages proviennent de la ville de Bukavu qui les
importe à partir du Nord-Kivu ou du Rwanda.
4 MUGANGU MATABARO Séverin, la gestion
foncière rurale au zaïre : reforme juridique et pratiques
foncières locales cas du Bushi, Louvain-la- neuve, Academia
-Brylant, 1997, p3
5 MUGANGU MATABARO Séverin, la crise
foncière à l'est de la RDC, 2008, p14
6 Ibidem, op cit, p18
7 Ibidem, op cit, p5
8 OBSERVATOIRE GOUVERNANCE ET PAIX (OGP asbl),
étude socio-économique des groupements Mushinga, Lubona,
Kaniola, Burhale, Mulamba, Tubimbi et Luntukulu en chefferie de ngweshe,
Misereor, p25.
9 DANIEL Gaye, la pauvreté rurale et
insécurité alimentaire au Sud-Kivu : situation des milieux
précarisés à l'est de la RDC, Louvain
développement, 2008, P.16-17.
3
En ce qui concerne les cultures industrielles qu'on rencontre
généralement dans la zone. Ces dernières sont
vouées quasi exclusivement à l'exportation, sont en
régression et limitées au thé, au café et au
quinquina. Relativement aux contraintes à la promotion de
l'activité agro-pastorale, le système agricole de la zone
d'étude est caractérisé par une association des cultures
de type extensif et faiblement productif9au point de se demander si
les pratiques foncières ne sont-elles pas responsables de cette
régression ?
De ce qui précède et tenant compte de l'ampleur
des problèmes liés aux pratiques foncières locales en
milieu rural, le questionnement suivant va constituer l'objet de notre
recherche :
1. La législation foncière a-t-elle un impact sur
le développement de l'agriculture à walungu/chefferie de ngweshe
?
2. Quel est l'impact des pratiques en marge de la loi sur la
production agricole à walungu/chefferie de ngweshe ?
3. Que faudrait-il faire pour que les pratiques
foncières locales actuelles influent positivement sur la production
agricole des ménages à walungu/chefferie de ngweshe ?
II. HYPOTHESES
1. N'étant pas précis sur le statut des terres
rurales, la législation foncière laisse la gestion
foncière rurale dans une situation confuse au point que les
autorités locales s'estime aptes à exercer une main mise sur le
foncier qui impact négativement sur le développement agricole
dans le territoire de walungu/chefferie de ngweshe.
2. Les pratiques en marge de la loi se fondant sur un rapport
clientéliste et de fraternisation impact nullement sur la production
agricole car ne donne pas la latitude à tous les paysans
d'accéder légalement et équitablement à la terre
pour y développer les activités agricoles.
3. A travers ces pratiques informelles (en marge de la loi),
il se remarque un ordre imposé par les autorités
coutumières à walungu/chefferie de ngweshe. Ainsi obligation est
faite aux juristes congolais d'être créatifs et innovateurs pour
apporter la sécurité juridique aux exploitants paysans en
promouvant les droits fonciers des hommes et femmes par le développement
et la mise en oeuvre des politiques foncières équitables,
renforcer l'encadrement agricole au
4
sein des ménages, faciliter aux ménages
d'accéder aux crédits agricoles, et faire une réforme
foncière notamment par remembrement et/ou redistribution des terres afin
que les pratiques foncières locales influent positivement à la
production agricole des ménages a walungu/chefferie de ngweshe.
III. OBJECTIF DU TRAVAIL Objectif global :
Ce travail poursuit comme objectif global de contribuer au
développement de la production agricole dans le territoire de
walungu/chefferie de ngweshe Sud-Kivu.
1. Objectifs spécifiques :
1. Déterminer l'impact de la législation
foncière sur le développement de l'agriculture à
walungu/chefferie de ngweshe.
2. Déterminer l'impact des pratiques foncières en
marge de la loi sur la production agricole dans le territoire de
walungu/chefferie de ngweshe.
3. Proposer les mesures à prendre pour que les
pratiques foncières locales influent positivement à la production
agricole dans le territoire de walungu/chefferie de ngweshe sud- Kivu.
IV. CADRE THEORIQUE :
Pour les théories évolutionnistes des droits sur
la terre, on assiste sous l'influence de la croissance démographique et
du marché, à une évolution progressive des système
de propriété commune vers une généralisation de la
propriété privée, individuelle et familiale,
parallèlement à une effritement puis une disparition du
rôle des autorités coutumières. Cette évolution
n'est encore que partielle, ce qui explique le caractère «
imparfait » de la transformation de la terre en bien marchand. Ces
symptômes (persistance de gestion communautaire sur certaines portion de
territoire ; résistance à la vente de la communauté,
caractère réversible des « vente » de terre ;
persistances des relations clientéliste entre acheteur et vendeur, etc.)
sont de signes d'une situation transitoire avant le développement d'une
véritable marché foncier.
Ces théories reposent sur un fondement
d'économie néoclassique, pour qui le marché
représente la forme économique la plus efficace. Dans leur
formulation la plus libérale, le passage à la
propriété privée se fait spontanément, par les jeux
des acteurs. Cette évolution se
10 PHILIPPE Lavigne Delville, Quelle politique
foncière pour l'Afrique Rurale ? Réconcilier pratiques,
légitimité et l'égalité, KARTHALA- COOPERATION
FRANCAISE, PARIS, 1998, P.29-30.
5
déroule plutôt bien, malgré des conflits
révélateurs d'une adaptation en marche, et une intervention de
l'Etat risquerait plutôt de compliquer la situation et de créer de
nouvelles imperfections. Plus récemment, une nouvelle formulation en a
été faite, d'inspiration institutionnaliste, pour mieux rendre
compte des réalités empiriques, en s'appuyant sur les
théories récente de l'innovation institutionnelle induite ».
Dans cette optique, la compétition croissante entraine des
revendications contradictoires sur un même espace des incertitudes sur
les droits fonciers (qui sont en phase de transitions : ils ne sont ni
l'application des principes coutumières, ni l'expression du droit
moderne).
Cette situation aboutit à une multiplication des
conflits et une surexploitation des ressources, ce qui provoque une demande
d'innovation institutionnelle, le producteur demande (explicitement ou non)
à l'Etat d'intervenir, et de mettre en place un régime de
propriété privée, par des procédures
d'enregistrement ou de délivrance des titres. Une telle intervention
permet de rétablir la paix sociale, en clarifiant les droits, ce qui
facilite la transition foncière au profit des exploitants dynamiques et
permet l'accès au crédit, le tout encourageant les
investissements dans la terre et les gains de productivité.
Même si elles diffèrent sur la capacité
spontanée des systèmes fonciers à se métamorphoser
(et donc sur le rôle de l'Etat dans cette transformation), ces deux
variantes des théories évolutionnistes reconnaissent le
caractère dynamique, flexible, adaptatif des systèmes fonciers
locaux. Elles se placent dans une perspective de « transition » vers
une généralisation privée, les systèmes «
propriété commune », dont elles reconnaissent
l'efficacité en situation de faible pression démographique,
devenant obsolètes (tant du point de vue de leur efficacité
sociale que de leurs performances économiques) dès que la
pression sur les ressources s'accroit.
Les théories standards de l'évolution des droits
fonciers ont été critiquées à la fin des
années 80 parce qu'elles « n'ont guère eu jusqu'à
présent de validation empirique ». Leurs formulations sous
l'optique de « l'innovation institutionnelle induite s'appuie sur les
études empiriques récentes des situations foncières,
menées surtout dans le contexte asiatique. Ses prédictions
n'avaient pas reçu de validation empirique en contexte africain, et les
vérifier était un des objectifs récents de la Banque
mondiale10 .
6
V. METHODOLOGIE DU TRAVAIL 1. Brève
présentation du milieu :
La collectivité chefferie de Ngweshe est l'une des 20
collectivités et secteurs qui composent le Sud-Kivu située
à 2°35' de latitude Sud et à 28°40' de longitude Est et
dont l'altitude varie entre 1000 et 2500m. La collectivité de Ngweshe
est délimitée au Nord par le Territoire de Kabare avec le
groupement Kamisimbi, au sud par les Territoires de Mwenga et de Shabunda, avec
les groupements Tubimbi et Mulamba. A L'ouest par le Territoire de Kabare avec
les groupements de Kaniola, Izege et Ikoma, à l'est par la
collectivité de Kaziba avec les groupements d'Irongo et luciga et au
Nord-est par la République du Rwanda et du Burundi, le Territoire
d'Uvira avec les groupements Karhongo et Kamanyola. La collectivité de
Ngweshe est dominée par une topographie formée de collines,
plateaux et un relief plus ou moins accentué constitué de hautes
montagnes dont les sommets les plus élevés sont les monts Nidunga
(2300m) et Mulume Munene (2500m). Quelques groupements présentent de
fortes Pentes et certains endroits sont très accidentés parmi eux
Kaniola, Izege, Luciga, Karhongo, Rubimbi et Mushinga. Dans les bas-fonds on
dénombre 4 grands marais (Cidorho, Nyamubanda, cisheke et Nyalugana) qui
à eux seuls couvrent plus de 4.000 hectares.
En général le climat de Ngweshe est humide
caractérisé par l'alternance de deux saisons : une saison
sèche et une saison des pluies. La saison sèche connaît une
température élevée et une rareté de pluies durant
toute cette période. C'est à ce moment qu'on cultive les endroits
marécageux. La saison de pluie dure 9 mois à partir de septembre,
mais il s'observe une courte saison sèche d'environ 3 semaines au mois
de mars. Les précipitations moyennes annuelles variant entre 900 et 1500
mm des pluies par an. La température moyenne annuelle est comprise entre
190C et 230C. En ce qui concerne les sols, on remarque que dans la
collectivité de Ngweshe, il y a une grande complexité des
variétés des sols, mais de façon général on
y rencontre des sols argilo-sablonneux du type latérite rouge, les sols
noir meubles, les sols caillouteux et les sols alluvionnaires dans les marais
et bas-fonds. En général le sol de Ngweshe est argileux et de
plus en plus pauvre à cause des érosions et de la surpopulation.
C'est ainsi qu'il y a beaucoup de conflits foncier dans ce territoire et
l'élevage diminue sensiblement par manque de pâturages. Sur le
plan administratif, A côté de l'autorité administrative
dont l'Administrateur de Territoire actuel Mr ELONGO NSANA, il y a les
autorités coutumières. Ainsi à la tête de la
collectivité chefferie de Ngweshe, il y a le Mwami (roi) en l'occurrence
le Mwami MUHIGIRHWA NDATABAYE WEZA III. Actuellement la collectivité de
Ngweshe compte 456.660 habitants avec une densité supérieure 250
hab. au
7
km2. Il faut signaler que Ngweshe est l'une des
collectivités qui a une des densités les plus
élevées en RD Congo. Sa population croît de manière
exponentielle et à une vitesse vertigineuse (elle a doublée en 27
ans) par rapport aux terres disponibles et aux infrastructures sociales
existantes. Dans la collectivité de Ngweshe, l'agriculture constitue la
principale activité de la population. Parmi les cultures de base on
cite, le manioc, la banane, le haricot et la patate douce. Le bananier est
cultivé sur toute l'étendue de la chefferie de Ngweshe mais il se
trouve attaqué par les cosmopolites sordidus. Elle peut couvrir 70 % de
la superficie cultivable. Les conditions écologiques de la
collectivité sont en général très favorables aux
cultures maraîchères dans les marais d'altitude et la plaine de la
Ruzizi. En dehors de ces dernières, il y a la présence
remarquée des cultures commerciales et industrielles telles que le
thé, quinquina et café. Mais ces derniers temps, les cultures
sont quasi abandonnées suite notamment au climat
généralisé d'insécurité qui a poussé
les exploitants à les abandonner. S'agissant du régime foncier au
Bushi, la terre appartient en principe au Mwami et son clan, les habitants
accèdent aux terres par héritage. Les autres personnes
acquièrent le droit d'exploitation et de jouissance des terres
grâce à 3 principaux types de contrats : le Bwasa, le Kalinzi et
le Bugule.11
11 Rapport de l'administration du territoire.
8
Figure 1. Carte administrative de la chefferie de
Ngweshe
Source : Département de Géographie / ISP -
Bukavu
2. Approche méthodologique :
La présente étude a été
réalisée en trois étapes :
Dans un premier moment, nous avons collecté les
données ethnologiques sur la chefferie de ngweshe. La recherche à
ce stade a été strictement documentaire (monographies, archives
du territoire et travaux coutumiers) et s'est focalisé sur :
1. Les normes coutumières en matières
foncière ;
9
2. Les autorités foncières coutumières ;
3. Les procédures d'acquisition et de transfert des
droits fonciers coutumiers ;
4. Les formules contractuelles traditionnelles et la
portée des droits qui y sont associés ;
5. Les modes d'extinction des droits fonciers en droit
coutumiers ;
6. Les modalités de règlement des conflits
foncier
L'objectif visé à cette étape était
de comprendre la reconstitution de l'économie ancienne Et traditionnelle
de la coutume foncière dans la chefferie de ngweshe en territoire de
walungu dans la province du Sud-Kivu.
Le deuxième moment a été consacré
au travail du terrain pour analyser les changements intervenus dans les modes
de gestions des terres coutumières. L'attention ici a été
portée aux pratiques foncières locales et plus
singulièrement aux/à :
1. Transaction foncières (les contrats et leurs modes de
preuves) ;
2. Procédure d'acquisition et de transfert des droits
(nouveaux rôles des autorités traditionnelles) ;
3. Conflits (nature, origine, types, caractéristiques
et acteurs)
4. Pratiques des autorités foncières et/ou
territoriales modernes en rapport avec le foncier rural (pratique en marge de
la loi et de la coutume) ;
5. La jurisprudence des tribunaux moderne en matière
foncière (singulièrement lorsque les tribunaux ont tranché
les conflits foncier coutumier, ou des conflits opposant des ayants-droits
coutumiers à des détenteurs des titres fonciers).
Le troisième moment a été consacré
à l'analyse des données empiriques recueillies et à leur
confrontation avec les règles formelles et les mécanismes
officiels de gestion foncière et à la rédaction de ce
présent travail.
VI. CHOIX ET INTERET DU SUJET
Les milieux ruraux du bushi était alimenté
depuis belle lurette les milieux urbains en denrées alimentaire en
qualité et en quantité, mais la réalité qui
s'observe actuellement ce que c'est les milieux urbains qui alimente les
milieux ruraux en denrées alimentaire. On peut ainsi se demander de quoi
est du l'inversion de cette tendance qui de nos jours maintienne la population
rurale dans une dépendance totale en denrée alimentaire.
D'autre part les lamentations de la part de la population sur
les pratiques foncières et les modes d'accès à la terre se
fondant sur le clientélisme ne donnant pas ainsi la latitude à
toute
10
la population rurale d'accéder à la terre dans
toute égalité et dans toute équité au point de se
demander si ces dernières ne sont-elles pas responsable de la faible
production agricole à ngweshe. Telles sont les motivations qui nous ont
poussé à choisir ce sujet.
VII. DELIMITATION SPACIO-TEMPORELLE
Cette étude est faite à ngweshe dans le territoire
de walungu Sud-Kivu et couvre une période
allant de 2015 à 2016.
VIII. DIFFICULTE RENCONRTE
Tout au long de notre recherche nous nous somme heurté
a des énormes difficultés, d'une part, certain paysans nous
traité des espions chose qui fait à ce qu'ils soient retissant
pour s'exprimer, et d'autre part certains agents non seulement de
l'administration du territoire mais aussi et surtout ceux des ONG oeuvrant dans
les milieux ruraux en ce qui concerne le foncier, la sécurité
alimentaire, nous refouler et ne voulez pas nous servir des données qui
nous intéressée.
IX. SOMMAIRE DE L'ETUDE
Cette étude a un caractère exploratoire et
analytique. En plus d'une introduction et d'une conclusion, elle s'articule sur
quatre principaux chapitres dont :
Le premier chapitre retrace l'Etat de lieux du régime
foncier en République Démocratique du Congo, il développe
les aspects liés au droit foncier dans sa section premier et ceux
liés à la coutume dans sa section deuxième. Le
deuxième décrit les pratiques foncières locales en milieu
rural cas de la chefferie de ngweshe, sa section premier décrit les
pratiques en matière d'acquisition des terres et la section
deuxième les pratiques successorales. Le troisième
démontre l'impact des pratiques foncières locales sur la
production agricole à ngweshe dans le territoire de walungu, retrace
certains aspects liés aux conflits foncier, les caractéristiques
des différents types des conflits, les caractéristiques des
redevances foncières, l'impact des pratiques foncières sur la
production paysanne ainsi que l'incidence des contrats fonciers sur la
production paysanne. Le quatrième chapitre présente les
stratégies pouvant contribuer à l'amélioration de la
production agricole à ngweshe dans le territoire de walungu.
11
CHAPITRE I : LE REGIME FONCIER EN RDC : ETAT DE
LIEUX
SECTION I : LE DROIT FONCIER CONGOLAIS :
Généralités.
Pour le législateur congolais, il faut établir
une nette distinction entre le sol, (le foncier) qu'il considère comme
immeuble par nature et constructions (l'immobilier) qui sont
érigées et qui peuvent avoir une vie juridique propre et
indépendante du sol auquel elles sont incorporées. Ces derniers
deviennent essentiellement la surface de la terre sans tenir compte du volume
de matières incorporées. « La surface qui constituent
l'immeuble, dit Savatier, est remplis de la matière »12
telle n'était pourtant pas la conception romaine sur laquelle
repose l'essentielle de l'édifice juridique congolais en effet, le
législateur romain admettait comme principe de base que la
propriété du sol entrainait fatalement celle des constructions
qui s'y était érigé. Il y était dès lors
acquis que juridiquement un droit de propriété ne pouvait
affecter les constructions indépendamment du sol. Les matériaux
incorporaient au sol perdaient, comme nous l'avions déjà
affirmé, leur individualité propre, c'est-à-dire, qu'il
n'y avait plus deux choses : le sol et les matériaux, mais une seule :
sol bâtit appartenant au propriétaire du terrain. Cette conception
antique était tellement ancrée dans le droit romain qu'on
exprimait par de nombreux adages notamment « superficie solo cedit »,
« accessio solo cedit », « non res extinctae vindicari possunt,
omne quod solo inaedificatur solo cedit ».13
En examinant la législation congolaise, l'on ne peut
manquer d'apercevoir qu'elle est dominée par une dualité
administrative consacrant l'idée de l'appropriation du sol
considéré par l'état. Mais, à la différence
du droit romain les immeubles incorporés au sol ne suivent pas
nécessairement son régime juridique. Ces principes sont :
? Seul l'état est le propriétaire foncier,
c'est-à-dire propriétaire du sol et du sous-sol. Sa
propriété est inaliénable et, partant, aucune
appropriation privative du sol n'est concevable. C'est là une option
opérée par le législateur.
? Les particuliers peuvent avoir sur le sol des simples droits de
jouissance pouvant impliquer la propriété des immeubles qui sont
incorporés au sol.
12 SAVATIER R., Vers des nouveaux aspects de la
conception et de la classification des biens corporels, in revue semestrielle
de droit civil, 1958, pp.1 et suivantes, cité par J.P. KIFWABALA
TEKILAZAYA, le droit civil des biens Tome 1 Les droits réels
Fonciers, deuxième édition, Mediaspaul-kinshasa, Mars 2015,
p.29
13 PATAULT A.M., Introduction historique au droit
de biens, PUF, Paris, 1989, pp. 83, cité par J.P. KIFWABALA
TEKILAZAYA, op cit, p.29
12
Ainsi, un édifice érigé sur un fond est
séparer du sol auquel il continue à être incorporer de
manière que l'état reste propriétaire du sol, le
constructeur pouvant être propriétaire de l'édifice. Il
s'ensuit que la propriété du sol n'en porter pas
nécessairement celle du dessus et du dessous. Car le législateur
a règlementé la propriété des bâtiments et
constructions envisagées isolement ; et, cette propriété
est un droit réel autonome distinct de la propriété du
sol. Il y a là, comme diraient certains auteurs, une superposition ou
une imbrication de différentes propriétés les unes sur les
autres et cependant parfaitement distinctes juridiquement.
Devant ces options, il aurait été
réellement absurde de conserver le concept générique
d'immobilier pour designer à la fois les droits relatifs au fonds ou sol
et ceux relatifs aux immeubles par
incorporation. la notion
même de propriété immobilière aurait alors
prêté à confusion, surtout que le législateur
soutient expressément que les droits que l'état
propriétaire peut accorder sur le fond qui ne sont pas à analyser
comme des démembrement de son droit de propriété mais
comme des droits réels autonomes d'un type nouveau.
