Conclusion
On retrouve les thèmes principaux évoqués
par l'étude de 1994 de DeLorme, Reid et Zimmer, et leur présence
ici confirme l'influence certaine qu'a la pratique sur l'audience.
En revanche, les quatre nouveaux thèmes relatifs
à la consommation et au sentiment de sécurité agrandissent
le spectre de l'effet des placements de marques, car ils suggèrent que
l'interprétation de la pratique par l'audience va au-delà des
simples expériences liées au film en lui-même, et
s'étend aux situations de consommation.
Comme pour l'étude de 1994, les personnes
interrogées participent activement dans l'expérience de
visionnage d'un film. La question ici n'est plus de savoir ce que font les
placements sur le spectateur mais ce qu'ils font avec le
spectateur, ce dernier devenant seul juge de l'influence de ces pratiques (et
non plus l'annonceur ou le réalisateur). Aux yeux des chercheurs, le
consommateur est donc passé du statut de simple récepteur passif
à celui d'interprète actif des marques ou produits
rencontrés. Même si elles ne sont pas étudiées ici,
on peut supposer que cette remarque ne s'applique pas aux cibles jeunes ou en
bas âge.
Implications
Premièrement, les acteurs devraient prendre en compte
le potentiel à long terme des effets du placement de produits sur la
mémoire et l'attitude du spectateur. En outre, lorsqu'on se penche sur
la dimension stratégique d'une campagne de communication, sachant que
l'attitude face à une marque se développe et évolue dans
le temps, il faut admettre le rôle déterminant d'une telle
pratique dans la construction d'une image de marque. Le placement de marques
semble donc être un élément décisif dans un plan de
marketing intégré.
Il est également intéressant de constater que la
cible adolescente présente une attitude favorable à la
pratique ; sélectionner les types de film où placer ses
produits serait donc une méthode appropriée pour les
annonceurs.
Limites et recommandations pour les futures
recherches
Les résultats obtenus dans cette étude ne
tiennent pas compte des potentielles différences culturelles, et donc
différences d'acceptation de la pratique, pour une audience d'un pays
autre qu'américain. Il pourrait donc être intéressant
d'étendre l'étude à d'autres nationalités.
Les modes de consommation de l'audiovisuel étant en
profonde mutation, il serait également judicieux de développer la
recherche en s'attachant à comparer les effets du placement de marques
en fonction du mode de visionnage utilisé (cinéma,
télévision simple, home cinéma).
Enfin, récolter des données en provenance
d'acteurs de la pratique (responsables marketing, réalisateurs ou
agences de placement de produits) permettrait d'élargir les
connaissances sur la pratique, et de trouver de nouvelles problématiques
à étudier.
A cross-cultural Comparison of Consumers'
Perceptions and Evaluations of Brand Placement in Motion Pictures
DeLorme, Denise E. ; Mennicken, Claudia & Aleff,
Hans-Joerg (2000), «A cross-cultural Comparison of Consumers' Perceptions
and Evaluations of Brand Placement in Motion Pictures», American
Marketing Association. Conference Proceedings, 2000 (winter), 11; p.
27-34.
Cette étude cherche à analyser les opinions de
jeunes étudiants face à la pratique de placement de produits,
dans un contexte international. Les interviewés sont de deux
nationalités différentes, allemands et américains. Par le
biais de questionnaires, les auteurs récupèrent les informations
concernant les attitudes vis-à-vis de la pratique et comparent les
écarts d'opinions entre les pays, afin de pouvoir émettre des
recommandations pour les stratégies de communication des annonceurs,
dans le cadre de placements dans des films de portée internationale.
Hypothèses de l'étude
On vient de le dire, les auteurs se basent sur les
modèles d'attitude face à la marque. Ils partent donc du postulat
selon lequel les attitudes et perceptions vis-à-vis de la pratique de
placement de marques auront un impact sur l'attitude générale
face aux marques placées, et par conséquent sur les
éventuelles intentions d'achat des spectateurs.
La seconde hypothèse affirme qu'il y aura des
différences culturelles entre les consommateurs américains et les
consommateurs allemands dans leurs perceptions et évaluations du
placement de marques.
