CONCLUSION PARTIELLE
L'homme doit donc considérer comme valeur tout ce qui
permet sa croissance, tout ce qui est favorable à sa vie. La source des
valeurs est donc immanente : c'est la vie elle-même qui crée
les valeurs dont elle a besoin. La question ne sera plus de savoir si une
idée est vraie ou fausse mais si elle est favorable ou
défavorable à la vie. L'importance du devenir, de la croissance,
se remarque jusque dans la forme que Nietzsche choisit pour délivrer ses
pensées. S'il choisit d'exposer sa pensée sous la forme
d'aphorismes c'est-à-dire de fragments, de paragraphes, c'est pour
s'écarter d'une pensée de la fixité que nous imposent les
systèmes. Avec l'aphorisme, l'auteur de Par-delà bien et
mal conserve la spontanéité de ses pensées, le
jaillissement. Certains aphorismes nous renvoient à d'autres, la
pensée est vivante ; il y a peu de mise en forme, nous sommes plus
près de l'expression immédiate. Nietzsche conteste non seulement
les valeurs dominantes dans la tradition philosophique mais également
les formes choisies pour les retranscrire, d'où l'importance qu'il donne
à la dimension philologique dans sa philosophie.
DEUXIEME PARTIE : LE
RELATIVISME MORAL DANS LA GENEALOGIE
INTRODUCTION PARTIELLE
Nous avons vu dans la partie précédente que
certains courants de pensée philosophiques ont tenté de fonder la
nécessité et la généralité des valeurs
morales qui organisent de nos jours l'Occident en leur attribuant une origine
soit transcendante, soit rationnelle ou encore immanente. C'est pourquoi ces
valeurs morales s'imposaient à tous. De sorte que, ni leur origine, ni
leur autorité encore moins leur valeur ne pouvaient être mises en
doute. Cependant, Nietzsche s'est inscrit en faut contre cette conception en
affirmant que ces philosophies camouflent la réalité et vont
à l'encontre de l'ordre naturel en procédant au nivellement de la
hiérarchie naturelle. Il montre ainsi par une étude
généalogique, entendons par là, une recherche des origines
qu'il est absurde de fonder la morale sur une base essentiellement
transcendante en conférant aux valeurs morales un caractère
obligatoire, universelle et nécessaire. Cette recherche amène
Nietzsche à penser que ces valeurs sont le produit de l'imagination,
qu'elles n'existent pas réellement et donc qu'elles ne sauraient avoir
de valeur en elles-mêmes. Bien plus, l'auteur voit dans cette
consécration des valeurs une idéologie des faibles et des
impuissants dont l'objectif est de renverser l'ordre normal des choses à
savoir l'ordre naturel en procédant à un nivellement de l'ordre
naturel qui impose désormais une égalité entre le fort et
le faible, entre le puissant et l'impuissant, entre le père et le
fils.
Voici donc l'objectif que visent selon Nietzsche, les
discours des généalogistes dont nous avons
présentés les pensées plus haut. De sorte qu'une
étude menée sur l'origine des valeurs morales en question
révèlerait leur véritable nature, leur provenance, leur
rôle et partant leur valeur pour la civilisation moderne. Nous
montrerons, à la suite de notre auteur que les évaluations
morales faites par la métaphysique (de l'Antiquité à nos
jours) sont essentiellement nihilistes, qu'elles n'ont pas une dimension
universelle, nécessaire, et obligatoire et qu'il s'impose tout à
la fois d'établir et d'affirmer de nouvelles valeurs qui soient
« par-delà bien et mal ».
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