Le langage juridique congolais désigne par le concept
de droit immobilier, les droits ayant pour objet les immeubles par
incorporation et par le terme droit foncier, ce type nouveau de droit se
rapportant sur un fond ou sol. C'est pourquoi dans cette étude lorsque
nous parlons des droits réels fonciers, nous avons en vie seuls les
droits qui ont pour objet le sol. Ces droits sont énumérés
de manière limitative par législateur, contrairement aux droits
belge et français dans lesquels le principe même de la limitation
de droits réels par la loi, a divisé la doctrine. en effet, le
droit belge, partant de l'article 543 du code civil qui dispose : « on
peut avoir sur les biens, ou un droit de propriété, ou un droit
simple de jouissance ou seulement des services foncières à
prétendre », l'on a considéré que les droits
réels sont : la propriété, l'usufruit, l'usage,
l'habitation, les servitudes ou services foncière. L'on accorde aussi
à dire qu'il faut ajouter à cette énumération
l'emphytéose et la superficie prévue par la loi du 10 janvier
1824, le gage et l'hypothèque.
Si l'on ne peut se douter que le législateur puisse
créer lui-même autant de droits réels qu'il veut, certains
auteurs n'ont pas manqué d'admettre que les particuliers puissent aussi
créer leurs droits originaux sur base des conventions en l'absence de
tout texte ne le condamnent14. Cependant, depuis la fin du
19e siècle, la grande majorité des auteurs
admettent
14 DE PAGE, H, traité
élémentaire de droit civil belge, Tome v, volume 2,
Bruxelles 1952, n°825
13
que l'énumération de la loi est
limitative15, même s'ils ne justifient pas tous, de la
même manière leurs prise des décisions16.
En RDC depuis l'époque coloniale, il a
été admis un principe selon lequel, l'organisation de la
propriété autant que celle de la famille, constitue une
matière d'ordre public, et ceci étant, les particuliers ne sont,
pas libres de créer d'autres droits réels que ceux qui sont
prévus par la loi. La loi foncière de 1973 à
réaffirmé ce principe. L'on peut ainsi lire dans le rapport de la
commission économique et financière sur la proposition de la loi
portant
régime foncier, immobilier et régime de
sureté, ce qui suit : « s'agissant de la distinction entre les
droits réels et les autres droits patrimoniaux, le principe suivant
lequel cette distinction est d'ordre public a été maintenu. Ce
maintien emporte comme conséquence qu'en dehors des droits réels
consacrés par la présente loi, les particuliers ne sont pas libre
de créer d'autre droits réels » l'alinéa 2 de
l'article premier de la loi foncière dispose alors : « les droits
réels sont : la propriété, la concession
perpétuelle, les droits d'emphytéose, de superficie, d'usage et
d'habitation, les servitudes foncières, le gage, le privilège et
l'hypothèque17.
D'autre part l'on remarque aisément que les pratiques
administratives et populaires mettent plus ou moins en échec la loi du
20 juillet 1973 telle que modifiée et complétée par celle
du 18 juillet 1980 portant notamment régime foncier et immobilier. Ces
pratiques posent particulièrement un problème en ce qui concerne
d'une part la valeur juridique, c'est-à-dire les effets liés
à ces « titres » qui sont abusivement délivrés
aux populations par des autorités incompétentes, d'autre part
l'application des sanctions.
Un fait s'impose à l'observation : les pratiques
foncières en marge de la loi prédominent en milieu rural et elles
ne sont point sanctionnées.
L'article 65 de la loi dite foncière dispose par
ailleurs que les terrains sont concédés sous réserve des
droits des tiers. Un problème se pose à cet égard en cas
d'extension des villes et de création de nouvelles cités. Ces
situations s'accompagnent généralement des contestations, car
elles portent atteinte aux droits coutumiers des populations locales. La
question est ici de savoir si des droits coutumiers peuvent être
exercés sur des terres devenues urbaines. D'autre part, lors de la
création d'un marché foncier, en l'absence d'une expropriation
préalable, les droits coutumiers restent-ils intacts sur les
différentes lois faisant partie du plan parcellaire ?
15 PATAULT A.M., op cit, pp 250-251.
16 GINOSSAR, Droit réel,
propriété et créance, L.G.D.J., paris, 1960, pp
147-148
17J.P. KIFWABALA TEKILAZAYA, le droit civil des
biens Tome 1 Les droits réels Fonciers, deuxième
édition, Mediaspaul-kinshasa, Mars 2015, p28-32.
14
Les opérations foncières consécutives au
changement du statut administratif des zones rurales ne semblent assez souvent
obéir à aucune logique juridique. Deux modalités peuvent
être observées : soit une intervention autoritaire, soit une
opération négociée. Quoi qu'il en soit, la pratique en ce
domaine aussi est en marge de la loi foncière18. Ce pourquoi
nous sommes d'avis avec MUGANGU MATABARO Séverin, J.P. KIFWABALA
TEKILAZAYA, KALAMBAY G. sur le plaidoyer pour la réforme de la
législation et la décentralisation de la gestion foncière
par les biais qu'il présente.
§1. Dualité foncière et
insécurité de la paysannerie :
Dans ces relations clientélistes et ces rapports de
force politique, la petite paysannerie est particulièrement mal
placée : elle ne dispose que de très maigres ressources à
faire valoir dans les réseaux d'alliance et d'allégeances. Il en
résulte qu'elle se trouve incapable de défendre ses propres
intérêts et son bien plus précieux : la terre.
Depuis 40 ans (loi foncière de 1973), les petits
producteurs font face à une incertitude foncière
particulièrement forte à cause de la confusion juridique qui
règne en la matière. Le foncier relevé en effet de deux
cadres normatifs basé sur des valeurs, des percepts et règles
antagonistes, à savoir la coutume et la loi foncière. Mais,
surtout, la loi foncière entretienne de fait la suprématie du
droit sur la coutume en matière foncière. Alors que les petits
paysans sécurisent traditionnellement leur terre au travers de contrats
coutumiers oraux enchâssée dans des relations d'allégeance
coutumier, la loi vient disqualifier la coutume comme mode d'accès
à la terre et lui oppose les procédures d'enregistrement des
terres par le cadastre et l'émission de titres fonciers.
Rédigé dans le contexte politique précédant la
zaïrianisation, cette loi foncière favorise les élites
politiques et économiques urbaines et insécurise les petits
producteurs agricoles.
les résultats tangibles de cette dualité
foncières est que les élites, en connivences avec les
chefs coutumiers qui leurs vendent des grandes superficies
souvent à très bas prix, ont pu s'approprier de larges
concessions au détriment des petits producteurs agricole qui n'ont
désormais plus la possibilité d'accéder à la terre
sauf en s'inscrivant dans un rapport de location monétarisé de la
terre, qui constitue désormais une pratique fortement répandue
à l'est de la RDC. Dans le pire des cas, les paysans ce sont vu purement
et simplement chassées des terres qu'ils occupaient depuis plusieurs
générations. Avec la montée
18 MUGANGU MATABARO Séverin, la crise
foncière à l'Est de la RDC, Bukavu Mars 2008, p.5.
15
démographique, les terres coutumières
accessibles aux paysans sont dans biens des zones devenues trop exigus et les
petits producteurs sont dès lors obligés de louer des terres aux
grands propriétaires terriens. Cette dynamique a dans de nombreux cas
transformé les paysans en simples ouvriers agricoles et renforcé
la vulnérabilité des petits producteurs agricoles. Ces processus
de marchandisation des terres et privatisation des terres qui se réalise
au détriment des petits producteurs a été décrit et
analysé par de nombreux chercheurs occidentaux et congolais. Alors que
l'insécurité foncière des petits paysans a
été mise en exergue depuis plus de 20ans, il est remarquable que
celle-ci persiste encore jusqu'à aujourd'hui, comme le montre certains
conflit. La persistance de cette insécurité foncière des
paysans dans le temps est avant tout un signe de faiblesse structurelle de la
classe paysanne sur l'échiquier politique congolais. Alors même
qu'elle représente entre 70 et 80% de la population nationale et
constitue ce fait la première force politique du pays dans un provincial
ou national contexte électoral, la paysannerie demeure largement
incapable de faire entendre sa voix et défendre ses
intérêts dans les arènes de pouvoir, que ce soit au
niveau.
Ces constats renvoie dès lors non plus seulement
à un problème de gouvernance foncier ou de conflits foncier, mais
ou modes de gouvernances des institutions étatiques de manières
générale et à l'incisive des institutions vis-à-vis
des populations et leurs attentes. Ces constats est valable pour les
agriculteurs comme pour les autres secteurs socio-professionnels et tous les
groupes sociaux de base, de leurs intérêts et de leurs attentes,
dans un contexte où ces institutions demeurent les instruments de
pouvoir aux mains des élites.19
§2 Ambiguïté normative et
responsabilité mal définie
La plasticité de l'action administrative dans la mise
en oeuvre de la législation foncière est déterminée
essentiellement par l'impératif pour l'administration de
s`insérer à son environnement politique et social. Elle est
également favorisée et facilitée par
l'ambigüité de la législation et l'enchevêtrement des
instructions de mise en oeuvre de cette dernière qui offrent aux
pratiquent administratives un champ de déploiement extrêmement
fertile.20
Les terres rurales forment une catégorie
résiduelle. La loi définit les terres urbaines comme celles qui
sont situées dans les circonscriptions urbaines. Toutes les autres sont
rurales. Parmi
19 USAID : AU-DELA DE LA
STABILISATION : Comprendre le dynamique des conflits dans le Nord
et Sud-Kivu en RDC, février 2015, p.32-33.
20 MUGANGU MATABARO
Séverin, La gestion foncière rural au zaïre :
Réformes juridiques et pratiques foncières locales Cas du
bushi, Louvain-la-Neuve, Academia-Bruylant, 1997, p.
188.
16
celles-ci, il y a lieu de distinguer les terres
concédées, les terres affectées au domaine public et les
terres occupées par les communautés locales. Ces
dernières, qualifiées de terres indigènes dans la
législation coloniale, étaient régies par les coutumes
locales et gérées par les autorités coutumières.
Elles étaient la propriété des communautés
indigènes.
Aux termes de l'article 387 de la loi dite foncière,
« les terres occupées par les communautés locales deviennent
à partir de la promulgation de la présente loi des terres
domaniales ». Elles font désormais partie du domaine foncier
privé de l'État. En déterminant les compétences en
matière foncière, la loi a expressément
écarté les autorités coutumières du rang des
gestionnaires de son domaine.
Au regard de l'article 56 alinéa 2 de la loi qui
dispose que les terres du domaine privé de l'État sont
régies par la présente loi et ses mesures d'exécution,
nous pouvons affirmer que les terres occupées par les communautés
locales relèvent bel et bien de la loi du 20 juillet 1973 et qu'en
conséquence nul ne peut se prévaloir des droits fonciers ou
immobiliers sur elles, s'il n'est détenteur d'un certificat
d'enregistrement (Art. 219).
L'Article 389 de la même loi dispose, pour sa part, que
les droits de jouissance régulièrement acquis sur ces terres
seront réglés par une ordonnance du Président de la
République. La question que soulève cet article est de savoir si
le législateur a voulu par cette disposition réserver le
régime applicable à ces terres à une loi
ultérieure. Si la réponse est affirmative, on pourrait alors
soutenir avec la cour suprême de justice qu'en attendant l'ordonnance
présidentielle promise, les droits de jouissance sur ces terres sont
régis par le droit coutumier (CSJ, RC 1932, 20 janvier 1988,
RJZ, 1988, p. 7, supplément n° 3).
Suivant cette position de la cour, ces terres ne
relèveraient donc pas de la loi dite foncière. Elles sont
régies par les coutumes locales et gérées par les
autorités coutumières. Cette interprétation reconduit en
fait le dualisme juridique auquel la loi du 20 juillet 1973 a voulu mettre fin.
Elle est en contradiction avec la lettre et l'esprit de la loi.
Au demeurant, la même cour suprême de justice
contredit cette position dans un autre arrêt où elle juge : «
en vertu de la loi foncière, toute règle coutumière en
matière d'occupation des parcelles a été abrogée
». (CSJ, RC334, 09 avril 1980, RJZ, 1988, p.8, supplément
n° 3).
Force est de constater que les droits des communautés
locales sur les terres qu'elles occupent, sont indéterminés.
L'équivoque se situe à trois niveaux :
1. au niveau du régime juridique de ces terres,
c'est-à-dire des règles applicables à ces terres,
2. au niveau de l'autorité gestionnaire,
3. au niveau de la nature des droits des exploitants paysans.
17
Hélas, la doctrine juridique congolaise n'arrive pas
non plus à lever l'équivoque21. Au-delà des
considérations qui précèdent, les termes mêmes
utilisés par le législateur sont sociologiquement
équivoques. D'un côté, le concept de «
communauté locale » n'a pas un contenu et un contour précis
; de l'autre, il est difficile de déterminer les « terres
occupées par les communautés locales ». À propos de
ces dernières, on s'interroge : s'agit-il de toutes les terres
situées dans les limites des entités administratives rurales ? En
d'autres mots, s'agit-il des terres revendiquées comme terre ancestrale
par une tribu, un clan, un Segment de clan, ou une famille élargie ? La
loi précise à l'article 388 qu'il s'agit des terres que les
« communautés locales habitent, cultivent ou exploitent d'une
manière quelconque, individuelle ou collective, conformément aux
coutumes et usages appartenant, des terres considérées comme
l'héritage inaliénable des ancêtres.22
§3 pluralité des instances d'intervention au
niveau local
Comme nous venons de le voir, l'ambiguïté de la
législation ne permet pas d'unifier l'interprétation des textes
législatifs. La pluralité des instances de mise en oeuvre de la
législation foncière ne permet pas non plus d'unifier les
pratiques. Ainsi peut-on observer des trajectoires différentes pour
l'acquisition des terres d'une concession rurale ou la résolution d'un
conflit s'y apportant.
En ce qui concerne l'acquisition des terres rurales, on voit
intervenir divers autorités locales, régionales, ou nationales
dans un ordre qui diffère, en fonction de la nature des terres à
enregistrer (terres coutumières ou « domaine de l'état
»), de l'envergure sociale ou politique du demandeur de l'enregistrement,
de Sa solvabilité ou de ses relations personnelles avec les membres de
l'appareil administratif ou judiciaire, plus spécialement des agents des
services des titres fonciers.
§4 les facteurs qui empêchent l'enregistrement
du sol par les paysans
Le récit de l'existence du parc national de kahuzi
biega nous a révélé que les populations concernées,
au point de vue foncier, par cette extension, n'ont été
informées de
21 KALAMBAY, G., Le droit foncier zaïrois et
son unification, thèse, Louvain-la-Neuve, UCL, 1973, 641 p.
Cité par MUGANGU MATABARO Séverin, thèse, op cit, p.6
22 MUGANGU MATABARO Séverin, op cit,
p.6-7.
18
l'existence de la dite loi que onze ans après. Si
à ce moment-là, ces populations n'avaient pas concrètement
été menacées d'exploitation, il est évident
qu'elles n'auraient jamais été au courant de l'existence de la
dite loi.
Les lois, en effet, sont portées à la
connaissance du public en RD Congo Par la publication au journal officiel. Le
service qui s'en charge est rattaché à la présidence de la
république et n'est pas doté des structures-relais dans les
provinces. Par conséquent, les lois ne sont pas physiquement à la
portée de tous les citoyens. Au demeurant le vocabulaire très
technique des lois exclut déjà de sa connaissance une fonction
importante de la population.
En interrogeant certains paysans d'ikoma à walungu/
chefferie de ngweshe sur la connaissance de l'existence de la loi
foncière, nous n'avons guère été surpris se savoir
que la plupart (21/23) n'en n'avait jamais entendu parler. Nous pouvons ainsi
supposer qu'un facteur des facteurs qui empêchent l'enregistrement des
terres par les paysans serait la méconnaissance de l'existence de la
législation et, à plus forte raison, la méconnaissance de
son contenu.
Nous avons également analysé que les paysans du
Bushi cherchait avant tout à sécuriser sa terre. N'étant
pas conscient des garanties qu'offre la loi foncière, il se contente des
solutions (fragiles) qui lui sont offertes par l'autorité
coutumière qu'il considère comme légitime (le «
contrat de délimitation », le « bugule ») ou en invente
d'autres à l'ombre de celles-ci (les ventes des terres avec l'accord des
chefs locaux). Et quand bien même il en serait conscient, deux types de
facteurs pourraient encore l'arrêter : la procédure
d'enregistrement des terres rurale et le cout des opérations.
En effet, l'enregistrement par les paysans de sa terre, pour
être conforme à la loi, doit souscrire à la
formalité de l'enquête préalable, la quelle « a pour
but de constater la nature et l'étendue des droits que de tiers
pourraient avoir sur les terres demandées en concession ». (Article
193, §2).
Il se fait justement, comme nous l'avons déjà
mentionné, que différents individus exercent sur la terre du
Bushi des droits différenciés. Il faudrait par conséquent
que les paysans désintéressent tous ceux qui auraient les droits
à revendiquer sur le terrain ; encore faut-il que ces derniers
consentent à être désintéressés. En effet, en
demandant l'enregistrement, le paysan cherche à sortir la terre de son
contexte social et juridique spécifique et, par conséquent,
menace de rompre la « chaine de solidarité » dont la terre est
support au niveau du terroir. Autant donc il ne peut se permettre de
compromettre son intégration sociale du fait de la tentative de faire
enregistrer, autant les hiérarchies sociales
19
locales dont il essaierait de s'affranchir, pourraient
multiplier les obstacles pour faire échec à sa
démarche.
Nous savons du reste que les chefs coutumiers du Bushi ont
eux-mêmes crée préalablement à l'introduction de la
demande de concession, une série des procédures qui semblent
avoir été validé par l'administration foncière. A
ces procédures déjà fortes onéreuses,
succèderait alors la phase de l'enregistrement qui met en scène
le géomètre du cadastre (Art.191, 4B, a et b), le commissaire
sous régional, le commissaire de zone et le conservateur des titres
immobiliers (Art.190, 193,195). Outre que ces autorités sont
physiquement hors de portée du paysan, les couts, surtout informel
(corruption et autres) de l'enregistrement sont tels que le paysans du Bushi ne
trouverait guère d'intérêt à initier la
procédure.
On sait par ailleurs que les rapports entre l'administration
et le paysan au Bushi, comme peut-être partout en RDC, sont encore
marqués par le souvenir colonial de la contrainte et de l'exploitation.
Les paysans évitent par conséquent d'avoir affaire à
l'administration de façon générale. Celle-ci est
perçue comme une structure parasitaire et tout à fait inapte
à apporter des réponses aux problèmes de la
société rurale. On a, du reste, d'autant moins de raisons de
chercher sa protection, en ce qui concerne la protection des biens, que l'on a
vu des concessionnaires exciper des titres légaux sans pouvoir jouir de
leurs de fond et que des solutions (« titres fonciers coutumiers »)
sont offertes aux paysans contre ceux qui les menacent potentiellement : les
voisins et les chefs.23
§5 Les paysans du Bushi et la loi du 20 juillet
1973
Il y eut ce qu'on appelle « la loi BAKAJIKA ». Ce
qui étonne un peu, cette loi stipule que le sol et le sous-sol
appartient à l'Etat (Article 53, 387, 388,389) et que l'on ne dirait
plus que le sol appartient au Mwami.
Toutefois, ces lois se sont d'application dans les villes ou
il y avait des terres sous contrôle de la CNKI (parc, mines, domaines
public de l'Etat, domaine privé de l'Etat,...)
Cette loi a eu tendance à ravir au Mwami et sa
population leurs droits sur la terre. Cette loi n'a pas pu défendre la
population. En effet quand on parcourt la loi BAKAJIKA, on se rend compte de la
« confusion » concernant les terres des paysans, parce qu'elle n'a
rien prévu sur les champs des paysans. Et là, c'était la
chance des Bamis et leur population.
23 MUGANGU MATABARO Séverin, op cit,
thèse p.281-282.
24 IADL (Initiatives et Actions pour le
Développement Local), Rapport de la session de formation sur la
question foncière au Bushi, Bukavu, Aout, 2000, p.25.
20
Face à cette situation, les autorités du pays
ont promis une ordonnance présidentielle qui donnerait de la
lumière mais jusqu'à sa mort, le feu président MOBUTU S.
ne s'est pas exprimé à ce sujet. Même les autorités
actuelles du pays n'ont encore rien dit sur les champs des paysans.
? En 1980 (loi n°80/6008 du 18 juillet 1980)
C'était une loi qui donnait de la lumière sur ce
qu'on appelle « concession ». Cette loi complète la loi
BAKAJIKA, c'était pour préciser qui peut bénéficier
la concession, qui peut donner la concession, ou, quelle superficie comme par
exemple :
? Pour obtenir de 200 à 100 ha ; il faut un
arrêté ministériel
? On obtient de 10 à 100 ha auprès du
gouverneur.
