II. Moyens de subsistance des enfants de la rue et leur
exploitation à des fins économiques comme nouvelle forme
d'esclavagisme.
Les enfants de la rue développent des
stratégies de survie pour subvenir eux-mêmes à leurs
besoins alimentaires et vestimentaires. Ainsi, certains d'entre eux s'adonnent
à des activités génératrices des revenus telles que
les travaux de manutention, l'entretien et la garde des véhicules. Ces
derniers se placent dans les places publiques où ils attendent les
éventuelles « offres » de la part soit de ceux qui
viennent des marchés ou de ceux qui veulent charger ou décharger
les biens de consommation. D'autres exercent dans le cirage des souliers, etc.
Dans tous les cas, l'argent reçu juste après le service rendu
à des tiers n'est pas hélas proportionnel à ce service car
de temps en temps, l'activité exercée nécessite la
mobilisation de l'énergie physique et du temps suffisant comme le prouve
le tableau illustratif ci-après :
N°
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Nombre d'enquêtés
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Activités exercées
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Lieu d'exercice du travail
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Durée de travail
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Rémunération
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Risques en courus
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1
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12
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Manutention, chargement et déchargement des
véhicules
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Tous les arrêts-bus, les carrefours et grands
marchés de la ville
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Tous les jours de 7h30 jusque vers la tombée de la
nuit
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-200FC à 500FC pour les colis légers et à
des distances moins longues,
-700FC à 1000FC pour les colis lourds et à des
distances longues
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-Altération et affectation des la santé de
l'enfant et du rythme normal de développement physique.
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2
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3
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Cirage des souliers
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A Nyawera et à la place feu- rouge
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De 08h jusque vers 16h30
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200FC par paire de souliers
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Malaises dorsales et musculaires
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3
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11
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Entretien (lavage) des véhicules
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A Nguba au rond point, à Funu, au beach Muhanzi et
autres points d'eau aménagés
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De 6h30 jusque vers 18h
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1500FC à 3000FC par véhicule
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Idem.
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4
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4
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Coulage des dalles
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Partout dans la ville de Bukavu dans les chantiers de
construction
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De 7h jusqu'à la fin de l'opération.
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2,5 à 3 dollars
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-Maladies vasculaires et hémorragiques
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5
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8
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Evacuation des déchets et autres ordures
ménagères vers les poubelles publiques
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Dans les familles partout dans la ville de Bukavu,
principalement au centre ville.
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De 10h jusque vers 18h
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1000FC
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-Maladies de mains sales comme le paludisme, le
choléra, etc.
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Source : Nos enquêtes.
De ce tableau, il ressort donc que les
enfants de la rue sont surexploités par ceux qui les emploient au regard
des travaux exercés. Par exemple pour la première
catégorie des enfants enquêtés, c'est-à-dire celle
qui concerne les enfants exerçant dans la manutention, la nature des
colis à transporter sur la tête ou sur le dos laisserait croire
que la rémunération réellement reçue ne devrait pas
être ainsi quand on s'en tient seulement à la grandeur de la
tâche, aux conséquences et autres dangers encourus. Cette
situation est la même pour les autres catégories où
l'énergie déployée- physique surtout- n'est pas
compensée au prorata.
C'est justement cette situation
d'exploitation de l'homme par l'homme qui traduit en fait la dimension de
l'esclavagisme contre les enfants de la rue. De plus, l'on note que beaucoup
d'organisations se disant oeuvrer en faveur des enfants de la rue n'affectent
pas le gros de ressources allouées pour la cause de ces enfants ;
ressources devenues alors des moyens sûrs d'enrichissement des
responsables de ces organisations. Ceci a fait que les problèmes des
enfants de la rue sont devenus un fond de commerce de plusieurs personnes
à Bukavu ; d'où, prolifération à Bukavu des
organisations de protection des enfants vulnérables.
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