La primauté du droit communautaire de l'UEMOA ( Union Economique et Monétaire Ouest Africaine ) sur le droit des états membres( Télécharger le fichier original )par Ahmed Rémi OUOBA Université Saint Thomas d'Aquin de Ouagadougou Burkina Faso - Mémoire de maitrise en droit public 2012 |
CONCLUSIONLa création d'organisations internationales supranationales modifie l'équilibre des pouvoirs internes et limite par la même occasion leur souveraineté normative153(*). Dans le but de garantir un fonctionnement dynamique des règles de l'Union, le droit communautaire impose aux Etats membres d'assurer une application uniforme et correcte au sein du système interne les-dites règles. La conséquence juridique de cette règle de la primauté est que, en cas de conflit, la disposition nationale contraire à la disposition de l'Union cesse d'être applicable et qu'aucune autre disposition nationale ne peut être introduite si elle n'est pas conforme au droit de l'Union. C'est en ce sens que tout juge national en présence d'un conflit opposant une norme interne à une norme communautaire pourvue de l'effet direct, doit assurer le plein effet de la norme communautaire, « en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu'il ait à demander ou à attendre l'élimination préalable de celle-ci par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel 154(*)». Cette fonction de juge communautaire de droit commun assumé par le juge national et encadré par la CJUEMOA dans leur relation de coopération (marqué notamment par le renvoi préjudiciel) a pour finalité d'établir la cohésion et la cohérence du système juridictionnel de l'UEMOA. Cependant force est de noter que les obstacles politiques155(*), notamment le souci de préserver les relations de bon voisinage, le fait que l'intégration est encore une affaire des gouvernants et des technocrates et non celle des populations font que jusqu'à ce jour, la CJUEMOA n'a jamais été saisie par la Commission, par un Etat partie ou par le Conseil des Ministres, d'un recours en manquement ou d'un recours en exception d'illégalité d'un acte communautaire156(*). Alors que de telles saisines auraient pu permettre à la CJUEMOA d'apporter des précisions importantes sur le droit de l'UEMOA157(*) . Or le véritable point de départ de tout processus régional d'intégration et de coopération est la volonté politique, dont l'essence peut être décrite comme la recherche d'une solution vers la coopération et l'intégration en dépit des obstacles158(*). Même si l'on peut se poser la question de l'efficience du principe de primauté, il reste qu'il s'agit d'une règle qui permet de résoudre un conflit entre les normes internes et la norme communautaire, dans le sens où cette dernière l'emporte sur les premières. Souhaitons que le futur parlement qui sera chargé du contrôle démocratique des organes de l'Union et qui participera au processus décisionnel de l'Union permettra aux ressortissants des Etats membres (personnes physiques ou personnes morales) d'être parties intégrantes au fonctionnement de l'Union en défendant dans ces enceintes leurs intérêts individuels ou corporatistes. * 153 N. Q. DINH, op. cit., p. 282. * 154CJCE, arrêt Simmenthal, op. cit. * 155 Une parfaite illustration ne serait elle pas la difficulté rencontrée par les chefs d'Etat sur la nomination du nouveau président de la commission en remplacement du malien Soumaila CISSE? Les textes prévoient une présidence tournante. Récemment nommé, le président de la commission Cheik Hadjibou SOUMARE est sénégalais, et doit exercer un mandat unique de quatre ans et le deuxième mandat sera assuré par le Niger qui soutenait (à juste raison) que le Sénégal a déjà assuré la présidence par l'entremise de Moussa TOURE et ne pouvait se prévaloir de ce poste. * 156 A. SALL, op. cit., p.20. * 157 La CJUEMOA a pour tâche de favoriser une uniformité jurisprudentielle dans l'interprétation et dans l'application du droit communautaire, Cf. L. M. IBRIGA, « Problématique institutionnelle de l'intégration économique régionale : Essai de définition d'un cadre juridique efficient », in Revue Burkinabè de Droit (RBD), N°24, 2ème semestre Décembre 1993, p. 216. Toujours dans la même logique « lorsque les difficultés sont sérieuses, les Etats préfèrent aller vers la rupture du marché commun plutôt que de faire confiance à la cour de justice pour trouver une solution, ce qui n'encourage pas beaucoup le fonctionnement et la promotion des mécanismes juridiques d'intégration », A. MAHIOU, in « le cadre juridique de la coopération Sud-Sud. Quelques expériences ou tentatives d'intégration », RCADI, 1993, p.81. * 158 Voir « le courrier Afrique-Caraïbes-Pacifique-Union Européenne », n°142, G. LAPORTE, l'intégration : de la théorie à la pratique, Novembre Décembre 1993, p. 66, « l'intégration économique ne se conçoit pas, à la longue, sans un minimum d'intégration politique ».R. POIDEVIN : Histoire des débuts de la construction européenne, Bruylant ; Bruxelles, 1986, p. 30. Il faut aussi comprendre que par volonté politique, il s'agit de l'instauration de véritable Etat de droit et de démocratisation. |
|