? Jusqu'à 10 ha, on s'adresse auprès du
conservateur des titres fonciers24,
Cette loi n'a rien dit sur les terres des paysans.
Cela fait que les autorités du pays, au niveau
décentralisé, utilisent les deux voies. C.-à-d. que l'Etat
(cadastre) ne traite pas avec un paysan non en ordre avec la coutume.
? Il faut que le champ soit obtenu soit en « Kalinzi
», soit en « Bugule » pour que le service du cadastre le
régularise.
? Toutefois en cas de conflits foncier, l'Etat reconnait plus
les documents cadastraux que ceux de la coutume.
SECTION II : LES COUTUMES EN MATIERE FONCIERE A
WALUNGU
Face à l'échec de tentative de gestion Etatique
du foncier, il est rarement prôné une « meilleur prise en
compte des systèmes foncier coutumier ». Mais faute d'une
compréhension suffisamment claire de logique et de la dynamique de ces
systèmes ; ce souci peut déboucher sur des erreurs
d'interprétations, des biais opérationnels ou des effets sont
rares à ce qui était souhaité. Il semble donc important de
caractériser au mieux ces logiques.
L'identification « d'une logique » de
systèmes coutumiers se heurte à de nombreuses et importantes
difficultés : la nature très variées des dispositions
foncières (principe, règles formelles, convention et pratiques de
toutes sortes), la diversité de l'enchevêtrement des droits qui en
résultent, en fin la complexité des déterminants qui
influent sur la mise en oeuvre des
25 CHEVEUX Jean-Pierre, La logique des
systèmes coutumiers in Quelle politique foncière pour
l'Afrique rurale ?, Réconcilier pratiques, légitimité et
légalité, KARTHALA- COOPERATION FRANCAISE, 1998, p.66-67.
21
ressources, organisation sociale locales, techniques
utilisées, niveau de pression foncière , environnement
socio-économique, dispositif juridique et interventions des pouvoir
publics,....).
Pour contourner ces difficultés, on peut d'abord
être tenté de nier l'existence d'une cohérence
significative généralement en posant comme
référence le model « propriétarisé » en
soulignant la décomposition avancée des systèmes
coutumiers (individualisme, décadence des autorités
coutumières, marchandisation de la terre, intervention public).
Toutefois l'hypothèse de l'incohérence des système foncier
coutumiers actuels n'est sauf cas très rare en Afrique rurale, d'aucune
utilité car elle n'avance aucune interprétation alternative
observable pour rendre compte de procédure de fonctionnement
effectivement observables et leurs prévalence globale vis-à-vis
du droit positif « moderne ».
A l'inverse, on peut rechercher hors de la seule logique
« propriétarisé » la cohérence interne des
dispositions foncières coutumières en faisant valoir l'existence
des règles, socialement acceptées et effectivement
invoquées, et l'existence de droits, certes complexes mais
néanmoins réductibles à une typologie raisonnée.
Par « la logique » des systèmes coutumiers, il faut alors
entendre la cohérence commune et l'ordre générale qui
ressortes des dispositions régissant l'accès à la terre et
son usage agricole et pastorale, ce qui l'on pourrait appeler « l'esprit
» de ces règle et des ces pratiques. Cependant, il existe toujours
les risques de « forcer » la cohérence endogène des
systèmes coutumiers sous le prétexte de combattre la
prétention à l'universalisme de la logique
propriétarisé. Or enchâsser dans les relations sociales
plus larges et produit de l'histoire et de rapport de force, les dispositions
et pratiques foncière coutumières ne constituent nullement un
système endogène, fermé et harmonieux. Aussi est-il
très formelles des règles et des typologies de droits mais dans
leurs mode « procédural » de régulation de nature
davantage sociopolitique que juridique.25
§1. Les modes d'accès à la terre
à walungu/ chefferie de Ngweshe
Dans ce contexte d'exiguïté des terres productives
par ménage paysan et en l'absence de secteur secondaire performant
capable de désengorger le secteur primaire, la question de
l'accès à la terre et de sa sécurisation est
particulièrement cruciale.
22
De par sa valeur productive « vitale »,
économique, par son rôle culturel et les implications politiques
que sa possession induit, la terre est la principale source de
compétition dans cette région.26
Au Bushi, Le mwami est le propriétaire des terres
rurales. Il gère les terres rurales et les hommes. Ceux qui aident le
mwami dans sa gestion du terroir se trouvent inclus dans ce qu'on appelle
« la pyramide sociale ». Ce sont les chefs de groupement, les chefs
des localités et des villages.
On distingue 6 formes de contrat foncier dans le BUHSI :
1. l'obuhashe : (etym. Mashi : « okuhana obuhashe »
donner l'autorisation, permettre, d'exploiter pendant une année).
2. Le «bwassa » : (etym. Mashi : « kuyasa
» céder l'usage d'une terre soit pour une saison culturale soit
pour une année renouvelable).
3. Le «bwigwarhire » : (etym. Mashi «
kuchigwarhira » prendre pour soi un objet qui est sans propriétaire
autre que la collectivité).
4. Le «mulagiro » : (etym. Mashi : «kulagira
» être intermédiaire entre le peuple et le chef).
5. Le «kalinzi » : (etym. Mashi : « kulinda
» ou « kulinza » attendre ou faire attendre).
6. Le «bugule » :( etym. Mashi : « kugula
» : acheter).
Parmi ces 6 formes des contrats fonciers suscités au
bushi, le bwassa, le bwigwarhire, le bugule et le kalinzi sont encore
d'actualité27
§ 2. Comment obtenir un champ coutumier :
procédure
Chez le bashi l'homme qui désire un terrain, y
construire son habitation, s'y installer avec sa famille et cultivé le
sol, doit solliciter un « supérieur » pour obtenir le droit
d'occupation sur cette terre. Ce supérieur peut être un chef du
village, un chef de région ou même un chef de pays. Il peut
être aussi un homme riche, sans charge politique, et qui peut
céder un terrain qu'il ne cultive pas. En fait, celui qui donne est
toujours plus riche, et de ce fait socialement plus élevé que
celui qui sollicite. Être chef chez le bashi, écrira J.B. Cuypres,
c'est être « capable de procurer une terre » (CUYPRES, J.B.,
1967, p.225).
26 ÉMILIE Pèlerin, AURORE Mansion, PHILIPPE LAVIGNE
Delville, Afrique des Grands Lacs : droit à la terre, droit à
la paix Des clés pour comprendre et agir sur la sécurisation
foncière rurale, c o - édition CCFD-terre solidaire et gret,
p.18
27 OUCHINSKI A., Elément de codification
des coutumes foncières du Bushi, 1995, in P. MASSON, Trois
siècles chez les Bashi, la presse congolaise, s.c.a.r,
deuxième éduction, Bukavu, P.126.
23
Mais comment solliciter un chef ? Deux stades sont
nécessaires et inséparable : courtiser d'abord, solliciter
ensuite, bien qu'il soit possible de courtiser sans solliciter. La
courtisanerie est caractérisée par un cérémonial et
un langage quasi immuables. L'homme se présentera avec une calebasse de
bière devant l'enclos du chef et priera un « intercesseur »
(Muganda) d'aller avec différence, saluer le chef de sa part : il
demande un impératif poli, d'aller saluer pour lui au « Bugale
». Bugale doit avoir deux significations : la richesse et l'habitation
d'un homme riche ; « Mugale » ; ce terme s'emploi a la circonstance
pour désigner le chef. Par le « Muganda », le chef
répond à son salut. Puis le courtisan attend jusqu'à ce
que le chef l'appelle pour le laisser entrer. Il pourra alors prendre place
parmi les autres courtisans « Basengezi ».
Le comportement du courtisan a pour but d'exprimer
publiquement sa soumission ou sa disposition à se soumettre. Le chef,
après avoir accepté l'hommage du courtisan, donnera de la
bière, signe qu'il apprécie le geste. La demande ne sera pas
toutefois, formulée directement par l'intéressé
lui-même ; c'est toujours par l'intermédiaire d'un intercesseur
parmi les fidèles du chef.
En cas d'accord de principe du chef, le rendez-vous est pris
pour visiter et délimiter le terrain qui pourrait être
accordé. Le chef envoi le « Baganda » qui ne sont pas
obligatoirement ceux qui ont introduit la requête initiale. Leur nombre
n'est pas non plus déterminer par la coutume.
Sur terrain, les baganda convoquent les occupants des terrains
limitrophes lesquels sont invités à indiquer leurs limites
respectivement afin d'éviter toute contestation ultérieure. Ils
déterminent habituellement les limites en suivant des repères
naturels tels que arbres, ruisseaux, pied de colline, ... c'est après la
délimitation que les Baganda déclarent le kalinzi à verser
au chef avant d'occuper et de jouir du fonds. Ce kalinzi n'est pas
négociable ; il est fixé discrétionnairement par les
baganda.
Quoique le chef n'apparaisse plus dans la suite des
opérations, une fois son accord donné, il n'en demeure pas moins
que ce lui indique aux baganda la superficie à concéder et la
substance du kalinzi.
L'homme qui occupe une parcelle est tenu de payer plus tard et
périodiquement une double imposition : un tribut en nature, «
kushegula » et un tribut en travail « kurhabala ». Le premier
appeler parfois aussi « kurhula mwaka » (offrir un cadeau du champ)
consiste en une dime sur le récolte et la bière brassée
(kasigsi), à remettre à celui qui à accorder un terrain.
L'occupant d'une parcelle importante donnera même du bétail. Le
« Ntumulo » (le cadeau) n'est cependant pas versé à
terme fixe, mais suivant les possibilités.
24
Le chef de village envoie périodiquement une partie de
ses redevances au Mwami ou au chef de région ; ce dernier agit de
même vis-à-vis du Mwami.
Ne pas s'acquitter des tributs, c'est risquer de se voir
retirer le droit d'occupation de sa terre. Ainsi l'homme qui a sollicité
et reçu une terre, se place dans la situation matérielle et
morale d'apporter une aide quasi permanente au maitre de son terrain. Il lui
rendra de multiples petits services, sollicités ou proposés afin
de plaire28.
CHAPITRE II : LES PRATIQUES FONCIERES LOCALES EN MILIEU
RURAL : CAS DE LA CHEFFERIE DE NGWESHE
SECTION I : LES PRATIQUES EN MATIERE D'ACQUISITION
DES TERRE
§ 1. Les autorités territoriales et la gestion
des terres à walungu
Les autorités territoriales dont il est question ici
sont principalement les commissaires du district et l'administrateur du
territoire. Ceux-ci s'arrogent aussi des pouvoirs fonciers sans qu'aucun texte
ne les leur reconnaisse. Ils exploitent astucieusement le plan juridique
contenu dans l'article 69 de la loi du 20 juillet 1973dispose qui :
« En attendant l'accomplissement des formalités de
concession d'un fonds appartenant au domaine privé de l'Etat, celui-ci
peut autoriser le demandeur à occuper ledit fonds par le bornage, la
délimitation et, éventuellement, la clôture et
l'entreposage. Cette autorisation est donnée à titre
précaire, et ce, aux risques et péril du demandeur, sauf la
responsabilité services publics en cas de négligence fautive et
de vol29 ».
La délivrance de cette attestation est l'aboutissement
d'une procédure qui part de la « demande de délimitation du
champ » et passe par l'établissement d'un procès-verbal de
constat de lieux » et d'une fiche de reboisement individuel. L'attestation
est, à l'instar du contrat de concession, contresigné par «
le propriétaire du terrain ».
Au Bushi, le foncier actuel est un système complexe
dans lequel se superposent deux juridictions : le système «
traditionnel, coutumier » et le droit « moderne »
édicté par l'Etat, la loi foncière n° 73-021 du 20
juillet 1973, telle que modifiée et complétée par la
loi
28 MUGANGU MATABARO Séverin, La tenure
foncière coutumière en RDC : Etat de lieux et perspectives pour
la réforme de la législation, Rapport, Etudes de
référence sur la tenure en RDC, RIR (Right and ressources
Initiative), Bukavu, septembre, 2014, inédit, p.16-17.
29 Journal officiel de la RDC, loi n°
73-021 du 20 juillet 1973 portant régime général des
biens, régime foncier et immobilier et régime des suretés
telle que modifiée et complétée par la loi n° 80-008
du 18 juillet 1980, p.22
30 M. Jean-Baptiste Safari Bagula et BAKWI Jules,
Problématique de gestion foncière dans la région du
Bushi au Sud-Kivu, Bukavu, 2010, p.11.
25
n° 080-008 du 18 juillet 1980. Dans les pratiques
foncières du Bushi, la propriété purement privée
n'existe pas. La terre appartient à la famille qui l'a reçu du
clan, lui-même l'ayant obtenu du Mwami. Ce dernier incarne de passage, la
chefferie et est le garant moral et première référence de
gestion des terres. Tous les règnes Bashi considèrent la terre,
en premier lieu, comme un patrimoine collectif inaliénable. Les
différents types de récompenses qui caractérisent les
différentes formes d'octroi n'est pas à considérer comme
des « prix » payés pour l'obtention de la terre. Ils
confèrent plus les droits d'usage et d'habitation, de cultures, de
pâturage, de chasse, de passage, de rite et d'enterrement que celui de
propriété. Ces droits d'usage étant transférable
à la descendance par le fait d'héritage, de succession, de
lignage, ils deviennent permanent, se pérennisent et sous-tendent aux
droits définitifs tant que le clan et ses membres restent loyaux au
Mwami et au système du règne en place.30
§2 les titres fonciers coutumiers
Suivant l'esprit du décret sur l'accession des
indigènes à la propriété foncière,
l'administration coloniale a entrepris, dans la deuxième moitié
des années 50, l'élaboration en marge de la législation en
vigueur, à l'époque, des « contrats-types », tel le
« contrat de location ou de cession définitive d'un droit
d'occupation pérenne » au Sud-Kivu dans le territoire de walungu en
général et chefferie de ngweshe en particulier l' « acte de
cession ». Il y a lieux de croire que partout ailleurs dans les
entités coutumières, ces nouveaux contrats coutumiers ont
existé et existent peut-être encore.
Ces titres fonciers coutumiers sont délivrés
uniquement par les chefs des entités administratives rurales (chefs de
chefferie et chefs de secteur) et se présentent sous forme de
formulaires stéréotypés. Les ayants droits coutumiers de
niveaux inférieure ne les délivrent pas.
Autant que les « titres » délivrés par
les autorités territoriales, ces titres fonciers coutumiers n'ont aucune
valeur juridique. Ils ont toutefois une efficacité symbolique dans la
mesure où ils font foi lorsqu'on entreprend l'enregistrement d'un
terra
26
§3 les transactions foncières avec les
ayants-droits coutumiers : accord sur un malentendu
Toutes sociétés segmentaires sont aujourd'hui
confrontées à la difficulté d'adapter la
propriété clanique à l'évolution vers la
propriété individuelle et l'insertion à une
économie monétaire.
L'évolution observable est cependant sans
équivoque : le domaine clanique est désormais sur le
marché. Les actes d'aliénation, fort inspiré du
régime du certificat d'enregistrement, portent plusieurs
dénominations : « protocole d'accord », « convention de
cession de terre », etc. ils présentent tous les mêmes
caractéristiques :
1. Ils sont contresignés par plusieurs personnes au titre
d'ayants-droit ;
2. Ils sont limités dans le temps (25 ou 30 ans selon le
cas) ;
3. Ils comportent un cahier de charge ou des obligations
sociales envers le clan « aliénation » ;
4. Les contre parties dues par l'accipiens sont « conformes
à la coutumes ».
Ce qui se dégage de la plus part de ces conventions
conclues avec les ayants-droits coutumiers, c'est malentendu sur la nature et
la portée des engagements. Pour l'acquéreur, il s'agit d'une
cession des droits collectifs de jouissance, par ailleurs, limitée dans
le temps.
Ce qui est admis par tous et qui fera inévitablement le
lit du conflit à l'échéance du terme stipulé, c'est
que le nouvel acquéreur est autorisé à se faire
délivrer un certificat d'enregistrement. Or ce titre a pour effet de le
placer sous un régime statuaire très protecteur contre les
velléités de reprise par le clan aliénateur. Autant dire
qu'il s'agit d'un marché des dupes.31
§4 les Rapports entre l'administration foncière
et les ayants-droit coutumiers en matière d'enregistrement des
terres
En dépit de l'existence d'une législation
foncière, la coutume continue à jouer un rôle
prépondérant dans la gestion des terres rurales dans les milieux
ruraux du Bushi, à walungu dans la chefferie de ngweshe par exemple, les
ayants droits coutumiers ont un droit et les
31 MUGANGU MATABARO Séverin, op cit, p.
38-40.
27
obligations envers l'administration foncière et ceci se
fait selon chaque type de contrat foncier.
1. Pour le terrain obtenu en « Bwassa » : au cas
où un locateur quitte d'abord le fief pour
y revenir après, le contrat continue à sortir
ses effets en ce qui concerne le droit à la totalité de la
récolte. Le chef foncier n'a aucun droit d'attribution de ce terrain
sous quelque forme que ce soit avant l'achèvement de la récolte.
Il peut cependant réserver ce terrain à un tiers mais avec
obligation pour le second utilisateur d'attendre la récolte
préalable du premier. Certaines formes d'utilisations (ou
d'activité) du sol, du sous-sol ou des eaux sont absolument libre et ne
postulent de la part de l'utilisateur aucune demande préalable, ni de la
part de l'autorité foncière coutumière. Il s'agit par
exemple des végétaux de construction (Mushadu ou Mushushu), terre
saline pour les bétails (Muloba), « pemba », Kaolin «
Ibumba » terre à poterie,....
Le locateur est nominalement désigné par le
bailleur ; cependant lui-même possède du fait de l'accord et pour
toute la durée de celui-ci un droit de répartition du fond obtenu
ou des bénéfices entre tous tiers de son choix descendants,
collatéraux aux amis à condition, toutefois, de ne pas modifier
le caractère de l'accord initial. En ce qui concerne les
étrangers, une restriction existe cependant en ce cas, le préteur
est tenu d'avertir l'autorité foncière qui lui est
immédiatement supérieur, de la présence de
l'étranger dans son fief, mais nullement du fait de l'accord foncier
qu'il a pris ou compte prendre avec cet étranger. Le locataire a donc le
droit d'accorder ou de sous louer en Bwassa sans avis du Bailleur,) tout
frère de clan, tout étranger au sens tribal. Si pendant la
durée du bail, le produit du fonds est détruit en totalité
par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit et le
locataire n'est tenu à aucun paiement à posteriori. Si c'est
détruit partie toujours par cas fortuit, le bail ne peut résilier
complètement, mais il peut réduire le paiement
proportionnellement aux dégâts et aux bénéfices. Le
décès du locateur atteint le droit d'utilisation
ultérieure du fonds pour les héritiers. Un nouvel accord devra se
créer pour que l'utilisation puisse être poursuivie. Le
décès du locataire n'atteint par contre jamais le droit des
héritiers sur le produit du fond ; ils peuvent donc, sans avis du
bailleur ; récolter la totalité, mais ce droit ne leur est
accordée que pour une seule récolte.
2. Pour le terrain le « Bwigwarhire » : cette forme
d'autorisation d'usage ne nait pas de la requête individuelle de
l'emprunteur mais se crée à l'initiative de l'autorité
coutumière elle-même. L'attribution se fait collectivement et non
nominalement.
28
L'usage s'étend à une grande superficie de
terrain (marais ou colline). Après sa mise en valeur par le
bénéficiaire, ce terrain s'appelle : « Kandalwe ».
Cette forme d'attribution est essentiellement gratuite et
aucune délimitation ou restriction de superficie n'est prévue
pour chacun des bénéficiaires.
En principe, tout citoyen participant à la vie active
de la communauté peut jouir du « bwigwarhire ». Nul
étranger au sen clanique ou tribal ne peut jouir de l'autorisation
d'usage.
La condition de résidence dans le fief n'étant
plus remplie par le bénéficiaire, il perd tout droit aux
bénéfices réalisés sur le fond sauf ceux de la
récolte qui suit immédiatement son départ. A partir de ce
moment ; les fonds, tout ce qui s'y incorpore ou s'y unit et n'a pas
été enlevé par le bénéficiaire, revient le
droit à l'autorité foncière qui pourra soit le conserver
pour son usage personnel, soit une nouvelle attribution sous toute forme de
contrat qui lui est agrée.
