I.1.6 La consommation et le
groupe social
La consommation est aussi un signe social, le signe
d'appartenance ou non à un groupe social. De ce point de vue, deux
phénomènes peuvent être représentés :
1. La différenciation entre les groupes sociaux
Le groupe social se distingue de la catégorie sociale,
il n'est pas une simple collection de personnes réunies par des
caractéristiques communes, il suppose en outre
l'existence de relations entre elles. Ces relations peuvent être directes
et personnelles dans un groupe primaire tel que la famille ou de nature
différente dans un groupe social étendu (il peut s'agir par
exemple de la participation à la même activité ou un groupe
de travail, de l'établissement d'un mode de communication interne
à un groupe ou encore de la simple adhésion à des normes
ou des valeurs communes). Quelle que soit la nature de la liaison entre les
membres du groupe, elle doit être assez forte pour que celui-ci constitue
une unité sociale intégrée (ainsi le groupe social
n'existe que si l'intégration et lasolidarité l'emportent sur
l'autonomie des membres). Pour cette raison, la consommation d'un individu
appartenant à un groupe social déterminé, se rapproche du
modèle de consommation de son groupe. Un exemple caractéristique
est donné par l'habillement dans divers groupes sociaux (groupes de
jeunes, groupes de cadres dynamiques...). Le plus souvent, le non-respect des
normesdu groupe, y compris dans le domaine de la consommation peut conduire un
individu à samarginalisation et à son exclusion du groupe.Dans
son ouvrage «Income,Saving and the Theory of Consumer Behavior»,
James Duesenberry (1949) avance l'idée que chaque population
constitue une sorte de sous-culture qui exerce des pressions spécifiques
sur ses membres afin de les pousser à consommer. Ce principe
d'émulation sociale s'exercerait de manière plus forte sur les
bas revenus qui peinent alors à épargner. Dans leur ouvrage
«The World of Goods, Towards an Anthropology of
Consumption», Douglas et Isherwood (1978) soulignent que la
consommation doit être envisagée comme le moyen dont les
consommateurs usent pour construire leurs catégories culturelles,
c'est-à-dire les significations et le sens qu'ils veulent donner
à leurs actes. Qu'il s'agisse de suggérer une appartenance
familiale, communautaire ou de classe, la consommation agit comme un marqueur
culturel pour chacun d'entre nous. Pierre Bourdieu (1979), dans
« La Distinction, critique sociale
dujugement », montre que les consommateurs développent
une identité de classe qui se forge un habitus, ce qui frappe d'inertie
une importante partie de leurs capacités de choix entre plusieurs modes
de consommation.
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