Prenant en compte le fait que les croyances et opinions du
consommateur face au placement de produits sont formées à partir
de son expérience directe lorsqu'il regarde le film, la troisième
hypothèse est de considérer que la pratique de placement aura un
impact sur son support, le film en lui-même.
Méthode
L'échantillon choisi est composé de 480
étudiants en gestion et communication en Allemagne et aux Etats-Unis,
avec respectivement 193 participants pour les Etats-Unis et 287 pour
l'Allemagne. L'âge des participants a été choisi
judicieusement. En effet, la tranche d'âge des 18 à 35 ans
représente 39% des personnes fréquentant les salles de
cinéma aux Etats-Unis, et 62% en Allemagne. L'échantillon est
donc potentiellement très représentatif pour le sujet de
l'étude. Pour faciliter la comparaison entre les deux pays, les deux
groupes présentent des caractéristiques similaires en termes de
sexe, d'âge, de niveau d'éducation et de salaire mensuel.
Construction et développement de
l'instrument
L'étude est constituée d'un questionnaire. Pour
que les participants aient une idée claire du phénomène
étudié, le document présente une définition du
placement de marques en introduction.
Le questionnaire est constitué de questions
fermées, réparties en 3 parties principales :
1. Conscience de la pratique à travers les
expériences personnelles directes (dans un film) et indirectes (par les
médias ou par un tiers)
2. Perception et évaluation de la pratique à
travers 5 thèmes de questions :
- opinions générales à propos du
placement de produits
- sentiments face à la pratique
- convictions quand au rôle contributif du placement de
produits dans les objectifs marketing
- opinions quand aux problèmes éthiques
potentiellement engendrés par la pratique
- convictions quand au rôle du placement de produit,
facteur d'implication de l'audience dans le film.
3. Informations démographiques (âge, sexe,
occupation, préférences et habitudes de fréquentation de
cinémas, etc)
Résultats
Comportement de consommation
Vis-à-vis du public allemand, les consommateurs
américains vont plus souvent voir des films, et plus tôt
après leur sortie en salle : 74% des américains s'y rendent dans
les 2 semaines suivant sa sortie, contre 43% des allemands.
Si le pays d'origine ne semble pas déterminant dans le
choix du film, les allemands voient sensiblement moins de films
américains (90% des films vus aux Etats-Unis dans l'année sont
d'origine américaine, contre seulement 68% en Allemagne).
Opinions face à la pratique du placement de
produits
L'opinion globale est assez positive, mais les
américains acceptent d'avantage la pratique, qu'ils considèrent
comme peu différente de la publicité traditionnelle.
En outre, les deux nationalités mettent en avant
l'avantage de cette pratique si elle permet de limiter voire de stopper
l'augmentation des prix des tickets de cinéma.
Convictions quand à la contribution du
placement de produits dans la réalisation des objectifs
marketing
Les consommateurs des deux pays considèrent que la
pratique contribue d'une manière favorable à la réussite
d'une campagne globale de marketing. Cependant, les interviewés
américains voient un impact sur la notoriété de la marque
et sur l'attitude et les comportements d'achats plus important que les
interviewés allemands.
Opinions face aux problèmes
éthiques
Les consommateurs des deux pays ont une position
marquée face aux placements de produits
« sensibles », de type alcool ou tabac. Ils
considèrent également que les cibles jeunes (enfants et
adolescents) sont plus facilement influençables par la pratique.
Il a été vu précédemment que les
allemands étaient sensiblement moins favorables à la pratique du
placement de marques que les américains. Ils sont donc logiquement plus
prononcés sur la question éthique.
Les deux nationalités pensent que le placement de
produits doit être légalement supervisé par l'industrie
cinématographique, plus que par les autorités
gouvernementales.
Influence des placements sur l'attitude d'achat
des spectateurs
Les spectateurs pensent que le placement de réels
produits dans les films renforce le réalisme, l'intrigue et la
compréhension des personnages. La pratique participerait donc au
réalisme de l'histoire, mais les interviewés ne pensent pas pour
autant que cela les pousse à imiter les personnages principaux en
achetant les produits visibles à l'écran. Ces informations sont
d'autant plus vraies pour les participants allemands qui d'une manière
générale sont plus sceptiques.
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