Le fait du retour au fief après un départ de
longue ou de courte durée donne automatiquement le droit à une
réutilisation du terrain « Bwigwarhire » si aucune nouvelle
attribution de ce terrain n'a été entre-temps par
l'autorité foncière ; le bénéficiaire peut prendre
toute autre parcelle libre sur le terrain accordé en «Bwigwarhire
», mais ne peut plus prétendre sur son ancienne parcelle. Un simple
cultivateur ne disposera jamais d'un terrain assez important pour faire une
attribution collective sous cette forme. Si théoriquement, le cas se
présentait, il n'aurait pas le droit d'y avoir recours parce qu'il ne
poserait pas un acte à caractère semi-politique.
Il ne peut être conclu d'accord « bwigwarhire' pour
la plantation des cultures pérenne pour des boisements artificiels ou
pour l'installation des huttes destinées à une résidence
permanente. On reconnait au bénéficiaire le droit d'utilisation
du sol et des eaux et la cueillette des produits spontanés
autorisés. Celui qui a mis le terrain en valeur peut, sans avis
préalable du chef foncier, en faire profiter tout tiers de son choix. Le
« Bwigwarhire » est accordé, suivant les cas soit pour une
durée déterminée, soit pour une durée
indéterminée, mais révocable à tout moment. Toute
extension sur cette vierge est autorisée dans les limites du terrain
accordé sans avis de l'autorité foncier. En cas de départ
du terrain d'une parcelle aucun autre habitant du fief ne pourra occuper
celle-ci sans en avertir d'abord l'autorité foncière.
3. Pour le Kalinzi : la condition de Base pour l'obtention
d'un « Kalinzi » est
L'assujettissement politique, social et administratif
vis-à-vis de l'autorité foncière. Tout étranger au
Bushi peut obtenir un « kalinzi » à condition d'accepter le
«Kashiga ». la condition de résidence dans le fief est
absolument requise pour l'obtention d'un kalinzi, parce
29
que : « OKUBOKO KUGUMA KURHARIMBA NGOMA IBIRHI »,
« MPANGA NGUMA ERHA RHULA BAMI BABIRHI » c'est-à-dire parce
« on ne peut servir deux maitres à la fois ». Tout citoyen
résidant dans le fief ou il possède déjà un «
kalinzi » ne peut en principe, en solliciter un second dans autre fief. La
possession de deux « kalinzi » dans de fiefs différent est
cependant admise dans le cas où un descendant, installé dans un
fief distinct de celui de son père vient à hériter du
« kalinzi » de celui-ci. Cependant en ce cas, il est tenu d'assurer
le gardiennage sur celui des deux « kalinzi » ou il ne peut pas
résider. Le fait de quitter le fief sans assurer le gardiennage de sa
parcelle « kalinzi », entraine déchéance du droit dans
un délai suffisant pour que soit la preuve de l'abandon
définitif. Dans le cas où le premier preneur, après avoir
quitté son fief d'origine pendant plus de deux ans et sans laisser le
gardien revient dans ce fief, il peut reprendre la possession de son ancienne
parcelle à condition d'effectuer un nouveau paiement « kalinzi
», si ladite parcelle n'a pas encore été attribuée
à un tiers. L'attribution de fonds « kalinzi » se fait suivant
la pyramide sociale : le Mwami attribue au Murhambo, le Murhambo au Mushamuka,
le Mushamuka à ses administrés et chaque individus à tous
tiers jusqu'au morcellement individuel. Cependant, à aucun
échelon de la pyramide sociale, il n'est permis d'attribuer en «
kalinzi » la totalité du fonds que l'on possède
soi-même sous cette forme. Le « kalinzi » est toujours dû
mai le versement peut se faire avec des grands délais. L'acompte et le
crédit par versement fractionnées sont admis par la coutume qui
ne fixe toutefois pas l'importance des frais à verser. Le paiement n'a
jamais eu lieu lors de la requête. Généralement il se fait
après la délimitation par les baganda, s'il `agit d'un terrain
déjà mis en valeur et après la première mise en
valeur s'il s'agit d'un terrain « bulambo ». le paiement étant
effectué, le bénéficiaire n'est plus tenu à des
payements d'aucune sorte dans les années qui suivent, mais il reste
toujours soumis au « kushiga ». sont considérées comme
de résolutions d'un accord kalinzi les faits suivants : esprit
séditieux, sorcellerie prouvée, refus de « kushiga » ou
de « kurhabala » répétés, adultères
commis avec l'épouse de l'autorité foncière, vol
incorrigible, esprit d'insociabilité,...
Seul le conseil de chefferie peut décider de la
révocation d'un kalinzi, la demande collective de kalinzi n'est pas
admise, toutefois, les associations de développement bien
organisées avec statut et règlement d'ordre intérieur
peuvent demander le kalinzi, un fond kalinzi n'est jamais saisissable suite
à une décision judiciaire allouant des dommages et
intérêts ou condamnant à une amende. On n'exécute
que sur les produits meubles, bétail culture,...) et le "bafanshizo
»'existe plus, un veuve (avec ou sans enfants) peut disposer du fonds de
son mari défunt. Le testament est connu : il sert principalement,
à modifier l'ordre coutumier de la
30
succession appelé « KUBONA » ; le nouveau
chef foncier, peut exiger après sa succession, un supplément de
kalinzi appelé « Mushigo ». Tous les vassaux doivent en
principe le Mushigo ; le nouveau suzerain a le droit moral d'exiger le Mushigo
de tous ses vassaux mais en général il ne l'exige pas
verbalement, les vassaux s'exécutant d'eux-mêmes. Dans le cas d'un
fief passant en succession de père à fils le suzerain ne peut
citer en justice le vassal en défaut de payer.32
SECTION II : LES PRATIQUES SUCCESSORALES
La succession est le droit que possède
l'hérité légitime de prendre avec le nom, tous les droits
du défunt, il est censé continuer ici-bas sa
personnalité.33 La pratique successorale du kalinzi suit les
mêmes règles que toutes les successions des biens meubles ou
immeubles dans le Bushi.
L'héritage se fait dans le sens vertical, par ordre de
primogéniture, dans la lignée male. A défaut des
descendants males directes, l'héritage se fait dans le sens horizontal :
le droit à la succession passe au frère ainé du
défunt et, à défaut de celui-ci, à un frère
cadet, par ordre de primogéniture. A défaut de frère le
droit à la succession passe, en ordre préférentiel :
? Au père du défunt s'il est toujours en vie
? Aux oncles paternels, par ordre de primogéniture.
? Aux neveux dans la lignée male, par ordre de
primogéniture
Le testament est connu : il sert principalement à
déshériter, à modifier l'ordre coutumier de la
succession.
La forme de testament est orale et publique : la
présence de l'autorité coutumière et de membre de la
famille est requise ; celui-ci hérite des biens reçoit en
même temps toutes les charges, notamment les devoirs d'entretien et
d'assistance, les droits et devoirs sociaux vis à vis des autres
descendants du défunt. Ce qui hérite les biens hérite par
le fait même des dettes et des pactes de bétail du défunt.
Les femmes sont toujours exclut de la succession du Kalinzi, même par la
voie du testament. En ce cas de déshérence totale de la
lignée male :
? La coutume ancienne : le mwami héritait de tous les
biens immeubles, du bétail et des filles orphelines. Les biens meubles
allaient à la (ou aux) femme veuve qui elle-même n'allait pas en
succession.
32 IADL, op cit, p.17-21
33 P. COLLE, Essai de Monographie des Bashi,
centre d'étude de langues Africaines, Bukavu, P. 237.
31
? La coutume évoluée : le notable du lieu doit
faire connaitre le cas au Mwami lequel
défère l'affaire à la juridiction
coutumière. Celui-ci convoque tous les membres de la
famille du défunt. C'est ce conseil de la famille qui
après délibération, décide de la
succession.
En cas de désaccord quant à la désignation
du successeur c'est la voie de l'ainé qui est
prépondérante.
Dans le but d'assurer ma pérennité de la
succession, l'ainé ayant-droit est-il automatiquement
écarté s'il n'a pas lui-même de
progéniture masculine ?
L'ainé ayant droit n'est pas
déshérité, dans le cas où il n'a pas lui-même
de descendance
male.
La succession « kalinzi » peut-elle au client ?
La succession « kalinzi » ne peut jamais aller au
client du défunt.
Le partage par égales portion est-il appliqué dans
la succession « kalinzi » ?
Dans la succession « kalinzi » l'héritier est
unique et le partage par égales portions n'est pas
appliqué.
Quels sont les droits successoraux de l'épouse du
défunt ?
L'épouse (ou les épouses) qui n'a aucun droit de
succession sur le kalinzi peut jouir de
certain droits meuble (généralement 1/3 de ceux-ci)
: gros bétail, petit bétail, argent.
Elle hérite aussi la totalité des ustensiles de
ménage, d'une houe et ses propres vêtements.
L'héritier ou le légataire suit-il la même
obligation que le bénéficiaire kalinzi de résider le
fief ?
L'héritier ou le légataire suit la même
obligation de résider dans le fief que le bénéficiaire-
kalinzi décédé. Toutefois, il peut laisser
un gardien et continuer à résider dans un autre fief.
L'enfant-mineur peut-il être héritier ou
légataire d'un kalinzi ?
L'enfant mineur et même l'enfant conçu et à
naitre peuvent être héritier ou légataire, à
condition d'être du sexe masculin.
L'héritier ou légataire est-il tenu à
certains payements au cédant après le décès du
premier
bénéficiaire, pour continuer à jouir
parfaitement du Kalinzi ?
? Supplément du kalinzi ?
? Indemnités ?
? Autre témoignage à déterminer ?
Les héritiers ou légataires ne sont plus tenus a
versement de supplément de kalinzi, ou
d'indemnité pour continuer à jouir parfaitement des
droits acquis par le défunt ; ils restent
32
toujours soumis ou prestation des services et ou
allégeances ; sans obligation spéciale de sa part,
l'héritier ou légataire verse généralement un
cadeau spécial de succession.
Le cédant peut-il ne pas agréer l'héritier
ou le légataire à priori ?
Le cédant ne peut à priori, refuser d'agréer
l'héritier ou le légataire
Cas du décès du cédant :
Comment, en règle générale, s'opère la
succession dans ces cas ? Suit-on les mêmes principes que dans le cas du
décès du bénéficiaire ?
Les règles d'application en cas de décès
du bénéficiaire le sont également en cas de
décès du cédant. L'héritier ou le légataire
du cédant hérite également des bambali (client) du
défunt, ainsi que des droits et devoirs sociaux vis-à-vis de
ceux-ci.
Le nouveau chef foncier peut-il rompre les engagements
fonciers individuels pris par son prédécesseur ?
Le nouveau chef foncier ne peut rompre les engagements
fonciers individuels pris par son prédécesseur
décédé, mais il peut, en certains cas les modifier.
Le nouveau chef foncier peut-il exiger de nouveau paiement de
tous ses nouveaux vassaux : ? Supplément de kalinzi ?
? Indemnité ?
? Autre terminologie à déterminer ?
Le nouveau chef foncier, peut exiger, après sa succession,
un supplément de kalinzi.
Tous ces vassaux doivent-ils un supplément ou seulement
ceux désignés par le nouveau suzerain ?
Tous les vassaux doivent en principe un supplément.
Certain délais peuvent être consentis par le suzerain.
Le nouveau suzerain peut-il exiger un supplément.
Est-ce un droit sanctionné par la coutume ?
Le vassal peut-il refuser de verser un supplément ?
Peut-il être puni par les tribunaux s'il refuse ?
Le nouveau suzerain a le droit moral d'exiger le
supplément de tous ses vassaux, mais, en général il ne
l'exige pas verbalement, les vassaux s'exécutant d'eux-mêmes. Le
vassal ne peut, en principe, refuser de payer le supplément au nouveau
suzerain. Dans le cas d'un fief passant en succession de père à
fils le suzerain ne peut citer en justice le vassal à défaut de
payer.
Quels sont les critères employés pour la fixation
de la valeur du supplément ?
33
Il est impossible de déterminer les critères
précis employés pour la fixation de la valeur du
supplément : la qualité du terrain, la superficie, le
degré de richesse individuelle et m'importance des rapports personnels
d'amitié entre preneur et cédant constituent quelques
critères.
Quel est le moment se paie le supplément ? Il n'existe
aucune règle fixant le moment où doit se payer le
supplément : le moment de versement dépend souvent de la
disponibilité de chacun.
Le bornage de parcelle kalinzi :
? Artificiel ?
? Naturel ?
Une parcelle kalinzi ne se borne jamais artificiellement. En
général, lors de la délimitation par les baganda, les
limites naturelles seront choisies : telles que : rivière, ruisseau,
tête de colline etc...34
CHAPITRE III : IMPACT DES PRATIQUES FONCIERES LOCALES
SUR LA PRODUCTION AGRICOLE A WALUNGU/ CHEFFERIE DE NGWESHE
SECTION I : LES CONFLITS FONCIERS
La terre est actuellement la question politique la plus
importante et une source des multiplications des conflits fonciers dans les
milieux ruraux. L'accent qui est mis sur l'octroi et l'enregistrement de titre
de propriété des terres stimulent les tensions entre individus
qui causent des dégâts tant humains que
matériels.35
Les conflits fonciers sont les conséquences indirectes
des incertitudes foncières liées à l'utilisation du
système foncier dual, à une rareté croissante des terres.
Ils sont révélateurs des évolutions intervenues à
la fois dans le système foncier formelles. Les conflits fonciers sont
les produits des acteurs qui cherchent à occuper l'espace et à
s'y reproduire. Les acteurs se constituent, se développent autours du
foncier, de même leurs stratégies peuvent évoluer à
travers l'histoire36.
34 OUTCHINSKI, op. Cit. p.154-158.
35 BITONGWA MASUMBUKO jacques, Les conflits
coutumiers et fonciers défi au Développement
socioéconomique de Bunyakiri de 1945-2006, mémoire de
licence, ISDR, 2007, p.45
36 MUCHUKIWA RUKAKIZA Yussu Bosco, Les
autorités traditionnelle, pratiques et acteurs fonciers dans la plaine
de la RUZIZI au Sud-Kivu : Etude des stratégies individuelles et
collectives, Université Catholique de Louvain, Mémoire
présenté en vue de l'obtention du grade de Maitre en sociologie,
1992-1993, p.56
34
§1 ORIGINE DES CONFLITS FONCIERS
Les origines des conflits fonciers sont diverses. Mais une
observation attentive de l'évolution du domaine foncier au bushi en
général et dans la chefferie de ngweshe en particulier pousse
à considérer cinq grandes sources d'amplification du
phénomène de dépouillement des terres paysannes.
I. L'imperfection de la loi :
Du fait de la domanialisation des terres des
communautés locales (art. 387 de la loi foncière), les droits
fonciers traditionnels sur les terres villageoises ne constituent plus une
forme de maitrise foncière légalement reconnue et garantie par la
loi. La loi foncière précise, en son article 389, que le droit de
jouissance des villageois acquis sur les terres coutumières seront
fixés par d'autres règlementations. Mais celles-ci n'ont pas
encore été prises. Ce vide juridique a pour effet de laisser les
conditions de non maitrise et d'usage des terres villageoises dans une
situation ambiguë qui constitue une source de confusion et
d'insécurité pour la population exploitante.
II. L'ésotérisme judiciaire :
Ce phénomène n'est qu'une conséquence du
formalisme des instruments juridiques souvent ignorés par les
justiciables (paysannerie). Ce formalisme est à la base de nombreux cas
d'irrecevabilité des causes qui défendent les droits paysans.
C'est ainsi que ces irrecevabilités consacrent et rendent
exécutoires certains cas irréguliers et manifestement injuste.
Ils encouragent une justice dichotomique rendue par les juridictions
coutumières considérées comme incompétentes et par
les juridictions du droit formel. Deux justices planelles qui s'annulent et qui
rarement se confirment et se complètent ; deux justices fondées,
l'une sur le sens profond de l'homme et de la justice paysanne et l'autre un
protectionnisme singulier et individualiste de la propriété et
une conception athéiste de l'autorité de la chose
jugée.
35
III. L'ignorance et la mauvaise application des lois
foncières
A une population majoritairement analphabète, on
applique un droit foncier qu'elle ne connait pas, un droit qui ne cadre pas
avec sa conception coutumière de la propriété
foncière : ceux qui l'appliquent abusent surtout de son ignorance et
induisent volontairement l'autorité en erreur en lui fournissant des
fausses enquêtes de vacance des terres. A ceci, il faut ajouter une
mauvaise interprétation du contrat foncier par les contractants. Chacun
interprète le contrat à son profit.
IV. Les expropriations des terres par la nouvelle
bourgeoisie
Cette expropriation consiste en un détournement des
terres paysannes par les
« Nouveaux riches » n'appartenant à aucune
famille noble, avec la complicité de tous les services juridiques, des
affaires foncières et des hauts fonctionnaires. Disposant des moyens
financiers importants, les commerçants et les élites s'attirent
la sympathie de toute la classe politique et administrative, prête
à leur octroyer tout terrain demandé sur base des faux
procès-verbaux d'enquêtes de vacances des terres de complaisance.
Ce type d'expropriation est très fréquent compte tenue de la
barrière de la coutume d'occupation des terres des certaines
catégorie des gens et d'usage abusif de la nouvelle
réglementation foncière dont les administratifs exploitent les
ficelles pour se procurer de l'argent entre nouveaux riches et nobles
coutumiers représentant la population locale.
L'évolution du marché foncier et de
l'utilisation des réglementations formelles laisse percevoir une
tendance à la concertation des terres dans les mains de la classe de
nouveaux riches composée en grande partie de fonctionnaires et de
commerçants.
En effet, grâce à l'information
privilégiée et aux moyens financiers et relationnels dont elle
dispose, cette classe tire avantage du système foncier dual actuel.
37
§2 Types des conflits :
I. les conflits de succession :
37 MAFIKIRI TSONGO, Mouvement de la population,
accès à la terre et question de Nationalité au Kivu in
Démocratie, enjeux fonciers et pratiques locales en Afrique, paul
MATHIEU et al, Institut Africain-CEDAF, Harmattan Paris, Bruxelle-Brussel,
Décembre, 1996. 187-191.
36
La mort d'un tenant foncier a souvent été au
Bushi en générale et particulièrement dans la chefferie de
ngweshe l'occasion de conflits (fonciers) soit entre les héritiers du
decujus, soit entre ceux-ci et les « dépendants fonciers » de
ce dernier. Plusieurs types de situations peuvent se présenter.
1. Contestation d'une dévolution
testamentaire ou d'une libéralité
Depuis quelques années, on assiste dans le Bushi
à la pratique du testament écrit et parfois de la
libéralité comme procédé de transmission des droits
fonciers entre vifs ou à cause de mort. Cette pratique en
individualisant les droits fonciers ce qui permet d'en disposer en toute
liberté-contredit bien souvent la coutume au point de vue du
régime foncier et successoral et suscite des contestations.
2. Cas d'absence du testament
Nombreux sont cependant aussi les conflits qui
résultent de l'absence de testament. Les contestations portent en
cas-ci, soit sur le pâturage d'une succession ou la vente des terres
appartenant à la succession, soit se rapportant au sort
réservé, selon le cas, au conjoint survivant et aux «
dépendants fonciers » du decujus.
En ce qui concerne le pâturage de la succession, lorsque
le decujus n'a pas exprimé ses volontés, la pratique est d'en
laisser le soin au fils ainé qui hérite du nom. Assez souvent,
celui-ci se contente de la famille sur les parcelles qu'ils cultivaient du
vivant de celui-ci.
Les conflits ne naissent qu'à partir du moment
où le fils héritier entreprend d'arracher à ses
frères et/ou soeurs les parcelles qu'ils exploitent. Nous avons
observé, en effet; que la quasi-totalité des conflits
intrafamiliaux liés à la terre résultent de la vente par
le fils héritier de parcelles que ses frères et soeurs ou le(s)
conjoint(s) survivant considèrent comme leur appartenant.
Les conflits qui opposent assez souvent l'héritier du
decujus aux « dépendant fonciers » de celui-ci
obéissent à ce souvent à ce même schéma
élémentaire : le fils héritier tente de prendre une
parcelle à son titulaire soit en prétexte que le « kalinzi
» (redevance coutumière) n'a pas été payé ou
que le terrain a été cédé en « bwassa »
(détention précaire), soit en appliquant à ceux qui ont
revendu leurs parcelles, le sort réservé à celui qui a
émigré. En ce dernier cas, en effet, la coutume prévoit
que la terre retourne dans le patrimoine du « suzerain » («
N'aha mwabo »). Ces cas des conflits sont très fréquents
dans le Bushi.
37
3. Sort du conjoint survivant
Certains conflits de succession opposent enfin
l'héritier au conjoint survivant du decujus. En principe, la (les)
femme(s) du decujus continuent à exploiter leurs terres jusqu'au jour
où elles se remarient. A défaut de remariage, le droit de
jouissance du ou des conjoints survivant est viager. Les contestations naissent
lorsque le fils héritier tente de reprendre les parcelles que les
conjoints survivant ne peuvent plus exploiter personnellement et font cultiver
par leurs filles déjà mariées. On a vu également le
maitre du decujus tenter de reprendre les terres de ce dernier après le
remariage de la veuve. Le decujus dans ce dernier cas n'avait pas laissé
de progéniture.
