La persistance des sciences sociales coloniales en Afrique( Télécharger le fichier original )par Jean Barnabé MILALA LUNGALA Université de Kinshasa RDC - Doctorat 2009 |
Les difficultés d'analyse de John SearleA. Flottement des concepts centrauxEn épistémologie des sciences sociales et dans les disciplines qui se préoccupent sérieusement de savoir ce qu'est la réalité sociale, le phénomène social, le fait social, les objets sociaux, et autres concepts semblables, il n'existe pas d'unanimité, mais plutôt des points de focalisation différents. Nous retrouvons dans la théorisation de John Searle plusieurs focalisations : - Les faits institutionnels tels que les normes (ce qui est prescrit, permis, recommandé, etc.), l'argent, la propriété, et autres phénomènes collectifs du genre ou la valeur qui leur sont liée (impartialité, fidélité, honneur, etc.). - Les faits structurels (le pouvoir et sa distribution, le pouvoir et son prestige, le statut économique ou légal, etc.). - Les fonctions d'activités sociales et les impératifs fonctionnels des groupes ou des sociétés (c'est-à-dire ce qui est nécessaire au maintien ou à la survie des groupes ou des sociétés). - Les actions individuelles et collectives en tant qu'elles sont orientées significativement vers autrui. - Le rôle des croyances collectives et individuelles. - Les phénomènes collectifs en tant qu'ils sont les effets voulus ou non voulus d'actions intentionnelles individuelles. John Searle laisse de côté d'autres phénomènes tels que les données agrégés, par exemple, le taux de chômage, de suicide, les changements de structure familiale ou de pratiques religieuses, la socialisation, etc., utiles dans la compréhension et la résolution des problèmes sociaux. A propos, la reconstruction de John Searle au sujet de la définition des concepts de la réalité sociale, de phénomène social, de fait social, des objets sociaux, et autres concepts ,est de nature globalement conceptuelle ou synchronique : « la philosophie des sciences « analytique »issue de la philosophie du langage est, dans ses tendances dominantes, conceptuelle plutôt qu'historique ».889(*) Pris positivement : 1/ Ces travaux « se livrent par la discussion rationnelle et la synthèse(...), à un effort d'intégration souvent décisif, rendant possible une vision simultanément globale et analytique de la réalité sociale. Ils sélectionnent et articulent les niveaux pertinents et construisent un indispensable « tableau d'ensemble », 2/ ils proposent (...) des révisions conceptuelles, des ajustements théoriques, des formes d'articulations des programmes participant de l'indispensable travail d'autoréflexion des disciplines sur elles-mêmes »,890(*) 3/ ils permettent ainsi aux chercheurs, suivant leur sensibilité, de substituer à leur vulgate de référence une base raisonnée et épurée de travail, susceptible de susciter de nouvelles interrogations, d'ouvrir de nouveaux champs d'investigation ou de renouveler la lecture de phénomènes connus. Pris négativement, à la suite de Jean-Michel Berthelot, nous pouvons dire qu'il y a « deux limites fondamentales qui, sans invalider ni dans leur fond ni dans leur visée, marquent au fer rouge la spécificité - de fait, sinon de droit- de l'espace de connaissance où ils s'élaborent. Ces théories, systématiquement bâties sur un modèle conceptuel et non propositionnel, laissent dans l'indétermination les modalités de leur mise en oeuvre. (...) ».891(*) * 889Ibidem, p.522. * 890 Jean-Michel BERTHELOT, « Programmes, paradigmes, disciplines », p.55. * 891Ibidem, p.514. |
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