II. Les conflits liés à la circulation des
droits
Dans la chefferie de ngweshe, la circulation des droits
fonciers suscite également de nombreuses contestations. Les cas de
figure sont d'une telle variété qu'on ne serait les
évoquer tous systématiquement. Toutefois, on peut dire
globalement que les conflits résultent soit d'une double attribution
d'un même terrain, soit de la vente de la terre.
1. Double attribution d'un terrain
Trois types de situations conflictuelles se présentent
assez souvent lors des attributions des terres : dans certains cas, le terrain
est attribué à deux « concessionnaires »
différents par une même autorité coutumière ou un
même tenant foncier, dans d'autres cas, il est concurremment
attribué à des concessionnaires diffèrent par des
autorités coutumières différentes ; dans d'autres cas
encore, l'attribution concurrente du terrain est l'oeuvre respectivement d'une
autorité coutumière et d'une autorité moderne.
2. La vente des terres
Le développement depuis un peu plus de deux
décennies de la vente des terres comme mode de transmission des droits
fonciers, s'accompagne d'une multiplication des conflits fonciers. Ces ventes
constituent en fait une variante actuelle de la problématique du droit
de reprise. Elles s'inscrivent donc également dans la dynamique des
rapports de dépendance, une dynamique très conflictuelle du point
de vue de ses implications foncières.
38
La plupart de ces ventes frauduleuses présentent une des
structures suivantes :
1. Un concessionnaire coutumier installe un gardien sur sa
parcelle. Ce dernier rachète La parcelle auprès de celui qui
l'avait cédée à son commettant. Le vendeur en
l'espèce de considère l'absence de son « sujet » comme
une émigration. Il arrive toutefois également que le gardien
vende de son propre chef de terrain placé sous la surveillance. La plus
part des concessionnaires coutumiers qui se sont installés dans les
villes pour diverses raisons (travail, exercice de son négoce ...) sont
exposés à ce type de conflit.
2. La grande majorité des paysans par contre sont
souvent aux prises avec leurs « maitres », chaque fois que ceux-ci,
en proie à des difficultés matériels, tentent de
répondre, au détriment des premiers, aux demandes des terres qui
leur sont adressées par des candidats plus fortunés. A cette fin,
en effet, les autorités foncières coutumières (ici au sens
large) réinterprètent le type de rapport foncier qui existe entre
elles et leurs dépendants. Le kalinzi étant à l'origine
modeste, les autorités foncières ont de plus en plus tendance
à assimiler au Bwassa ; un contrat précaire, non créateur
de droits fonciers et, par conséquent, à exiger le paiement d'un
nouveau kalinzi, sans quoi elles revendraient le terrain.
3. Les crises de succession à la tête d'une
chefferie ou d'un groupement coutumier constituent également à
ces jours-ci l'occasion de conflits fonciers. Le groupe qui triomphe de la
rivalité, revend parfois les terres de ceux qui ont appuyé avec
acharnement l'adversaire et ont dû prendre la faute au moment des
hostilités. Le conflit de succession illustre très bien cette
pratique qui est une sorte de résurgence du « kunyaga »
(confiscation générale) interdit à l'époque
coloniale. De nombreux procès opposent aujourd'hui à ngweshe dans
le territoire de walungu, à propos de la terre, les partisans respectifs
des protagonistes dont les uns ont rachetés les terres des autres.
Si la vente des terres (et les conflits qu'elle suscite)
procède fondamentalement des dynamiques sociales que nous avons
décrites dans les paragraphes qui précèdent, elle donne
lieu également à des situations d'un type nouveau. On a vu, en
effet, les enfants d'un concessionnaire coutumier contester vigoureusement la
vente du terrain opérée par celui-ci, au motif que leur substance
dépendant dudit terrain. Dans un autre cas, une famille (cinq
frères consanguins) s'est cotisée pour réunir l'argent
nécessaire à l'acquisition d'un terrain. La transaction se
déroula au nom d'un frère ainé, quoique sa participation
financière fût modeste. Le conflit naquit au moment où les
quatre autres demandèrent le partage du terrain
39
au prorata des contributions au prix d'achat. Ce type de conflit
va probablement se
développer à l'avenir en raison de la
rareté des terres et du caractère de plus en plus onéreux
du kalinzi.
III. les conflits des limites et des occupations de
fait
Etant donné que les limites entre concessions voisines
ne sont pas toujours bien marquées sur le terrain et en raison de
l'absence d'un plan cadastral rural, les conflits naissent aussi de
l'empiètement sur les concessions voisines. Plusieurs cas de figure
peuvent se présenter. Dans certains cas, le concessionnaire
dépasse les limites qui lui ont été fixé par les
« baganda » et réalise ainsi des cultures sur une partie de
terrain appartenant au cédant. Parfois la contradiction entre le
cédant et le concessionnaire est le fait des « baganda » qui
ont porté les limites au-delà de ce que le cédant leur
à indiquer.
Des évènements naturels, tels les
détournements du lit d'une rivière ou le ravinement, ont parfois
aussi été l'occasion d'un conflit entre concessionnaires
voisins.
L'un des concessionnaire pourrait, en effet, étendre de
nature, son terrain jusqu'à la nouvelle « limite naturelle »
(la rivière ou le sillon).
Une variante des conflits de limites qui prend de l'ampleur
ces dernières années, ce sont les occupations de fait (ou
considérées comme telles) de parties de terrain appartenant
à autrui.
Ces occupations de fait sont souvent l'oeuvre de personnes
entre lesquels il existe un rapport de dépendance foncière. Elles
résultent d'une relecture des termes des conventions : une des parties
au litige prétend avoir acquis entièrement le terrain en kalinzi
; l'autre lui rétorque que ce droit ne porte que sur une partie du
terrain, le reste ayant été cédé à titre
précaire. En effet, il arrive que le détenteur précaire
d'un terrain (bwassa) cherche frauduleusement à consolider ses droits
sur celui-ci, en y érigeant des constructions ou en y incorporant des
cultures pérennes (arbres, bananeraies). Il arrive cependant aussi que
le maitre réoccupe une partie du terrain de son sujet en
prétextant que ladite partie avait été cédée
à titre précaire. Assez souvent, il profitera de ce que la
parcelle concernée est en jachère.
Après avoir décrit les grands types de conflits
dans le bushi en générale et particulièrement dans le
territoire de Walungu dans sa chefferie de Ngweshe, nous pouvons à
présent en analysant les principales caractéristiques.
La diversité des parties prenantes aux conflits
suggère naturellement la diversité des enjeux. Au-delà de
la sécurisation de la tenure. Les acteurs cherchent à travers les
conflits à
40
§ 2 Les caractéristiques des différents
types de conflits
La typologie que nous venons de présenter laisse
apparaitre une multiplicité d'acteurs susceptible de s'affronter autour
des enjeux fonciers. Nous allons par conséquent essayer de
dégager les caractéristiques des acteurs engagés dans un
conflit et les enjeux des confrontations entre ces derniers.
I. les acteurs des conflits
Contrairement à ce qu'on peut observer dans certaines
parties du Kivu montagneux ou les conflits mettent aux prises les agriculteurs
et les éleveurs, les conflits fonciers dans le Bushi opposent
fondamentalement des paysans entre eux. A l'intérieur, toutefois, cette
catégorie générique que sont les paysans, il est important
de distinguer les conflits qui opposent d'abord les ainés et leurs
cadets au sein d'une famille ; ensuite, les paysans stricto sensu et les
notables fonciers et ces derniers entre eux ; enfin, les migrants urbains (qui
ont installé des gardiens sur leurs terres) et les notables fonciers.
Rares sont les conflits qui opposent les paysans aux gros concessionnaires
(sociétés, grands planteurs...).
Dans la plupart des cas de conflits foncier, les acteurs
agissent individuellement. Le conflit met toutefois en scène, en vue de
sa solution, les seuls conflits collectifs que nous avons pu identifier dans le
Bushi, ont opposé l'Etat à l'occasion des expropriations
décidées par lui. Les conflits fonciers dans le Bushi n'opposent
donc pas des acteurs collectifs, tels que les clans, les villages,... ils
n'opposent pas non plus les autochtones aux immigrés, encore moins le
groupe qui se prévaudrait du droit de premier occupant aux autres.
Au plan de la sécurité des droits fonciers, la
position sociale de l'acheteur est déterminante. L'acte
générateur de conflit est généralement le fait de
celui qui est dans un rapport de force favorable, en raison soit de son statut
social (notable, ainé), soit de sa richesse. Ce sont par
conséquent des petits paysans pauvres qui prennent assez souvent
l'initiative de l'action en justice. La position défavorable qui est la
leur les oblige nous le verrons plus loin à multiplier les
démarche et à recourir aux services de « médiateurs
».
II. les enjeux des conflits
41
améliorer leur position de pouvoir et de revenu. Ces
conflits permettent de repérer les enjeux fonciers aux échelles
familiales et extra-familiales. Selon le cas nous allons l'examiner ci-dessous,
on cherche la maitrise de l'ordre familiale ou la maitrise des rapports
locaux.
1. Maitrise de l'ordre familiale
Les conflits fonciers qui opposent les membres d'une
même famille, avons-nous vu, résultent soit d'un mauvais partage
de la succession, soit de la vente d'un bien appartenant à une
succession. De manière générale, ce sont les cadets qui
prennent l'initiative de l'action en justice.
De ce type de conflit, il ressort généralement
une préoccupation essentielle : c'est que l'ordre familial doit à
tout prix être préservé. Les ainées tentent en
effet, lorsqu'ils le peuvent, reproduire le principe successoral coutumier dans
sa formulation ancienne (cfr supra). La maitrise foncière en ce cas-ci
leurs permettrait de sauvegarder leur autorité à
l'intérieur de la famille, tout au moins sur les membres de celui-ci qui
sont demandeurs de terre.
Les règles du partage de succession a, toutefois,
réduit l'emprise des ainés sur les cadets. Les premiers
conservent néanmoins le droit de s'opposer aux actes d'aliénation
posés par les seconds. De même, les cadets disposent de cette
faculté pour empêcher l'appauvrissement du patrimoine familial par
les ainés.
S'agissant de cette emprise des ainés, on constate
d'ailleurs que plus la famille ne s'étend, plus les liens, les
hiérarchies familiales s'effritent.
Il apparait, en somme que la dynamique interne de la famille
et les trajectoires spécifiques de différentes composantes de
celle-ci déterminent des conflits fonciers. Les conflits fonciers sont
les révélateurs d'une difficile restructuration de l'ordre
familial médiatisée par le foncier.
2. Maitrise des rapports sociaux
Débordant le cadre familial, le conflit ci-dessus
permet de repérer un second niveau d'enjeux. Au lieu de se disputer des
terres de manière explicite, les deux « frères » en
conflit se disputent des allégeances. Ceci nous amène à
affirmer que l'enjeu majeur dans les
42
conflits fonciers extra-familiaux est, au-delà de la
main mise sur le sol, la recherche pour les uns de la maitrise de l'espace
social villageois, par le biais de la reproduction des structures
d'autorités et d'allégeance ; pour les autres, à
défaut de s'émanciper à l'égard de telles
structures, la recherche de la sécurité de tenure
foncière.
La maitrise des rapports sociaux et la recherche de
l'émancipation selon le cas occultent en fait d'autres enjeux :
politique et économique. Les notables fonciers en effet, en s'assurant
comme autrefois, le contrôle de la paysannerie par le biais du foncier,
se créent de nouvelles opportunités. Non seulement ils
perçoivent une rente de plus en plus substantielle sur l'activité
des paysans, mais en plus, ils peuvent tirer profit des relations qu'ils
entretiennent avec les élus locaux. A ce propos en effet, plus est
grande la clientèle sociale d'un notable (et naturellement son
prestige), plus il fera l'objet de sollicitude de la part des élus
locaux.
On pourrait dès lors interpréter les conflits
fonciers opposant les notables entre eux, ou ceux opposant les notables et els
migrants urbains comme essentiellement des conflits de pouvoir. Ces derniers
notamment en raison de la distance physique et de leurs conflits de pouvoir.
Ces derniers notamment en raison de la distance physique et de leurs
activités en ville, échappent aux contraintes découlant
des rapports fonciers. Au contraire, en même temps qu'ils créent
une distance sociale avec les hiérarchies dont ils dépendaient
traditionnellement, ils recréent à leur profit les mêmes
rapports clientélistes. Les notables coutumiers, se sentant
menacés par cet état de choses, « réattribuent »
alors les terres de ces migrants sinon aux propres gradients de ceux-ci, du
moins à de nouveaux candidats sur lesquels ils pourraient avoir une
emprise plus certaine.
En ce qui concerne le paysan, par contre, c'est l'enjeu
économique qui fondamentalement explique son esprit procédurier
et sa propension à s'émanciper des contraintes coutumières
découlant du foncier. La terre est en effet pour le paysan le facteur
clé pour se créer un revenu. Par contre, ledit notable peut lui
assurer la sécurité de cette tenure. Dou le
phénomène des occupations de fait.
On peut dire en somme qu'au coeur des conflits fonciers, il y
a la recherche d'une maitrise de l'espace, lequel est perçu de
manière différente en fonction de la position sociale des
acteurs. Pour les uns (les autorités foncières traditionnelles et
les élites politiques), l'espace est vue comme lieu de socialisation
et/ou d'actualisation du rapport « politique » et économique ;
pour les autres, (les élites commerçants et spécialement
les
43
paysans), il est perçu surtout comme un lieu de
production et donc celui à partir duquel ils s'insèrent dans le
marché. Ce sont ces préoccupations différentes des
acteurs, leurs perspectives et leur poids social respectif qui vont
déterminer les trajectoires des conflits fonciers.38
SECTION II : LES RAPPORTS FONCIERS DE PRODUCTION :
Problématique des redevances foncières
§1 le contrat précaire (Bwassa) dans les
plantations
Le bwassa est une forme de contrat locatif donnant à
l'emprunteur le droit d'usage d'un terrain pour une courte durée
(souvent : une seule récolte) et dont le prix de location se calcule en
général proportionnellement aux bénéfices
réalisées et se règle, par conséquent à
posteriori.
Dans son esprit, le Bwassa ne porte sur la plantation de
cultures annuelles quelles qu'elles soient mais à l'exclusion de toute
culture considérée, à juste titre ou non comme dangereuse
à la collectivité (par exemple : chanvre). Il ne peut être
conclu de contrat Bwassa pour la plantation des cultures pérenne pour de
boisement artificiel (sauf entente spéciale avec le bailleur) ou pour
l'installation de huttes destinées à une résidence
permanente, le demandeur doit se présenter sans témoin pour
l'introduction de sa demande. Celle-ci étant reçue, le bailleur
envoie un témoin qui accompagne le demandeur avec office de
délimiter le fonds ; ce témoin est rarement appelé «
MUGANDA » ; plus souvent « MUHAMIRIZI ». Il témoignera
pour le bailleur en cas de contestation ultérieur ; aucune restriction
de la part du locateur n'est prévue pour le témoin, aucune autre
cérémonie coutumière ne célèbre l'accord.
En cas de dégradation, le bailleur ne connait que le
premier locataire, le sous-locataire doit répondre directement devant le
locataire principal. Il y a obligation de mise en valeur par le locataire pour
pouvoir garantir au bailleur le paiement à posteriori. En cas de non
mise en valeur, la rupture du contrat peut être décidée par
le bailleur. Le bailleur ne peut rompre le contrat avant que ne soit
réellement fait preuve de ce qu'aucune mise en valeur ne suivra. On peut
considérer comme délai normal le cycle cultural du produit : en
cas de non mise en valeur pour un premier cycle un nouveau contrat devra
être conclu pour un second. En principe, l'accord « Bwassa »
initial ne porta que sur une seule culture annuelle et sa durée est
38 MUGANGU MATABARO Séverin, op cit,
thèse, p.283-295
44
donc déterminée par le cycle cultural de
celle-ci. Cependant, on voit souvent un accord Bwassa évoluer en accord
« OBUHASHE » suite à une entente entre bailleur et locataire :
en cas, il peut porter sur plusieurs cycles culturaux. Le bailleur n'est jamais
tenu de garantir le locataire du trouble que des tiers apportent par voies de
fait ou autre à sa jouissance. C'est au locataire de se protéger.
Le prix de location s'appelé « Ntumulo ». Le Ntumulo
étant proportionnel au bénéfice, il se règle
après la récolte, certain accord Bwassa prévoient le
versement acompte. L'acompte à la redevance Ntumulo ne doit pas
être restitué dans le cas d'abandon du fonds par le locataire. La
valeur du Ntumulo n'est pas arithmétiquement chiffrable. Elle
résulte souvent de la déclaration des bénéfices
telle que faite par le bénéficiaire, en cas de
décès du bailleur, le témoin du premier accord servira aux
héritiers, sans que de nouvelles formalités de
délimitations soient entreprises.
§2 Exploitation des Marais (formules
contractuelles)
Dans les marais, les acteurs fonciers sont, d'une part, les
chefs de villages (représentant du Mwami et gestionnaires des zones
appelées « Ndalo », dans des marais collectifs ; un petit
marais ou de taille moyenne, en général géré par un
seul chef de village, s'appelle « Nfunda » et d'autre part, les
« Bwassa » locataire terriens, exploitant les lopins ou parcelles
composant les « Ndalo » ou les « Nfunda ». Les chefs de
villages (Barhambo) gèrent et contrôlent l'usage de l'espace
(Ndalo/Nfunda) sous leur responsabilité, sans interférence
mutuelle. Chacun, du fait de ses rapports lignagers avec le Mwami. Un chef de
groupement de la lignée du Mwami peut, lui, gérer et
contrôler un « Ndalo » ou un « Nfunda » sis dans son
entité (le groupement).
Il faut noter que la gestion du « Nfunda » ou du
« Ndalo » est plus liée aux relations lignagères avec
le Mwami qu'aux fonctions que confère le titre de chef de groupement.
Normalement, le Mwami, moins, moins encore le chef de groupement ou de village
ne doivent pas vendre ou donner à titre définitif les marais ou
une portion de marais, du fait de leur statut communautaire. Ils peuvent juste
attribuer des parcelles (champs) à leurs dépendants, chefs des
familles qui les gèrent en patrimoine familial et non en
propriété privée. Souvent, dans les marais non
drainés, il y a des inondations. Il s'ensuit, entre autres, des
conséquences foncières : à la décrue de la
rivière principale, les eaux d'inondations tracent de nouveaux drains
qui deviennent de nouveaux repères des limités ; aussi, les
d'inondations fondent la terre et nivellent les repères des limites ; de
même que les mêmes eaux, chargées
45
des terres arrachées des collines peuvent bourrer les
canaux qui servaient limités sur une étendue. Tout cela engendre
des conflits et problèmes fonciers.
La rivière qui généralement est un
repère de limites très prisé, peut changer de lit et
créer la confusion de limites sur une étendue. Cela conduit
à des faits accomplis mais engendre des lamentations. Les marais
constituent donc un patrimoine communautaire et restent d'usage collectif. Tout
contrat ayant rapport à la cession temporaire ou définitive y est
prohibé. Le Kalinzi et le Bugule n'y sont donc pas d'application. Seul
le « Bwassa » (location) y prévaut. Celui qui obtient ainsi le
champ ne l'acquiert pas en propriété, mais il en a le droit de
jouissance qui appartiendra à sa postérité aussi longtemps
qu'existe le droit sur la parcelle39. Le Bwassa dans les marais
n'est qu'un droit d'usage agricole sur la terre généralement
acquise suite à un défrichement. Normalement, aucun prix ne
devrait être payé à l'occupation et la pratique de
redevance saisonnière sur récolte disparaît de plus en
plus. Ce droit dure tant que la trace du travail perdure sur la terre à
sa disposition. Ce droit de culture est transférable aux membres de sa
famille ou à ses amis, pourvu qu'on en informe préalablement le
chef gestionnaire et /ou le comité du Ndalo/Nfunda.
Généralement, à cause de leur
fertilité, des apports alluvionnaires qui proviennent de flancs des
collines40, les champs en terres des marais sont très
sollicités. Tout abandon fait rapidement perdre les droits de cultures.
S'il y a recru d'herbes sur la parcelle, elle est fréquemment
sollicitées par d'autres cultivateurs et le chef gestionnaire et /ou le
comité ou Nfunda peuvent la céder sans aucune forme de
procès.
Actuellement, le droit de culture semble de plus en plus se
gérer au niveau du Ndalo/Nfunda par le gestionnaire foncier qui associe
de plus en plus le comité du Ndalo ou du Nfunda. Les décisions
unilatérales des chefs sont souvent contredites au sein des groupes
d'exploitants. Ce qui engendre des conflits, s'il ne répare pas vite.
L'intérêt accru porté aux sols des marais s'accompagne des
problèmes d'exploitation et de gestion des champs, d'application des
conventions (règle de jeu) et partant, des problèmes des
relations entre acteurs fonciers.
Le drainage et l'exploitation des terres des marais sont
exigeants en travail et sont souvent menacé par les briqueteries comme
fut le cas de marais kanyatende dans le groupement de karhongo.41
Ils demandent plus d'efforts que sur les champs des villages et collines. Or,
les règles de jeu exigent de ne pas laisser le champ en jachère
ou inexploité même pendant une
39 DIOBASS, vers une bonne gouvernance des
ressources naturelles collectives dans la région de Grands Lacs
Africains, 2014, p 56
40 BISHWEKA Antoine, Monographie de la
chefferie de Ngweshe, édition du Projet PAIDECO WAGA, Bukavu, 2010,
P.50.
41 DIOBASS, Atelier sur la Gestion des Marais
à Ngweshe, Bandari, 2000, p.3
46
seule saison culturale au risque de l'attribuer à
d'autres cultivateurs (trices) disponibles et plus capables. Le cas de retrait
des champs aux incapables crée des conflits surtout lorsque le premier
occupant qui s'estime en plein droit tente de récupérer le champ
déjà mis en valeur par le nouvel occupant. Cela engendre un
triple conflit. D'abord, entre les deux cultivateurs, ensuite entre le premier
occupant et le gestionnaire foncier (chef foncier ou comité de
Ndalo/Nfunda) et, enfin le nouvel occupant et le gestionnaire foncier.
Lorsqu'il éclate un conflit dans la gestion des champs de marais (soit
entre les bénéficiaires eux-mêmes, à cause des
limites soit entre un d'eux avec le chef de village), trois voies de
règlement de conflit sont envisagées :
- les occupants des champs contigus peuvent intervenir ; et
grâce à leurs conseils, remettre l'entente rompue entre les deux
querelleurs ; c'est le niveau élémentaire, banal mais pacifique
Qui, par moment et endroit résout pas mal de querelles qui
dégénéreraient en combats sanglants.
- Faute d'avoir emprunté cette voie ou après
échec, les parties embrassent le deuxième niveau, Celui du
comité « Ndalo » c'est-à-dire, une association des
exploitants des champs des marais. Ledit comité lequel, s'il le faut,
fait une descente sur terrain, essaie de remettre l'harmonie entre les membres
de cette association ou entre eux et le gestionnaire des champs (Bashamuka ou
chef de village.)
- Les problèmes fonciers des champs des marais
n'atteignent pas le niveau judiciaire ; ils se bornent aux instances
coutumières (chef de village ou, le cas échéant, et rare,
du reste, le chef de groupement.). Mais, à cette instance se pose un
problème sérieux que rencontreraient les occupants des champs de
marais lorsqu'ils sont opposés au chef de village : celui-ci ferait le
juge et la partie ! Les locataires, du fait du long temps d'exploitation du
champ, ont finalement tendance à considérer les terres à
leur usage comme leur propriété. Parfois, ils les cèdent
(aliènent) à leur gré ; ce qui constitue un triple litige
qui oppose :
- le gestionnaire foncier au premier occupant, qui a
cédé, considéré comme escroc par le gérant
foncier, le gestionnaire premier ou le deuxième occupant
(considéré comme illégal par le gérant, celui qui a
cédé (premier occupant) à celui qui a reçu
(deuxième occupant). Certains Chefs fonciers gestionnaires de
Ndalo/Nfunda finissent par les approprier et les aliéner au
détriment de petits exploitants et du Mwami.
D'autres chefs usent d'une grande discrimination non seulement
dans la distribution des champs où l'on observe des
inégalités entre les proches, amis envoyés du chef
(Barhonyi) et les simples citoyens (Rhushi kwone). Ces premiers peuvent obtenir
des champs pouvant atteindre 1 hectare, les autres moins de 10 ares,
(10ème d'hectare) pendant que c'est cette
47
deuxième catégorie de
bénéficiaires (Rhushi kwone) qui, souvent, ont pris l'initiative
de drainer le marais, y ont investi leur force et leur temps, pour se voir
léser lors du partage des résultats.
Ces aînés des chefs obtiennent de grandes
étendues non pour les cultiver eux-mêmes mais les Distribuer
moyennant tribut en espèce, en nature (poule, chèvre, mouton) ou
en travail.
- Souvent les aînés des chefs ne participent pas
eux-mêmes aux travaux communautaires si ce N'est que pour accompagner
leurs dépendants. Certaines concessions privées ont des
extensions sur les marais. Leurs limites ont vraisemblablement
été étendues vers les terres collectives s'appropriant
ainsi des terres indues au détriment des populations et de la
chefferie.42
§3 LE « BUGISHA » : actualité de
l'institution
Le « bugisha » est une réalité
coutumière du bushi que l'on peut appeler transhumance pastorale qui
consiste pour les éleveurs de se déplacer avec le troupeau
à la recherche du pâturage. Cette technique se déroule
souvent pendant la saison sèche probablement en Mars et Avril quand il
n'y a pas des fourrages pour les bêtes, les « bagisha : les
éleveurs qui pratiquent le bugisha » installent les « biralos
: maison ou vivent les bagisha » sur le lieu où ils pratiqueront le
Bugisha, mais avant tout ceci un préalable doit être conclus entre
les éleveurs et les propriétaires terriens ou les bêtes
seront entre de prendre les fourrages, les éleveurs doivent
négocier la terre ou près des propriétaires de ces
terrains qui peuvent le céder soit en bugule, soit en bwassa et le prix
sera proportionnellement calculer selon la convention, une fois les
éleveurs acquiert l'autorisation, il s'y installent en y plaçant
leurs habitations, leurs champs ou ils resterons durant toute la saison
sèche pour y revenir durant la saison pluvieuse souvent en Septembre ou
Octobre. Cette pratique date de plusieurs années à ngweshe ou
elle se pratiquait en grande échelle mais suite à un climat
exagérer d'insécurité, de pillage de bêtes elle a
subit une régression et ne reste qu'à petite échelle dans
certains groupements de la chefferie comme : Mulamba, Kaniola, Lurhala et
Luntukulu.
Contrairement à d'autres milieux, dans les milieux ou
se pratique le bugisha la production animale est très
élevée et est de bonne qualité. (Entretient faite à
Ngweshe le 08/08/2016).
42 M. JEAN-BAPTISTE Safari Bagula et Bakwi Jules,
op cit, p.3
48
§4 La production de la Braise
Relativement à la loi n° 11/009 du 09 juillet 2011
portant principes fondamentaux relatifs à la protection de
l'environnement dans son exposé de motif paragraphe 2 qui stipule que :
« Parmi les dommages causés à l'environnement figurent
notamment la diminution de la diversité biologique, la pollution du sol,
de l'air et de l'eau, la destruction de la couche d'ozone, la diminution de la
fertilité du sol, la désertification, l'épuisement des
ressources halieutiques, et la détérioration du patrimoine
naturel et culturel. » il y a lieu d'affirmer que la production de la
braise tel que se pratique à Ngweshe a des conséquences
néfaste sur l'environnement et doit être réglementer tel
que le prévoit la dite législation. A ngweshe la production de la
braise se fait d'une manière artisanale avec les producteurs qui ne sont
pas outiller en équipement approprié, les producteurs ne respecte
pas la loi environnementale, ils polluent l'environnement non seulement en
abattant les arbres mais aussi en dégageant les fumées qui
polluent l'aire. Le service de l'environnement du territoire de walungu
n'arrive pas à bien maitriser la gestion de la production de la braise
dans la chefferie de ngweshe, les statistiques de la production en braise ne
sont ni maitrisé par le service de l'environnement du territoire ni par
les producteurs eux-mêmes, ceci nous amène à confirmer une
fois de plus que la gestion environnementale tel que le prévoit
l'article 10, 11 et 14 de cette législation ne pas respecter dans cette
contrée. Les producteurs produisent la braise qu'elles vendent au
près des acheteurs grossistes qui a leurs tours les vendes aussi aux
détaillants venant de partout.
§5 La construction des écoles et autres
ouvrages collectifs (adduction d'eau, dispensaire, foyer sociaux, etc...)
L'affectation des terrains aux infrastructures ou projet
communautaire (écoles, dispensaire, foyers sociaux, etc.,...) est
généralement décidée par les autorités
coutumières du lieu. Selon le cas, l'affectation est le fait du chef de
secteur, de groupement, de localité ou du village. Le chef
concerné entouré de ses collaborateurs délimite l'espace
ou sera érigé l'ouvrage projeté. Il s'agit
généralement des terrains non occupés ni
revendiqués par une famille ou un particulier. L'affectation du terrain
se fait verbalement. Une pratique se fait toutefois jour actuellement : la
délivrance d'un « acte de propriété » par le
chef. Elle est par ailleurs gratuite il n'est cependant pas rare qu'un cadeau
soit remis au chef, d'après certains enquêtés. Lorsque le
terrain convoité pour accueillir les infrastructures communautaires
49
appartient à des particuliers, la pratique locale est
de leur racheter. L'acte de vente est dans ce cas certifié par
l'autorité locale qui agit comme « témoin instrumentaire
»43
§6 l'exploitation artisanale des minerais : cas de
MUKUNGWE
L'ONU distingue trois types d'exploitation minière :
grandes mines (exploitation industrielle ou à grande échelle),
petites mines (exploitation semi- industrielle ou à petite
échelle) et les mines artisanales (exploitation artisanale ou
traditionnelle) C'est cette dernière qui concerne notre étude.
Selon le code minier congolais, en son article premier,
l'exploitation traditionnelle ou artisanale est toute activité par
laquelle une personne physique de nationalité congolaise se livre, dans
une zone d'exploitation artisanale délimitée en surface et en
profondeur jusqu'à trente mètres au maximum, à extraire et
à concentrer des substances minérales en utilisant des outils,
des méthodes et des procédés non industriels44.
Un article du Département des Affaires Economiques et Sociales des
Nations Unies ajoute que, l'exploitation artisanale c'est l'utilisation directe
de l'énergie humaine dans l'extraction des minerais45.
La principale mine d'or se situe à Mukungwe en groupement
de Mushinga.
La mine est située entre 3 collectivités :
LUHWINDJA, BURHINYI et NGWESHE à cheval entre le territoire de MWENGA et
WALUNGU à plus ou moins 60 km de la ville de BUKAVU. Elle a
été découverte en 197846 et exploitée
depuis plus de 40 ans. On estime à 270 exploitants artisanaux (artisans
réguliers appelés PDG) sur une population moyenne de 5000
personnes vivant de produit de la mine. Sur le plan foncier, la mine de
Mukungwe appartiendrait à la SOMIKI Sprl (Société Agricole
Minière du Kivu), titre querellé et qui est à l'origine de
conflit entre la famille RUBANGO allié à la famille CHUNU contre
la famille KURHENGA MUZIMU.
43 MUHIGWA BAHANANGA jean berckmans, BIREMBO rigobert,
MUCUKIWA RUKAKIZA yussu bosco, MUGANGU MATABARO Séverin, JEAN MARIE
BANTU, USUNGO jacques, Le massif d'Itombwe, le peuple et la terre,
Bureau d'étude scientifique et technique (BEST), Bukavu, p.86.
44 Journal Officiel de la RDC n° spécial du 15
juillet 2002, loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier,
p32.
45 AYBEKA KOPIKAMA Jean de Dieu, Exploitation artisanale
de l'or et développement en territoires de Mambasa et Wamba (province
orientale, RD Congo) Mémoire de licence, Université
Catholique du Graben, 2010, p.8
46 GREGORY Mthembu-Salter, Étude de Base 2: Mine d'or
artisanale de Mukungwe, au Sud-Kivu, République démocratique du
Congo, Phuzumoya Consulting, Novembre 2014, p.92
47 OGP, op cit, p.33
50
La mine de Mukungwe dispose de quelques équipements
parmi lesquels 150 motopompes, plus de 500 barre à mines et l'on compte
plus de 1500 bêches. En périodes de production, la mine produit
21,5 grammes d'or par jour. Il y a plusieurs acteurs (parties prenantes) qui
gèrent la mine. Toutefois, nombreux témoins que nous avons
contactés affirment que 50 à 60% de la production de la mine
échappent aux statistiques officielles et passent par des circuits
mafieux.47
SECTION III : IMPACT DES PRATIQUES FONCIERES SUR LA
PRODUCTION PAYSANNE
§1 système d'agriculture paysanne :
On distingue dans le Bushi deux types d'exploitations : les
exploitations agricoles familiales et les plantations. A l`intérieur de
l'exploitation agricole familiale, nous distinguons également
contrairement aux plantations qui ne pratiquent que des cultures industrielles
(thé, café, quinquina), deux types de cultures : les cultures
vivrières paysannes et les cultures de rentes paysannes. Parmi ces
dernières cultures, les bananeraies occupe une position
particulière, comme autrefois.
I. exploitation agricole paysanne :
La structure d'exploitation agricole familiale dans le
territoire de walungu/ chefferie de ngweshe reflète une division
sexuelle du travail. L'agriculture vivrière de substance est le fait de
la femme, tandis que les cultures de rente, plus rémunératrices,
sont le privilège de l'homme.
II. L'agriculture de substance
En 1958, l'agronome HECQ constatait déjà que la
superficie des sols à cultures
vivrières permanente décroissait
régulièrement en faveur de celle destinée à la
bananeraie. Cette tendance a continué dans la période qui a
suivi.
Comme autre fois, les champs sont installés en deux
lieux et sous des contrats les plus divers. A partir de l'enclos
résidentiel, pris comme centre, on trouve successivement les types des
champs ci-après :
1. Sur les terres obtenues en Kalinzi : il y a d'abord la
bananeraie des toutes les variétés (variétés des
bananeraies en annexes). En bordure de celle-ci,
51
se pratiquent la plus part des cultures ou associations
principales: patate douces, haricots, associations haricots-mais-sorgho et
haricot-mais-manioc.
2. Sur les terres en Bwassa, on trouve les mêmes cultures
qu'en kalinzi. Le Bwassa est devenu un complément spécial
indispensable aux familles, en Raison de la rareté des terres
susceptibles d'être acquise en kalinzi.
En plus des cultures citées ci-dessus, on produit dans
la chefferie de ngweshe : l'igname, les petits pois, la pomme de terre, le soja
et la culture maraichère (amarantes, chou blanc, chou rouge, chou vert,
chou-fleur, le céleri, la carotte, l'é pinard, la salade, le
navet, le radis, l'artichaut, l'aubergine, le poireau etc...). Ces cultures
sont essentiellement destinées à la vente.
Par le passé, ce sont la banane, le haricot et la
patate douce qui fournissaient la base alimentaire. Mais sous la période
coloniale, en vue de combattre la famine et les pénuries de soudure, on
introduisit le manioc et la pomme de terre. Depuis la dernière
décennie coloniale, le manioc prend une très forte extension. Son
rendement est élevé et sa culture est facile. La récolte
peut être établie sur plusieurs mois parce qu'il se conserve
bien.
Parmi les tubercules, la patte douce suit directement le
manioc. On la cultive sur les terres de plateaux comme le manioc. La pomme des
terres ne pas produit à ngweshe, elle est plutôt cultivée
dans la chefferie de Kaziba sur les hautes altitudes, elle a connu une baisse
de production suite à la perturbation climatique par des pluies et
manque des produits phytosanitaires.48
Récemment, vers 1970 le soja a été
introduit et vulgarisé pour combattre la malnutrition. Il est
actuellement cultivé par 3700 ménages agricoles avec une
superficie totale emblavée de 370 ha contre une production totale de
203.50 tonnes. Sa culture est encouragée et progresse grâce
à la vulgarisation des services techniques des ONGs qui interviennent
dans la distribution des semences améliorées auprès des
paysans agricoles. Il est hélas très peu consommé. Il est
devenu très rapidement une culture de rente. Il fait l'objet de
transactions sur les marchés locaux.
En plus, il est acheté aux paysans par l'usine de
transformation qui le torréfie et le transforme en farine et biscuit.
Malgré la diversité des cultures de
proximités géographique des zones très productives telles
que le Nord-Kivu et la plaine de la Ruzizi, la population de Ngweshe est
souvent en proie à de multiples carences périodiques. La
dégradation des routes de dessertes
48 INSPECTION AGRICOLE DU TERRITOIRE DE WALUNGU,
Rapport annuel exercice 2015.
52
locales, parfois même leur disparition pure et simple
font que les marchés des produits vivriers soit atomisés. Le
transport des produits se fait à dos de femme sur 30 à 60 km, les
véhicules ne pouvant pas circuler. De plus, les méthodes de
cultures sont rudimentaires.
La recherche coordonnée par H.DUPRIEZ a fait à
propos des cultures de subsistances les observations suivantes :
« Elles régressent sur le plan de leur extension
en superficie. Les terres qui leurs sont consacrées sont de plus en plus
marginales, à l'exception des marais. L'extension des bananeraies et des
cultures industrielles les a refoulés vers les moins bonnes terres.
Elles régressent sur le plan qualitatif. Le manioc
surtout, mais aussi les autres tubercules augmente progressivement au
détriment des légumineuses et des céréales. Le
régime alimentaire se simplifie, les protéines diminuant par
rapport aux féculents.
Le nombre des bouches à nourrir étant en
augmentation constante sur des terres en cours de dégradation, les
rations diminuent quantitativement.
Du point de vue technique, il n'y a eu aucune
amélioration notable dans les techniques de production. Le labour et
l'entretien se fait selon le cas à la houe, à la machette,
à la serpette,... »
III l'agriculture paysanne de rente
A côté des cultures vivrières de rente que
nous venons de citer, les paysans de ngweshe cultivaient des cultures
industrielles jusqu'en 1985. Ils existaient en effet des milliers des petites
exploitations paysannes de quinquina, de thé, de café des
eucalyptus et cyprès. On le rencontrait spécialement à
kabare et à walungu.
Ces exploitations étaient installées, on s'en
doute, sur les terres de kalinzi et de bugule. Elles étaient souvent de
dimension modeste. Elles varient entre quelque are et 2 ou 3 hectares. Pour
l'entretien de son exploitation, les paysans ne comptaient que sur sa force de
travail, contrairement aux plantations qu'ils utilisent une main d'oeuvre
salarié et/ou des locataires des parcelles sur les plantations.
Après la période faste des années 70 ou
la pharmakina incitait par le prix les paysans à produire le quinquina,
la majorité des exploitations familiales ont été
progressivement laissée à l'abandon. Il semble que le cours de
ces produits s'est effondré dès le début de la
deuxième moitié des années 80.
53
Il apparait donc qu'actuellement, les seuls cultures de rente
paysannes sont les cultures vivrières pour lesquels il existe une forte
demande urbaine. Parmi ces cultures, la bananeraie occupe jadis une place de
choix.
Bananeraie et habitation sont toujours liées : le Mushi
habite encore au milieu de sa bananeraie. Par le passé, les cultures
saisonnières et l'élevage se faisaient autour du noyau central
constitué par la bannerai, en particulier sur des pentes.
L'accroissement de la population et la diminution des terres
de plateau disponibles a entrainé plusieurs modifications dans
l'organisation de la ferme.
? La bananeraie a progressivement été
étendue sur le piémont, sur les pentes et dans les ravins ;
? La part relative des cultures saisonnières dans
l'ensemble des cultures paysannes a diminué, celle de la bananeraie
s'est accrue ;
? Les parcelles satellites consacrées aux cultures
saisonnières ont été repoussées à des
distances plus grandes, soit sur des pentes encore disponibles, soit sur les
marais.
La structure traditionnelle des fermes a pratiquement disparu
dans les zones denses et paysages s'y est transformé en une
mosaïque continue de parcelles bananières et de parcelles sous
cultures saisonnières. La bananeraie est en effet sources de revenu
privilégié pour les paysans du Bushi. Une bananeraie moyenne
produit, d'après l'enquête de H. DUPRIEZ, 20 régimes par
mois. Outre son importance économique, la bananeraie revêt pour le
paysan une grande importance sociale et psychologique. Dans les circonstances
de la vie (mariage, naissance, deuil, fêtes diverses), la bière de
banane joue un rôle particulier. Tous les amis se joignent à
l'évènement en rapport à la cruche de bière qu'ils
consomment ensembles. La bière aide également a renforcé
les amitiés et les relations de voisinage. Après les travaux de
la journée, les hommes se trouvent pour échanger les nouvelles
chez celui qui a préparé la bière.
La bière de banane sert aussi à témoigner
les reconnaissances envers les autorités coutumières. Le paysan
offre une deux calebasses de bière de banane à celui qui lui a
donné le kalinzi ou au chef coutumier du village. C'est une
manière de renouveler la confiance ; de solliciter la sympathie ou la
protection de son chef politico foncier.
L'extension de la bananeraie sur les meilleurs terres, nous
l'avons déjà mentionné, marginalise les cultures
saisonnière et domestique. Elle témoigne d'une transformation
de
54
l'économie agraire qui tend à privilégier
les revenues monétaires par rapport à l'économie
domestique49
§2. Incidence des contrats fonciers sur l'exploitation
agricole
a. le « kalinzi » : l'assujettissement politique,
social et administratif vis-à-vis de l'autorité foncière
à la fois condition et conséquence d'acquisition d'un terrain,
pousse à mentionner quelques inconvénient du kalinzi. Le paysan
« Shi » lié complètement à son chef et par
conséquent à sa terre, Est privé de sa terre, Est
privé de toute mobilité spéciale. Gérant des terres
dont il n'est pas le propriétaire, il se désintéresse de
leur aménagement rationnel.
b. Le « bwassa » : vu que, d'après ce
contrat, la terre est louée pour un temps déterminé et
n'appartient pas à l'usager, ce dernier n'a pas intérêt
à l'améliorer. En plus, comme le dit plus haut, peut être
retiré n'importe quand par le propriétaire. Seul celui-ci en
bénéficie car il récupère les terres
labourées et bien aérées.
c. L « obuhashe » : caractérisé par
le fruit d'un effort personnel, ce contrat peut terre favorable à une
exploitation agricole rationnelle s'agissant de la diffusion et de la
vulgarisation des nouvelles méthodes culturales pour les cultures
vivrières et maraichères.
d. Le « bwigwarhire » comme pour le contrat
obuhashe, il est aussi caractérisé par l'effort personnel sous
l'encadrement et la surveillance du propriétaire de terrain. Il s'agit
surtout des églises et société multidimensionnelles qui
peut exploiter pour introduire des nouvelles techniques culturales et des
semences améliorées à haut rendement.
e. Le « bugule » : étant
caractérisé par l'achat en pleine propriété d'un
terrain, le bénéficiaire en dispose comme il veut. Il peut donc
l'exploiter rationnellement sans danger que son terrain soit
exproprié.50
49 MUGANGU MATABARO Séverin, thèse,
op cit, p. 248-252
50 AMUKA n°32, op cit, p. 34-36
55
CHAPITRE IV : STRATEGIE DE L'AMELIORATION DE LA
PRODUCTION AGRICOLE A WALUNGU/ CHEFFERIE DE NGWESHE
L'économie du Bushi en générale et de la
chefferie de ngweshe en particulier est tournée essentiellement vers
l'agriculture, l'élevage, le commerce et les services. L'agriculture est
surtout pratiquée par les ménages agricoles pas suffisamment
encadrés sur de petites étendues estimés entre 0,5 et 0,7
hectares. Moins de 10% des habitants disposent d'une superficie de 1 hectare.
La productivité de champs est très faible. La majorité des
champs sont dégradés de suite de l'érosion et la
surexploitation. Moins de 2% des exploitants recourent aux techniques
culturales améliorées. Le nombre de ménages sans terre est
trop faible. Par contre, plus de 40% des habitants recourent au métayage
(Bwassa) étant donné l'insuffisance de terres agricoles. Moins de
3% des agriculteurs de la région recourent aux semences
améliorées.51
Les opportunités à saisir pour améliorer
la production agricole à ngweshe sont nombreuses. La République
Démocratique du Congo s'est dotée d'un code agricole,
c'est-à-dire d'un corpus des règles régissant le secteur
agricole, du DCSRP depuis 2006, et des efforts pour la réforme
foncière se poursuivent en vue d'apporte des remèdes à la
situation qui se vit actuellement tant dans les milieux ruraux que dans les
milieux urbains. Nos suggestions ont pour fondement ces opportunités.
Les constats de cette étude couplés des
réalités contextuelles à ngweshe en particulier et dans le
Bushi en générale nous poussent à reformuler les 4
recommandations suivantes sous formes de stratégie à adopter :
I. Améliorer la sécurité
foncière, réduire les conflits fonciers et promouvoir
le développement local52 :
les résultats des certaines ONG (ASOP dans le
modelé de gestion foncière décentraliser a base
coutumière dans la chefferie de ngweshe et IFDP dans le projet d'appui
à la gestion foncière décentraliser a base des coutume
dans la chefferie de kabare ) retracent certains mécanismes de la
sécurisation foncière que nous devons prendre en
considération afin que les pratiques foncières locale influent a
la forte production agricole des ménages a ngweshe. Ce mécanisme
mis sur pied par ces ONG à donner des résultats dans certains
villages et non dans d'autre puisque le projet était pilote, et que donc
si on l'étend dans
51 OGP, op cit, p.35.
52 IFDC (Innovation et formation pour le
développement et la paix), Rapport annuel, p9. 2015.
56
l'ensemble de la chefferie peut apporter la solution aux
problèmes que posent les pratiques foncières locales au
développement agricole.
Activités
1. Sélectionner les articles/ disposition des
lois et des pratiques coutumières protégeant les droit fonciers
des femmes en vue de les vulgariser :
En collaboration avec les consultants juristes, les articles
des lois et les pratiques coutumières protégeant les droits
fonciers de la femme seront identifier, agencer logiquement pour constituer un
document devant servir pour la sensibilisation et formation des membres des
comités de médiation, les chefs des groupements, et à
distribuer aux leaders locaux en faveur des femmes dans la chefferie de
ngweshe.
Les lois et les articles à sélectionner porteront
sur :
- L'usufruit de la veuve : possibilité d'inscription
pendant la reconnaissance foncière (article 785 du code de la faille)
- La donation de toute sorte entre époux et la
liquidation du régime matrimonial (article 884 du code de la famille)
- L'héritage de la fille (article 794, 780 du code de
la famille)
- Lutte contre la discrimination à l'égard de la
femme (article 18 alinéa 3 de la charte africaine)
- Article 34 de la constitution alinéa 2 (juste et
préalable indemnisation)
- La copropriété dans le mariage, la
séparation réduite aux acquêts (article 499, 500, 502, 503
du code de la famille)
- Article 758 du code e la famille (égalité des
enfants)
- Article 884 du code de la famille (donation entre
époux)
|
Résultat attendus
Une brochure contenant les articles et les
dispositions de constitution, de la charte africaine 1325
du CSNU
et les pratiques coutumières protégeant les
droit foncier de la femme servira de module de formation, de
sensibilisation sera élaborer. Ce document deviendra
un outil de travail dans la résolution des conflits fonciers.
|
57
- Article 14 de la loi foncière (le droit à la
propriété
exclusive et absolue.)
Ces données seront introduites dans une des
chansons folklorique pour vulgariser le droit foncier de la femme en langue
locale.
|
|
2. Former les chefs coutumiers et politico-
|
- Les personnes
|
administratifs sur les droits fonciers des
femmes
|
formées auront
|
selon la loi et la coutume, la résolution 1325
du
|
l'aptitude de
|
conseil des nations unie à ngweshe :
|
restituer la
|
Un atelier de formation regroupant les hommes et les
|
matière apprise à
|
femmes parmi lesquelles les chefs des villages, des
|
meurs bases.
|
groupements, les topographes, les membres des
commutés
|
- Les chefs
|
de médiations, le responsables du service de
|
coutumiers
|
développement de la chefferie, le greffier du tribunal
de
|
deviendront plus
|
paix, le chef de bureau du territoire de walungu sera
|
respectifs vis-à-
|
organiser aux bureaux de la chefferie de ngweshe pour les
|
vis des droits
|
outiller sur les mécanismes juridiques de protection
des
|
fonciers de la
|
droits fonciers de la femme à ngweshe.
|
femme
|
Les matières à enseigner porteront sur les
articles du code
|
- Les chefs
|
de la famille, de la loi dite foncière, de la
constitution, de
|
coutumiers
|
la charte africaine et de la résolution 1325 du CSNU
|
dénonceront dans
|
portant protection des droits fonciers des femmes à
|
leurs villages
|
ngweshe ; (loi et pratiques)
|
ceux qui
tenteront de
violer les droits
fonciers de la femme.
|
3. Organiser les séances de restitutions de
la
|
Les héritiers chefs des
|
|
formation à l'intention des chefs des
ménages, héritiers/héritières chefs des familles
sur le respect
|
familles accepteront de plus en plus que leurs
|
de droits fonciers des femmes (veuves,
filles
|
soeurs soient identifiées
|
héritières) sous forme des tribunes
populaire :
|
pour leurs droits
|
Après la formation sur le droit foncier de la femme
selon
|
successoraux, que les
|
58
la loi et la coutume, les séances de restitutions doivent
être
|
veuves soient inscrites
|
organisé dans les villages par les chefs des villages te
des
|
sur la fiche parcellaire
|
groupements, les membres des comités de médiation
avec
|
pour le champ et objet de
|
l'appui des topographes. Les séances de restitutions
seront organiser dans les villages pilotes et aux bureaux du groupement de
walungu à l'intention des agents du groupement.
|
succession.
|
Le sujet de restitution portera sur la matière de la
formation reçu.
|
|
4. Produire un dépliant, le multiplier en
plusieurs
|
Toutes les copies seront
|
exemplaires et distribuer expliquant les
pratiques
|
distribuer, les questions
|
protégeant les droits fonciers de la femme
même en
|
relatives à leur contenu
|
langue locale dans la chefferie de ngweshe
:
|
seront expliquer par les
|
La brochure contenant les articles et les dispositions de la
constitution, de la charte africaine, résolution 1325 du CSNU et les
pratiques protégeant les droits fonciers de la femme sera
synthétisé, traduite en langue locale et multiplier en plusieurs
exemplaires. Par ailleurs, son contenu sera introduit dans la chanson
folklorique pour atteindre non seulement le public qui ne sait ni lire ni
écrire mais aussi les autres personnes vivant en dehors des groupements
pilotes dans la chefferie de ngweshe.
|
acteurs.
|
5. Diffuser les droits fonciers de la femme, à
travers
|
La chanson fera débat
|
|
les canaux locaux de diffusion de l'information à
la
|
dans plusieurs ménages
|
base (chanson) :
|
afin de montrer aux
|
Les canaux locaux qui seront utilisé pour diffuser les
droits
|
hommes les droits des
|
fonciers de la femme sont les rencontres de sensibilisations,
de
|
femmes qu'ils ignorent
|
l'information et des formations, les radios communautaires,
les cérémonies des mariages et les églises. La chanson
incitative composée sera produite sur CD audio et vidéo. Cette
chanson sera diffusé sur les ondes des diverses
radios notamment RTNC/walungu, Mulangane et maéndeleo qui sont
très écouées à ngweshe. La chanson abordera les
thèmes
|
tantôt.
|
59
suivant :
|
|
- Accès de la femme à la terre
- L'héritage de la femme
- Elaboration d'une loi protégeant le droit de la femme
- Egalité des enfants nés dans ou hors mariage
- Le Développement communautaire
- Le rôle de la femme dans le ménage
- La complémentarité entre homme et femme.
|
|
6. Former les membres des commissions des
|
Les membres des
|
reconnaissances foncières sur les droits
fonciers des
|
commissions de
|
femmes (usufruit, héritage.... Résolution
1325)
|
reconnaissance
|
avec l'attention particulière sur l'inscription
de
|
faciliteront la
|
l'usufruit de la veuve en cas de succession
et
|
réconciliation en se
|
d'égalité des héritiers (masculins
et féminins) en cas
|
référant à la loi.
|
d'héritage et sur les techniques
d'enquêtes et de
|
Les cas de violations des
|
documentation des cas des violations des
droits
|
droits fonciers de la
|
fonciers de la femme à walungu :
|
femme seront dénoncés
|
un atelier de formation sera organiser à walungu
à l'intention
|
dans la communauté et
|
d'un certain nombre des personnes qui à leur tours
|
les demandes
|
véhiculeront aussi le message aux autres. Un module sera
à
|
d'assistances seront ainsi
|
leur disposition.
|
formuler à l'endroit des certaines ONGs oeuvrant
dans le secteur foncier localisable dans le milieu comme
ASOP, des chefs
des villages et des groupements.
|
7. Former et recycler les membres des comités
de
|
Les comités de
|
|
médiations sur les techniques de
règlement
|
médiation mis en place
|
pacifique des conflits fonciers avec accent sur
le
|
dans les villages pilotes
|
droit spécifique de la femme :
|
réuniront et faciliteront
|
Les ateliers de formation seront organisés à
l'intention des
|
les médiations entre les
|
hommes, femmes des comités de médiations issu des
villages
|
occupants. Ainsi
|
60
et groupement pilotes.
Un module de formation leur sera disponible.
|
plusieurs conflits seront
régler à ce niveau et n'encombreront plus les
instances judiciaires.
|
8. Evaluer et apprécier progressivement les
effets produits par la formation et la sensibilisation sur les droits
fonciers de la femme :
Le charger de suivi-évaluation et de la mobilisation
notera les
différents comportements des chefs des villages et
des membres des comités de médiation en rapport avec les
différents thèmes abordés lors des formations.
Il sera question de vérifier s'ils tiennent compte de
différents conseils prodigués et thèmes
développés pendant la formation.
|
Les rapportages pendant
la mission de suivi- évaluation portant sur la
formation seront ici faite.
|
9. Répertorier et dénoncer les cas de
violation des droits foncier de la femme :
Les de violation seront répertorier et dénoncer
devant les autorités de la chefferie de ngweshe et du tribunal de paix
de walugu, ces cas de violation seront condensés dans un document de
plaidoyer pour la promotion des droits de la femme.
|
La chefferie de ngweshe
accordera des lettres de reconnaissance de droit fonciers aux
femmes.
Le cas de violations des
droits fonciers de la
femme seront ainsi dénoncer et inciteront la
société civile du milieu à
organiser les dialogues social avec les autorités
politico-administratives et coutumières.
|
10. Accompagner juridiquement les femmes et filles
victimes des violations des droits fonciers dans la chefferie de ngweshe
:
Les avocats pour assistance juridique et judiciaires seront
sur place afin d'assister juridiquement les victimes.
|
Le jugement favorable au profit des victimes.53
|
|
53 ASOP (Action Sociale pour
l'organisation paysanne), Rapport narratif annuel, 2015.
61
II. Renforcement de l'encadrement agricole au sein des
ménages :
Nos observations sur le terrain démontrent que les
paysans agriculteurs ne reçoivent aucun encadrement en dépit de
la présence des ONGD qui les réunissent en organisation paysanne
et les appuis d'une manière ou d'une autre. Cela prouve à
suffisance que les producteurs ont vaincue le fatalisme et l'attentisme. C'est
à encourager mais ce n'est pas normal. Nous pouvons ainsi affirmer avec
Katunga et Namijimbi qu'aucun pays au monde ne peut se développer sans
la volonté politique de ses dirigeants, de son Gouvernant. Le rêve
est celui de voir la République Démocratique du Congo renaitre
comme un Etat équilibré, normal qui reconnait avoir deux ailles
pour son développement harmonieux ; ses droits et devoirs. Le rapport
sur l'évaluation des OMD en RDC (2010) reconnait que la
sécurité alimentaire relève des
attributions des Ministère de l'agriculture et
du Développement rural. Il s'agit, pour l'Agriculture, d'assurer la
sécurité alimentaire de l'ensemble de la population et de
contribuer à la réduction de la pauvreté, et pour le
développement rural, d'améliorer les conditions de vie des
populations rurales et accroitre la production. Le code agricole de la RDC a
retenu cette recommandation dans l'exposé des motifs en stipulant :
« ce code poursuit entre autres les objectifs celui de favoriser la mise
en valeur durable des potentialités et de l'espace agricole
intégrant les aspects sociaux et environnementaux ; de stimuler la
production agricole par l'instauration d'un régime douanier et fiscale
particulier dans le but d'atteindre, entre autres, l'autosuffisance alimentaire
: de relancer les exportations des produits agricoles afin de
générer des ressources importantes pour les investissements
». Ceci devrait ne plus être un simple discours mais une occasion de
mettre en place des plans, des programmes et des projets visant
l'amélioration de la production agricole.
L'encadrement agricole suppose à ce moment que les
efforts des productions font l'objet d'un suivi rapproché par les
moniteurs agricoles et les agronomes des services de l'Etat. Cela suppose aussi
une collaboration étroite avec les stakeholders impliqués dans la
vulgarisation agricole. Les devoirs de l'Etat tel que la paie
régulière d'un salaire décent aux agronomes et moniteurs
agricoles, ma sécurité des populations et leurs biens, la
formation et l'information pour tous, la justice distributive etc. doivent
désormais figurer dans le programme et plan d'action du gouvernement
(national et provincial) et des ETD. C'est retenu par l'article 52 du Code
agricole de la RDC (2011) : « l'Etat définit une politique de
formation continue en faveur des agriculteurs et des acteurs ruraux ».
62
L'encadrement agricole suppose encore l'encouragement des
producteurs modèles. A l'instar d'une ONG locale dénommée
Comité Anti Bwaki (CAB), les ETD devraient organiser des journées
champêtres sous forme des foires agricoles en vue de primer les
producteurs ayant atteint le rendement le plus élevé pour toutes
les cultures produites dans le milieu d'étude. Cette pratique pourra
créer aux seins des ménages un esprit d'émulation et de
compétition. Cette approche a été mise en application au
Rwanda voisin dans le cadre de la vision 2020 et a produit des résultats
encourageant et qu'on peut copier en province du Sud-Kivu en
général et dans le territoire de walungu/chefferie de Ngweshe en
particulier.
La récolte et le traitement des statiques dans
nôtres pays inspirent pour certains acteurs moins de confiance. Les
techniciens à la base devront bénéficier d'une
capacitation en la matière par IPAPEL, le SENASEM, la FAO, le PNUD, etc.
sur demande des ETD.
III. Faciliter aux ménages ruraux l'accès
au crédit agricole et aux intrants :
« C'est un mal nécessaire » s'est
exclamé un producteur du groupement de kamisimbi. Ce qui fait peur chez
les producteurs c'est le remboursement au cas où la campagne a connu un
échec. Mais ailleurs, le facteur accès au crédit agricole
a donné des bons résultats. Tout en maintenant la rigueur dans le
remboursement des crédits et un taux d'intérêt
promotionnel, ceux-ci devraient être aussi accessibles aux techniciens
qui n'ont pas encore suffisamment des moyens financiers et qui devront
empêcher par des exemples. « Le revenu non agricole ainsi que
l'accès aux institutions de la finances rurale informel constituent des
véritables leviers de l'acquisition de l'investissement dans un
environnement caractérisé par le rationnement du crédit
formel.
Le crédit obtenu devra faciliter la prise en charge
d'une partie de la main d'oeuvre, de l'amélioration des conditions du
travail. Dans ce cas, l'Etat devra subventionner les engrais et en faciliter
l'accès en s'appuyant sur l'expérience du Rwanda comme
déjà retenu à l'article 28 du code agricole (2011) :
« l'Etat, la province et l'entité territoriale
décentralisée prennent toutes les mesures nécessaires pour
assurer le couverture totale des besoins nationaux en intrants agricoles de
qualité » et dans son préambule qui a retenu pour cette
cause la création d'un Fond national de développement agricole et
sa gestion en synergie avec les institutions financières bancaires et
non bancaires. Dans ces conditions, même le warrantage pourra être
accepté comme model de garantie aux crédits sollicités.
63
La RDC est signataire de la charte d'Abuja sur les engrais et
la révolution verte du 12 juin 2006, par celle-ci, « les Etas
membres de l'Union africaine doivent prendre les actions spécifiques
pour améliorer l'accès des agriculteurs aux semences des
qualités, à des infrastructures d'irrigation, aux services de
vulgarisation, aux informations du marché et aux analyses et cartes de
sol pour faciliter l'utilisation effective et efficiente des engrais
inorganiques et organiques tout en veillant aux aspect de protection de
l'environnement ». Cette déclaration reconnait aussi que « les
paysans africains sont confronter à des multiples contraintes dont la
faible productivité des sols, la difficulté d'accès aux
nouvelles technologies agricoles et des marchés restreins et
inefficaces. Sans des intrants en quantité suffisantes et de la
qualité requise, les paysans sont souvent incapables de satisfaire les
besoins alimentaires de leurs familles, encore moins ceux d'une population en
rapide croissance. Pour nourrir leurs familles et leurs pays les paysans
doivent passer des pratiques agricoles extensives à faible rendement
à des pratiques plus intensives à haut rendement, avec une plus
forte utilisation des semences améliorées, des engrais et de
l'irrigation. Tout effort visant à réduire la faim sur le
continent, doit d'abord passer par la restauration des sols très
épuisés. En effet, les sols d'Afriques sont devenus les plus
pauvres du monde du fait de l'épuisement continu des
éléments nutritifs depuis de nombreuses décennies. Selon
les estimations, le continent perd l'équivalent de plus de 4 milliards
de dollars US en élément nutritifs chaque années : un
phénomène qui mine la capacité du continent à se
nourrir ».
Le crédit en espèce sera couplé d'un
crédit en cheptel (gros et petit bétail) pour mieux asseoir la
gestion intégrée de la fertilité du sol. Le discours sur
les engrais chimiques seuls n'est pas encourageant pour ceux qui veulent
adopter leur utilisation.
IV. Une Réforme agraire par remembrement et/ ou
redistribution
Les superficies moyennes par ménage et par culture sont
trop petite et par rapport à la moyenne des personnes par ménage
et aux besoins. Le taux d'accroissement de la population est
élevé (3,3 % à partir de 2009 : PNUD, 2009) et annonce de
nouveaux besoins en terre de culture. Les études faites dans les milieux
ruraux du Bushi rapportent que les bonnes terres, des grandes étendues
sont possédées pour un nombre réduit des
propriétaires terriens à la défaveur des ménages.
Cela a toujours crée un sérieux déséquilibre et des
hésitations quant à un engagement pour une intensification
agricole. Une classe des paysans sans terres ne fait qu'augmenter en nombre.
64
Katunga et namugambo (2011) recommandent à ce sujet que
cette réforme agraire soit accompagnée par une occupation
effective de l'espace et! ou l'espace et! ou un déplacement d'une partie
de la population vers des zones à faible concentration. L'Etat devrait
définir des modalités pour un remembrement d'un côté
et d'un démembrement de l'autre en tenant compte des
particularités des milieux.
Nous pensons qu'une telle stratégie ne serait facile
à réaliser que si les textes des lois en matières
foncières ont été rationnellement révisés.
Les terres acquises doivent être mise en valeur et les inspections
provinciales de l'agriculture, du plan, du développement rural et de
l'environnement devraient faire le suivi de toutes les exploitations. Celles
qui ne sont pas mise en valeur doivent être sectionnées. La
population étant galopante, l'installation des entreprises rurales
devraient permettre à dégorger le secteur agricole. Les gens
iraient vers les usines à la recherche de l'emploi, ce qui
résorbera le chômage. Si les routes sont praticables dans toute la
province et que la sécurité des personnes et leurs biens
assurés, cette stratégie permettrait à ceux qui resteront
aux villages d'exploiter de grandes superficies qu'ils doivent mettre
convenablement en valeur et augmenter la production agricole. C'est ainsi que
le déplacement individuel de la population pour ceux qui le voudront se
fera aisément. Pour un développement agropastoral harmonieux
à ngweshe et au Bushi en général, des grandes cité
doivent être crées dans la province du Sud-Kivu en favorisant la
construction de grandes agglomérations et de comme vraie communes
rurales.
Une telle expérience a réussi au Brésil
et peut être copiée. A ce propos, Fernandez M.E., (1989) souligne
que par la réforme agraire, de nouveaux modes de production agricole
apparaissent ; ils intègrent d'autres données que celles de
l'agriculture traditionnelle qui se fondait exclusivement sur le binôme
terre-main-d' oeuvre. Pour remédier à la faible
productivité agricole, le gouvernement de ce pays prune série de
mesures : il favorise l'accès au crédit en le subventionnant,
finance des programmes d'aide aux producteurs dans le nouveau marché. Le
PNRA propose une distribution plus équitable, des terres fondées
sur des « modifications dans les régimes de propriété
et d'exploitation, les rendant compatibles avec les contraintes liées au
développement du pays, ceci par l'élimination progressive du
latifundium et minifundium, manière à permettre l'augmentation de
la production et de la productivité et en respectant en
conséquence les principes de justice sociale et le droit du travailleur
rural à l'exercice de sa citoyenneté ».
Parmi les objectifs spécifiques se détachent
l'augmentation de la production d'aliments pour répondre prioritairement
à la demande interne, la mise en place de nouveaux emplois dans le
65
secteur rural ; la diminution de l'exode rural afin de
réduire la pression démographique exercée sur les villes
et les problèmes en découlant.
Une autre expérience qui a réussi en
matière de réforme agraire c'est le regroupement de l'habitat
autour des artères routières au Rwanda communément
appelé « IMIDUGUDU » fasse à l'arrivée massive
des refugiés sans terre, l'Etat a mené une politique «
volontariste » d'urgence, c'est-à-dire, la construction des
logements groupés en zones rurales, sur des terres communales. La
création de se villages s'inscrit dans un cadre plus large de
développement de pôles économiques en zones rurales et
devraient à moyen et long terme attirer une partie de la population sans
terres et regrouper la population rurale. Cette villagisation du monde rural
entre dans le cadre réformes des foncières menées par le
ministère de l'agriculture et de l'élevage visant à
libérer les terres agricoles. Cette réforme avait pour objectif
de trouver comment résoudre le dualisme existant entre le droit
écrit et coutume et la pluralité des principes coutumiers
d'accès pour permettre une gestion foncières efficace et
sécurisation des droits fonciers, mais également permettre
à l'Etat de mettre en place une stratégie de développement
agricole pour parvenir à la sécurité alimentaire. Mais,
barrière propose de procéder d'une manière
différente : constatant que le droit écrit importé n'est
légitimé, il prose de partir des réalités,
dynamiques et des pratiques locales et de passer d'une situation de droits
oraux vers un droit écrit : certaines pratiques coutumières
seraient légalisées et deviendraient peu à peu une
référence juridique (Catherine A., 1998)54
54 CIRIMWAMI Kashangabuye, Crise agricole et
déterminants de l'intensification au Bushi en province du Sud-Kivu/ RD
Congo. Cas des certaines spéculations alimentaires (manioc, haricot,
mais et pomme de terre) à Walungu, Mémoire du diplôme
d'étude approfondie, ISDR-BUKAVU, 2012-2013, p. 94-97.
66
CONCLUSION GENERALE
Au terme de cette réflexion portant sur les
pratiques foncières locales en milieu rural et leur impact sur le
développement agricole dans le territoire de Walungu : cas de la
chefferie de ngweshe, nous pouvons dire avec M. MAUSS que «
les faits sociaux sont totaux et globaux » devons-nous les analyser dans
leurs totalité et dans leurs globalités55, c'est
pourquoi nous avons eu une vision globale dans l'analyse des pratiques
foncières locales tout en les considérant comme les faits
sociaux.
Se fondant sur le rapport de force et clientéliste, las
pratiques foncières locales en milieu rural n'obéit pas a aucune
règle juridique ceci parce que la loi n'arrive pas à
préciser toutes les dispositifs sur les statuts des terres de la
communauté locale, laissant ainsi une certaine plasticité sur ce
terre aux profits des autorités coutumières des milieux.
La législation foncière congolaise n'est
cependant pas moins ambiguë en ce qui concerne le régime juridique
des terres rurales. A ce propos il nous est apparu d'analysé que
l'interprétation ci-après était plus idoine et
adéquate : les dispositions générales de la loi du 20
juillet 1973 tel que modifié et complétée par celle du 20
juillet 1980 s'appliquent également aux « terres occupées
par les communautés locales en vertu de la coutume ». En d'autres
mots, la jouissance sur ces terres par les communautés locales ne trouve
pas juridiquement son fondement dans la coutume, quoique le législateur
renvoi cette disposition à une réglementation ultérieure.
Elle est plutôt le fait d'une tolérance légale. Les terres
dont question font partis du domaine de l'Etat. Elles sont simplement
occupées par les communautés locales. Cette occupation n'est pas
constituée des droits ni constituée en droit.
En ce qui concerne l'application de la loi foncière,
nous avons signalé que les principes et les procédures qu'elle a
mis en marche ne sont respectées ni par les instances de mise en
oeuvres, ni par la population locales. En matière d'expropriation pour
cause d'intérêt public, nous avons constaté notamment que
les autorités coutumières du milieu entouré de ses
collaborateurs délimite l'espace ou sera érigé l'ouvrage
projeté. Il s'agit généralement des terrains non
occupés ni revendiqués par une famille ou un particulier.
L'affectation du terrain se fait verbalement. Une pratique se fait toutefois
jour actuellement : la délivrance d'un « acte de
propriété » par le chef. Elle est par ailleurs gratuite il
n'est cependant pas rare qu'un cadeau soit remis au chef, d'après
certains enquêtés. Lorsque le terrain convoité pour
accueillir les infrastructures communautaires appartient à des
particuliers, la pratique locale
55
WWW.revuedumauss.com.fr/media/CHAN.pdf
Précisons à propos du pouvoir coutumier que
celui-ci est largement dénaturé. De plus en plus les
intérêts des chefs et notables coutumiers sont contradictoires
avec ceux des populations et
67
est de leur racheter. L'acte de vente est dans ce cas
certifié par l'autorité locale qui agit comme «
témoin instrumentaire ». Quant à la procédure
d'acquisition foncière, nous observons une très grande
variété des trajectoires que, malgré les vices des
procédures dont elles sont entachées, l'autorité publique
finit par légaliser.
Quant à l'attitude des populations rurales
vis-à-vis de la loi foncière, nous avons constaté que
cette loi n'est pas connu par toute la population du milieu, la majorité
de la population vie dans l'ignorance en dépit de l'existence de la
législation foncière, dans cette situation les pratiques en marge
de la loi ce sont développées et ont eu une grande ampleur pour
toute la population et dans tout le milieu. Ainsi nous avons pu confirmer notre
hypothèse de base que la législation foncière a un impact
nul sur le développement de l'agriculture dans le territoire de
walungu/chefferie de ngwshe car ne détermine pas de manière
directe et univoque le comportement des acteurs foncier qui développent
les pratiques informelles ne permettant pas aux petits exploitant agricole (les
paysans) a accéder à la terre dans toute égalité et
selon les modalités prescrite par ladite législation.
En ce qui concerne l'acquisition des terres rurales, on voit
intervenir diverses autorités locales, régionales ou nationales
dans un ordre qui diffère, en fonction de la nature de terre à en
enregistrer, de l'envergure sociale ou politique du demandeur de
l'enregistrement, de sa solvabilité ou de ses relations personnelles
avec les membres de l'appareil administratif ou judiciaire.
A walungu/chefferie de ngweshe comme dans tout le Bushi en
générale, il est apparu que les fidélités
personnelles d'autrefois ressortissant des transactions foncières ou sur
les bétails se reproduisaient dans le cadre de l'Etat moderne en raison
notamment de l'insécurité juridique de la tenure foncière
coutumière. Faute de pouvoir compter sur des structures administratives
et judiciaires efficaces, les populations rurales tentent en effet, pour
sécuriser leurs possessions, de « s'acheter » d'une part le
certificat de reconnaissance foncière au près du service foncier
de la chefferie signer par le Mwami, et d'autre part la sympathie de ceux qui
contrôlent les appareils de gestion administrative et foncières et
les structures de résolution des conflits. Par ce biais, s'est mis en
place un clientélisme du type nouveau, structuré non plus par la
coutume mais par des logiques sociales opportunistes et/ou
patrimonialité.
68
leurs ressorts. Les chefs tentent à tirer un maximum de
profit des liens de dépendance traditionnelle en exigeant parfois des
redevances très élevées, soit de renouvellement de
redevances versées anciennement. A l'occasion même, ils spolient
les paysans au profit des élites nouvelles. Le chef reçoit toute
sorte de faveur des élites en contre partie de la terre qu'il leur vend
ou soutient électoral qu'il leur promet. Si le pouvoir coutumier
permettait autrefois d'articuler le monde de vivant et l'au-delà et
garantissant l'harmonie sociale, aujourd'hui il est en crise et n'est plus apte
à remplir ses fonctions de régulation. Il passe volontiers pour
un anachronisme dans le paysage instationnaire de moderne.
Dépouillé de ses référents symbolico-mystiques et
subordonné aux nouvelles hiérarchies mis en place par l'Etat
moderne, le pouvoir coutumier s'est radicalement altéré au point
de devenir un facteur d'instabilité en milieu rural.56
La matrice culturelle des rapports fonciers est cependant
restée quasiment inchangée. Les modes concrets d'accès
à la terre ont par contre beaucoup évolué, les pratiques
foncières en marge de la loi se sont accrues restant à la faveur
d'une catégorie des personnes (les nobles) qui s'achète et
thésaurise les terres au détriment des petits paysans qui ne
vient que de l'agriculture, ceci se répercute négativement sur la
production agricole car une couche de la population se retrouve San terre
à mettre en valeur et fait recours aux métayages qui aussi ne
donne pas des résultats escompter pour le développement de
l'agriculture. Ainsi donc nous avons confirmé notre deuxième
hypothèse que les pratiques en marge de la loi ont une influence moindre
sur le développement de l'agriculture et leur impact serait nul sur la
production agricole.
Nous venons de constater que les autorités
traditionnelles du Bushi ont mis en place des procédures
préalables à la demande de l'enregistrement des terres en milieu
rural. Ces procédures ont un caractère compensatoire et solennel
et confèrent une protection progressive au demandeur de
l'enregistrement.
Nous avons en autre constaté que le contrat foncier
coutumier par excellence, à savoir le « kalinzi », se faisait
de plus en plus rare, du moins dans sa forme et son économie
traditionnelle. Dérogeant à la tradition, les transactions
foncières font en effet, l'objet des conventions écrite concluent
directement entre le cédant et le concessionnaire. Les pratiques
successorales relatives au foncier ont également subit des profonds
changements.
56 MUGANGU MATABARO Séverin, op cit,
thèse, pp. 323.
69
Contrairement à la période coloniale, le bwassa
un contrat foncier précaire, est devenu au lieu du kalinzi le principale
mode d'accès à la terre par les paysans.
Toutes ces mutations foncières s'accompagnent, on s'en
n'est rendu compte, de conflits dont l'enjeu majeur semble être, au
de-là la mainmise sur le sol, la recherche pour certaine
catégorie d'acteurs de la maitrise de l'espace familiale ou social
villageois par le biais de la production de structure d'autorité et/ou
d'allégeance ; pour les autres, à défaut de
s'émanciper à l'égard de telles structures, la recherche
de la sécurité de la tenure foncière.
Relativement à ces conflits, nous remarquons deux types
de situations : d'une part le fait que ni la loi foncière ni la coutume
ne sont systématiquement appliqués aux litiges fonciers ; d'autre
part la difficulté d'unifier la jurisprudence. Ce pourquoi nous nous
associons aux plaidoyers menés par KALAMBAY LUPUNGU, J.P. KIFWABALA
TEKILAZAYA et Séverin MUGANGU MATABARO pour la réforme des
législations foncières afin de sortir les paysans agriculteurs
dans l'impasse et espérer au développement agricole dans les
milieux ruraux de la RDC en générale et du Bushi en
particulier.
70
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71
14. GINOSSAR, Droit réel, propriété
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15. IADL, Rapport de la session de formation sur la
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16. INSPECTION AGRICOLE DU TERRITOIRE DE WALUNGU, Rapport
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17. IFDC, projet d'appui à la gestion
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18. JEAN-PIERRE CHAUVEAU, la logique des systèmes
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19. J.P. KIFWABALA TEKILAZAYA, le droit civil des biens
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20. Journal officiel de la RDC, loi n° 73-021 du 20
juillet 1973 portant régime général des biens,
régime foncier et immobilier et régime des suretés telle
que modifiée et complétée par la loi n° 80-008 du 18
juillet 1980.
21. Journal Officiel de la RDC n° spécial du
15 juillet 2002, loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code
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unification, thèse, Louvain-la-Neuve, UCL, 1973.
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-Brylant, 1997, p3
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27. MUGANGU MATABARO Séverin, la crise
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29. MUCHUKIWA RUKAKIZA Yussu Bosco, Les autorités
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30. M. Jean-Baptiste Safari Bagula et BAKWI Jules,
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Bushi au Sud-Kivu, Bukavu, 2010.
31. MUHIGWA BAHANANGA jean berckmans, BIREMBO rigobert,
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siècles chez les Bashi, la presse congolaise, s.c.a.r,
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35. PHILIPPE Lavigne Delville, Quelle politique
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36. PATAULT A.M., Introduction historique au droit de
biens, PUF, Paris, 1989.
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37. P. JACOLIN, H. DUPRIEZ, P.M. FALL, J. NDIONE, M. SOW,
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(Centre Technique de Coopération Agricole et Rurale), le HARMATTAN,
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38. P. COLLE, Essai de Monographie des Bashi, centre
d'étude de langues Africaines, Bukavu.
39. PATRICK DUGUE, LUC RODRIGUEZ, BERNARD OUOBA, ISSA
SAWZDOGO, Techniques d'amélioration de la production agricole en
zone soudano-sahélienne, centre de coopération internationale en
recherche agronomique pour le développement CIRAD-SAR), France,
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40. Rapport de l'administration du territoire.
41. SAVATIER R., Vers des nouveaux aspects de la
conception et de la classification des biens corporels, in revue semestrielle
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42. USAID : AU-DELA DE LA STABILISATION : Comprendre le
dynamique des conflits dans le Nord et Sud-Kivu en RDC, février
2015.
43.
WWW.revuedumauss.com.fr/media/CHAN.pdf
74
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS III
RESUME IV
SIGLES ET ABREVIATIONS VI
INTRODUCTION 1
I. PROBLEMATIQUE 1
II. HYPOTHESES 3
III. OBJECTIF DU TRAVAIL 4
Objectif global : 4
1. Objectifs spécifiques 4
IV. CADRE THEORIQUE : 4
V. METHODOLOGIE DU TRAVAIL 6
VI. CHOIX ET INTERET DU SUJET 9
VII. DELIMITATION SPACIO-TEMPORELLE 10
VIII. DIFFICULTE RENCONRTE 10
IX. SOMMAIRE DE L'ETUDE 10
CHAPITRE I : LE REGIME FONCIER EN RDC : ETAT DE LIEUX
11
SECTION I : LE DROIT FONCIER CONGOLAIS :
Généralités. 11
§1. Dualité foncière et
insécurité de la paysannerie : 14
§2 Ambiguïté normative et responsabilité
mal définie 15
§3 pluralité des instances d'intervention au niveau
local 17
§4 les facteurs qui empêchent l'enregistrement du sol
par les 17
§5 Les paysans du Bushi et la loi du 20 juillet 1973 19
SECTION II : LES COUTUMES EN MATIERE FONCIERE A WALUNGU
20
§1. Les modes d'accès à la terre à
walungu/ chefferie de Ngweshe 21
§ 2. Comment obtenir un champ coutumier : procédure
22
CHAPITRE II : LES PRATIQUES FONCIERES LOCALES EN MILIEU
RURAL :
CAS DE LA CHEFFERIE DE NGWESHE 24
SECTION I : LES PRATIQUES EN MATIERE D'ACQUISITION DES
TERRE 24
§ 1. Les autorités territoriales et la gestion des
terres à walungu 24
§2 les titres fonciers coutumiers 25
§3 les transactions foncières avec les ayants-droits
coutumiers : accord sur un malentendu 26
§4 les Rapports entre l'administration foncière et
les ayants-droit coutumiers en matière
d'enregistrement des terres 26
75
SECTION II : LES PRATIQUES SUCCESSORALES 30
CHAPITRE III : IMPACT DES PRATIQUES FONCIERES LOCALES
SUR LA
PRODUCTION AGRICOLE A WALUNGU/ CHEFFERIE DE NGWESHE
33
SECTION I : LES CONFLITS FONCIERS 33
§1 ORIGINE DES CONFLITS FONCIERS 34
§2 Types des conflits : 35
§ 2 Les caractéristiques des différents types
de conflits 40
SECTION II : LES RAPPORTS FONCIERS DE PRODUCTION :
Problématique des
redevances foncières 43
§1 le contrat précaire (Bwassa) dans les plantations
43
§2 Exploitation des Marais (formules contractuelles) 44
§3 LE « BUGISHA » : actualité de
l'institution 47
§4 La production de la Braise 48
§5 La construction des écoles et autres ouvrages
collectifs (adduction d'eau, dispensaire, foyer
sociaux, etc...) 48
§6 l'exploitation artisanale des minerais : cas de MUKUNGWE
49
SEECTION III : IMPACT DES PRATIQUES FONCIERES SUR LA
PRODUCTION
PAYSANNE 50
§1 système d'agriculture paysanne : 50
§2. Incidence des contrats fonciers sur l'exploitation
agricole 54
CHAPITRE IV : STRATEGIE DE L'AMELIORATION DE LA
PRODUCTION
AGRICOLE A WALUNGU/ CHEFFERIE DE NGWESHE 55
CONCLUSION GENERALE 66
Références bibliographiques 70
Contacts : +243 847119617
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